Chirurgie de La Diaphyse Humérale
Chirurgie de La Diaphyse Humérale
Chirurgie de La Diaphyse Humérale
Mots clés : Humérus ; Diaphyse ; Fracture récente ; Pseudarthrose ; Ostéosynthèse par plaque ; Enclouage ;
Embrochage fasciculé ; Fixation externe ; Paralysie radiale
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de Bezes [11], ou de Dayez [12]). Une plaque peut être posée au
bord antérieur ou à la face antéromédiale (Fig. 6, 7). Les dangers
potentiels de cet abord sont relativement éloignés : le nerf
axillaire a donné ses branches de distribution au deltoïde, le
nerf radial est en dedans et amorce son contournement de la
face postérieure diaphysaire, le pédicule huméral est interne, le
Figure 3. Voie antérieure (deltopectorale élargie), bras gauche. nerf musculocutané est plus antérieur, et récliné avec le biceps
1. Muscle grand pectoral ; 2. muscle biceps brachial ; 3. muscle bra- à sa face profonde.
chial fendu, berge médiale ; 4. nerf musculocutané ; 5. muscle deltoïde ; Voie latérale
6. veine céphalique ; 7. muscle brachial fendu, berge latérale ; 8. diaphyse
humérale, face antérieure et médiale. Le patient est couché sur le dos sans garrot, le bras le long du
corps, le coude reposant sur un appui latéral.
La voie brachiale latérale (Fig. 8, 9) passe en avant du septum
intermusculaire latéral, entre les muscles brachial antérieur et
triceps brachial au-dessus du nerf radial, puis entre les muscles
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brachioradial et triceps brachial au-dessous du nerf. L’incision
cutanée est rectiligne au bord latéral du bras. Le septum
intermusculaire latéral est le premier élément à repérer : le nerf
radial le perfore d’arrière en avant, avant de se glisser entre les
muscles biceps et brachioradial. Il est recherché en premier. Sa
découverte n’est pas toujours facile : il ne faut pas hésiter à
6 palper directement les fibres musculaires pour le sentir « rouler »
ou le chercher plus distalement dans le sillon bicipital. Aucune
7 traction ne doit être exercée sur lui, ce souci doit être perma-
8 nent pour l’opérateur et son aide. Une fois le nerf repéré, il est
9 obligatoirement neurolysé et mis sur lacs. La plaque est posée
10 sur la face latérale, passant alors souvent sous le nerf radial avec
tous les risques que cela peut comporter : manipulation peropé-
ratoire, risque de lésion lors du méchage, irritation possible
postopératoire, difficultés prévisibles lors de l’ablation du
11 matériel, et surtout en cas de reprise pour infection ou pseu-
darthrose, etc. Par cette voie, le risque de lésion nerveuse
iatrogène est réel. Les difficultés opératoires sont importantes
quand un opérateur assisté par un seul aide doit simultanément
Figure 4. Coupe à la jonction tiers supérieur-tiers moyen du bras droit, maintenir la réduction fracturaire et poser la plaque tout en
segment supérieur. Voie d’abord antérieure. 1. Triceps, vaste latéral ; contrôlant le nerf radial. Dans tous les cas, la situation de la
2. deltoïde ; 3. triceps, vaste médial ; 4. brachial ; 5. biceps brachial ; plaque doit être précisément mentionnée dans le compte-rendu
6. nerf musculocutané ; 7. nerf médian ; 8. nerf brachial cutané médial ; opératoire, ainsi que ses rapports avec le nerf radial (croisement
9. nerf ulnaire ; 10. nerf radial ; 11. triceps, longue portion. en regard de quelle vis, etc.).
Voies postérieures
le deltoïde est récliné en dehors avec la veine céphalique, et le La voie postérieure est réalisée sur un patient installé en
grand pectoral peut être désinséré au ras de l’os et repéré sur fils décubitus ventral, coude étendu sur table à bras, ou coude fléchi
pour sa réinsertion (Fig. 4). Vers le bas, en réclinant en dedans sur un court appui latéral, avant-bras dans le vide. L’abord est
le biceps avec le nerf musculocutané qui n’est pas repéré, la médian et postérieur. L’aponévrose brachiale est ouverte à la
diaphyse est exposée en fendant le bord latéral du brachial et partie basse du muscle deltoïde entre le chef latéral du muscle
le bord antérieur de l’humérus est exposé ainsi que la face triceps et le chef intermédiaire (longue portion) plus médial. Ces
antéromédiale (Fig. 5). Pour l’exposition du tiers moyen de la deux chefs musculaires sont séparés sur la ligne médiane jusqu’à
diaphyse, seule la partie basse de la voie d’abord est faite (voie l’olécrane, au doigt et au bistouri. Le paquet vasculonerveux
A B
Figure 6.
