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E.

LÉVI-PROVENÇAL
DOCTEUR ÈS-LETTRES

PROFESSEUR A r;INSTITUT DES HAUTES-ÉTUDES MAROCAINES DE BAnAT

LES

- HISTORIENS DES CHORFA


ESSAI SUR LA LlTTÉRATURE HlSTORIQUE
e
WT BIOGRAPHIQUE AU MAROC DU XVIe AU XX SIÈCLE

-_.~--

PARIS
ÉMILE LAROSE, ÉDITEUR
H, RUE VICTOR-COUSIN, 11
-
IIIII~1ij~]i ~j~jfli~jj 1111
139781
1922

'--"-~
LES

HISTORlENS DES CHORFA


Ouvrage publU
SOIlS ies anspices de la Direction générale de l'Instruction publique,
des Beaux-Arts et des A nliquités au Maroc.
E . LÉVI-PROVENÇAL
DOCTEUR ÈS-LETTRE

PROFE E R A L ' INSTITUT DES HAUTES- ÉTUDES ~1AROCAIN ES DE RABAT

LES

HISTORIENS DES CHORFA


ESSAI SUR LA LiTTÉRATURE HISTORIQUE
fj]T BIOGRAPHIQUE AU MAROC DU xvr e
AU XX SIÈCLE

--_ . ~---

PAR I S
ÉMI L E LAROSE, ÉDITEUR
11, RUE VICTOR-COUSI ' , 11

1922
A

MONSIEUR RENÉ BASSET,


CORRESPONDANT DE L'INSTITUT,

DOYEN DE LA FACULTB DES LETl'RES DE L'UNIVERSITÉ D'ALGER.

HOllunage de respectueuse gratitude.


-.:(

- EX 'LIBRIS
-

.
MADAME
DON
DE
SALOMON REINACH
0.
- NÉE MORGOULI EFF _ •
A VANT- PROPOS

J'ai cru, dans cet ouvrage, devoir employer un système de


transcription qui, tout en perlnettant la reconstitution inté-
grale des lnots arabes, ne dé paysât pas trop le lecteur non
arabisant. C'est pourquoi j'ai fait usage, pour la représen-
tation de certaines letlres, de complexes qu'une longue tra-
dition a, pour ainsi dire, consacré, et qui, au surplus, ne
prêlent que rarement à la confusion.
De n1êlne, au li u de m'en tenir à la transcription rigou-
reuse de certains mots passés presque dans le domaine cou-
rant, j'ai préféré adopter l'orthographe admise: ainsi :Mou-
lay pour ~Iawlâï, Sidi pour Sayyîdi, elc.
J'ai fait allusion, dans les pages qui suivent, aux difficul-
lés que l'on éprouve encore au Maroc à obtenir des lettrés
indigènes des renseignen1ents d'ordre bibliographique. Je
dois pourtant à la vérité de signaler une double exception:
à Fès, le chérif Sidi l\10l)ammed 'Abd el-I:Iaï el-Kaltâni a
placé à n10n entière disposition son incomparable collection
de lnanuscrits; à Salé, l'historiographe im périal Si Mol:wm-
meel Ibn 'Ali ed-Dokkâli m'a mis souvent sur la trace d'ou-
"rages intéressants. Je leur en exprime tous mes remercie-
Inents.

Rabat, le 4 janvicr1.!)2~.
INTRODUCTION

Le :Maroc, dans les temps modernes, semble avoir excité


plus encore que n'importe quel pays d'Islâm, l'attention de
l'Europe occidentale. Il se révéla de bonne heure comme une
puissance maritime qu'il fallait ménager; les relalions diplo-
matiques et comlnerciales que le vieux monde entretint a\'ec
lui sont l'indice Je l'intérêt réel qu'on ne tarda pas à lui
porter. De son côté, le public lettré fixa bientôt ses regards
sur cette terre toute proche qui, malgré sa situation géogra-
phique particulière, eut sa lal'ge part de la faveur que la
curiosité de l'inconnu et le goùt de l'exotisme valurent, à
partir du XVIl O siècle, aux lnystérieux pays d'Orient. Le
~Iaroc, tout comme la Turquie, devint à la mode et, cer-
tains de trouver des lecteurs épris de nouveauté, des com-
merçants, des prêtres rédempteurs et même des captifs
rachetés se mirent à écrire des relations de leurs voyages en
.Afrique. Une bonne parLie des ouvrages cités dans la biblio-
graphie du :Maroc, de Playfair et Brown, est antérieure à
1 00; leur nombre di t assez la vogue dont jouissait alors ce
sujet.
On a déjà fait remarquer, avec juste raison, que ces au-
teurs donnèrent à leurs relations, le plus souvent à torl, des
titres qui purent faire croire qu'elles contenaient un expusé
1
2 LES HISTORIE TS DES CHORFA

de l'histoire du Maroc. Quelques-uns, il est vrai, avaien


cherché à recueillir, soi t directen1ent, au cours de leuF"
séjour, soit auprès de leurs devanciers européens, la maLière
d'une histoil'e du pays. Pas une de ces œuvres, en tout cas,
n'utilisait de SOUI'ces indigènes écrites : du llloins, n'en
avons-nous pas la preuve. Elles témoignent cependant par-
fois d'un effort méritoire et il faut reconnaître qu'il en est
parmi elles qui sont encore aujourd'hui d'un secoul's pré-
cieux.
Des travaux comme ceux de Diego de Torres (1535), de
:i\IouëLLe (1682), de Pidou de Saint-Olon (1694); du P. Busnot
(1714), de Braithwaite (1729) et de Chénier (1787) ont, il ne-
faut pas l'oublier, servi de base, il n'y a pas bien longtemps
encore, à des études écrites en France, en Angleterre et en
Espagne, sur la période moderne de l'histoire du :Maroc.
Quelles que oient leur partialité et leur prolixité, il ne
faudra janlais les considérer comme périmés, surtouL pOUl'
ce qui a trait aux relations du pays avec ses voisins d'Eu-
rope.
Néanmoins, des sources arabes existaient; quelques-une
avaient franchi les frontières du :Maroc, Lraversé la mer et
gagné l'Europe. Quand elles furent signalées à l'attention
des orientalisles, cenx-ci se préoccupèrent de publier d'abord
les document relalifs au Maroc du Moyen Age, qui ,étaient
certainernent dignes, comme l'Jlistoil'e des Berbères d'Ibn
Khaldoûn, par exemple, de la pr ' férence qu'on leur accorda.
Celui de Ces doculnenls ' qui semble avoir eu la plus grande
fortune fut la chronique des premières dynasties qui régnè-
rent au :i\Iaghrib et l'histoire de la ville de Fès, le Rawçi el-
qirtâs d'Ibn Abî Zar'; en moins d'un siècle, il bénéficia de
quatre traductions, en allemand, en portugais, en latin et en
français, et il aura bientôt l'édition critique définitive à la-
queUe il a droi t.
C'esl à ~f. IIoudas que revient le mérite d'avoir, le pre-
mier, révélé au.' historiens européens les chroniques maro-
caines modernes. En 1886, il puLliaiL, en effet, avec une'
traduction fl'ançai e, ]e chapitre de l'hi toire musulmane
d'ez-Zayyânl relatif à la dynastie 'alawite, et, en 1888.89~
INT110DUCTION 3

l'histoire de la dynRstie sa'dienne d'el-lfrâni. Plus lard, il


continuait par l'édi lion de chroniques arabes soudanaises, le
Tâ' rUell es-Soûdân et la Taclltldrat en-nisiân, qui ofhent un
gL'and intérêt pour l'histoire du Maroc, dans ses relations
a vec le pays noir.
En même temps, les Musulmans de certaines villes d'Al-
gérie, de Tlemcen surtout, entretenaient des rapports a sez
.suivis avec le :Maroc savant. En utilisant ces relations,
certains orientalistes purent se procurer des exemplaires,
si rares encore aujourd'hui, des éditions arabes de Fès.
Les œuvres des hagiographes marocains, lithographiées
dans la capitale, permirent en grande partie à M. Gour son
travail sur l'établissement des Ghorfa au Maroc: l'une des
premières études relatives aux deux dernières dynastie~
chérifiennes qui tint un égal compte de sources euro-
péennes et des sources indigènes.
En 18~r (1312 Hég. ), le Ki! âb el-istiq$â d'en-Nâ~iri sortait
des pres es du Qaire. L'histoire marocaine deyait, dès lors,
tirer grand parti de cet ouvrage, surtout quand les Al'chives
marocaines publièrent la traduction française, par Fumey,
du tome relatif à la dynastie 'alawite.
Ainsi donc, jusqu'à la fln du XIX e siècle, l'histoire dLl
:Maroc moderne n'est établie que sur la foi de documents
européens; aux données qu'ils fournissent s'a joutent, à ce
moment, les renseignements précis de quelques chroni-
queurs marocains, dont les œuvres sont devenues acces-
sibles à tou , ou que les historiens arabisants peuvelll allcr
chercher dans les Inauvaises éditions du pays. Le Maroc,
quelque vigilance qu'il ait n10ntré jusque-là à feerner ses
portes à l'étranger ét à se défendre de lout contact exté-
rieur, a pourtant laiss é échapper au dehors qûelque chosc
de lui-même: des livres, qui ne connaissent pas de fron-
Lières. Si peu 110111 breux g u'ils soient, ils corrohorent de
leur autorité les travaux historiques étab lis en Europe, eIl
éc lairant parfois d'un jour nouveau certains aspects du passé
lllaghribin . L'hi toire du pays, tracée grâce aux uns et aux
autres, peut alors passer pour à peuprès définilire.
4 U:s ITISTURIENS DES CHORrA

AujourJ'hui, la bJrrière est tomhée. Le :M aroc, nouyeau


venu à la science, est une terre vierge pour les enquêteurs.
Les inve tigations de tout ordre s'y poursuivent et y sont fé-
conues. Il semble le dernier refuge de l'in édit , la demeure
d'éjection des chercheurs. L'ethnographe et le linguiste y .
trouvent, comme le géologue, de la mati' re toute neuve:
car, de même que le sol qu'il habite, le Marocain du peuple
se laisse volontiers sonder. Celui qui témoigne quelque in-
térêt au passé littél'uire du pays est, au contraire, encore
arrêté à chaque pas. Il voit hien, dans les villes, s ' ouvrir de
bonne grâce, devant lui, les portes des bibliothèques privées
réputées pour leur richesse. Sous ses yeux, défilent padois
des œuv"es dont il Soupçonnait à peine l 'existence et qu'il
désespérait de rencontrer un jour: dlwân de poètes, antho-
logies, chroniques, recueils de biographie ou d'hagiogl'aphie.
1l teuillette aviuement, dans une posture qui ne lui est pas
famili ère, ce manuscrits enserrés dans des reliure fanées
e t rongées; l' un d'eux, plu. spécialement, le relient; il vou-
drait en prend,'e ou e n faire prendre copie, serait h eureux
que son hôte le lui confiât; il se heurte, dans la plupart des
cas, à un refus courtois, mais fe rme, enveloppé d'un pré-
lexte quelconque. POUL' le bibliophile, le :M aroc est une terre
fertile ct riche en promesses, mais terriblem ent caillou-
teuse.
Ce n'est pas une raison pour que la recherche Jes docu-
ments écrits doive être délaissée pour l'instant. Des élé-
ments nouveaux d'information, si pénibles qu 'ils soient à
atteindre, existent néanmoins. Pour le passé du pays, l'in-
tél'êt qu'ils peuvent offrir n'échappera à pel' onne. Grâce
à ces so urces nouvelles, l'histoire du :M aroc risque d'être
au moins complétée et les vides qui la morcèlent ont peut-
êtl'e quelques chances d'être comblés (1).

( l) Cf. à cc suj et IJ o uh.lit qu 'e n 1860, Léon Go ~la rd formulait d éjà


dans a Description el IIisloire du Maro c, p. D09.
INTRODUCTION 5

On s'était, d'ailleurs, aperçu en France, dès le début du


xx e siècle, que celte histoire devait être écrite à la lumière
de docunlents nouveaux. D'autant plus que ces documentsr
dont on soupçonnait l'existence au Maroc même, n'étai en t
pas les seuls ~ J'autres, également importants, étaient ceux
que les collections d'archives des difl'él'ents pays d'~urore
semblaient devoir renfernler. Il y a quinze ans que M. Henry
de Castries, voulant composer une histoire du Maroc, vit
qu'il était auparavant indispensable de publier, avec l'appa-
reil scientifique dont elles ne pouvaient se passer, toutes ces
« sources inéd ites » conservées hors d'Afrique . C'est alors
que ce savant entreprit l'e nquête remarquable qu'il mène
encore actuellement et qui est loin d'être close. Tant qu'elle
n'aura pas élé conduite à sa fin, il est peu probable que l'on
s'aventurera à en tirer une synthèse historique, provisoire
et prématur ' e.
Tout le monde reconnaît, ayec l' éditeur de ces sources eu-
ropéennf's, ([U' « au point de vue de l'incertilude ues faits et
des jugements, il n'y a pas J'histoire qui soit cam parable à
celle du Maroc (1) » . Ces sources nouvell e contribueront il
dissiper ce lte in certi tude ; mais y suffi ront-elles ? Quelle que
soit l'importance qu'on leur accordera, elles ne nous rensei-
gneront de première main que ~ur une petite partie du
sujet; en ce qu i .concerne l'histoire intérieure, elles seront
peut-êtL'e un excellen t moyen de contrôle, mais n'apporte-
ront Ci u'exceptionnellement une information nouyelle. L'his-
toil'e moderne du Maroc, établie grâce à elles, n'aura do
valeur <lue si elle a, en mème temps, utilisé toutes les
source arabes, puisqu'elles existent (2) .
Ce sonl ces dernières que l'on se pl'opose d'étudiel' ici,
pour la période qui s'étend du d ' but du XVie siècle à nos
jours. On verra plus loin qu'elles ne consi tent pas Uni(ple-

(1) H. dc Ca tric, ource' inédiles de l'Histoire du Maroc, Ue é rie , 1<rance,


l. l, Pari , 1905, p. UL
(2) lIouùas rcmarquaillui-mêmc, dan ' L' (l A c rLi 'C ll1cnl » qui précède
sa lraduction d 'er-Rawe,l el-halotin d'Jbn Ghàzî (Monog r(Lphie de Méquinl>: ),
p. 2: «( ... à toul prcndrc, lcs Mus ulman parlanl d c leur pal ri e onl lou -
jours plu s prè d c la vérité que les autcur curopécns».
6 LE HISTORIENS DES CHORFA

ment en annales historiques et que les biogra phes ont leur


place marquée dans le cadre de ce travail, parce qu'ils sont,
autant que les chroniqueurs, des historiens du 'M aroc ché-
rifien. On essaiera, des uns et des autres, de dresser l'in-
ventaire le plus complet possible, sur la foi Je renseigne-
ments recueillis auprès de quelques lettrés marocains, ou de
recherches bibliographiques (1). ~1ais1 avant de les étudier .
eux-mêmes, il ne sera pa inutile d'examiner la place que
tient l'histoire dans l' nsemble du mouvement littéraire du
pays; de tente r de définir l'originalité de ce mouvement ;
d'esquisser, en un mot, un tableau sonlmaire de la litté-
rature arab e marocaine.

II

Cette littérature marocaine existe-t-elle d'aille urs ? -t-on


le droit d'appeler de ce nom une partie, si impol'tante soit-
elle, do la littérature arabe musulmane, qui a pl'is fOl'nl sur
un domaine' immense, celui de l'!slâm par ' l 1l1onJe. S'il
est vrai que la langue employée est une, elle dont le Qor'ân
constitue le modèle inimitable et parfait, n'y a-t-il pas pour-
tant, au moins pour le -M aroc, l'obligation de tenir cOlnpte
de l'isolement géographique et d'enyisager à part la produc-
tion littéraire d'un pays -qui, assez tôt, a possédé sa physio-
nomie propre?
D'une façon générale, il faut évidemment répondre par la

('1 ) Aucun élément de recherche n'a été fourni par le li~tes bibliogra-
phique. de Fluegel, Catalogus librorum qui praeler celeros in regionibus
Jfricae occidenlalibus non sunt in ordinem do ctrinarum .·,. (t. VI, p. 660 de
on édition de 1)âjjî l halîfa) et de . Kampffmeyer, Eine alte Lisle al'abis-
cher Werke z ur Ges chichle paniens und Nordweslafrikas, in Mitleilungen
des eminars (ür Orienlalische prachen, lÀ, Berlin , 1906, pp. 74-110. On
ait que le document utili é par ce dernier (lithoaraphie con ervée au
éminaire de Étude orientales de Berlin ), n'e t qu 'une li te de recher-
che que le avant Codera composa lui-mème et fit circul r au Maroc,
dan l'c poil' d'arriver à d' découverles d'ordre bibliographique.
INTRODUCTION
7

n' gative. Bien d'autres avant nous ont eo' posé la place pré-
pondérante que les sciences islâmiques ont toujours occupée
dans la littérature arabe. Que découvre-t-on, en effet, dans
l'immense collection des œuvres de langue arabe, à travers
lèS innombrables copies conservées dans les bibliothèques
.d'Europe et d'Orient? Une glorification permanente, une
illustration, d'une richesse inouïe, de la r ligion musulmane
et de la langue dans laquelle le Qor'ân a été révélé. Ce sont
d'abord les commentaires du Livre, puis la tradition re-
cueillie de la bouche du Prophète, et la vie de ce Prophète
lui-même, la théologie et le ùeoit reposant sur l'interpréta-
tion des textes sacrés; puis la langue, étudiée sous tous les
aspects de son incompa'r able complexité morphologique et
lexicographique. Somme toute, dès les premiers siècles de
l'ère musulmane, les littérateurs arabes apparaissent surtout
<comme des gramnlairiens pointilleux et des théologiens
,assiùus.
Il n'est pas de pays du monde islâmique qui, tôt ou tard,
n'ait apporlé sa contribution à cette littéralure. Les euls
ethniques des écrivains de langue arabe l(~ moignent de leurs
origines divers s : ils rappellent aussi bien les déserts brô-
lants de l'Afrique que les steppes glacés de l'Iran; il affec-
tent parfois de rUlles consonances où l'on reconnait la
langue berbère et le Maroc. Et ce n'est pas l'une des
llloindres forces de cet Islâm que d'avoir su ainsi, sur des
milliers de lieues, provoquer ces enquêtes arides et stricte-
ment objectives, qui n'ont pas eu assez de treize siècles pour
êlre définitivmllent terminées et classëes.
Le Maroc était à peine islâmisé qu'il eut à cœur de colla-
borer à cette tâche, méritoire au plus haut point dans l'es-
prit de ceux qu'elle occupait. Dès le ~loyen Age, en dépit
des cénacles brillants de l'Andalousie proche, des noms
Inarocains deviennent notoires, puis célèbres. 1\1ais il n'exis-
tait pas encore d'enlpire marocain proprement dit; l'Espagne
et r Afrique :Mineure, jusqu'à l'Ifrlqîyya et la Sicile, ne fai-
saient le plus souvent qu'un. S'il y eut un mouvement litté-
raire africain ou andalou, il n'y eut pas, à ce moment, à vrai
.dire, de mouveillent littéraiee exclusivement marocain.
8 LES HISTORIE~S DES CHORFA

Alors, dans tout le monde musulman, la littérature arabe


élargit son idéal; les relations avec certaines pa rties cl e
l'Europe, un degré avancé de ci vilisation, un souci artistique
assez accusé invitent l'élite intellectuelle à se hausser à des
spéculations extra-islâmiques. La médecine, l'astronomie, les
sciences exactes sont en honneur; la philosophie, tout en se
montrant respectueuse de l'orthodoxie, va résolument de
l'avant; la poésie connaît de beaux jours et n'a presque rien
à envier aux chantres arabes d'avant l'Islâm. De Grenade à
Fès, et de Fès à Tunis, une fiévreuse activité règne parmi
les savants. C'est l'apogée de la littérature musulmane et
l'âge d'or de la civilisation maghribine.
Puis, c'est le déclin. Avant la fin du xv e siècle, les der-
niers Maures quittent la péninsule ibérique. A ce moment
va se former une école vraiment marocaine. Elle a pour elle r
tout d'abord, l'appoint considérable d'une grande partie des.
expulsés du pays voisin. Si elle reste en relations suivies
avec les centres intellectuels d'Orient, elle échappe néan-
moins à leur tutelle; et, dans le pays, Ile va rayonner, non
seulement de la capitale savante et de son Tniversité, mais
aussi, et encore plus, des zâwtyya disséminées dans le
pays.
C'est le total des œuvres issues de cette école, des produc-
tions littéraires de ce pays dans les temps modernes, que
l'on cl ' signera dé ormais sous le nom plus commode
qu'exact de littérature arabe marocaine.

On sait à peu près, maintenant, à quoi s'en tenir sur les.


causes, restées longtemps obscures, qui sapèrent, insensi-
blement d'abord, puis avec une violence de jour en jour
accrue, le pouvoir p eécaire des derniers souverains berbères
du Maroc et amenèrent à la tête de l'Empire la dynastie
des Chorfa, que l'on appela ensuite, pour le distinguer des
. Alawites, les Chorfa Sa' cliens : lu ltes incessantes des
sultans de Fèé contre le dynastes de Tlemcen et de Gre-
nade, expulsion des derniers émirs andalous de leurs
INTRODUCTION
9

royaumes, et, surtout, mouvement de l" action contre les


entreprises des Chrétiens et leurs visées sur le ~,iar'oc, pro-
pagande active des marabouts et des confrél'ies religieuses,
prêchant ouvertement la guert'e sainte, l'expulsion des infi-
dèles de la terre d'Islâm et la course sur mer. Les expédi-
tions organisées par les souverains de Portugal et de Castille
pour refréner la piraterie ne font qu'exaspérer davantage la
masse du pays qui ne reconnait plus de pouvoir temporel. Il
suffira à des personnages religieux, descendant du Pro-
phète, de se lnettre à la tête des tribus du SOlls et de chasser
les Chrétiens d'un point méeidional Je la côte atlantique où
ils se sont installés, pour que les dernier sultans berbères,
voyant de jour en jour s'affaiblir leur maigre autorité, n 'ar-
rivent bientôt plus à oppo el' de résistance sérieuse au mou-
vement révolutionnaire qui soulève le pays et les emporte.
Le :M aroc est, dès lors, l'extrême refu ge occidental de
l'Islâm; les Turcs s'installent à Alger, les relations politi-
ques avec le re te cl u Nord de l'Afrique s'espacent; l'isole-
ment définitif de l'Empire date de cette époque: si para-
doxale que puisse paraitre celte expression à qui n'a pas
étudié l'histoiee du :Maroc, ce pays scelle dans l'anarchie
son unitè politique; ses limites ne varieront plus ou presque,
dans les siècles qui suivront (1).
Cette poussée religieuse avait pris naissance dans des cou-
vents, zâwtyya ou ribât, situés la plupart du temps en
dehors des villes, auprès du tombeau d'un saint ou d'un
chef de confrél'ie. Ces couvents furent bientôt, en même
telups que des foyers Je réaction, des écoles, qui, de plus
en plu fréquentées par des étudiants aussi avides d'exalta-
tion religieuse et mystique que de science, finirent par con-
cureencer sérieusement, pOUl' ne pas dire di tancer, l'ensei-
gnement semi-officiel donné à Fès dans la mosquée
cathédrale d'eL-Qarawiyin (2). Cette Université, qui avait
déjà perdu son ancienne prospérité et l'éclat qui s'était at-

(1 ) ~ ur cette période Lroubléc, voir .A. Cour, Élablissem,enl des dynasties


des chérifs au Maroc, chap. 1 cL Il

(2) Cf. ibid., p. 6.


10 LES HISTORIENS DES CHORFA

taché à son nom aux beaux jours de la dynastie mérinide,


cessa d'être le seul grand centre intellectuel du pays; si, par
la suite, elle put recouvrer quelque chose de sa splendeur
première et voir à nouveau affluer les tolba à ses cours (1 ),
elle ne se releva jamais suffisamment pour mériter le titre
de « Source de la science et paeure du ~Iaghrjb », dont jadi
elle avait été digne (2).
Quoi qu'il en soit, à partir du XVIe siècl , l'enseignement
donné soit à Fès, soit dans les zàwîyya éparses au :M aroc,
marque d'une même empreinte particulière les lettrés du
pays. La culture du savant marocain, à cette époque, et dans
la suite, prend forme et ne varie plus. Elle se cristallise
suivant un programme strict où, non seulement, les matières
enseignées sont bien délimitées, mais qui groupe aussi une
liste d'auteurs classiques dans l'ordre de leur importance.
Quatre siècles passeront, qui n'apporteront pas de modifi-
cation notable, aussi bien dans les choses de l'espri t que
dans la vie extérieure.
L'un des caractères les plus saillants du Maroc moderne
est, en effet, sa haine du changement. Alors qu'en Europe,
il faut tirer parti de tous les documents conLen1porains pour
se représenter de manière exacte le tahleau d'une société à
peine disparue, au Maroc, plus encore qu'en tout autre pays
d'Islàm, peut-être parce que l'esprit traditionali te du Mu-

('1) vant notre in Lallation à l<ès, Oll s'était beaucoup e agéré il Eu-
rope l'importance de celle Iliver ilé. Elle eslloin de con liluer Le cenlre
d'éludes laborieux et flori sant que l'on s'imaginail naguère. Qua nt à a
bibliothèque, on peut dire que la publication de son catalogue (A. Bel,
éditeur, Catalogue des livres arabes de la bibliolhèque de la mosquée d'el-
Qarouiyîne à Fès, Fè , 1918) a été une déception pour les orien tali tes;
les collection particulières ou appartenant aux Q,oboûs offrent au Maroc
des re Ources bibliographiques certainement plu digne d 'attention.
Depuis longtemp , la bibliothèque d'el-Qarawîy.în n'a ce sé d 'è tre métho-
diquement pllIée et de Ouvrages précieux qu'elle contenait, un eul, par
miracle , a échappé aux tentations des bibliophile marocains: l'e em-
plaire du Kilâb el-'ibar d 'Ibn Y haldoùll, dédicacé de la main mème de
l'auteur (cf. Calalogue, nO 1266).
(2) ' bd el-J;Taï el-1\altàni, lIId(li 'l-QaJ'awt'yt'n wa moslaqbalohâ , ap. Bel,
op. cil., p. 4.
11
INTROD CTlON

suln1an s'y est accru de l'esprit conservateur du Berbère,


.on ressent une impression constante de stagnation absolue,
on est frappé par une atonie dominante, un manque de plans
successifs, de cadres, qui mettent, comn1e ailleurs, tout en
place dans le passé. Et l'on finit vite par se convaincre
que, pour connaître ce que fut le pays pendant les siècles
précédents, il suffit souvent de regarder et d'entendre
aLrtour de soi; qu'une promenade d'une heure y est aussi
fructueuse qu'une journée de recherches dans une biblio-
thèque. Toutes les descriptions du pays, écrites jadis par
des voyageurs européens, sont encore, au point de vue
social, rigoureusement valables. Quoi de plus saisissant,
dans sa vérité actuelle, que ce minutieux tableau de Fès et
de son bazar, que parcoura.i t au début du XVIe siècle Léon
l'Africain ; rien n'a changé, pas même le nombre des
échoppes, et les boutiquiers accroupis discutent encore
aujourd'hui avec la même foule grouillante et bariolée.
Aussi loin que l'on pousse l'enquête, la similitude est trou-
blante : l'ethnographe se trouve au ·M aroc en présence d'une
lnine inépuisable de ri tes millénaires et l'historien n'a guère
à craindee d'y commettre des anachronismes, car, pour dé-
couveir le passé, il n'est gêné par aucun souci de transpo-
sition ou de reconstitution.
S'il est une figure qui, à coup SOT, n'a pas changé depuis
quatre cents ans, c'est bien celle du savant marocain; tel
nous le coudoyons n1aintenant, passant, son tapis de feutre
sous le bras, dans les venelles qui entourent l'Université de
Fès, tel, sans aucun doute, il fut jadis. n
n'a pas appris et
n'enseigne pas autre chose que ses ancêtres, et il suffira de
l'interroger sur lui-mêrne pour avoir la liste des connais-
sances qUl lueublaient leurs esprits.

III
La qualité de savant, au ~Iaroc, est d'ailleurs, si l'on peut
dire, héréditaire. On rencontre à chaque pas, quand on s'en-
quiert des auteurs d'œuvres écrites en terre marocaine, des
12 LES HISTORIENS DES CHORFA

ethniques semblables à deux ou trois sièc les J'intervalle;


si bien que l'on est tenté de croire que quelques grandes
familles privilégiées ont, de père en fils, au cours des géné-
rations, monopolisé la science. On aura l 'occasion d'étudier
plus loin quelques-unes de ces lignées d'érudits dont les
descendants actuels doivent précisén1ent, pour la plupart, le
pl'incipal de leur notoriété à leur nom et au passé littéraire
qu'il rappelle. .
On n'insistera pas outre lnesure sur la façon dont l'ensei-
gnement islâmique était, au mOlnent de notre arrivée, pra-
tiqué au Maroc. D'autant plus qu'il ne diffère pas tellement
de celui que reçoivent les étudiants des autres pays musul-
mans, d'Algérie et de Tunisie principalement, où l'on est
depuis longtemps à mêlne d'ètre fixé sur place et de ma-
nière exacte. Ici et là, d'ailleurs, le début des études consiste
dans la lecture répétée du Qor'ân; elle entraîne la mémoire
à un asservissement qui nous étonne et nous force presque
à prendre au sérieux les légendes qui nous sont parvenues
sur l 'hypermnésie professionnelle des râwfyya des premiers
siècles de l'Hégire. l\Iais peut-ètre ne sera-t-il pas inutile de
passer ra pidement en revue les différents enseignements
professés et le s « manuels » employés, qui fOrn1ent, au sur-
plus, le fonds traditionnel de toutes les bibliothèques maro-
caines, et dont la connaissance permet si bien, presque dans
tous les cas, d'aller puiser tout droit, dans ces dernières,
l'ouvrage illédit et intéressant qu'elles peuvent renfermer.
Au sOl'tir de l'école dite « coranique », que sait le jeune
'M arocain destiné, par son nom, sa fortune ou l'ambition
pateL'nelle, à des études prolongées? Peu de chose, sinon le
texle sacré et quelques rudiments de grammaire. Son pre-
mieL' soin est alors d'apprendre, toujours par cœur, en même
temps ou ::;uccessivement, deux courts poèmes didactiques:
l'Ajo/'/'oû17zlyya et el- J/o/'chid el-mot ln d'Ibn < Achir (1), aux-

(1) Il n'a pas paru nécessa ire d 'a llonger la lisle de au leur cl des ou-
vrages qui va , uivre de rérérences bio-bibliographiques. On les lrouvera
facilement, soil dan le Geschùhte der Arabischen Lilteralur de Brockel-
mann, soil dans les nolices de nos Manuscrits arabes de Rabat.
INTRODUCTION
13

quels s'applique la dénomination caractéeistique d' (( œuvres-


Hlères » (ol7vnahât) et qui, par la suite, constitueront pour
lui de commodes ( résumés aide-mémoire » de grammaire
et de théologie.
Granlluaire et théologie, plus exaclement langue et reli-
gion, voilà les deux objets à la connaissance parfaite des-
quels vont tendre luaintenant les effor ls de l'apprenti savant;
au lever du jour, à midi, après le coucher du soleil, il se
joindra au cercle des tolba qui, à la mosquée ou à la zâwîyya,
se pressent autour d'un maître en vue, et, rentré le soir au
logi paternel ou dans son élroite chambre de médersa, il
essaiera de se rmuéluorer et de graver dans son esprit
les phrases pour ainsi dire stéréotypées qu'il aura en-
tendues.
Delphin a tracé, dans s?n mémoire déjà ancien sur l'Uni-
versité de Fès (1), un tableau des auteurs étudiés pour cha-
cune des disciplines enseignées. Bien qu'exact dans son
ensemble, ce tableau a trop d'exten ion: ce n'est pas une
liste-type. Cette derni' re, telle qu'on a pu l'établir' à l'aide
de recou pements dans différentes villes du Maroc, a pparait
r~rem.ent modifiée dans 10 q.étail et e réduit à quelques
noms:
L'Ajo/'/'oûmlyya, pour la gl~ammaire, est expliquée à l'aide
<.lu cOl1unentaire d'el-Azharî, l'Alftyya et la Lân'lÎyyat el-
a(âl d'Ibn Nlâlik, à l'aide de ceux d'el-Makkoüdi et de
Ba1).raq (Aboû A1).raq), le Na,;>l71- el-jomal d'el-:Mojrâdi, à l'aide
de celui d'er-Rasmoùki. La l'hétoriclue est enseignée d'après

( 1) G. Delphin, Pas, SOli UniveI'silé et l'en 'eignement supérieur in Bull.


ltim. de géogr. et d'arch. Oran, VIlr, pp. 93-'205. ur l'enseignement au
Maroc avant rétabli semenl du Prolccloral, cf. égalemcnl un arlicle Jo-
cu mcnté de E. Michau J -Bellaire, dan Jc OLwerw dictionnaire de pédagogie
eL d'instrucLion primail'e, Pari, 1911 , sub Maroc, pp. '1230-H40. Cf. égale-
ment, E. ubin, le Maroc d'aujourd'hui, Paris, H)07, p. 219; G. Yver, En-
cyclopédie de l' Islam, H, pp. 80' ct 81, su.b Fù ; P. Gr moult a donné, dan
le Mercure de France du -15 juin '1920, un article sur l'Université de Fez et
le .. inLellectuels marocains, cl L. Brunot a trailé de l'Université marocaine de
Kamouiyine in Bull. de l'enseignement pLlblic au ~faroc, S" année, Paris,
HU l , pp. ·19G-206.
14 LES HISTORIENS DES CIIORFA

le commentaire' (ecll-Char!l él-m·o.ttuvwal) qu' et-TaftâZtm î 7

uniquement désigné au :Maroc sous Son laqab cl'es-Sa\l ( a<d


ed-din) donna clu résumé d'el-Qazwlnî sur le traité d'es-
Sakkâkî; la glose la plus employée est celle d'el-Jol'jâni es-
Sayyid. Pour l'étude des prindpes de la religion et du droit
(o~'o{ll) , il n'e t fait appel qu'au Jam' el-jawâllzt d'es-Sobki,
avec le commentaire de J alâl ed-din el·Mal;tallî et la glo e
de Kamâl ed-din Ibn Abi Charif. Avant d'aborder l'étude de
traditions islârniques, il est bon d'avoir appris l'Aljl'yya d'el-
'Irâqi sur l'utilité ' cles I;adtth. L'explication des recueils de
l\tlâlik, d 'el- Bokhâd, d' n-N awawî, des Cha17zâ'ïl d' et- Tirmidhi
et du C/tifâ' clu qâdi <Iyyàçl sera pour uivie par le lettré du-
rant de longues années. S'il aspire à ulle charge dans la ma-
gistrature, il apprendra la To/:tfat el)wkkâm d'Ibn <A. im et
la LânuY.ya d'ez-Zaqqâq. Les 'traités classiques de droit mâli-
kite, la Risâla d'Ibn Abi Zard el-QaIl'awânî, avec le com-
mentaire d 'Aboû'l- Basan <A li ech-Châdhili, et le Mokltta~ar
de l halil, avec les commentaires d'el-Khirchî et d'ez-Zorqâni,
feront l 'objet des plus nornbreuse leçons; sans compter la
théologie, ~vec le Alol'chid d'Ibn 'Achir, commenté par
Mayyâra et les trois 'aqtda d'~s-Sanoù i, grande, moyenne
et petite, avec les commentaires et le gloses d'ed-Dasoûqî.
Enfin, pour clore la série, des notions d'astronOluie seront
fournies par le célèbre JJfoqni' d'el-:Maeghithî et des éléments
d'arithmétique par les résunlés d'el- aJa1?âdî et la jJ;foniat el-
/:tossâb d'Ibn Ghâzi.
Une fois ces œuvres pass.é es en revue, le leur' marocain
a atteint le but qu'il se proposait: il est sur le chemin de
la mocltâralca, c'est-à-dire de l'Olnniscience. Il suffira qu'à
Son tour, il devienne maître et se metle ù donner, de la
même façon qu'il l 'a reçu lui-m êlne, l'enseignement à des '
auditeurs d'une nouvelle génération, pour qu'il soit sa-
cré savant, et CI ue son titre lui aSSlll'e en même temp que
quelques moyens d'existence, l'estime et le respect de es
compatriotes.
u terme de ses années d'étude, ou 111ême auparavan t, il
lui arrivera de demander à ses profe seurs cles attestations
de scolarité, qui pourront en même temps constituer de yé-
INTRODUCTION
·15

ritables licences d'enseignernent, ijâza (1), délivrées bien


entendu sans ratification de l'Élal. Le makhzen marocain
_ et il en allait de mèm.e, il n'y a pa bien longtemps en-
core dans tous les pays islârniques - n'accorde pas de di-
plômes ayant une valeur officielle; mais il a établi, sur des
rond provenant de donations pieuses, toute une série
d'allocations mensuelles, priIl}.es à la cience devenues
aujourd'hui minimes avec la dépréciation Je l'argent, sans
dernander en retour aux bénéficiaires. un enseignement ré-
gularisé et fixé pal' lui.
Les ~jâ~a que l'on a conservées - on n'en voudra pour
preuve qlle celle qu'a publiee en 1907 ~1. Ben Cheneb (2)
_ sont d'une inlportance bibliographique capilal~. De même,
il n'est guère d'écrivain arabe au Maeoc, qui, sur le tard de
sa vie, n'ait consacré quelques pages à fournir une lisle dé ·
taill' e de ses mailres. On verra plus loin quel intérêt his-
torique s'attache à ces fahrasa (3). Elles sont également de
la plus grande utilit' pour la détêrmination du cycle des
sciences musulmanes, mais elles s'appliquent, dans la p1u-
part des cas, à des savants qui se sont adonnés toute leur
ie à l'étude.
Au contraire, un lettré de catégorie moyenne - un savant
de troisième classe dans la hiérarchie impériale actuelle -
c.onsidère son bagage comlne suffisant dès qu'il a dépassé
la trentaine. A ce lllonlent, il sollicite une fonction officielle

(1) ur l'ijâ::a qui fui, à l'originc, unc « manière dc reccvoir lran mi'-
ion du J:ladîl. )), cf. ·W. 1arçais, le Taqrib de en- IVawawi, Pari, 1902,
p.115 el nolc 2.
(2 ) Élude sur les personnages mentionnés dans tidjà::a du cheikh 'Abd el
Qddir el Fdsy in Acles du .:U Vc Congrès international des Orientalistes, L1 .
(3) On a adoplé ici la lranscription fuhrasa au licu de jihriso, ce moi
pouvanl êlre considéré comme dérivé ubslanlif dc la racinc quadrililèr
arabi 'éc UJé. ~lorlaÇlâ, Tdj el-'o/'oùs, éd. de Boûlàq, 1306, IV , p. 211,

. vo , esl très explicile à ce sujel: 0~Ja.: ü~~ ...... ~~ U fiA\J


J'ft' \}w cWl\ ~:.. \yi:": \ ~~ ~~ .....'-:'f" 6J) ~
u.)~ ~. . .J,"~\ L-J ~A 4.; t..('
16 .
LES HISTORIENS DES CIIORFA

ou fait, plus simplement, du commerce ou de l'agl'icultu re.


