Manuel Eco-Construction FR
Manuel Eco-Construction FR
Manuel Eco-Construction FR
La toiture ............................................................................................................................................. 36
2.2.3 La ventilation........................................................................................................................... 39
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 3
La ventilation naturelle ....................................................................................................................... 39
Le bambou .......................................................................................................................................... 67
Contexte Les infrastructures publiques, telles que écoles et hôpitaux, visent-elles à répondre
aux besoins du plus grand nombre, quitte à réduire la qualité des constructions, ou
à fournir des interventions pérennes quelles qu’en soit leur prix ? Vaste débat qui
occupe beaucoup de responsables en charge des investissements publics depuis
de nombreuses années.
Entre quantité et qualité, une réponse univoque ne peut être donnée, l’important
étant de répondre aux besoins de la programmation architecturale et des
spécificités locales dans le respect du cadre budgétaire imposé. On s’attend de fait
à ce que le bâtiment, tout en s’inscrivant résolument dans son époque et la
modernité qui la caractérise s’inscrive dans son contexte culturel et géographique
et intègre diverses dimensions, tel le genre ou l’environnement. Sur ce point, il ne
s’agit plus aujourd’hui de limiter uniquement l’impact écologique du bâtiment mais
également de tenir compte, d’une part, de la raréfaction des ressources naturelles
et, d’autre part, de la problématique des changements climatiques.
La réponse à ces défis n’est pas uniquement l’apanage des pays du nord, mais
également des pays du sud, dont les pays partenaires de la coopération belge.
Quel que soit le lieu où un bâtiment s’érige, il est de la responsabilité des auteurs
du projet qu’ils y intègrent la question climatique. A eux de concevoir non
seulement des bâtiments plus résilients aux catastrophes naturelles, mais aussi
qu’ils améliorent leur efficacité énergétique afin de limiter leur impact sur les
changements climatiques. Une allocation supplémentaire au budget initial du
bâtiment est dès lors nécessaire pour répondre à ce défi majeur.
Objectif Ce manuel s’inscrit pleinement dans la vision du Ministre de la Coopération et de
nouvelle stratégie en matière de climat de la CTB, future Enabel, qui vise à
promouvoir des actions d’atténuation et d’adaptation aux bouleversements
climatiques dans ses interventions. Son objectif est de proposer de façon non
exhaustive différents concepts, approches et techniques visant à garantir le
meilleur confort possible des usagers tout en limitant au maximum
l’empreinte écologique de l’édifice tout au long de son cycle de vie. Les
différentes composantes de cette stratégie sont à intégrer dans une conception
architecturale cohérente répondant aux spécificités du lieu.
Public Le document est destiné à l’ensemble des acteurs intervenants dans la conception
cible d’un bâtiment ; maître d’œuvre, maitre d’ouvrage, autorités locales, gestionnaires
et utilisateurs du bâtiment en devenir.
une synthèse reprend les principales actions pertinentes suivant les deux types
principaux de climats opérant dans les pays partenaires de la CTB.
L’efficience énergétique est aussi une question cruciale pour les populations du « sud » en
raison d’un coût toujours plus élevé de l’énergie – le creux observé depuis la mi-2014 dans la
montée des cours est malheureusement ponctuel – et l’accessibilité réduite en électricité dans
beaucoup de régions. Si les réseaux électriques des pays du sud continuent à croitre et tendent
à couvrir des portions toujours plus vastes de territoire, aucun pays n’est à l’abri de coupures de
courant qui sont d’autant plus régulières que la zone est reculée. Il est dès lors important de
répondre à la demande de confort, notamment thermique, des usagers en diminuant
drastiquement les besoins en énergie, notamment ceux dévolus à l’air conditionné, par
une conception architecturale plus adaptée intégrant des technologies alternatives.
L’efficacité énergétique des bâtiments devient donc une nécessité. Elle vise à mettre en œuvre
des projets qui optimisent l’utilisation de l’énergie tant par une conception adaptée que des
moyens techniques appropriés. Elle s’appuie sur le Trias Energetica, stratégie visant à réduire
la consommation énergétique des bâtiments en 3 étapes:
2. Utiliser les sources d’énergie durable telles que le vent, l’eau et le soleil, mais aussi la
géothermie via l’installation de chauffe-eau solaires, de panneaux photovoltaïques,
d’éoliennes ou de pompes à chaleur ;
3. Utiliser l’énergie fossile de la manière la plus efficace possible pour répondre aux
besoins restants en limitant, par exemple, la longueur des conduites des systèmes de
chauffage et de refroidissement.
L’objectif est donc de réduire l’impact énergétique des bâtiments sur toute leur durée de
vie, tout en optimisant leur viabilité économique, le confort, mais également la sécurité et
la santé des occupants.
L’efficacité énergétique constitue donc une priorité pour tout projet de construction. En Afrique,
la majeure partie des immeubles requiert l’air conditionné et l’éclairage artificiel. Pourtant,
d’autres approches architecturales peuvent conduire à un plus grand confort des usagers sans
y avoir recours en améliorant la conception, le design et les matériaux utilisés. De telles
approches nécessitent une réflexion au stade de la conception et la volonté d’augmenter le coût
d’investissement initial – de l’ordre de 10 à 15% – sachant qu’il sera amorti durant la phase
d’exploitation du bâtiment.
Répondre à la fois à un confort optimal et limiter au maximum l’appel aux ressources primaires,
oblige à laisser de côté les solutions voraces en énergie. L’architecture bioclimatique tente de
répondre à ce défi de la manière la plus naturelle possible. Elle nécessite une approche
holistique, impliquant une réflexion tant sur la forme et l’agencement du bâti que sur les
matériaux, s’inspirant en cela de l’architecture traditionnelle et vernaculaire, tout en faisant
appel à des technologies appropriées et innovantes.
Elle se définit comme une approche architecturale visant à tirer parti des conditions d'un site et
de son environnement (le climat et le microclimat, la géographie, la morphologie, la
topographie…) tout en se prémunissant des contraintes qu’ils induisent. Elle vise à des
conditions de confort adéquates (températures, taux d'humidité, luminosité, insalubrité, etc.), via
des moyens dits passifs ; c’est-à-dire en limitant le recours aux moyens techniques mécanisés
et aux énergies extérieures au site. Quand ils sont nécessaires, les énergies renouvelables
sont privilégiées, tel le solaire, la géothermie ou l’éolien.
Le bio-climatisme fait appel à de nombreuses stratégies, techniques et systèmes de
construction qui permettent de rafraîchir, ventiler et éclairer l'ambiance intérieure d'une
construction. Ces techniques utilisent généralement des savoir-faire et des matériaux
disponibles localement ainsi que des systèmes faisant appel à des technologies simples, bien
qu’il soit de plus en plus fait appel à l'électronique pour leur contrôle et leur gestion
automatisée.
La "conception bioclimatique" ou « l’écoconstruction » fait donc référence à l'ensemble
des stratégies, solutions et techniques architecturales mises en place dans un projet
soucieux de son empreinte écologique.
Apporter des réponses aux aspirations de confort par ce biais nécessite des actions parfois
contradictoires. Ainsi, l’apport en lumière naturelle induit un accroissement des risques de
surchauffe par les rayons du soleil, tandis que le fait de maximiser la ventilation naturelle
favorise la propagation des bruits. Le défi sera donc d’atteindre le meilleur équilibre possible
entre ces différentes aspirations par l’introduction d’éléments palliatifs, tels des brise-soleils ou
des pièges à sons, et à prioriser les demandes.
Aujourd’hui les principes de l’architecture traditionnelle reviennent en force comme source
d’inspiration. L’architecture bioclimatique vise à optimaliser les techniques anciennes sans pour
autant renier l’apport des technologies modernes.
Ainsi, certains matériaux, techniques et conceptions issues du passé – tel l’emploi de la terre
crue et les techniques constructives qu’elle implique ou les déclinaisons de systèmes de
ventilation traditionnels, du moucharabieh de l'Afrique du Nord, au Yazd Iranien, en passant par
les badgirs (pièges à vents) du moyen Orient – sont réinterprétés par l’architecture
contemporaine.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 10
Schéma de maison de la Grèce Antique basé sur la Badgir ou tour à vent, ville de Yazd, Iran
course du soleil en été/hiver
Figure 2 : La tradition comme exemple d’approche écologique
Des techniques traditionnelles de construction, comme l’adobe, sont devenues des sources
d’inspiration pour des technologies plus adaptées au contexte local, comme les blocs
autobloquants en terre-ciment. Ces technologies dites « appropriées », suivant la terminologie
initiée par Schumacher dans son ouvrage "Small is beautiful"1, valorisent l’emploi de techniques
et d’ingénieries adaptées aux spécificités du lieu qui minimisent leur impact sur l’environnement
et la société.
Pour autant, l’emploi de hautes technologies ne doit pas être rejeté, pourvu que leurs coûts
d’achat et d’utilisation demeurent compétitifs. Il ne s’agit donc pas d’une idéologie restrictive
mais d’une approche pragmatique.
Pour répondre au mieux aux attentes des usagers, les concepteurs de projets ont besoin de
disposer d’une idée précise de la zone de confort optimale attendue dans les bâtiments qu’ils
conçoivent. Des recherches ont été menées dans la plupart des régions du globe pour mieux
cerner cette notion suivant le contexte local et ses différentes dimensions.
1
Small Is Beautiful: A Study Of Economics As If People Mattered, E. F. Schumacher, 1973, Trad. en français : Small is beautiful. Une société à la
mesure de l'homme, Seuil, coll. "Points", 1979.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 11
Confort Confort Confort Qualité de l’air
hygrothermique visuel acoustique
Cette zone de confort sera également affectée par la vitesse de l’air ; une plus grande vitesse
augmentant la sensation de froid.
Pour permettre aux personnes d'exécuter leurs activités dans un intérieur sans fatigue visuelle
excessive, un éclairage adéquat doit être assuré de façon constante et sans éblouissement.
L’éclairage peut être fourni par la lumière du jour, l'éclairage artificiel ou une combinaison des
deux ; le concept d’efficience énergétique, privilégiant la première option.
2
La luminance est la seule grandeur réellement perçue par l’œil humain. Elle est directement liée à l’éclairement rétinien et correspond à la sensation
visuelle de luminosité créée par une source ou par une surface éclairée. Elle représente le rapport entre l’intensité de la source dans une direction
donnée et la surface apparente de cette source.
3
L’intensité lumineuse est une grandeur physique qui correspond, en photométrie, à l'éclat perçu par l'œil humain d'une source lumineuse ponctuelle.
Elle est une unité de mesure exprimée en candela (cd) permettant de caractériser un point lumineux. Tout comme les autres grandeurs
photométriques, elle dépend directement de la perception humaine : c'est donc une grandeur perceptive.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 13
La lumière naturelle est composée des rayons directs du soleil et d’une lumière diffuse et stable
venant du ciel. Son utilisation apporte de nombreux avantages tant physiologiques que
psychologiques. Elle est gratuite, offre un rendu de couleurs « réel » et assainit l’air en limitant
la profusion de certaines bactéries. Les baies qui laissent entrer la lumière offrent aussi une vue
sur l’extérieur, reliant les occupants au monde extérieur.