A. Fracture oblique de l’humérus droit, jonction tiers supérieur-tiers moyen.
B. Ostéosynthèse par plaque et vis de compression libre au bord antérieur par voie antérieure deltopectorale élargie.
A B
Figure 7.
A. Fracture transversale avec troisième fragment de l’humérus droit, tiers moyen.
B. Ostéosynthèse par plaque face médiale par voie antérieure de Bezes, Dayez.
huméroradial peut être repéré dans l’interstice formé : il croise tendon de terminaison du triceps, et la voie postérolatérale de
la partie haute du champ opératoire de dedans en dehors à Moran [14], qui passe en dehors du chef latéral du muscle triceps
environ 17 cm ± 3 cm de l’épicondyle médial. Cependant, dans brachial et du tendon de terminaison du triceps. L’aponévrose
la mesure où cette voie est rarement utilisée dans les fractures brachiale est ouverte au ras du tendon terminal du triceps, à
hautes, la recherche du nerf n’est pas toujours nécessaire. Le cas son bord latéral. De proche en proche et vers le haut, le triceps
échéant, après avoir isolé le nerf, la face postérieure de l’humé- est décollé de la face postérieure de l’humérus. À la partie haute
rus n’est plus recouverte que par le chef médial du muscle du champ, le nerf radial est repéré alors qu’il croise le bord
triceps brachial qui est fendu verticalement jusqu’à l’olécrane latéral de la diaphyse, et passe à travers le septum intermuscu-
(Fig. 10). L’ostéosynthèse est réalisée sur la face postérieure. laire latéral, au dessus du muscle brachioradial (Fig. 11). Il peut
Cette voie d’abord est transmusculaire : elle provoque une être neurolysé afin d’être déplacé vers l’avant. Une fois le nerf
dévascularisation périostée étendue. Elle impose une ostéosyn- bien contrôlé, une plaque peut être posée sur la face postérieure
thèse épaisse sous l’appareil extenseur, qui peut prendre les et latérale de l’humérus (Fig. 12). Seules les fractures du tiers
deux piliers de l’humérus (plaques en Y inversé). Il existe deux distal sont accessibles sous peine de devoir passer la plaque sous
variantes à cette voie : la voie postéromédiale de Bousquet [13], le nerf radial. Pour les fractures basses et difficiles, un relève-
qui passe entre le chef médial du muscle triceps brachial et le ment de l’appareil extenseur par olécranotomie peut être réalisé,
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Figure 8. Voie latérale, bras droit. 1. Triceps ; 2. brachioradialis ;
3. humérus, épicondyle latéral ; 4. brachial ; 5. nerf radial.
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Figure 9. Coupe à la jonction tiers moyen-tiers inférieur du bras droit,
segment supérieur. Voie d’abord latérale. 1. Brachioradialis ; 2. nerf 2
radial ; 3. brachial ; 4. nerf musculocutané ; 5. biceps brachial ; 6. nerf 3
brachial cutané médial ; 7. nerf médian ; 8. nerf ulnaire ; 9. triceps.
A B
Figure 12.
A. Fracture oblique de l’humérus gauche, tiers inférieur.
B. Ostéosynthèse par plaque « à tibia » et vis libre par voie postérolatérale.
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B
Figure 16. Coupe à la jonction tiers moyen-tiers inférieur du bras droit, Figure 17.
segment supérieur, en décubitus ventral. Voie d’abord postéromédiale. A. Fracture spiroïde à 4 fragments de l’humérus droit tiers inférieur.
1. Nerf brachial cutané médial ; 2. nerf médian ; 3. nerf ulnaire ; B. Ostéosynthèse par plaque et vis libre par voie postéromédiale.