Un ministre marocain, ez-Zayyânî, qui. au XVIIIe siècle, de-
vait, dans les intervalles de disgrâce où sa haute charge à
la cou!' des sultans lui était enlevée, consacrer ses loisiJ's à
des tl'avaux histol'iques, raconte lui-même qu'il termina de
bonne heure à Fès ses humanités musulmanes. « Quand,
dit-il, au moment de mon adolescence, je fus capable de ré-
citer le Qo!"ân, je nl'adonnai à l'étude. Je commençai par
l'Ajo/'/'oû'm<1fya, le petit traité de théologie d' es-SanoLÎsi et
celui d'Ibn 'Achir, sous la direction du chaïkh AI:uned ben
e~-Tâhir ech-Chargi. Je continuai par la Risâla d'Ibn ALi
Z ~lïd el-Qaïrawànî. à la nl0squée d'el-Andalos, auprl~s de ~Io-
1)ammed ben e~-Tayyib el-Qâdirî; en 111ême temps, je pro-
fitai, à la médersa d'e~-$aheij, des conférences que ' Abd el-
Qâdir Boùkhri~ faisait à ses fils sur .l'Aljlyya et la Risâla.
Je suivis ensuite le cOU!'S de ce derniel' SUl' le cornmentaire
du Qor'ân, le précis de droit de Khalil et l'Alji'yya, en même
temps que j'assistais, à la lI10squée d'el-Qa"a-wiyin, à celui
d 'AbOli f:Iaf~ ' Omal' el-Fâ. L sur le droit mûlikite. Pui ,j'en-
t!'epris l'étude de la logique dans le résumé d'es-Sanoùsi
et continuai, au COurs proIe sé à la médersa d'el- 'A ttârîn
paL' l\Iol)ammcd Ibn Ibrâhîm ed-Dokkâlî, l'explication de
Khalil que je devais reprendre ensuite, sous la direction de
Mobarnrned Bennânl, l'auteur de la glose Sur le commen-
taire cl'ez-Zorqâni. Je terminai mes éludes en l1ti9 (1755-
1756), à l 'élge de vingt-tl'ois ans (1). »

Les œuvres sont nécessairement le reflet parfait de celte


culture à forte empreinte islâmique, et, de ce fail, durant
les siècles qui précèdent, l'eiTol't littéraire au :M aroc est loin
de pouvoit' accuser quelque originalité. Il 'agit avant tout,
dans l'esprit des lettrés, de faciliter l'étude de ces traités

( l ) D'a pI''. el-To/:iomâna[ el-/cobrd d'Aboù 'l-Qà im cz-Zayyàni, In . de


Salé, fol. 0 l'0 . Cc pa s Clac a été partieHement traduit pal G. Salmon, in
Archives marocaines, 1" pp . 33'2-333.
INTRODUCTION 17

définitifs où la science Inusulmane est tout entière con-


<lensée. Il en résulte la production, dans le pays même,
d'une quantité déconcertante de commentaires, de gloses,
<le résumés, qui, tous, n'ont qu'un but: éclairer jusqu'à
l'extrême limite, sans négliger les détails même les plus
infimes, les œuvres inégalables des maîtres disparus. :M ême,
dès le XVI e siècle, il 'selnble que le mouvement religieux qui
soulève le pays contre les visées chrétiennes, ait prohibé,
'pour un tem ps au moins, tout genre profane dans le domaine
littéraire. La poésie, dès qu'elle n'est pas un panégyrique
de l'Islâm, des saints ou de la noblesse religieuse, est sus-
pecte et vite taxée d'imm.oralité. Les zâwlyya, farouchement
orthodoxes, ajoutent encore un obstacle à toute possibilité
.d'e sor littéraire. C' est à peine si quelques rar es sultans ,
~mis des lettres , donnent parfois à la littérature marocaine
un regain de vit'alité e t d'indépendance, lnalheureusement
momentané et limit ' à une capitale. La libre sp éculation est
bannie du pays, tandis que les doctrines du ~oûfisme ins-
pirent une foule d'e prits en quête de m sticisme.
L'emprise de la culture islâmlque est demeurée vi ace
sur toute l' ' tendue du monde musulman; pas tellement ce-
pendant qu'elle ait étouffé sous elle les résultats de la science
europ éenne et du progrès. C'est au Maroc, en tout cas,
.q u'elle est demeurée la plus forte; la doctrine musulmane,
telle qu 'elle a é té interprétée dans ce pays jusqu'à la fin du
XIX e siècle, n'a permis au lettré de s'en d ' gager un peu que
dans un seul cas: quand il a voulu aborder l'étude du passé
de sa patrie. La seule partie originale de la littérature arabe
marocaine ne peut ê tre (lue l'histoire politique, religieuse
ou littéraire. En dehors de celle-ci, elle ne fait qu'ajouter
sa part au fatras des œuvres strictement islâmiques , pour
la plupart désespérément objectiv s ct incolores. Les NIa-
l' cains de l'avenir pourront, conlme ceux d'aujourd'hui, s'en
enorgueillir et les revendiquer avec zèle. Il suffira à la cu-
riosité européenne d' en dresser . seulement l'inventaire et
de n 'y pas chercher ce qu'elles ne contiennent pas.

2
PHEMIÈRE PARTIE

La Conception de l'Histoire
1

LES ~lAROCAINS ET L'HISTOIRE

EI-Kattânî, au début de sa Salwat el-anfâs, déclare sans


ambages que l'intérêt porté par les Marocains à l'histoire est
tout à fait limité (1) . Et, pour appuyer cette affirmation qui
parait quelque peu osée dans la bouche d'un savant de Fès,
et se soustraire en même temps à la critique et au hlâme de
ses contemporains nettement accusés d'une tare littéraire ,
il tient à citer, d'après les il1o~lâg,arâl d'el-Ioûsî (2), ce pas-
sage extrait de la Irlir'ât el-l1za~âsin de Mo4ammed el-<Arbi
el-Fâsî (3) : « Des savants de l'Islâm ont accusé les Maro-
cains de négligence; ils leur ont reproché d'enterrer leurs
célébrités sous de simples tertres de terre et de les laisser
tomber dans l'obscurité. Combien y eut-il chez eux de
gloires dignes d'être au nloins mentionnées, dont le sou-
venir s'est perdu, faute d'historiens pour le conserver! »
Il n'est pas sans intérêt de voir des écdvains maghribins,
et non des nloindres, faire à plusieurs reprises, à des siècles
différents, cette constatation qui saute aux yeux dès que l'on
s'occupe d'histoire au Maroc. Pour (IU'ils aient eu l'audace

(1 ) l, p . 3: 'é:-!.~l::.l~ ~r\ \~ ~\ ~l::~\ W.


(2) P. 59.
(3) P. 4.
22 L\ CONCEPl'IO~ DE L'HISTOIRE

d'e'u faite état d'une façon aussi formelle, il fallait que vrai-
Illent l'incuriosité des sa \'ants en ce qui concerne le passé
Je leur patri e fù t sans égale; et il suffit, en effet, d'interroger
la plupart des lettrés nlarocains, même réput' s pour leur
savoir, pour se heurter à une ignorance historique presque
incompréhen~ible. Tel savant qui brillera dans les cercles
liltéraire ,q'ui aura, de l'aveu de ses contempotains, atteint
le summum dd la culture parce qu'il aura fait, par exemple,
« deux mille cent conférences SUl' le point de la lettre bâ'
<bns l'expression bismi 'llalt (1) », saura tout juste que c'est
aux Sa<diens que les <Alawites ont succédé. Les différentes
dynasties m3rocaines forment Jans sa mémoil'e admirable-
ment exercée à d'autres spéculations un imbroglio qui étonne
et déconcerte. Il sait à peine que c'est Idris II qui a fondé la
ville de Fès, et que ~'est Moulay Ismâ<Il qui a bâti les palais
Je Meknès. C'est nliracle qu'il n'en fasse pas deux princes
contemporains l'un de l'autre. Il se soucie fort peu de tout
ordre d'évéBements et ne pense pas, au surplus, que les
cllOses terrestres aient véritablenlent un objet et qu'elles
vaillent la peine de quelque attention. L'histoire est la der-
nière science à laquelle il puisse s'arrêter.
Cette opinion est ancrée dans son esprit; elle prend à ses
yeux d'autant plus de valeur que l'histoire n'est, nulle part,
enseignée, Aucun maître officiel, accroupi pour sa leçon
publique au pied d'un pilier de mosquée, ne l'a convié à
~'initier au passé politique ou intellectuel de son pays. Et il
est presque excusable de son ignorance, puisque personne
n'a essayé, au moment de ses études de jeunesse, de l'en
arracheJ' plus ou moins. Il a vu les recherches historiques
délibérément élilninées des programmes que la tradition a
rendus, avec le temps, immuables, Quoi de plus naturel
alors qu'il témoigne de la défiance 'à l'égard de cette
parente pauvre, qui n'a jamais pu bén 'ficier de la lnoindre
heure e~levée à l'explication d'un traité de syntaxe ou de
droit!

( l) el-Ifl'ânî, No zhal el-(/'ddL', éd. Jloucla , p. '132 du le te cl ... 19 de Ja


traduction.
LES MAROCAINS ET L'UISTOIHE 23

Du même cou p, les rares historiens, Cf ui sont forcément,


au milieu de leurs COl1telnporains figés, comme une élite un
peu révolutionnaire, passent à leurs yeux pour des savants
douteux et suspects. C'est qu'il leur a fallu abandonner,
pour un temps au lnoins, la besogne commune et fail'e preuve
d'indépendance pour s'occuper d'histoire. Un historien ma-
rocain, qui, avant d'écrire Sa chronique, n'aurait pas prouvé
son attachement à la science vraiment islàmique et reconnu
son excellence en cornposant, par exemple, une glos~ nou-
velle sur un traité connu, serait à jamais resté dans l'oubli
le plus complet. Si restreint que soit le public sur lequel il
peut compter, il doit auparavant préparer, pour ainsi dire,
le terrain, se concilier ses futurs lecteurs et écarter tout
soupçon de tendances personnelles, par la composition d'une
œuvre didactique établie dans la forme obligée. On verra
par la suite qu'il n'est pas depuis le XVI C siècle, sauf peut-
être ez-Zayyânî, d'historien marocain étroitement spécialisé
et dont on ne possède pas d'œuvres d'un autre genre (1 ).
Les historiens savent donc bien que leurs lecteur::;, malgré
la bienveillance avec laquelle ils pourront ouvrir leurs ou-
vrages, seront, par avance, quelque peu prévenus contre ces
derniers. Aussi, éprouvent-ils tous, dès qu'ils se mettent à
les rédiger, le besoin de justifier leur entrepl'ise, en invo-
quant des argunlents tondant à démontrer l'utilité de l'his-
toire. N'ignorant pas le respect que portent les lettrés aux
grandes autorités de la littérature musulmane, ils essaient
de trouver dans des œuvres célèbres les éléments ùe cette

(1) l ous ommes ainsi d'un avis totalement opposé à celui de Brockel-
mann, qui déclare, dans on introduction au chapitre sur la litLérature
maghribine des XVie et XVIIe siècles (Arab. litt., H, p. 45~ ) : « Par compa-
raison avec es voisins de l'E t, le Maroc jouissait, en matière politique,
d'un passable repos sou le gouvernement de ses Chorfa (sic) ; mais ce
pays était trop éloigné des centres de la culture islâmique pour que celle-
ci y pùt encore è\'re floris anLe. Là aussi, touL comme dans l'EsL, prédo-
minaient les inLérèts militaires; ct la cour de Chorfa avaiL pre que le
caractère d'un camp. C'est pourquoi il était tout à fait naturel que, de
toutes les branches de la littérature aH Maghrib, l'histoire fût encore la
plus florissante; car les di verses petiLes révolu Lions offraient une utile
matière aux 1ellrés. »
24 ,
LA CONCEPTION DE L HISTOIRE

justification. C'est ainsi qu'Abmed Bâbâ (1 ), puis, bien aprè


lui, Akensoûs (2), écrivant les prolégomènes de leurs livres~
ne purent, afin de couper court par avance à toute critique
s'empêcher de s'écrier, avec le fameux polygraphe Jalâl ed-
din es-Soyoùli : « Celui qui ignore l'histoire est pareil à qui
monte une bête aveugle, et hésite à trouver son chemin
comme la chamelle qui ne voit pas devant elle (3). »
Le souci de faire . disparaître cette indifférence ou même.
cette méfiance qui sont un grave obstacle à tous les travaux
historiques, apparaît nettement dans les préambules des
historiens; bien plus, ce souci leur fournit constamment, à
lui tout seul, la matière de ces préambules. Car il ne suffit
pas de flétrir les ignorants de l'histoire, il s'agit aussi de-
démontrer de façon péremptoire que cette science est utile,.
serait-elle même profane; et qu'elle peut d'ailleurs, quoi
qu'on en dise, trouver sa place dans le cadre des sciences.
essentiellement et indubitablementislâmiques.

II

L'histoire fait partie du cycle des « éludes orthodoxes» et.


les esprits distingués la {( placent au pren1Ïer rang (4). »,
Telle est, en substance, l 'affirmation qu'el-Ifrâni a voulu
inscrire, presque en épigraphe, au début de sa Noz hat el-
f:tâdî (5). Comme la généalogie, qui n'est en somme qu'nne-
de ses sciences auxiliaires, d'une inlportance ca pi tal e chez
les Arabes (6) , l'histoire a fait l'objet des préoccupations di-
(1 ) Naïl el-ibtihâj, p. 4.
(2) el-Jaïch el-'aramram, l, p. 2 .

.(3) "l>~ ~~. ~!.J ~~ 0 t-:. ):Jl J~~.


(4) ~-? r Î yk - 4-; >A-À..ï!..
(~) Ed. Houdas, p. 2 du t exte et 3 d e la traduction.
(6) Hi toire et généalogie sont étroitement liées au témoignage d'ez-
Zayyâni, et-Torjomânat el-1cobra, ms. de Salé, fol. 1, ct d 'cn-N..à~iri, Istiq~â,
l, p. 3 in fine .
LE MAHOCAINS ET I .. 'IllSTOInE
25

'vines el le Qor'ân donne en sa faveur des arguments d'une


évidente clarté; il comprend mêlne des versets qui sont
comme cl es axiomes historiques et des points de repère iné-
branlables (1).
Il n'est pas une moqaddilna qui ne cite au moins un ver-
set du Livee sacré ou une tradition du Prophète pour
démontrer l'utilité de l'histoil'e (2). Le preuves apportées
sont souvent d'une naïveté presque enfantine; elles manquent
toutes d'originalité et se réduisent à la même idée: le
Qor'ân et les collections de ~~adîth sont les premiers livres
d'histoire musuhnane; ne serait-ce que pour cette raison
majeure, l'histoire ne pourrait janlais être taxée, par des
gens pieux et sensés, de nlanque d 'intérêt et d'inutilité (3).
En dehors de ces preuves d'ordre religieux, il existe des
exemples classiques de l'utilité de l'histoire, que les écri-
vains marocains, chroniqueurs ou biographes, rRpètent
chacun à leur tour, avec une amusante régularité, si bien
que l'on s'attend à l'avance à les retrouver dans l'introduc-
tion d S ouvl'ages dont on entreprend la lecture. Celui
qui revient le plus fréquemment est, à coup sûr, celui que
fournit l'anecdote de Râ'ls er-roû'asâ', qui, rapportée en
dehors du Maroc par Iâqoùt (t 626 ==
'1229) (4), Ibn Khallikân
i
(t 681 == 1282) (5), el?-$afadi (t 764 ==
1363), es Soyoût

(1) Par exemple, le ver el 58 de la soûrate TH , cité par el-Qâdid, Tachr


el-malhdnî, J, p. l~.
(2) Cf. en- . à~iri, [stiq~â, 1. l, p. 3: « L'ulililé e l démonlrée par ce ver-
el du Qor'àn ( ~ oùr. Xl , ver . 1~1 ) : « ... Je vai te raconler l 'hisloire de
« nO prophèles afin d'aITe rmir Lon cœur ... )) Le Prophèle parlail ouvenl
il . e compagnon de peuple. de l'anliquité, conlme le prouve el-l3okhârî,
ùan on livre ùu f$al.tîl.t, in.tilulé Bad' el-/~halq. (Du commencemenl d~
La créalion). Cf. EI-Bokhàri, les Traditions islamiques, lrad. O. Houdas el
W. Marçais, Paris, MDCCCCV[, l. II, lUre LlX, p. 422 qq. Ibid. : el-Tfrâni
urail recueilli le ' paroles _uivanles : l( L'histoire e lune cience qui ne
ert pa et l'ignorer n'a pa d 'imporlance. >, Cf. égalemenl el-Qàdirî,
achl' el-malhdni, l. 1, p. 4.
(3) On ail d'ailleurs que les premier ouvrage d'histoire mu ulmane
avaient lrait au e pédilions du Prophèle (maghâ zî) .
(4~ MOJam el-bolddn, éd. Wü lenfeld (Icîcûls geographisches Worlerbuch,
() vol., Leipzig, 1866-1813), l. lI, p. 561.
(5) \Vafaydl el-a'ïân, éd. vVüslenfeld, ôllingen, 183~-1843, notice 33.
26
LA CONCEPTION DE L'llf 'TOUtE

(t 911 ==1505) (1), et Badr ed-dîn el-Qarâfi (t 1008==1600) (2) ,


repal'ait au début du Naïl el-ibtiltâj d'AI)med Bâbâ (3) , d"ed-
DOl'al' el-mol'a~~a'a de Mol:lammed ed-Dara'ï (4), du .Nacltl'
el-mat ltân/ cl 'el-Oâdiri (5), d' et- TOI:iol7lrtn el-ma' l'ib d'ez-
Zayyânl' (6), d 'el-Jaïclt el-arallll'{utl d'Akensolts (7), du
KiLâb el-istiq~â d'en-Nà!?iri (8) et d'es- a'âdat el-abadtyya
<l'Ibn el-Mowaqqit (9) .
Voici le texte de cette anecdote, d'après les prolégomènes
que Khalil Ibn AIbak e!?-$afadt' plaça en tête de Son ouvrage
inlitulé el-H âjt bil-wafayât (10) : « Un exenlple qui montre
l'utilité de l'histoire est l'affaire de Ra']'s ar-Ru'asâ' avec le
Juif qui avait produit un écrit portant que l'Apôtre d'Allah
avait ol'donné l'abolition de l'impôt de caUitation au profit de
la population (juive) de Khaibal'. Cet acte contenait le témoi-
gnage de compagnons du Prophète, parmi lesquels figul'ait
"'Ali, fils d'Abù Tâlib (qu'Allah soit satisfait de lui !). L' ' crit
fut présenté à Ha'i Hl'-nu'asâ', et les gens on étaient tout
perplexes. Ra'is ar-Ru'asà' soumit l'écrit au grand tradition-
ni~te Abù Bakr AI-KhatJ'b al-Baghdâdzi (le p,'édicateur de
Baghdâdz). Celui-ci l'examina et dil: « Cet écrit est faux. _
Comment cela? », lui demanda-t·on. Il répondit: « Il con-
tient le témoignage de l\fo'âwiya (qu'Allah soit sati fait de
lui!) ; or, il a embrassé l'i!?lâmisme l'année cie la prise de
la Mecque (année 8 de l'hégil'e), tandis que la prise de
Khaibar avait eu lieu en l'année 7 (de l'hégire). Il con-

(1) ur la foi des hi loriens marocaills qui rapportenL l'anecdote.


( 2) Mème ob ervalion.
(3) Éd. de Fès , p. 4.
(4) Fol. 31'0 du ms. de 'Abd cl-l:Iaï cl-Katlàni.
(5) Éd. de Fès, l, p. 5.
(6) Fol. 3 yO du m . de Salé.
(7) Éd. de Fès, l, p. 3.
(8) Éd. du Qaire , T, p. 3.
(9) Éd. de Fè , T, p. 7.
(10) La lradu tion donnée e ~ t emprulltée à Émile Amar, Prolégomènes à
l'élude des historiens arabes, pal' KhaUl ibn ibal e.. -'. afadi, exlrait du
.Journal asiatique (m ars-aoùt1911 et mars-avril 1912), Pari, 1DCCCCX(J,
pp. 160-161. ur l e personnag-c cité dans l'anecdote, cf. les noLe ac-
compagnant la lraduction (p. HW, Il. 2, et p. 1Gl, n. 1).
27
LES MA.ROCAINS ET L'HlSTOIRE

tient aussi le témoignage de Sa<d, fils de Mu<àdz; or Sa<d


était Inort à la « Journée des Banû Qurai~a », deux ans avant
Khaibar. Cela dissipa alors l'inquiétude de la popuLi-
tion ».
Il s'agit, on le voit, d~un sinlple anachronisme redeessé et
raventLll~e ne valait pas la réclame répétée clue l'on devait
lui faire. Il faut signaler aussi que les historiens marocains
s'eff'oecent en même tenips de trouver, sans négliger pour
cela les arguments classiques pris en dehoes de leur pays,
des exemples locaux tendant à démontrer l'utilité des
recherches histo l'iq ues (1).
Insister sur l"orthodoxie de ces recherches et sur les ser-
vices que l'on peut en attendre, voilà donc le premier soin
qui les occupe. On pourrait aussi les voir invoquer, pour
les justifier plus encore, l'intérêt national qui s'y attache,
mais il faudrait aloes 111RCOnnaître la force avec laquelle l'Is-
lâm ~ fait, jusqu'à ces derniers temps, chez ses adeptes, ob-
stacle à la naissance de toute idée de patrie. Il n'est qu'un
biographe, Ibn <Askar, qui ait essayé de formuler, d'une ma-
nière précise, l'obscur sentiment patl'iotique qui avait dû
s'éveillee en lui. Il écrit, dit-il, sa Daw{wt en-nâchir, sur
les cha"lkh du ~Ial'oc, paece que ce pays est celui où il a
gl'andi et qu'il est sa patrie (2). Encore se hâte-t-il aussitôt
Je donner à ses paroles une confirmation d'ordee religieux,
en prouvant la supériorité de sa terre natale par la citation
d'une tradition recueillie par Moslim et relative au Maroc (3).
Ce sentiment national d'Ibn <Askar, nous savons d'ailleurs

Cl ) Ainsi en-Nô~irî, Istiq~d, l, p. 3.


(~) Ed. de Fès, p. 2: "';.J CI ,-:-,rl\ 'ê.:-'~~ l~:~.. ~ ~\J
~:~J '-;?!~ u~J '-;?:1 J .
(3 ) Ibid., p. 3: ~l\ Je- j!,..)~Ù; '-:-' ..);.,~l~ 0:"\ j" ~.;\.1 JIj''1
~l_l\ \.JÀ,' ~,(( Une parlie de mon peuple restera au Maghrib, con-
servant la vérité jusqu'à l'arrivée de l'Heure! )) Cf. aussi la tradition rap-
porlée par el-lfrânî, Nozhal el-I),âdî, éd, IIoudas, p, 292 du texle el 48;; de
la trad" d'après le Kitâb el-jommân fî <ajâ'ib " ez-zamdn d'ech-Châ~ibî et
répétée l)ar AkensoùS, el-Jaïch el-<aramram, l, p. 50,
28 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

]e cas qu'il devait en falL'e par la suite, puisqu'il trouva la


moet, en 1578, à la bataille du WàcH 'l-~Iakhâzin, en combat-
tant, aux côtés des Portugais, ses propres compatriotes!
Un biographe contemporain, Ibn el-:M owaqqit, a essayé,
dans un livre récemment lithographié à Fès et consacré aux
saints de Marrâkech, de développer plus encore que ses pré
décesseurs les considérations sur l'histoire qui forment la
Inatière habituelle des introductions (1). Les raisons qu'il
fournit pour faire la preuve de l 'utilité de l'histoire sont, ou
plutôt veulent être d'ordre philosophique. Il croit utile de
scinder ses arguments et de séparer l'utilité « terrestre»
de l'utilité « extra-terrestre». Pour démontrer la première,
il cl ' clare que l'homme ne peut trouver de meilleure ligne
de conduite que dans l'histoire. Pour les souverains sur-
tout , cette utilité est incontestable. Si, dit-il, ils consultent
les œuvres qui relatent la vie des tyrans et des oppresseurs
et voient leurs actes barbares consigné en détail: turpi-
tudes, ruines de villes, assassinats, pillages , il y aura beau-
coup de chances pour qu'ils répudient eux-mêmes ces actes
de leurs gouvernements; tandis que si, au contraire, à la
le'cture des annales, des rois leur apparaissent comme des
princes intègres et célébrés pour leues belles actions, ils
tiendront à suivre ces exemples de conduite, s'y appuieront
et s'en inspireront pour accomplir, à leur lour, des gestes
méritoires dont ils auront le droit de se glorifiel'.
Les arguments d'utilité « extra-terrestre » sont de la
même naïveté un peu puérile, originale pourtant chez un
auteur marocain. L'homme, à son avis, peut puiser dans
l'histoire un renforcement de fatalisme. Il lui suffit d'y voir
les révolutions et les troubles qui la renlplissent et la for-
tune .chang-eante des siècles passés. Il se rend compte alors
de la vanité de la vie en ce bas-nl0nde et se prépare à être
accueilli dignement dans l'autre. Tout en s'instruisant d'évé-
nements qui sont des leçons de choses, il acquiert la patience
et la résignation hi enfaisantes.

(1) es-Sa'âdat el-abadfyya, l, pp. 4 el ~.


LES MAUOCAINS ET L'lIlSTOIRE
29

III

En dépit de la défaveur non douteuse qlU pèse Jepuis


longtemps sur les recherches historiques au Maroc, il se-
rait exagéré de dire qu'il n'existé pas, dans le pays, d'ou-
vrages d'histoire classiques. Non pas classiques au sens
exact du mot, Pll is que,. on l'a déjà vu, l'histoire est bannie
de l'enseignenlent officiel et ne saurait, dès lors, être trans·
crite dans des livres tenus en même honneur que les tra·
vaux d 'objet spécialement islâmique; lnais, au moins, con-
sidérés comme tels par les trop peu nombreux savants qui
ne la dédaignent pas absolunlent. La remarque a déjà été
faite par Delphin, que l'histoire au "M aroc, bien que non en-
seignée oralernent, comme d'ailleul's la géographie , est par-
fois étudiée par des tolba dans quelques ouvrages , en nom-
bre limité, composés en dehors du "M aroc ou au Maroc
même (1) . La liste fournie par son informateur paraît, au
reste, assez éclectique; et il est curieux d'y voir figurer en
rnême temps, par exemple, lbn el-Athîr et es-Soyoût î , d'une
part, ez-Zayyâni et BamdoùL1 Ibn el- B i\jj, d'autre part.
It semble plus intéressant de voir l'auteur d'une chronique
comme Akensoûs, fournir de lui-même un relevé des ou-
vrages histoeiques qu'il juge classiclues, même si, comme
c'est certain, il ne les a pas tous lus (2). Les historiens qui,
à son avis, font autorité pour l'histoire lllusuimane générale
sont, avec le fameux el-Bokhârî, auteur du Salftl~, Aboû
Is1).âq (3), el-Wâqidi (4), Saïf b. lOmar (5) et et-Tabarî (6),

(1) Delphi.n, Fas , son Université . .. , p. 36, § 16, d'après son informalellr,
Idris b. Thâbit.
(2) el-Jaïch el-laramram, l, p. 4.
(3 ) Il ùoit s' agir d'Aboù Isl)âq Ibrâhîm b. llilâl el-l~arrânî C.-. âbî,
hislorien de Boûyides, morl en 384 (994) , sur lequel cf. Brockelmann,
Arab. liLt., l, pp. 9;>-96 , el Huarl, LiLt. ar. , p. 13tL
(4) Cf. Brockelmann, Arab. litt., l, p. 135, el I1Ué'rt, Lilt. ar. , p. 115.
(5) Source d'etr-Tabarî. Cf. Brockelmann, Arab. litt., l, 1)· 516 (142) .
(6) Cf. Brockelmann, Arab. litt., I, p. 14~, cl Uuart, Litt. ar., p. 180.
30
LA CO~CEPTIO~ DE L'rnSTOIRE

Ibn el-Kalbl ( L), edh-Dhahabi (2) et el-l\Ias'oûdî (3). Il cile,


pour ce qui a spécialement trait aux Musulmans occidentaux ,
les histoires particu lières d'Ibn er- Raq iq (4) sur les dynas
ties de l'Ifl'iqîyya, d'Aboû 1:Iayyân (5) Sur les Onlaïades d 'Es-
pagne, l'auteur du livre intitulé DOl'al' el-atlll71ân sur les 0:-
tOlllans (6) , le RawÇi el-qir,tâs, la Boglliat el'-roûwâd cl 'Ial)iù
Ibn Khaldoûn (7) sur la dynastie des Banoù 'Abd el-Wâd, le
Na;,m ed-do/'I'wa'l-' iqiân d' et- Tanasî SU1' les Banoû Zayyân (8),
la Sa/wat el-adab d'AD-med b. 'Abd es-Salâm el-Jirâwi Sur
les Almohades (9), le Raq1fl el-lwlal d'Ibn el-Khatîb (10), la
RawÇiat en-nisrt'n d'Ibn el-Al;uuar (11) et les Afanâlzil eS-oJafâ'
d'el-Fichlâli (12). Encore l'historien rnoderne fait-il preuve
d'une ignorance impardonnable, en ne soupçonnant pas
même, Souvent, les noms des historiens dont il a fait choix
et en allant jusqu'à prenJre une partie du titre d'un ouvragp-
pour le nom de l'auteur lui-même (13).
Cette énumération faite par Akensoûs semble d'ailleurs
la seule liste écrite et suivie que l'on puisse retrouver de
ces ouvrages. En revanche, la plul'aet des histori ens font
assez souvent appel, dans l'intérieur même de leurs écrits,
aux gmndes autorités historiques musulmanes, soit POUL'
appuyer une considél'ation d'ordre philosophique sur un

(1) Cf. Brockelmann, Arab. lilt., J, p. 139, et Huart, LiU. ar., p. 177.
(2) Cf. Brockelmann, Arab. liLl., Il, p. 4li, et Huart, Litt. ar., p. 337.
(3) Cf. Brockelmann, Arab. lilt., " p. 143, et Huart, Litt. al'., p. 182.
(4) Source du Rawrj el-qirtds , d'Ibn Kh.1JdoÙn ct de Léon l 'Africain. Cf.
Ma signon, le Maroc dans les premières années dl.l .tl Vl e siècle, pp. 41-42.
(5) Cf. Brockelmann, Arab. liU., l, p. 338. 11 s'agit d 'Aboù Merwàn Ibn
1:Iayyân.
(6) Mol).ammed el-Bakd e~-~iddîqÎ, t 1028 ('1619). Cf. Brockelmann,
Arab. litt. , Il, p. 301.
(7) Cf. Brockelmann, Arab. liU., II, p. 241.
(8) Cf. Brockelmann, Arab. litt., II, p. 241.
(9) Cet ouvrage serait, d 'après cCl'Lains lettrés de Fès, une simple antho-
logie poétique.
(10) Cf. Brockelmann, Arab. litl., H, p. 262, et Huart, Lill. ar., p. 31- '1.
(H ) Cf. Brockelmann , Arab. lilt. , II, p. 2H.
(12) Cf. infra , If, A, 1.
(13) Cf. infra, If, B, II. Akensoùs a confondu el-Qirtâs avec un nom de
personne.
J.ES )I.\IlOC.-\Ii'ÎS ET L'HISTOIRE 31

événement qu'ils viennent de rapporter, soit pour justifier


une comparaison plus ou moins bien venue. Indépendam-
ment de l'intél'êt que présentent ces citations pour la déter-
mination des sources utilisées de première ou de seconde
main par chaque auteur, elles permettent de constater que
la conception qu 'il se fait de l'histoire n'est pas différente de
celle de ses devanciers. Il faut d'ailleurs ajouter que cette
conception commune ne se dégage qu'assez obscurément
des ouvrages écrits au Maroc. Alors qu'ils s'attachent tous
à faire l'apologie des re,c herches historiques et à démontrer
Leut' éu'linente utilité, les historiens maghribins tentent bien
moins volontiers de fournir à leurs lecteurs des définitions
de l'histoire. Ces dernières sont trop SOUYeIlt noyées dans
le pathos des fleurs de rhétorique, et leur imprécision se
.trouve encore accrue par l'emploi d'une prose rimée pleine
de chevilles et d'images déplacées. Akensoùs, qui a cru bon
d )en donner une, et d' é tendre plus qlle de coutume l'intro-
duction qui précède sa chronique de la dynastie <alawile, est
satisfait de pouvoir comparer, dans une p ' l'iode agréable-
lnent cadencée pOUl' des oreilles marocaines, l'his~oire « il
une fiancée parée et assise sur son trône, qui exci te l'ad mi-
ration et fait l'ornement de son temps. - C'est, ajoute-t-il,
une science qui élève les esprits et les cœurs et ressuscite
les cadavres passés (1) . » Et c'est 10ut !
D'autres historiens, Ibn el-NIvwaqqit par exemple (2), se
bornent à recopier le chapitre bien connu des P/'olégOlnènes
d'Ibn Khaldoùn SUI' la définition de l'histoire: « C'est une
science qui se distingue par la noblesse de son objet, sa
grande utililé et l'importance de ses résultats ... (3).» Il
semble que la clal'té de ce passage les a impressionnés. Mais
il sembl'e aussi que le fameux historien-philosophe a été,
pal' eux, presque mis à l'index pOUl' sa trop grande largeur
de vues; les chroniqueurs marocains sont loin, bien qu'ils

'( L) el-Jai'ch el-'aramram, T, p. L


(2) es-Sa<âdat el-abadiy ya, l, p. 5,
(3) PrQlégomènes historiques, édil. Oualrf'mèrc, in Notices et Extraits de;;
Mss. de la Bibl. Imp ériale, t. "\ YI , pp. 8 el 9; trad. de Slane, m '.me collcc-
tion , l.IX , p. 13.
32 LA CONCEPTION DE J.. 'IUSTOIRE

le revendiquent eux-n1êmes comme une célébrité nationale,


de voir en lui le Inodèle à imiter et le maître dont il faut
s'inspirer constamment.
D'ailleurs, pOUl' conserver son caractère de science or-
thodoxe, l'histoire ne pouvait être conçue par les Marocains
sur des bases nouvelles; leur manque d'originalité et de
personnalité ne pouvait pernlettre une évolution, si minime
fût-elle, de cette conception, unique et imposée à tous les
écrivains arabes d'Orient et d'Occident.
Le mot qui désigne l'histoire en laDgue arabe , tâ'l'tkh, est,
à cet égard, grandement suggestif, car sa signification pre,
mière fait sans contredit de l'histoii'e « la science des dates » ,
et les œuvres historiques doivent être, par le fait m ême, de
simples collections de synchronismes. On voit, dès lors,
l'~mprécision de lin1ites que suppose un tel point de dé-
part. Dans ce cadre, l'histoire littéraire trouve sa place aussi
bien que l'histoire politique; de même la biographie et
l 'hagiographie, la généalogie et même la géographie, car la
description d'un pays chez les :M usulmans doit se doubler
du relevé des célébrités qu'on y rencontre. Le Turc Bâjjî
Khalîfa a donné de 'c ette conception si large un tableau
d'une précision et d 'une concision caractéristiques: « L'his-
toire consiste, dit-il, dans la connaissance de l'état des
peuples, de leur pays, de leurs vestiges, de leurs coutumes,
des œuvres de leurs individus, de leurs généalogies, de
leurs décès, etc. Elle comporte l'étude des prophètes, des
saints, des sages, des poètes, des princes disparus (1). »
Cette énun1ération ne semble pas faite au hasard de la plun1e :
l'histoire politique n'y vient qu'en dernier lieu, et la biogra-
phie des grands personnages de tous genres y apparait
comme la branche la plus importante de la science histo-
rique (2).

(t ) T;Iàjjî Khalîfa, Ka chf e;:-;onoûn (Lex icoll bibliographicLlIn), éd, Flucgel,


If, pp. 95-96.
(2) L'écrivain marocain Aboù ( li el-T:Iasan el-Ioûsî a donné de l 'hi toire
une définition analogue mais moins claire et moins précise dans son ou-
vrage inlilulé el-'Qdnoûn , éd. lilh. de Fès, 1310, pp. 96-97.
LES MA.ROCAINS ET L'HISTOIRE
33

On doit alors s'attendre à ce qu'il n'en aille pas ~utrement


dans un pays conservateur à outrance, où les historiens se
sont occupés de groupes de noblesse religieuse détenant, les
uns, le pouvoir temporel, les autres, le pouvoir spiritueL
Le chroniqueur, au Maroc, se double nécessairement du
biographe, comme dans tout le reste du monde musulman.
Et il ne faut pas s'étonner que les constatations ou les
üéductions auxquelles pourra amener une en(!uête consacrée
au mouvement historique marocain depuis quatre siècles,
vaillent, au moins dans leur ensemble, pour le reste de
l'histoire islAmique.

3
II

LES GENRES HISTORIQUES .

L'HISTOIRE DYNASTIQ- E

Une des prérogatives les plus chères aux souverains mu-


sulmans fut d'avoir .leurs moindres faits et gestes soigneuse-
lIlent consignés dans des annales officielles. Ils tiraient sa-
tisfaction de la lecture d'une œuvre qui les glorifiait; elle
les rehaussait non seulement aux yeux de leurs sujets, mais
enCOl'e vis-à-vis des nations étrangères. Aussi, un présent
magnifique récompensait-il presque toujours l'auteur de
leur panégYl'ique; et l'émulation et l'intérêt aidant, des
historiographes plus ou moins préparés à leur besogne
d'écrivains se présentaient souvent aux portes des palais,
pour offrir aux princes les œuvres qu'ils leur dédiaient.
Il n'apparait pas, en effet, que la fonction d'historiographe
ait constitué au Maroc une charge officielle, munie d'un
titulaire désigné par sa compétence et son talent. Il n'est
peut-être qu'un seul sultan de la dynastie sa'dienne~ Moulay
A~med el-Man$oùr, qui vouiùt faire figurer un annaliste
officiel parmi les membres attitrés de son « makhzen )~. Les
autres souverains du pays semblent, au contraire, s'être
contentés d'attendre que ces apologies de leurs règnes leur
fussent apportées en hommage par des écrivains en quête de
cadeaux, d'honneurs ou de fonctions rétribuées.
L'HISTOIRE DY ASTIQUE 35

Mais il s'est trouvé aussi des hommes pour entreprendre


l'œuvre contraire, qui n'ont pas hé sité à flétrit' la tyrannie
d'un despote dans un livre, moil1s destiné d'ailleurs à la
foule pressurée, 'm ais ignorante, qu'aux aristocrates fron-
deurs. Quand la rigueur royale, malgré tout limitée dans un
pays de permanente anarchie, ne parvenait pas à les châtier.
elle avait soin, en tout cas, de faire disparaître, par tous les
moyens, les pamphlets de ces audacieux.
Si bien que, parmi les histoires particulières des princes
des deux dernières dynasties marocaines, les premières
seules ont des chances de subsister et les secondes n'èxis-
te nt plus ou sont d'une rareté extrême.