Bureau 300
Couloir 50
Escalier 100
Sanitaires 100
Laboratoire 500
Une série de normes ont été produites pour définir l’intensité lumineuse requise selon le
type de tâches et la durée de l'activité, en faisant la distinction entre l'éclairement
recommandé dans la zone de travail et les zones attenantes. Le Tableau 2 donne un
aperçu des niveaux d’éclairement attendus dans différents type de locaux. On y voit, par
exemple, qu’un niveau d’éclairement optimal de la table de travail d’un bureau est de 500 Lux et
de 300 Lux sur la zone adjacente immédiate.
Le confort acoustique vise à limiter les bruits4 parasites générés tant à l’intérieur qu’à
l’extérieur du bâtiment dans les limites acceptables tout en privilégiant une bonne
4
Les bruits sont des mélanges de sons, chacun caractérisé par l’amplitude - le niveau sonore exprimé en décibel (dB) - et une fréquence, exprimée en
Hertz (Hz), différente. Ainsi un bruit s’exprime par son spectre et son niveau sonore exprimé en décibel, pour chaque bande de fréquence observée.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 14
transmission des sons (musique et parole) sans distorsion. Pour offrir un confort
acoustique optimal, il convient de contrôler la transmission du bruit au travers de l’enveloppe du
bâtiment et entre les différents locaux, tout en permettant une diffusion sans parasite des sons
dans l’espace donné. Il s’agit pour cela d’intervenir sur les trois types de transmission – directe,
parasite et latérale – ainsi que les différents types de bruits5. Pour ce faire, il est possible de
jouer sur la qualité des matériaux de construction, soit leur degré d’isolation, d’absorption et de
réverbération, et leur épaisseur.
Suivant la fonction du local, on veillera à favoriser l’intelligibilité de la parole, dans les espaces
où l’écoute doit être privilégiée, ou à réduire le niveau sonore des activités, comme dans un
atelier par exemple, en jouant tant sur la forme du local (notamment les angles de ses parois) et
les types et la composition de matériaux des parois (absorbants, isolant ou réfléchissant).
Les polluants de l’air intérieur sont nombreux. Ils peuvent être de nature chimique, physique ou
biologique, et peuvent être listés comme suit :
- La vapeur d’eau est présente non seulement dans les pièces humides de type salle-de-
bain, mais aussi dans tous les locaux occupés ; l’une des sources importantes de
production de vapeur dans un intérieur étant le corps humain. Ce dernier rejette jusqu’à
2,5L d’eau dans l’air ambiant en 12h. Un niveau d’humidité trop élevé conduit à la
prolifération d’acariens, de bactéries et de moisissures, sources de fortes toxicités. Un
trop faible taux d'humidité entraine un desséchement des muqueuses, l’augmentation
des symptômes des maladies respiratoires (asthme), et favorise les éruptions cutanées.
- Les moisissures apparaissent sur le bois, les cloisons sèches, telles que les plaques
de plâtre, les meubles rembourrés, le tissu, le carrelage, et les systèmes de ventilation.
Elles peuvent affecter la santé des occupants.
- Les acariens sont présents dans tous les milieux et sont inoffensifs, mais leurs
excréments sont allergènes.
- Le CO2, produit du métabolisme cellulaire, est naturellement émis par la respiration des
êtres vivants. L'homme au repos en exhale un volume moyen de 200 ml par minute. A
partir de 1 000 ppm, le CO2 devient nocif pour l’organisme.
Pour caractériser un bruit par une seule valeur, on additionne les niveaux de chaque bande d’octave, corrigés en fonction de la sensibilité variable de
l’oreille entre les sons graves et aigus. On obtient ainsi un niveau de bruit global exprimé en dB(A). Les décibels sont des valeurs logarithmiques, ils ne
peuvent donc pas être directement additionnés ou soustraits.
5
On distingue le bruit aérien extérieur et intérieur, le bruit de choc, le bruit d’équipement, la réverbération et le bruit de voisinage.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 15
- Les composés organiques volatils sont des molécules composées d’atomes de
carbone et d’hydrogène, se trouvant sous forme gazeuse dans l'atmosphère. Ils
résultent de produits manufacturés tels les solvants, les produits imbrulés ou raffinés, et
de l’émission de certaines plantes. Ils sont plus ou moins biodégradables par les
bactéries et champignons, les UV et les plantes et sont nocifs pour les personnes
fragiles et les asthmatiques.
- D’autres gaz peuvent également être présents, tel le radon ou le monoxyde de carbone.
Les sources de pollution sont multiples: l’air extérieur, certains matériaux de construction, les
appareils à combustion, les équipements, l'ameublement, les produits d’entretien et de
bricolage, l’activité humaine (cuisine, etc.), le tabagisme, les bio-contaminants (poussière de
maison, allergènes des acariens et du chat), etc… Il importe donc de veiller à la qualité de l’air
intérieur en éliminant les sources de pollution potentielles et en disposant d’un système de
renouvellement d’air performant.
Les valeurs minimum de renouvellement tablent sur un apport d’air neuf de 90m³/h par
personne. Ce chiffre doit être adapté aux types de locaux – on parle de locaux secs pour les
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 16
pièces de vie, et de locaux humides pour les sanitaires, cuisines, salle-de-bains – et leurs
fonctions. Ainsi le renouvellement d’air attendu sera de 2 volumes par heure pour un bureau et
pourra aller jusqu’à 4,8 volumes par heure pour une salle de classe.
Un renouvellement d’air par simple ouverture des fenêtres n’est pas efficace dans la mesure où
il dépend du bon vouloir des occupants, qu’il est impermanent et qu’il entraine des débits d’air
neufs parfois importants.
La saison sèche durant laquelle on observe des températures plus basses et des
précipitations quasiment nulles. Elle dure d’autant plus longtemps que l’on s’éloigne
de l’équateur.
- Le climat équatorial est caractérisé par une seule saison avec des précipitations
fréquentes et importantes dont les intensités sont les plus élevées aux équinoxes de
mars et de septembre. Les températures moyennes sont de 27°C et la pression
atmosphérique est toujours basse.
Les températures élevées, combinées à une humidité forte, sont sources d’inconfort. Une
ventilation permettant le refroidissement du corps par convection et par évaporation est
essentielle pour obtenir une sensation de confort satisfaisante.
Les nuits, souvent étouffantes, ne contrebalancent pas les chaleurs diurnes. Même les
bâtiments aux parois légères correctement conçus libèrent de la chaleur, ce qui fait que les
températures intérieures sont souvent plus élevées que les températures extérieures. Minimiser
l’inconfort durant la nuit est dès lors d’une extrême importance.
- Le climat aride est caractéristique des régions désertiques comme le Sahara. Les
températures y sont élevées, encore plus que dans un climat tropical. Les différences de
température entre le jour et la nuit sont importantes. Les journées sont invariablement
chaudes. Ces températures élevées sont accompagnées d’une humidité faible à
modérée, les brises légères sont suffisantes pour éviter la sensation de moiteur sur la
peau. La faible humidité durant les heures les plus chaudes atténue la sensation
d’inconfort et les larges variations de température entre le jour et la nuit permettent
d’avoir des nuits agréables. Les vents sont généralement faibles bien qu’à certains
endroits particuliers, ils puissent être plus violents.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 18
- Le climat semi-aride ou climat de steppe est caractérisé par une saison sèche la
majeure partie de l’année et par une saison humide. Les précipitations sont faibles et
réparties inégalement dans l’année. Il est donc globalement plus humide que le climat
aride et ses pics de température sont plus faibles. L’écart de température entre le jour et
la nuit y est aussi moins important. Le confort nocturne varie beaucoup au cours de
l’année. Les nuits sont souvent inconfortables et chaudes dans les bâtiments. Durant la
saison des pluies, les nuits peuvent à l’inverse être fraîches.
Dans les deux cas, au plus fort de la période chaude, la chaleur des journées impose des
restrictions sur les activités exercées à l’extérieur. Les bâtiments doivent être conçus de
manière à ce que les températures intérieures soient basses durant le jour et doivent être
aménagés avec des espaces extérieurs ombragés où les habitants peuvent vaquer à leurs
occupations.
Choix du site
Le choix du lieu d’implantation d’un bâtiment public dans une localité spécifique est du ressort
des décideurs institutionnels et politiques. Quant à la sélection du site proprement dit, il
appartient à l’autorité locale, au maître d’ouvrage et au futur bénéficiaire.
Il est de la responsabilité du concepteur de projet de vérifier la pertinence de ce choix en
veillant à ce que le terrain réponde à une série de critères, telle que l’accessibilité ou la
facilité de raccordement aux réseaux (eau, électricité, égouts). Il faut également que la
topographie et la géologie du sol soient compatibles avec la construction d’un bâtiment (au-delà
de la résistance du sol, un point d’attention sera la présence de sel, corrosif pour les murs). Une
attention particulière sera portée à la salubrité du terrain, aux risques d’érosion ou d’inondation
en saison des pluies. Ainsi par exemple, les oueds ou wadis dans les pays arabes du pourtour
méditerrannéen, ces lits de rivières secs la majeure partie de l’année, sont à proscrire.
La course du soleil
Les apports de chaleur dans un bâtiment sont fortement dépendant de l’orientation de ce
dernier par rapport à la trajectoire du soleil. Il s’agit d’un facteur clé dans les climats chauds.
Les toitures étant les plus exposées au rayonnement, il convient de les isoler, de les ombrager
ou encore d’utiliser leur masse thermique pour amortir le transfert calorique qu’il sera possible
de rejeter ensuite par une ventilation appropriée.
L’angle d’incidence de l’ensoleillement est plus important à l’ouest et à l’est qu’au sud et au
nord, et donc, les rayons plus pénétrants. C’est pourquoi l’orientation la plus favorable dans
les pays chauds se trouve le long de l’axe est-ouest. Cela signifie que pour un bâtiment
rectangulaire, les côtés les plus longs doivent faire face au nord et au sud. Le nord n’est
pratiquement pas exposé, il est donc peu soumis aux apports de chaleur. L’exposition sud peut
être facilement maitrisée, le soleil étant au zénith, grâce à un débord de toiture ou un porte-à-
faux.
Afin de se prémunir des rayons chauds venant de l’ouest, certaines écoles construites par la
CTB au Cambodge disposent d’un auvent sur la partie ouest afin de protéger le pignon d’une
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 21
trop forte exposition. A contrario, l’exposition est des écoles en Palestine est privilégiée, en ce
qu’elle apporte le matin, quand les élèves sont en classe, la lumière et la chaleur naturelle
nécessaires durant les mois d’hiver.
Le pignon ouest de cette école construite au Cambodge par la CTB est protégé par un auvent servant
d’espace récréatif pour les enfants. La façade sud est protégée par une toiture largement débordante.
Des bouches de ventilation hautes et basses sont également présentes.
En fonction de son orientation, les ombres créées par le bâtiment peuvent également fournir
d’agréables espaces extérieurs, dont il conviendra de tenir compte dans le choix de l’orientation
et l’organisation des espaces intérieurs et extérieurs.
L’ombre portée des bâtiments limitrophes est à prendre en compte ainsi que le couvert végétal.
Les arbres peuvent utilement apporter de l’ombre à l’édifice et rafraichir l’air qui sera ensuite
introduit dans le bâtiment.
L’exposition aux vents
Face aux vents dominants, deux stratégies sont possibles, s’exposer ou se protéger.