4. triceps ; 5. brachioradialis ; 6. nerf radial ; 7. brachial ; 8. nerf muscu-
locutané ; 9. biceps brachial. la plaque peut alors être posée. Idéalement, l’utilisation de
daviers est proscrite pour éviter de léser les parties molles ou le
nerf radial. La plaque peut parfois être moulée du fait du relief
plaques plus étroites et moins épaisses (2,7 mm dites « à avant- tourmenté de l’humérus, surtout lorsque l’on s’approche de la
bras ») peuvent être utilisées avec des vis de 3,5 mm. Les trous zone distale. L’utilisation de fers à chantourner ou de presse à
étant plus proches, un montage doit être réalisé avec huit prises plaque devient alors indispensable. Toutes les vis doivent être
corticales de part et d’autre du foyer de fracture, soit quatre mises pour assurer un montage solide.
vis [5, 10]. L’utilisation des plaques verrouillées nécessite une technique
L’ostéosynthèse par plaque peut être utilisée de plusieurs tout à fait différente. Il s’agit d’obtenir une fixation interne sur
manières : plaque en compression pour les fractures transversa- un os aligné et non sur un os réduit anatomiquement. C’est un
les ou obliques courtes non comminutives, avec une vis inter- concept de pose de « fixateur interne ». Le montage classique
fragmentaire de compression et plaque de neutralisation en cas pour ce type de plaque utilise un implant large et épais, de
d’obliquité du trait. La compression peut s’avérer difficile à longueur suffisante pour laisser libre un trou sur deux au niveau
obtenir en cas de comminution. En cas de fracture à trois ou de la fixation diaphysaire, et trois trous inoccupés en regard du
quatre fragments, un vissage direct de ces derniers permet de foyer de fracture. Si la fracture est comminutive, des vis à
simplifier la fracture en une oblique, pour poser ensuite une proximité du foyer de fracture peuvent être utilisées. La
plaque de neutralisation. Dans tous les cas, une réduction dite réduction peut ne pas être fine ce qui permet une technique
« anatomique » est recherchée pour assurer une bonne stabilité. mini-invasive pour les parties molles : pas de manipulation
Cette réduction est obtenue dans le meilleur des cas sans trop directe des fragments osseux, pas de dépériostage, peu d’utilisa-
de dommage des parties molles (dépériostage a minima, désin- tion de daviers, exposition osseuse a minima ne permettant que
sertion musculaire limitée à la zone de pose de plaque, etc.) et de contrôler l’absence d’incarcération musculaire qui doit être
A B
Figure 18.
A. Fracture de l’humérus gauche, tiers moyen, et paralysie radiale. L’abord par voie latérale permet l’exploration du nerf radial (ici sectionné), et l’ostéosynthèse
par plaque.
B. Même patient après suture du nerf radial.
levée. La logique de ce concept de respect des parties molles Fractures diaphysaires au tiers distal
conduit naturellement vers une chirurgie moins invasive, avec Elles peuvent être abordées plutôt par voie postérieure avec
réduction de la taille des cicatrices. une ostéosynthèse solide par plaque en Y inversé, ou par voies
postéromédiale ou latérale. La voie postéromédiale a notre
Chirurgie mini-invasive [19, 20] préférence [17, 18]. Les avantages de cette voie sont multiples : il
Les principes de la chirurgie mini-invasive commencent à être n’y a pas de dissection du nerf radial, la surface de l’humérus
appliqués pour la pose de plaques à vis verrouillées. Cette mini- est facilement accessible à la pose d’une plaque, sauf à la partie
invasive ostéosynthèse par plaque (MIPO) est décrite par voie toute distale où l’épicondyle médial oblige à mouler la plaque,
antérieure pour les fractures du tiers distal de la diaphyse. Sur le troisième fragment est souvent médial et accessible à une
un patient en décubitus dorsal, épaule en abduction, bras réduction sous contrôle de la vue puis à une synthèse directe
reposant sur une table radiotransparente, une première incision (Fig. 17), la cicatrice est rarement visible. En cas de polytrauma-
de 2 cm est faite entre le bord latéral du muscle biceps et la tisme, les voies postérieures ne sont pas réalisables du fait de
terminaison du muscle deltoïde. Une deuxième incision de l’installation ventrale du blessé.