Il est à peine besoin de signaler combien ces œuvres


d'historiens officieux, à qui manquait la qualité la plus
souhaitable en l'occurrence, le désintéressement, doivent
être consultées avec méfiance. La plupart du temps, les faits
y sont déformés systématiquement et le sultan le plus in-
digne y est présenté comme un souverain modèle. On se
doute des mensonges grossiers auxquels la cupidité et la
plus basse flatterie peuvent condnire. Il est rare que l'une
de ces apologies se distingue des auLres par un souci réel
J'exactitude. Dans l'ensenlble, elles ne constituent pas, à
proprement- parler, des documents historiques: les louanges
les plus exagérées sur les différentes qualités du prince,
toutes analysées longuement à grand renfort de comparai-
sons et de citations, forment à elles seules tout le contenu
de ces œuvres.
Il ne faut pas traiter avec le même mépris d'autres ou-
vrages, partiaux aussi, il est vrai, mais qui, au lieu de con-
tenir seulement le panégyrique du souverain, donnent en-
core un récit plus ou moi as détaillé des faits saillants qui
ont marqué les divel~ses années de son règne; et ceux qui,
au lieu de traiter uniquement du prince régnant, relatent
également l'histoire de ses prédécesseurs de la même dy-
nastie. L'ouvrage, lui aussi, est destiné à être présenté au
36 LA CONCEPTION DE L'HISTOIHE

prince; l'auteur l'a écrit avec l'arrière-pensée qu'il en serait


récompensé largement; toutefois, la flatterie et l'obséquio-
sité ne sont pas ses seules préoccupations; une certaine re-
chel'che de la vérité et quelque souci de mettre en œuvre
des renseignements statistiques, donnent parfois à ces chro-
niques royales ou dynastiques un intérêt qu'il serait injuste
de dénier absolument.
Il aerivera aussi qu'un sultan charge un écrivain de talent
d'écrire son histoire et, en même temps, celle de toute sa
dynastie, non pas en l'attachant au palais comme un historio-
graphe officiel régulièrement astreint aux heures de pré-
sence de la « makhzanîyya », mais en lui donnant de simples
idées directrices auxquelles il devra se conformer en entre-
prenant son travail; pendant tout le tenlps que durera la
composition de cette chronique, l'auteur recevra du prince,
à date fixe et à l'occasion des fêtes religieuses, des cadeaux
qui le paieront de sa tâche.
Il y a donc lieu de distinguer les historiens chal'gés
d'écrire officiellement une histoire, et ceux qui l'écrivent
de leur propre initiative, afin de l'offrir en hommage au
souverain. On tentera d'exposer ici, en quelques lignes, ce
qui est attendu des uns et ce à quoi s'appliquent les autres.
Celui que le sultan a chargé d'écrire son histoire sen1ble
au premier abord, étant donnée la mission qui lui est con-
fiée, avoir la plus grande facilité à se renseigner. On verra
qu'il n 'en est pas toujours ainsi. Pourtant, il semble qu'on
exige de lui le maximum de détails, et de détails concret~;
son œuvre, toute consacrée qu'elle soit au prince et aux
membres de sa famille, ne peut cependant laisser dans
l'ombre les courtisans les plus haut placés. Aussi, trouvera~
t-on, dans beaucoup de chroniques ainsi établies, des listes
de fonctionnaires suffisamment complètes, qui pourront
constituer, suivant l'expression de 1\-1. G. Marçais , des sortes
d' « almanachs royaux (1) . »
Le chroniqueur rétribué donne le détail des victoires rem-

(1) Introduction à l'édition de la Rawcf.al en-nis/'în d'Ibn el-A1:tmar,


p. xv.
L'HISTOIRE DYNASTIQUE 37

portées par le sultan lui-n1ême ou en son nom, des conquêtes


qui ont ajouté à son empire de nouvelles provinces. Il énu-
mère avec soin ses troupes régulières, indique le nombre des
soldats de chacune de ses armées; il renseigne son lecteur sur
les ouvrages de fortification entrepris à l'intérieur de l'État
et sur ses frontières, sur les tl'avaux exécutés dans les ports
qui "sont en relations avec les flottes marchandes de l'Europe.
A propos d'une guerre, il n'oluet pas de citer les noms des
chefs d'armée "et des gouverneurs des places fortes. Il
donne le texte"des lettres de félicitations qui sont parvenues
au souverain à l'occasion de l'heureuse issue d'une expédi-
tion, "et celui des messages que lui-même a adressés à son
peuple ou à l'étranger, pour leur faire part de la brillante for-
tune de ses armes. Les fonctionnaires du clîwcin sont énumérés
nominativement, les grands personnages de la cour: vizirs,
sous·seûrétaires d'État, qâ'ïds, trouvent leurs biographies
dans son ou,trage. Il doit parler des ambassades étrangères
arrivées dans l'Empire et de celles que le sultan a envoyées
auprès des princes du dehors. Il est de son devoir de vanter
la magnificence de la dynastie, de montrer comment le sou-
verain traite ses parents et son entourage, de donner le
chiffre des pensions qu'il leur alloue, de ne pas oublier la
trésorerie impériale et de nlentionner les revenus et les dé-
penses de la maison régnante.
Il va sans dire que ces œuvres doivent être examinées
avec d'autant plus de confiance que la dynastie est à son
apogée; il suffit, ou peut suffire alors à l'auteur de dire la
vérité, en l'enjolivant et en la poétisant dans les limites per-
luises; mais si celte dynastie se trouve, au moment où il
compose ses annales, sapée dans ses fondements et menacée
de ruine, il "e st forcément plus partial et déguise, de plein
gré ou par nécessité, la stricte vérité. Il est d'expérience
courante au :Maroc que ce sont les sultans les plus contestés,
ceux qui ont vu surgir de tous côtés des prétendants puis-
sants et régnant effectivement sur une partie de leur em-
pire, qui ont, plus que les autres, éprouvé le besoin de
pouvoir produire à leurs détracteurs leurs propres panégy-
riques, afin de réfuter les attaques dont ils étaient l'obj~t.
38 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

Ceux qui ne voient dans le fait d'écrire l'histoire d'uri sou-


verain ou d'une dynastie que leur jntérêt personnel, doivent
faire preuve d'une cieconspection encore plus grande. Le
prince, mal assis sur un tl'ône branlant, sera porté à voir
dans l'œuvre offerte des allusions à sa situation précaire;
s'il ne les découvre pas lui-même, il y aura bien dans son
entourage quelque compétiteur ou quelque intrigant jaloux
qui les lui signalera. Alors, c'en est fait p.u dédicant et de
son livre; il e t jeté en prison, battu de verges ou mis à
mort, La moindre vétille pouerait lui coùter la vie. Au con-
traire, la louange apparaissant à tl'avers toutes les lignes ne
prêtera en aucun cas à la critique et à la suspicion. Mais le
public savant, sachant exactement à quoi s'en tenir sur
son œuvre, la regardera d'un œil dédaigneux et lui refusera
l'accès de sa bibliothèque, presq ue dans tous les cas.
Aussi, tant qu'on n'aura pu faire l'invenl aire des livres con-
servés dans les palais impériaux du :M aroc, s'attendl'a-t-on
forcément à ne voir circuler dans le pays que le minimum
d'exemplaires de ces sortes d'ouvrages. Et pour deux rai-
sons bien dis~inctes, les œuvres par trop partiales et les re-
lations dynastiques impartiales ayant pour ainsi dire totale-
ment disparu et échappant la plupart du temps aux plus sé-
rieuses investigations, ce seront seulement les chroniques
d'une partialité relati ve, mais dignes d'intérêt et Don dépour-
vues de toute valeur historique, qui, heureusement, auro·n t
été conseryées ou que l'on aura le moins de difficulté à
retrouver.

D'ailleurs, ces œuvres que nous appelons impartiales,


nous ne croyons pas qu 'il faille trop grandement en déplorer
la perte. Sans doute, on aurait été en droit d'espérer y dé-
couvrir des renseignements originaux, principalement en ce
qui concerne les intrigues de la cour Inarocaine et les résul-
tats d:expéditions inlpériales présentées par les annalistes
officiels comme de grandes opérations couronnées de succès,
alors qu'elles n'ont, en réalité; le plus souvent abouti qu'à
des échecs ou qu'elles n'ont été que de simples tournées de·
L'HISTOIRE DYNASTIQUE 39

police sans résultats appréciables. Mais rien ne dit aussi que


~es travaux n'aient pas été tendancieux et partiaux, au sens
négatif du mot. Que quelques-unes de ces histoires aient
essayé de retracer honnêtement la réalité telle qu 'elle était,
sans l' enj oliver ou la présenter sous les couleurs les plus
sombres, rien de. plus normal. Mais, par contre, combien,
parmi elles, devaient consister simplenlent en diatribes
peut-ètre payées très cher, elles aussi, par les prétendants
au trône et les agitateurs qui, de tout temp s , ont fomenté le
trouble au Maroc.
. Au surplus , la disparition quasi-totale de ces œuvres per-
met tout juste de préj uger de leur valeur; à leur égard, on
ne 'peut guère formuler que des hypothèses.
Il est, en effet, fort peu d'écrivains marocains qui soient
connus comme auteurs d'histoires de ce genre. L'un d'eux
a, en tout cas, une personnalité intéress ante: il ne s'élgit pas
moins que d'un fils du sultan 'alawite Sidi Mol)ammed ben
-< Abd Allah (1757-1789), le chérif Moulay el-tlosaïn, qui, au té-

moignage des lettrés dignes de foi, corn posa un livre plein de


reproches amers, où il fit ressortir les défauts qui dépa-
raient la famille régnante à laquelle lui-même appartenait, et
-.dénonça les fautes cQmluises par le gouvernement de son
propre père. Il sera question plus loin d'un écrivain de
lnême genre , quoique de moins noble origine, Aboû 'Abd
Allah Mohammed b. 'Abd es-Salâm eçl-:Qo' ayyif er·Ribâti,
dont le souvenir n'est pas COIn piètement perdu à Rabat. Cet
-. auteur, dans un ouvrage consacré aux ' Alawites depuis leurs
-débuts j us'q u'au milieu du règne de Moulay Solaïmân
(vers 1800), ne craignit pas, suivant' la pittoresque expres-
.sion marocajne, de « lâcher les rênes» et de rappo~ter ce
que bon lui parut. Il est dOlnmage que ces livres aient dis-
,p aru, ou du moins soient restés introuyahles malgré toutes
les recherches que nous avons pu faire: ils auraient formé,
pour une bonne partie de l'histoire marocaine des temps
lnodernes, la contre-partie des chroniques sérieusement éta-
blies, mais ne disant pas, volontairement, toute la vérité.
Car ces historiens de partialité relatiye ne se défendent
point d'omettre ou .de défol'mel'la vérité 101'squ'ils le croient
40 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

nécessaire. Ils sont, par ailleurs, persuadés que ce qu'ils


pensent ne pas devoir mentionner sera bien vite rétabli
par le lecteur tant soit peu averti. C'est ainsi que l'historien
de la dynastie sa<dienne, Mol)alnmed e~-$aghir el-Ifrân
cherche plusieurs fois, dans sa Nozlzat el-J:tâdî, comme à
s'excuser de la retenue qu'il s'impose. Il dit, en effet au
début de son ouvrage: « Il est du devoir de l'historien de
ne point s'appesantir sur les choses malséantes et de ne
point entacher l 'honneur des gens (t ). » Plus loin, il définit
ainsi la ligne de conduite dont il ne veut pas s'écarter: « Ne
point montrer les actions honteuses et voiler les turpitudes ...
Ce que nou s disons suffit du reste pour que le lecteUJ'
sache à quoi s'en tenir sur ce que nous dissimulons (2). »
Enfin, au moment où il va clore son livre: « Nous nous
sommes abstenus, dit-il, de donner trop de vivacité aux cri-
tiques que méritaient certains princes de cette dynastie
(sa<dienne). Nous avons agi ainsi par respect pour leur répu-
tation et par respect pour la dignité du califat (3). ) Il se
soustrait, de même, non sans habileté, aux reproches que
des lecteurs pointilleux , susceptibles et enclins à voir partout
la critique et la satire, pourrai ent lui adresser, en citant à
propos un passage qu'il attribue à Tâj ed-din Ibn es-
Sobki (4) : « Les historiens sont, en quelque sorte, sur une
berge minée par les eaux. En effet, par suite de la longue
étude qu'ils font du caractère des honlmes, il peut leur
arriver de calomnier certains personnages, soit par esprit de
parti, soit par ignorance, ou encore en s'appuyant sur l'au-
torité de gens qui ne sont pas dignes de foi. » Aussi, ajoute-
t-il dans une conclusion un peu inattendue, « l'historien
doit avant tout craindre Dieu (5). »

(1) Nozhat eHl-âdî, éd. Houda , p. 9 du texte et 18 de la trad.


(2) Ibid., p. 158 du texte et 25ï de la trad.
0 ) Ibid., p. 258 du texle et ~29 de la trad.
(4) Source de la Salwat el-anfas d'el-} attânî. Sur cet auteur, mort en
771 (13ïO) et son ouvrage, et-Tabaqât , auquel el-Urânî fait allusion, cf.
R. Ba" et, Rech. bibl. , p. 14, nO 22, et Brockelmann, Ar. litt., II, p. 89,
Jl O 8.
(5 ) Nozhat el-I).âdî, éd . Boudas, p. 49 du texte et 90-91 de la trad.
L'HISTOIRE DYNASTIQUE 41

On voit quels Inénagements, quelles réticences doit com-


porter au Maroc tout essai d'histoire politique; et l'on com-
prend dès lors pourquoi les nlOnographies historiques y sont
si rares. Le public auquel elles s'adre~sent est restreint, -
les histoires y sont faites presque à l'usage exclusif des
souverains (1) ; - et des écrivains désintéressés ne peuyent
avoir que peu de goùt à se livrer à des études tenues en
général en médiocre estime, dans lesquelles il leur faut
faire preuve d'une prudence de tous les instants, se garder
de la moindre liberté de jugement et affirmer à chaque page
un loyalisme plus ou nloins sincère.
Ce que l'on vient de dire de ces historiens des Sa'diens
et des <Alawites s'applique d'ailleurs parfaitement à leurs
prédécesseurs de l'Espagne et du Maroc, sinon à tous les
historiens musulmans. La plupart des chroniques relatives
aux règnes des princes omaïades, almohades ou mérinides
et aux petites familles royales qui eurent, dans la partie oc-
cidentale du lnonde islàmique, quelque illustration passa-
gère, ne se présentent pas autrement aux lecteurs européens.
Et les jugements qu'ont pu porter sur elles les savants qui
les ont éditées, traduites et utilisées servent de confirmation
exacte aux pages qui précèd ent (2). La discipline est par-
faite dans la littérature marocaine; les lettrés du pays,
mênle à propos de leur pays, n'ont fait que suivre pas à pas
leurs devanciers musulmans, compatriotes ou étrangers, de
telle sorte que la conception de l'histoire qui se dégage d'une
chroniq ue arabe maghl'ibil1e ou espagnole datant du xe siècle

(1) Cf. Boudas, Monographie de Méquinez, Avertis ement, p. 2 : « .. .l'his-


toire telle qu'elle est écrite chez les mu ulmans ne peut guère servir
qu'aux princes et aux grands de la terre. Eux seuls ont à tirer profit des
enseignements qu'offre ceUe étude d'un passé où l'on ne retrouve souvent
que l'exposition d es moyens d'asservir un peuple et de lui arracher tout
l'argent qu'il possède ... » Tout le pas age est excellent et s'applique par-
faitement à l'hisloire marocaine moderne.
(2) Cf. particulièrement Dozy, Hisloire de l'Afrique el de l'Espagne, inti-
tulée : al-Bayano'l-Mogrib, par Ibn-Adhâri (de Maroc), Introduction,
pp, 18, 19, 63. Cf. aussi le jugement porlé sur les chroniqueurs nord-
africains par G. Marçais, les Arabes en Berbérie du XI e au XIXe siècle, p. 3.
'42 LA CONCEPTION DE L'lIISTOIRE

n'est pas différente de celle qui caractérise une chronique


.marocaine du xvn C •
Les Marocains n'ont pas fait, non plus, preuve de grande
ûriginalité quand ils. ont voulu donner à leufs tableaux de
règnes ou de dynasties un caract~re spécialement didactique.
L' orjoûza (1) ne florissait pas seulemen t pal'mi les grammai-
riens, les juristes ou les professeurs de sciences exactes;
elle a trouvé sa place Jans la « science des dates », car elle
y permit l'emploi des chronogrml1l1les si chers aux écrivains
arabes. Les assemblages de lettres qui contenaient, suivant
leur valeur numérique, l'indication d'une année, éLaient un
excellent prétexte à rinles, à calembours et à jeux de mots;
et l'imagination feL'tile des pseudo-poètes qui crurent éCI'ire
l'histoire en vers, nous a laissé bon nombre de ces produc-
tions, heur-eusement toutes très courtes, car elles sont aussi
pauvres par le fond que par la forme.

... '"

En fin de compte, qu'ils consistent en chroniques d'étendue


val'iable, en vies de princes sans grands développements
historiques ou en simples poèmes mnémotechniques, {IU'ils
soient d'une partialité délnesurée ou relative, ou bien qu'ils
ne répondent qu'à un but didactique, ces ouvrages d'histoire
marocaine ont tous le même défaut: pOUL' eux, dans l'État,
n'existe que le pouvoir royal; en dehors de la cour et des
grandes capitales, rien, dans le pays, n'est digne d'aLten-
tion. L'histoire du Maroc, vue à travers ces livres, n'est qu'une
histoire limitée, délaissant délibérément un pouvoir aussi

('l) Poème du mètre rajaz, qui a pOUL' mesure ~.. répété trois
fois à chaque hémisliche. Cf. H. Basset, la Kha z radjyah, p. 89 sqq., et
Ibn bi Chanab, TOQJat el-adab fi mizân ach<ar ël-' Arab, pp. 47-48. Dans
l'orjoû za, la rime, au lieu d'ètre la mème pour toule la pièce, peul changer
avec chaque verS à la condition que les deux hémistiëhes de chaque ver
riment entre eu . Cette particularité el la simplicité du mètre ont fait du
rajaz le vers le plus facilement composable; c'est pOlJf celle raison qu'il
e:3t employé dans les traités didactiques.
L'HISTOIRE DYNASTIQUE 43

actif que l'autre et plus important peut-être, le pouvoir spi-


rituel. L'influence du maraboutisme et des confréries reli-
gieuses sur l'histoire intérieure du pays semble être inconnue
de tous ces annalistes; parce qu'elle ne représente pas une
force officielle et concrète, elle ne leur parait pas digne
d'être signalée. Non pas pourtant qu'ils ignorent son exis-
tence; d'ailleurs, pour des raisons de déférence à l'égard du
souverain - et qu'il faut tout de même excuser un peu -
ils ne sauraient sans difficulté aborder la (Iuestion. L'his-
toire du Maroc n'a été, en somme, depuis le XVIe siècle,
qu'une lutte du pou voir central contre les chefs' religieux.
C'est une poussée religieuse qui a porté les Sa'diens, puis
les <Alawites sur le trône; chacune de ces dynasties s'est
heurtée à des mouvements d'opinion qui purent devenir
inquiétants et menacer de la conduire à sa perte. Rien de
7
tout cela dans ces œuvres historiques, ou si peu, qu il faut
lire entre les lignes, avec une grande attention, pour trou-
ver quelques allusions; le tableau de la vie intérieure du
pays à travers les siècles y apparaît du même coup comme
singulièrement raccourci. Selon l'expl'ession de Dozy, aussi
valable pour le :Maroc des teIl1pS modernes que pour l'~s­
pagne musulmane du :M oyen Age, F « histoire pl'oprement
dite est travestie et n1utilée; on n'y saisit le caractère géné-
J:al de l'époque qu'à travers une sorte de brouillard (1) ».
On pourra dire alors que ces œuvres ne serviront pas à
grand' chose pour compléter notre connaissance de l'histoire
du :Maroc moderne. Elles ne nous apprendront rien' que
nous ne sachions déjà. Pareille affirmation, malgré les dé-
fauts de ces travaux, qui sont, comme on l'a YU, loin d'être
contrebalancés par leul's mérites, serait pourtant exagérée.
Au reste, ce ne sont pas là les seules œuvres d'histoire
marocaines. Ces renseignements, que l'on ne trouvera pas
dans les chroniques en prose ou en vers, on les rencontrera
éparpillés dans d'autres livres, non plus consacrés à des
souverains, mais à l'élite intellectuelle et à la noblesse reli-
gieuse du pays. Les biographies des saints, des chorfa et des

(1) Dozy, op. cil., p.19.


44 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

savants marocains seront souvent aussi instructives que les


chronologies, et ce sont elles, parfois autant que ces der-
nières, que les historiens européens auront à utiliser, pour
y découvrir le passé du Maroc depuis la fin du Moyen Age.

J"A LITTÉHATURE BIOGRAPHIQUE

La floraison du genre biographique, auq uel il vient


d'ètre fait allusion, n'est pas particulière non plus au Maroc
musulman. On lui doit, dan.s la littérature arabe, bon
nombre d'ouvrages d'importance capitale, et ce n'est pas le
lieu de montrer ici combien d'obscurité planerait sur beau-
coup de gloires islâmiques, si l'on n'avait, pour nous rensei-
gner sur elles, des collections comme celles d'Ibn Khallikân
ou d'Ibn Far]:lOûn. Plus particulièrement, pour la connais-
sance de l'histoire politique et littéraire de l'Espagne maure,
de combien d'indications n'est-on pas redevable à ces au-
teurs musulmans de la péninsule ibérique, dont les recueils
de notices ont déjà, autant que les œuvres suivies, permis à
des savants européens d'écrire des pages définitives (1) ?
Au Maroc, malgré le peu de goût montré par les lettrés
pour les études historiques, il fallait s'attendre, de la nlême
façon, à voir les biographies de savants et de personnages
religieux se révéler nombreuses et variées. Le total des
travaux de ce genre, tel qu'il apparaît dans les tableaux des
sources consultées par les auteurs marocains contempo-
rains, ne manque pas, en effet, d'être imposant: il contraste
singulièrement avec celui des œuvres historiques pures,
d'une pénurie réelle et, à première vue, déconcertante.

(1 ) Le répertoire complet de ces auteurs a été dressé par Pons Boigues


dans son Ensayo bio-bibliografico sobre los historiadores y geographos ara-
bigo-espalioles, ct quelques-uns ont déjà été publiés, à Madrid principale-
ment, dans la Bibliotheca arabico-hispana.
LA LITTÉRATURE BIOGRAPHIQUE 45
Il ne faut pas, d'ailleurs, perdre de vue que la biogra-
phie ne constitue pas, aux yeux des lettrés musulmans, une
branche indépendante ou même une science auxiliaire de
l'histoire. L~s définitions classirIues de cette dernière accor-
dent - on l'a vu plus haut - une place prépondérante à la
biographie dans le ge,nre historique. En préférant les re-
cueils de tarâjim aux chronplogies politiques, les Marocains,
une fois de plus, n'ont pas fait preuve d'originalité; là
comme ailleurs, ils se sont simplement ' conformés aux
règles établies et suivies par tout le monde musulman. Et
l'on ne doit pas s'étonnet' outre mesure d'entendre un bio-
g-raphe encore vivant s'écrier, avec la meilleur:e foi du
lnonde : « Les biographies des grands personnages valent
mieux que l'histoire eUe-nlême (1) . »
C'est que le :M aroc, on le sait, n'a pas cessé d'être le pays
des sainls et des chorfa. Nulle part peut-être ailleurs, dans
le monde nlusulman, la noblesse religieuse n'a de plus no~­
breux représentants. Ils forment une bonne part de la bour-
geoisie des cités, et m ê me, on les 'rencontre souvent dans la
campagne marocaine, sous des aspects rudes et grossiers,
illettrés la plupart du temps, parfois même ignorant la
chaîne d',ascendance qui les illustre, mais jouissant, quelle
que soit leur fortune terrestre, du respect et de la consi-
dération de leurs contribules ou de leurs concitoyens. Au
demeurant, fort jaloux les uns des autres. suspectant, de
branche à branche, leur pureté d 'origine et, dans les villes,
conservant précieusement de père en fils les documents
qui constituent la preuve de leur noblesse.
Le titre de chérif, auquel ils tiennent tant, peut leur être,
d'ailleurs, souvent contesté. On ignore fréquemment que
ceux qui, de façon plus ou moins authentique, rattachent
leur généalogie au prophète Mol}.ammed, ne sont pas les
seuls, dans le pays, à s'attribuer cette dénomination. Il
en est dont la souche n'a rien de chérifien, au sens exact

.
(1) Ibn el-~lowaqqit, es-Sa <âdat el-abadiyya, I , p. 9 : e-~ .Jl:l' d J:>.\
.)~_\j\ i?"~'.
46 LA CO~CEPTION DE L'UISTOIRE

du mot. Combien de familles de chorfa, ' au :Maroc, ne


peuvent tout bonnement invoquer, comme origine de leur
noblesse, qu'un ancêtre, pur berbère, sanctifié par ses con-
temporains! •
Car l'hagiolâtrie et le chérifisme sont étroitement liés au
:J1aghrib-Extrê.me. Peut-être est-ce à cause de l'éloignement
du pays où la religion nlusulma,ne prit naissance? En tout
cas, sûrement, parce que l'Islâm, malgré sa rigueur exté-
rieure, a dû, pour s'iInplanter dans cette partie occidentale
de la Berbérie, ne pas étouffer sous son empri3e les cultes
obscurs qui s'y pratiquaient bien avant sa venue. Les saints,
au Maroc, pullulent, à telles enseignes qu'il faudrait, pour
en dresser une liste à peu près complète, un travail minu-
tieux qui durerait des années. Or, il n'est guère de descen-
dant de ces saints, morts quelques-uns à peine au cours du
s~ècle dernier, qui ne revendique pour son compte, mème
s'il n'est pas arabophone, ce titre de chérif; et il faut ad-
mettre, en définitive, que dans de très nombreux cas~ les
Marocains qui le portent sont de simples autochtones, et
n'ont rien dans leur sang qui les rattache à l'illustre famille
du fondateur de l'Islâm (1 ).
Quoi qu'il en soit, l'abondance des gens qui, au ~1aroc, se
réclament, à tort ou à raison, d'une origine chérifienne,
suffirait à expliquer pourquoi le nombre des ouvrages qui
traitent de leur noblesse y est relati venlent considérable.
L'histoire de l'aristocratie religieuse, des confréries établies
par des chorfa entrepl'enants, des saints dont les tombeaux
parsèment le pays, fournit aux biographes en quête de
sujets d'études, une riche matière sans cesse renouvelée.
Si l'on . ajoute à cela le mérite moral incontestable qu'un
auteur marocain est certain de se voir attribuer p;:tr son
entourage, s'il glorifie, dans l'un ou l'autre de ces groupes,
cette noblesse toute spirituel1e qui fait l'ornement de l'Em-
pire (2), on comprendra pourquoi le Maroc offre, pour com-

(1) Sur le culle des alnts au faroc, cf. principalement E. Doutlé,


Notes SUI' l'islam maghribill: les Marabouts, p. 3 sqq.
(2) On a vu plus haut l'assertion po ilive d'Ibn el-Mowaqqit, au sujet
LA. LITTÉRATURE BIOGRAPHIQUE
47

penser la pénurie de ses documents d'histoire politique.


toute une série d'histoires particulières du mouvement reli-
gieux qui lui donna, depuis la fin du Moyen Age, une em-
preinte si caractéristique.
Alors qu'il semble, en effet, s'ètre produit au Maroc, dans
le siècle qui suivit l'avènement des Chorfa, un ralentisse-
ment de l'activité historique, c'est à partir de ce momenl
qu'en revanche la littérature biographique prend une exten-
sion beaucoup plus grande. La cause en est due précisément
au développement subit du nlaraboutisme au XVIe siècle, et
c'est pourquoi on a pu dire à juste raison que « cette renais-
sance religieuse s'est caractérisée sous la triple forme d'un
pou voir politique nouveau, d'une mission religieuse très ac-
tive et d'une littérature arabe musulmane spéciale à cette
é p 0 que (1) ».
La biographie des chorfa et des savants et l'hagiographie
ne son t pas séparahles, au Maroc, de la généalogie: la science

de la préférence qu'il faul accorder aux travau biographiques. Il ajoule


que leur ulilité est indéniable, et recherche les causes de cetle utililé;
d'aprè lui, elle con i le dans le fait que les biographies des grand per-
onnages ne provoquent pas seulement l'intérêt, mais encore l'imilation
et l'émulalion. Un savalll de Rabal, encore vivanl, Fal\:.l Allah el-Bannânî,
cité par Ibn el-Mowaqqil, es-Sa<driat el-abadîyya, p. 11, a insisté, dans son
ouvrage inlitulé et-Tabaqdl (inédit), sur le même sujel. Comme les hislo-
rien propremenl dits, les dilIérenls biographes ou hagiographes ne man-
quent pas d'ailleurs de s'élendre sur l'ulililé des éLudes qu'ils entrepren-
nent. Ils le fonl mème avec plus d'aisance que les premiers, particulière-
menl el-Kallànt, Salwal el-an(às, r, p. 1. Hs n'omellent jamélis de cilerla
phra e sléréo! ypée : ~:»\ J.;;. ç.bt:U\ j ~ : « la mi éricordc di-
vine descend sur ceu qui font mention des ainL )).
r

(1 ) E. Doutlé, op. ciL, p. 1~, nole 1, après Hené Bassel, Revue de l'his-
Loire des religions, 1899, 'l eI' emestre, pp. 3~9-360. Fr. Codera, in Conside-
rable numero ... , p. 590, voit au conlraire, à tort, la cause de l'e lension
de cetle littérature hagio-biographique dans « la tendance qui a presque
loujours dominé les écrivains arabes de l'Occident )). On verra, au con-
lraire, plus loin, qu'a\'anlle XVIe iècle, le Maroc n'a produit qu'un nom-
bre lrè restreint d 'ouvrage biographiques el hagiographiques, landis
qu'all déclin de la dyna lie mérinide, ces lravall font place, presque sans
ll~atlsilion, aux ancienne tabaqâl, ou recueils biographiques des lradi-
lionnisles, des juri consulte et des grammairiens.
48 LA. CONCEPTION DE L'HISTOIRE

du nasab n'y a pas moins de spécialistes que dans le reste


du monde musulman. La chose est compréhensible. Un
arbre généalogique bien établi, à l'abri de toute contestation
possible, constitue pour les familles de chorfa le meilleur
titre de noblesse qu'elles puissent produire; et quoi de plus
naturel, devant l'enchevêtrement compliqué des différentes
branches toutes issues d'un ancêtre conlmun, mais, à un
moment donné, séparées les unes des autres et se subdivi-
sant elles-mêmes en sous-branches, que des répertoires aient
été dressés pour permettre à chacun de savoir à quoi s'en
tenir exactement sur sa propre origine? Et, de même que
les chroniqueurs ont pour premier soin de s'étendre longue-
ment sur la souche des Inonarques dont ils écrivent l'his-
toire, de même les biographes sont nécessairement des gé-
néalogistes et n'omettent jamais les chaînes d'ascendance
des personnages dont ils retracent la vie. Les Marocains at-
tribuent une im portance extrême à ces listes de non1S qui
peuvent sembler à peu près sans objet; et c'est un titre digne
d'envie que celui de nessâba qu'ils accordent à ceux q ni ont
consacré leur activité à ces stériles spéculations (1.).
Il va sans dire que ces biographes doublés de généalo-
gistes appartiennent, dans un grand nombre de cas, à la
maison dont ils se font les historiens. Il n'est guère de ché-
rif lettré qui n'ait composé, parmi ses autres œuvres, une
espèce d'armorial de sa propre famille, n'ait insisté longue-
ment sur ses origines et ne se soit étendu avec abondance
sur les divers personnages qui en marquèrent les deg['és
successifs.
Les hagiographes n'ont pas, en écrivant chacun leur part
de la Légende dorée marocaine, agi d'une manière sensible-
ment différente. Bien souvent, ce sont des descendants du
saint lui-même qui écrivent l'histoire de sa vie, ou, s'iJs ne
s'en sentent pas capables, la font écrire par un lettre de
grande ville en lui fournissant la liste de ses manâqib, c'est-
à-dire des actes d'allure miraculeuse qui lui sont attri-

(1) Sur l'utilité du nasab, cf. el-Ioûsî, el-Mol},âcJarât, éd. de Fès, p. 14


sqq. et ez-Zayyànî, el-To/'jomânat el-kobrâ, III • de Salé, fO 1.
LA l.ITTÉRATURE BIOGRAPHIQUE 49

bués (1). Il existe, au Maroc, un nombre relati vernent consi-


-dérable de ces monographies de saints, qui toutes ressemblent
-étrangement les unes aux autres et sont d'une lecture diffi-
.cile et parfois rebutante.
Les recueils hagiographiques, par' ordre géographique ou
,chronologique, comportent nécessairement des notices ré-
,sumées et sont, en général, plus lisibles. Et, plus que ne le
font d'ordinaire les nlonographies de saints, il peut leur ar-
river de replacer, avec plus ou moins de bonheur, les per-
:sonnages qu'ils étudient dans le cadre de l'époque à laquelle
ils ont vécu. Au lieu de vouloir uniquement s'en tenir au
développement de manâqib souvent puérils et insignifiants,
,ces recueils forment parfois un ensemble assez vivant, où il
n'est pas impossible de retrouver des informations curieuses
.sur l'existence intérieure du pays. On peut, par contre, leur
reprocher de ne s'occuper que des saints des villes et de
, laisser de côté les innombrables santons c:am pagnards du
:M aroc arabophone ou berbérophone. Les hagiographes ma-
,l 'ocains n'admettent, en général, dans leurs listes, que ceux
-des marabouts qui ont été en même tenlps des docteurs de
l'Islâm, par conséquent, des saints vraiment orthodoxes. Et
l'on a déjà fait remarquer que, non contents d'écarter soi-
gneusement la masse des obscurs saints berbères, ces écri-
vains ont encore passé sous silence toute la légende popu-
'l aire, la plus intéressante, au fond, des saints orthodoxes (2).
En e11'et, alors qu'il semblerait naturel de voir la biographie
.et surtout l'hagiographie faire une large place à la légende ,

(1) C'est ainsi que les pseudo-chorfa descendanl du sainl Aboù 'ch-chitâ
,e l-Khammâr, et inslallés auprès de sa zâwiyya, à 70 kilomètres au nord-
oue t de Fès (cf. Rev. de l'hist. des rel., t. LXÀVI, 1911, pp. 206-217), onl
fait écrire, il y a quelques années, par un leltré de Fès, du nom de
'<Omar b. MoL:tammed b. <Abd cl-Qùdir es-Soûdi el-Qorachi, un recueil de '
manâqib de leur ancèlre intitulé: Matâli' ech-chomoÎLs wa'l-aqmâr fî tar-
jamat Abi 'ch-chitâ' el-J(hammàr. Nous avons enlre les mains une copie de
ce travail, qui ne présente d'aulre intérêt que celui d'avoir été écrit Sllr
.commande.
(2) Cf. Henri Bassel, Essai sur la lilteratl).re des Berbères, Alger, 1920,
p.273.
4
50 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

il en est rarement ainsi. Si l'on trouve dans les monogra-


phies de saints quelques relations de faits qui paraissent
avoir été dénaturés et tournés au prodige, il faut recon-
naîtl'e que, la plupart du temps, les hommes qu'elles pré-
~entent sont des hommes COlnme les autres. La vraie lé-
gende du saint n'est pas dans les hagiographies écrites, si
l'on peut dire; elle se trouve dans l'esprit de la foule, sur-
tout de la foule illettrée. L'hagiolâtrie populaire n'a pas sou-
vent de points communs avec les recueils de manâqib. Dans
ces derniers, ]e saint est avant tout musulnlan, très ortho-
doxe, dévot, ascète; ses biographes ~ui donnent le caractère
d'un intercesseur; il a parfois aussi l'esprit débordant d'un
lnysticisme qui le rapproche de l'unité divine. C'est à peine
s'il se montre un redresseur de torts, parlant haut aux sou-
verains; plus souvent, il travaille sourdement contre eux.
C'est dans le rôle social qu'ils jouen t dans le pays que les
santons marocains se dévoilent un peu à travers les mono-
graphies. Là réside précisément l'intérêt de ces dernières.
Cette observation générale pel'met d'ailleurs d'expliquer
pourquoi les femmes saintes, qui pourtant bénéficient au
·Maroc d'un culte populaire étendu, sont à peu près laissées
de côté dans l'hagiographie nationale savante.

Le gros intérêt de tous ces ouvrages réside, en tout .cas,


dans le fait qu'ils constituent les seuls documents écrits qui
touchent aux confréries religieuses du Maghrib. Il est rare au
Maroc, ou presque sans exemple, qu'un saint notable ne se
rattache pas, par une chaîne plus souvent spirituelle qu'an-
cestrale, au fondateur ou aux propagateurs d'une de ces so-
ciétés .m ystiques; de mêlue, la p upart du temps, les groupes
de chorfa assument la direction d'une confrérie, indépendante
et maîtresse, ou filiale d'une autre et se plaçant sous sa tutelle
nominale. C'est grâce à ces œuvres que l'on pourra arriver à
connaître le caractère exact de chacune de ces confrél'ies, les
causes obscures qui ont nlotivé leur fondation et le rôle po-
litique et social qu'elles ont joué depuis lors au :Maroc.
LA LITTÉRATURE BIOGRAPHIQUE 51

On trouvera Inême parfois dans ces biographies de chorra


ou ces monographies familiales des informations d'ordre
strictement historique: pour ne citer que deux exemples,
la Mi/"ât el-ma{tdsin, consacrée à l'ancêtre de la gl'ande fa-
mille marocaine des Fâsîyin, Aboû'l-Mal}.âsin Ioùsof el-Fâsi,
contient un bon récit de la bataille des Trois-Rois, et l'ou-
vrage intitulé el-Bodoûr eÇl-rJâwîyya, une relation trop brève,
à notre gré, de la dynastie éphémère des marabouts d'ed-
Dilâ'.
Les représentants lnarquants des grande~ familles de la
noblesse marocaine ne sont pas seulement, dans la pl'esque
totalité des cas, des personnages religieux. Ce sont aussi des
écrivains. L'aristocratie musulmane forme en même temps
l'élite intellectuelle du pays, et il n'est pas étonnant que les
ouvrages consacrés à ces lignées de chorfa dont la science
islâmique n'a d'égale que l'édifiante piété, constituent une
série de documents précieux pour tout ce qui touche à l'his-
toire littéraire du pays. C'est ainsi que la famille des Fàsiyin,
dont on vient ùe parler, n'a pas seulement élé au Maroc
l'un des « piliers» du châdhilisme; elle a aussi donné nais-
sance à des savants qui font enCOl'e autorité, et dont l'un,
cAbd er-Ral)mân ben 'Abd el-Qâdir el-Fâsi a mérité le nom
d' « es-Soyoûti de son époque».
On peut dire, en résumé, que cette littérature biogra-
phique, venant cOlnpléter heureusement la maigre littéra-
ture historique renferme, évidemment sous une forme frag-
mentaire, des éléments non négligeables de l'histoire poli-
tique, religieuse, sociale et littéraire de l'Empire des
Chorfa. .
On peut rattacher encore au genre biographique, et du
mêlne coup à l'histoire, ces nombreuses autobiographies
que l'on appelle en arabe fahrasa. Tout lettré marocain de
quelque envergure se dispense rarement de renseigner ses
lecteurs habituels, dans une œuvre de ce genre, non pas
tant sur ses origines et les différentes époques de son exis-
tence que sur ses propres études, les maUres auprès des-
quels il a étudié, les ouvrages qu'il a lus, expliqués et com-
mentés depuis son adolescence et durant toute sa vie, et
52 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

même la liste des élèves qu'il a pu former. Il ne livre pas au


public cette sorte d'autobiographie, qui, on le conçoit, pré-
sente surtout un intérêt bibliographique, tant qu'il est vi-
vant; mais, dès sa mort, ses héritiers s'empressent de la
1nettre en circulation, et en tirent eux-mêmes parti pour
écrire une vie du défunt.
Enfin, il ne sera peut-être pas inutile de signaler l'exis-
"tence de quelques ouvrages qui, à première vue, ne parais-
sent pas devoir contenir des renseignemeuts historiques, et
néanmoins, laissent transpercer parfois de s allusions à des
événements politiques contemporains. Ce sont des œuvres
ou des commentaires d'objet spécialement islâmique, se rap-
portant en g énéral au droit ou à la th éologie; ainsi, le
commentaire de Mayyâra sur el-Jlforchid el-mo' ïn d 'Ibn
~Achir et le Jli'yâr d'el-Wancharlsi comportent parfois
des bribes d ' histoire qu'un enquêteur à la recherche
d'une documentation compl è te pourra utiliser, et qu 'au
dem eurant, les historiens indigènes n'ont eux-nlêmes pas
ignor ées (1).
La maniè re diJûctique, sous sa forme d'orjoûza, qui, on
l'a vu, s 'est étendue jusqu'à l'histoire dyna stique, n'a pas
exclu de son" domaine les listes de chorfa et de personnages
religieux importants. La cadence simplill é e du mètre qu 'elle
emploie permet à des généalogistes de nl é tier et aux arbi-
tres marocains du chérifJsme de briller dans leur spécialité
et d'avoir une mémoire à toute épreuve, au milieu de l'inex-
tricable imbroglio des di verses branches soi-disant issues
du Prophète.
De même, bien que leur objet semble les faire ressortir à
la géographie uniquement, les ril}la ou relations de voyage
(surtout de voyages ùe pèlerinage à la :M ekke) renferment
toujours, en mème temps que des itinéraires et des évalua-
tions de distance, des biographies relativ es aux personnages
qui illustrent ou illustrèrent les différentes étapes de la
route suivie pal' le voyageur. Parfois aussi, on y pourra

(1) Ainsi el-Ifrùnî, Nozhat el-J;Lâdî, éd. Houdas, p. 260 du lexte el 431 de
la trad.
LA LITTÉRATURE BIOGRAPHIQUE
53

relever des indications d'histoire politique, éparpillées il est


vl'ai, dont il y aura quelque parti à tirer (1 ).
Si bien qu'en fin de compte. par~e que les historiens sont
nécessairement et par fonction des polygraphes, tous les
polygraphes sont aussi quelque peu historiens; tel auteur,
sans s'être jamais essayé à écrire une œuvre spécialement
historique ou biographiq ue, a pu laisser échapper dans ses
travaux des parcelles d'informations sur l'histoil'e de son
propre pays, qui, malgré leur forme disséminée, constituent
des documents dont, a priori, il ne faut pas nier la valeur'.

En résumé, c'est un ensemble fort complexe que forment


les sources arabes de l'histoire du Maroc depuis le XVIe siècle.
En laissant de côté les pièces d'archives qu'il faudra ras-
sembler, dépouiller et classer avant de pouvoir les utiliser,
on se trouve en présence de deux groupes de documents
parfaitement distincts. Les uns ne se rapportent qu'aux
dynasties marocaines et, particulièrement, à la vie person-
nelle des souverains du pays; les autres s'occupent des per-
sonnages _ religieux, chorfa, savants - qui détinrent au
Maroc quelque part d'autorité spirituelle.
La conception de l'histoire, du même coup, n'est pas une;
on se trouve en présence d'au lTIoins deux types d'ouvrages:
chroniques dynastiques, d'une part; biographies, d'autre
part; les premières moins sympathiques que les secoilde,s
au public lettré marocain. Che7. les chroniqueurs, peu ou pas
d'évolution depuis le ·M oyen .Age, bien que leurs histoires
soient devenues des histoires nationales, restreintes unique-
ment au Maroc, à l'intérieur de ses limites; les panégyristes
et les pamphlétaires demeurent des émules de leurs prédé-
cesseurs de la cour mérinide. Les biographes, au contraire,

(1) Cf. Brockelmann, Ar. lilt., il, p. 455: «( Dans les ril.ûa, les élémenLs
« auLobiographiques et anecdotiques tiennent bien plus de place que la
« description du pay ,celle-ci constituanL presque uniquemenL une Lrame
« pour les premiers. »
LA CONCEPTIO~ DI<: L'HISTOIRE

tout en maintenant en honneur le genre qu'avaient illustré


Ibn Khallikân et e$-$afadi et en restant des généalogistes,
deviennent SUl'tOUt des hagiographes et des historiens du
chérifism e. Comme les chroniqueurs, ils tendent peu à pèu
à exclure de leurs livres tout ce qui n'est pas marocain: ou
bien, ils se font les rapporteurs de 112anltqib expurgés de
toute superstition populaire; ou, plus encore, établissent des
dictionnaires biogl'aphiques génél'aux. Les « classes» (taba-
qât) de traditionnistes (1), jurisconsultes. grammairiens,
étant des œUV['es trop spéciales, ne fornlent plus de mono-
graphies séparées, mais se fondent dans les recueils biogra-
phiques où tous les personnages marocains de quelque im-
portance sont étudiés pèle-mêle, et où voisinent ainsi les
saints ul'bains et les docteurs de l'Islâm.
Quels que soient, en somme, les défauts et les mérites de
ces genres d'ouvrages, il faut avouer qu'ils sont loin de
constituer des sources de premier ordre. Il faudra les sou-
mettre, pour en tirer des renseignements originaux, à une
sévère critique de provenance et les confronter soigneuse- -
ment poar faire la part de leur exactitud e. Les œuvres
d'histoire marocaine qui nous sont paryenues, sous leur
forme de chroniques ou de biographies, n'apportent que des
bribes d'histoire. Elles présentent un aspect aussi fragmen-
taire que des documents d'al'chives, sans en avoi)' toujours
malheu l'euserilent la valeu r.