Une exposition des façades principales aux vents dominants favorise la ventilation naturelle
quand le dispositif est accompagné de bouches de ventilation de façon transversale. Pour
donner sens à une telle stratégie, il conviendra d’implanter le bâtiment dans une zone à bonne
potentialité de vent, soit au voisinage du sommet d’une déclivité topographique, ou encore entre
2 obstacles en créant un « effet venturi ». A contrario, un creux entre 2 collines, ou un
positionnement arrière d’un obstacle important (bâtiment, relief) est à éviter. Idéalement la
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 22
distance devrait être de 12 fois la hauteur de l’obstacle dans le sens du vent et de 4 fois celle-ci
perpendiculairement au sens du vent.
Il peut être également possible de tirer profit des déviations de vent occasionnées par les
obstacles, bâtiments, relief, végétation... Cette dernière peut en effet contribuer tant à se
protéger du vent, qu’à le diriger à son avantage, pourvu que le massif végétal soit suffisamment
large, haut et bien positionné.
Ces principes, porté à l’échelle urbaine ont des implications diverses. Ainsi la ville de Tel Aviv
n’a pas su profiter de la brise venant du large, faute de n’avoir pas suffisamment placé d’axes
routiers perpendiculairement à la côte. A contrario, la conception du plan de la nouvelle ville
durable de Masdar, à Abu Dhabi a pleinement tiré parti de la modélisation des vents pour
développer un concept de petites ruelles de maximum 100m de long afin d’éviter que l’air chaud
en provenance du désert ne s’y engouffre.
Une étude poussée des vents a largement influencé la conception urbanistique de la ville nouvelle
Masdar à Abu Dhabi. Plutôt que de grands axes de circulation, la parti urbanistique a adopté le principe
de petites ruelles évitant à l’air chaud de s’y engouffrer
Certaines fonctions peuvent tolérer des chocs thermiques, comme les garages, les zones de
stockage, les buanderies, les sanitaires ou les couloirs. Ils peuvent dès lors servir d’espace
tampon pour les pièces plus nobles et occuper les zones les moins propices. Certains locaux,
6
Oxford services designed by Robert Bray
7
Sustainable Urban Drainage Systems, Cristiano Poleto and Rutinéia Tassi, Federal University of Technology - Paraná (UTFPR), Federal University of
Santa Maria (UFSM), Brazil, 2012
8
Ainsi, la température en ville est en moyenne supérieure de 10°C à celle observée dans les campagnes limitrophes
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 24
utilisés de façon exceptionnelles peuvent également s’établir sur les façades les moins bien
exposées, laissant aux pièces de vie continuellement occupées les zones les plus confortables.
Il est également intéressant de regrouper les pièces d’eau, comme la cuisine et la salle de bain,
de manière à minimiser la longueur des conduites d’eau chaude et par la même occasion, les
pertes de chaleur.
9
Le coefficient de transmission thermique est l'inverse de la résistance thermique totale (RT) de la paroi. U = 1 / RT > U (ou k) s'exprime en W/m²K.
Plus sa valeur est faible et plus la construction sera isolée.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 26
Figure 9 : Niveau d'isolation exprimée en valeur U
D’autres éléments caractérisent un matériau isolant : sa disponibilité sur le marché local, son
coût, son degré de toxicité tant à la pose qu’une fois installé, son inflammabilité, sa résistance
mécanique, l’énergie nécessaire à sa production, son imperméabilité à l’eau et son étanchéité à
l’air…Ces éléments sont également à prendre en compte lors de la sélection des divers
isolants, ceux-ci étant souvent différents selon qu’il s’agisse de l’isolation du sol, d’un mur ou
d’une toiture. Il importe en effet d’isoler toutes les parois, toute partie non isolée conduisant à
des déperditions importantes. Des normes de plus en plus restrictives sont désormais
d’application en Europe en matière de transmission thermique des différentes parois d’un
immeuble.
Se pose ensuite la question de la position de l’isolant, ce dernier pouvant être placé soit du côté
intérieur, soit du côté extérieur de la paroi. Le choix de l’une ou l’autre position est déterminé
par:
- L’usage ou non de la masse thermique de la paroi (voir plus bas) ;
- La gestion des risques de ponts thermiques ;
Ainsi, aujourd’hui, une paroi est généralement composée de cinq couches au minimum : la
finition intérieure, le mur porteur (ou un système de colonnes et d’un mur de remplissage), un
isolant, souvent complété d’un pare-vapeur, un vide d’air pour collecter l’eau de point de rosée
et le parement (briques, bois, ardoises…). Si l’emploi de telles techniques de construction est
devenu une évidence depuis plusieurs années dans les régions tempérées et froides, la
recherche d’économie d’énergie des systèmes mécaniques de refroidissement plaide pour leur
emploi également dans les régions chaudes, quitte à adapter le système aux contraintes
locales.
Placer l’isolant du côté intérieur requiert la pose d’une couche de finition telle qu’une plaque de
plâtre, ainsi que d’un pare-vapeur. Il se conçoit si l’emploi de l’inertie thermique du mur n’est
pas recherché.
Si l’emploi de l’isolant dans les pays du sud reste encore l’exception, la promotion de
murs creux pourrait être une première étape utile. En effet, disposer d’un deuxième mur
de parement séparé d’un vide ventilé permet d’absorber une grande partie de la chaleur
induite par les rayons solaires.
Inertie thermique
La masse ou l’inertie thermique est la capacité d’un matériau à absorber la chaleur. Une grande
quantité d’énergie est requise pour changer la température de matériaux aussi denses que la
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 28
brique ou le béton. A l’opposé, des matériaux légers comme le bois, ont une faible masse
thermique.
Un tel procédé est à exclure dans des climats chauds et humides où la variation de
température entre le jour et la nuit est faible. L’emploi de matériaux lourds à fortes inerties
thermiques exposés au soleil la journée rendrait les nuits encore plus inconfortables. Il est
indispensable dans ce type de climat d’utiliser des solutions à très faible inertie, comme
le bois, comprenant une forte ventilation. La circulation d’air apparait donc comme le facteur
essentiel permettant de diminuer l’inconfort résultant de ce type de climat.
Dans le calcul des calories à évacuer, toutes les sources de chaleurs doivent être considérées,
non seulement l’apport des rayons directs du soleil sur les parois et les fenêtres, mais
également les sources internes, comme la production de chaleur d’un réseau informatique ou
des usagers. Pour rappel, les gains calorifiques internes sont de l’ordre de 100W par occupant,
ou +/- 10W/m² dans les bureaux, de 4W/m² par 100 Lux de lumière artificielle, et de 400W par
ordinateur ou +/- 40W/m² en moyenne par bureau. Il conviendra dès lors de développer des
mesures spécifiques dans les bureaux par exemple.
10
En Belgique, l’ensemble fenêtre devra respecter la réglementation PEB et présenter une valeur Uw inférieure à 2,5 W/m²K. De plus, le coefficient de
transmission thermique du vitrage (Ug ) ne pourra pas excéder 1,6 W/m²K; cette valeur Ug est la valeur U centrale du vitrage en position verticale. On
veillera également à ce que le châssis (à multiples frappes) ne présente pas de ponts thermiques tant au niveau de son espaceur que de sa mise en
œuvre.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 31
Répartition de l’énergie transmise par le soleil au Transmission par radiation et convection au travers
travers d’un simple vitrage d’un double vitrage
Le choix d’un châssis doit tenir compte de son impact environnemental (selon le matériau
utilisé, le châssis participera plus ou moins à l’épuisement des ressources, sera plus ou moins
recyclable, etc.) et de sa propre performance thermique. Les châssis en bois et en aluminium à
plusieurs frappes constituent en général le meilleurs compromis.
Forme et position des baies vitrées
Afin d’optimiser l’apport de lumière naturelle tout en maitrisant les inconvénients, la baie vitrée
doit être conçue suivant une stratégie en 5 actes : capter, transmettre, distribuer, se protéger et
contrôler.
Capter
La surface, les dimensions et la position d’une baie vitrée entrent en ligne de compte dans
l’apport de lumière naturelle, suivant la latitude, la période du jour et de l’année, l’orientation,
ainsi que le niveau d’ombrage et de réflexion de l’environnement extérieur11. Compte-tenu de
l’ensemble de ces paramètres, il serait difficile d’établir des règles universelles.
Alors que l’on privilégie de grandes surfaces vitrées orientées sud dans les pays froids afin de
tirer profit des gains calorifiques en hiver, on favorisera dans les climats chauds la
multiplication de petites baies, dont l’occultation est plus facile, tout en évitant les
fenêtres plein sud, à moins qu’elle ne soient ombragées.
Transmettre
Le niveau de transmission d’une fenêtre est défini par le degré de pénétration de la lumière à
l’intérieur d’un local. Celui-ci dépend des caractéristiques de ses matériaux constitutifs et de la
baie, dont l’inclinaison, l’orientation, la configuration et les dimensions de l’ouverture. Il sera
également influencé par la dimension de la pièce, l’aménagement intérieur et le niveau de
réflexion des matériaux qui la constitue.
11
Si le degré de réflexion de la terre n’est que de 0,22, et celui du béton de 0,35, celui d’un plan d’eau sera de 0,7, alors que celui de la neige atteint
0,9.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 32
Ainsi, à surface égale, une fenêtre horizontale placée en hauteur assurera un meilleur
niveau d’éclairage et une meilleure pénétration dans le local qu’une fenêtre verticale
disposée au bas du mur.
Distribuer
La distribution de la lumière naturelle dans un local peut être diffuse ou focalisée. Pour un bon
confort visuel, il importe d’éviter un trop fort contraste en privilégiant une bonne répartition du
niveau d’éclairement sur toute la pièce.
Une prise de jour en façade induit une forte variation
quantitative de l’éclairement. Il importe dès lors de bien
répartir les ouvertures et de veiller à ne pas multiplier les
obstacles pour laisser pénétrer la lumière même dans les
zones les plus reculées du local.
Une prise de jour en toiture permet d’uniformiser l’éclairement.
Elle est 3 à 5 fois plus performante qu’une prise de jour en
façade, pour une même surface et un vitrage de même type.
On peut aussi améliorer les performances par l’emploi de
dispositifs complémentaires via des bandeaux et des
mécanismes de réflexion de la lumière.
Dans les pays chauds et secs, la disposition des pièces autour
d’un atrium sera une bonne stratégie non seulement pour
apporter de l’air frais mais également de la lumière au milieu
du bâtiment.
Figure 15 : Diffusion de la lumière
Source: L’éclairage naturel, stratégies et prédétermination, S. Balez, 2007
Se protéger et contrôler
Afin de maitriser en toutes saisons la pénétration des rayons solaires au travers des baies, les
éléments tant intérieurs qu’extérieurs pouvant les protéger du soleil doivent être étudiées avec
soin. On parlera de système de protection, lorsque le système est externe et fixe ou de système
de contrôle lorsque ces derniers sont amovibles ou orientables, qu’ils soient positionnés à
l’intérieur ou à l’extérieur. Des systèmes de contrôle solaires intérieurs, les volets et rideaux
sont les plus courants.
