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Mécanique & Industries 9, 519–531 (2008) www.mecanique-industries.

org

c AFM, EDP Sciences 2009 Mécanique
DOI: 10.1051/meca/2009016 & Industries

Automobile et environnement : contribution de la recherche


aérodynamique à la réduction des gaz à effet de serre
Patrick Gilliéron1,2 et Azeddine Kourta1,2,a
1
Renault, Direction de Recherche (DREAM), 1 avenue du Golf, 78288 Guyancourt Cedex, France
2
ESA/Institut PRISME, Polytech’Orléans 8, rue Léonard de Vinci, 45072 Orléans Cedex, France
Reçu le 30 avril 2008, accepté le 20 décembre 2008
Résumé – Cet article traite du contrôle des décollements aérodynamiques pour réduire la consommation et
les émissions de gaz à effet de serre des futurs véhicules automobiles. Après avoir passé en revue les moyens
de contrôle passif, des exemples de contrôle actif par aspiration, soufflage ou par jet synthétique sont suc-
cessivement présentés. Les résultats montrent le fort potentiel des solutions présentées. Des réductions de
traı̂née proches de 20 % sont ainsi déjà envisagées sans que soit nécessaire de contraindre les géométries ac-
tuelles en termes d’habitabilité et de confort. Les coefficients de traı̂née aérodynamique des futurs véhicules
automobiles destinés aux liaisons extra urbaines pourraient alors très prochainement tendre vers des va-
leurs voisines de 0,24. Cette évolution permettrait alors de réduire de 1,6 l sur 100 km la consommation
moyenne d’un véhicule de moyenne gamme se déplaçant sur autoroute à la vitesse de 130 km.h−1 . La
réduction des émissions de gaz carbonique serait au moins de l’ordre de 7 g.km−1 suivant le cycle NEDC
(New European Driving Cycle).
Mots clés : Traı̂née / contrôle / gaz effet de serre / automobile

Abstract – Automotive and environment: aerodynamic research contribution to the green-


house gas reduction. This paper deals with the aerodynamic separation control to reduce consumption
and the greenhouse gas emission for the future road vehicles. After reviewing the passive control methods,
examples of active flow control by using suction, blowing and synthetic jets are successively presented.
Drag reductions of about 20% are hence already possible without any negative geometrical modification in
term of habitability and comfort. Drag reduction coefficients of the future road vehicles doing outside city
connections could soon tend to a value near 0.24. The result must allow to reduce the fuel consumption
of a vehicle of the range M1 (vehicle of the lower average range) of approximately 1.6 liters by 100 km at
the speed of 130 km.h−1 . The CO2 emission reduction will be at least about 7 gr.km−1 following NEDC
(New European Driving Cycle).
Key words: Drag / control / greenhouse gases / automotive

1 Introduction chinois pourrait ainsi compter dans 20 ans près de 270 mil-
lions de véhicules, soit trente fois plus qu’en 2002. L’Eu-
Le parc automobile mondial comptait en 2002 près rope de l’Est et l’Afrique suivent le même processus dans
de 590 millions d’unités dont 182 en Europe de l’Ouest, des proportions plus ou moins équivalentes et à plus ou
140 aux États-Unis, 55 au Japon, 29 en France, 9 en moins long terme. Dans ce contexte, les émissions de
Chine et 6 en Inde [1]. Dans ce contexte, les émissions an- gaz à effet de serre auront augmenté de près de 57 %
nuelles de CO2 dépassent déjà les 22 milliards de tonnes en 2030 avec des répercussions fortes sur l’environne-
alors que les besoins en transports des pays émergents ment et le climat [2]. Des solutions sont alors recherchées
augmentent. À titre d’exemple, la demande en énergie dans différents domaines de la physique, par et pour l’in-
fossile de la Chine et de l’Inde transforme aujourd’hui dustrie des transports, afin de réduire de manière signi-
le système énergétique mondial qui devient incompatible ficative les émissions de dioxyde de carbone. Dans ce
avec les ressources disponibles et la nécessité de réduire contexte et quelle que soit la source d’énergie utilisée
les émissions de gaz à effet de serre. Le parc automobile (combustible fossile, électrique, hydrogène. . . ), le contrôle
des écoulements aérodynamiques pour les déplacements
a automobiles interurbains constitue une nécessité pour op-
Auteur pour correspondance :
[email protected] timiser l’énergie embarquée. La communauté scientifique

Article publié par EDP Sciences


520 P. Gilliéron et A. Kourta : Mécanique & Industries 9, 519–531 (2008)

Nomenclature
d Distance entre deux positions d’aspiration (m)
e Largeur de la fente de soufflage, d’aspiration ou de jet synthétique (m)
l Longueur de la lunette arrière (m)
Cp Coefficient de pression statique
Cpi Coefficient de perte de pression d’arrêt
ω Vorticité (s−1 )
Cµ Coefficient de quantité de mouvement
Fk Fréquence caractéristique (Hz)
Fj Fréquence du jet synthétique (Hz)
F+ Fréquence réduite = Fj Fk−1
V0 Vitesse de l’écoulement infini amont (m.s−1 )
Vasp Vitesse d’aspiration (m.s−1 )
Vs Vitesse soufflage (m.s−1 )
Cx Coefficient de traı̂née aérodynamique
ΔCx Variation du coefficient de traı̂née aérodynamique en %
λ2 Critère d’analyse pour la dynamique des tourbillons cohérents

Cycle NEDC pour New European Driving Cycle, cycle d’homologation de tout véhicule léger en Europe. Démonstrateurs
EVE et VERA : premiers prototypes automobiles aérodynamiques développés par Renault et Peugeot au début des années 80
en réponse au défi proposé par le Ministère de l’Industrie qui souhaitait que soit développée une voiture capable de consommer
moins de 3 l aux 100 km. Le projet EVE a abouti au prototype Vesta II qui le 23 juin 1987 a réalisé un record mondial de
consommation sur autoroute entre Bordeaux et Paris. Valeur de Swirl : rapport entre les vitesses azimutale (à la périphérie
d’un tourbillon longitudinal) et axiale (dans la direction de l’axe du tourbillon).
MEMS : pour Micro Electro Mechanical Systems.