3 cm est faite, distale et antérieure, au bord latéral du muscle
biceps, 1 cm au-dessus du pli de flexion. Par une tunnellisation Ostéosynthèses intramédullaires
de l’incision proximale à distale, une plaque à vis verrouillées
est descendue, et appliquée à la face antérieure de l’humérus. Le Les ostéosynthèses intramédullaires humérales sont diverses,
principe d’ostéosynthèse répond aux critères décrits au-dessus : tant dans leur conception biomécanique que par leur voie
alignement du foyer de fracture, vissage distal et proximal à d’implantation humérale. Elles ont en commun le principe du
l’aide de vis verrouillées, etc. Ces techniques restent bien sûr à foyer fermé et son corollaire, le contrôle radiologique peropéra-
valider par le temps, les séries actuelles ne regroupant que toire. Elles ne peuvent être conduites qu’en s’assurant de la
quelques patients, avec des reculs faibles. Les risques de lésions réductibilité première du foyer de fracture.
iatrogènes neurologiques sont réels et la bonne maîtrise de la
chirurgie conventionnelle à ciel ouvert est un prérequis indis- Enclouage centromédullaire
pensable pour connaître les dangers anatomiques potentiels. Principes généraux
L’enclouage centromédullaire est utilisé pour les fractures de
Indications générales
la diaphyse humérale depuis les publications de Küntscher. Il
Fractures diaphysaires du tiers proximal décrivait notamment un clou descendant depuis le sommet du
La voie deltopectorale élargie vers le bas reste la voie de trochiter et un clou ascendant depuis la fossette olécranienne.
prédilection. La longueur de l’incision cutanée et de la désinser- Cette technique a vu augmenter ses applications sous l’impul-
tion musculaire est donnée par la taille de la plaque choisie lors sion de Seidel avec la promotion de son clou à verrouillage
de la planification préopératoire, agrandie de 2 cm à 3 cm. Une distal par expansion endomédullaire [25] , puis grâce à un
fois l’humérus exposé, en cas de trait oblique, spiroïde ou d’une matériel d’enclouage permettant un verrouillage proximal et
« aile de papillon », le vissage préalable est assuré par une ou distal maîtrisant mieux les contraintes rotatoires [26-28].
plusieurs vis de 4,5 mm ou 3,5 mm. La plaque choisie comporte Enclouage antérograde (Fig. 19, 20)
au moins trois vis de part et d’autre du foyer (Fig. 6). Il est
parfois nécessaire de recourir à des implants en T ou en trèfle Le patient est installé en décubitus dorsal, position demi-
pour assurer une prise métaphysoépiphysaire proximale. assise, tête fixée à une têtière, bras dépassant de la table
reposant sur un accoudoir. Tout le membre est installé dans le
Fractures diaphysaires du tiers moyen champ opératoire, permettant la liberté des manœuvres de
En l’absence de paralysie radiale, la voie d’abord est anté- rotations et de rétropulsion de l’épaule, facilitant l’exposition de
rieure, décrite par Bezes [11] puis Dayez [12] pour placer la plaque l’épiphyse proximale de l’humérus en avant de l’acromion, et
à la face antérieure ou à la face antéromédiale (Fig. 7). un contrôle radioscopique durant toute l’intervention. L’abord
En cas de paralysie radiale préopératoire, une neurolyse du médullaire se fait par une incision de l’épaule antéroexterne de
nerf radial reste logique bien que controversée [21-24]. La voie 3 cm à 4 cm au bord acromial, avec discision du deltoïde. Le
latérale permet l’exploration du nerf, sa suture, ou bien sa point d’introduction osseux dépend du dessin du clou (Fig. 19) :
libération, voire sa transposition antérieure [23] pour poser la • extra-articulaire, latéral, au sommet du trochiter pour les
plaque sur la face antérolatérale ou latérale (Fig. 18). clous béquillés [29] ;
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Embrochage fasciculé
Principes généraux
L’embrochage fasciculé, décrit il y a 50 ans par Hackethal, est
une technique d’ostéosynthèse intramédullaire à foyer fermé,
rétrograde par voie sus-olécranienne : le remplissage diaphysaire
et l’autoblocage mutuel d’un nombre maximal de broches
endomédullaires, leur divergence métaphysoépiphysaire proxi-
male dans l’os spongieux céphalique et l’obstruction de la
fenêtre d’entrée corticale distale assurent la stabilité du montage.