Figure 17: Principes de protection des baies des rayons solaires fixes
Le brise-soleil est un moyen efficace de protection des fenêtres. Il s’agit d’un système de
protection rigide placé en haut de la fenêtre ou latéralement. Il consiste le plus souvent en des
panneaux pleins, orientables ou non, dont la profondeur est inversement proportionnelle au
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 34
nombre de panneaux disposés horizontalement ou verticalement au-dessus ou devant la
fenêtre.
Les brise-soleils peuvent aussi couvrir l’ensemble de la façade et être utilisés comme moyen
d’expression architectural. Le Corbusier fut le premier à en faire un élément du langage de
l’architecture moderne au début du siècle dernier.
Quelle que soit l’expression architecturale retenue, sa conception doit être correctement
étudiée, notamment en fonction de l’orientation et des vues. Ainsi des panneaux placés
verticalement permettront de limiter l’impact d’un ensoleillement latéral et de la forte
inclinaison du soleil du matin ou du soir. Une dalle positionnée au-dessus de la fenêtre
est plus efficace pour une orientation sud. Elle doit idéalement être disposée au plus près du
linteau afin que son ombre portée couvre la plus grande partie du vitrage, sa largeur devant être
définie en fonction de la hauteur de fenêtre à couvrir.
Figure 18 : Etude de différents types de façades avec brise-soleils appropriés pour Bangkok
Source : http://urbanalyse.com/research/brise-soleil-study-2/
Comme l’illustre la Figure 19, une étude faite dans le cadre d’un projet de construction d’écoles
en Palestine pour la CTB, a permis de définir l’impact du système de brise-soleil retenu sur le
niveau d’éclairement à l’intérieur du bâtiment. L’objectif est de garder un niveau le plus diffus et
constant possible pour à la fois se passer d’éclairage artificiel et éviter un contraste trop
important entre la partie du local située à proximité des fenêtres de la partie la plus éloignée.
La toiture
La toiture, qu’elle soit plate ou inclinée, absorbe une grande quantité de calories provenant des
rayons solaires. Pour limiter tout risque de surchauffe, différentes alternatives sont
envisageables, certaines étant compatibles l’une avec l’autre.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 36
Figure 20 : Système de toiture ventilée avec bouche de sortie en point haut appliqué dans une école en
Afghanistan, GIZ, 2010
- L’ombre portée sur la toiture est un premier atout. Ainsi, la pose de panneaux solaires
sur la toiture contribuera à limiter la transmission thermique vers l’intérieur du bâtiment,
de même qu’un auvent, voire une simple bâche, posée au-dessus d’une toiture plate ;
- La couleur des matériaux est un autre facteur important. Les couleurs claires
réfléchissantes sont à privilégier par rapport aux couleurs sombres plus absorbantes.
Dans cet esprit, le rouge foncé, le vert foncé, le bleu vif ou même le gris clair sont à
proscrire ;
- Le choix du matériau est déterminant, la tôle métallique ondulée étant à éviter. Elle agit
comme un véritable radiateur solaire, alors qu’en cas de pluie, elle produit un bruit
assourdissant. La tuile de ciment ou de terre cuite dispose de meilleures qualités
isolantes et d’inertie thermique ;
- La pose d’un isolant, aussi minime soit-elle, sous la toiture est salutaire. On parlera de
« toiture chaude » quand la couche d’étanchéité est située directement au-dessus de la
couche d’isolation et de « toiture froide » quand une couche d’air est placée entre
l’isolation et la finition de toiture. On parlera également de « toiture inversée » quand
l’isolation surmonte la finition de toiture. Chaque option dispose d’avantages et
d’inconvénients qu’il conviendra d’étudier en fonction du contexte ;
- La ventilation est une stratégie complémentaire importante, notamment lors de l’emploi
de matériaux dont l’inertie thermique est conséquente. Un courant d'air sous la toiture
permet d’évacuer l'air chaud accumulé. Pour être efficace, des entrées d’air doivent être
réparties uniformément sur tout le périmètre de la toiture, la surface de ventilation
devant être supérieure à 15% de la surface de toiture. On veillera à la protection latérale
contre la pluie et l’intrusion des nuisibles, tels que chauves-souris et rongeurs. Ce
mécanisme peut être renforcé par une prise d’air en point haut de la toiture, à l’image de
ce qui fut expérimenté pour des écoles en Afghanistan (voir Figure 20). Une alternative
sera de créer une ouverture continue au niveau du faux-plafond, comme expérimenté
dans une école technique en Ouganda appuyée par la CTB. L’air chaud et vicié de la
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 37
pièce va ainsi pénétrer dans la sous toiture plus chaude, puis sera extrait par les
ouvertures pratiquées au point haut de la toiture (Figure 21).
Schéma de principe de faux-plafond ventilé connecté à la pièce de vie dans le cadre d’un projet
de rénovation de la CTB d‘une école professionnelle en Ouganda
2.2.3 La ventilation
La ventilation naturelle
La ventilation naturelle est la source de rafraichissement la plus efficiente d’un point de vue
énergétique et la plus facile à réaliser. Elle est déterminée par la différence de température
et de pression entre l’intérieur et l’extérieur d’un local, ainsi que par la différence de
Figure 23 : Système de ventilation basé sur la masse thermique, la ventilation naturelle et les variations de
température entre le jour et la nuit
La position des lames d’une fenêtre influe Un espace libre entre le brise soleil et la paroi
directement sur l’orientation du flux d’air pousse le flux d’air vers le bas
Un brise-soleil continu placé au droit de la baie Un brise-soleil fait de lamelles élargit l’amplitude
pousse l’air vers le haut du local du flux d’air
La ventilation peut être ainsi assurée au travers des portes et fenêtres par l’intermédiaire de
lamelles. Ce principe a été expérimenté par un projet de la CTB au Cambodge. Ce dernier a
développé un système de portes et fenêtres métalliques à lamelles (orientables pour les
fenêtres) qui maximalisent la ventilation. Ce système garantit une ventilation permanente ; la
différence de température entre le jour et la nuit n’étant pas suffisante pour profiter de la masse
thermique du bâtiment et évacuer les calories durant la nuit. Les ouvertures sont protégées de
la pluie par une toiture largement débordante et des intrusions par des grilles.
Un système de claustras fixes est une autre option, à condition que les ouvertures soient
suffisamment bien conçues pour ne pas être un obstacle au mouvement d’air. Le design du
claustra doit maximiser le passage de l’air tout en assurant une bonne protection contre les
pluies et les intrusions tant de voleurs que de nuisibles (insectes et rongeurs).
C’est ainsi qu’un système de double portes a été imaginé pour un projet d’école professionnelle
en Ouganda financé par la CTB en 2014. Les salles de classes disposent à la fois d’une porte
massive en bois placée du côté extérieur et d’une porte grillagée disposant de moustiquaire
coté intérieur. Cette dernière assure la sécurité du local pendant la nuit alors que la porte
extérieure reste ouverte. En matinée la porte extérieure est fermée, préservant ainsi la fraicheur
à l’intérieur du local. Une fois que la température intérieure atteint celle de l’extérieur à la mi-
journée, il conviendra d’ouvrir à nouveau toutes les baies.
Figure 28 : Variation de la température dans les premiers mètre de profondeur du sol à Jérusalem
Source : Transsolar, BTC-Palestine, 2012
Le puits provençal est composé de quatre éléments : (i) l’entrée d'air neuf, (ii) le conduit, (iii) le
système d'évacuation des condensats et (iv) la bouche de sortie d’air. Sa conception dépend
des facteurs suivants :
La conductivité thermique d’un sol dépend non seulement de sa composition mais également
de la disposition et de la forme de ses particules constitutives, des liaisons entre ses particules
et de la teneur en eau. Le sol sera d’autant plus conducteur qu’il sera humide. La conductivité
thermique d’un sol peut donc varier dans le temps.
La capacité calorifique (Cs) d’un sol s’exprime par la moyenne pondérée des capacités
calorifiques de ses constituants : minéraux, matière organique, eau et air, où χi, ρi, Ci
représentent respectivement la teneur du matériau (m³ de matériau/m³ de sol), sa masse
volumique et sa capacité calorifique. Comme l’eau et la matière organique ont une capacité
12
Logiciel téléchargeable sur le site http://nesa1.uni-siegen.de
13
Logiciel téléchargeable sur le site http://www.izuba.fr/telechargement.htm
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 45
calorifique supérieure à celle des minéraux, un sol humide et riche en matière organique
stockera mieux la chaleur qu’un sol sec, riche en minéraux.
A priori il conviendra donc d'installer un puits dans un sol argilo-marneux ou argilo-
sableux humide plutôt que dans un sol sablonneux sec.
La conception des différents constituants doit tenir compte des éléments suivants :
L’entrée d’air
L’entrée d’air sera implantée loin des sources de pollution (voirie, parking, poubelles) et loin de
toute végétation pouvant produire des pollens allergisants.
Il s’agira d’une simple bouche extérieure ou d’un plénum, suivant la taille du bâtiment desservi.
La hauteur de la bouche sera supérieure à 1,1m pour éviter l’encrassement. Elle sera munie
d’un chapeau pour la protéger de la pluie ainsi que d’une grille à fin maillage pour éviter
l'intrusion de rongeurs, oiseaux et insectes. Elle doit être facilement accessible pour le
nettoyage. La pose d’un filtre est nécessaire pour limiter l’encrassement par les poussières. Il
est recommandé d'inspecter et de changer régulièrement ces filtres.
Le conduit
Le conduit du puits peut être constitué d'un simple tube posé en méandre ou en boucle autour
du bâtiment ou être organisé sous la forme d'un réseau de tubes parallèles installés entre des
collecteurs afin d'augmenter le débit d'air circulant dans le puits (boucle de Tichelmann). Afin de
minimiser les pertes de charge au sein du conduit et de faciliter l’entretien, le nombre de coudes
sera limité.
La longueur de chaque tube est de l'ordre de 30 à 50 m afin de limiter les pertes de charge. La
longueur totale du conduit est calculée en fonction du débit d'air souhaité, de la nature du sol,
de la zone géographique et du climat ainsi que du type d'installation choisie.
Pour optimiser les transferts thermiques sol/air, la vitesse de l'air au sein du puits doit être
comprise entre 1 et 3 m/s. Le diamètre du conduit sera calculé en fonction des conditions de
vitesse requises. Mais il ne peut pas être trop important afin de faciliter les échanges
thermiques. A flux égal, il est préférable d'employer plusieurs tuyaux de petit diamètre qu'un
seul gros tuyau afin d’augmenter la surface d'échange thermique. La moyenne tourne autour
d’une quinzaine de centimètres de diamètre. Les tuyaux devront être le plus possible séparés
les uns des autres, en privilégiant un espacement supérieur à 3 fois le diamètre des tubes, avec
un minimum de 1m.
La profondeur préconisée d’enfouissement est comprise entre 1,5 et 3 m. Au-delà de cette
profondeur les contraintes de terrassement et de pose deviennent particulièrement aiguës.
Le passage de l’air ambiant plus ou moins humide dans le réseau peut conduire à la
condensation de vapeur d'eau sur les parois intérieures qui favorise le développement de
germes et de bactéries. Afin de faciliter l'évacuation de ces condensats, le réseau sera pourvu
d’une pente comprise entre 1 et 3%, idéalement placée dans le sens du passage de l’air.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 46
Le système d'évacuation des condensats peut se faire au niveau du sous-sol du bâtiment ou
par un regard de visite placé à l'endroit le plus bas du puits. L’évacuation peut se faire soit par
infiltration dans le sol à l'aide d'un lit de cailloux, soit en utilisant une pompe de relevage. Le
regard permet également l’inspection et l’entretien.