(1) Cf. sur les t'.lbaqdt d es tradilionnislcs (T:t-âji:?) , vV. Marçais, le Taqrîb
de en-Nawawi, p_ 240 el 241, Ilole 1 ( références sur la définilion, l 'utililé,
l'origine el la littérature des tabaqât ).
III

LES PROCÉDÉS

Ainsi donc, pendant q uatl'e cents ans, alo1's qu'en Europe


l'évolution intellectuelle a m.arqué son avance à pas de géants,
on ne voit poindre dans la littérature arabe marocaine aucun
indice d'une tendance nouvelle, d'une conception moderne
ou tout au nloins rajeunie des études historiques . .Malgré
l'effort de quelques individualités exceptionnelles, effort mal
accueilli par le monde lettré du pays, on sent, dans tous les
ouvrages, le souci constant d'obéir en tous points à la disci-
pline islân1Îque. Les savants marocains, en histoire comme en
-science musulmane, ont toujours eu sous les yeux les modèles
de leurs devanciers orientaux. Et, si leur conception des
genres historiques ne leur est pas particulière, il faut s'at-
tendre aussi à les voir présenter leurs écrits suivant les règles
fixes dégagées par eux des travaux analogues qu'ils ont trou-
vés disséminés dans l'imluense littérature de langue arabe.
En effet, les procédés commun à tous les historiens ma . .
rocains le sont égaleluent à la plus grande partie des histo-
riens arabes de tous les pays du monde musulnlan. Leur
manière d'écrire ne semble, en aucune façon, offrir de dif -
férence avec celle des historiographes ou des biographes de
la période classique de l'Orient antémédiéval ou de l'Es-
pagne du Moyen Age. D'autre part, l'unité du genre, qui
place, à leur avis, sur le mêlue pied, toute étude historique,
qu'il s'agisse d'histoire politique, sociale, religieuse ou lit-
téraire, s'aperçoit encore mieux à l'étude de leur technique
56 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

de composition; mais les constatations auxquelles conduit


cette étude ne leur sont pas non plus particulières. La seule-
originalité des historiens marocains se borne à enfermer
dans les frontières de leur pays les sujets qu'ils se s,ont pro-
posé de traiter. Ils ont écrit leurs chroniques ou leurs mono-
graphies sur un plan tout préparé que leurs prédécesseurs.
leur ont fourni. Jan1ais ils n'ont essayé de s'en libérer. On
pourrait presque dire que leur rôle a simplement été de ré-
pond.re, en utilisant les résultats de leurs enquêtes person-
nelles, à un questionnaire fixé par la tradition, à faire entrer
la matière nouvelle dans un cadre immuable, tracé une fois
pour toutes. La marque de la culture islâmique a été si forte-
sur eux que, même en composant des ouvrages d'ordre pro-
fane, ils ne se sont jamais rendu compte que leurs procédés.
devenaient peu à peu désuets.
Ce sont ces procédés que l'on voudrait maintenant carac-
tériser rapidement: ils ne méritent pas à notre sens qu'on
s'y arrête beaucoup tant ils entraînent de conclusions néga-
tives; tant on sent, à les examiner, de stagnation intellec-
tuelle, d'éloignement d'esprit et même parfois d'indélicatesse
chez ces écrivains pourtant jusqu'à un certain point raffinés,
mais dont le conservatisme outrancier et la crainte de la nou -
veauté n'ont jamais peut-être été égalés. D'autant plus que
leur manière de travailler décèle un tel manque de sens
critique qu'on risque, en l'analysant, d'être obligé de faire-
'état de puérilités parfois à peine croyables ..
Cette manière de travailler suppose naturellement une in-
formation préalable. C'est elle qu'on essaiera de préciser
d'abord, avant de passer, pour s'en tenir à une classification
peut-être artificielle mais commode, à leurs procédés d'ex-
position et à leurs procédés d'expression.

La découverte de quelques-unes des œuvres qui ont servi


de sources aux chroniqueurs et aux biographes marocains de
la période moderne, permet de se rendre compte assez aisé-
LES PROCÉDÉS
57

ment de la façon dont ils les ont utilisées. Il est plus difficile,
au contraire, d'apercevoir le parti qu'ils ont pu tirer des
autres documents placés à leur disposition: ceux que leur
ont procul'és leurs enquêtes privées, par voie orale, directe
ou traditionnelle, ou qu'ils ont trouvés dans des archives
d'Élat ou simplement familiales. Ces derniers éléments d'in-
fonnation sont, en effet, d'un contrôle encore presque
toujours impossible. Mais, dans la plupart des cas, ce sont
ceux auxquels l'historien a fait précisément le moins appel,
quand lui-m ême n'a pas été contemporain des événements
qu'il relate.
On peut admettre que, sauf dans le cas particulier qu'on
.vient de signaler, ce sont les ouvrages antérieurs dont les
histol'iens du :M aroc ont tiré la plupart du temps l'essentiel
de leur documentation. Une prem.ière question se pose: ont-
ils toujours épuisé la bibliographie - marocaine - du sujet
qu'ils ont voulu traiter? Il est évident que non. Mais, en
gélléral, on peut constater que seul un petit nombre de ces
sources demeura ignoré par ' eux. L'écriyain est, le plus sou-
'vent, assez complètement a\-erti de l'existence des travaux
vers lesquels il 'p ourra orienter. ses recherches. Pour le chro-
niqueur, ce seront les annales établies par ses devanciers;
pour le biographe, les monographies ou les recueils déjà
composés au Maroc.
Seulement, entre le fait de connaître l'existence d'une
source possible et celui de se trouver à m ême d~ la consulter,
.il y a loin. Il s 'ensuit qu'il faut beaucoup plus faire confiance
à l'indication d'une source dans le corps d'un ouvrage, à
l'endroit où elle est utilisée, qu'aux listes des autorités que
les historiens marocains placent parfois au début ou à la fin
de leurs travaux.
Il faut néanmoins reconnaître qu'il ne leur est pas tou-
jours facile de se procurer les ouvrages qui peuvent être
e
nécessaires à leur documentation. Jusqu'à la fin du XIX siècle,
l'imprimerie au Maroc est inexistante; un ou deux ateliers li-
thographiques, à F ès, prennent de l'importance à cette époque
seulement; ils n'apportent d'ailleurs aux historiens qu'un
secours très limité, car ils accordent la préférence de leurs
58 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

éditions aux ouvrages pUl'ernent didactiques. La production


littéraire au Maroc est, dès lors, réduite à la copie, dispen-
dieuse et infidèle. La bibliothèque de l'Université d'el-Qa-
rawiyin est relativenlent riche, mais son fonds historique et
biogr'aphique est certainement celui qui a été le plus livré à
l'a]Jandon et a fait l'objet des moindres préoccupations des
uléma chargés de sa conservation. Les acquisitions nou-
velles y sont devenues rares, de plus en plus. Il n'est pas
douteux que les difficultés d'ordre bibliographique en pré-
sence desquelles on se trouve encore actuellement, au
Maroc, n'aient été les mêmes pour les écrivains marocains
des siècles passés. Et l'on sait aussi conlbien les savants
des grandes villes de l'Empire, qui ont pu acquérir ou
recevoir par h~ritage une collection de manuscrits de lit-
térature musulmane, se 1110ntrent jaloux de leur avoir.
Peut-être, au surplus, n'ont-ils pas tout à fait tort. Le res-
pect du livre est encore dans le pays profondément illu-
soire; et le lettré qui consent à se séparer momentanément,
au profit d'un de ses confrères, de quelque exemplaire de
ses précieux livres de falllille, ne le fait qu'à regret, en
comptant soigneusement, devant l'elllprunteur qui ne pour-
rait songer à se formaliser, le nombre des feuillets ou des
cahiers que compte le \'olume, et en inscrivant sur la page
de garùe ces indications en même temps qu'un témoignage
de sa propriété.
Dès lors, quand un écrivain lnarocain a trouvé un sujet
qu'il se sellt capable de traiter, il lui faut s'armer de patience
s'il veut lire tout ce que l'on a déjà écrit sur la question. E!l
général, il se contente d'une infornlation linlÎtée, à nloins
que ses fonctions publiques ou ses relations lui perlueUent,
à force de recherches, de grouper à pied d'œuvre tous les
travaux auxquels il lui faudra se référer.
Une fois qu'il a rassemblé quelques-uns de ces docu-
ments, l'historien s'informe de leur contenu. Il y prend tout
ce q n'il pourra utiliser et le met par écrit, en copiant à la
lettre. Ces notes sont appelées par lui de~ fawâ'ïd. Ou
hien, plus simplenlent, il se fie à sa mémoire. Faut-il croire,
à ce propos, el-Ifrâni, qui, dans la conclusion de sa Nozhat
LES PROCÉDÉS 59

el-?làdt (1), prétend qu'il avait rassemblé sur fiches (batâ'ïq)


sa documentation, afin de la coordonner (tahdhtb), !l1ais qu'il
en fut empêché par un obstacle imprévu? Est-ce vrai, ou pure
forfanterie de sa part? S'il n'est pas im possible qu'il ait cité
de mémoire les nombreux vers que renferme son ouvrage,
il a bien pourtant eu à sa disposition l'histoire d'el-Fichtâli
dont il reproduit d'importants passages.
Quand il en a fini avec un auteur, l'écrivain passe au
sui vant. Les pages de son cahier de notes se noircissent.
Ensuite) il laisse au temps le soin de le mettre sur la trace
des autres autorités qui lui manquent, ou bien, jugeant son
informatIOn suffisante, il se n1et à la composition de 's on
propre ouvrage. Il en explique le but dans une préface, lui
Ïlnpose un titre aux rimes bien sonores et entame son sujet.
Ses notes sous les yeux, il laisse courir sa plume sur son
brouillon (2). Deux manières de composer s'offrent alors
à son choix: quelquefois, il introduit, à son compte person-
nel, dans son li vre, toutes les indications non contradictoires
qu'il a à sa disposition; ou bien, plus souvent encore, s'il
peut y avoit· doute dans son esprit, quand deux informations
ne concordent pas entre elles, il se borne à citer in extenso
le texte de la plus ancienne autorité, puis successivement,
celui des autres, en faisant, s'il le juge utile, suivre le tout
d:une petite appréciation personnelle. Aussi, le développe-
ment d'un fait se présente-t-iJ., dans la plupart des cas, sous
la forme suivante: « Un tel a dit. .. Tel autre a dit ... Je dis
n10i-même ... (3). »
On pourra objecter qu'on n'agit pas différemment en Eu-
rope. Assurément, mais non jusqu'à ce point pourtant, sous
cette forme toujours répétée, qui entra1ne à des longueurs,
à des redites; il suffit, pour s'en convaincre, d'ouvrir au

(1) P. 310 du texte et 511 de la traduction.


(2) i;) >___ (dialectal: mswûddal, par opposition à la « copie au net ) :

~ (dialectal: mbîrJ4a ).
(3) En arabe: aj. ..... J.,;\ 3#> ....... J\~L, Jli * ....... 0J\9 Jli 3#>.
60 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

hasard la traduction d'une histoire ou d'une biographie ma-


ghribine moderne. D'ailleurs, il ne faut pas croire que l'in-
tervention de l' écri vain se fasse sentir chaque fois. 'Le plus
souvent, il laisse le lecteur libre de tirer lui-même la con-
clusion qu'il jugera bonne. Il lui met sous les yeux les élé-
ments de la discussion et n'a pas toujours le désir d'indi-
quer comment illa tranche personnellement.
Ce procédé s'explique d'ailleurs d'une manière historique.
Il y a longtemps que, sans être poussé à l'extrême comme par
beaucoup d'écrivains marocains, il fut employé plus intelli-
gemment par l'historiographie arabe. La chronique d'Ibn
el-Athîr n'est qu'une réédition émondée de la grânde his-
toire d'et-Tabari, et l'existence de ces rédactions succes- .
sives a même permis par compal'aison d'expliquer la suite
des transformations subies par les anciennes écritures hé-
braïques (1). Dans un ouvrage de vulgarisation récemment
paru, Carra de Vaux écrit: « (Les historie'n s arabes) recueil-
lent les traditions, les mettent côte à côte et laissent le lec-
teur juge. C'est à ce dernier de faire le métier de critique t
s'il lui plaît; l'historien n'est qu'un agent d'informa-
tions (2). » On est en plein accord avec lui; mais il paraît.
difficile de partager son avis, au moins pour la période qui
fait suite à l'antiquité musulmane classique, quand il dit que
« cette façon de corn prendre l'histoire n'est peut-être pas si
mauvaise ». Elle ne pourrait être digne d'attention que si
l'on était autorisé à ne jamais mettre en doute l'exactitude et
la sincérité de l'écrivain. Et certes, pour l'histoire maghri-
bine, ces deux facteurs si importants ne sont malheureuse-
ment pas toujoul's assurés!
Une fois rouvrage établi, il souffre encore des remanie-
ments. Même quand il a été transcr.it au net et que l'auteur-
l'a mis en cil'culation parmi les lettrés du pays, il peut y
faire des additions ou des suppressions. Comme le texte du
livre n'est pas fixé par l'imprimerie, ces retouches semblent

(1) Cf. E. Renan, Éludes d'histoire religieuse, Se éd., Paris, 1.909, p. Si:
(2) Baron Carra de Vau , les Penseurs de l'Islam (l, les Souverains, l'his-
toire et la philosophie politique), p. 81.
LES PROCÉDÉS
61

à prernlere vue ne pas offrir de gl'osse importance. Elles t'm


ont pourlant, car les copies prises dans l'intel'valle seront dif-
férentes. Il y a dans des ouvrages marocains, et arabes en
général, deux sortes de variantes bien distinctes: celles qui,
J'un e part, sont dues ~ux erreurs commises par les copistes;
les autres, au moins aussi nonlhreuses, qui sont le fait de
l'auteur lui-même. Le premier travail de critique auquel on
doit soumettre un manuscrit arabe intéressant est d'élablir
s'il remonte à une copie faite sur l'autographe, et postérieure-
ment à la mort de l'auteur. C'est la seule façon de se rendre
cornpte si l'on a affaire à un texte définitif, ne varietur.
D'autre part, il peut arriver qu'une fois l'ouvrage mis en
CIrculation, l'auteur se trouve en présence d'une source dont
il s avait ou ignorait l'existence, et dans laquelle il remarque
des indications qui pourraient figurer ùans son travail. Il
n'est pas trop tard pour le faire. Un renvoi, la citation en
Inarge , et la référence fortuitement découverte n'aura pas
~té perdue. La photographie d'une page de l'exemplaire mis
au net de la Torjomâna d'ez-Zayyânî~ qui porte la copie
marginale d'un passage de la Dawl;at en-nâchir le prouvera,
ainsi que la reproduction d 'un passage de l'Istiq.,,,â accru en
marge d 'une citation du Nachr el-lnathânt, insérée dans le
texte imprimé au Qaire (1). Ce procédé est à peu près, et
sous une forme purement matérielle, .celui des retracta-
tianes des écrivains de l'antiquité classique.
C'est dans toutes ces modifications postérieures à la ré-
daction prinlÏtive, et même dans celles que cette dernière a su-
bies avant d'être livrée an public, qu'il faut voir, croyons-nous,
l'un des principaux motifs du manque d'unité des histoires
'marocaines, de l'impression sans cesse renouvelée qu'elles
donnent d'une simple juxtaposition d'indications relatives à
un même événement. Les raisons qui en sont la cau,se ne
sont pas nouvelles; on les retrouve en remontant dans le
passé islâmiqup. Mais, au Maroc, elles se sont maintenues
plus longtemps qu'ailleurs; à ce point de vue, comme à
heaucoup d'autres, la terre du Maghrib est encore, à l'heure

(1) Voir planches 2 el 5.


62 LA CO~CEPTION DE L'HISTOIRE

actuelle, riche en enseignements sur le passé social du


monde musulman.
Ce qui importe en S0111me, quand on le peut, est de re-
monter à la source originale. Mais on ne le peut pas sou-
vent. Il est, d'ailleurs, un autre écueil. Quand l'historien
utilise un autre historien, qui, pour une certaine époque,
a déjà procédé au nlême travail. de groupement, et que sa
part personnelle se trouve, dès lors, réduite à néant, ou à
peu près, jusqu'à la période où lui-même est directement
renseigné, il n'a pas à refaire le travail; plus n'est besoin
d'entreprendre une compilation nouvelle. Il suffit de copier,
en citant l'éluteur emprunté. Ou bien, la tentation l'emporte,
et c'est alors le plagiat.
Rien ne fut plus facile au :M aroc que d'être un plagiaire.
Quel lecteur assez avisé aurait pu s'en apercevoir et dénon-
cer la supercherie? Qui se serait astreint, pour démon-
trer le vol manifeste et indéniable, à une longue et minu-
tieuse confrontation de textes, de textes éparpillés aux
quatre coins du pays? Il n'est guère d'historien, ayant utilis é
des travaux antérieurs sur un suj et analogue au sien, qui,
au Maghrib-Extrême, ne soit un plagiaire en quelque endroit
de son œuvre. Il n'y a pas d 'apparat critique, pas de signes
d'écriture qui permettent de fixer exactement à chacun la
part qui lui revient. Quand un écrivain mentionne, au Jébut
d'une citation, le nom de l'auteur qui parle, rien ne vient
montrer jusqu'à quel endroit le- texte primitif est reproduit.
Où s'arrête la citation? Si quelques historiens ont l 'honn ê-
teté d'avertir le lecteur, de prendre la peine de noter eux-
mêmes la fin de leur emprunt par une indication spéciale (1) ,
combien les autres, en revanche, trouvent le procédé com-
mode et en abusent! AkensotLs n'a, dans cette voie, peut-
être jamais été égalé. Qu'importe que le Boslân d'ez-Zayyâni
soit si rare, puisque le Jaïch, dans toute sa première partie,
l'a intégralement reproduit, comme il a reproduit aupara-

(1) Au moins par un hd' inilial (~) , forme abréviative du mol: (.$~;\
« fin (de la citation) ». Cf. Ben Cheneb, Lisle des abréviations employées
par les auteurs arabes, in Revue Africaine, 1920, n OS 302-303, p. 138.
LES PROCÉDÉS 63

vant, on s'en rendl'a compte aisément, toute la partie <alawite


de la Noz hat el-J:tâdt.
Il y a, chez les lettrés marocains, diverses façons, toutes
plus ou moins malhonnêtes, de citer un texte, de le citer
littéralement, sans prendre la peine de mentionner l'auteur,
ou de donner au lecteur, par quelq ue réflexion personnelle
intercalée dans la citation, l'impression que cette dernière a
bien pris fin. Toutes sont également condamnables; la
manière marque un état d'esprit qui doit toujours maintenir
en éveilla méfiance du lecteur averti. Mais, au point de vue
purement objectif, peut-être est-on en droit de ne pas le
déplorer trop amèrement. Des sources historiques anciennes
sont toujours, à tout prendre, préférables à des ouvrages ré-
cents. Les plagiaires marocains des œuvres antérieures
ont peut-être bien fait de ne pas interpréter les premières à
leur manière, mais de nous les conserver telles quelles,
puisque souvent nous n'avons plus à notre disposition que
les travaux qu'ils (J'nt osé signer, et qu'ils nous donnent le
nloyen de reconstituer à peu près dans leur ensemble, sans
gros risques d'erreur, des sources perdues ou rares.
:M ais, malgré tout, il aurait été pour eux de la plus élé-
mentaire honn êteté professionnelle de se faire des éditeurs
sans plus, des glossateurs, comme ils le furent pour les ou-
vrages de science islâmique. On est, du même coup, plus
disposé à faire confiance à un écrivain comme el·Ifrânî, qui
a al,longé son livre en y reproduisant une bonne partie de
celui d'el-Fichtâli, sans vouloir néanmoins s'attribuer la
prose fleurie de l'historiographe d'el-Man~oûr , et qui a fixé
avec précision le début et le terme de ses emprunts.

De tout ce qui précède, une conclusion se dégage, et la cri-


tique des sources arabes de l'histoire du Maroc s'impose
d'elle-m ême. Seules, d'une manière générale, ne sont pas à
rejeter celles de ces sources qui sont contemporaines, à une
ou deux générations près, des faits qu'elles relatent. Aken-
soûs, plagiaire éhonté et sans aucune tendresse pour celui
64 LA CONGEPTION DE .L'HISTOIRE

qu'il a pillé sans scrupule, devient un annaliste relative-


ment digne de confiance dès qu'il arrive à la période de
l'histoire <alawite qu'il a vécue lui-même, en .acteur ou en
spectateur. Son œuvre, alors, fait suite à celle d'ez-Zayyâni.
La même observation s'appliquera aussi, on le verra, mais
d'une façon plus atténuée, à l'historien en-Nâ~irî.
Peut-être les biogr'aphes ont-ils fait preuve dans leurs
livres d'un peu plus de réserve que les chroniqueurs. Il est
vrai qu'ils ne sont pas poussés, comme ces derniers, par la
hâte J'obtenir quelque récompense n1atérielle pour un pané-
gyrique de la dynastie régnante ou d'un personnage en vue.
Ils savent aussi que leur œuvre sera beaucoup plus lue
([u'une chronique, et bien plus susceptible, dès lors, d'être
passée au crible. Si eux aussi sont réd uits, dans de nom·
breux cas, à la compilation pure et sÏlnple, ils ne peuvent
guère néanmoins faire autrement que de citer les autorités
sur lesquelles ils appuient leurs dires. Ils font d'ailleurs,
plus que les chroniqueurs, appel à des informations de
source orale; leurs monographies de saints et de savants
s'étayent, la plupart du temps, sur des fahrasa ou des préci-
sions fournies par les descendants directs des personnages
qu'ils étudient.
Quoi qu'il en soit, pour les . travaux historiques comme
pour les travaux biographiques, il selllble, en fin de compte,
qu'il faille retenir des documents qu'ils offrent à la critique
deux catégol'ies seulement, celles qui sont d'ailleurs définies
par l'heuristique lTIoclerne : d'une part, les ouvrages qui cons-
tituent des sources originales; d'autre part, ceux qui sont
inspirés ou copiés d'autres sources originales aujourd'hui
perdues.
Reste à savoir si ces sources originales présentent des
garanties d'authenticité suffisantes, si les événements qu'elles
rapportent peuvent être considérés comme s'étant déroulés
de la même façon qu'elles invitent à le croire. C'est là que
la conception étriquée des genres historiques au Maroc
reprend tous ses droits; la personnalité de l'historien, l'in-
dépendance relative dont il a pu faire preuve, sont les meil-
leurs indices de la façon dont il a transcrit, en les interpré-
65
LES PROCÉDÉS

tant à sa manière, ou bien sans les interpréter, les informa-


tions qu'il est parvenu à recueillir. La chronique politique,
on l'a vu, est presque toujours écri te dans un but intéressé;
mais il n'en va pas de Inème des œuvres biographiques. Les
documents fournis par ces dernières serviront ainsi: quand
ce sera possible, à juger de la valeur de ceux que contiennent
les premières, à les confirmer ou à les infirmer. L'intérêt
des œuvres biogeaphiques ne sera pas uniquement de pré-
senter des informations historiques parsemées; elles servi-
ront auss~ de moyen de contrôle, chaque fois qu'on en aura
l'occasion.
C'est seulenlent par exception que l e rappel d'un fait his-
torique s'appuie sur un document officiel, lettre ou charte,
reproduit par le chroniqueur. La plupart du temps, il relate
l'événement sur la foi de ses informations particulières.
Jusqu'à preuve du contraire, il paraît impossible, puis-
qu'on n'a aucun nloyen d'en critiquer la provenance, de pou-
voir, en même temps, en critiqller l'exactitude.
On peut néanmoins admettre, en règle générale, que
l'historien maeocain - aussi bien annaliste que biographe
_ est toujours disposé à rejeter a priori toutes les informa-
tions de source populaire. Le vulgaire se fait des événements
politiques dont il est le témoin une opinion bien à lui; de
même, de l'influence sociale des marabouts ou de la noblesse
spirituelle. Cette opinion est parfois tendancieuse, mais ell e
est le reHet fidèle de l'esprit public. Or, la haine de ce vul-
gaire se fait sentir souvent chez le chroniqueur et l'hagio-
graphe, qui ne s'attachent qu'à reproduire des faits, sanS se
soucier de leur valeur réelle et de la façon dont la masse les
accueille: il n'y a peut-être qu'Ibn <Askar et l'Anonyme Je
Fès qui semblent s'être préoccupés de l'opinion populaire.
Les autres, au contraire, la rejettent résolument. A propos
de la mort d' Al).med el--Man~oûr, el-Ifrânî n'hésite pas à
traiter de nlensonge le bruit suivant lequel ce sultan
aurait été empoisonné par son fils Moulay Zaïdân, au lieu
de succolnber de la peste, car, dit-il, « aucun des histo-
riens qui rnéritent créance ne fait mention de cet empoi-
sonnement, qui n'est qu'un de ces récits imaginés par le
5
66 LA GO CEPTION DE ' L'HISTOIRE

peuple et par dès tolbri ignorants (1) ». De ' même, il fait


remarquer qu' « il laisse de côté les récits qu'affectionne le
vulgaiI>e, pensant qu'il est plus digne de les exclure de
l'ouvrage (2) ».
Enfin, il e3t à peine besoin de signalee l'indifféren ce dont
les hisloriens marocains font pl'euve à l'égard de to~t ce qui
n'est pas l"histoire intérieure de Leur pays." On ne sait rien
par eux, ou presque, des relations politiques du :Maroc ayec
l'Europe ou même le reste du monde nlusulman (3). C'e's t à
peille ~i l'on peut découvrir dans leurs ouvrages quelques
renseignements sur les rapports de l'Empire avec l'Aftique
du Nord orientale (4). Il est d'ailleurs permis de croire que
toute information dans ce sens leur fut presque toujours
impossible. Il aurait fallu qu'ils eussent à leut' disposition
des archives d']hat conservées et classées. D'ailleurs, ils n'y
ont pas même songé, sauf peut-être ez-Zayyâni. Leur partia-
lité innée contre tout ce qui n'est pas musulman est aussi
la cause du peu de cas qu'ils firent des relations des sultans
chorfa avec l'Europe. A ce point de vue, il n'y a rien à
attendre de leurs ouvrages. C'esl dans les histoires du
:Maroc établies en Europe, c'est dans les archives des na-
tions d'outre-mer qu'il ' fau t, pour l'ins tant, aller cherchee

(1) el-1f1'<1ni, Noz hat eH1âdî, p. 189 du le rte el 306 de la trad.


(~) Ibid., p. 12 du Lexte el 25 de la lrad.
(3) On u vu qu'il en allail différemment des relations intellècluelles avec
le re, Le de l'Islàm, mais ces quelques relations étaient simplement entre-
Lenues par le mouvemenL régulier des pèlerin marocains qui se rendaient
en Arabie en suivant jusqu'en Égyple la voie de Lerre, et qui, à leur reLour,
' rapportaielJ.t à leur compatriotes des précisions Sur les milieux leUrés
qu'ils avaient eu l'occasion de fréquenter à leur pas age. Ces préci ions
servaient parfois de thème à des rii;tla; le type parfait de ce genre d'ou-
vrages est la RiJ:tla d' el-'Ayyâchl, que l'on trouve presque toujour citée
dans les Ouvrages historiques ou biographiques postérieurs. Par conlre,
des relations de voyage comme celles d'el-Wazîr el-Ghassâni et d'el-Ghaz-
zùl, pourlant pleines de détail nouveaux el uLUisables par des hisLoriens,
n 'ont jamais, ou à peu près, mérité les honneurs de la citation.
(4) EI-Ifeàni et ez-Zayyùni ont pourtant eu le mériLe de faire quelque
ell'ort dans ce sens. Le premier, ainsi, s'est étendu assez longuemenl ur
l'établis cllle,nt des Turcs en Algérie (No::hat el-J:tâdi', p. 17 du texte eL 33
de la trad. ).
LES PROCÉDES
67

toute documentation à ce su'jet. Les historiens marocains qui


ont fai t de courtes allusions nécessaires à cerlaines de ces
relations politiques ont toujours été tendancieux, imbus
qu'ils étaient de leur absolue supériorité de race, de culture
et de religion. Ajoutons qu'au surplus cette critique peut
être parfaitement retournée contre les r elations européennes
SUl' l'histoire du ·M aroc. Entee l'Europe et le Maroc des
temps modernes, il Y a toujours eu l'obstacle infranchis-
sable de l'Islàm consel'vateuL' opposé à la Chrétienté à peine
tolérante. n faut arriver au XIX e siècle, à l'époque qui a
suivi la Hévolution française, pour trouver de la part de
l'Europe une certaine im partialité dans sa façon de décrire
le pays et son histoire. Auparavant, les informations euro-
péennes portent toutes la lnarque d'une ignorance absolue
de l 'influence nlaltresse de l'Islâm sur la vie national~ Ju
'Maroc et sur ses destinées.
Il pourra néanmoins arriver que ces ouvrages européens,
surtout quand les indications qu'ils fournissent sont étayées
sur des témoignages provenant de correspondances ùiplo-
matiques, servent à coeriger certaines imprécisions que les
historiens indigènes laissent sur des événel1lenls parliculiers
à leur pays, et qui y eurent même d'assez gt'andes répercus-
sions intérieures. On n'en voudra pour exemple que l'e rreur
de date d1une année, qui vient d'être rectifiée sur des don-
nées indiscutables, au sujet de la peste de 1799 au Mafoc (1).
Il est certain que, clans la relation de cette épidémie, l'his-
toeien marocain le p lus ancien qui en fasse mention, ez-
Zayyânî, a, probablement sans Y prèter attention lui-même,
reculé de plusieurs mois l'époque de l'apparition du fléau
dans le pays; les chroniqueurs posté['ieurs, Akensoùs et en-
Nâ~irî, ont reproduit après lui, sans s'apercevoir de l'er-
reur, le renseignement chronologique qu'il a fourni. Malgré
tout, quand on n'aura pas, comme dans le cas qui précè Je,
de témoignages formels à sa disposition, mieux vaudra ac-

l1.) Dr Renaud H. P. J., Rec herches hisloriques sur les épidémies du Uaroc:
La Pesle de 1199 d 'aprè de documenl inédils, dans Hespéris, l , 192t,
p. 160 sqq.
68 LA CONCEPTION DE I,'nISTOIRE

corder sa confiance aux chroniqueurs mat'ocains, quitte ft


demander, s'il est possible, aux œuvres des biogl'aphes, de
recouper les infornlations historiques paraissant douteuses.

II

Dans la petite liste des œuvres marocaines à proprement


parler histol'iques qui nous sont conservées sur les dynasties
sa<dienne et <alawite, il est difficile d'établir un classement
suivant la méthode de composition. Au contraire, les tra-
vaux biogl'aphiques sont suffisamment nombreux et divers
pour se prêter à ce classement. C'est ce qu'on rappellera
maintenant.
La premiè ee constatation à laquelle on se trouve amené
est celle du manque d'histoire génér'ale du pays depuis ses
origines musulmanes. Pourtant, cette idée parait avoir germé
dans quelques cerveaux maeocains. On verra qu'à la fin du
XlX 6 siècle seulement, elle a pu être réalisée par en-Nâ-
~iri. Avant lui, et après des ouvrages comme ceux d'Ibn bi
Zar< et d'Ibn Khaldoûn, on n 'a affaire qu'à des histoires par-
tielles, car il ya li e u de regarder comme telle le To/'jomân
d'ez.Zayyânî, qui est une chronique islâmique dans laquelle
l'auteur n'a pas donné à toutes les périodes de l'histoire ma-
rocaine l'ampleur qui caractérise sa relation de la dynastie
<alawite.
Dans tous les cas, l'objet de Ja chronique est l'histoire
d'une famille régnante, ou même seulement d'un prince de
cette famille. Les histoires sont dynastiques: ainsi la Nozhat
el)lâdt, pour les Sa<diens, le Boslân, le Jaïch, pour les
<Alawites; o,u bien ce sont des monographies royales: ainsi,
el- Monlaqâ'l-/lzaq~oû,., consacré à Abmed el-:Man~oûr, e.;;-
~ill el-warif, consacré à :Moulay ISlnâ<ïl. Dans les histoires
dynastiques, on peut toujours remarquer que la partie la
plus développée est celle qui a trait au souverain régnant au
moment où l'écrivain compose son ouvrage, ou à ses pré-
décesseurs immédiats, sur lesquels sa mémoire ou celle de
69
LES PROCÉDÉS

ses contemporains lui apportent un afilux d'informations.


L'histoire d'un règne n'est jamais vue dans son ensemble;
l'historien marocain n'en dégage jamais des faits généraux.
C'est un annaliste qui, après avoir épuisé la série dès évé -:
nements qui se sont déroulés pendant une année, passe
naturellement à la suivante. Son œuvre est, dès lors, un
calendrier, une reproduction de synchronismes, sans aucun
lien. C'est le procédé d' Akensoûs, par exemple; c'est dans
sa chronique qu'apparaît le mieux la cascade de faits sim-
plement amenés par l'indication d'une date.
Cette rigueur de la chronique ne laisse place à des juge-
Inellts d'enseluble qu' au nloment où elle rapporle la mort
d'un souverain et l 'avènement de son successeur. Une des
préoccupations de l'historien est alors de fournir un portrait
complet du nouveau prince. EI-Ifrânî, entre autres, se
dérobe rarement à ce soin. Le portrait physique doit men-
tionner la taille, la carrure, la manière, le maintien, l'abord
du personnage, en mème temps que la couleur cie ses che-
veux, celle de ses yeux, la barbe fournie ou non, l'éclat des
dents, en un mot, toutes les particularités d'un signale-
ment (1) . Ce dernier procédé est évidemment poussé à
l'extrême dans toute nl0nographie royale. :Mais alors, le
portrait physique n'est rien à côté du portrait moral: qua-
lités diverses, culture intellectuelle du souverain sont défi-
nies à grand renfort de comparaisons, d'épithètes laudatives,
de citations. Le J.l 1ontaqâ d'Ibn el-Qâçlî est certainement, à ce
sujet, un modèle du genre. Malheureusement, toute cette
abondance dans l'analyse des sentiments ne laisse pas.
toujours beaucoup de place à l'étude politique du règne
du souverain. Ces monographies, qu'on pourrait s'at-
tendre, au premier abord, à trouver pleines de faits, sont
en général bien plùs vides que les qu~lques pages de
chl'onique consacl'ées au même personnage. Au moins t
dans celles-ci , même quand il y a partialité évidente dans
la présentation des événenlents, on soupçonne tout de

(t ) Cf. nolammenl el-Ifrâni, Noz hat eZ-l),âdî, pp. 45 et 18 du lexte el 82


el 140 de la trad.
7D L.\. COXCEPTION DE L'IUSTOIRE

mêmè ce qu'ils ont pu être dans la réalité et l'on peut en


chercher ailleurs confirmation. Dans les premières, qui sont
avant tout des ouvrages littéraires et des panégyriques, la
matière historique fait totalement défaut.
Malgré l'importance qu'elle attribue au lllonarque, la
chronique dynastique laisse, auprès de lui, une petile place
aux grands personnages de la cour, surtout, d'ailleurs, dans
la mesure où ils sont en rapports avec leur chef suprême.
Quelques historiens donnent assez régulièrement des listes
de ces hauts fonctionnaires; d'autres -se contentent d'en
faire mention· au fur et à mesure qu'ils prennent une part
active à un événement. Ce sont les princes, lieutenants du
sultan dans les capitales de l'empire, les vizirs, les cham-
bellans, les secrétaires, les qâ'ïds chefs d'armées. On trouve
parfois aussi le rappel de l'investiture, de la destitution Ol1
de la mort des grands qâçlîs des villes im portantes, Fès ,
Meknès, Marrâkech (1) .
D'autre part, les chroniqueurs sont en m ême temps des
lettrés; aussi, d'habitude: ne manquent-ils pas, surtout el-
Ifrânî et AkensollS, de s'étendre plus ou moins longuenlent
sur les manifestations littéraires provoqu ées par un sultan;
c'est la raison pour laquelle leurs histoires donnent, à
maintes reprises, l'impression d'être des anthologies poé-
tiques.
Il est dommage qu'elles ne soient pas plus souvent des
chrestomathies épistolaires. Les quelgues lettres que l'on
trouve parfois dans les chroniques n'en sont que plus pré-
cieuses, par l'intérêt qu'elles offrent au point de vue histo-
rique ou par les détails sociaux qu'elles fournissent. La cor-
respondance des Dilâ'ïtes, conservée en grande partie par
el-f:Iawwât, sera d'un~ importance indéniable pour l'histoire
de la dynastie éphémère de ces marabouts du Maroc cen-
tral. Les lettres d' A~lmed el-l\lan~oùr à son fi 1s Aboû Fâris
. Abd el-' Azîz, dont el- Ifrâni a pu se proc urer le 1exte, sont

(1) On trouvera en appendice une liste de ces fonctionnaires. ous


avons pu la constituer au cours de nos lectures, mais elle n'a pas la pré-
tention d'être complète.
LES PROCÉDÉS 71

le meilleul' portrait de ce grand monarque; l'une d'elles (1 )


a même été jugée par les copistes si peu digne d'être un
doéument d'histoire, qu'elle ne figure pas sur la plupart des
manuscrits de la Nozhat el)tâcU. Et pourtant, grâce à elle,
on est exactement renseigné sur l'organisation intérieure
du palais de :M arrâkech; devant la peste fi ui menace de
faire son apparition dans la capitale du Sud, el-Man~oûr sé
hâte, de Fès où il se trouve, de prendre pour les sIens les
mesures que dicte la situation: il donne à son fils des con-
seils de prophylaxie; il devra faire usage de remèdes et de
potions tout préparés; quand il recevra des lettres de la
région pestiférée, son secrétaire ne devra les lui lire
qu'après les avoir trempées dans du vinaigre très fort.
El-l\1an~oùr est très au courant des détails domestiques .
·d e son ralais : il envoie des ordres à transmettre aux tail·
leurs et à l'intendant de sa garde-robe, fait presser les tra-
vatix de bâtiment, s'inquiète de son cheval bai, demande
qu'on le soigne, qu'on ne lui donne plus de fourrage, qu'il
soit nlonté quotidiennement et qu'il reste sellé teut le long
du jour. Evidemment, parmi ces lettl'es, il en est peut-être
d'apocf'yphes ou de reconstituées, comme celle des habi-
tants de :M al'râkech à :\f oulay l\fo}:lammed b. <Abd Allah,
-q ui, contrairement à l'usage de l'époque, y est appelé le
Sa<dien (2).
On ne trouve plus dans la littérature historique du ~laroc
moderne de monographie de ville, comme avnit voulu l'être
le Qi/'jâs. Le procédé, repris au début du XVIe siècle par
Ibn Ghâzi pour ~f eknès, dans er-RawÇl el-ltatoûn, fut ensuite
complètement délaissé. Par contre, les chroniqueurs regar-
dent comme des événements dignes d'être mentionnés les
·c onstructions ou les réparations de monunlents et d'édifices
publics dans les capitales de l'empire. On trouve chez
tous, avec ou sans descriptions, des l'enseignements sur les
travaux entrepris sous l'impulsion des sultans bâtisseurs;

(1) el-Ifrânî, Noz hat eHlâdî, p. 181 du lexle et 297 de la trad. sqq.
(2) Ibid., p. G5 du lexte el 1'15 de la lrad. Heproduite par en-Nà~irî, ls-
tiq~â, III, p. 33.
72 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

à Marràkech par el-Man~oùr ~ à F ès par Moulay er-Rachid ,


à Meknès par Moulay Ismâ 'ïl.
Il existe enfin une série d'indications qui trouvent place
à côté de s événements politiques , dans le plus grand nombre
des chroniques: ce sont les phénomènes météorologiques
rares, les épidémies, les famines. En moins d'un siècle, el
lfrânîen signale un nombre considérable : l'éclipse de
soleil de 964, la peste de 965, le tremblement de terre
de 977, les sauterelles de 978 (1), la comète dont l'apparition
coïncida avec la bataille du Wâdl'l-Makhâzin (2) , et même y
en 1036, l'orage de grêle dont les grêlons demeurèrent trois
jours sans fondre (3). C 'est peut-être el-Qâdirî qui prend
le plus de soin à rappeler ces calamités publiques, dans son
,-Vachl' el-mathânî; il fournit, par exemple, dans ce diction-
naire biographique, un grand non1bre de détails curieux
sur les désastres que produisit au :M aroc le fameux trem-
blement de terre du l et' novembre 1755 (26 mol).arram 1169),
connu sous le nom de tremblen1eI1t de terre de Lisbonne (4).
Le même biographe semble celui qui a donn é , au
Maroc, le plus d'extension à la chronique annuelle mixte.
Alors qu'el-Ifrânî, par exemple, a fait à la fois œuvre de
chroniqueur et de biographe, mais en deux ouvrages diffé-
rents, el-Qâdiri a rassen1blé dans l'Iltiqât ed-dorar comme
dans le N achr el-mathânî, dèS matériaux d'ordre à la fois
politique et biographique. Il marque la transition entre la
chronique purement historif!ue et le dictionnaire chronolo-
gique de célébrités de l'Islâm marocain. Sa façon de pro-
céder est toujours la suivante: après l'indication de l'année
dans la décade, il donne l'une après l'autre les biogra-
phies des personnages notables morts pendant cette année,
puis un tableau succinct des événements intérieurs qui s'y
sont déroulés. Aussi, jusqu'à un certain point, son double
répertoire des savants et des saints des XIe et XIIe siècles de

('1) No::hrlt el-l),âdt', p. ~O du texte et 92 de la trad.