et technique travaille et s’organise alors pour réduire de améliorer la compréhension des portraits de phases re-
30 % la traı̂née aérodynamique des véhicules et diminuer levés lors des visualisations pariétales [7], orienter l’action
ainsi de 12 (cycle NEDC pour New European Driving des ingénieurs et identifier des voies de progrès destinées
Cycle) à 24 g (profil client) par kilomètre les émissions de à réduire la contribution des décollements dans la traı̂née
dioxyde de carbone. Cet article propose une présentation aérodynamique globale. L’ensemble des progrès accomplis
des principales voies de progrès pour l’aérodynamique au- permet aujourd’hui de mieux comprendre les origines de
tomobile basée sur le maintien des critères actuels d’ha- la traı̂née aérodynamique, d’optimiser les performances
bitabilité, de confort et de sécurité. aérodynamiques et de mieux intégrer les contraintes De-
sign aux impératifs de réduction de traı̂née. Ces progrès
ne permettent hélas pas de réduire de manière significa-
tive la traı̂née aérodynamique des véhicules automobiles
2 La problématique et les coefficients de traı̂née aérodynamique Cx , aujour-
d’hui de l’ordre de 0,30, n’évoluent plus depuis 20 ans.
L’objectif de réduction de traı̂née est nécessaire et Particulièrement sensible aux problèmes environne-
ambitieux. Des travaux de recherche sont alors conduits mentaux et à l’épuisement des ressources fossiles, la com-
depuis plus de 30 ans pour améliorer la connaissance munauté européenne fixe aujourd’hui un objectif clair
et contrôler les mécanismes physiques à l’origine de et ambitieux aux constructeurs automobiles en termes
la traı̂née aérodynamique. Les réductions de traı̂née d’émission de gaz à effet de serre. Les rejets de gaz car-
aérodynamique associées au rétrécissement des sections bonique ne devront ainsi pas dépasser 120 g.km−1 à l’ho-
d’entrée d’air, à l’accroissement des pertes de charge des rizon 2012 et sans doute 90 g vers 2018. Des solutions en
échangeurs, à l’extension verticale de la partie basse du rupture doivent alors être imaginées pour réduire d’au
bouclier avant ou encore à la présence d’un déflecteur moins 20 % la traı̂née aérodynamique d’ici l’échéance
de soubassement positionné en amont du train arrière 2012, c’est-à-dire d’ici quatre ans. Pour l’utilisateur fi-
sont ainsi mieux comprises et utilisées avec plus d’effi- nal et 100 km parcourus à 130 km.h−1 , l’objectif consiste
cacité [3]. Des bilans intégraux de quantité de mouve- à réduire la consommation de carburant d’un véhicule de
ment permettent d’identifier des voies de progrès pour la gamme M1 (véhicule de la gamme moyenne inférieure)
réduire la contribution du compartiment moteur dans d’environ 1,6 l. Sur le parcours mixte normalisé dit NEDC
la traı̂née aérodynamique et améliorer l’efficacité des (pour New European Driving Cycle), la réduction des
échangeurs [4–6]. Les écoulements en proches parois émissions de CO2 serait de l’ordre de 0,7 kg pour 100 km
sont modélisés à partir de modèles mathématiques pour parcourus soit 7 g.km−1 .
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Fig. 2. Représentation topologique schématique de la struc-


Fig. 1. Géométrie du corps de Ahmed, échelle 1. Notations : ture décollée de la partie gauche de la lunette arrière, vu de
A, fin de pavillon ; α angle de lunette arrière/horizontale [8]. l’arrière, d’après [10].

3 Les solutions de rupture la région décollée de fin de pavillon, évolue vers le


bas de la lunette arrière, le plan de symétrie y = 0
Un véhicule automobile est un corps de faible allonge- puis remonte vers le haut en spiralant vers l’origine du
ment qui se déplace à proximité du sol dans un écoulement cornet B, figure 2. Au culot, l’écoulement décolle à la
naturellement turbulent. L’écoulement décolle au niveau périphérie de la géométrie et donne naissance à une
des entrées d’air, au niveau du soubassement, autour de structure tourbillonnaire en forme de tore qui interagit
la roue, dans les passages de roues, au niveau du pied avec l’écoulement décollé de lunette arrière. Les résultats
de pare-brise, des montants latéraux avant et enfin au expérimentaux montrent que la topologie de l’écoulement
niveau de la lunette arrière et du culot. La contribu- reste identique et que la traı̂née aérodynamique augmente
tion des contraintes de frottement reste faible, de l’ordre continûment avec l’accroissement de l’angle d’inclinaison
de 10 %, et la traı̂née aérodynamique résulte princi- de la lunette arrière entre 12 et 30◦ .
palement de la distribution des contraintes de pression
réparties sur la lunette arrière et le culot. Ces contraintes
sont classiquement à l’origine de 90 % de la traı̂née 3.1 Résultats en contrôle passif
aérodynamique globale et sont à 80 % concentrées sur
les parties arrière. Les interactions entre les différentes Le contrôle passif des écoulements et des décollements
régions du véhicule sont nombreuses, complexes et la s’effectue à partir de solutions qui ne nécessitent aucune
recherche de solutions efficaces de contrôle nécessite de puissance à prendre sur le générateur principal d’énergie
travailler sur des géométries simplifiées capables de re- du véhicule. Ce contrôle s’effectue ainsi de manière clas-
produire l’essentiel des décollements et phénomènes phy- sique à partir des connaissances mises en évidence et capi-
siques rencontrés sur un véhicule réel. La géométrie pro- talisées entre 1976, date de première mise en service de la
posée par Ahmed en 1984 a donc été retenue depuis plus soufflerie S4 (IAT Saint Cyr) pour automobile, et 1985.
de 10 ans par l’ensemble de la communauté scientifique Durant cette période, les coefficients moyens de traı̂née
pour analyser les phénomènes, rechercher et mettre au aérodynamique des véhicules automobiles ont été réduits
point de nouvelles solutions de contrôle destinées à réduire d’un tiers, (de 0,45 à 0,30) et des réductions plus impor-
la traı̂née aérodynamique [8]. Cette géométrie simplifiée tantes obtenues sur les démonstrateurs EVE (Renault) et
de type bicorps (pas de coffre arrière) permet de repro- VERA (Peugeot), voir nomenclature. Les solutions iden-
duire l’essentiel des décollements qui apparaissent sur une tifiées sont toujours utilisées mais restent très contraintes
géométrie réelle de véhicule automobile, voir figure 1. par les exigences du marché en termes de confort, d’habi-
Sur cette géométrie, l’écoulement décolle en fin de pa- tabilité et de sécurité. Les meilleurs coefficients de traı̂née
villon pour donner naissance à une nappe décollée ou- aérodynamique demeurent ainsi proches de 0,30 depuis
verte qui recolle en moyenne vers le bas de la lunette plus de 20 ans. Pour améliorer ce résultat, des solutions
arrière. L’écoulement décollé sous la nappe est le siège de nouvelles basées sur des géométries en rupture et une
deux mouvements contrarotatifs qui convergent vers deux meilleure connaissance des processus de formation et de
foyers de séparation, origine du cornet B sur la figure 1 développement de la traı̂née aérodynamique doivent être
et son symétrique par rapport au plan y = 0 [9, 10]. recherchées.
L’écoulement issu de ces deux foyers interagit et alimente Des dispositifs de contrôle ont alors été développés
ensuite l’écoulement de culot. Une partie de l’écoulement ces dernières années pour élargir l’offre des solutions
issu des parties latérales de la géométrie décolle au niveau aérodynamiques proposées aux ingénieurs et designers
des arêtes latérales de lunette arrière et donne naissance à automobiles. Des réductions de traı̂née significatives ont
deux structures tourbillonnaires longitudinales contraro- ainsi été obtenues à partir d’éléments transversaux po-
tatives. L’autre partie alimente l’écoulement situé sous sitionnés en aval et en amont d’une géométrie de forme
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Fig. 6. Positions des fentes d’aspiration en fin de pavillon, sur