Le choix du matériau a une influence directe sur les échanges thermiques sol/puits. L’utilisation
de matériaux à conductivité thermique élevée permet d'augmenter les échanges et ainsi de
réduire la longueur du puits. Ils doivent également avoir une bonne tenue à l'enfouissement
(une classe de rigidité minimale de 8 kN/m² est conseillée). Les tubes sont généralement en
polyéthylène (PE), en polypropylène (PP) souple ou rigide ou en Polychlorure de vinyle (PVC).
Ce dernier, s’il est moins cher, n’est pas très écologique et peut dégager des vapeurs nocives
dues au mode de fabrication. Il n’est donc pas conseillé.
L’institut Provincial de Formation Continuée de Nivelles est la première école « passive » construite en
Wallonie en 2008. Il dispose de brise-soleils sur les façades sud et ouest, d’une isolation d’une
épaisseur de 23cm et d’un puits canadien.
Figure 30 : Schémas de ventilation d’une école à Nivelles basé sur le principe du puits canadien
Source : La Maison Passive, 2008
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 47
Il sera aussi possible d’utiliser des tuyaux en terre cuite de 150 à 300 mm de diamètre. La
conductivité de la terre cuite étant plus élevée que celle du plastique, l’échange thermique est
plus important. Le principal inconvénient de cette option est l’exigence d’une mise en œuvre
soignée. Les condensats sont quasi inexistants avec ces tubes, ils évitent donc les bactéries
pathogènes et les moisissures.
L’étanchéité du réseau est indispensable pour empêcher la pénétration de racines ainsi que les
phénomènes d'infiltration d'eau et de radon au sein du conduit14.
Un traitement est recommandé pour freiner la prolifération microbienne, source de mauvaise
odeur et de dégradation de la qualité de l'air intérieur15. L’entretien du puits doit être au moins
annuel.
La bouche de sortie d’air
La bouche d’arrivée d’air peut être couplée à un ventilateur afin d’accélérer la circulation de
l’air. Elle sera au minimum munie d’un système d’occultation afin de fermer le système à mi
saison, quand la température ambiante est de 20 à 24°C.
La ventilation à tirage
La cheminée solaire
La cheminée solaire est un système passif sans apport d’énergie extérieur faisant appel
à l’énergie solaire pour ventiler naturellement l’immeuble et extraire l’air vicié et chaud
en provoquant une poussée induite d’un mouvement d’air. Le mécanisme se base à la
fois sur le principe de stratification de l’air et l’effet de cheminée. Ce dernier est accéléré par un
accroissement de chaleur au sein du tube de cheminée via l’énergie solaire. Celle-ci est utilisée
pour accroitre la vitesse de succion de l’air dans le conduit en créant un appel d'air. La partie
émergeante de la cheminée est pourvue d’une fenêtre exposée au sud, dont la partie opposée
à l’intérieur du tube aura été peinte en noir afin de mieux absorber les calories.
Les principaux avantages de la cheminée solaire sont: (i) un taux de ventilation amélioré les
jours de canicule sans vent ; (ii) une dépendance du vent réduite pour la ventilation ; (iii) un
contrôle du flux d'air amélioré ; et (iv) un taux de ventilation accru en période nocturne.
La performance de la cheminée et la température de l’air à l’intérieur du conduit sont les
éléments déterminants du mécanisme. Ils sont définis par la hauteur, la profondeur et la largeur
du conduit, le degré d’exposition au soleil, l’inertie thermique des parois de la cheminée et le
niveau de déperdition thermique du conduit, et donc son degré d’isolation.
Les éléments constituants d’une telle cheminée sont :
- La surface de capteur solaire couvre tout le conduit de la cheminée ou au moins sa
partie supérieure. L'orientation, le type de vitrage et son angle de pose, l'isolation et les
14
Une étanchéité des jonctions conforme aux exigences de la norme française NF EN 1277 est recommandée.
15
L’emploi de sel d’argent est par exemple un excellent traitement antimicrobien.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 48
propriétés thermiques du tube sont cruciaux pour exploiter, retenir et utiliser les gains
solaires. Il pourra ainsi être utile d’élargir la baie vitrée tant du côté est que ouest pour
accroitre l’exposition au soleil ;
- Le puits de ventilation définit par la localisation – idéalement placé à l’opposé de
l’arrivée d’air frais – sa hauteur et sa section ;
- Les bouches d’entrées et de sorties d'air, caractérisées par leurs dimensions, leur
emplacement et leur aérodynamisme.
Les études empiriques n’ont pas encore défini le ratio optimal entre la section et la hauteur
d’une cheminée solaire. Il est cependant reconnu qu’accroitre d’un quart sa hauteur augmente
de trois-quarts les gains thermiques. La profondeur de la cheminée est généralement de 25 à
30 cm ; aller au-delà serait contre-productif et réduirait la vitesse de l’air.
Les dimensions de l’entrée d’air jouent également un rôle. Si sa taille augmente avec la largeur
de la cavité, la pression va descendre. Différentes études conseillent de rapprocher le plus
possible la largeur de la bouche d’air de celle du conduit de cheminée. Une largeur optimale de
55cm et une hauteur minimum de 6m sont recommandées.
La taille de la surface absorbant la chaleur est plus importante que le diamètre du conduit de
cheminée. En effet, une grande surface permet un échange de chaleur plus efficace avec l'air
nécessaire pour le réchauffement par rayonnement solaire. Ce réchauffement améliore la
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 49
convection, et donc le flux d'air dans le conduit. La fenêtre d’exposition au soleil sera donc la
plus grande possible. Selon la latitude du bâtiment sur le globe, il pourra être indiqué d’incliner
la partie vitrée pour accroitre la pénétration des rayons. L’expérience de la CTB en Palestine
pousse cependant à la prudence à ce niveau, la partie la plus horizontale de la cheminée étant
source d’infiltration.
Les propriétés du mur opposé à la fenêtre sont également importantes. L’augmentation de sa
largeur favorise la ventilation nocturne puisqu’elle affecte le temps de distribution de la chaleur
et donc l’appel d’air dans la cheminée. Il est impératif d’isoler l’extérieur du mur afin de prévenir
la perte de chaleur. Notons enfin que la bouche de la cheminée doit être du côté opposé
au vent dominant.
Différents technologies passives ont été expérimentées dans cette école pilote, dont des cheminées
solaires qui disposent d’une partie verticale et d’une partie horizontale vitrée.
Figure 32: Cheminées solaires de l’école Wadi Al-Mughair située à Hebron, Hébron, CTB, 2015
Source : Projet Schools IV, CTB-Palestine, 2015
La tour à vent
Les tours à vent sont destinées à "capter" le vent et augmenter sa pression. Selon les
modèles, l'air peut être insufflé et extrait par deux conduits situés dans la même tour où par
deux tours distinctes. Les exemples traditionnels les plus illustres viennent de Perse. L'air issu
d'une tour à vent est capté en hauteur. Il est donc plus frais, moins poussiéreux, mais aussi
moins humide.
Les tours à vent modernes sont généralement pourvues d'écopes auto-orientables vers les
vents dominants. L'énergie éolienne est ainsi utilisée pour accélérer l’appel d’air par effet
Venturi. Lorsque le vent dominant est centré sur un secteur étroit, l’écope est constituée d’une
large section verticale qui va en se rétrécissant légèrement jusqu’à celle du conduit intérieur.
Dans les climats à forte amplitude thermique, utiliser des matériaux à forte inertie pour la
construction du conduit permet de rafraîchir l’air efficacement.
Bien que délaissée suite à l'avènement des matériaux de construction industriels et critiqué
pour sa sensibilité à l'eau ou son manque de durabilité, la terre a suscité un regain d'intérêt
comme matériau de construction ces dernières décennies.
Contrairement au ciment, au béton ou l’acier, la terre à l’état naturel peut être utilisée
comme matériau de construction presque sans dépense d’énergie. Naturel, non toxique
et sans ajout chimique, c’est un matériau sain qui régule l'humidité de l'air et la
température, absorbe les odeurs et ne provoque pas d'allergies. La terre crue est simple
16
La bauge est une technique proche mais qui n’utilise pas de coffrage.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 55
Résistance en 1 à 4 Mpa 0,5 à 6 Mpa 0 à 5 Mpa 0,7 à 5 Mpa
compression humide
Dilatation thermique 0,02 à 0,2% 0 à 0,2% - 0,02 à 0,05%
réversible
Isolation thermique 0,81 à 0,7 à 1,3W/mC 0,4 à 0,8W/mC 1 à 1,7W/mC
1,04W/mC
Masse volumique 1700 à 1400 à 1200 à 1700 à 2200kg/m³
apparente 2200Kg/m³ 2400kg/m³ 1700kg/m³
Tableau 5 : Comparatif d'éléments constructifs en terre avec le bloc de béton
Source : CRATerre EAG, 1995
La durabilité de la terre crue peut être garantie si elle est correctement mise en œuvre et
protégée contre l’humidité ; l’eau de ruissellement et l’humidité ascensionnelle étant
particulièrement néfastes.
Ecole Pilote du Lac Rose, 2010 Hotel Djoloff, Dakar, 2015. Structure en béton et
remplissage de briques de terre crue
Figure 35 : Exemple de bâtiments en terre crue au Sénégal
Source : B. Legrand, 2016
Le pisé
Le pisé est un procédé de construction de murs en terre crue, compactée dans un coffrage en
couches successives, à l’aide d’un pilon. Le pisé s’élève habituellement sur une assise de
galets ou de moellons de pierres. Les parties les plus exposées des murs, angles et
encadrements sont souvent renforcés par des lits de mortier.
La terre-paille
La paille et le typha (plante invasive typique des berges d’étendues d’eau calme, de fossés, de
lacs,…) sont traditionnellement utilisés soit comme revêtement de toiture – la paille est alors
tressée – soit en panneaux ou en bottes pour la construction de cloisons (qui peuvent ensuite
être enduits de chaux ou de terre). Elle peut être aussi découpée et incorporée à la terre en
torchis ou dans des briques moulées. Cet usage est particulièrement intéressant en ce qu’il
augmente les qualités isolantes de la terre.
Les technologies nécessaires à la production de matériaux d'isolation thermique à partir du
typha ont été développées et validées en Europe par l'utilisation du typha (typha latifolia et
typha angustifolia) combiné au ciment. Il s’est révélé être un matériau thermorégulateur et
hygro-régulateur avec de bonnes performances phoniques. Au Sénégal, la valorisation du typha
est depuis 2015 en phase de recherche/développement par un projet du PNUD en collaboration
avec le centre de recherche CRATerre de Grenoble. Le mélange du typha avec de la terre ou
du ciment est étudié pour le développement de produits préfabriqués de type dalles, panneaux
d’isolation, briques et panneaux compressés. Les premiers résultats sont encourageants.
Ce matériau profite des amplitudes thermiques nuit/jour et des faibles transferts thermiques du
matériau. La combinaison de plusieurs éléments de densités différentes supportant la force et la
capacité d'isolation permet de créer des systèmes intégraux de mur et de toit. En particulier, la
combinaison du typha et du ciment offre une conductivité thermique basse [λ~0.05-0.06 W/mK]
et une chaleur spécifique haute [c~1,600 J/kgK].