Technique opératoire
B Au plan technique, plusieurs variantes sont possibles, tant sur
l’utilisation de matériel que de la voie d’abord. Le principe reste
Figure 21. cependant le même, à savoir une réduction du foyer fermé sous
A. Fracture spiroïde de l’humérus droit, tiers supérieur. contrôle de l’amplificateur de brillance et d’un abord distal de
B. Ostéosynthèse par clou béquillé avec verrouillage bipolaire. la cavité médullaire. L’installation peut se faire en décubitus
dorsal, bras reposant sur une table radiotransparente, amplifica-
teur de brillance placé à la tête du patient ; en décubitus dorsal,
strictement médian, méché uniquement dans la corticale posté- en position demi-assise comme pour l’introduction d’un clou
rieure, agrandi en direction distoproximale. Il permet l’introduc- antérograde ; en décubitus latéral, mais avec un faisceau
tion du guide d’alésage dont le trajet à travers le foyer réduit est d’amplificateur horizontal ; enfin, en décubitus ventral, le bras
suivi par l’amplificateur. L’alésage est supérieur de 1 mm ou restant pendant hors d’une courte tablette [34].
1,5 mm au diamètre du clou choisi. Celui-ci est enfoncé après un L’abord de la cavité médullaire peut se faire au-dessus de la
choix précis de sa longueur puisqu’il doit être affleurant à l’orifice fossette olécranienne, ou des épicondyles latéral ou médial.
d’introduction distal et s’impacter dans l’épiphyse proximale. Le L’abord olécranien est celui décrit par Hackethal. Il est mené par
verrouillage distal est réalisé en premier, à « main levée », après une incision médiane postérieure, 2 cm au-dessus de la pointe
repérage de l’orifice postéroantérieur du clou et méchage de son de l’olécrane, sur 4 cm à 5 cm en incisant longitudinalement le
trajet. Une, ou mieux, deux vis assurent le verrouillage proximal, tendon du triceps. Une pointe carrée dirigée vers le haut et le
placées de la même manière à travers de courtes incisions. Le plus tangentiellement possible pénètre dans la cavité médullaire.
verrouillage proximal se fait sur cadre de visée ou à main levée. Cet orifice d’entrée est agrandi à la pince gouge ; il est ovalaire
et mesure 2 cm sur 1 cm, son extrémité inférieure reste à 2 cm
Indications opératoires
au-dessus de la fossette olécranienne. Le nerf radial est loin à
L’enclouage centromédullaire comporte des limites anatomi- plusieurs centimètres en haut et en dehors, le nerf ulnaire est
ques d’indication : les fractures du quart distal diaphysaire. plus proche.
A B
Figure 23.
A. Fracture transversale de l’humérus gauche, tiers moyen.
B. Ostéosynthèse par deux broches ascendantes par voie sus-épicondylienne latérale.
L’abord épicondylien [35, 36] (Fig. 22, 23) se fait par une caractérisant par un cal périosté important. Dans des mains
incision longitudinale strictement centrée sur le relief de cette expertes et entraînées, du fait de sa simplicité et de sa rapidité
apophyse, les muscles épicondyliens sont décollés de l’os sur d’exécution, certaines indications paraissent préférentielles :
quelques millimètres ; on pénètre dans la cavité médullaire en polytraumatisé, fractures bifocales, coude flottant, fractures
dirigeant la pointe carrée obliquement à 45° vers le haut et transversales, obliques courtes. La méthode doit être contre-
légèrement en arrière par un point d’entrée juste situé au-dessus indiquée pour les fractures trop distales, très comminutives et à
de l’apophyse ; l’orifice est ensuite agrandi aux dépens de l’arête .
composante rotatoire.
postérolatérale de la palette humérale. Dans la voie épicondy-
lienne latérale, le nerf radial est loin. Dans l’abord épicondylien Fixation externe
médial qui se fait selon le même principe, le nerf ulnaire est en
revanche très proche.