(2) Ibid., p. 161 du texte et 263 d e la trad.
(3) Ibid., p. 245 du texte et 407 d e la trad.
(4 ) Nachr el-nwlhâni, H, p. 266. Cf. aussi en-Nâ~irî , Isliqijâ , IV , p. 128.
LES PROCÉDÉS 73
l'Hégire peut être en même temps considéré comme une his-
toire politique établie sous forme d'annales.
Mais la manière d'el-Qâdirî semble ayoir constitué une
exception. Les travaux biographiques sont ou bien des mo-
nographies d e personnages ou de familles illustres, ou bien
des collections de notices de courte étend ue sur un grand
nombre de personnages. Ces notices peuvent être groupées
suivrlnt un ordre chronologique - c'est le cas de la Daw?7at
en-l1âchir et de la Safwat man intachar, - ou bien s 'a ppli-
(Iuer aux célébrités d'une même ville: ainsi, le dictionnaire
d'Ibn <Aïchoûn ech-Charrât.
D'ailleurs, comme les chroniques, ces biographies sont
enfermées dans un cadre toujours respecté. Une nolice de
courte étendue sur un docteur d'Islâm doit d'abord, après
une série d'épithètes laudatives qui ne sont pas toujours jus-
tifiées, mentionner SOIl nonl complet, parler de ses qualités
naturelles, donner la liste de ses maîtres, indiquer les
ijôza dont il a pu bénéficier, fournir les titres des ouvràges
qu'il a composés, nommer ses principaux disciples et, pour
terminer, noter le lieu et la date de sa naissance et de sa
mort, ainsi que l'endroit exact où il a été inhumé (1). Pour
les saints, la nléthode est sensiblement la même; les maîtres
de science musulmane figurent en même temps que les ini-
tiateurs mystiques, et l'on donne aux manifestations mira-
culeuses (karamât ou 17ulnâqib), qui ont signalé la puissan~e
visionnaire du marabout, une importance plus ou moins
grande, suivant chacun d'eux.
La composition des relations de voyage en pays musulman
ne diffère pas sensiblement de celle des biographies; alors
que les ri?zla en terre chrétienne ne comportent que des in-
dications écrites au jour le jour, les ri?ûa de pèlerinage, en
dehors de hmr cadre nécessaire, se présentent sous la
forme de dictionnaires topographiques des célébrités du
nlonde musulman. D'ailleul' , la plupart des notices qu 'elles

(1) On trouvera de. ob crvation analogues sur les procédés de l 'hislo-


riographi e arabe andalouse dan l 'Ensayo bio-bibliograjico d e Pons Boigues,
p. 370 sqq.
74 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

renferment s'appliqu'ent à des personnages vivanls que le


voyageur a rencontrés sur sa route. Le fait d'être un mu-
sulman étranger pique un peu, malgl'é tout~ la curiosité du
savant marocain : on verra que deux docteurs orientaux,
AQ.med b. <Abd el-Baï el-f:Ialabî et Mo1)ammed $àlil,l el'-
Riçlawi, furent accueillis à Fès avec assez de sympalhie.
Dans l 'aristocratie intellectuelle de la capitale, ils apportè-
rent, par leurs connaissances et leur manière d'être, une diver-
sion à l'uniformité traditionnelle des programmes d'éludes
d'el-QarawiyJ'n. C'est la mêm.e raison qui valut leur succès
aux ribla savantes. L'une d'elles, celle d'el- <Ayyâchi a joui
d'une vogue qui ne fut égalée par- aucune autre relation de
voyage. L'auteur de la JJ/i/,'ât el-Ina!ul' sin, ~Io1)ammed el-
'Arbi el-Fâsi nous est représenté par ties biographes comme
ayant toujours pris un vif intérêt à se renseigner sur l es
célébrités contemporaines de l'blâul non marocain: quand
il rencontrait quelque étt'anger, il avait l'habitude de lui
demander le nom de sa patl'ie, celui des gens notoires,
savants, saints ou chorfa qui s'y trouvaienl; une fois rentré
chez lui, il consignait le tout par écrit (1). ~Iais il faisait
exception.

III

Tout le monde s'accorde à reconnaitrc que le style est la


marque la plus fidèle d'une personnalité. Aussi bien, pour-
rait-on trouver téméraire tout essai de jugement d'ensemble
sur les procédés d'expression des historiens et des biogra-
phes marocains postérieurs au Moyen Age. Un n'ira pas
jusqu'à affirmer que tous ces écrivains n'ont jamais mis
dans leurs œuvres quelque chose d'eux-mêmes, et q LI 'elles
furent à tel point conçues et rédigées dans la stricte obéis-
sance à la tradition établie par le s deyanciers, qu'elles ne
présentent pas plus d'originalité dans leur forme que dans

(1) Cf. el-loû î, el-MolJ,âcJ,arât, p. ~9; cl-Qùdirî, Nachr el-nwlhânÎ, 1,


p.182 et el-Kattânî, Salwal el-allfas, L, p. 3.
LES PROCÉDÉS 75
leur mode de conlposition. Mais, comme chacun de ces écri-
vains ne Inéritera jaulais une étude spéciale, où pourraient
êtro définis son st Yle et sa langue, il ne sera peut-être pas
inutile d'essayer de dégager les grands traits caractéristi-
{lues et communs de leur manière d'écriJ'e. '
On sait d 'ailleurs que chaque genre littéraire, chez les
Arab es, suppose, en général, un style assez unifol'me. Les
grammaieiens ont le leur, les théologiens et les j uriscon-
suItes également. Dans une littérature où la répétition est le
_fait dominant, où chaque œuvre ma!tresse est le plus sou-
vent accrue d'un nombre considérable de commentaires et
de gloses, l'expression ne se trou \Te forcément jamais renou-
velée et le fond ne laisse pas à la forme 1e moyen de témoi-
gner beaucoup de la nlarque personnelle de l'écrivain.
L es :Marocains lettrés connaissent bien leur langue clas-
sique, mais ils l'ont surtout étudiée dans des ouvrages di-
dactiques ou religieux, plus raren18nt dans la liUérature pro-
fane. On ne peut, d'une manière généeale, leue reprocher
de ne pas énoncer clairement ce qu'ils pensent, quand ils le
veulent. L'arabe est pour eux un instrument dont ils se ser-
vent sans nulle gêne, mais avec le souci constant du jugement
de leurs confrères. Il s'ensuit que comme ils onttous, ou à peu
près, la même culture et. le même idéal intellectuel, l' unité de
leur langue s'en est grandement ressentie. Pour peu qu'on ait
quelque habitude de la phrase latine, on distinguera sans
peine des fragments de Tite-Li e, de Salluste ou de Tacite.
Mais que l'on prenne par exemple une page d'el-Qâdiri et
une d'el-Ijawwât, quelle différence trouvera-t-on dans la
Inarche de la phrase, dans le rythme ascendant ou décrois-
sant des pé riodes? Aucune. Il n:y a paR eu plus d'évolution
dans le style de ces écrivains que dans leur écriture. Autant
il est impossible d'assigner, à deux ou trois siècles près, une
date de copie à un manuscrit maghribin dépourvu d'indica-
tion chronologique, autant il est difficile de savoir si un ou-
vrage anonyme de science musulmane doit à première vue
être déclaré ancien ou récent. Le style, dans les éCl'its clas-
siques, est demeuré le même et la langue y est celle de
l'âge d'or de la litt~rature arabe savante.
76 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

Seulement, au Maroc, comme dans tous les pays arabo-


phones, il y a un langage parlé qui vit et évolue, de même
que n 'importe quel dialecte, à côté de la langue savante
figée. · On sait que l'inlmense majorité des Marocains se
compose de ' berbères arabisés, et qui portent encore, dans
les diverses manifestations de leur vie quotidienne, la
marque de leur origine. En dehors de leurs conférences lit-
téraires, où, d'ailleurs, la langue du Qor'ân n'est pas tou-
jours la seule employée, les lettrés du pays se servent de
l'idiome courant que l'on parle autour d'eux, de leur vél'i-
table langue maternelle: celle-ci, peut-être moins riche au
point de vue lexicographique que l'arabe classique, a subi
des influences nombreuses avec le temps et a fini par donner
droit de cité à des vocabI'es d'importation, dont l'adoption
était devenue indispensable, au fur et à mesure que quel-
ques nouveautés étrangères s'introduisaient dans la vie
sociale du pays. Ces mot::;, qu'il ne pouvait se dispenser
d'employer dans ses récits quand ils lui étaient nécessaires,
le chroniqueur les a, pour ainsi di['e, classicisés, malS pour
son œuvre historique seulement.

Leur contenu même, la suite d'événenlents terrestres


qu'elles rapportent, sont la raison pour laquelle, dans l'en-
semble des productions de la littérature marocaine, les
chroniques historiques constituent les ouvrages les plus
lisibles, ceux qui exigent la connaissance la moins appro-
fondie des subtilités de la langue. Le style y est, en général,
clair, les phrases courtes ne tendent à aucun effet de recher- 1
1

che; il va de soi que l'historien, qui pense dans sa langue


courante, transcrit en arabe classique les phrases dialectales
qui viennent à son esprit.
On peut néanmoins observer des degrés d'élégance et de
complication du style, parmi les di verses chroniques lnaro-
caines. Il en est dont la forme rappelle d'une façon frappante
la conversation courante. Quelquefois, les phrases d'ez-Zay-
yânî ou de l'Anonyme de Fès sont presque de l'arabe dia-
LES PROCÉDÉS 77
lectal marocain transcrit à l'aide des caractères de l'alphabet
de la langue savante. Avec el-Ifrâni ou Akensoûs, on sent
déjà un souci plus net de montrer qu'on peut briller et se
révéler à l'occasion fin lettré, même en écrivant des annales
politiqu es. Le style se nlontre précieux et artificiel chez les
historiographes sa'diens, el-Fichtâll et Ibn el-QâçlL Chez ces
derniers - on le verra en examinant leurs œuvrAS - le
sujet imposé n'est qu'un prétexte à un étalage de culture
poussée à l'extrême: ce sont à peine des chroniqueurs, ce
sont surtout des adi'b, des historiens littérateurs, esclaves
des assonances et des finesses de la langue classique. Du
style de ceux-ci, on peut dire qu'il est le digne continuateur
de celui d'écrivains comme Ibn Khâqân ou el-Khafâji. Leurs
œuvres, Manâhil e$-$afâ' ou el-.Alontaqâ'l-maq$oûI', sont
souvent totalement illisibles; ou alors, il faut s'arrêter lon-
guement à chaque instant pour essayer de saisir, devant la
chute des métaphoreB, le sens réel qu'elles contiennent.
Ce classement du style en trois catégories n'est d'ailleurs
possible que si l'on s'en tient au texte de la chronique elle-
même, en laissant de côté, pour les juger à pal't, l'introduc-
tion, la conclusion et les rares appréciations personnelles de
l'historien sur l'un des personnages dont il fait le porlrait.
Dans ces parties de leurs ouvrages, les écrivains marocains,
ez-Zayyâni comme el-Ifrânl ou Ibn el-Qâçll, se croient
tenus de faire usage de la factice prose rimée (1). On
connait la « doxologie » de la Nozlwt el-?uidî " « Rendons
grâces à Dieu de ce qu'il a rendu dociles entrA 1}Os mains
les plumes qui plongent dans l'océan ténébreux des écri-
toires pour en retirer les perles du discours et nous a permis
ainsi de nous emparer des mamelles de la science et d'y
puiser son lait à grands flots (2). » Il est évident que si le
l'es le de l'histoire sa' dienne était écrit dans le même goùt,
elle n'offrirait, au point de vue documentaire, qu'un intérêt

. ('1 ) Cf. à ce sujet, la jusle observation de l'abbé Bargès dans sa traduc-


tion de l'hi toire des Beni ZayyùL1, exlraite du Na :? m ed-dorr wa'l- 'iqiân
d'cl-Tana i, p. xxv.
(2) Cf. cl-Ifrâ 111 , Noz hal el-I),ddi, p. 1 du lexlé el 2 de la lrad.
78 LA . CONCEPTION DE L'IIISTOIRE

for;t limité. Pourtant el-Ifrâni y a fait indéniablement preuve


de culture avancée; il n'a pas trop émaillé son récit de
fleurs de rhétorique, sauf peut-être quand il voulait dire
impunément des vérités désagréables au pouvoir central. De
SOl'te que son histoire se présente comme un ensemble écrit
sans trop de recherche, mais non dépourvu d'une cel'taine
élégance. Quant au ministre historien ez-Zayyâni, qui a sup-
primé dans le Torjo17'lân tout apprêt littéraire pour s'en
tenir aux faits historiques, - le Bostân, au contraire,
. marque une pl'éoccupation de style relevé, parfois, nette
ment accusée - il a encouru, pour sa forme caractéri-
sée par un peu de laisser-aller, les jugements sévères
des uléma marocains. Celui qu'Houdas a porté sur lui
demeure néanmoins excellent. On le rappellera ici : « Ez-
ziâni maniait convenablement la langue arabe; son style,
d'une grande simplicité, n'a pas subi l'influence de ce mau-
vais goùt particulieL' aux auteurs andalous et dont Ibn el-
Khathib et Elmaqqari nous ont fourni les spécimens les plus
marquants. Ezziânî ne s'est pas cru obligé d'exprim er des
idées simples sous cette forme « précieuse » qll' on appelle
la prose- rim ée et dont le but principal semble être de sou-
mettre l'esprit du lecteur à une torture qu e s'est béné vole-
ment imposée le cerveau de l'écrivain. Il a pensé, avec
raison, que dans une œuvre historique, la clarté ne devait
jamais ê tre sacrifiée à l 'élégance et qu 'il fallait laisser les
« atours » de la langue à ceux qui n'ont d'autre souci que
de parer leur pensée (1). »
Au style des biographes et des hagiographes, les mêmes
observations pourraient s'appliquer; elles vaudraient de
même pour bien d'autres travaux islâmiques écrits au
Maroc. La langue de ces écrivains s'accroît parfois de toute
la technologie du ~oùfisme, et l'obscurité est le principal
résultat de cet emploi. EI-Qâdiri n'a pas voulu, dans ses
deux dictionnaires, accorder l 'hospitalité à tous ces termes
et il a eu grandement raison. Les recueils de notices consa-
crées à des savants se lisent en gén~ral sans désagrément.

('1) Houdas, traducteur, le Maroc de 1631 à 1812. Inlroduction, pp. YI-YII.


LES PROCÉDÉS 79

En ce sens, les biographes modernes du' Maroc n'o'n t pas


suivi le peocédé déplorable du style rythmé et ampoulé qui
fait, par exemple, de la Raï?uinat el-alibbâ' d'el-Khafâjî, l'Ine
source bio-bibliographique à peu près inutilisable (1). Mais,
en revanche, combien on sent chez eux l'austère uniformité
du style classique, renforcé à chaque insta~t d'épithètes
louangeuses d'une valeur toute relative! Un hagiogl'aphe
Inarocain, Ibn <Askar, dont on verra l'originalité de la vie' et
de l'œuvre, a fait preuve encore, à cet égard, d'une person-
nalité assez remarquable. Il manquait évidemment d'une
culture très poussée, mais à côté de définitions. et d'apolo-
gies ~)Qûfiques, des anecdotes racontées avec quelque
bonhomie apportent au lecteur un peu de délassement,
tandis qu'il est impossible de ne pas s'y prendre à plusieurs
reprises si l'on veut lire complètement une œuvre d'hagiogra-
phie marocaine, même de courte étendue.
Le style le plus chaoti q ue qui soit est bien celui des
poésies didacliques de chronologie et de wafayât. La traduc-
tion d'un poème de ce genre serait à peu près impossible.
Que l'on songe au tour de force accompli en faisant entrer
clans un seul vers un nom, une date en lettres, quand il
faut, au surplus, se préoccuper des deux rimes d'hérnistiche
et obtenir un mot arabe pourvu de sens, en assemblant
comme il le faut les lettres dont la valeur numérique lotale
correspond à la date à indiquer. Il va sans dire gu'à ce jeu,
la mesure des vers se ressent Jans la plupart des cas de la
difficulté. Quant aux chevilles nécessaires pour combler
l'un ou l'autre hémistiche, elles sont parfois monstrueuses.
Cette langue et ce style des /'omoûz font songer irrésistible-
ment aux lamentables poèmes mnémotechniques qui enfer-
ment la liste des rois capétiens ou celJe des sous-préfec-

Cl ) Une tentative malheureuse vient d'ètre faile dans ce sens par un


jeune ddib de Rabat, Mol:ta mmed es-Sâ'ïl). el-Andalosî er-Ribâ~î, qui, dans
une chrestomathie maghribine et andalouse écrite dans un but pédago-
gique et i nlitulée : el-Montakhabdt el- <abqarîyya li-tollâb el-madâris eth-
ihanâwîyya, a placé, en tète de chaque extra it d'auteur, des notices bio-
bibliographiques en prose rimée et .enrichie d'expressions rarissimes,
aussi peu utilisables pour les étudiants qLle pour les pécialistes.
80 LA CONCEPTION DE L'i-nSTOIRE

tures de France. Encore si le résultat cherché était le 111ême!


Les cit~tiol1s d'el-Modarra entre autres, qu'on trouve épar-
t
,

pillées dans les biographies des personnages notables de


Fès, montrent l'engouement un peu inexplicable que l'on a
témoigné, dans les milieux lettrés du Maroc, à cette variété
chronologique du poème didactique en vers l'ajaz (1).
Une des particularités du style qu 'on est convenu d'appeler
oriental, réside enfin cl ans l'abondance des images, qui,
tant elles sont inattendues, frappent le plus souvent et cho-
quent parfois le lecteur européen. Chroniqueurs et bio-
graphes marocains en ont tous fait un usage quelquefois
abusif. Quelques-unes sont d'un pittoresque qui les rend
savoureuses. POUL' qui connait la bruyante population .de
Fès, toujours vindicative et frondeuse et d'un loyalisme en
général suspect, quoi de plus exact et de plus sonore que
cette comparaison du tumulte des habitants au cours d'une
réunion à el-Qarawiyin, « au braiement d'une troupe d'ànes
sauvages (2) ) ! D'autres images, par eontre, se répètent tel-
lement dans la même œuvre qu'elles finissent par ne plus
rien obtenir de l'effet attendu par l'auteur; il en est une,
d'ailleurs classique, qui est si chère à el-Ifrânl qu'on ne la
trouve pas moins de quatre fois dans la Nozhat el-(lâdî :
c'est celle « des combats et des luttes qui auraient fait blan-
chir un enfant à la mamelle (3) ». On pourrait m ulti plier les
exemples de ce genre; mais, en fin de compte, ils témoigne-
raient encore que, dans leurs procédés de style, les Maro-
cains n'ont pas voulu différer en quelque façon de leurs
prédécesseurs de rOrient et de l'Occident musulmans.

••
On a dit plus haut que, pour la langue aussi, ils ne n1an-
({uaient pas de modèles, du moins tant qu'ils n'avaient pas

(1) Le procédé n'élail d'ailleurs pas nouveau: on sait qu'cs~Soyoù tl a


placé une orjoû:::a chronologique à la fin de son Td'rikh el-kholajâ'.
(2) Cf. Nozhal eHtâdi, p. 235 du texte cl 390 de la trad.
(3 ) ibid., pp. 212 , '239, 286 ct 301 du texte et 346, ;~98, 4 ï6 et 498 de la
trad.
LES PROCÉDÉS 81

il signaler des nouveautés introduites dans la vie sociale,


des importations d'usages ou d'objets étrangers. Il en résulte
que la langue des biographes, qui n'a eu besoin d'aller
,c hercher ses termes que dans la littérature biographique
antérieUl'e, est tout naturellement asse2 limitée quant au
nonlbre des mots et relativement classique. Tandis qu'an
,c ontraire , la' langue des chroniqueurs a forcément, avec le
temps, légèrerrlent évolué. Elle présente aussi, en de nom-
breux cas , des réminiscences d'expressions dialectales. Il
sera peut-être curieux de. retrouver les causes des apports
nouveaux dont s'est enrichie cette langue de l'histo·r ien.
Tout le monde sait, d'abol'd, l'influence sensible que le
makhzen des Sa<diens subit du fait de l'empire ottoman. Les
deux grands souverains de cette dynastie, <Abd el-Malil' et
Ab.med el- :Man~;oûr donnèrent, le second surtout, un proto-
cole et une étiquette turcs à leur cour; un séjour assez long
en Orient avant leur avènement leur en avait fourni le
moyen. Il s'ensuivit une importation dans la langue offi-
cielle, qui fut en même temps celle de leurs annalistes, d'un
nOlubre assez eonsidérable de vocables osmanlis. C'est ainsi
que l'introduction du terme « pâchâ » au Maroc semble
dater de cette époque. On en trouvera d'autres dans la
Nozhal el-l:tâdt )· ils paraissent être, pour la plupart, tombés
depuis en désuétude.
L'armée subit aussi à partir de cette êpoque de sérieuses
modifications., Indépendamment de son organisation à ra
turque, elle conlprenait dans ses rangs de nombreux rené-
gats, anciens chefs de bandes ou mercenaires, qui lui impo-
&èrent~ en même temps que des procédés de tactique 3mé-
liol'és, une s érie de termes techniques dont tOtIS n'ont pas
encore disparu.
Il semble enfin qu~à dater du moment ou le jilzâcl anti-
chrétien se traduisi t par une recrudescence de la piraterie
marocaine, le jargon méditerranéen auquel on donne le nom
de langue franque (1) s~implanta dans tous {es ports de

(1) Sur l'emploi de la langue franque dans le ports de l'Afrique du


J ord, cf. Uaedo, in Revue africaine, l. x.v, p. 93, el M. Cohen, le Parler
6
82 LA CONCEPTION DE L'lIISTOIRE

l'empire marocain. Ce mélange d'espagnol, de provençal,


d'italien et d'arabe fut aussi, sans nul doute, la langue em-
ployée dans les relations quotidiennes avec les captifs. Ces
derniers, non plus, ne furent pas étrangers à une introduc-
tion peut-être assez grande de vocables nou veaux dans les
dialectes du littoral. Une étude récente vient de démontreL·
que toute la. langu.e technique des marins indigènes des
ports marocains est, à très peu d'exceptions près, d'origine
non arabe (1).
Les chroniques ont bien alors été obligées de faire plus
ou moins état de ces apports nouveaux. On voit, surtout à
partir de la période <alawite, apparaltre dans les histoires
marocaines des vocables étrangers en même temps que des
souvenirs d'expressions dialectales. Les uns comme ]es.
autres mériteraient certainement d'être étudiés et groupés.
en un glossaire. Les premiers, surtout, permettraient de
tirer d'intéressantes conclusions sur la façon dont le Maroc
dut un peu se modet:niser, malgré lui, à partir du XVIIe siècle.
C'est chez ez-Zayyânl qu'on en trouverait le plus grand
nombre. Et ce serait normal, rien qu'à considérer la person-
nalité de l'écrivain, tellenlent différent de ses collègues, et
si bien averti, pour son temps et pour son pays, des choses·
de l'étranger (2).

arabe des Juifs d'Alger, p. 4 11 sqq. Le curieux « Dictionnaire arabe que )),
que J\loüclle a placé à la fin de sa Relation de captivite, Paris, 1683, pp. 330-
362, eL qui est (;elui ùu vocabulaire employé à Salé à la fi~ du xvne siècle,
renferme une bonne part de mols appartenanl à la langue franque .
.C1) L. Brunol, la Mer dans les traditions et les industries indigènes à Ra-
bat et Salé. Cf. son observation, qui n'esL pas toujours jusLifiée (ez-
Zayyàni), p. 290, § 344: « L'hisLorien maghr ;bin lettré montre une igno-
rance singulière, pm'foi dédaigneuse, p our Loutes les choses maritime ;
il semble que les Lerm e techniques onnenl dans sa langue comme des
mols élrangers, de e ' pres ions dialeclales qui ne méritent pas d'expli-
cation , sur le quelle il passe rapidement. »
(2) Voici quelque exemples de ces mots nouveaux: et-Torjomân el-
mo'rib, éd. Boudas, pp. 1~ et 76 du lexle, 4J.1..iL..::, , « plate-forme à canons »,

p. 60, .::,;~ , « mine », p. 72, ..::..,l;.1.;\ ,« antennes, vergues ». - Dan '

et-Tvrjomânat el-kobrâ, on trouve de même les termes: ,;::~.J, « qua-


LES PROCÉDÉS' 83

Ces nouveautés acceptées pal' les chroniqueurs modernes


marocains le furent aussi dans les l ettres et les rescrits
émanant des sultans 'alawites. Les preuves de cette adoption
s'accumulent de jour en jour. On se rend compte de plus
en plus qu'il existe au Maroc une manière d'écrire spéciale

ranLaine »; _U~L.;\! ' « ambassadeur»; J.::,,~ , « monter un pavillon»;


'\;.i.} , « tempête »; 1.J-Lj , « piraterie sur mer », etc. n mot dia-

lectal (Torjomân, p. 15), .u...::j , employé par lui et ensuile par Akensoùs
et en-Na~irl, est trè connu dans la langue courante et a une ig'nification
spéciale: il désigne, en !fet, une toilure soutenue par ùes poulrelles se
joignant en V el recouverte elles-mêmes de planches minces, sans luiles
ni chaume. C'est la toiture employée pour tou les marchés aux étofl'e
du Maroc (qî:jârîyya).
On trouverait bien des termes dialectaux en remonlant dans la litléra-
ture marocaine. Le Rawq, el-qi /'tds et la Ri1;tla d'Ibn Ba~où~a n'en manquent
pas. Dans er-Rawq, el-haloûn d'Ibn Ghàzi, on lrouve ainsi le..Jl! Jy ,
« marché hebdomadaire »; j~L.::.; ,« revendeurs de fruit » (ce sens

a échappé à Houdas qui a lu: j~l...::.;,J\ et traduit « le sopllistiqueurs»;


cf. Monographie de Méquinez, p. 29 et nole 1). Dans Ibn 'A kar, Daw1;tal en-
ndchir, 0 11 peut aussi en relever quelques-uns: a insi, p. ~4, ligne 5, le
mot~! est pri dans le sens d' « aveugle », qu'il a toujours en maro-
cain, pal' antiphrase euphémi lique. On trouve, p. :n, 1. 4, dans la bio-
graphie d'Ibn Ghàzi, le pluriel '"":"'~\ , avec le sens de (1 dome tique )

qu'il a. dans la langue couranle; à la même page, 1. 6, ~~.J!.l:- , dans le


sens de « soldaLs d'escorle, gardes ». CeLle significalion dialeclale est
connue dan le Djebel eplenlrional el la forme plurielle du mol e l celle
de quelque Hom de méticr de la xo~v~ marocaine. P. 48,1.15, Jbn 'Askar
emploie, dans le sen de « chambre », le mot ~JAA- (voisin de l 'algérien

~:!JAA..; signalé par Beaussier, Diel. pral. a,.. fr., p. 341, avec lc sens dc
« petile chambre où l'on met de provi ion, capharnaüm »), (lui, appa-
remmcnt, appartenait au dialecte de Fès au XVie siècle el qui emble avoir
disparu. On citera, pour lcrminer, Ulte phra c Lypique de la Daw~tal ell-
ntichir, qu'on cnlend encore Lous l es jours comme vœu de guéri ' on à Ull
malade: d-.1:. û~ ':Jj ~ ':J\ d~ç. ~ ~J..~_ L (p. 37, 1. 9).
84 LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

aux secrétaires de cour: on pourrait en appeler le style et la


langue, style et langue makhzen. Des recueils de correspon-
dance chérifienne édités depuis quelques années permettent
de s'en apercevoir sans difficulté (1). Il est certain que, sur-
tout à partir du règne de Sidi Mol}.ammed b. <Abd er-
Ral;tmân et de celui de Moulay el-Basan, les rapports suivis
avec les représentants des puissances européennes dans les
ports de l'empire ont obligé la secrétairerie d'État à faire
usage, ~ans une certaine mesure,d'un style concis et précis,
mais auquel l'épithète J'administratif ne convient qu'ünpar-
faitement, et d'une langue nouvelle adaptée à des besoins
nouveaux. On ne voudrait, pour affirmer son existence,
qu'un exemple aussi probant que pittoresque: dans une
lettre datée du 20 dhoû'l-qa<da 1273 (12 juillet 1857) (2), le
rédacteur officiel, chargé, au nom du sultan, d'ordonner au
gouverneur de Salé de former vingt artilleurs dans cette
ville, appelle la science de l'artillerie tâtobjît (3) en appli-
quanL, sans sùrement s'en douter, la forme d'état berbère à
un mot turc assez tard venu dans l'arabe dialectal marocain!

(1) Fume)', Choix de correspondances nwrocaines, Paris, 1903, et Nehlil,


Lellres chérifiennes, Paris, 1916.
(2) Reproduite par en-N â~irî, Isliq~â, IV, p. 206 (ligne 2).
(3) ~~~'.
DEUXIÈME PARTIE

Les Hommes et les Œuvres


1

LES HISTOHIENS DE LA DYNASTIE SA'DIENNE

AI~IMED EL-MANf?OÛR, PROTECTEUR DES S.\. YANTS; SON MAÎTRE

EL-MANJOÛR; SES HISTORIO GRAPHES, EL-FICHTÂLÎ, IBN EL-Q.~~i

Succédant aux Beni ~lerln et aux Beni Wattâs , qui


avaient pu se m.aintenir sur le trône marocain pendant plus
cie trois siècles, la dynastie sa ' dienne n'eut pas, malgré le
mouvement populaire auquel elle dut son avènement, une
existence aussi prolongée. C'est à peine si l'on peut estimer
sa durée à cent cinquante ans, et encore en tenant compte
des périodes troublées et des compétitions qui marquèrent
son début et sa fin. Aussi bien, n'y a-t-il guère, parmi les
princes de cette famille qui régnèrent effectivement, qu' un
seul dont la figu re émerge vraiment et dont le gouverne-
n1ent amena au Maroc une ère dè pt'ospérité et d'apaisement
que le pays tout entier ne connut pas souyent : Ahoù'
1- ' Abbâs Al;l.med el- ~lan1?oùr, qui fut, sans contredit, en
mênle tenlps que le plus grand des sultans sa'diens, l'un des
rares souverains dont le :M aroc puisse vél'itablement tirer
gloire. Avant lui et après lui, ce fut, la plupart du temps,
l'anarchie complète, la guerre civile sans cesse rallumée aux
quatre coins de l'Empire : il suffit de se rappeler que, sur
les douze sultans de la dynastie sa 'dienne, huit, au moins,
88 LES HOMMES ET LES ŒCVllES

ont péri de mort violente, pour avoir sur elle un aperçu


d'ensemble saisissant; et il est normal que les historiens qui
nous ont conservé le récit des incessantes révoltes au milie u
desquelles les princes sa'diens eurent, presque tous, à se
débattre, s'appesantissent volontiers sur la période de calme
et de sécurité que valut au :M aroc l'é nergie et la pui ssance
du plus illustre d'entre eux.
D'autant plus qu'el-Man~oûr ne fut pas seulement un con-
quérant et un organisateur; ce fut aussi un lettré et un ami des
lettres. Au témoignage de tous ses biographes, sa culture mu-
sulmane était remarquable. Ses expéditions et le gouverne-
nlent de son empire ne l'empêchèrent pas, durant tout son
règne, de poursuivre ses études. Nous sommes remarquable-
ment renseignés sur elles, grâce à la fahras(( de son maître
el-Manjoûr : ce dernier ne craint pas d'y appeler son royal
élève: « le savant des khalifes et le khalife des savants. » (1}
Aboû'l- 'Abbâs AI).nled ben 'Ali ben 'Abd Allah el-Man-
joûr el-Fâsî (2), originaire d e :M eknès, naquit à Fès en 92&
(23 décembre 1519-11 décembre 1520). Il fit ses études dans
sa ville natale, auprès de maitres célèbres, conlme 'Abd
er-Ral,lmân ben 'Ali Soqqaïn (3), qui professait d.a ns le ves-
tibule de son riârt de la Zerbtâna (4), et MolJ.ammed ben

(1 ) ~LJ.J\ ~.J s.liW\ ~k.: Fahrasa, fol. 1 d e mon ms. B.appeloJls.


qu'en plus des historiens ct des biograph e marocain, el- 1 hafàjî, dans.
sa Rai~tânal el-alibbâ', p. 142 sqq., consacre une noUce élog ieuse il cl-
Man~oùr.
(2) BIBLIOGllAPHIE. - Safahrasa; AJ:l.med Bùbà, aïl el-ibtihçij, p. 80; Ibn
el-QâÇlî, Jadhwal el-iqlibds, p. G7; Ibn 'Askar, Dawlfal en nâchir, p. 45; cl-
Jfrànî, $afwat man intachar, pp. 4-6, eLNo z hat el-Ifddî, éd . llouda ,pp. 27,
133 et 135 du Lexte et M, 221 eL 2'25 de la trad. ; el-KalLùnl, Salwat el-anfds "
lII, p. 60 ; Ben Cheneb, Idjdza, § 2~.
(3) Mort en 956 (1549). Cf. el-Manjoûr, Fahrasa, fol. 29 sqq, ; Ibn 'A kar,
Dawlfal en-ndchir, p. 4,5 ; Ibn. el-QàÇli, Jadhwat el-iqtibds, p. 261; Al.:tmcd
Bâbà, Nad el-iblihdj, p. -1;)3; el-KaLLùnî, Salwat el-anfds, 11, p. 159; Bcn
Cheneb, Idjdza, § 30.
(4) On entend, au Maroc, par riâq" une maison comprenant deux corp
de logis séparé par un jardin. Zerb~àna est l e Hom d 'un quartier de Fès
qui s'éLend à l'E t de cel ui d'el-'Oyoùn et au Sud du Zoqâq el-l}.jàr, dan
la parti e occidentale d e la Ville-Vieille. Cf. le plan d'Orthlieb, nO ~'10.
LES HiSTORIENS . DE LA DYNASTIE SA 'DIENNE 89

Al,lmed ben ' Abd er-Hal,lmân el-Iassitnî (1), dont il suivit les
cours pendant onze ans (2).