Ces caractéristiques permettent la création de matériaux d'isolation à la chaleur très efficaces,
pouvant être facilement adaptés aux contraintes spécifiques de la construction par la variation
de leurs proportions relatives dans le matériau final. La combinaison du typha et du ciment ou
de la terre offre donc une bonne protection contre la chaleur dans tous les climats avec des
amplitudes thermiques significatives.
Figure 36: Bâtiments construits avec voûte nubienne: l'école des sables, Toubab Dialao, Sénégal
Source : B. Legrand, 2016
17
AVN a lancé le programme de vulgarisation à grande échelle « pour des Toits de Terre au Sahel » afin de propager ce modèle architectural à
l'ensemble de l'Afrique sahélienne. Fin 2008, AVN avait contribué à la formation d'un réseau de plus de 120 maçons burkinabé, maliens, togolais,
sénégalais qui avaient réalisé plus de 500 voûtes nubiennes au Burkina Faso, Mali, Togo, Sénégal, Guinée et Côte d'Ivoire.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 58
conseillés pour faciliter l’utilisation des toits en terrasse et assurer une meilleure tenue des
finitions terre.
Les murs pignon de fond de voûtes sont composés de grosses briques posées dans leurs
longueurs (plus ou moins 38cm) et sont montés légèrement penchés vers l'intérieur du
bâtiment, avec un fruit de 1 centimètre pour 1 mètre. Les murs de cloisons sont faits de grosses
briques posées dans leur largeur (plus ou moins 20 centimètres).
De nombreuses ouvertures avec linteaux en voûtains de 80cm de large maximum sont
conseillées18.
Une voûte couvre en général un espace de 3,25m sur 12m de long. Des largeurs plus grandes
seront couvertes par une succession de voûtes. La hauteur intérieure varie généralement entre
2,5 et 3,5m. Descendre le sol intérieur d’une vingtaines de centimètres augmente la hauteur
sous plafond tout en accroissant la fraicheur intérieure. La construction de voûtes en étage
(avec escalier intérieur) est possible sous le contrôle d'un maçon expérimenté.
La pose d'une bâche plastique (Faso plast) sous la dernière couche de crépissage est
indispensable. Celle-ci offre une garantie d'étanchéité qui vient compléter celles que donnent
des crépissages d'entretien corrects. La bâche ne doit jamais être laissée à nu sous le soleil et
doit toujours être recouverte de terre de crépissage pour éviter son vieillissement par les UV.
Les crépissages doivent être contrôlés annuellement et obligatoirement entretenus en cas
d'usure. Beaucoup de matériaux peuvent être mélangés à de bonnes terres pour obtenir des
crépissages résistant aux pluies, telles que les eaux de rinçage du néré et du karité, le kapok,
18
On peut laisser 75cm d'ouverture pour 100cm de mur plein dans les murs extérieurs et 75cm d'ouverture pour 80cm de mur plein dans les murs
porteurs intérieurs. Ces ouvertures pourront servir de portes ou être refermées en armoires ou en fenêtres.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 59
les bouses de bœuf, etc. Des enduits de ciment ou de goudron sur les murs et sur la toiture (le
ciment est exclu en toiture) permettront de supprimer les crépissages d'entretien annuels.
Briques pressées en terre crue stabilisée
La technique artisanale de production de briques cuites nécessite de l’ordre de 50m³ de bois au
moins pour la cuisson de quelques 5.000 briques, concourant ainsi à la déforestation. Des
techniques alternatives plus écologiques sont possibles, comme la technique de Blocs de Terre
Stabilisée (BTS).
Elle a été mise au point en 1956 en
Colombie, puis a été perfectionnée par
différentes recherches, notamment en
Thaïlande. Elle fait usage de terre crue à
laquelle une faible quantité d'adjuvant
(chaux ou ciment) est nécessaire ; la
quantité de cet additif (de 4 à 10%) ainsi
que le type d'enduit hydrofuge à appliquer
sur les briques dépendent de la nature de
la terre.
L’ajout de ciment ou de chaux au
matériau initial fait diminuer la teneur en
eau de saturation des matériaux
stabilisés, tout en augmentant le temps
de fin de reprise d’eau lors des essais de
capillarité.
Figure 38: Profil des différents types de brique pressées
Source: Interlocking Compressed Earth Blocks, Vol. II. G. Wheeler, 2005
Les résultats obtenus montrent que l’humidité modifie considérablement les propriétés thermo-
physiques de la terre et que la stabilisation au ciment augmente la résistance du matériau face
aux variations d’humidité. L’influence notable de la masse volumique sur la conductivité
thermique a été également démontrée.
La compressibilité
La compressibilité est le premier facteur à prendre en compte. En général, on recherchera une
granulométrie et une structure continues. Cela signifie que la terre doit contenir suffisamment
de particules inertes (graviers et sables, de 45 à 50%) qui seront liées entre elles par les silts et
l'argile. Il est déconseillé d'utiliser des sols contenant moins de 10% d'argile ou moins de 25%
de silts et d'argiles car il serait impossible d'obtenir une structure dense et cohérente.
Le ciment agit sur les graviers et sables mais moins bien sur les silts ou l'argile. Dès lors, un sol
sableux convient bien pour une stabilisation au ciment. Sur base d'essais, la distribution
optimale de la granulométrie pour une stabilisation au ciment se rapproche de 15% de graviers,
50% de sable, 15% de limon et 20% d’argile19.
La chaux agira également sur les graviers, les sables et les silts mais dans une moindre
mesure en comparaison du ciment. Elle interagit par contre fortement avec l'argile. Elle créé des
liaisons stables entre cette dernière et le sable. Sur base d'essais, la distribution optimale de la
granulométrie pour une stabilisation à la chaux sera de 15% de graviers, 30% de sable, 20% de
limon et 35% d’argile20.
Les proportions mentionnées ci-dessus correspondent à un optimum. Il est rare que des sols
aient de telles proportions à l'état naturel. Il est par contre possible de les améliorer en ajoutant
du sable ou des graviers ou encore en mélangeant différents types de sols.
Les briques pressées requièrent une presse – manuelle ou hydraulique21 – selon la quantité de
briques à produire. Plusieurs profils de briques seront produits suivant leur usage, soit des
briques de renfort, de remplissage ou de coffrage perdu pour linteau ou dalle. Une fois
pressées, les briques sont stockées et mises à sécher en phase humide, sous une bâche,
durant une à trois semaines.
Types de blocs
Les blocs peuvent être fabriqués selon différents types, formes et tailles. Différents modèles
sont conçus pour répondre à des usages particuliers :
- Les blocs pleins peuvent être utilisés pour des structures porteuses allant jusqu'à 3 ou
4 étages. Ils ont généralement une forme rectangulaire mais ils peuvent aussi être
carrés, trapézoïdaux ou polygonaux.
- Les blocs creux peuvent aussi être utilisés dans des structures porteuses mais pour
des bâtiments de moindre hauteur. Ils ont de meilleures propriétés isolantes. Ils existent
sous forme rectangulaire ou carrée.
- Les blocs autobloquants peuvent être pleins ou creux. Les blocs pleins peuvent être
mis en œuvre plus facilement par de la main d'œuvre peu qualifiée. Seuls les blocs
creux seront utilisés en zone sismique car ils peuvent être renforcés avec du béton
armé. Ils sont disponibles sous forme rectangulaire ou carrée.
19
Source: Auroville Earth Institute, Inde
20
Idem
21
Ce type de presse est produit notamment en Afrique du Sud.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 61
- Les blocs spéciaux sont utilisés dans des buts divers : les blocs creux circulaires pour
des colonnes, les blocs à indentation pour permettre le passage de gaines électriques
ou encore les blocs en U pouvant servir de coffrage à béton. Les blocs spéciaux sont
souvent produits par un moule standard avec différents types d'inserts. Ils sont utilisés
dans différentes parties d'un bâtiment.
- Les machines uniques qui nécessitent en général des accessoires périphériques comme
un mélangeur ou un broyeur ;
- Les unités mobiles qui intègrent souvent un mélangeur. Le degré d'intégration des
accessoires comme le broyeur, le convoyeur… augmentera leurs possibilités et leur
coût.
La construction de la cour suprême du Burundi, plus haute juridiction du pays, fut l’occasion de valoriser
la terre auprès des institutions et de la population. Les cloisons intérieures ont en effet été érigées en
blocs de terre comprimée et stabilisée. Elles ont ensuite été recouvertes d’un enduit à la chaux afin de ne
pas altérer leurs propriétés hygrothermiques.
Parallèlement, la ventilation naturelle a été favorisée grâce à la disposition réfléchie d’un ensemble de
fenêtres équipées de vantelles métalliques. Ces vantelles, au même titre que le bardage métallique qui
recouvre la façade, contribuent également à la limitation des apports thermiques du soleil. Enfin, une
étude acoustique poussée a conduit à la mise en œuvre d’un appareillage spécifique des briques,
comme piège à son (voir photo intérieure).
Figure 41: Exemple d’un projet en BTS: La Cour suprême du Burundi, CTB, 2014
Source : Atelier D et Projet Justice, CTB-Burundi, 2014
Cette technique a l'avantage de faire de sérieuses économies de stabilisants, mais elle n'a pas
eu le succès escompté du fait d’une productivité peu élevée, les blocs étant plus complexes à
fabriquer. Une réflexion a dès lors été amorcée dans les années 80 au Maroc pour aboutir à la
conception de l'ado-béton.
La terre cuite
La terre cuite est un matériau ancestral aux qualités unanimement reconnues parmi lesquelles
on peut citer la solidité, la durabilité et l’esthétique. C’est aussi un matériau sain, durable et
respirant, parfaitement stable, proche de la pierre naturelle, qui ne requiert que peu
d’entretien. Pour les pièces dont la température de cuisson n’a pas été parfaitement maitrisée,
une saturation à l’huile de lin pourra être appliquée.
Elle nécessite une cuisson progressive et maîtrisée jusqu’à des températures de 900 à 1.100°C
suivant un processus semi-industriel ou artisanal. D’un point de vue écologique, son emploi
est à proscrire si la brique est issue de fours artisanaux non performants exigeants
beaucoup de bois, et d’autant plus si le bois ne provient pas de forêts éco-gérées. En
outre, les briques issues de fours artisanaux présentent le plus souvent un format irrégulier ainsi
que des propriétés mécaniques variables suivant le degré de cuisson. Un contrôle qualité
exigeant et systématique sera dès lors nécessaire avant leur emploi.
La brique industrielle existe sous deux formes principales :
- La brique cuite pleine de dimensions standards (par exemple : 22x10.5x6.5cm) qui
résiste très bien aux agressions climatiques et est donc généralement utilisée comme
parement extérieur ;
- La brique creuse qui présente l'avantage d'être plus légère et plus isolante. Elle est
principalement utilisée pour les murs porteurs, les murs de remplissage et les cloisons
intérieures.
L’industrialisation de sa production a permis d’accroitre la gamme de produits disponibles et
leurs dimensions. On citera notamment les briques alvéolaires à perforations horizontales ou
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 65
verticales, à joints minces ou épais. Les premières nécessitent l’emploi de mortier-colle, les
secondes un cimentage traditionnel.