Principes généraux
La condition obligatoire du déroulement de cette interven-
tion reste la réductibilité à foyer fermé de la fracture. Une fois La fixation externe reste classiquement réservée aux lésions
celle-ci obtenue et maintenue par l’aide opératoire ou par la largement ouvertes ou résultant d’un traumatisme balistique [37,
38]. Ses indications ont été étendues à certaines fractures pour
table orthopédique, et la fenêtre d’entrée réalisée, l’embrochage
se fait de distal à proximal. Le contrôle par l’amplificateur de lesquelles ni le traitement chirurgical, ni le traitement orthopé-
brillance permet de vérifier le passage du foyer de fracture et la dique ne paraît souhaitable, soit pour des raisons d’ordre
divergence céphalique des broches. Des broches à bout mousse général (polytraumatisé, damage control et chirurgie en deux
(acier inox, Aprill) ou effilé (titane, Métaizeau), de gros diamètre temps, etc.), soit pour des raisons d’ordre local (lésions cutanées,
(2,2 mm), peuvent être utilisées. Le remplissage endomédullaire fracture très comminutive étendue, etc. [Figure 24]). Les
doit être maximal : il faut monter les broches jusqu’à ce que résultats rapportés dans la littérature sont satisfaisants, quoique
leur introduction ne soit plus possible. Les broches doivent être révélant un délai plus important pour obtenir la consolidation.
recourbées puis coupées au ras de la fenêtre d’introduction Il s’agit cependant de séries faisant état d’utilisation d’un
corticale : il faut trouver un compromis entre les possibilités fixateur externe dans des cas graves et compliqués, pour lesquels
d’extraction future et l’absence de conflit avec les parties molles. il paraît logique que le taux d’échec soit élevé. Il faut retenir
qu’il s’agit d’un traitement orthopédique amélioré, la consoli-
Indications opératoires dation intervenant sur un os aligné, mais non parfaitement
C’est une solution simple et peu coûteuse pour fixer les réduit.
fractures humérales. L’embrochage permet une consolidation en Divers montages sont possibles, liés en fait au type de
8 à 9 semaines. Les performances biomécaniques de l’embro- fixateur posé. De Bastiani [38] recommande un montage stricte-
chage restent cependant modestes : le contrôle rotatoire est ment latéral, parallèle à la diaphyse grâce à deux groupes de
faible, et l’absence de contact interfragmentaire associé à une fiches ; Lenoble [39] préconise un montage par fixateur de
mobilisation précoce risque d’aboutir inévitablement à une non- Hoffmann avec barres obliques appuyées sur un groupe proxi-
consolidation. Ce mode d’ostéosynthèse provoque une ostéoge- mal de fiches frontales latéromédiales, et un groupe distal de
nèse proche de celle observée après traitement orthopédique, se fiches sagittales antéropostérieures.
A B
C
Figure 24.
A. Fracture spiroïde, tiers moyen de l’humérus gauche, en aval d’une fracture proximale déjà opérée. Complications cutanées (phlyctènes).
B, C. Ostéotaxis par fixateur externe de Hoffman, montage en cadre.
Technique opératoire [39-41] solidement les deux groupes de fiches. Le montage peut être fait
en monoplan ou en cadre. Dans tous les cas le montage doit
Le patient est installé en décubitus dorsal, bras reposant sur permettre un contact étroit entre les deux extrémités diaphy-
une table radiotransparente, épaule légèrement déjetée en saires en cas de fracture simple. L’évolution peut être marquée
dehors. par une infection aux orifices des fiches, qui doit être prévenue
L’amplificateur de brillance est placé à la tête du patient. En par une toilette quotidienne, et le cas échéant une désinfection
cas de lésion ouverte, le parage chirurgical est le premier temps cutanée autour des fiches. En cas d’infection, une antibiothéra-
opératoire. La zone d’insertion des fiches ne peut se faire à pie peut être prescrite, adaptée aux germes retrouvés sur les
l’humérus que sur sa face latérale et/ou postérieure. À la partie prélèvements locaux. Une ostéite sur fiche impose la dépose de
proximale, la zone d’insertion est latérale : chaque fiche cette dernière, voire du fixateur. Les temps de consolidation
nécessite un très court abord cutané, puis, à travers le deltoïde, sont longs (12 semaines environ). Le retentissement sur les
dissocié à la pince et protégé par une douille, soit la corticale mobilités articulaires de l’épaule et surtout du coude est noté
est méchée avant la mise en place des fiches non transfixiantes par l’ensemble des auteurs.