le haut et en fin de la lunette arrière du corps de Ahmed. La
Fig. 3. Élément séparateur transversal sur la géométrie sim- largeur des fentes est identique quelle que soit la configuration
plifiée désignée corps de Ahmed [11]. et la distance d est égale à 10−2 m [16].

nécessite une puissance à prendre généralement sur le


générateur principal d’énergie du véhicule. La partie
visible de ces systèmes est constituée d’orifices circu-
laires ou de fentes distribuées sur la surface du véhicule
au voisinage de l’écoulement à contrôler. Leur fonc-
tionnement s’effectue à partir de systèmes mécaniques,
électromagnétiques ou électriques logés dans les parties
creuses de la structure du véhicule. Leurs masses et leurs
encombrements doivent être les plus faibles possibles pour
réduire leurs impacts sur la consommation et les volumes
utiles ou habitables.
Fig. 4. Générateurs de séparation sur concept car Airlounge Plusieurs solutions de contrôle ont été identifiées,
PSA (avec l’aimable autorisation de PSA). testées et analysées par différents auteurs pour le contrôle
des écoulements et des décollements en aéronautique, hy-
drodynamique et aérodynamique des véhicules terrestres.
Les solutions retenues consistent généralement en des
systèmes qui permettent de souffler ou aspirer de manière
continue ou alternée au travers d’orifices circulaires ou
rectangulaires.

3.2.1 Solutions par aspiration continue

Le contrôle des décollements et de la traı̂née


aérodynamique des véhicules terrestres peut s’effectuer à
partir d’aspiration continue au travers de fentes trans-
Fig. 5. Générateurs de vortex sur véhicule Logan
versales disposées en amont ou en aval de la ligne de
Dacia/Renault [12].
décollement. Les expérimentations numériques effectuées
sur un corps de Ahmed muni d’une lunette arrière inclinée
anguleuse [11] ainsi qu’à partir de générateurs de vortex à 25◦ à partir d’une fente disposée en envergure et de
mécaniques [12], figures 3–5. Des travaux sont également largeur e permettent de mettre en évidence les résultats
engagés pour tester la capacité des milieux poreux suivants [14].
à réduire la traı̂née aérodynamique et des réductions
proches de 45 % ont été obtenues sur une géométrie sim- (i) Position de la fente par rapport à la position
plifiée bidimensionnelle à culot droit [13]. Ces solutions du décollement : pour des expérimentations ef-
offrent des alternatives intéressantes d’un point de vue fectuées en 2D, les réductions maximales de traı̂née
aérodynamique qui restent industriellement inexploitées aérodynamique s’obtiennent pour des fentes posi-
à ce jour. tionnées au voisinage immédiat et de part et d’autre
de la ligne de décollement. Les réductions de traı̂née
sont quantitativement identiques mais moins sen-
3.2 Résultats en contrôle actif sibles à la position longitudinale lorsque la fente est
positionnée en aval du décollement, figures 6 et 7.
Le contrôle actif des écoulements et des décollements (ii) Influence de la vitesse d’aspiration : l’efficacité du
s’effectue à l’aide d’actionneurs dont le fonctionnement contrôle sur la réduction de la traı̂née aérodynamique
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20 50

V0
Evolution de la traînée aérodynamique (%)

Evolution de la traînée aérodynamique (%)


10 35

Vasp
0 20
θ

-10 5

-20 -10

-30 -25

-40 -40
0 2 4 6 8 10 0 30 60 90 120 150
Position θ (degrés)

Fig. 7. Influence de la position de la fente sur la réduction du Fig. 9. Influence de l’orientation de la vitesse d’aspiration
coefficient aérodynamique Cx , résultats numériques 2D corps sur la réduction du coefficient de traı̂née aérodynamique Cx ,
de Ahmed [16]. résultats numériques 2D corps de Ahmed [16].

-20
4
V0 V0
e
Evolution de la traînée aérodynamique (%)
Evolution de la traînée aérodynamique(%)

-4 -23
Vasp
Vasp

-12
-26

-20

-29

-28
3%

-32
-36
0,5 0,75 1 1,25 1,5
0 0,4 0,6 0,8 1,2 1,6
e (10-3 m )
η= Vasp /V0
Fig. 10. Influence de la largeur de la fente d’aspiration
Fig. 8. Influence de la vitesse d’aspiration sur la réduction du sur la réduction du coefficient de traı̂née aérodynamique Cx ,
coefficient de traı̂née aérodynamique Cx , résultats numériques résultats numériques 2D corps de Ahmed [16].
2D corps de Ahmed [16].