Les briques pleines ou perforées ainsi que des plaquettes à coller ou accrocher mécaniquement
peuvent être utilisées pour les murs de parement extérieurs. Leurs propriétés sont variables
suivant les modèles ainsi que leur mise en œuvre, leur résistance mécanique, leur niveau
d’isolation thermique22 et acoustique, leur perméabilité à l’eau et à l’air. Il importe dès lors de
disposer des spécifications techniques des fabricants.
Les briques alvéolaires industrielles disposent de nombreuses qualités : isolation thermique et
phonique accrue, forte inertie, excellente résistance mécanique. Elles sont fabriquées à base
d’argile à forte teneur en carbonate de calcium, sans solvants ni liants. Ces briques ne
contiennent pas de composés organiques volatils. Les alvéoles verticales offrent une plus forte
inertie. Ces briques font en outre preuve de porosité calculée ; des bulles internes se forment à
la cuisson et améliorent les performances thermiques des briques. Elles sont extrêmement
résistantes, il suffit ainsi de 4 poteaux de briques aux angles d’une maison pour supporter la
charpente. Le reste des murs peut ensuite être réalisé selon la volonté du maître d’ouvrage.
La mise en œuvre de ces briques demande un savoir-faire et un matériel spécifiques différents
de la maçonnerie classique23.
Le bois tropical
Le bois est un matériau de construction naturel et renouvelable qui présente une faible
empreinte carbone24, à la fois dans sa transformation et son utilisation. En plus d’offrir de
nombreuses solutions techniques, il peut être réutilisé pour certaines applications et peut aussi
être facilement recyclé. Il occupe donc par nature une place importante dans une construction
dite durable et ce, d’autant plus s’il est issu d’une gestion forestière responsable, c’est-à-dire
‘respectueuse des hommes et de l’environnement’.
Penser qu’éviter d’utiliser du bois tropical permet de sauver les forêts tropicales peut être
contreproductif. Son utilisation, lorsqu’il est certifié FSC25, par exemple, permet au contraire de
donner une réelle valeur à la forêt, de stimuler sa gestion de façon durable et donc la
conservation de l'écosystème tout en offrant de nombreux avantages socio-économiques aux
communautés locales.
L’emploi du bois tropical comme parement extérieur convient particulièrement en milieu
équatorial où la masse thermique du mur n’est pas un élément déterminant, à la différence
de la protection solaire et la ventilation naturelle.
22
Le niveau d’isolation des briques varient entre 0,5 et 1 m².K/W.
23
Le premier rang de briques est posé de façon traditionnelle, sur un lit de mortier et mis à niveau à l’aide d’un maillet en caoutchouc. L’assemblage
des briques entre elles se fait par un joint mince (1 mm) réalisé avec un mortier-colle spécial. Les briques des rangs suivant sont ensuite assemblées à
joint décalé. La finesse des joints va réduire considérablement les ponts thermiques.
24
Un arbre mature séquestre en moyenne 7 tonnes de CO2, alors que sa valorisation en matériau de construction, transport compris, induit peu de
gaz à effets de serre. Le bilan CO2 est donc globalement positif.
25
Le Forest Stewardship Council (FSC®) est une organisation internationale à but non lucratif qui a été créée en 1993 par des ONGs et des
professionnels du bois. Le label FSC concerne aujourd’hui une cinquantaine de millions d’hectares* dans le monde.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 66
C’est ce qu’a démontré une étude comparative26 sur les qualités thermiques du bois face à
d’autres matériaux de construction, comme la terre crue ou le parpaing de ciment. L’avantage
du bois est qu’il offre une température radiante moyenne intérieure se rapprochant de la
température extérieure la nuit, à condition que la ventilation naturelle soit promue. La stratégie
consiste donc :
- En climat équatorial à rechercher des conditions d’ambiance intérieure proches de
celles de l’extérieur en optant pour une protection solaire, une inertie légère des parois
et une ventilation permanente. L’emploi du bois est dès lors recommandé;
- En climat tropical, où les pointes de températures élevées rendent les conditions
extérieures inconfortables, à créer un micro climat intérieur, thermiquement plus
confortable, découplé des conditions extérieures une protection solaire poussée, une
forte inertie thermique et une bonne ventilation nocturne. L’emploi du bois en
parement extérieur n’est alors pas souhaitable.
Ainsi, les constructions en bois sont propres à l’habitat traditionnel dans la plupart des pays
équatoriaux aussi bien en milieu rural qu’urbain. Les structures sont généralement relevées du
sol pour éviter leur pourrissement et favoriser la ventilation sous le plancher alors que la toiture
est largement débordante afin de protéger les murs tant du soleil que de la pluie. Ce type
d’architecture nécessite une ventilation naturelle permanente via des claustras, dont le grand
inconvénient est acoustique.
S’inspirant de cette typologie, des constructions contemporaines optent pour des constructions
légères à ossatures et parements tant intérieurs qu’extérieurs en bois. Les essences de bois
sont choisies en fonction de leurs propriétés mécaniques et physiques (densité, module
d’élasticité en flexion, contrainte de rupture…) ainsi que leur durabilité. Les espèces locales
sont privilégiées en veillant à ne pas se limiter dans le choix des essences afin de ne pas mettre
trop de pression sur certaines d’entre-elles.
Il est essentiel que le séchage du bois plein soit correctement assuré. D’autres types de
matériaux pourront être également utilisés, tel que le contreplaqué bakélisé ou l’aggloméré de
bois, pourvus qu’ils soient, comme le bois plein, correctement traités contre l’humidité, les
champignons et les termines.
En dépit de leurs qualités thermiques, écologiques et esthétiques indéniables, l’image négative
des constructions en bois dans certains pays perdure face aux risques liés aux incendies ou
aux termites. Compte-tenus des moyens de protection actuels et de ses qualités intrinsèques,
des campagnes de sensibilisation sont nécessaires pour changer les mentalités.
Le bambou
Le bambou est une alternative bon marché, durable, légère et robuste au bois dur tropical. Il est
utilisé depuis des siècles en Asie et se répand à travers le monde comme matériau de
26
A. Kemajou et L. Mba, « Matériaux de construction et confort thermique en zone chaude, application au cas des régions climatiques
camerounaises », revue des Energies Renouvelables Vol. 14 N°2 (2011) 239 – 248
La culture du bambou a peu d’impact sur l’environnement quand il est utilisé localement. Sa
productivité élevée en fait un substitut idéal au bois de construction classique car il croît et se
récolte beaucoup plus vite. Ainsi, une tige de bambou peut être utilisée comme matériau de
construction au terme d’une croissance de 4 ans seulement. En réduisant les besoins en bois
classique, il contribue à freiner la déforestation et participe à la régénération de forêts et de sols
dégradés. Il permet également de réduire l’érosion du sol et fournit à la fois de la nourriture et
un habitat pour la vie sauvage.
Restaurant Bamboe Koening, Bali, Eff Studio, 2014 Green village, Bali, Elora Ardi,2013
Figure 43: exemples de structures en bambou
Source : http://www.ecocentric.fr/blog/index/billet/5698_green-village-bambou-bali
Le bambou peut être utilisé sans avoir recours à des techniques ou outils compliqués. Il est
léger et résiste bien aux vents, tremblements de terre et ouragans. Il est particulièrement
intéressant dans les régions équatoriales et subtropicales et peut être utilisé dans différents
types de terrains.
L’investissement initial est faible, ce qui en fait un matériau de choix pour les foyers et
communauté à faible revenus.
Toutefois, en dépit de ses qualités, l’utilisation du bambou n’est pas non plus sans danger. Il est
sujet à la biodégradation (pourriture et moisissures) et aux attaques d’insectes et est vulnérable
au feu, s’il n’est pas traité. De plus, il n’est pas toujours aisé de sécuriser les joints entre
éléments constructifs.
Sans traitement particulier, le bambou a une durée de vie souvent limitée à 5 ans. Avec un
traitement adéquat et une bonne protection à l’humidité dans la mise en œuvre, sa durée de vie
peut être portée à 15 ans minimum. Grâce aux structures remarquables qu’il permet et le
caractère exotique qu’il induit, il est beaucoup utilisé dans la construction d’hôtels et de
restaurants, notamment en Asie.
27
Cradle to Cradle: Remaking the Way We Make Things, W. Mcdonough, M. Braungart, North Point Press, 2002
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 69
Quels que soient les matériaux choisis, il conviendra de sélectionner ceux qui répondent aux
normes les plus strictes. On songe aux produits satisfaisant aux spécifications européennes
harmonisées disposant du marquage CE. Ils répondent non seulement à une multitude
d'exigences techniques concernant leur application, mais aussi à certaines prescriptions en
matière de santé publique, d'hygiène et de protection tant des utilisateurs que de
l'environnement. La directive européenne sur les produits de construction (DPC) intègre en effet
7 exigences fondamentales, à savoir : (i) la résistance mécanique et la stabilité, (ii) la sécurité
incendie, (iii) l’hygiène, la santé et l’environnement, (iv) la sécurité d’utilisation et l’accessibilité,
(v) la protection contre le bruit, (vi) les économies d’énergies et l’isolation thermique et (vii)
l’utilisation durable des ressources naturelles. L’emploi de matériaux répondant à ces normes
aura un impact indéniable sur le coût de construction, mais qui sera largement amorti durant la
durée de vie du bâtiment.
Une attention particulière doit également être accordée à la mise en œuvre de ces matériaux.
On n’insistera donc jamais assez sur l’importance d’un suivi de chantier objectif, intègre et
rapproché, garant d’une meilleure qualité des ouvrages et donc de leur durabilité.
Comme illustré dans la Figure 44, le potentiel d’exploitation de l’énergie solaire dans les
pays d’intervention de la CTB est important. Il le sera d’autant plus que le coût moyen du
kilowatt/heure est élevé et que l’expertise locale en matière d’énergie solaire est
disponible tant pour la conception que pour l’installation d’équipements solaires.
28
Voir la brochure Developpement a matter of energy, promoting renewable solutions, CTB, 2012
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 74
sur un retour sur investissement de 6 à 8 ans. Dans cette projection il y aura lieu de tenir
compte de la perte de rentabilité du système, le rendement des PV étant de l’ordre de 90% au
bout de 10 ans et de 85% après 20 ans.
Une fois le type d’installation de PV choisi, il conviendra d’intégrer cette installation de
manière harmonieuse dans le projet architectural. Le système peut en effet avoir un double
avantage : non seulement produire de l’électricité mais aussi projeter de l’ombre sur le toit du
bâtiment ou sur les parkings.
Projet de rénovation du bâtiment Bota, Bruxelles, 2017 Parking du Garden City Mall, Kenya,
production de 1256MWh, 2015
3.2 L’éolien
Le vent est une autre expression de l’énergie solaire; le différentiel de chaleur généré sur la
planète crée des différences de pression qui entrainent des flux d’air : le vent. La puissance que
représente le flux d’air est proportionnelle au cube de la vitesse du vent et de la surface
couverte par le flux. Mais l’énergie produite par le vent ne peut être valorisée en tout point du
globe. La connexion au réseau électrique, l’exposition aux vents, les dégagements nécessaires
tant pour valoriser pleinement le vent que pour éviter les nuisances sont des facteurs qui
déterminent l’implantation d’éoliennes. Celles qui sont placées en mer disposent de vents
généralement plus puissants et plus stables que sur terre.