perpendiculaires à l’axe diaphysaire (De Bastiani, 3 fiches), soit
la fiche est enfoncée directement si elle est autotaraudeuse
Indications opératoires
(Hoffmann, 3 à 5 fiches). À la distalité, les fiches peuvent être
postéroantérieures, transtricipitales ou latérales, parallèles au Elles ont déjà été précisées dans les principes généraux. Il faut
groupe proximal, sus-épicondyliennes, fixées dans le bord latéral retenir que le fixateur est un moyen d’ajustement à mi-chemin
du pilier de la palette. Les fiches proximales sont placées en entre le traitement orthopédique et le traitement chirurgical,
premier, puis la réduction est réalisée, permettant d’apprécier la facile à mettre en œuvre, qui ne contre-indique pas une prise
position du groupe de fiches distales. Enfin, la ou les barres en charge chirurgicale secondaire. On peut donc le réserver aux
d’union relient les deux groupes de fiches ; la modularité du situations les plus difficiles : fractures largement ouvertes [42],
fixateur doit permettre d’améliorer la réduction, avant de réunir polytraumatismes, etc.
Fractures ouvertes initialement, mais peut être différente si des difficultés sont
prévisibles du fait d’une première voie d’abord inadaptée
Elles sont souvent de stade 1 de Gustilo. En cas de fracture
(Fig. 25). L’abord de tout foyer de pseudarthrose diaphysaire
de stade 3, un traitement par fixateur externe doit être préféré,
impose l’excision du tissu fibreux d’interposition, l’ouverture du
comme nous venons de l’exposer [42].
canal médullaire proximal et distal, la mise en contact étroit des
deux extrémités osseuses. La décortication de Judet est techni-
Fractures avec complications vasculaires quement difficile mais à envisager si les conditions locales le
permettent. À l’humérus, un raccourcissement de 1 cm à 3 cm
La voie humérale médiale est utilisée pour l’exploration et la
est une solution possible pour obtenir un meilleur affrontement
réparation de l’artère humérale. Si l’ostéosynthèse est aisée, elle
et « simplifier » le foyer, sans conséquence clinique notable. Un
est assurée par une plaque médiale par cette voie commune aux
deux équipes. En cas d’ouverture stade 3 associée (plaie par apport osseux est indispensable en présence d’un foyer atrophi-
arme à feu, délabrement etc.), ou si le type de fracture rend que et/ou d’une perte de substance osseuse. La crête iliaque est
l’ostéosynthèse par plaque difficile, voire impossible, un fixateur la source de greffon autologue spongieux qui a fait la preuve de
externe doit être employé. Une fois la stabilité osseuse obtenue, son efficacité. Dans certaines pertes de substance importantes et
le geste de réparation vasculaire est alors réalisé [42, 43]. pour une pseudarthrose itérative multiopérée, un transfert libre
de fibula avec suture microchirurgicale peut être envisagé [52]. Le
foyer de pseudarthrose est abordé selon les principes de l’ostéo-
Fracture avec paralysie radiale synthèse des fractures récentes. Il devient ici indispensable
La paralysie radiale est la complication la plus fréquente des d’utiliser une plaque large et surtout quatre vis d’excellente prise
fractures humérales récentes, surtout dans les localisations au-dessus et au-dessous du foyer (Fig. 25).
basses, de type transversales ou spiroïdes : sa prévalence est En cas de pseudarthrose secondaire à une chirurgie endomé-
d’environ 12 % [24, 44]. Elle est de pronostic favorable puisqu’elle dullaire, un alésage et enclouage est proposé (d’un diamètre
évolue vers une récupération spontanée dans près de 9 cas sur supérieur au précédent s’il s’agit d’un changement de clou), sauf
10. La constatation d’une telle paralysie n’est donc pas un s’il s’agit d’une pseudarthrose atrophique qui nécessite un abord
argument pour proposer un traitement chirurgical, le traitement en décortication et le plus souvent une greffe [56]. Le montage
orthopédique gardant alors toute sa place en cas de fracture peu est fait si possible avec compression du foyer et fixation
déplacée. En cas de fracture avec paralysie radiale nécessitant bipolaire statique.