(iv) Influence de la largeur de la fente : l’influence de


augmente rapidement avec l’accroissement de la vi- la largeur de la fente est analysée pour une fente
tesse d’aspiration. La traı̂née aérodynamique dimi- d’aspiration positionnée immédiatement en aval du
nue ainsi de 30 % lorsque le rapport de la vitesse décollement, une vitesse d’aspiration égale à 0,6 fois
d’aspiration Vasp sur la vitesse infinie amont V0 de- la vitesse de l’écoulement infinie amont et une aspi-
vient égal à 0,6. Pour des rapports supérieurs, le gain ration dirigée suivant la normale à la lunette arrière.
de traı̂née continue faiblement d’augmenter mais l’ef- Pour des largeurs de fente comprises entre 0,5 et
ficacité énergétique cesse d’être intéressante, figure 8. 1,5 × 10−3 m, la meilleure réduction de traı̂née est
relevée pour une largeur de fente égale à 10−3 m,
(iii) Influence de l’inclinaison de la direction d’aspira- figure 10.
tion : l’influence de l’orientation de la vitesse d’aspi-
ration par rapport au plan de lunette arrière est ana- Appliqués sur une géométrie 3D du corps de Ahmed,
lysée pour des angles compris entre 10 et 145◦ et une les meilleurs paramètres relevés lors de l’étude bidi-
vitesse d’aspiration égale à 0,6 V0 . Pour les angles mensionnelle permettent d’obtenir des réductions de
testés, la meilleure réduction de traı̂ne, de l’ordre de traı̂née proches de 18 % [15]. Pour cette configuration, le
30 %, s’obtient pour une aspiration normale, figure 9. décollement de fin de pavillon disparaı̂t et la distribution
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0
zone 1 zone 2

-0,3
zone 1 zone 2

-0,6
sans contrôle
Vasp=0,6Vo
-0,9
Cp

y3
-1,2

-1,5
x3
l
-1,8
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
x 3/l
Fig. 13. Pare-brise simplifié sans aspiration, visualisation iso-
Fig. 11. Influence du contrôle normal en position 4 (Fig. 6) surface λ2 = −25 s−2 . Vue de 3/4 avant droite [18]. Résultats
sur les coefficients de pression statique Cp de lunette arrière. numériques 3D montants de baie simplifiés.
Résultats numériques 3D corps de Ahmed, plan y = 0 [16].

0,5

0,25

sans contrôle
Vasp=0,6Vo
0
y/hc

-0,25 y

hc x

-0,5
-0,25 -0,2 -0,15 -0,1 -0,05 0
Cp
Fig. 14. Pare-brise simplifié avec aspiration Vasp = −0, 5 V0 ,
visualisation iso-surfaces λ2 = −25 s−2 . Vue de 3/4 avant
Fig. 12. Influence du contrôle normal en position 4 (Fig. 6) sur droite [18]. Résultats numériques 3D montants de baie sim-
la distribution des coefficients de pression statique Cp au culot. plifiés.
Résultats numériques 3D corps de Ahmed, plan y = 0 [16].

structures tourbillonnaires de montants de baies obte-


des coefficients de pression statique sur la lunette et au nues par calculs et relevées sans et avec aspiration pour
culot évolue de manière significative, figures 11 et 12. les vitesses 0,5V0 et V0 est reportée sur les figures 13
Sur la lunette arrière, les coefficients de pres- à 15. Pour la configuration géométrique retenue et des
sion statique diminuent très fortement puis augmentent structures tourbillonnaires représentées à partir du critère
progressivement jusqu’à atteindre des valeurs supérieures λ2 , l’influence de l’aspiration n’est significative qu’au-delà
aux valeurs relevées sans contrôle au bas de la lunette de la vitesse d’aspiration Vasp = 0,5V0 . Des réductions
arrière, figure 11. Au culot, le contrôle par aspiration tend de traı̂née proches de 14 % sont ainsi relevées par voies
à uniformiser la distribution des pressions statiques et ac- numérique et expérimentale [17, 18]. Ce résultat s’ob-
croı̂tre sa valeur moyenne, figure 12. Des expérimentations tient pour une direction d’aspiration normale à la paroi
effectuées en soufflerie sur une géométrie identique munie latérale positionnée immédiatement en aval de la ligne
d’une fente d’aspiration positionnée sur le haut de la lu- de décollement, une vitesse d’aspiration égale à la vi-
nette arrière confirment ces résultats [16]. tesse de l’écoulement infini amont et une fente de lar-
L’aspiration peut aussi être utilisée pour réduire la geur e = 10−3 m positionnée sur toute la hauteur du
contribution des structures tourbillonnaires de montant montant de baie. L’analyse des résultats montre des
de baie dans la traı̂née aérodynamique. L’évolution des modifications importantes au niveau des distributions
P. Gilliéron et A. Kourta : Mécanique & Industries 9, 519–531 (2008) 525

Fig. 15. Pare-brise simplifié avec aspiration Vasp = −V0 ,


visualisation iso-surfaces λ2 = −25 s−2 . Vue de 3/4 avant Fig. 16. Lunette arrière corps de Ahmed avec soufflages
droite [18]. Résultats numériques 3D montants de baie sim- latéraux perpendiculaires à la paroi [18].
plifiés.

surfaciques des pressions pariétales instantanées mesurées


sur les surfaces latérales (vitres latérales des véhicules
automobiles) [19]. Ce dernier résultat constitue à lui
seul une perspective intéressante pour diminuer le bruit
d’origine aéroacoustique, améliorer la stabilité dynamique
du véhicule lors des phases transitoires ou réduire les sa-
lissures.