Une localisation sur les sites les mieux exposés est cruciale. Augmenter la hauteur expose la
turbine à des vitesses de vents plus importantes et plus stables. Augmenter le diamètre de la
turbine accroit la surface sur laquelle l’énergie du vent est extraite. En toute logique, une
évolution vers des turbines toujours plus grandes et plus hautes s’observe ; elle s’est stabilisée
aujourd’hui à 150m de haut environ. Cette évolution est limitée par la pression du vent sur les
pales, les régulations locales ainsi que les contraintes matérielles et logistiques.
Des réglementations définissent l’espace tampon minimal entre le site d’implantation des
éoliennes et les quartiers résidentiels afin de préserver ces derniers du bruit généré par les
Des systèmes de petites turbines se sont développés ces dernières années pour répondre aux
besoins des bâtiments. Certes, ils sont moins rentables que leurs grandes sœurs mais ils
peuvent constituer une source énergétique alternative intéressante dans les zones non
connectées au réseau mais largement exposées au vent.
Des études ont été menées sur le gisement éolien dans la région du Sahel, par exemple, où on
constate une grande variabilité des sites ; des études complémentaires au niveau local sont
donc nécessaires.
3.3 La bio-méthanisation
Le biogaz est une source d’énergie sûre, gratuite et renouvelable. Il s’agit pourtant d’une
technologie encore largement sous-exploitée.
Dans la cuisine, le biogaz peut remplacer le bois ou le charbon, ce qui permet aux occupants de
respirer un air plus sain et de limiter la déforestation29.
29
Des recherches financées par l’Organisation Mondiale de la Santé ont démontré que 1.6 millions de personnes mourraient chaque année des effets
néfastes de la fumée du bois de feu.
Ecoconstruction et efficacité énergétique – Juin 2017 77
PARTIE 4 : EXEMPLES DE PROJETS INTEGRES
L’école Française de Damas, en Syrie, conçue par les Ateliers Lion en 2008, est une bonne
illustration de l’usage qu’il peut être fait des techniques traditionnelles pour limiter les
consommations dues au refroidissement et au chauffage. D’une superficie de 10.000m², elle
abrite plus de 900 élèves. Différentes techniques ont été associées pour créer un
microclimat optimal de manière passive:
- Les arbres existants sur le site ont été préservés ;
- Les constructions sont bâties autour de petits jardins au sein desquels les arbres
plantés forment de véritables canopées protectrices. Des toiles sont parfois tendues
pour apporter de l’ombre;
- Les plantations sont arrosées via un système de récupération des eaux pluviales ;
- Des galeries couvertes relient les différents bâtiments ainsi que des espaces sous
pilotis;
- L’air frais produit dans les patios est capté et introduit dans les salles de classes
adjacentes ;
- Les murs à double peau sont séparés par un vide de 5cm, évitant ainsi que la chaleur
accumulée par le mur extérieur soient transmises à l’intérieur. Les calories accumulées
en journée par la paroi intérieure qui dispose d’une bonne inertie thermique, sont
évacuées la nuit par le système d’évacuation ;
- Pour éviter la surchauffe, les toitures en béton sont constamment ventilées par un vide
d’air de 25cm de large ;
- La ventilation naturelle est favorisée par l’emploi de cheminées solaires.
Patio couvert avec partie du bâtiment sous pilotis favorisant la ventilation entre les bâtiments.
L’école primaire de Rudrapur au Bangladesh a été conçue par les architectes A. Heringer et E.
Rosway en 2006 pour le compte d’une ONG. Elle utilise essentiellement deux techniques
passives ; d’une part, la masse thermique de la terre crue pour le rez-de-chaussée et, d’autre
part, la ventilation naturelle au travers d’une structure légère en bambou pour l’étage.
Les trois classes du rez disposent de « grottes » latérales comme espace de jeux, qui d’un
point de vue thermique constituent un bouclier idéal contre la chaleur. Les autres murs sont
également composés d’adobe mélangé à de la paille de riz enduits de chaux. De petites
ouvertures y sont pratiquées.
Le deuxième étage est un espace multifonctionnel utilisé pour la période des moussons,
époque où la masse thermique du rez-de-chaussée n’est pas particulièrement efficace contre
l’air chaud et humide. Les parois sont en structures légères de bambou. La ventilation naturelle
est privilégiée par de grandes ouvertures situées sur les quatre parois.
o Murs trombes ;
L'énergie géothermique
Pour profiter de cette énergie, trois tunnels souterrains ont été construits et ont été connectés
aux salles de classe au travers de douze conduits verticaux. Ils amènent un air préchauffé en
Chaque classe dispose de deux grilles d'aération qui peuvent être ouvertes et fermées par
les enseignants. En été, l'air frais entre dans la classe à travers la grille inférieure. L'air chaud
dans la classe est évacué à travers la grille supérieure vers une cheminée solaire. Ce
système géothermique réduit les températures de la classe de 6 °C en été. En hiver,
inversement, les tunnels servent à préchauffer l'air.
Murs solaires
Une dernière innovation testée dans l’école est l’emploi de murs solaires. Des panneaux
métalliques sombres percés de 250 000 trous ont été installés sur la façade Est de l'école. En
hiver, les panneaux absorbent l'énergie solaire, chauffent l'air derrière les panneaux avant de
l’injecter dans les salles de classe à travers une grille, par convection naturelle. L’air est
ensuite extrait par la cheminée solaire.
Analyse et suivi
En tant que projet pilote, l'école est équipée de deux stations météorologiques et d’une
quinzaine de capteurs répartis dans tout le bâtiment pour mesurer avec précision les
variations de températures générés par les différents systèmes mis en place. Différentes
Sensibilisation
Les enseignants et certains étudiants ont été formés à l'utilisation des différents systèmes
suivant les conditions météorologies afin d’optimiser leur apports. Ils contribuent ainsi à une
sensibilisation à l'environnement. Le bâtiment fait ainsi la démonstration qu’il est possible
d’améliorer les conditions de confort des usagers sans pour autant porter préjudice à
l’environnement et le climat.
L’hôpital conçu par le bureau italien Tamassociati en 2010 a été édifié à Nyala, capitale du
Darfour Sud, au Sud Soudan par l’ONG Emergency. Il intègre, entre autre, une section
d’urgence, de pédiatrie et de chirurgie cardiaque.
La volonté du maitre d’ouvrage et du maitre d’œuvre était d’offrir à la population un bâtiment
beau où chacun se sente valorisé et où le confort serait optimal sans pour autant être
dispendieux. Cet accent sur l’esthétique et le confort est perçu comme une marque de respect
vis-à-vis d’une population pauvre dévastée par la guerre et les exactions. Il opte aussi pour une
simplicité maximale dans une approche de durabilité. Le résultat a abouti à une combinaison de
modernité et de tradition. Le bâtiment a ainsi été conçu autour d’une stratégie axée sur la
ventilation naturelle en minimisant le transfert de chaleur en provenance de l’extérieur suivant
l’emploi d’une série d’éléments :
- L’organisation de l’hôpital autour d’un patio intérieur ;
- Des coursives larges et ombragées protégeant non seulement les personnes mais
également les murs des salles ;
- Des murs à forte inertie thermique et de petites ouvertures afin de se prémunir tant du
soleil que des vents chauds, secs et porteur de poussières ;
- L’emploi de matériaux locaux, soit la terre cuite et le jonc tissé, et l’usage de techniques
de construction simples nécessitant peu de ciment ;
- Une tour à vent avec humidificateur adiabatique.
Le processus constructif est basé sur l’emploi de voucettes en briques de terre cuite posées
sur des poutrelles métalliques au-dessus desquels sont disposés des combles ventilés
permettant d’absorber la chaleur issue de la toiture.
A l’image des réalisations reprises plus haut à titre d’exemples, l’objectif de ce manuel est
d’aider le concepteur de projet à développer une stratégie environnementale globale cohérente
du bâtiment intégrant les principes de l’écoconstruction, encore appelée architecture
bioclimatique. A charge de cette démarche d’intégrer les différentes dimensions exposées dans
ce document en les adaptant aux spécificités climatiques et culturelles de la zone d’intervention.
Le but est de répondre aux critères de confort de l’occupant suivant quatre dimensions :
hygrothermique, visuel, acoustique et de qualité de l’air dans une démarche respectueuse de
l’environnement en veillant à la fois à s’adapter aux modifications climatiques et à en réduire les
effets.
L’investissement supplémentaire consenti pour intégrer les techniques et approches exposées
dans ce guide peut rapidement être amorti via les économies engendrées au niveau de la
consommation énergétique. Les systèmes mis en place permettent dans la plupart des cas de
se passer de l’air-conditionné tout en offrant un confort thermique acceptable. Ces technologies
appropriées nécessitent également un entretien, ni plus ni moins que toute autre composante
du bâtiment.
Le tableau ci-joint propose un résumé des approches à favoriser selon que le bâtiment s’inscrit
dans un climat chaud et humide (tropical ou équatorial) ou dans un climat chaud et sec, soit
les deux principaux types de climats rencontrés dans les pays partenaires de la coopération
belge.
Zone chaude et humide Zone chaude et sèche
Choix du site - Bonne accessibilité, avec accès à l’eau, l’électricité et possibilité de récupération et
traitement des eaux usées
- Bonne résistance du sol
- Zone non inondable
- Loin des sources de pollution
Implantation - Recherche de l’ombre dans une zone bien exposée aux vents
- Préserver le couvert végétal existant
- Implantation d’arbres pour se protéger du soleil et canaliser le vent
- Privilégier les vues remarquables
Orientation Axe longitudinal E/O avec fenêtres sur façades nord et sud, pignon ouest protégé du
soleil, en s’exposant ou se protégeant des vents dominants suivant les cas
Mitoyenneté Habitat dispersé Habitat regroupé
Forme Allongée Compacte
Organisation - Zones de services utilisées comme espaces tampon face aux nuisances
des espaces - Espaces nobles disposés du côté des bonnes orientations
- Regroupement des pièces d’eau
Il s’agira donc de mettre en œuvre suivant les spécificités climatiques une stratégie cohérente
dans la conception du bâtiment qui intègre les éléments repris dans le tableau 6 en fonction des
spécificités locales, tout en tenant compte du savoir-faire des concepteurs et des entreprises. Si
certaines technologies font appel à des techniques traditionnelles, celles-ci sont souvent
oubliées, alors que d’autres plus récentes nécessitent une formation appropriée. Les architectes
locaux ne sont pas toujours au fait de l’existence de ces techniques et technologies, ni de la
manière de les concevoir et de les intégrer dans leur projet. L’objectif de ce manuel était d’en
faire l’inventaire et la promotion en rappelant qu’une expertise pointue ponctuelle sera
sans nécessaire pour en valider les principes, voire concevoir les détails techniques.
Si le chemin est encore long pour généraliser les différents principes de l’architecture
bioclimatique exposés dans ce document dans les projets appuyés par la coopération belge, les
expériences positives du Cambodge, de Palestine, de l’Ouganda ou du Burundi démontrent que
cette voie n’est pas confidentielle et que des résultats concrets sont déjà visibles, en cohérence
avec les objectifs et priorités de la Coopération belge eu Développement.