(1) La biograpbie de ce savant, mort e11 959 (1551), est donnée par d-
Manjollr, dans sa fahrasa, fol. 13 à 19 de mon ms. Cf. également Ibn 'As-
kar, Daw~wt en-nâchir, p. 45; Ibn el-Qàçli, . Jadhwat el-iqlibâs, p. 152;
Al:uued Bàba, ail el-ibtihâj, p. 368; Mol).ammed el-'Arbi el-Fàsî, Mir'ât.el-
ma~ldsin, p. 9; el-Kallàni, Salwal el-anfds, 11, p. 59; Ben Cheneb, Idjdza, §iL
(:2) el-Manjoùr cite encore parmi ses maitre , en s'étendant longuement
sur leur biographie:
a) ([01. 20 1'0), Aboù'l-tla an 'AU ben ~10~sà Ibn Hâroûn eV\1atgharî,
mort en 951 (1545), sur lequel cf. Ibn 'Askar, DawQ.al en-nâchir, p. 40 ;
Ibn el-Qàçll, Jadhwal el-iqtibâs, p. 302; Al).med Bàbà, Naïl el-iblihdj, p. 205;
el-Qàdirî, Nachr el-mulhdnî, l, p. 60; el-KaLlàni, Salwal el-anfds, II, p. 82;
Ben Cheneb, Idjdza, § 92;
b) (fol. 23 vO), le fameux 'Abd el-Wàl;tid ben Al).med el-Wancharîsî, as-
sassiné en 955 ( 1549) SUl' l'ordre du sulLa n ~10ulay Mal).ammed ech-Chaïkh.
Cf. Ibn 'Askar, DawIJ-at en-nâchir, p. 41; Al:rmed Bàbà, Naïl el-Iblihdj,
p. '168; el-IfrùnÎ, Nozhal el-hddî, éd . Houdas, p. 32 du te le et 61 de la
trad.; el-Kaltànî, Salwat el-anfds, Il, 146; Ben Ch eneb, Idjàza , § 252;
c) (foL 27 r O), 'Abd er-H.al).mân ben Mol).ammed Lbn Jbrù.hlm cd-Dokkâlî,
mort en 962 (l554), sur lequel cf. Ibn 'Askar, DawIJ-at en-nâchir, p. 44; Ibn
el-Qâçli, Jadhwal el -iqtibâs, p. 261; l,lmed Bùbù, Naïl el-iblihdj, p. '152;
Mol).ammed e l-'Arbi el-Fàs1, Mir'ât el-ma~~dsin, p. 9; el-Kaltùnî, Salwat el-
anJds, Il, p. L30; Ben Cheneb, Idjdza , § 251 ;
d) (fol. 28 VO), le cé lèbre juriste de Fè , 'Abd cl-Wahhùb beu Mol).ammed
ben' 11 cz Zaqqàq, mort fi 961 (1554), sur lequel cf. Ibn '.Askar, DawIJ-at
en-ndchil', p. 43; Ibn el-Qàçlî, Jadhwat el-iqlibâs, p. 276; Al).med Bàbâ,
Naïl el-iblihdj, p. '162; Mol).ammed el-'Arbi el-Fùs1, Mil"dt el-mal.ldsilt, p. 9 ;
el-Mol).ibbi, J(hold~al el-âthar, l, p. 246; el-Ifràni, Nozhat el-~1,âdî, éd. Hou-
das, p. 31 du têxte et 59 de la trad.; Ben Cheneb, Idjâza , § 29 ;
e) (fol. 31 vO), Aboù 'Amr 'Olhmùn ben 'Abd el-·Wàl).id el-L am~î, mort
en 954 (1545-1546), sur lequel cf. Ibn el-Qùçlî, Jadhwat el·iqlibds, p. 290 ;
Al;lmed Bùbà, NaLl el-ibtihdj, p. 182; el-Kaltànî, Salwat el-anfds, Ul, p. 65;
Ben Ch eneb, Ir.1ja za, § 101 ;
f) ([ol 32 1'0), ~lol:tammed ben Al).med ben Mijbar el-Massùd, mort en
~83 {1576-J577), SUl' lequel cf. Ibn el-Qàçlî, Jadhwat el-iqtibâs, p. 'l54; Al!-
med Bùbù, Naïl el-ibtihdj, p. 370; Mol;lammed el-'Arbi el-Fàsî, Mil"ât el-
ma~uisin, p. JO; el-l\.allàni, Salwal el-anj'ds, III, p. 128;
g) ([01. 31 1'0), ~lolfammcd ben 'AH Ibn 'Odda el-Andalosî, mort en 975
('1567- 11)68), SUl' lequel cf. Jbn cl-Qàçl.î, Jadhwat el-iqLibâs, p. 206; el-Kal-
lùnJ', Salwat el-anfds, lU, p. 282;
h) (fol. 35 1'0), 'Ali ben 'Isù cr-Hâchidi, morl en 961 ('1554), sur lequel cf.
Ibn cl- Qùçli, Jadhwal el-iqtibds, p. 311 ; cl-Kallânî, Salwat el-allfds, III,
p. 31 t; Bell Cheneb, Ir.1jdza, § 254 ;
90 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

EI-Manjotir était un honlme d'une rare érudition. Il pro-


clamait l'utilité. de toutes les sciences. Il ne dédaigna pas
de s'intéresser aux dictons populaires, s'occupa des dia-
lectes que l'on parlait en Andalousie et alla même jusqu'à
apprendre à jouer aux échecs et à se servir J'un luth. Il
passa toule sa vie soit à Fès, soit à Nlarrâkech, et forma des
élèves dont les principaux furent tous, par la suite, nantis
de charges de ([âçlî : ainsi, Aboû <Abd Allah l\Iol.tanlmed er-
Ragrâgi, qui fut qâçlî de Marrâkech, Ibrâhinl ech-Châwl, qui
fut qâçli de Tâmesnâ (Châwîyya actuelle) , Aboû'l-Qâsim ben
Mol.tarnmed Ibn Abi'n-No<aïm el·Ghassâni, qui fut qâçlî de
Fès, et l'historien Ibn el-Qâçli, qui fut qàçlî de Salé et de
Meknès (1). Le fameux biographe soudanais, Al;tmed Bâbâ~
qui suivit également ses cours, l'appelle « le dernier des
savants du Maghrib ». Mais son élève le plus glorieux fut
le sultan vainqueur de la chrétienté, Aboû'l- <Abbâs el-
lVIanl?oùr.
Cha<{ue année, el-:M anjoûr se rendait auprès du prince, en
sa capitale de Marrâkech, et expliquait en sa présence un
auteur musulman classique. Il rentrait ensuite à Fès, chargé
de riches présents. Mais le savant, qu'attristaient pourtant,
surtout sur la fin de ses jours, des préoccupations d'ordre
matériel, partageait les libéralités d'el-lVIanl?oûr entre les
pauvres et les infirmes. Il mourut à l'âge de soixante-dix
ans, à Fès, le 16 dhoû'l-qa<da 995 (19 octobre 1587), et fut
enterré en dehors de Bâb el-Fotoû}:l, auprès du tOlnbeall de
son maître el- Iassitni (2).
EI-lVIanjoûr délivra au sultan sa<dien une Tjâza « com-
plète et générale», dans la dernière décade de rajab 989
(21-30 août 1581.). EI-~1anl?oûL' avait demandé au pt'ofesseur
de lui accorder cette licence sur toutes les sciences qu'i~

i ) (fol. 36 1'0), le tunisie.n MoJ:lammed ben Abi'l-Façll Kharoùf, mort en


966 l1558-1559), sur lequel cf. Ibn el-Qàçlî, Jadhwal el-iqtibâs, p. 205; Mo-
l).ammed el-<Arbi el-Fàsî, Mir'dt el-maQ.dsin, p. 9; el-f altànî, Salwat el-an-
j'ds, ] Il, p. 281; Ben Cheneb, Idjâ za, § 20.
(1) Ces renseigneII1:ents sont donnés par AJ:lmed Bâbâ, Naïl el-ibtihdj,
Loc. cit. Ibn el-Qâçlî y est simplement appelé !\J:lmcd Ibn Abî'l-<Afîyya.
(2) el-KattânÎ, Salwal el-anj'ds, Loc. cil., d'aprè le Ma?maQ en-naq,ar.
LES HISTORIENS DE LA. DYNASTIE SAtDIENNE 91

avait lui-même étudiées, et d'écrire, en même temps à son


intention, une fahrasa de ses maîtres, spécifiant les dates
de leur naissance et de leue décès et indiquant leurs études
d'une façon détaillée.
Dans cet ouvrage, écrit ainsi SUl' l'ordre du sultan, el-
Manjoûr accumule de précieux l'enseignements sur le mou-
vement intellectuel du :M aroc à son époque; il Y présente,
en même temps, un Al)med el-Man!?oûr singulièrement
instruit pour un souverain marocain. EI-Manjoùr ne se
flatte pas seulenlent de lui avoir, en q'uelque sorte" servi
de précepteur, il va plus loin et fait du sultan lui-même
l'un de ses propres maitres. La fin de la fahrasa, qui lui est
spécialement consacrée, rappelle étrangement le protocole
des lettres patentes Je la dynastie satdienne : « Parmi ceux
dont j'ai tiré profi t, je nlentionnerai enfin ... le Prince vain-
queur par Dieu (el-:Mani?oûr billah), notre Maitre AI)med,
fils de l'Emir des Croyants fils de l'Emir des Croyants le
Chérif descendant d'el-f:lasan - Dieu lui donne la vic-
toire ! - Combien lui suis-je redevable de connaissances
historiques ou li ttérai l'es (1) ! ... »
La fah/'asa d'el-Manjoûr ne fait nullement état des grands
événements qui marquèrent l'ul'rivée au pouvoir et le règne
de son protecteur. Ce n'est qu'une précieuse collection Je
biographies de savants, écrite sur la demande d'un mécène
({ui se faisait gloire de protéger les ulénla de son époque (2).

(1) Fol. 42 de mon ms.


(2) El-Manjoùr n'a pas laissé d'ouvrage hi loriques proprement dil .
En plus de sa grande jah/'asa el d ' une aulre plu s petite, il écri'villes ou-
vrages suivanls :
a) Na?1n el-jard'ïd wa-mobdî' l-jawd''id li-ma1:L~al el-maqd$id, commenlaire
de l'orjoliz a d'[bn Zakrî sur la lhéologie ;
b) Hésumé de ce commenlaire ;
c) Glose SUL' le commentaire d'es-Sanoùsi sur son grand lraiLé de lhéo-
logie, écrite sur l'ordre du sultan el-~lall~oùr;
d) Pelite glose sur le même commentaire;
e) Commentaire du Na,?m laldqdl el-majdz de l'imàm Aboù'l-Façllibn e~­
~abbàgh el-Miknâ î;
f) Commentaire d 'e l-Manhaj el-monlalchab ilâ qawd'ïd el-madhhab d'ez-
Zaqqâq sur le droit ;
92 . LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Mais il allait de soi qU'Uri sultan à la fortune si brillante -


sa conquête du Soudan et le rachat des captifs portugais
fieent de lui le monarque le plus riche de son temps -
attendît de ses courtisans et de ses protégés des histoires
de son règne qui ne fussent pas indignes de lui. Nous en
avons conservé une, celle d'Ibn el-QâÇl.î; et nous savons,
par des historiens ou des biographes postérieurs, qu'il
désigna, parmi ses secrétaires, un historiographe officielle-
ment chargé d'établit', au joue le jour, les annales de son
empl~'e.

Le personnage à qui fut confié ce soin s'appelait Aboû


Mol).alhmed et Aboû Fâris "Abd el"-' Aziz ben :Mol,lammed ben
Ibl'âhîm e~-$anhâji el-Fichtâlî. Il naquit en 956 (1549). et
mourut en 1031 (1621-22) (1), probablement à Marrâkech,
bien que les recueils consacrés aux personnages luarquants
enterL'és dans cette ville n'en fassent pas mention.
Les rares biographes de 'Abd 01- 'Aziz el-Fichtâll s'ac-
cordent à reconnaitre qu'il fut, en Inêll1e temps que l'histo-
riographe d'el-Man~oûr, le « gt'and-vizir de la plume »,
c'est-à-dire le secrétaire d'Etat chargé de la correspondance
royale (2). A ce titre, il était également le poète officiel de

g) Résumé de ce commenlaire;
h ) Comm e nlaire du résumé du Manhaj iltiqdt ed-dorr;
il Commenlaire du poème de Qawd'ïd d'eL-Wancharî î;
j ) Aj wiba maj moû'a fî masd'i'l min el-jlq h wa-l-kaldm;
k ) Commenlaire de l'Alfîyya d 'Ibn Màlik, sur l'ordre d'el-Man~oûr;
l) Mardqî'l-majd fî dïdt es-sa'd.
(1) BiBLIOGRA.PHlE. -Ibn eI-QàÇlî, Dorrat el-f},ijdl, reproduit par el-Ifrànî,
Nozhal ~Htâdl, éd. Houdas, p. 161 du lexte el 267 de la lrad. sqq.; ibid.,
passim (à l'inde); el-\laqqari, Nap" eHîb, Qaire , 1302, III, p. 10 sqq.; el-
Khafàji, Raïf},dnal el-alibbd', p. 180; el-Qàdiri, Nachr el-malhânî, l, pp. 140-
142; en-Nà~irî, Isliq~d, lIL, p. 79 et passim (règne d'el-l\1an~oLLr) ; Akensoûs,
el-Jaïch el-'aramram, l, p.15\:1; MoJ::tammed cs-Sà'ïQ., el-Moniakhabâl el-'ab-
qarîyya, p. 33.
(2) Le litre arabe d'historiographe officiel est ~JJ..J' é-~..)~' Jy.,4 , et

celui de grand-vizir de la plume, Jc}!\ il.â:J\ J....JJ . Graulle, dans sa


LES IIISTORIE~S DE LA DYNAST lE SA t DIENNE 93

la cour. C'est lui qui, notamment) composa la plupart des


pièces de vers qui furent gravées sur marbre ou sur bois,
sur les façades et à l'intérieur d es pavillons du palais el-
Badr, à Marrâkech (1 ). On a conservé quelques-unes de
ces poésies, ainsi que d'autres qu'il composa sur tout à l'oc-
casion des fêtes de la Nativité du Prophète, célébrées en
grande pompe au palais d'el-Man$oûr (2 ). Ses biographes,
notamment son ami el-J1aqqarl, dans le Naf7.~ et-tîb (3),

traduction du Naehr el-malhânî d'el-Qâdiri, traduit faussemen l ce dernier


titre par « écrivain très distingué n. El-Qàdirî termine sa llolice sur el-
FichLàlî d'une façon assez curieuse (l, p. 142): « Louange à l'Unique par
la durée! C'est à lui que revient le royaume éternel que ne vieillissent ni
les ans ni les jours. 11 ne reste pas de ces rois (sa'diens) de traces con-
nues. De même, nous ne savons plu rien qui se rattache vraiment aux
Fichtùlîyîn (de la cour d'el-Man~oùr), car les gens qui portent le nom de
Fichlùla ont non'lbreux et forment une tribu du ~i[aroc bien connue! »
Cette tribu de Fichlâla qui habite à 70 kilomèLres au N.-O. de Fès, a, en
e{fel, complètement perdu le souvenir des grands personnages qui por-
tèrenl son eLhnique au XVle iècle. Il est vrai qu'il existe aussi des fractions
de FichLâla; dan le Dir, à l'est du Tàdlà.
(1 ) EI-Hrànî nous a conservé (Nozhal el-/:!,àdi,pp. 104=182 sqq. ) le texle
des qa.5îda qu'cl-Fichlâlî composa pour la décoration de la coupole dite
el-Khamsînîyya, au palais el-Bad!': ces poèmes sont au nombre de cinq
et comprennent respectivement 37, 20, 20, 12 et 8 vers. L'édition Houdas
de la Nozha; pp. 170 = 276, donne également le texte d'insultes en vers
échangées enlre el-Fichtâlî et le qâçiî de Marrâkech, Aboù'l-Qâ~im ben
'Ali ech-Châ~ibî (mètre motaqârib). Il sembJe, d'après el-Qâdiri, Naehr el-
malhànî, lo e. cil., que les poèmes d'el-Fichtâlî furent réunis en diwân: cc
biographe aurait trouvé, dans un recueil du poète, une pièce qu'il écrivit
à l'occasion de la prise d'A~îlâ (ville en fait abandonnée en 1589 par Phi-
lippe H).
(2) Sur les pièces dites moûloûdîyya, cf. Houdas, l'Islamisme, p. ,129.
L'hi Loriographe Si Mol:wmmed Ibn 'Ali ed-Dokkâlî a bien voulu me com-
muniquer .un recueil inédit de cinq moûloûdîyya récitées à la cour d'Al}.-
med edh-Dhahabî; l'une d'elles a précisément été écrite par 'Abd el-'Azîz
el-Fichlûli. Incipit (mèlre rajaz) :
0W;~ Cf ~~~ L,~ oJJ~
~~l~\ ~ Je
« Par Dieu, ô chamelier, fais pencher la litière pour que j'y monte,
« Car je suis sous la garde du Guide, Maître de 'Adnàn. ))
(3) Bien que Je célèbre Aboù'l-'Abbâs Al}.med ben Mol}.ammed el-Maq-
94 LES HOMMES Err LES ŒUVRES

recQnnaissent en lui le plus grand poète de son temps et


racontent que fe sultan mal'ocain serait allé jusqu'à dire:
« EI-Fichtâlî nous a rendu plus illustre que tous les autres
princes de la terre. On peut le conlparel' à Lisân ed-Din
Ibn el-Kha~il). » L'égyptien el-Khafâji proclame égaleluent
son talent de poète, dans la courte notice qu'il lui con-
sacre (1).
D'après son contemporain Ibn el-Qâçli, l'œuvre historique
d'el-Fichtâli se composerait de plusieurs trava~x dans les-

qarî (mort en 1041 = '1631-1632) soil d'origine 'maghribine (il naquit à


Tlemcen vers '1000 = HS91-1592) el qu'il ail vécu à Fès pendanl assez long-
temps, son œuvre historique et biographique, à peu près complètement
étrangère au 1aroc, n'entre pas dans le cadre de celle étude. Sur sa vie
et ses œuvres, cf. Mol}ammed ben Al).ll1ed 1ayyàra, ed-Dorr elh-lhamin
(commentaire d'el-Morchid el-mo'ïn d'Ibn 'Achir), le Qnire, '1306, p. 41 ; el-
IoûsÎ, el-lIIo~îdq,arât, p. 59; el-Khafàjî, Raï~l,dnat el-alibbd', p. 293; el- Ifrànî,
~a.rwat man intachar, p. 71; el-Qàdirî, Nachr el-malhdlll', l, p. '157; llliqdt
ed-dorar, fo '13 1'0; el-i\Iol) ibbî , J(hold~al el-dlhar, 1, p. 302; Wüstellf"ld,
Die Geschichtschreiber der Araber, p. 265 qq.; Dugat, oUce saI' Al Mak-
kari, en tète de l'édition de A nalecles; H. Bassel, oUce sommaire des ma-
nuscrits orienlaux de dellx bibliolhèques de Lisûonne, pp. 24-26; Recherches
bibliographiques sur les sOLl/'ces de la Saloual el-Anjas, p. 22, nO 53; Pons
Boigues, Ensayo bio-bibliograflco, p. 417; Brockelmann, Arab. lill., JI ,
p. 296; Bel, les Be/wu Ghcinya, p. X I X; Ben Cheneb, ldjd:a, § J 02; Il uart,
Lill. ar., p. 37,.; Carra d~ Vaux, les Penseurs de l'Islam, 1, p. 158, qq.
Le grand ouvrage d'el-~aqqari, NaflJ, et-tîb min gho~n el-andalos el'-ratib
wa-dhilîl' wazîrhci Lisân ed-lJL'n el-j{ha?îb, a été imprimé à Boûlàq en 1279
II. et au Qaire en 1302 et 1304 n. (4 vol.). La prem.ière parUe a été publiée
à Leyde de 1855 à 1861, sous le titre d' j-lnalecles sur l'histoire et la lilléra-
lure des Araûes d'Espagne, par Ll. Dozy, G. Dugat, L. Krelll ct ' V. ' Vrigill.
En '1840, Pascual de Gayangos avaiL publié, à Londres, sous le lilre de The
IIislory oj the 1I1ohammedan dynasties in Spain, une lraduction anglai e de
la partie du Naf!), eHib qui se rapporte à l'histoire politique de l'Espaglle
musulmane.
(l) De même, au dire d'el-Qùdiri, Nachl' el-malhdnî, loc. cil., el-'\Iaqqarî
lui aurait, dans son ouvrage Fat~l, el-mola'dl ft' madf), en-ni'dl (cité par
Brockelmann, Ar. litt., Il, 297, 4), décerné les louanges suivanles: « 11
fut le vainqueur des chevaux de course du Maghrib et le délenleur du ca-
lame de la supériorité (c'est-à-dire un écrivain excellent). Grâce à lui, les
gens de l'Occident ont surpassé ceux de l'Orient! » RappeloJls enfin llu'el-
Jfrâni, au début de la Nozha (éd.IJoudas,p. 6 =14), appeUe'Abdel-'Azizel-
Fichlàlî: '7' r l\ 0U , « la langue du Maghrib ».
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA (DIENNE 95

quels il aurait traité de la dynastie des Chorfa depuis ses


origines jusqu'au règne d'el-Manf?oùr. Mais on n'a conservé
que le titre d'un seul de ces ouvrages : malgré l'assel,tion
d'Ibn el-QâQ.i, il est peu probable qu'il en ait même
existé d'autres.
Cette histoire s'appelait JJlanâhil e$-$afâ' ft akhbâl' el-
moloû!c ech-clwl'ajâ'. Au dire des savants marocains actuels,
la perte en est, plus que tout autre, irréparable (1). Les
Manâ/til comprenaient, d'après el-Maqqari, huit vohlmes; ils
n'étaient pas tous perdus au temps d'el-Ifrâni, qui utilisa
l'ouvrage; un exemplaire dut n1ême en être conservé assez
longtem ps dans la bi bliothèq ue des princes (alawites, puisque,
dans son falclt, le chroniqueur Akensoüs rapporte que le sul-
tan Sidi l\t[oQ.alnmed ben 'Abd Allah, au printemps de l'année
1178 (1765), pendant un voyage à Aghmât, donna l'ordre à
l'un de ses secrétaires de lui lire un long passage de l'his-
toire d'el-FichtàU. Akensoùs, d'ailleurs, reproduit lui-mème
ce passage dans sa chronique (2).
Celle citation, ainsi que celles qu'el-Ifrâni a intercalées, à
plusieurs reprises, dans sa NO:::'/Ull el-{lâdt, pel'mettent, dans
une certaine mesure, de savoir ce que contenait l'ouvrage
perd u. Le ti tre 1ui-même ap pelle une constatation; il semble
qu'en le Jonnant à son histoire, el-Fichtâli ait voulu insister
sur le caractère chérifien de la no LI velle dynastie. Un pas-
sage des klanâhil, dont el-Ifrâni s'est inspiré (3), montre
aussi la préoccupation de l 'historien: si, à son a\'is, eJ-.:vtan-

(J) Les recherches que nous avons en lreprises pour relrouver cet ou-
vrage, à Fès el à ~larrâkech, onl élé vaines.'\1. H. de Caslrie le recherche
aussi depuis longlemps au Maroc.
(2) Akensoù , el-Jaïch el-'aratnratn, l. J, pp . H>9-'168 de l'éd . lith. de Fès.
Le sultan Mo1:tammed ben 'Abd Allah, alLallt en visite pieu se à Aghmâl,
se rappela qu'au cours d'une mème zidra etTecluée par son prédécesseur
el-Man~oùr, des poésies furenl improvi ées par les secrélaires de l'entou-
rage du sultan, au sujel du qri(li'l-qocjdl de Fès, el-~lomaj'dî; ce dernier
avait, pendant le voyage, reçu, en présenl d'un secrélaire, du miel el Ull
moulon glLls qui furc-nl la eau de ces plaisanleries rimées. L'incident
e l relalé plu succinclemeJll, d'après les Mandhil, par el-lfrânî, Nozhal
el-Ifâdt', éd. IIoudas, pp. 120-120 du texle et 204-209 de la lrad.
(3) No zhat el-(Lddi, éd. Boudas, p. 102 du lexle et 17U de la lrad.
96 LES HOMMES E'f LES ŒUVRES

~oûr fit construire le palais el-Badi' dans sa capitale de Mar-


râkech, ce fut dans le but de laisser, comme l 'avaient fait les
princes berbères qui l'avaient précédé r une trace du rable de
sa « dynastie chérifienne ». L'ouvrage se présentait donc,
tout d'abord, comme un panégyrique de la nouvelle fanlille
régnante qui remontait au Prophète. Ce fut, sans aucun
doute, le sultan sa<dien lui-même qui invita son historio-
graphe à insister sur sa qualité de chérif authentique, suc-
cédant, après ses prédécesseurs immédiats, à des princes
d'origine obscure.
Il ressort aussi des enlprunts faits par les historiens pos-
térieurs à l'ouvrage d'el-Fichtâli, que l'historiographe ne
s'enferma pas étroitement dans le cadre de son sujet. Il
trouva, dans la tâche qui lui était confiée, une occasion de
produire son talent de prosateur et, su l'tout, son habileté
de poète. Les Manâhil, si peu nombreux soient les fragments
que nous en connaissions, apparaissent C0111nle une antho-
logie poétique, ou plus exactement comme le propre dîwân
de l'auteur, dans lequel la matière historique servait, en
<Iuelque sorte, de trame de:;:;tinée à relier les unes aux autres
ses différentes qa$îda. Plus encore que les autres histoires
marocaines qui sont trop sou vent d es chrestomathies litté-
raires, le livre d'el-Fichtâli devait présenter ce caractère
d'ouvrage à double objet.
Non pas, d'ailleurs, qu'il faille conclure que les Afanâhil
e$-~çafâ' ne présentaient pas un grand intérêt historique.
Nous savons, au contraire, surtout par el-Ifrânî, que l'ou-
vrage renfermait un grand nOlTIbre de détails sur les lTIenUS
faits du règne d'el-Man~oûr, conlme sur les grands actes de
son gouvernement. Il était mênle rédigé sous forme d'an-
nales. au sens propre du mot. Les renseignements les plus
intéressants qu'on trouve dans la Nozhat el-l}âdî sur la vie
publique et privée du sultan el-Man~oûr, sont, à la lettl~e,
extraits d'el-Fichtâlî. Ainsi, ce qui touche à l'organisaLion
à la turque de la cour et des armées sa<diennes ; la relation
étendue des solennités du Moûloûd (nativité de Mo}:tamnlecl) ;
enfin, l'histoire de la construction du grand palais de Mar- ,
râkech, à propos de laquelle el-Fichtâl1 raconte que le
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA'DIENNE 97

marbre apporté exprès d'Italie fut payé, poids pour poids, en


sucre provenant des pressoirs de canne établis le long de la
côte atlantique du Maroc (1).
En plus des lJfanâhil, el-Fichtàli composa, sur l'invitation
de son maitre, un certain nombre d'ouvrages non historiques
dont il semble que la perte soit définitive aujourd'hui (2).
Elle est regrettable, moins pourtant que celle de son his-
toire : heureusement que, de cette dernière, el-Ifrânî devait
nous conserver, semble-t-il, l'essentiel.

'1- •

EI-Ifrânî, de même, nous apprend qu'un autre ouvrage,


sous el-Man!?oûr, fut consacré au règne de ce sultan par un
secrétaire de la cour, Aboû 'Abd Allah Mobammed ben .
'Isâ. La Nozhat el-?zâdt cite quatre vers de sa composition et
dit que son histoire portait le titre d'el-Mamdoûd wa'l-
maq$oûr min sanâ Abt'l-'Abbâs el- l1fanfioûr. Nous n'avons
pu nous procurer d'autres renseignements sur ce personnage
dont l'histoire dut être perdue de bonne heure, puisqu'elle
ne fut utilisée par aucun historien postérieur, pas même par
celui qui a révélé son existence (3). Il Y eut encore, dans
l'entourage d'Al).med el-Man!?oûr, un troisième secrétaire
historien qui portait le même ethnique que l'auteur des
Manâhil : Aboû 'Abd Allah Mo1)ammed ben 'Ali el-Fichtâli.
On sait de lui qu'il se rendit comme ambassadeur à Cons-
tantinople, avant l'année 1003 (159lt-95 ), avec le chaïkh 'Ali
et-Tamgroûtî et qu'il mourut en 1021 (1612-13) (4). Comme

(1) Cf. notamment el-lfrânî, No zhai eHlâdî, éd. Houdas, pp. 103 = 180
sqq., 115 = 195 sqq., 145 = 237 sqq.
(2) Ce sont: 1° un commentaire de la Maq~oûra d'el-Makkoûdî; 2° Madad
el-jaïch , ou commentaire ùu Jaïch et-iawchîl}- de Lisân ed-Dio Ibn el-Kha-
~îb; 3° Moqaddima li-tarlib diwân el-Molanabbî. Les incipit de ces deux
derniers ouvrages sont donnés dans le Montaqâ d'Jbn el-Qâçlî.
(3) el-lfrânî, Tozhat el-l).âdî, éd. IIoudas, p. 163 du texle el 270 de la trad.
(4) BIBLIOGRAPHIE. - Et-Tamgroùtî, en-Nafahat el-miskîyya (notice com-
muniquée parSi'VAbbâsbenlbrâhîm); Ibn el-Qâçlî, el-Montaqd 'l-maq~oûr ,
7
98 LES HOMMES ET J~ES ŒUVRES

son homonyme, il fut surtout un poète de talent, et son ou-


vrage historique, conlpté d'ailleurs parmi ses prodtilctions
poétiques, est un obituaire (wclfayât) y en vers rimant en
lrin?' (1). Dans cette qa$tda historique, l'auteur se propose,
comme il le dit dans son préambule, de compléter, d'une
part, les wafayât d'Ibn Qonfoûdh le Constantinois (2) ; d'autre
part, l'ouvrage du même genre composé pae son contempo-
rain lbn el-Qâçli (3). La liste des décès qu'il donne s'arrête à
l'an 1000 de l'hégire. Au rapport d'el-Qâdiri, le poènle de
Mol)ammed el-Fichtâli fut continué par la suite par Aboû
<Abd Allah el-:NIaklâtî (4), et un supplément au tout fut en-
core donné plus tard par el-Bâfi:? el-Fâsi (5 ).
Cet et-Tamgroûti, que :M ol)ummed ben 'Ali accompagna en
Turquie, a lui aussi laissé des détails intéressants sur la
dynastie sa'dienne. Il se nommait exactement Aboù'l-f:Iasan
~Ali ben Mol).ammed ben' \li ben NIo~ammed (6), et était

passim; el-I hafâjî, Raïf:tànai el-alibbâ', p. 151 sqq. ; el-Jfrànî, Noz hat el-
J:tddî l éd.lloudas, pp. 168= 272etpassim (à l'index);el-Qàdirî, Nachr el-
matnànî, l, pp. 113-114 et J, p. 31 (dans la biographie d 'et-Tamgroûti);
Mol:tammed cs-Sà'ïJ:t, el-Monlakhabàt el-'abqarîyya, p. 31.
(1) La bibliothèque de Rabat possède une copie des lYafayàt d'el-Fi ch-
tâlî (nO 537, XI).
(2) Aboû'l-'Abbâs Al)med ben J;Iasan ben 'Ali Ibn el-} hatib el-Qosan-
pni, connu sou le nom d'Ibn Qonfoùdh, mort en 810 (1407-1408), sur le-
quel cf. Lbn el-Qà<;li, Jadhwat el-iqlibàs, p. 79; Al).med Bàbà, Naïl el-iblihàj,
p. 57; el-Qàdirî, Nachr el-malhânf, l, p. 4; Cherbonncau, la Farésiade, in
Journalal5iatique, août-septemhre -1852; B:rockelmann, Arab. lilt., lI, p. 24<1;
R. Basset, Rech. bibliog., p. 12, nO 20; Huart, Litt. ar., p. 343. La liste com-
plète des œuvres d'Ibn Qonfoûdh est donnée par Ibn Mariam, el-Bosldn,
pp. 308-309.
(3) Laqt el-farâ'ïd.
(4) Aboû 'Abd Allah Mo"Q.ammed ben AJ:tmed el-Maklàtî, élève de 'Abd
,er-Ral).màn el-Fàsî, mourut en 1041 (163 1-1632). Cf. el-Qàdirî, Nachr el-
mathânî, l, p. 160.
(5) Ce personnage., qui s'appelait exacLemel1t~ Aboù'l-'Abbùs Al).med
ben Abi'l-Mal).âsin Ioûsof el-Fihrî el-Fàsî, fut un lraditionnisle de valeur
et mourut en 1021 (1612), cf. infra, lU, Les Biographes (Les premiers
Fâsiyîn).
(6) BIBLIOGRAPHIE. - El-Ifrânî, $afwat man intachar, p. 106; el-Qâdiri,
Nachr el-mathânî, l, p. 31, exactement reproduit par. Ibn el-Mowaqqit, es-
Sa'âdat el-abadîyya, l, pp. 90-91 ; Iltiqât ed-dorar, fol. 2 VO.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE S:A. 'DIENNE 99

orïginaire de Tamgroût (1). Il deva~t occuper une fonction


offi'cielle à la cour de Marrâkech, puisqu'il fut cliargé par
AbouT 'Abbâs el-M'a n$oûr de diriger l'ambassade que celui-
ci envoya au sultan de Constantinople (2). Il composa à cette
occasion une rib'za, ou relation de voyage, qu'il intitula en-
NafaZzat el-misldyya ft's-sifârat et-torkîyya. Il mourut à
Marrâkech en 1003 (1594-95) et fut enterré dans le sanctuaire
du q âçll 'lyyâ<.L
L'ouvrage d'et-Tamgroûtî est encore l'une des sources
dont s?est inspir.é el~Ifrâni pOUi' composer sa relation du
règne d'el-Man$oûr (3). Suivant l'usage des· auteurs de ri~~la,
l'ambassadeur dut donner une description détaillée de son
point de départ, la cour de ~larrâkeGh, et son livre, à ce
titre, doit offrir un nombre important de données histo-
riques. D'ailleurs, ce que l'auteur de la Nozha a tiré de ce
récit d'an1bassade (expédition de Mourâd III. contre Tunis,
des.cniption du pavillon de voyage d'el~:Man$oûr et des fêtes
de la Nativité à la cour de M~arrâkech) , pemnet de bien pré-
juger du reste de l'ouvrage, qui sera bientôt publié (4) .
EI-Ifrâni, enfin, dans son chapit~e sur. les forces militaires
d'el-Man$oùr., parle d ' un autre auteur de ri~1la qui lui a servi
·d e sour.ce, et dut être ainsi, da manière indirecte, un autre

(1) Sur la célèbre zâwîyya de ce centre, qui est la maison-mère de la


confrérie marocaine de à .lrîyya, cf. de Foucauld, Reconnaissance au
Maroc, p. 293; de Segon-zac, Au cœur de l'Atlas, p. 89 sqq. ; M. Bodin, la
Zaouia de Tamegrout, in Archives berbères, année 1918, d'aprèsAl,lmedben
Khâlid en-Nâ~irî es-Salâwî, Tal'at el-mochtarî fi'n-nasab el-ja'farî, 2 vol.,
Fès, 1309 H.
(2) Il ne doit vrai emblablement pas s'agir de l'ambassade,envoyée au sul-
tan Mourâd'lIl par el-Man~oûr, que relate el-Ifrânî dans son chapitre XXXI,
pp.85=1!:)l qq., puisqp'à la lête de cette ambassadesetrouvaientle qâ'îd
'AH ben Wadtla el-Ghamr.î et le secrétaire Aboû'l-'Abbàs A};lmed ben 'Ali
el-I:Ia wzâlî.
(3) Remarquon'S, à ce propos, qu'el-Ifrânî, qui a fait, dans la Nozhat el-
f)âdî, quatre emprunts à l'ouvrage d'et-Tamgroûtî, ne mentionne pas une
seule fois le nom de l'ambassadeur.
(4) M. If. de Castries, q.ui possède un manuscrit de la Nafal:ta, est. sur le
point d'en Rublier une reproduction par la photogravure, ainsi qu'une
traduclion annotée. Il est donc inutile de nou attarder ici sur cet ouvrage,
qu'au surplus nous n'avons pu nous procurer.
100 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

historien de la dynastie sa<dienne : Aboû'l- <Abbâs Al).med


Afogâï, qui écrivit un itinéraire de pèlerinage, sous le titre
de Rif).lat ech-chihâb ilâ liqâ' el-aZzbâb. Nous n'avons pu
trouver aucun renseignement sur ce personnage (1 ).

Si l'œuvre de l'historiogl'aphe <Abd el- <Azîz el-Fichtâli,


écrite SUl' l'ordre d' el-Man~oûr, reste introuvable, on a,
d'autre part, la chance J'avoir conservé une seconde his-
toire de ce même prince, écrite par l'un de -ses courtisans
les plus familiers: Ibn el-QâÇli.
Chihâb ed-Din Aboû'l- <Abbâs Al).med ben Mol.lanlmed ben
:Mol)ammed ben A4med ben <Ali ben <Abd er-Ra4mân ben
Abi'l- <Aflyyael-Miknâsî ez-Zanâti, connu sous le nom d'Ibn el-
Qâçlî, naquit en 960 (18 décembre 1552 - 6 décembre 1553) (2).
La branche des Ibn el-QâÇlî appartenait à la grande
famille des Zanâla, dont de nombreux descendants étaient
établis à Fès et à :Meknès. Elle avait compté parmi les
siens des personnages de marque, qui, durant les siècles
précédents, avaient détenu de hautes charges politiques ou
religieuses et s'étaient rendus célèbres comme doc leurs

(t) Cf. el-Ifrànî, Nozhat el-l),àdî, éd. Houda ,p. 1'18 du texte et 200 de la
trad. En-Nâ~irî, qui rapporte le passage, Istiq~à', III, p. 84, donne les va-
riantes Afoghàï pour Afoqàï et Ri~dat ech-chabàb pour Rif:tlat ech-chihàb.
(2 ) BlBLIOGRAPIIlE. - En plus des renseignements autobiographiques con-
tenus dans les œuvres d'Ibn el-Qàçlî, cf. el·Hrânî, $afwat man intachar,
p. 77 ; el-Qâdirî, Tachr el-malhànî, l, p. 128; lltiqàt ed-dorar, fol. 8 yO; el-
J:Iawwàt, el-Bodoûr ecj.,-cj.,àwi'yya (ms. 394 de Rabat), fol. 29 vo-30 1'0 ; el-
KaLtânî, Salwal el-anfàs, Ill, p. 133 ; el-Foçlaïli , ed-Dorar el-bahîyya, II,
p. 3:)2 ; Mo!:tammed cs-Sâ'i!:t, el-Afonlakhabâl el-<abqarîyya, p. 28 ; Pon
Boigues, Ensayo bio-bibliografico, p. 417 ; R. Basset, Rech. bibl., p. 21,
n° 49; Codera, ap. Bolelin de la Real Academia de la Historia, Madrid, XXII,
1893, p. 291 sqq. (Un escritor marroqui del siglo XVlI importante para nues-
tra historia); ' XIX, 1896, p. 182 sqq. (Autografo del historiador Aben
Alcadi en la Academia de la Historia ) ; le même, in Actes du XIve Con-
grès des Orientalistes , HI, pp. 581-582 (Considerable numero de libros anti-
guos y 111:odernos exislenles en Marruecos ) ; Ben Chene'!>, Idjâ za, § 307 ;
Huart, Lill. ar., p. 383.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA'DIENNE 101

d'Islàm. Les Ibn el-Qâçli prétendaient même descendre de


l'émir Moûsà ben Abi'l-'Aflyya (l), qui avait, aux C siècle, con-
quis le "M aroc au nom des Fâ~imites, proclamé ensuite son
indépendance et combattu les derniers princes idrisites (2).
Pour ne pas déroger à la tradition familiale, AIJ.med Ibn
el-Qâçlî se livra à l'étuùe pendant fort .longtemps, soit à
Marrâkech, soit à Fès. Dans cette dernière ville, il fut l'élève
de son père, du savant Aboù'l-'Abbâs el-Manjoùr (3), d'el-
Qa~~âr (4) et de la' qo ûb el- ladl'i (5) . Il eut également
comme maîtres le mufti de Nlarrâkech . Abd el-Wâbid es-
Sijilmâsi (6), lal)i â es-Sa['râj (7), Ibn J allâl (8) , ~lolJ.ammed

('1) Sur ce pel' onnage, cf. Ibn Abi Zar', flawq, el-qir!ds, éd. Tornberg,
p. 50 sqq.; Ibn Kha1doLLn, Kilâb el-'ibar, /Iisloire des Berbères, l, p. L11
qq. ; Ibn el-Qàçlî, Jadhwat el-iqlibds, pp. 227-229.
(2) Ibn el-Qàçli dit, à cc propos, dall la biographie de ~Ioùsa ben Abi'l-
'Afîyya (Jadhwa, Loc. cit.): « l ous fai on remonter nolre ascendance à
ce personnage, mais Dieu sail la vérité! En lout cas, je désapprouve for-
mellement la façon dont il a agi à l'égard des descendanls du Prophète
(le Idrîs ile ), car j'en prends Dieu ct ses anges à témoin, je suis l'esclave
des descendants du Prophète cl leur ami ... » Ce passage a élé visiblement
écril pour flatter les Chorfa, spécialement les Chorfa Sa'diens. L'authen-
ticité de la généalogie d'Ibn el-·Qâçli a élé conteslée par certains au leurs
au rapport d'el-Kaltànî, loe. cit.
(3) Cf. supra, p. 8H sqq.
(4) Aboù 'Abd Allah MoJ::tammed ben Qàsim el-Qa~~ùr , mort en 1012
(1604), sur lequel cf. Mol).ammed el-'Arbî e I-Fà i, jIir'dl el-ma ~l,(isin, p.148;
el-lfrànÎ, Nozhat el-fyidî, éd. Iloudas, p. 192 du texle et 312 de la trad.; $af-
wat man intnchar, p. 16; cl-Qàdiri, Nachr el-mathdnî, l, p. 62; el-l\'IoQibbî,
Khold~al el-dthar, IV, p. 121; el-Kallânî, Salwat el-anfds, lI, p. 62; Ibn el-
Mowaqqil, es-Sa'ddat el-abadîyya, l , p. 89; Ben Cheneb, Idjdza , :) 19.
(5) Aboù Râchid la'qoùb ben Ial:tià cl-Iadrî, mort en 999 (1591) sur lequel
cf. Ibn el-Qàçlî, Jadhwat el-iqlibds, p. 301; A}:tmed Uàbâ, Nad el-iblihâj,
p. 383; el-KaUânî, Salwat el-an lds, 111, p. 318; Ben Cheneb, Idjdza, § 294.
(6) AbolL i\fo}:tammed 'Abd el-Wàl)id ben Al}mcd ccli-Charif es-Sijilmâ i,
mort en 1003 (1595 ), SUL' lequel cf. la notice spéciale qui lui sera consa-
crée, infra, III, les Biographes (Biographes du Xi e siècle de l'Hégire).
(1) Aboù Zakariyà' lal:ti à ben Mo}:tammed e -Sarràj, dit el-A~gh ar (pour
le di linguer de son grand-père Ial).iâ es-Sarrâj cl-Akbar), mort en 1007
(1598), sur lequel cf. eL-IfrànÎ, $a.fwat man inlaehar, p. 29; el-Qàdirî, Nachr
el-mathdnî, I, p. 50; el-I altânl, Salwat el-anfâs, Il, p. 51; Ben Cheneb,
ldjdza, § 24·8.
(8) Aboù 'Abd Allah 10}:tammed ben 'Abd er-RaQmân Ibn Jallàl, mort
102 'L ES HOMMES ET LES ŒC'VRES

ben Al;1mecl ben Mijbar el-Massârl (1) et le j uri-sco.nsulte bio-


gra.phe sDudanais Al).ll1ed Bâbâ. Enfin, il suivit les cours du
chaïl-h Aboù'l-Maçâsin Ioùsof el-Fâ·sj. Des ijâza lui Jurent
délivrées par la plupart de tous ces maitres, principalement
par el-Manjoùr, Hui lui en accorda deux (2). li se fit r.apide-
ment remarquer .par sa culture étendue et aaquit même
quelque renommée en matière d'arithmétique et de partage
des successions, sciences dans lesquelles il «.nageait comme
un poisson dans l'eau» (3) ou « volait comme un faLlcon
dans le ciel » (4).
Désireux 'd'acquérir encore d'autres connaissanües, Ibn ·el-
Qâçli profita de la pieuse obligation du pèlerinage pour
faire un séjour prolongé en Orient. C'est ainsi qu'il assista
aux cours d'IbrAhim el- Alqamî (5), de Sâlim es-Sanhaûri (6) ,
<

de Ioùsof ben Fajla ez-Zorqânl, de Ia1!iâ el-l;IaHâb (7 )' et de


Badr ed-DJ'n el-Qarâfi (8).

en 981 (1574), sur lequel cf. Ibn <Askar, Daw~Lat en-nâchir, p. 90; Ibn el-
QâÇli, Jadhwat el-iqtibâs, p. 206; Al,lmed Bàbâ, Naïl el-ibtihâj, p. 371, re-
produit par Ibn .\fariam, el-Bostân, p. '260; el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, l,
p. 93; el-KaLtâni, Salwal el-anfâs, II, p. 26 ; Ben Cheneb, Idjâza, § 22.
(1 ) Cr. supra, p. 89, note 1, f).
(2) el-Monlaqâ'l-maq~oûr, fol. 14 de mon m . Il devait perdre, dit-il,
ces deux diplômes, quand il fut emmené en captivité par les Chrétiens.
Dans la première ijâza, il était ass.ocié à Aboû <Abd Allah Mol:).ammed ben
<Ali el-Hawzânî. .
(3) el-lfrânî, $afwat man intachar, loc. cit ., d'aprè Al,lmed Bâbâ.
(4) I-KattânÎ, Salwat el-anfâs, loc.. cit.
(5) Sur ce profe eur du Qaire, cf. el-E hafé\ji, Raïl),ânat el-alibbâ', p. 255;
Ben Cheneb, Idjâza, § 31.8.
(6) Aboû'n- ajâ' Sâlim ben Mol,lammed es-Sanhoûrî,.mort en 1016 (1607).
Cf. Al:).med Bâbà, Naïl el-ibtihâj, p. 107; el-Ifrânî, $afwat man intachar,
p. 60; el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, J, p. 100; el- 10l:).ibbî, Kholâ~at el-âthar,
Ir, .p. 204 ; Brockelmann, Arab. litt., II, p. 305; Ben Cheneb, Idjâza, § 304.
(7) Aboû Zakarîyà' Ial:).iâ ben Mo1).ammed el-r:lanâb, mort en Rabî' 1995-
(9 février-iO mars 1587). Cf. Al:).med Bâbâ, Naïl el-ibtih~j, p. 394; llrQckel-
mann, Arab. lilt., II, p. 393; Ben Cheneb, Idjâza, § 82. (La date de décès
est fournie par Ibn el-Qâçlî, el-Montaqâ, fol. 94 de mon ms.)
(8) Mol:).ammedhen Ial).iâ Badr ed-Din el-Qarâfi, mort en 1008 (1'600). cr.
Al:).med Bâbâ, Naïl el-ibtihâj, p. 3:73; el-KhafàjL, Raïf),ânat el-alibbâ', p. 266 ~
el-Mo1;libbî, Kholâ~at el-âthar, IV, p. 258; el-Qâdirî, Nachr el-malhânî, J ~
p. 56; Brockelmann, ,1rab. litt., II, p. 3i6; Ben Cheneb, ldjâza, § 26.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE .sA 'DIENNE 103-

Il était rentré en Afrique au moment de la bataille du


Wâdî'l-Makhâzin. Il se trouvait alors dans le Fez.zân, à un en-
droit appelé el-Makhâtin : c'est là qu'il apprit, le 15 cha ' bin 986
(17 .(}~tobre 1578) , la victoire remportée contre les infidèles
et la proclamation du sultan Al;1med el-Man~'oût' (1). Il fut
bientôt recommandé au monarque par son maître Ia~iâ el-·
f:lattâb. En l'année 994 (t585-1586), il devait faire partie de
son entourage, puisqu 'il lui demanda et obtint la permission
de se rendre à nouveau au Qaire, à la recherche de la
« noble science ».
Au lieu de gagner l'Égypte par voie de terre, comme il
l'avait déjà fait lors de son pèlerinage, il se mit en route par
mer; mais le navire qui le conduisait en Orient fut attaqué
par des corsaires chrétiens, le jeudi 14 cha'bân de la même
année (31 juillet 1586). Ibn el-QâQ.l f.ut emmené en captivité
dans un endroit qu'il ne nomme pas. C'est alors que com-
mença sa « torture » (mi1:tna ), dont le souvenir revient sou-
.vent dans ses écrits. Il avait emporté des liasses de pré-
!Cieuses notes, qui furent détruites. Il fut maltraité et frappé,
et souffrit de la faim et du froid. Dès qu'il le put, il envoya à
el-Man~oûr une pièce de dix-sept vers, dont on a conservé
le texte et dans laquelle il suppliait son royal protecteur de
le racheter et de « sauver de la mort le captif traînant son
houlet ». :M ais cette supplique n'était pas encore parvenue
au sultan, que celui-ci, ayant appris d'une. autre source la
mésaventure d'Ibn el-Qâçlî, avait ordonné aux gouverneu ,'8
d ,e ses villes maritimes de faire rechercher l'endroit où il
était interné. Une fois renseigné, il négocia son rachat et
finit par l'obtenir au prix de vingt mille onces. Ibn el-Qâçlî
fut libéré le 17 raj ab 995 (23 juin 1587), après llne captivité
de près de onze mois. Il raconte que les Chrétiens firent des
difficultés pour le relâcher, cal' ils savaient qu'il était l'un
<les uléma les plu.s en vue du monde musulman. Mais le
souverain négocia jusqu'à sa libération et serait allé, s'il
l'avait fallu, jusqu'à payer le double de la somme qu'il versa.