3.2.2 Solution par soufflage continu

Le contrôle des décollements et de la traı̂née


aérodynamique des véhicules terrestres peut aussi s’effec-
tuer par soufflage continu. Dans cet article, le soufflage
est utilisé pour destructurer ou faire éclater les struc-
tures tourbillonnaires de lunette arrière dans la perspec- Fig. 17. Surface d’égale vorticité (ω = 5000 s−1 ) avec va-
tive d’accroı̂tre les pressions statiques pariétales et par leurs maximales relevées sans soufflage [18]. P, plan courant
conséquent réduire la traı̂née aérodynamique. Contrai- de mesure de la vorticité, E un point sur l’axe tourbillonnaire.
Résultats numériques 3D lunette arrière corps de Ahmed.
rement aux structures tourbillonnaires de type sillage
qui prennent naissance au niveau des montants latéraux
de pare-brise, les structures tourbillonnaires de lunette
arrière sont de type jet. analysée à partir des surfaces d’égale vorticité, des distri-
L’éclatement tourbillonnaire s’obtient ici en augmen- butions de pression statique sur la lunette arrière et des
tant la valeur du nombre de Swirl (rapport de la vitesse réductions de traı̂née aérodynamique.
azimutale sur la vitesse relevée dans la direction de l’axe Pour toutes les vitesses de soufflage, la structure tour-
tourbillonnaire) à partir de l’accroissement des vitesses billonnaire longitudinale et la distribution pariétale de
azimutales locales jusqu’à des valeurs proches de 1,5 [20]. pression statique sur la lunette arrière évoluent et des
Pour toutes les configurations, les nombres de Swirl sont réductions significatives de traı̂née sont relevées pour les
déterminés à partir de mesures de vitesses relevées par vitesses de soufflage Vs = 0,5V0 , V0 et 1,5V0 [21], voir
vélocimétrie laser 3 composantes dans des plans P perpen- figures 17–21. La structure tourbillonnaire passe de l’état
diculaires à l’axe tourbillonnaire, figure 17. Sur cet axe et déstructuré à l’état éclaté avec recirculation et courant
de part et d’autre du point E (Fig. 17), les valeurs maxi- de retour avec point d’arrêt lorsque la vitesse de souf-
males de vorticité ω relevées sans soufflage décroissent res- flage évolue de 0,5 à 1 et 1,5 V0 [21]. Pour toutes ces
pectivement de 1,00 × 104 s−1 à 0,25 × 104 s−1 . Comme vitesses, les valeurs des pressions statiques pariétales re-
pour l’aspiration, le soufflage s’effectue dans une direc- levées sous la structure tourbillonnaire augmentent et les
tion perpendiculaire au plan de la lunette arrière à partir maximums de pression statique sont relevés pour la vi-
d’une fente d’épaisseur e = 10−3 m positionnée sur toute tesse de soufflage Vs = 0,5V0 , figures 18 et 21. D’un point
sa hauteur, figure 16. L’analyse s’effectue pour les vitesses de vue énergétique, la meilleure efficacité énergétique
de soufflage Vs = 0,5V0 , V0 et 1,5V0 où V0 désigne la vi- s’obtient pour une vitesse de soufflage proche de 0,5 V0 .
tesse de l’écoulement incident. L’efficacité du contrôle est Des expérimentations réalisées en partenariat avec le
526 P. Gilliéron et A. Kourta : Mécanique & Industries 9, 519–531 (2008)

Fig. 18. Coefficients pariétaux de pression statique Cp (de Fig. 20. Surface d’égale vorticité (ω = 5000 s−1 ) avec souf-
bleu à rouge valeurs entre –1 et 0) sur lunette arrière relevés flage Vs = V0 , ΔCx = −6,2 % [18]. Résultats numériques 3D
sans soufflage [18]. Résultats numériques 3D lunette arrière lunette arrière corps de Ahmed.
corps de Ahmed.

Fig. 21. Coefficients de pression statique Cp (de bleu à rouge


valeurs entre –1 et 0) pour soufflage Vs = 0,5V0 . À comparer
Fig. 19. Surface d’égale vorticité (ω = 5000 s−1 ) avec souf- avec la figure 18 [18]. Résultats numériques 3D lunette arrière
flage Vs = 0,5V0 , ΔCx = −5,6 % [18]. Résultats numériques corps de Ahmed.
3D lunette arrière corps de Ahmed.

sont déjà engagées avec l’IEMN, le LEMAC et la société


Laboratoire de Mécanique et d’Énergétique d’Orléans FLOWDIT pour développer de tels systèmes.
sur une configuration analogue confirment l’éclatement
tourbillonnaire et les remontées de pression sur la lunette
arrière (article Mécanique & Industrie à paraı̂tre). 3.2.3 Solution par soufflage et aspiration alternés à débit
En l’absence de solutions géométriques permettant de moyen nul (jet synthétique)
réduire ou de supprimer totalement les structures tour-
billonnaires de lunette arrière sans incidence forte sur Le contrôle des écoulements et des décollements
l’habitabilité des véhicules (garde au toit, déplacements aérodynamiques par jets alternés de types soufflé et
latéraux), ces résultats montrent l’intérêt de l’éclatement aspiré offre des perspectives intéressantes en termes d’ef-
tourbillonnaire pour remonter les pressions de culot et ficacité énergétique. Le jet est dit pulsé ou synthétique
réduire la traı̂née des véhicules automobiles. Des travaux selon que la moyenne temporelle est respectivement non
sont en cours pour accroı̂tre l’efficacité du contrôle et nulle ou nulle sur une période [22]. Dans cet article, seuls
réduire la contribution énergétique nécessaire à l’appa- les travaux et résultats récents obtenus dans le cadre d’un
rition de l’éclatement. Lorsque les solutions auront été contrôle par jet synthétique sont présentés [22–24]. Ces
identifiées, le travail suivant consistera alors à mettre au travaux sont effectués à partir des expertises développées
point et développer des actionneurs de petites tailles et de autour du contrôle par aspiration et soufflage continus
faible masse (MEMS électriques, électromagnétiques ou décrits aux paragraphes précédents. La géométrie utilisée
autres) à haut rendement énergétique. Des collaborations reste identique et les résultats relevés sur la configuration
P. Gilliéron et A. Kourta : Mécanique & Industries 9, 519–531 (2008) 527

5 20

15
0
10

Réduction de traînée (%)


5
Réduction de traînée (%)

-5
0
-10
-5

-10
-15
-15
-20
-20

-25
-25
-30

-30 -35

-40
-35
0 2 4 6 8 10 12 14 16 18
0,1 1 10 100
Fréquence réduite F+ Cμ (x10-4)

Fig. 22. Pourcentage de réduction du coefficient Cx en fonc- Fig. 23. Pourcentage de réduction du coefficient Cx en fonc-
tion de la fréquence réduite F + pour le coefficient de quantité tion du coefficient de quantité de mouvement Cµ pour la
de mouvement Cµ = 2,4 × 10−4 [26], résultats numériques 2D fréquence réduite F + = 0,7 [26], résultats numériques 2D
corps de Ahmed. corps de Ahmed.