une ostéosynthèse, l’exploration du nerf sur tout son trajet
En cas de pseudarthrose secondaire à un traitement ortho-
latéral et antérieur doit être faite. Les techniques endomédullai- .
res à foyer fermé perdent donc leur intérêt [21, 22]. L’exploration pédique ou à une fixation externe, la chirurgie à ciel ouvert ou
première du nerf est ainsi faite par voie latérale, puis l’ostéosyn- endomédullaire peut être proposée au choix [54].
thèse assurée par une plaque latérale ou antérieure (Fig. 18). Les pseudarthroses septiques sont traitées en deux temps
Lorsque le nerf est rompu, sa suture directe s’impose si l’opéra- classiques : dépose de l’intégralité du matériel, nettoyage avec
teur maîtrise les techniques de microchirurgie. Lorsqu’il est prélèvements bactériologiques, fixation externe et traitement
continu, sa palpation et sa stimulation électrique permettent antibiotique. Une résection osseuse est possible dans ce cadre
d’apprécier ses chances de récupération : un nerf vide non pour se retrouver en zone saine, avec deux surfaces corticales
stimulable doit être réparé (suture, résection-greffe) ; un nerf planes, faciles à affronter et à mettre en compression avec un
simplement contus et stimulable doit a priori récupérer. fixateur externe. Il faut alors préférer un montage monoplan
dynamisable pour mettre progressivement en compression le
Coude flottant [45-47] foyer. À distance du premier temps, l’évolution septique étant
favorable, une révision chirurgicale est proposée telle que
Il s’agit d’une association fracturaire humérale et des deux os
décrite précédemment, sauf si la consolidation a été obtenue
de l’avant-bras (diaphysaire ou métaphysoépiphysaire). Tous les
avec le montage par fixateur.
auteurs s’accordent sur l’importance de l’ostéosynthèse de la
diaphyse humérale, qui doit être réalisée en premier. Si les
lésions sont très complexes (fréquentes dans ce cadre de Fractures pathologiques [57]
traumatisme à haute énergie), une fixation externe pontant le
coude est proposée. S’il s’agit de fractures simples chez un sujet La chirurgie des fractures pathologiques diaphysaires est
stable au plan hémodynamique, une chirurgie par ostéosynthèse envisagée à ciel ouvert si le diagnostic tumoral est connu. En
à ciel ouvert est indiquée, sur un patient en décubitus dorsal, cas de fracture métastatique, la pose de plaque doit donner une
avec pose de plaque sur chaque diaphyse fracturée. S’il s’agit de stabilité immédiate : elle peut être associée à un comblement
fractures articulaires proximales antébrachiales et humérale de l’ostéolyse par du ciment chirurgical avec analyse histologi-
basse, une ostéosynthèse à ciel ouvert par plaques peut être que du foyer fracturaire. Le cimentage nécessite un abord
réalisée en décubitus latéral par voie postérieure concernant les direct, un curetage du foyer tumoral et son injection sous
épiphyses et l’humérus, puis si nécessaire par voie antérieure en contrôle de la vue et protection des éléments vasculonerveux.
décubitus dorsal concernant le radius. Si le patient est en Ce geste demeure hémorragique, non dénué de conséquences
revanche instable, une ostéosynthèse diaphysaire par embro- hémodynamiques, et est discuté en fonction de l’état général
chage de l’humérus et de l’ulna reste possible par la même voie du patient. La radiothérapie postopératoire fréquemment
d’abord en décubitus dorsal, puis le radius par brochage
indiquée n’est entreprise qu’après parfaite cicatrisation cuta-
ascendant.
.
A B
Figure 25.
A. Fracture transversale de l’humérus gauche, tiers inférieur. Luxation associée du coude. Ischémie par interruption de l’artère humérale. Revascularisation par
pontage saphène. Ostéosynthèse « légère » par voie latérale, non adaptée. Pseudarthrose.
B. Révision par voie postérieure avec olécranotomie : ablation de la plaque, avivement, greffe iliaque postérieure et ostéosynthèse par plaque en Y inversé.
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Laporte C., Thiong’o M., Kassab G., Atallah A. Chirurgie de la diaphyse humérale : voies d’abord,
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