(t) el-Monlaqâ'l-maq$oûr, fol. 3 de mon ms. La bataille a'Vait eu lieu le


4 août t578 (dernier jour de jomâdâ 1 986 ).
104 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Ibn el-QâçIi arriva à l\larrâkech le 8 cha<bân 995 (14 juillet


1587) (1) et récita, le même jour, au sultan, pour le remer-
cier, une longue pièce de vers à sa louange (2).
A partir de cette époque, le lettré séjourna à lVlarrâkech
auprès du sultan sa'dien, sans toutefois faire partie de son
makhzen. A une date indéternlinée, il fut nommé qâçIi de
Salé (3) et resta dans cette ville un certain temps. Puis, il fut
révoqué. Alor~, il se fixa à Fès et se consacra à l'enseigne-
ment. Il y expliquait, pendant les dernières années de sa vie,
1

le $al:tî!z d el-Bok'hâri à la mosquée d'el-'Abbârin (4) et déli-


vrait de nombreuses Uâza. Ses biographes citent, parmi les
disci pIes qui suiviren t ses cours à Fès, Aboù'l-' Abbâs
A~med ben Ioûsof el-Fâsi (5) et el-Mag qarî, l'auteur du
Naf!z e!-!lb (6).
C'est aussi vers la fin de sa vie qu'lbn el-QâçIi entreprit un
voyage à la zâwiyya d'ed-Dilâ', à laquelle Aboù Bakr ed-
Dilâ'I commençai t à donner tout Son éclat. .Il resta un
certain temps dans ce monastère et y fut le maître des
enfants du chalkh. Il s'occupa plus sp'écialement de l'un
d'eux, Mabammed ben Abi Bakr. Quand il quitta la zâwiyya,
Ibn el-QâçIi rentra à Fès, où son élève lui envoyait réguliè-
rement dps cadeaux. C'est dans cette ville qu'il mourut, en
~afar 1025 (19 février - 18 lnars 1616) , d'après el-13odoûl' efj-
fjâwîyya, le 6 cha'bân de la même année (19 aoùt 1616),
d'après la Salwat el-anfâs. La prière fut dite SUL' Son
cadavre par son ancien élève Ab.mcd el-Maqqad, qui était
alors imâm à la mosquée d'el-Qarawiyin. Il fut enterré en

(1) La rapidité avec laquelle Ibn el-Qàçli rejoignit Marràkech peut


laisser croire qu'il fut sim plemellt emmene en captivité sur un point du
littoral de la péninsule ibérique,
(2) el-Montaqd'l-maq~oûr, fol. 25 de mon ms.
(3) Peut-êlre même de Meknès, si l'on en croit le renseignement d'Al:t-
meel Bâbâ rapporté plus haut, p. 90.
(4) Cet oratoire se trouve à Fès, au centre de la Ville-Vieille, à proxi-
mité de la mosquée-calhédrale d'el-Qarawiyin, etdans le voisinage immé-
dial de la médersa dite d·el-<A~tàrin.
(5) Cf. supra, p. 98, note 5,
(6) Cf. supra, p, 93, note 3.
LES HISTORIENS DE l,A DYNASTIE SA' DIENNE 105

dehors de Bâb el-Glsa (1 ), auprès du mausolée de Mal)ammed


ben el-Basan (~).

Les œuvres d'Ibn el-Qâçlî, dont on a conservé les titres,


sont au nombre de quatorze. Quatre, parmi elles, sont du
domaine de la littéeatnre biographique et seront examinées
dans le chapitre consacré aux biographes. Trois autres sont
des œuvres d'histoire proprement dite, le Montaqâ, la Do/'-
rat es-soloûk et son commentaire (3).
SeuL d'ailleuL's, le premier de ces trois ouvrages a exclu-
sivement tl'ait à la dynastie sa'dienne, plus exactement
même au sultan Al)med edh-Dhahabi. Son autéur, qui l'inti-
tula el-llJontaqâ 'l-maq$oûr 'aLâ ma'âtlzir khilâfat el-Alan-
$OÛI' (4) , apprend lui-mênle qu'il l'écrivit dans le but de l'of·
frir au souverain marocain. « Allah le Généreux, dit-il au
début de son livre, ayant gratifié les croyants, ses créa·
tures, d'un peinee qui règne sur les cœurs, dont la gloire
s'envole de l'Orient à l'Occident, gràce à ses innombpables
qualités et à son caractèl'e d'une inépuisable bienveil-
lance ... , il m'a paru nécessaire de répandre son éloge et

('1 ) Porte située à Fès, dans la partie seplenlrionale de la Ville-Vieille.


Bàb el-Gisa est une prononcialion locale défeclueuse pour Bùb 'Ajisa, du
nom de l'un des fils de l\~mir maghràwÎ Doûnàs (mort en chawwà1452 =
29 oclobre-26 novembre 1060). Son frère, el-Foloùl~, fil bàlir la porle mé-
ridionale de la Villc- ieille qui porle encore son nom. Cf. Jbn Abi Zat'"
Rawq, el-qirtds, éd. Tornberg, p. 70.
(2) Chérif idrî He originaire de ijilmàsa el l'inl révéré de Fès, mort
en 595 (1.198-1199). Son nom se prononce dans la langue courante MJ:tam-
med ben Lal.lsen. Cf. Ibn el-Qàçli, Jadhwat et-iqtibds , p. UO; el-Kaltàni,
Salwat el-anfâs, III, p. 126; ~lichau -Bellaire, Description de la ville de
Pâs, in Arch. mar., X.I, p. 269; Gaillard, Une ville de l'Islam: Fès, p. 135.
(3) oici le Litres de es autres ouvrage : 1 el-Pall), en-nabil bi-mâ la-
0

q,ammanaho min asmâ' el-'adad et-lanztl; 2° Ghonial er-râ'ïq, fi tabaqât ahl


eHlisâb wa-l-farâ 'ïq, ; 3° el-Madkhal fl'l-hindasa; 4° Nafm lall,ht'~ Ibn el-
Bannâ'; 5° Naïl el-amalfi-mâ ûihi baïna'l-Mâlikiyyalijard'l-'amal; 6 Taqyîd
0

'ald jadâwil el-~Iawrî; 7 NO:f-m m,antiq es-Sa'd.


0

(4) Varianle d'après la Salwat el-anlds, Loc. cit. : 'alâ mal),âsin el-khalifat
Abî' l-'Abbds el-Man~oûr.
106 LES UO~Il\tES ET LES ŒUVRES

d'immortalis.e r son ouvenir et son nom (1) . D'autant (plus,


ajoute-t-il, qu'il me délivra de la captivité et m'accorda une
pension à partir du jour de ma libération. » On voit, dès la ,
première page, qu'il s'agit là de l'hommage d'un historien
officieux; pour rp,mercier le prince qui l'a racheté de l'es-
clavage, il va chantee sa louange dans tout un livre et pro-
clamer, un par un, ses mérites. La liste des chapitres dont
.se compose le l~lontaqâ est, à cet égard, curieuse: elle dé-'
note bien, à elle seule, le caractère de l'ouvrage tout entier.
Comme il convient. l'introduction rappelle la généalogie
d'el-l\Ian~oûr, la noblesse de sa falnille et sa noblesse per-
sonnelle. Puis viennent dix-huit chapitres: ils ne forment
pas, comme on pourrait s'y attendre, une histoire du Maroc
au milieu de l'époque sa 'dienne, mais, au contraire, une
série de développelnellts sur chacune des qualités person-
nelles du souverain. C'est ainsi qu'Ibn el-QâÇli s'occupe
successivement de la beauté physique et morale d'el-Man-
!?oùr, de la façon dont il s'iInposait l'exéculion des obliga-
tions religieuses, de son intégrité vis-à-vis de ses suj ets,
de la manière grandiose dont il faisait célébrer la fête de
la Nativité du Prophète, de sa piété, des égards qu'il témoi-
gnait aux gens de science, de sa clémence et de sa géné-
rosité, de sa patience, de sa modération, de sa piété filiale,
des connaissances qu 'il avait acquises.
Le Montaqâ n'est donc pas un livre d'histoire suivie; il
ne constitue pas, pourtant, une source historique dénuée
d'intérêt. Il y a dans cet ouvrage, malgré la forme caracté-
ristique que l'auteur lui a donnée, à tirer un assez grand
nombre d'informations de première main. Surtout, dans le
début, où Ibn el-Qâ<Jî semble avoir voulu condenser en
quelques pages les renseignements que nous souhaitons le
plus qu'il nous donne. A propos de la généalogie des
Sa'diens, sur laquelle, .dit-il, il ne veut pas s'étendre, car
eUe est connue de tous les .historiens, il émet 'Un doute au
sujet de la filiation de l'un des personnages' de "la ëhaÎne
d'ascendance~ doute qu'el-lfrânî devait, plus tard, relever

(1) el-Montaqâ'l-maq~oûr, fol. 2 de mon ms.


J,ES HISTORIENS DE LA DYNASTIE BiA:DlENNE 107

dans sa No.zhat el)'Lâdî. Puis il nous apprend que le sultan


Aboû'l- 'Abbâs el-Man~oûr naq uit à Fès en l'année 956 (1549)
et fut proclamé après la bataille du Wâdi'l-lVIakhâzin, lIe
lundi dernier jour de jomâdâ 986 (4 août 1578). Il donne, à
cette occasion, un court récit de la bataille elle-même, qu'il
compare à la victoire de Badr. D'après lui, l'Armée chré-
tienne se composait de cent vingt-cinq mille hommes, dont
vingt-cinq mille restèrent sur les bateaux; le re·s te fut tué
ou fait prisonnier dans l'espace de « trois heures quarante
minutes », ou de « quatre heures vingt rflinutes », selan
d 'autres. Cette victoire de guerre sainte est, aux yeux d'Ibn
el-Qàçli, le plus grand titre de gloire de la dynastie sa'dienne
jusqu'à son époque (1). Il rappelle brièvement, ensuite, que
les armées d'el-lVIan~oClr s'emparèrent, dans les années qui
suivirent, du Soudan, du ToCtât et du Tigoùrârln (GoÛrâl'a).
Malheureusement, après les premières pages de son
livre, Ibn el-Qâçli espace de plus en plus les renseigne-
ments historiques, qu'il noie dans un flot de considérations

(1) Il ne faut pas faire aux historiens arabes marocains le reproche de


s'étendre longuement sur celle célèbre bataille et de lui donn er l'extrême
importance qu'elle a eue réellement. Je ne suis pas de l'avis de ~1. Cour,
qui déclare, dans son Établissement des dynaiilies des Chérifs au Maroc,
p. 145, qu' « en reuillé, elle n'eut d'importance que pour le Portugal dont
la famille royale y ombra et pour la maison d'Espagne qui domina par
la suite pour quelques années le pays portugais. Au Maroc , cette bataille
fit simplement passer le pouvoir royal de mains d'un sultan à celles de
onsucct>s eut' naturel, elle n'eut absolument aucune influer.ce directe
sur les relations des Turcs et des Marocain n. On a la preuve aujourd'hui
que , plus encore que la conquête du Soudan, le rachat de la noblesse pOl'-
tugaise faite prisonnière au cour de cette bataille valut au suUan Aboù'l-
'Abbâs el-Man~oùr une richesse extrême (delà sonsurnomd'edh~Dhahabî,
« l'aurique )}l. Toutes les puissances européennes à court d'argen t ten-
tèrent de négocier des emprunts au Maroc. L'empire de Chorfa pratiqua
mème à cette époque une polilique d'alliance , et peu s'en fallut - E Uf-
tout si 'Abd el-)falik n'avait 1)a8 succombé - qu'il n'entrât dans le concert
européen, comme l'empire ottoman. Sur les relations du Maroc avec la
Sublime-Porle, la victoire d'el-Qa~r ne fut pa sans influence, et Moulay
Al).med el-l\1an~oùr, devenu monarque puissant et respecté, ne se crut
plus obligé d'envoyer régulièœment au « Grand Seigneur» Mourad III,
un tribut de vassalité. Cf. pécialement, de Castries, Sources inédiles ,
pc série, France, ] l, document LxxvIi , p. 188 et la nole 7 de la })age 189.
108 LES nOMMES ET LES ŒUVRES

morales sur le sultan. Il faut une lecturp- attentive pour les


en dégagel'. C'est ainsi qu 'au nlilieu du Montaqâ (1) , l'his-
torien note qu'el-Man!:,oùr réorganisa la flotte marocaine.
dota les ports de son empire d'ouvrages fortifiés et fit
bàtir à Fès les deux bastions appelés aujourd'hui Borj
Nord et Borj Sud (2) . Il est curieux de voir combien ce
geste, pourt.ant si significatif, reste incompris de l'histo-
rien: il ne voit pas que, pOUf' surveiller la turbulente capi-
tale du Nord, el-}\lan!:,oùr~ tout en faisant mine de s'inté-
resser à elle, y fait ériger des forts qui, au lieu de la
défendre, serviront dans la suite à la réduire. De même,
quelques lignes plus loin, Ibn el-Qâçli donne le texte des
vers gravés tout autour de la vasque de Inarbre envoyée
en 996 (t588) de Marrâkech à la mosquée d' al-Qaravviyîn par
le sultan. On trouve encore, dans l'un des chapilres du
Montaqâ, un l'enseignement assez inattendu: les Chrétiens
evacuèrent, sans cOlllhat, la ville d'A!:,ilâ, d ,ms la nuit du
cli'llanclle 13 dhoù'l-qa ' da 997 (23 septembre 1589).
Tous les d é tails CI ui précèdent ont, d'ailleurs, été fidèle-
ment reprod uits par l'auteur de la Nozlzat el-lJ,âdt. On peut
dire, après avoir lu le .jJfontaqâ, qu'el-Ifràni en a conservé
les passages les plus intéressants et qu'il y a glané à bon
escient. Les renseignements originaux fournis par Ibn el-
Qftçli et laissés de côté par l'historie n de la dynastie
sa'dienne sont rares; à peine peut-on en relever deux ou
trois: ainsi, le texte donné tout au long par Ibn el-Qâçli,
d'un très curieux acte de mainmorte (!wvoûs), par leqllella
mère d'el-Man!:,ollr assure l'entretien et le payement des
fonclionnaires du culle attachés à la mosquée qu'elle fit
construire à Marrâkech, près de Bâb Dokkàla (3). Indépen-
damment des indications topograph5ques qu'il renferme sur
la capitale du Sud, il nous ré"èle le nonl de cette « sultane-
validé» d'origi ne berbère, 'Awda bent Al).med ben ' Abd
Allah el-Wazgiti el-Warzâzâti, et contient le texte de l'ho-
(1) Fol. 92 de mon ms.
(2) Le premier de ces forLs e trouve à l'ouest de Bâb el-Gîsa, le second,
au sud-ouest de Bâb el-Fotoùl)..
(:1) Porte située à l'ouest de la madilla de Marrâkech.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA <DIENNE 109

mologation ilnpéeiale de cet acte, rédigé par le secrétaire


<Abd el-<Aziz el-Fichtâlî (1).
Si la matière historique est aussi parcimonieusement mesu-
rée dans l'histoire d'Ibn el-Qâçli, on pourra se demandel'
avec quoi il a bien pu renlplir l:ies dix-huit chapitres. Uni-
quenlent avec des digl'essions et avec des citations poé-
tiques. En somme, là encore', le portrait moral du sultan e1-
:Maw;;oûr n'est qu'un prétexte. Le Monlaqâ n'est qu'une
anthologie, avec, de temps à autre, une ou deux phrases
venant rappeler au lecteur que c'est bien d'une histoire du
prince sa<dien qu'il s'agit. Ibn el-Qâçlî - prenons cet
exemple entre tous - définit en quelques lignes dans son
sixième chapitre la piété d'el-Man!;'oûr; puis, il entre aus-
sitôt .dans de longues considérations d'ordre général sur les
avantages que trouve le musulman dans la crainte de Dieu;
au cours de ce développement, il ne cite pas moins de
treize pièces de dix à vingt vers chacune. Ensuite, par une
formule banale dont il fait abus (2), il revient à son sujet
pour donner à son chapitre quelques lignes de conclusion.
La façon dont se termine le Atfontaqâ, mieux encore que
les longues digressions du corps de l'ouvrage, prouve que
l'auteur ne se montra guère soucieux des règles, pourtant
si peu rigides, du genre historique chez les Arabes. Sans
craindre le ridicule, il déclare, en effet, dès le début de
son livre, que, tout en intercalant dans chacun de ses cha-
pitres des pièces d.e vers et d es anecdotes plaisantes, il
groupera dans sa conclusion (khâtima) une suite de hons
mots et de traits d'esprit. A son avis, ce sera là le moyen
de faciliter la lecture de l'ouvrage; d'après Ibn el-Qâçli,
c'est une fatigue pour l'esprit que de s'en tenil' à une seule
science; tandis que par ces digressions agréables, l'au sté-

(1) Le nom fourni par Ibn el-Qàçlî est identique à celui qui e lit sur
l'épitaphe de cette princesse, enterrée à Marràkech, dans la salle princi-
pale de la nécropole sa<dienne. Il serait intéressant de retrouver, dan les
vieux registres de ~wbous de Marrâkech ( I),awâla) , l'original de ce document
et de le confronter avec la copie qu'en donne Ibn el-QâçlL
(2) ~~~ L:.,) L.J\ ~..;JJ'
110 LES HOMMES- ET LES ŒUVRES

rité de ses pages s'atténuera de la plus heureuse manière (1).


On sent bien, en résumé, que le Montaqâ, écrit dans un
geste de reconnaissance, de flatterie et, peut-être aussi, de
vantardise littéraire, n'a jamais dû constituer, dans la pensée
de l'auteur, une monographie historique; si l'ouvrage avait
pris la fonne d'une chronique du règne, il aurait pu attirer
à Ibn el-QâÇ.l les repeoches de l'historiographe officiel el-
FichtâH. Nous ne savons pas comnlent el-:Man~oûr accueillit,
d'ailleurs, l'hommage du captif racheté; et c'est peut-être en
disgL'àce que l'historien fut envoyé, peu de temps après avoir
écrit le J.1 fontaqâ, comme qâ<;ll de la ville de Salé, loin de la
cour de Marrâkech.

Sous le titre de DOflrat es-soloûk ft'-man ?u;twâ' l-1720lk min


el-moloûk, Ibn el-Qâ<,H avait composé, à une époque de sa
vie que nous ignorons, un poème historique sous forme
d'or;joûza, relatif aux dynasties nlusulmanes et, particulière-
ment, aux dynasties marocaines qui s'étaient succédées jus·
qu'à son époque. Plus tard, le sultan el·Man~oûr lui de-
manda de compléter cette orjouzâ par un comnlentaire
qu'Ibn el-QâÇ.î intitula ed-Dorr el-?laloûk el-mochl'iq bi-
Dorrat . es-solQûk (2).
Ce poème historique comprend un total de plus de q:uatl'e
oents vers. Dans la courte introduction qu'il a placée en tête,
l?auteur déclare, avant de faire l'éloge du sultan, son protec-
t.eur, qu'il va mentionner tous les princes qui ont régné et don-

(1') e;loj ... ~~I '::"'~J ~WJ .::..,~.lb- ~ JS-~I .>.9J


p l 0U ~. L:.Û\ ~lb Je. 0~JL) ~~ 0yQ.·. 4;.:~~\ ~~
..w ~ ~ 1,\ 1..0 J~ ûyiJI ~ ~i,J JJ ..b-~ j; j
...\~ lj~1J:. ~~.~ ~ ~; ~ ~I ~~l;J~ ........ :. Û ~I ~
:. ~~~IJ ~~}I.I e,:"> ~ ~laJIJ:' ~~W~ <..54-41 ~I ~..
(2) La bibliothèq,ue de , Rabat pussède,. sous· le. nO 37~ une copie du
poème et du commentaire, établie sur l'original qui, malheureusement,
n'est pas daté.
LES HISTORIEN.s :DE LA DYNASTIE SA:<DIENNE 111

n el' les dates de leur décès. Il débute, comme il convient, par


le Prophète, dont il cond'e nse la biographie en quelques
vers, pour passer aux Omaïades d'Orient, puis aux <\.bbâsides,
sur lesquels il s'étend plus longuement. Il arrive ensuite
à la dynastie desFâtimites, qu'il appelle les <Obaïdites (l ), con-
sacre quatorze vers à la fa mille dos Ayyoûbites (XIIe et XIIIe siè-
cles) et termine la première partie de son orjoûza par la liste
des sultans ottomans. Le reste du poème serapportealol1s plus
spécialement au :Maroc; Ibn el-Qâçlî laisse mèll1e de côté
l'Espagne et les Almohades. Il passe successivement en
revue les Idrisites, son ancêtre ~Ioûsâ ben Abî'l- <Afiyya el-
Miknâsi, les :Maghrâ'wa, les Lamtoûna (Almoravides ), les
Mérinides; rappelle, en quatre vers, le règne éphémère t à
Fès, du mezwâr des Chorfa . ~101)ammed ben <Ali ben <Amr
el-J oûti (869-876/ 1561-1569) ; continue par les Beni 'Vattâs et
arrive enfin aux Sa<diens qu'il appelle les Chorfa Zaïdâniyin
de Ianboû<.
Le nombre restreint des vers qui composent le poème ne
lui permet pas d'être autre chose qu 'une simple énumération
de nOlns et g'années, nécessairement sèche et remplie d'inu- '
tilités incorporées pour les besoins de la rime à l'hémistiche
du rajaz . Le commentaire est un peu plus détaillé, mais il
n'est lui aussi qu'une simple chronologie à peine renforcée
de quelques développelnents. Ibn el-Qâçli donne dans ce
commentaire la filiation de chaque souverain, la date de son
avèn.e ment, celle de sa Inort et, quand il le peut, la liste de
ses gouverneurs, d'e ses vizirs, de ses chambellans, de ses
secrétaires et de ses qâçlis. La partie relative aux Sa<diens,
sur laquelle l'historien aurait pu s'étendre longuement, n'y
est guère plus importante que chacune des autres. Ibn el-
Qâçli consacre en tout cinquante-neuf vers à la dynastie, et
le eommentaire de cette fin de poème tient d,a ns six pages
de petit format. Il est' vrai qu'il renvoie liout de suite, pour
plus de détails, à ses ouvrages el-M(')ntaqâ ' l-maq~oûr,
Jad1zwat el-iqtibâs et lJor/'at el-l}ijâl. rI donne néanmoins
d.ans Ge court commentaLr.e quelque.s renseigp.ements inté-

(1) Du nom de <0bafd Xll>ah el--Mahdî, fondateup de la dyna-stie.


112 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

ressants et surtout la liste complète de chacun des fonction-


naires du makhzen, au temps des premiers sultans sa<diens.
Ces renseignements devaient tous, d'ailleurs, êtl'e utilisés
plus tard par el-Ifrânî dans sa Nozltat el-J:tâdt.
L'œuvre véritablement historique d'Ibn el-Qâçli se réduit,
somme toute, à peu de chose, au moins en ce qui con-
cerne la dynastie sa<di~nne. Nous verrons plus loin que ses
dictionnaires biographiques renferment des indications d'une
valeur beaucoup plus grande. Le Montaqâ n'est qu'une
anthologie littéraire , qui, même à ce titre, ne manque
pas d'intérêt, et la Don'al es-soloûk, un « aide-mémoire »
de chronologie musulmane.

EL-IFRÂNÎ ET SA Nozhat el-l:tâdt (1).

Quand il publia, en 1889, l'histoire de la dynastie sa <dienne


d'el-Ifrânl, ~1. Houdas n'arriva à donner sur cet historien
d'autres indications que celles qu'il put extraire de l'ou-
vrage lui-même. On n'est pas, à l'heure actuelle, beaucoup
plus renseigné sur lui; la date de sa naissance ne peut être
fixée qu'à plusieurs années près, et les rares Marocains qui
se s~t occupés de sa biographie ne sont pas Inême d'accord
sur c~lle de sa mort.

(1) BIBLIOGRAPHIE. - Mo1).ammed el-Makkî Ibn Nâ~ir ed-Dara'ï, ed-Dorar


el-mora~~a'a, fol. 46-48 du ms. de 'Abd el-T;Iaï el-Kattânî ; el-Qàdirî, Nachr
el-mathânî, l, p. 3; le même, Illiqât ed-dorar, fol. 92 vo; el-J:Iawwâl, no-
tice biographique reproduite dans l'édition de Fès de la No z ha, in fine;
el-'Abbâs b. Ibrâhîm el-Marrâkochî, Icthâr el-kamâl, t. J, pp. 1.81-183; Mo-
1).ammed es-Sa'ïl~, el-Monlakhabât el-'abqarîyya, p . 73; Ibn el-Mowaqqit, es-
Sa'âdal el-abadîyya, J, pp. 112-115; Houdas, Introduction à sa traduction
de la Nozha; R. Bassel, Rech. bibl., nOS 98 et 99, p. 35 sqq.; Graberg di
Hemso, Specchio geograflco, pp. 12 et 281; Budgett Meakin, The Moorish
Empire, p. 515; Codera, Libros procedentes de Marruecos, pp. 373-376;
Brockelmann, Ar. litt., II, p. 457; Huart, Lill. ar., p. 384.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA <DIENNE 113

On sait par eux qu'il s'appelait Aboû <Abel Allah MolJ-am-


med b. el-Bâjj Mol.lammed b. <Abd Allah el-Ifràni (1), qu'il
portait le surnonl d 'e~ -$aghîr et qu'il naquit à Marrâkech ,
dans les environs de 1080H. (1 cr juin1669 - 20mai 1670).Sa
famille était originaire de la tribu berbère des Ifrân (2 ) , dans
le Soûs , où elle était installée à la Zâwiyyat es-sielra. Ce fut
dans sa ville natale qu'el-Ifràni commença ses études et qu'il
suivit principalement les cours d'un docteur réputé, Aboû'l-
<Abbâs Al).med b. <Ali el-Mawâsi es-SoûsÎ (3). Puis, désireux
de poursuivre son instruction à la mosquée d'el-Qarawîyin,
il se rendit à Fès et assista aux leçons de maitres célèhres
comme Al,lmecl b. <Abd el-Baï e'l-Balabi et Mal,lammed
b. <Abd er-Hal).mân b. <Abd el-Qàdir el-Fàsî (4).
D'après el-Bawwât, el-Ifrâni termina son pr..emier ouvrage
assez tard, dans la première décade de rajab 1128 (21-
30 juin 1716), soit environ à l'âge de 48 ans: sous le titre
d'el-}"Iaslak es-sahl ft charJ:t tawcldJ;, Ibn Saltl, il consacrait
un commentaire au TawchîJ:t ou lr'Iowachcha{z du poète juif

('1) On a adopté ici la transcription « el-Ifrânî »), qui correspond à l'eth-


nique du berbère Ifren. Les biographe arabe de l'historien l'appellent
tanlôl el-Ofrdnî, tantôt el-Ifrânî ou même el-Iajrdnî. El-f:Tawwât e pli-
que: 4:~ L..S- ~S-l- ~t9 4~ ~l)\J ~l~\ &. 0~j ~ LS;~\
~S- ûJ-AlLiJl . Ibnel-Mowaqqitspécifle que l'o rthographe j~~\ est
défectueuse. Tous rappellent queles ancêtres d'el-lfrânîfondèrentauMaroc
une dynastie, le Benî Ifrân, après la chute d es Idrî île .
(2) Tribu chell,la sédentaire installée dans le ba sin du vVâdî Dar<a
(Oued Dra ), au ud-ouest des AH Imejjât. Cf. de Foucauld, Reconnaissance
au Maro c, p. 316. Rien ne dit d'ailleurs ; contrairement à l'opinion rap-
portée à la note ci-dessus, que cette tribu oil apparentée à celle des
Zanâta Beni Ifrân, établis au nord-est du Maroc et qui s'e mparèrent du
pouvoir au xe siècle J .-C. De Castries, Sources inédites, Anglelerre, I~
p. XXXI, fait d 'el-Oufrani l'ethnique d' « Oufràn, ville du Sou ».
(3) Aboû1-<Abbâs Al,lmed b. 'AH b. Mol,lammed b. 'AIt b. ~âlil,l el-Ma-
wàsî, né à Marrâkech vers 1050 (1640-1641), mort dans cette ville en 1.130
(1 HH) el enterré près du tombeau d'el-Jazoûli. Cf. el-lfrânl, $afwat man
intachar, p. 223 sqq., reproduit par Ibn el-Mowaqqil, es-Sa<âdat el-abadîyya,
JI, p. 41 qq.
(4) Sur ces avants, cf. infra, Ill, les Biographes. Sur l'ijàza que Mal,lam-
med el-Fâsî délivra à el-lfrânî, cf. $afwal man intachar, p. '226.
8
114 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

espagnol Ibn Sahl (1). C'était faire preuve de (luelque


originalité et d'une certaine indépendance que de débuter
ainsi par un tl'avail d'objet purement littéraire et profane;
l'ouvrage est néanmoins encore aujourd' hui fort prisé des
lettrés marocains. EI-I:Iawwât ajoute qu'el-Ifl'ânî était alors à
Fès, à la médersa Rachicllyya (2). Y venait-il faire des leçons
ou y habitait-il une chambl'ette d'étudiant? Il est impossible
de le dire. Il semble, en tout cas - peut-être son premier
livre le fit-il remarquer - qu'il occupa un posle dans l'en-
tour'age du sultan Moulay Ismâ'Il; il est même probable
que, sans exercer, comme el-Fichtâli un siècle auparavant,
la charge d'historiographe officiel, il fut désigné 'par le
grand sultan 'alawite pour écrire une chronique de son
règne. Cet histoire malheureusement perdue, il la termina
en effet cinq ans après son commentaire d'Ibn Sahl, en 1133
(2 novembre 1720 - 21 octobre 1721 ) et lui donna le double
titre de e~-:?ill el-warîf fl mafâkhir 1I1awlânâ ISI7'lâ'ïl bni'ch-
Clwrtf et de Rawçlat et-La'ri'f ... Cet ouvrage comprenait.huit
chapitres: le premier sur la généalogie du prince, le second
sur sa vie avant son avènement, le troisième sur les prédic-
tions qui annoncèrent sa fortune, le quatrième sur sa pro-
clamation, le cinquiènle sur la pacific~tion de l'empire, le
sixième sur les villes du Maroc qu'il reprit aux Chrétiens,
le septième sur ses qualités, le huitième, enfin, sur ses
enfants (3).

(1 ) Cet ouvrage a été lithographié à Fès en 132L Il en existe deux exem-


plaires manuscrit à la biblioLLlèque de Rabat , sous les nOS 331 et 332. Il
a été récemment utilisé par Soualah dans son étude sur Ibrahim ibn Sahl,
poèle musulman d'Esp ::tgne, Alger, 1914-'1919, pp. 12-13.
(2) C'est-à-dire la médersa dite d'ech-Charrûpn (quartier des fabricants
de cordes en palmier-nain) , Hué e à proximité de l'Univer ité d'el·Qara-
wiyin et bâtie sur l'ordre du sulLan Loulay er-Rachîd , qui la fit com-
mencer en cha'bàn 1081 (14 déccmbrè 1670-11 janvier 1671). Cf. ez-Zay-
yâni, et-Torjomân el-mo' rib, éd. llouda , p. 11 du texte et 22 de la trad.,
et A. Bel, l nscriplions arabes de Fès, p. 60.
(3) oici les titres arabes de ces chapitres, écrits par el-Ifrânî en prose
rimée:
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA'DIENNE 11.5

Ce plan cOl'respond bien à celui d'un panégyrique de


commande et ressemble, par de nombreux points, à celui du
Montaqâ d'Ibn el-Qàçlî, par exemple. On ne peut savoir si
la chronique valut à son auteur la faveur de 'Moulay Ismâ'ïl,
ou si elle fut précisément la cause de la disgrâce dont il
devait se plaindee dans sa Nozhat el-~làdt.
Le dernier ouvrage q u'el-Ifrânî composa étant, au dire
d'el . I:Iawwât, la $afwat nzan intaclzar, ou dictionnaire des
saints du Maroc au XIe siècle de l'Hégire (1), tel'miné en
1137 (20 septenlbre 1724 - 8 septembre 1725), ce fut donc
dans l 'intervalle qu'il écrivit, avec trois autres travaux non
historiques (2), les ouvrages suivants. : une monographie
des « Sept Saints» de l\1arrâkech, intitulée DoraI' el)âjâl ft
ma'âthil' sab'at l'~jâl, dont on ne sait rien sinon qu'elle resta
inachevée; un autre ouvrage perdu qui fut peut-être, à en
croire le titre qui n'est pas trop alambiqué, une histoire
générale du Maroc jusqu'à son époque: el-lIlo'/'ib ft akhbâr
el-Jl1aghl'ib; enfin, la Nozhat el-~zâdt.
Le biogra·p he cité plus haut place la mort d'el-Ifrânî vers
l'année 1140. Mais cette date se trouve reculée jusqu'à 1151

~tJ\ 3#> ~~ç,.J r\ .JA\ ~,l. 0\ J\~'l~J ~.~ '1 JJ~ j l5;tH 3#> ~\
i,l::-l\ J.»\ ~ .......J L.J ~\J ...;.!.CI\ J.»\ -j: -r.>\ ~
~l;J\ 3#> ~\ ~.; ~);J dW~ ~lA;'\ ~ ~ ~ t)J\ .v. c.>W~
jA & ~; û~U\ 3#> ~U\J ~\ . ~\ Je ~J ~~\ ~~~. ~
~ J("'; ~ c.U \ 3#> S.J WI \ ~\ ~ 4-: 8 lS:J\ 0.M
S.J l.aj \

Y,;"'L.t.J\ <J jA\:J\ .. w,\J ~\ ":'A ';.ÀA <J <::~- j:) L.J ..J-",J
3#> ~\ ~ jA ~\ '-?~ '-?:J\ i~)t j ' ; j ~\ ~~\~\ 0"
(1) Cet ouvrage sera e aminé en même temp que les au lres diclion-
naires biographiques, infra , les Biographes.
(2 ) Ce sont: 10 el-Ifdddt wa'l-inchâddt; 2° Tal'at el-mochtarî fi thoboût
tawbat ez-Zamakhcharî; 3° Fatf), el-maghîth bi-f),akm el-laf),njî'Hwdîth. En-
fin, la bibliolhèque de Rabal possède un commentaire d'el-Urânî sur une
orjouza qu'il composa sur la rhétorique, intitulée lâqoûtat el-baïân
nO 496 (7).
116 LES nOMMES ET LES ŒUVRES

au moins, si l'on tient compte des renseignements fournis


par ed-Dorar el-mo/'a~~a<a d'ed-Dara'J: et l'Iltiqât ed-dorar
d'el-Qâdirî. L'auteur du premier de ces ouvrages dit, en
effet, Jans la biographie d'Al;nled Ibn Nâ$ir, qu'el-Ifrânî
composa en 1151 Sur ce personnage, à .i.\farrâkech, une
qa~îda (IU'illui récita lui-même. L'historien, qui aurait eu,
à cette époque, plus de quatre-vingt-dix ans, était alors, au
témoignage du même auteur, inlâm et prédicateur au
Mas/id loûsoft de Marrâkech (1). Il Y faisait en même temps
des cours et répondit aux attaques de lettrés qui fréquen-
taient la mosquée par la pièce de vers suivante, dans laquelle
il se défendait non sans énergie et avec une conscience
peut-être exagérée de sa propre valeur: .

« Jusqu'à quand les envieux s'attaqueront-ils à nlon hon-


neur, alors que je détourne d'eux nles regards ave~ pa-
tience !

Quel est donc mon crime à leurs yeux, sinon ma supé-


riorité sur eux et mou lnanque d'humilité!

Il s croient que la science consiste à détenir un emploi


dans l'administration des J:toboûs (biens de mainmorte) ou à
avoir la barbe blanche! lVIais cette cr:oyance est la preuve de
leur ignorance!