100
3D sont obtenus après avoir développé un savoir-faire sur
90
des configurations bidimensionnelles.
La fréquence du jet synthétique s’obtient à partir 80

des grandeurs caractéristiques de Kolmogorov définies à 70 Sans contrôle


partir de la hauteur de la géométrie et de la vitesse de F = 0.7
l’écoulement incident V0 = 40 m.s−1 . Pour ces valeurs,
60
z/H A(%)

F = 1.0

la fréquence caractéristique Fk est égale à 140 Hz. Le co- 50 F = 20.0

efficient de quantité de mouvement Cµ est déterminé à 40


partir du maı̂tre couple de la géométrie, de la surface
30
en plan de la fente du jet synthétique, de l’amplitude
de la vitesse maximale du jet synthétique et de la vi- 20

tesse de l’écoulement V0 . La fréquence du jet synthétique 10


Fj et la fréquence caractéristique Fk permettent alors de
définir une fréquence réduite notée F + à partir du rapport
0
0 -0,2 -0,4 -0,6 -0,8 -1
Cp
Fj /FK .
Les résultats numériques obtenus sur une configura- Fig. 24. Distribution des coefficients de pression statique Cp
tion bidimensionnelle du corps de Ahmed font apparaı̂tre sur la lunette arrière et le culot sans et avec contrôle pour
deux régimes associés à des réductions significatives de Cµ = 2,4 × 10−4 et les fréquences réduites F + = 0,7, 1,0 et
traı̂née aérodynamique [26]. Un premier régime station- 20,0 [26], résultats numériques 2D corps de Ahmed.
naire (F + = 20, Fig. 22) permet de réduire et de re-
pousser en aval du culot les valeurs maximales de pertes
d’énergie volumique et un second régime (F + = 0,7, tourbillonnaires de Von Karman à partir du soubasse-
Fig. 22), désigné dynamique, pour lequel la topologie de ment et est peu influencé par l’écoulement de lunette
sillage est caractérisée par la formation de petites struc- arrière. Le second régime est tel que les fréquences des
tures tourbillonnaires dont la fréquence d’émission appa- émissions tourbillonnaires issues de la lunette arrière et
rait synchronisée avec la fréquence du jet synthétique [27]. du soubassement apparaissent en phase. À ces modes sont
Pour ce dernier régime, la valeur du coefficient de quantité respectivement associés les nombres de Strouhal 0,4 et
de mouvement évolue sans incidence rapide sur la struc- 0,7. Pour la fréquence réduite F + = 0,7 et un contrôle
ture de l’écoulement et la valeur du coefficient de traı̂née positionné en fin de pavillon en amont du décollement
aérodynamique, figure 23. La meilleure efficacité s’obtient (4,5 × 10−3 m), la traı̂née aérodynamique diminue avec
lorsque la quantité de mouvement est introduite au cœur l’accroissement du coefficient de quantité de mouve-
de la sous-couche logarithmique [28]. Les réductions de ment Cµ jusqu’à une valeur seuil Cµo , voir figure 27.
traı̂née relevées pour ces deux régimes sont respective- Le développement transversal du décollement de lunette
ment de 13 (pour F + = 20) et 33 % (pour F + = 0,7) [27], arrière issu de la fin du pavillon diminue (Figs. 25 et 26),
figures 22 et 23. l’écoulement en proche paroi s’organise à partir de dis-
Pour une configuration tridimensionnelle, les résultats tributions de rouleaux tourbillonnaires, les positions des
de calculs relevés sans contrôle mettent en évidence deux centres tourbillonnaires de sillage se symétrisent dans
régimes caractéristiques d’agitation tourbillonnaire [27]. le plan de symétrie longitudinal et la pression au cu-
Le premier régime est associé à l’émission d’allées lot augmente. Sur la lunette arrière et comme en 2D,
528 P. Gilliéron et A. Kourta : Mécanique & Industries 9, 519–531 (2008)

0,0
3,2
-1,5

-3,0
3,1
-4,5

ΔCx (%)
Coefficient Cx 10-1
-6,1
3,0
-7,6

-9,1
2,9

-10,6

2,8 -12,1

-13,6

2,7 -15,2
0 2 4 -4
6 8 10
Cμ (x10 )

Fig. 25. Surfaces d’égales pertes d’énergie volumique Fig. 27. Réduction du coefficient de traı̂née Cx et pourcentage
(Cpi = 1) coloriées par les valeurs des coefficients de pres- de réduction pour des fentes positionnées en amont et en aval
sion statique Cp , résultats numériques 3D corps de Ahmed du décollement. Résultats numériques 3D corps de Ahmed,
relevés sans contrôle [27]. d’après [27].

0 1 2 3 4
-1

-2

Réduction de traînée (%)


-3

-4

Fente - 4 mm
-5 Fente + 2 mm
Fente + 4 mm
-6

-7

-8

-9
-
Cμ (x10 )
Fig. 26. Surfaces d’égales pertes d’énergie volumique
(Cpi = 1) coloriées par les valeurs des coefficients de pression Fig. 28. Réduction du coefficient de traı̂née aérodynamique
statique Cp , résultats numériques 3D corps de Ahmed relevés Cx en fonction du coefficient de quantité de mouvement Cµ
avec contrôle positionné en amont du décollement, F + = 0,7 pour des fentes positionnées à –4, +2 et +4 mm. Résultats
et Cµ = 4,2 × 10−4 [27]. expérimentaux 3D corps de Ahmed, Re = 1,2 × 106 [27].

l’écoulement devient dynamique et l’apparition puis le membranes des actionneurs (F = 520 Hz) associée à la
transport des rouleaux tourbillonnaires s’effectuent en fréquence réduite F + = 4,2 et des largeurs de fente com-
phase avec la fréquence du jet synthétique. Pour les confi- prises entre 0,5 et 1,5 × 10−3 m, des vitesses maximales
gurations testées et le soufflage continu, les meilleures comprises entre 14 et 19 m.s−1 sont relevées à la sortie
réductions de traı̂née s’obtiennent lorsque l’orifice trans- des actionneurs. Comme précédemment (aspiration conti-
versal du contrôle est positionné en aval mais au plus nue et jet synthétique 2D), les meilleures réductions de
près du décollement (intersection de la fin du pavillon traı̂née s’obtiennent pour une fente positionnée en aval
avec le haut de la lunette arrière). La meilleure réduction et au plus près de la ligne de décollement (+2 × 10−3 m,
de traı̂née proche de 13 % s’obtient pour la même valeur voir Fig. 28). Pour des valeurs croissantes du coefficient de
Cµ = 4,2×10−4 du coefficient de quantité de mouvement, quantité de mouvement comprises entre 0 et 3,9×10−4, la
figure 27 [27]. traı̂née aérodynamique diminue rapidement pour croı̂tre
Ces résultats obtenus par voie numérique sont com- légèrement et tendre vers 8 % lorsque le coefficient de
parés à des résultats expérimentaux réalisés en souffle- quantité de mouvement tend vers 3,9×10−4. La réduction
rie sur une maquette de géométrie identique à échelle maximale représente 8,5 % de la traı̂née aérodynamique
0,7 [27]. Le jet synthétique s’obtient à partir d’une bar- relevée sans contrôle, figure 28.
rette d’actionneurs à membranes piézoélectriques montés Au-delà du coefficient de quantité de mouvement
en parallèle [29] et l’orifice du dispositif de contrôle est Cµ = 3,9 × 10−4 , la traı̂née aérodynamique n’évolue plus.
positionné à –4, 2 ou 4 × 10−3 m en amont ou en aval Cette réduction résulte d’une diminution progressive de
du décollement (fin du pavillon ou haut de la lunette l’extension transversale de la région décollée sur le haut
arrière, Fig. 28). Pour la fréquence de résonnance des de lunette arrière qui s’accompagne d’un accroissement
P. Gilliéron et A. Kourta : Mécanique & Industries 9, 519–531 (2008) 529

de la vitesse longitudinale au bas de la lunette arrière. Tableau 1. Impacts estimés des solutions de contrôle sur la
Cette augmentation locale de la vitesse de transport consommation à 130 km.h−1 et les émissions de Co2 pour le
reporte vers l’aval la partie supérieure de la structure cycle NEDC. Valeurs déterminées pour 10 % de réduction du
tourbillonnaire torique de culot, les vitesses au voisinage coefficient de traı̂née aérodynamique Cx .
du culot diminuent, les pressions statiques augmentent Solutions Réduction Réduction
et la contribution du culot à la traı̂née aérodynamique consommation émission
décroı̂t. De plus, l’écart des vitesses entre les parties
CO2
inférieures de la lunette arrière et du culot se réduit et
Contrôle passif l/100 km à g.km−1
la structure tourbillonnaire de culot se symétrise. Enfin,
130 km.h−1 (NEDC)
le contrôle réduit l’activité spectrale associée au batte-
ment du bulbe décollée de lunette arrière, introduit une Elts Sép Longitudinaux 0,8 2,5
instabilité forcée qui contraint l’évolution instationnaire Elts Sép Transversaux 0,8 2,5
du sillage et renforce l’organisation autour de l’instabilité Vortex Générateurs 0,4 1,6
de Von Karman. Contrôle actif
Aspiration continue LuAR 0,7 2,9
Aspiration continue montant baie 0,7 2,4
4 Impact sur les consommations Soufflage continu culot droit 0,7 2,1
et les émissions Soufflage continue LuAR (éclt) 0,4 1,5
Jets synthétiques LuAR 0,8 3,1
Ces résultats montrent que des solutions en rup-
ture existent pour réduire d’au moins 10 % la traı̂née
aérodynamique des véhicules automobiles. Ces solutions serre des véhicules automobiles. Ces solutions pourraient
pourraient être utilisées dans des régions où subsistent également être utilisées pour améliorer les performances
des décollements ou lorsque les contraintes d’architec- des futurs véhicules hybrides et électriques qui devraient
ture et/ou de design ne permettent pas d’appliquer progressivement se substituer aux véhicules à moteur
les préconisations aérodynamiques classiques. Elles of- thermique. Les objectifs sont évidemment ambitieux et
friraient ainsi des moyens supplémentaires aux équipes nécessitent de poursuivre le travail de recherche engagé
aérodynamiques chargées du développement des nou- pour améliorer la connaissance des phénomènes phy-
veaux véhicules. Pour des véhicules de gamme moyenne siques, optimiser les protocoles de contrôle et concevoir en
du type Mégane, la consommation diminuerait alors de parallèle des actionneurs robustes à faible coût capables
0,8 l sur 100 km pour des trajets effectués à la vitesse d’intégrer les exigences automobiles. Les programmes
stabilisée de 130 km.h−1 . Les émissions de dioxyde de de recherche doivent alors s’appuyer sur l’ensemble des
carbone seraient à cette vitesse réduites de 20 g par ki- compétences scientifiques et techniques développées dans
lomètre et de 3,5 g.km−1 sur le parcours NEDC. les laboratoires de recherche industriels et universitaires
Ces solutions nécessitent cependant des systèmes em- qui travaillent et échangent sur des thématiques iden-
barqués qui engendrent des accroissements de masse et de tiques et connexes. C’est ainsi qu’a été créé sous l’im-
puissance électrique pour les systèmes actifs. Ces accrois- pulsion de Renault, de PSA et du CNAM, un Centre
sements induisent des augmentations de consommation National de Recherche Technologique désigné CNRT
et d’émission de CO2 qui sont prises en compte dans les (( Aérodynamique et Aéroacoustique des Véhicules Ter-
valeurs reportées dans le tableau 1. restres )) et a été développé un Groupement de Recherche
Des associations de solutions peuvent enfin être (GdR) intitulé (( Contrôle des Décollements )), voir les sites
imaginées (soufflage et jets synthétiques...) pour des www.cnrt2a.asso.fr et www.imft.fr/GDR2502
réductions de 20 % de la traı̂née aérodynamique sans S’agissant du Centre National de Recherche Techno-
incidence sur l’habitabilité et le confort des véhicules. logique désigné (( Aérodynamique & Aéroacoustique des
De telles associations permettraient alors de diminuer Véhicules Terrestres )), Renault et PSA sont membres fon-
les émissions de gaz carbonique de 7 g.km−1 sur le par- dateurs et animent le comité scientifique. Leurs contribu-
cours NEDC et de 1,6 l la consommation sur 100 km tions consistent à identifier et prioriser les axes de re-
à 130 km.h−1 . Ces perspectives confirment l’intérêt du cherche, rechercher les meilleurs partenaires et assurer le
contrôle aérodynamique pour optimiser les rendements suivi scientifique des travaux financés par ce CNRT. Ces
énergétiques des solutions actuelles et futures de trans- dernières années, la recherche s’est orientée vers l’iden-
port (solutions hybride, hydrogène ou électrique). tification de produits non toxiques destinés à améliorer
le rendu des visualisations pariétales (IMFT, IAT) dans
les régions à faible vitesse, l’analyse des écoulements de
5 Conclusion et perspectives césures (LIMSI, LME Valenciennes, LEA Poitiers, Si-
gnal Développement) et la recherche de solutions des-
Les résultats présentés dans cet article montrent déjà tinées à mettre au point des nappes souples de cap-
des progrès significatifs et permettent d’envisager l’intro- teurs pariétaux de pression statique (LAUM & ESIEE).
duction du contrôle actif comme une des solutions pour Les interactions sillage/décollement (LEA de Poitiers),
réduire la consommation et les émissions de gaz à effet de le contrôle de décollements par plasma froid (université
530 P. Gilliéron et A. Kourta : Mécanique & Industries 9, 519–531 (2008)

d’Orléans et LEA de Poitiers) et le lancement d’une ac- [2] World Energy Outlook 2007, Executive Summary, China
tion d’évaluation des actionneurs sur une maquette d’es- and India Insights, International Energy Agency IEA,
sais de type corps de Ahmed évoluée destinée à tester ISBN: 978-92-64-02730-5
des dispositifs de contrôle des décollements sont des su- [3] F. Chometon, P. Gilliéron, Modélisation des écoulements
jets actuellement en cours d’analyse ou d’étude. Des in- tridimensionnels décollés autour des véhicules automo-
formations sont disponibles sur le site du CNRT R2A, biles, Congrès SIA, Société des Ingénieurs de l’Automo-
www.cnrt2a.asso.fr bile, N◦ SIA 96-09-11, Courbevoie/Paris, 5 et 6 novembre
Des résultats significatifs ont également été obte- 1996, p. 10
nus par les acteurs du Groupement de Recherche GdR [4] P. Gilliéron, F. Chometon, Reduction of cooling air
2502 (( Contrôle Des Décollements )), dont les activités drag of road vehicle: an analytical approach, SAE pa-
s’articulent autour de laboratoires publics (LEA Poi- per N◦ 01B-48, SAE Congress, Detroit, Michigan, USA,
March 2001
tiers, IMFT, ONERA, Institut PRISME/LME Orléans,
[5] T. Ivanic, P. Gilliéron, Reduction of the aerodynamic
ENSAM...) et privés (SNECMA, Dassault, PSA, Re-
drag to cooling systems: an analytical and experimental
nault et PlasticOmnium). Les travaux de recherche s’ef-
approach, SAE paper N◦ 2005-01-1017, SAE Congress,
fectuent à partir de géométries simplifiées de types corps Detroit, Michigan, USA, April 2005
de Ahmed, profil d’aile (OAT15) ou diffuseur plan. De
[6] F. Chometon, P. Gilliéron, Assessment of engine co-
nombreux résultats ont été présentés dans le cadre de oling performance by measurement of cooling airflow drag
journées d’études et/ou publiés dans diverses revues ou in aerodynamic wind tunnels, SAE Congress, Detroit,
actes de congrès. Les résultats obtenus de 2001 à 2005 Michigan, USA, February 23–26, 1998
et publiés au début de l’année 2006 dans un recueil [7] F. Chometon, P. Gilliéron, Dépouillement assisté par or-
CEPADUES, ont permis de reconduire cette organisa- dinateur des visualisations pariétales en aérodynamique,
tion au début de l’année 2006 pour une nouvelle période Compte-rendus Académie des Sciences Paris, tome 319,
de 4 années. Renault, PSA, Dassault et l’ONERA sont série II, 1994, pp. 1149–1156
membres actifs du conseil scientifique de ce GdR, voir site [8] S.R. Ahmed, G. Ramm, G. Faltin, Some salient features
www.imft.fr/GDR2502 of the time-averaged ground vehicle wake, SAE technical
En parallèle sont développées des collaborations scien- paper series, N◦ 840300, Detroit, 1984
tifiques pour croiser les expériences, partager les moyens [9] P. Gillieron, F. Chometon, Modelling of stationary
expérimentaux ou numériques et développer de nou- three-dimensional detached airflows around an Ahmed
velles idées. Un projet PREDIT (collaborations Renault, Reference Body, Third International Workshop on
PSA, université de Bordeaux, ESPCI, CNAM et Plas- Vortex, ESAIM, Proceedings, 7, 1999, pp. 173–182,
tic Omnium) a ainsi récemment été déposé et ac- http://www.emath.fr/proc/Vol7/
cepté sur le thème du contrôle par jets pulsés, projet [10] P. Gilliéron, A. Spohn, Flow separations generated by
CARAVAJE. Des recherches devront être poursuivies a simplified geometry of an automotive vehicle, Congrès
sur le jet synthétique pour mettre en concurrence ces IUTAM Symposium on Unsteady Separated Flows, April
deux approches, mieux évaluer leurs potentiels, leurs 8–12, Toulouse, France 2002
avantages, leurs inconvénients et identifier leur efficacité. [11] E. Levallois, P. Gilliéron, Contrôle des écoulements
La réponse industrielle à la nécessité du contrôle des en aérodynamique automobile & réduction de traı̂née
écoulements et des décollements aérodynamiques pour par éléments séparateurs – Analyse par PIV, Colloque
réduire la consommation et les émissions de gaz à effet National de Visualisation et de Traitement d’Images en
Mécanique des Fluides, Fluvisu 11, Lyon, 6–9 juin 2005
de serre des automobiles sera issue de l’une de ces deux
[12] Renault, Direction de la Communication, Communiqué
solutions. Les progrès récents réalisés sur les dimensions,
les masses et l’efficacité des actionneurs de type MEMS de Presse, À l’occasion du Challenge Bibendum Michelin,
Renault présente Logan (( Renault ECO2 )) concept,
associés au développement de l’expertise sur le contrôle
véhicule écologique et économique, 1er octobre 2007
aérodynamique permettent d’envisager l’intégration de
[13] C.H. Bruneau, P. Gilliéron, I. Mortazavi, Passive control
ces solutions d’ici 2015.
around the square back Ahmed body using porous de-
vices, J. Fluids Eng. (2007)
Remerciements. Les auteurs remercient particulièrement
[14] M. Rouméas, P. Gilliéron, A. Kourta, Réduction de
l’ANRT ainsi que Mathieu Rouméas, Benjamin Lehugeur et
traı̂née par contrôle des décollements autour d’une
Cédric Leclerc, ingénieurs et docteurs, pour leurs contribu-
géométrie simplifiée: Étude paramétrique 2D, 17e
tions à cet article effectuées dans le cadre de travaux de thèses
Congrès Français de Mécanique, 29 août au 2 septembre
CIFRE entre 2003 et 2008. Ces contributions ont permis de
2005, Troyes, France, 2005
réaliser des avancées significatives pour imaginer et développer
[15] M. Rouméas, P. Gilliéron, A. Kourta, 2005, Analyzis and
des solutions destinées à réduire la consommation et les gaz à
control of the near-wake flow over simplified car geome-
effet de serre des futurs véhicules automobiles.
try, 4th Conference on Bluff Body Wakes and Vortex-
Induced, Vibrations (BBVIV4), Santorin, Greece, 21–
24 June, 2005
Références
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