Que trouverait-on sur le personnel des Zzoboûs, sinon les

(1 ) Le Ma jid loûsofî est plutôt connu il Marrâkech sous le nom de Ma-


drasat 1bn Ioûsof. Cette médersa, qui sert en même temps de mosquée,
se trouve dans la ville , à mi-chemin de Bàb Dabbâgh à Bàb Dokkâla. Elle
fut btttie par le sultan mérlnide Aboû'l-T:lasan < li (732-749 /1331-1348J et
engloba dans ses murs une ancienne mosquée fondée par l'almoravide
<Ali b. Ioûsof (500-531 jU06-1142), dont elle porte encore le nom. La Ma-
drasat Ibn Ioû of fut restaurée en 910 (1562-1563) par le sultan sa<dien
Moulay <Abd Allah el-Ghâllb billah. Cf. el-Ifl'âni, Nozhat el-l},âdî, p. 51 du
texte et 93 de la trad., en- à~irî, Istiq!jâ, II, p. 86 et Ibn el-Mowaqqit, es-
Sa<âdal el-abadt'yya, l, p. 21. otons en pas ant que A. Bel, Inscriptions
arabes de Fès, p. 1'19 et note 1, semble avoIr confondu "la Madrasat Ibn
Ioûsof de larrâkech avec la Madrasat e~-~ahrij de Fès et qu 'il a
utilisé comme s'appliquant à cette dernière le passage d'eI-Ifrânî cité
plus haut.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA'DIENNE 117

marque~ de la' colère divine et des actions déshono-


rantes (1) ?
Combien de vieillards ressemblent au mulet qui avance en
piétinant le sol; la barbe (dont ils tirent vanité) n'est pas
autre chose que leur bride!
S'ils pouvaient se défaire de leurs passions mauvaises, ils
seraient tous assoiffés et désireux de venir s'abreuver au
bassin de ma science!
Ils s'égareraient dans les défilés de mes connaissances et
n'arriveraient pas à les parcourir~ ni dans le sens de la lon-
gueur, ni dans celui de la largeur!
Ils viendraient, en tendant leurs cous, vers l'océan de
science qui déborde impétueusement sur toutes les réunions
.savantes!
Je réunis en moi le meilleur des choses précieuses; je
suis paré des plus belles qualités!
Dieu m'a orné des perles de la science et, grâce à lui, j'ai
reçu le meilleur accueil dans tous les pays.
Je suis devenu savant, le corps tenaillé par la faim, en
approfondissant jusqu'à l'extrême toute question!
Combien ai-je passé de nuits à veiller, sans fermer l'œil et
sans autre compagnon que des livres!
J'ai acquis la science auprès de maîtres sincères et en-
fourché la monture de toute connaissance licite!
A certain de mes maitres vertueux, le prophète de Dieu,
<IsA (Jésus) est apparu en rêve; ce n'est pas un men-
songe!
Dis 'aux chaïkh de Marrâkech : « Venez, faisant preuve
d'équité, boire le coup du matin dans le jardin de ma
science!

(1 ) Allusion au pillage traditionnel des ~wboûs au Maroc, qu'il est cu-


rieux de voir attesler au XVJU 0 siècle par el-Ifrânî.
118 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Ne croyez pas, parce que je m'appelle le Petit (1), qu'il


faille ne 'pas reconnaltre le rang que j'occupe et nle haïr.
Car la science est une lumière dispensée par Dieu; son
éclat apparait aux uns, non pas aux autres! ))

Cette pièce est la seule des poésies d'el-Ifrânî qui nous


soit conservée dans les .ouvrages marocains, avec une autre
écrite à la louango du o:;aint Aboù'l- <Abbâs es-Sabti, et les
deux vers suivants qu'il improvisa:

« Je suis le meilleur des poètes et sans rival! Que celui


qui prétend que je ne suis pas poète vienne nle trouver!
Mon esprit est semblable à une mer immense qui con-
serve les perles cachées (2) ! ))

A sa mort, au dire d'Ibn el-Mowaqqit, el-Ifl'ânî fut enterré


dans ce même Masjid Ioûsofi, sous le pavenlent d ' une
chambre proche du dépositoire des morts pendant la prière
du vendredi (3) . Près de son tombeau, encore visité, aurait
poussé un petit palmier qui servirait aujourd'hui à en
marquer l'emplacement.
Les biographes de l'historien restent muets sur le
malheur ( mo~·tba) qui le frappa et auquel il fait allusion à la
fin de la Nozha (4). Les obscures fleurs de rhétorique sous
lesquelles il dissimule cet événement ne permettent guère de
lire entl'e les lignes. Fut-ce une disgrâce, une l'é"ocation de
la charge dont il semble avoir été titulaire, ou simplenlent
la ruine et la misère dans laquelle, sur le tard de sa vie, il
put se trouver plongé ? La fortune ne sourit guère à sa
vieillesse, témoin ce vers plein d'amertume:
« Nous sommes à une époque d'argent et non d'autre

(1 ) Allusion au surnom d'c1?-~aghîr porté par el-Ifrânî.


(2) Ces deux vers et la poésie qui précède sont cités en entier par el-
'Abbâs b. Ibrâhîm el-Marrâkochî, IQ,hâr el-kamâl, J, pp. 182 et 183 .
(3) Cf. la Jàma( el-gnù"iz de la Grande Mosquée de Fès-la-Neuve, apud
Bel, Inscr. ar. de Fès, p. 30.
(4 ) Nozhat el-I),âdî, p. 310 du texte et 511 de la trad.
LES HISTOIUENS DE LA DY TASTIE SA'DIENNE 119

chose; laisse donc là la littérature jusqu'à des temps meil-


leurs (1)! »
et d'impitoyables créanciers firent vendre même sa biblio-
thèque.
Jusqu'à sa mort, el-Ifrâni fut en correspondance suivie
avec le chef de la zâwiyya des Charqâwa d'Aboû'l-Ja'd
(Bon jadl , dans le Tàdlâ, Mol)ammed e~-$à lil) b. Mol)ammed
el-Mo'tâ cch-Charqi (2) , qui s'intéressa à ses travaux histori-
ques et dut même, à l'occasion, lui venir en aide. Un lettl'é
de Fès nouS a affirmé avoir vu une lettre d'el-Ifrâni, en
réponse à une invitation de ce personnage relig i eux, qui lui
demandai t d'écrire un comlnenlaire ùe la DâUyya d'el-
Ioûsî. Dans cette réponsC', l'historien aurait exprimé sa ran-
cœur de voir tous ses livres vendus et aurait demandé à
ech-Charqi de lui assureL~ pour sa subsistance un peu de
viande tous les jours. De même, l'auteur de l'/rthâl' el-
kamâl a bien voulu nous communiquer le texte d'une
autre lettre d'el-Ifeànî, qu'il eut l'occasion de copier à la
zâwiyya d' Aboù'l-J a' d et qu'il ne seea pas sans intérêt de re-
produire ici (3) :

(1) Nozhat el-I)-ddî, p. 310 du lexle et 51"2 de la lrad.


('2) Ce personnage était le fils de Mol:tammed el-Mo'~â ech-CharqÎ, mort
en rabi' Il 1092 (20 avril-18 mai 168'1), sllrlequdcf. el-lfrânî, $afwal man
intachar, p. 190, et le père d'un aulre lol:tammeJ. el-Mo'~à, auleur de la
Dhakhîral el-mol;dâj, rn.orl e n 1180 (1ï66), sur lequel cf. infra (à l'index).
(3 ) .J~ ~IJ ~~ 0"'; ., .J'rI c. ':'liJI ':'liJI
.Jl-..)I\ if>J (,;-:.> 'J ~~ lSl...\~\ j~. ~~
.À-:J\
r <.S,WI .j.}JI ,bJ,., .JL;..I .; ? I jA iyW l::l:.Î WI ..Ii J
...; l. ·i(, d..J~ 4.-;.; ~.J.~ ~> ,-:"tS' ~~J L...L,( J~ ~~ j
Y' j ct;) j'.r J ~ ..r
..:r J';:-'''''; ';;1J'lIJ J.;JljA
~\.J}J 0l\ ~. 0.4 ~t; ~ ~.)) 019 AjJ\ J\ ~J; l?,~
~.,l. .J~>~ <.S,WI ~j l::l:.S..;.ll~ ~I.r. .::..G ~IJ
l?,.)br.l\ 0J~\
120 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

« Au secours! Au secours! ô gens de noble race~ nous ne


sommes que vos golfes et vous êtes des mers!
Ce n'est que Jans les temps pénibles que l'aide maté-
rielle est appl'éciable, et non lorsqu 'il y a baisse de prix!
Nous avons terminé notre ouvrage $afwat nutn inta-
chal' sur les saints du XI e siècle (de l'Hégire). Il comprend
quinze cahiers (de seize pages). C'e t un livre remarquable
où nous avons mentionné ton père, avec toutes ses qualités
et le parLi qu'il y a à tirer de son exemple. Cet ouvrage a
été établi d'après environ vingt-cinq livres; je l'ai écrit
pour me rappf'ocher J'Allah. Si tu en veux une copie, envoie
quelqu' un qui la prenne. Quand tu verras les biographies
qu'il renferme, tu en a p prou veras les articulations (?). (Tu
pourras faire copier de même ) notre No::,/zat el-f:târU, consa-
cl'ée aux souverains du XI e siècle (de l' Hégire ). »
Tel8 sont les renseignements bien imprécis que l'on pos-
sède sur la vie d'el-Ifrâni. Et si, de son vivant, il fut n~é­
connu et eut à souffrÎr de vexations d'ordre politique ou
personnel, les Marocains d'aujourd'hui lui ont rendu justice;
il passe en effet à l'heure actuelle, aux yeux dé ses compa-
triotes, pour un grand écrivain, et sa Noz/za, pour l'histoire
la plus complète de la dynastie sa(dienne, après les jJ;janâhil
e~-$afâ' d'el-Fichtâli.

'" '"
La Nozltat el-/:lâdî bi-akhbâl" moloûk el-qarn el-/:lâdt est
devenue, depuis la fin du siècle dernier, grâce à l'édition et
à la traduction qu'en donna M. Houdas, le document le plus
important que nous possédions sur l'histoire de la dynastie
sa(dienne au Maroc (1). Il semble qu'on doive fixer la date

(1) Rappelons, après MM. Houdas et R. Basset (Rech. bibl., n O98, p. 35),
que de la Nozhal el-f}-âdî, déjà ulilisée en 1824 par Fr. José de Santo An-
tonio Moura (Memorias da Academia real das sciencias da Lisboa, tomo X,
1824) et Graberg di Hemsô (op. cit., loc. cit.), certains pas ages furent tra-
duits par de Slane (Revue africaine, avril 1857), Dastugue (la Bataille d'Al-
Kasar el-Kebir d'après deux historiens musulmans, Revue africaine, 1857,
t. XI, p. 130), et Mol).ammed ben Ral).t).âl (le Soudan au XVie siècle , in Bul-
letin trime de géogr. et d'archéol. Oran, 1887, t. VU, p. 320).
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA 'DIENNE 121

de sa composition, comme il résulte de la lettre précédente


et de l'introduction de la $afwat man intachar, à quelques
années avant la rédaction de ce dernier ouvrage, terminé,
au rapport d'el-f:lavvwàt, en 1137 (1724-25) (1). Au surplus,
sa place, dans la série des œuvres historiques d'el-Ifrânl,
entre le f;ill, consacré au règne de Moulay Ismâ'ïl et la
$afwa, œuvre pieuse et relative à des saints ou Maghrib,
est à noter : qui sait si l'historien n'a pas tout d'abord .
marqué son désappointement pour le peu de cas fait de sa
première œuvre - la preuve en serait qu 'elle est perdue -
en s'occupant, dans la seconde, d'une dynastie déchue depuis
peu de temps et sur laquelle il était bon de garder encore le
silence. Malgré le panégyrique final de la dynastie' alawite,
-la No:::Jlat el-{lâdî, à l'époque où elle fut écrite, était une
œuvre ne Inanquant pas de hardiesse, sous la signature d'un
homme qui fut peut-être l 'historiographe de Moulay Ismâ'Il.
On verra que l'auteur de la seule monographie des Sa' diens
qui lui soit antérieure, et qu'el-Ifrânl considère comme un

L'édition de M. IIoudas, accompagnée d'une traduction (Nozhel elhâdi,


lIisloire de la dynastie saadienne au Maroc (15 11-1610), a été établie d'après
trois manuscrits, deux provenant de Tlemcen et le troisième d'Alger
(Bibl. nat., nO 1.631). Il exi te encore un exemplaire manuscrit de la Nozha
à Paris (Bibl. nat., nO 4617 ) et trois à la bibliolhèque de H.abat (nos 376,
377, 378;.
L:l traduction de ~1. IIoudas est excellente dans l'ensemble et les quel-
que erreur qu'il y a commises proviennenl en majeure parlie du fait
qu'il ne fil pas au Maroc de séjour prolongé. Cf. ainsi la traduction d e
l'expres ion ~~>JyJ\ ~~\ (p. 88 du tex le et 156 de la trad. ) par:
« ~Iaje lé molouyenne », avec la nole e plicative: « Les souverains ma-
rocain prennenl souvent la qualification de princes molouyens, épithète
empruntée san doute au nom de la rivière de la Molouya. » Il 'ag it plus
simplement de l'adjectif tiré de Mawlàï, « mon maître », qui précède,
comme Sidi (Sayyidi) le nom des sultans du Maroc , et, en même temps ,
celui de tous les chorfa de l'Empire. Cf. E. Doutté, les Jlarabouts, p. 36,
note 3.
La Nozhat el-f),ddî a été lithog-r aphiée à Fès en 1307 H.
(1) Pourtant, le ms. 376 de l~abat, mentionne que la Noz ha fut terminée
le 25 mol).arram 1139 (22 seplembre 1.726). Dans ce cas, la $afwa, au lieu
de remonler à 1137, serait encore postérieure à 1139. Il est impossible
de déterminer qui , du manuscrit ou d'el-T.Iawwàl, a raison.
122 LES HOMMES ET J~ES ŒUVRES

pamphlétaire, crut bon de se Inettre à l'abri derrière l'ano-


nymat. Il est curieux de suivre l'écrivain, qui termine sa
carrière littéraire en laissant de côté sultans passés et p ,.é-
sents, pour glorifier, « afin de se rapprocher d'Allah », les
puissants marabouts intercesseurs. L'historien officiel a
continué d'écrire l'histoire par goût, peut-être avec quelque
arrière-pensée, et a fini hagiographe.
La Nozlzat el-/:tâdt commence aux débuts de la dynastie
sa'dienne pour se terminer au règne de Moulay Ismâ'j'l. "Elle
embrasse donc ainsi une période de p,'ès de deux siècles, et
comprend les débuts de la dynastie 'alawite et le règne de
Moulay er·Rachid. C'est ce qu'explique el-Ifrânl lui-même.
Il désire, avoue-t-il , écrire une histoire de la dynastie
sa'dienne, mais le titre choisi peut laisser croire qu ~elle
retracera l'histoil'e du Mal'oc pendant un siècle seu lement et
non pas sous tous les sultans sa'diens. Il se tire de ]a diffi-
culté par un raisonnement spécieux. « La dynastie sa'dienne,
dit-il ingénument, a bien commencé en la seizième année
du xe siècle, mais elle n'a eu d'éclat et n 'a étendu sa domi-
nation que vel'S la fin du xe siède et au commencement du
XI e, aussi l'ai-je placée sous la rubrique du XIe siècle, par ce
motif qu'une chose voisine d'une autre est susceptible de
lui être assimilée (1).» En réalité, il apparait qu'el-Ifrânine
pouvait pas faire assez preuve d'indépendance pour arrêter
son hisLoire à la chute des Sa'diens, que!s flue fussent ses
s entiments à l'égard des pri nces 'alawites; le lnoyen qui Jui
a semblé le plus simplp, pour sa tisfaire son projet et ne pas
craindre d'être taxé de hardiesse, a été d'aller chercher ce
« paravent» du XIe siècle.
D'ailleurs, sur les quatre-vingt-un chapitres que contient
la Nozltat el-{zâdt, soixante-quinze se rapportent à l'avant-
dernière dynastie marocaine. Il avait, dit-il, d'abord pensé à
écrire une suite au Rawrj el-qir.tâs d'Ibn Abi Zar' (2) et à la
(1) Nozhat el-1:tâdî, p. 2 du texte et 4 de la trad.
(2) Le ms. 376 de Rabat donne à la place de Lf'l1....}AJI la variante
~)I . Il s'agirait alors du Raqm el-J:tolal d'Ibn el-Khatîb. Celte 16ÇOO
semble devoir être rejetée.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA' DIENNE 123

Rawçlal en-nisrîn d'Ibn el-Al).nlar (1 ), sur la fin de la Jynastie


des Mérinides et sur celle des Beni Wattâs (2) ; s'il se
décida pour une histoire des Sa'diens, ce fut parce que « ses
contem pOl'ains prenaient un intérêt pl us vif à cette dy-
nastie ». El- Ifràni est-il sincère en parlant de la sorte? Ses
contemporains témoignaient bien , pour la plupart au moins,
autant d'indifférence aux Sa'diens qu'aux Mérinides, Quant
à lui, .peut-être regrettait-il vraiment ce temps où des
chorfa, venus de son pays du Soùs, avaient pu s'installer
sur le trône de l'empire, où sa ville natale, Marràkech,
maintenant déchue de sa splendeur de capitale au profit de
Meknès, avait pu ap paraître pendant de longues années comme
le centre intellectuel et politique du :M aroc. Entendons-le gé-
mir sur les ruines de ce palais el-Badl', que le « sultan
victorieux Moulay Ismâ'ïl ben ech-Charif ordonna de dé-
truire en l'année 1119 (1707-08), pOUl' des causes qu'il serait
trop long d'énumérer (3) » :
« Pourquoi, ai-je dit, gémis-tu et te plains-tu? - Parce
que, me répondit-il, le temps heureux a fui et ne reviendra
plus (4) ! »
Le sultan Ab-med el-)1an~oûr, ami des poètes et des his-
tOl'iens, est certainement à ses yeux le plus grand des sul-
tans qui aient régné sur le :Maroc, puisqu'il ne lui faut pas
moins de vingt-huit chapitres pour retl'acer sa vie et ses
actions d'éclat. Ce n'est pas l'inclination de tous ses con-
temporains qui l'a poussé à écrire l'histoire de la dynas-
tie à peine éteinte; c'est peut-être plus simplement son
inclination propre d'homllle du Sud, que partageai('nt
probablement ses concitoyens de Marrâkech, regrettant la
fortune passée de leur ville et se méfiant de ces sultans

(1.) La Rawcj,at en-nisrîn d'Ibn el-Al).mar a été éditée et traduite par


Gh. Bouali et G. Marçais. ~1. G. Marçais, dans l'introduction (p. XIV ) ,
s'appuie sur ce passage d'el-Jfrànî pour croire que la Rawq,a jouissait
d'une çertaine estime au }[aroc à la fin du xvu t siècle.
(2) EI-Ifràni savait-il que ce projet avait déjà été mis à exécution par
un lettré .de :Bès, Ibn Zàkoùr, en 1097 (1686) '? Cf. injra, III, les Biographes.
(3) ozhat el-J:tâdî, p. 113 du texte et 1.93 de la trad.
(4) Ibid., p. 1.14 du texte et 1.94 de la trad.
124
LES HOMMES ET LES ŒUVRES

venus .de l'autre extrénlIté de l'empire, qu'ils n'avaient pas


proclamés d'eux-mêmes.
On n'analysera pas longuement ici la Noz llat el-l:zâdt'. Il
suffira de rappeler qu'elle embrasse au total la période qui
va de l'année ,917 (1511-12) à la fin du XIe s.iècle de l 'Hégire
et qu'elle s'étend très inégalement Sur les règnes des diffé-
rents princes sa'diens. C'est d'abord leur généalogie, l'his-
toire de leur accessiàn au trône et de la fortune passagère
des derniers prétendants de la maison des Benî Wattâs.
Puis, el-Ifrâni arri ve assez vite au règne de Moulay ' Abd el-
Malik, et, en s'arrêtant à peine à la victoire remportée sur les
armées de Dom Sébastien, il laisse courir sa plume avec
verve dès que sa chronique l'amène à Al).med el-l\Ian~oùr.
C'est alors la relation de toutes les victoires de ce souve-
rain, de la conquê te du Toûât, du Tigoûrârln et du Soudan,
de la répression des révoltes locales, et, en même temps,
celle des constructions entrepI'i~es par ce sultan, la descrip-
tion du palais el-Badl' à Marràkech, le rappel du cérémonial
en usage à la COur à l'occasion de certaines solennités et des
fêtes orthodoxes, avec bon nombre de renseignements, les
uns éparpillés, les autres groupés, sur la co~position du
makhzen impérial : vizirs, secrétaires, chambellans, et sur
les qâçlis investis à Fès et à l\1arrâkech. Puis, c'est l'histoire
des révoltes qui se rallument à la mort d'el-Man~oûr, de
l 'anarchie dans laquelle se débattent ses successeurs, des
mojâllidtn ou guerriers de la croisade contre les infidèles,
qui rayonnent de la ville de Salé sous l'impulsion d 'el-
'Ayyâchi, de l'importance grandissante de la maison d'ed-
Dilâ', et, pour conclure, l'élévation au pouvoir des chorfa
l)asanis de Sij ilmâsa, et les règnes de ' Moulay l\1aQam~
med b. ech-Charif, de .M oulay er-Rachid et de Moulay
Ismâ '11.
Sans les grouper sous une même rubrique, comme il
devait le faire ensuite dans la Safwat nzan intachaJ', el-Ifrâni
cite la plupart du temps chacune de ses sources au· fur et
à mesure qu'il les utilise. Ce souci de mentionnAr des
autorités qui, d'ailleurs, comme on l'a vu, ne lui est pas
particulier, permet d'attribuer à la Nozltat el-l:zâdî un total
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA <DIE NE 125

de quarante-trois sources: les unes ayant trait à l~histoire


générale, les autres à l'histoire particulière de la dynastie
sa <dienne. On s'aperçoit, en étudiant la liste de ces dernières,
que la prùpal't d 'entre elles, la chronique de <Abd el-<Azî.z
el-Fichtâli, le lJ!fontaqâ, la Don'at el-soloûk et ed-Dorr el-
ly,aloûk d'Ibn el-Qâçlî, par exem pIe, sont contemporaines de
la période brillante de la dynastie ~;a<dienne. On sent que
les documents, n 'existant pour ainsi dire pas pour les pé-
- riodes antérieure et postérieure, ne lui firent pas au con-
traire défaut pour l 'histoire du long règne d'el-l\1aw;iOûr, et
qu'il en tira un large profit. EI-Ifrânî nous renseigne ainsi,
de manière indirecte, sur le mouvement historique maro-
cain au tenlps de la dynastie satdienne. Puisque, mieux
placé que nous et surtout presque contemporain des faits
qu'il relate, il borne sa documentation à un nombre d'ou-
vrages très limité, il pernlet de présumer qU'f\ll plus de ces
derniers, il n'en est point d'autres qu'on puisse espérer dé-
couvrir un jour. Ainsi se vérifie bien la loi générale qui
veut qu'aux périodes troublées corresponde toujours un ra-
lentissement de l'activité littéraire.
On a essayé de montrer, au début de ce travail, combien
tout historien, au Maroc, devait faire preuve de circonspec-
tion en écrivant son histoire. Les précautions d'el-Ifl'ânî, si
on les analyse, viennent encore confirmer cette constatation
faite sur l 'ensemble des œuvres historiques du · pays. Le
loyalisme de l'auteur de la Nozha, sans apparaître suspect
dans son livre, ne s'y affirme pas toujours avec l'insistance
à laquelle on pourrait s'attendre. il use parfois, à l'égard des
sultans, d ' une liberté de langage à peine atténuée: ainsi,
dans sa doxologie noyée de pathos académique: « les astres
de la royauté, dit-il, tantôt se lèvent à l'Orient, tantôt dispa-
raissent à l'Occident dans le firmament des dynasties (1) )}.
Il est remarquable de voir combien les autorités qu'il cite
(1) Nozhat el-l),âdî, p. 1 du texte et 2 de la trad. Cf. aussi p. 46 du texte '
et 85 de la trad. « J'ai vu, dans une lettre, quelque chose qui est en con-
tradiction avec cette légende (que Moulay <Abd Allah fut un prince équi-
table et un homme vertueux) et qui autoriserait à croire que ce prince
était comme tous les autres souverains. »
126 LES nOMMES El' LES ŒUVRES

viennent à propos lui permettre de placer adroitement, tout


en dégageant sa propre responsabilité, des affirmations cho-
quantes pour les souverains. Qui sait si ce n'est pas de
propos délibéré qu'il est allé chercher, pour l'insérer dans
son livre, cette phrase insidieuse de la Mir'ât el-ma!zâsin :
« Le fondateur de la dynastie des Chorfa était rem pli de
méfiance à l'égard des chefs des confréries religieuses et il
les redoutait précisément parce que c'était grâce à leur en-
tremise qu'il était monté sur le trône (1). »
Ce soin que prend el-Ifrânî de citer ses sources apparaît
également avec netteté quand l'historien veut signaler un
miracle. Est-ce afin de renforcer le degré de confiance qu'il
faut lui attribuer, ou plus simplement pour ne pas laisser
croire à son lecteur qu'il y ajoute foi (2) ?
Certaines de ses sources, enfin, n'ont rien de particulière-
ment historique. Elles montrent que si, par goût personnel
ou dans un but légèrement tendancieux, el-lfrâni a voulu
écrire la relation d'une dynastie marocaine, il n'a pas non
plus oublié le temps de ses « humanités» et se déclare au-
tant poète et littérateur qu'historien. On a vu que les his-
toires sa'diennes d'el-Fichlàli et d'Ibn el-Qâçli ne sont en
réalité que des anthologies, et que la matière de leurs
œuvres à proprement parler historiques ne constitue qu'une
trame à laquelle viennent s'ajouter, en grand nOlnbre, des
digressions littéraires. Sans en pousser le nornbre à l'ex-
trême, comme ses prédécesseurs, el-Ifràni ne résiste pas au
plaisir de les imiter, soit en citant dans son livre certaines
des pièces de vers qu'ils ont eux-mêmes insérées dans
leurs œuvres, soit en faisant appel à ses souvenirs littéraires
personnels. S'il se fait l'historien des joutes poétiques dont
ses prédécesseurs lui ont transmis le souvenir, par exemple,
de ces improvisations du vizir Aboû 'Abd Allah :Moulay Mo-
l)ammed, du qâçli el-Ijomaïdi et d'Aboù'l-' Abbâs el-Manjoùr
sous les murs de Fès-la-Neuve (3), il ne perd pas lui-même

(1) Nozhai el-Q-âdî, p. 12 du texte et 24 de la trad.


(2) Ainsi, ibid., pp. 21 et 40 du texte et 43 et 81 de la trad.
(3) Ibid., p. 53 du texte et 97 de la tr8d.
LES HISTOHlENS DE LA DYNASTIE SA'DIEN ' E 127

l'occasion de montrer sa propre culture en faisant part à ses


lecteurs des sentiments de tristesse que lui suggérèrent les
ruines du palais el-Badl', et en donnant le texte des poèmes
qu'il crut devoir prononcer à ce propos (1).
Il ne faut d'ailleurs pas se plaindre outre mesure de ces
longueu)'s, qui, dans bien des cas, pourraient sembler hors
de propos. Il n'est pas d'historien moderne, au Maroc, qui
ne leur accorde une place inlportante dans ses récits; les
chroniques présentent souvent autant d'intérêt littéraire
fi ue d'intérêt historique. Une étude consacrée au mouve-
litent littéraire ma rocain trouverait dans les œuvres d'his-
toire, beaucoup plus que dans les autres ouvrages écrits
dans le pays, la documentation nécessaire, et, à ce point de
vue, el-lfrâni offrirait dans ses livres, y compris la Nozha,
des renseignelnents de premier ordre.
En tout cas, ces citations en prose ou en vers nlOntrent
qu'el-Ifrân1. possédait une culture étendue. Il sait même, ce
qui n'est pas le cas ùe tous ses confrères, utiliser ses lectures
pour critiquer les dires de certains auteurs. C'est ainsi,
entre autres choses, qu'il relève l'affirmation d'un écri-
vain prétendant que l'usage du parasol porlé au-dessus de la
tê~e du sullan était une invention des princes sa'diens, et qu'il
réfute très justement cette assertion en citant à propos un pas-
sage d'Ibn I\hallikàn, qui, effectivement, parle du parasol du
cinquième khalife fâti mite, N izâr el-' Aziz fils d'el-Mo ' izz (2).
On doit savoir gré à el-Ifrâni d'avoir fait ce rapprochement,
encore que le passage d 'Ibn Khallikân ne fasse pas très
netten1ent du parasol l'insigne de la souveraineté, ou plutôt
du khalifat.
On remarquera de même, en lisant la Nozhat el-llâdî,
que l'auteur fait preuve d'un louable souci de vérité histo-
rique : après avoir donné le texte du discours prononcé
par el-Man$oûr devant son entourage pour justifier son expé-
dition au Soudan, il relève deux erreurs commises par
le sultan dans ce discours et les corrige: les Almoravides,

(1) Nozhat el-l),âdî, p. 114 du te te et 194 de la trad.


(~) Ibn Khallikân, Wafayât el-a 'idn, éd. du Qaire, 1299, t. Il, p. 443.
128 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

remarque el-Ifrânî, ont eu des établissements au Soudan,


au témoignage d'Ibn Khaldoûn (1) ; et la poudre était bien
connue avant les Sa'diens, puisque dans le commentaire de
son el-'Amal el-fâsl, <Ab::l er-Ral).mân b:Abd el-Qâdir el-
FAs! fait remonter son invention à 768 (1366-67). Bien que
cette date soit loin d'être exacte et qu'on soit nlÏeux ren-
seigné qu'el-IfL-ânt sur la question (2), son honnête étonne-
ment en présence d'un anachronisme est à noter et reste à
son avantage.
Non pas, d'ailleurs, qu'il faille accorder à el-Ifrànî une
qualité que ses prédécesseurs ou ses successeurs maro-
cains n'ont jamais possédée: 'quelque dose d'esprit critique.
Il a, comme tous les autres écrivains de son pays, des idées
bien a.rrêtées sur ce qui constitue la valeur d'un ouvrage,
qui se mesure, enCOt'e aujourd'hui, à Fès et à Rabat, à
peu près uniquement au nombre de ses pages (3) ; et bien
des digressions, où le souvenir de ses lectures apparaît
et s'étale complaisamment, n'ont en fin de compte, à ses
yeux, d'autre but que de renforcer son ouvrage et de le
remplir.
Quoi qu'il en soit - et c'est le point de vue qui importe
le plus - la valeur historique de la Nozha est indéniable.
EI-lfrAnî a su, avec assez de talent, prendre l'essentiel de
la documentation contenue dans les sources qu'il a mises
à profit. D'autant plus que son information ne s'est pas
seulement adressée à des ouvrages historiques, mais aussi
à des pièces d'archives qu'il a peut-être utilisées de pre-
mière main. Il n 'y a, en effet, rien d'impossible, comme

(1) Ibn Khaldoûn, Kitâb el-'ibar (Histoire des Berbères), texte arabe, l,
p.263.
(2) Ibn Khaldoûn, ibid., II, p. 272, et Ibn Abî Zar', Rawq, el-qirtâs, éd.
Tornberg, p. 209, rapportent qu'en rajab 672 (11 janvier-9 février :1274),
le sultan mérinide Aboû Ioûsof Ia'qoûb b. 'Abd el-J:Iaqq employa des
bombardes au siège de Sijilmâsa.
(3) Ou plus exactement au nombre de ses cahiers (de 8 feuillets). La
première question posée par un lettré marocain à qui l'on signale un livre
nouveau est celle-ci: âch-Q,âl men korrâ~ Jîh ? c'est-à-dire: «( De combien de
cahiers se compose-t-il? ))
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA<DIENNE 129

M. Boudas l'a d'ailleurs supposé (1) , à ce qu'il ait consulté


et copié, s'il a vraiment occupé une fonction au makhzen,
des documents que sa situation à la cout' lui permettait
d'atteindre. Quand Lien luême cette hypothèse ser'ait erro-
née, on resterait en droit de penser qu'il put trouver à
Marrakech des bribes d'archives de la dynastie sa<dienne.
On connait le sort qui était réservé à ces dernières en terre
marocaine: les lettres adressées au sultan restaient presque
toujours entre les mains des secrétaires chargés d'y répondre,
ou suivaient les convois royaux au cours de leurs innom-
brables déplacements; si bien qu'à l'heure actuelle, ce n'est
qu'entre les mains de rares collectionneurs indigènes qu'on
a quelques chances de retrouver les correspondances des
sultans du :M aroc. Aussi, doit-on savoir g"é à el-Ifràni de
nous avoir conservé des lettres importantes et d'une belle
tenue littéraire : celle, par exem pIe, que les docteurs
de Nlarrâkech envoyèrent à Nlol,lammed el-Masloûkh, qui
essayait de justifier à leurs yeux l'appel qu'il avait adressé
aux Chrétiens, afin de résister à son oncle <Abd el-Malik (2).
Cette utilisation assez rationnelle des ouvrages anté-
rieurs et de quelques documents cl'archives donne ainsi
au livre d'el-Ifrâni une honnête physionomie et le rend
sympathique à ses lecteurs européens. ~lais ce serait trop
faire la louange de i' auteur que de croire qu'il a complète ment
dépouillé le vieil hon1l11e. Si quelques-unes de ses digres-
sions o.ffrent de l'intérêt, d'autres, en revanche, sont malen-
contreuses. Pourquoi. par exemple, avoir profité du rap-
pel d'une légeIide sur le sultan <Abd Allah el-Ghâlib
billah et l'alchiInie, pour amener, hors de propos, SUl'
cette « science chimérique », un développement fort inat-
tendu (3) ?
De même, el-Ifràni reste bien marocain avec sa manie du
chronogramme et des pseudo-coïncidences. Il est fier d'avoir
trouvé que la valeur numérique des lettres contenues dans

('1 ) Inlroduction à la lraduction de la Nozhal eHlâdî, p. IV.


\2) Nozhat el-J:!,âdi, p. 65 du lexte et '115 de la lrad., sqq.
(3) Ibid., p. 51 du lexlc el 94 de la trad., sqq.
9
130 1.ES HOMMES ET 'LES ŒUV1\ES

le mot el-Badr, soit 117, correspond exactement au nombre


d'années durant lesquelles le palais resla debout (1). Il a lu
·q uelque part que « les dynasties s~éteignent avec un .prince
qui porte le même nom que le fondateur de cette dynastie».
Et le voilà qui essaie de donner raison, pour la dynastie
sa<dienne, à cette assertion; de nlême, à la Tègle qui veut
·q ue le sixième prince d'une dynastie soit déposé (2) .
Sa circonspection l'a peut-être enfin empêché de faire
,état de documents autres que ceux qulil signale. Son pané-
gyrique 'final de :M oulay .Ismâ <ïl a, semble-t-iI, quelque
-chose de forcé; toutes ses longues pages sur Al:Imed ei-
Man!?oûr, n'a-t-il pas cherché à les excuser ou à les faire
accepter par sa brève énumération des expéditions du prince
<alawite ? Et si, par répugnance, il ne termine pas son
livre par des vers de sa composition à la louange du sultan
et se contente de citer ceux de l'un de ses amis, il escamote
en même terrlps prudemn1ent son jugement d'ensen1ble sur
' la dynastie sa<dienne, en glorifiant simplement la dignité
<le khalife (3). '
Toutes ces taches n'empêchent pas, assurément, que la
Nozhat el-bâdî demeure notre principale source de l'hïs-
",toire des Sa <diens. Outre le mérite qu'elle a (l'avoir été
-c omposée peu de temps, relativement, après la chute de
cette dynastie, elle a aussi celui d'être à peu près impar-
tiale. L'auteur a beaucoup lu de ce qui se l'apporte à la
période qu'il étudie, tire bon parti de ses lectures, a l'hon-
nêteté de citer ses sources sans se borner à les plagier, et
fournit ainsi une bibliographie arabe du sujet, assez éten-
due. 'D'autre part, on ne aoit pas regretter que la Nozlza
soit souvent, en plus d'une chronique, une chrestomathie à -
la fois poétique et philologique. C'est grâce à la tenue litté-
raire de 1''Ouvrage que les lettrés marocains en ont tou-
jours fait grand, cas : ils nous ont ainsi conserv-é la pre-
mière histoire du Maroc sérieuse, qui fasse suite à celles

(1.) Noz hal el-1),âdi, p. '114 du texte et 195 de la trad.


(2) Ibid., p. ~59 du texte et 430 de la trad.
(3) Ibid., p. 258 du texte et 429 de la trad.
LES HISTORIENS DE LA DYN STIE SA'DIENNE '13'1

que corn posèrent au 1\loyen Age Ibn Ahî Zar'< et Ihn


Khaldoûn (1).

c
L'ANONYME DE FÈS

Dans le chapitre de .1a Nozlzat el-~âdî relatif à .la conduite


du sultan sa<dien Aboû Mol).arnrned <Abd Allah el-Ghâlib
biHah, el":Urânî signale que certain auteur accuse ce Pl'inee
d'avoir livré aliX Chrétiens, pour empêcher les Turcs d'Alger
de s'en emparer, le port de Bojr Bâdis (2), ,et d'avoir
ordonné là son qâ ïd <Ali b. Wadda d'évacuer la place d'el-
Brîja (3), que Ge ,d ernier aurait enlevée aux Portugais. Et
l'historien ajoute: « Ces faits attl'ibués à Moulay <Abd Allah
seraient odieux s'ils avaient été réellement accomplis, mais

(1) III e era pas inulile de rappeler ici deux jugaments portés en Eu-
rope sur la Nozhat el-·f),âdî .:
En 1834, Grâberg di Hemso éûrit dans son Specchio, p. 281 : « [La gé-
néalogîe de <Abd er-Raç.mân b. Hichâm est rapportée ... ] più particolar-
mente dal Noz hat-el-khadi, 0 sloria dêi regi, e degli uomini celcbri deI
secolo undecimo deU'egira, ' èhe contiene uua di tes a esposizione islol'ica,
e critlca della discenden:za di A'li, e di Hhosein suo secondo-genito, co11'-
ajuto della quale, ci è $tato sortito di schiarire, e di rellific.are, in più de
un Juogo, il consimile albero genealogico già pubblicato nel primo vo-
lume dei viaggi deI spagnuolo D. Domingo Badia, y Leblich, sotto il
pseudonimo di A'li Bej-el-a 'bbassi. » ,
Budgett Meakin, dans le chapitre Works on Morocco Reviewed de son
ouvrage The Moorish Empire, p. 515 , émet sur el-lfrânî une appréciation
injuslifiée. Pour lui, la Nozha, dont il traduit le titre par « amusement pi-
quant (?) » - (pungent amusement), est un ouvrage si diffus et tellement
plein de louanges composées pal' les contemporains que la lecture en est
pénible, même comparée à celle des ouvrages de même sorte.
(~) AujourtPhui, Pei10n de Velez de la Gomera, presitlio espagnol sur
un petit îlot rocheux de la côte méditerranéenne du Maroc, entre Ceuta
et Melilla.
(3) EI-Brîja, « le fortin », ancien nom arabe de la ville de Mazagan, qui
fut remplacé, au moment où le sultan <alawite Moulay <Abd er-Ral)mân
fit reconstruire la ville, par celui d'el-Jadîda (la 'Nouvelle).
132 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

je ne saurais les admettre, étant donné que je ne les ai lus


que sur des feuillets détachés, dus à la plume d'un écrivain
dont j'ignore le nom, et qui n'a fait qu'une virulente dia-
tribe contI'e les pl'inces de la dynastie sa'dienne. A mon avis,
l'auteur de ces récits était un des ennemis de cette famille,
car il a cherché à jeter sur elle la déconsidération, en l'ex-
cluant de la descendance du Prophète, et il a dépeint le
gouvernement de cette dynastie comme un gouvernement
odieux. Aussi ai-je passé sous silence nombre de faits qu'il
a mentionnés et qui ne sauraient être imputés à ces nobles
Chérifs (1) ».
Si, parmi les sources, aujourd'hui considérées comme
perdues, qu'el-I;ràni utilisa pour la cOluposition de son his-
toire sa'dienne, il en était une ([u'il fallait le moins du
monde s'attendre à découvrir, c'était bien cette relation ano-
nyme, dont le pL'udent historien de la No::,ha flétrissait l'atti-
tude à l'égard des Chorra. Un hasard heureux J'p'a permis
de la retrouver et de l'identifier, à premièl-e lecture, à la
source d'el-Ifràni (2).
Il s'agit bien, en effet, d'un opuscule de quelques feuillets,
une trentaine à peine, malheureusement acéphale, et du
mème coup anonyme. D'après les renseignements que j'ai
pu obtenir sur lui, l'exemplaire de cette « virulente dia-
tribe» que j'ai eu sous les yeux proviendrait de Fès. Aussi,
l'ouvrage sera-t-il désigné ici sous le nom d'Anonyme de
Fès)' on va voir, d'ailleurs, qu'il y a tout lieu de croire que
c'est bien dans cette ville qu'il fut composé.
La photographie reproduite ci-contre (fig. 1) (3) n10ntre
dans (luel état est parvenu ce manuscrit; elle montre aussi

(il el-rfrànî, No::hat el-f},âdf, p. 49 du texte et 90 de la trad :


(2) Je dois ]a communicalion de ce manuscrit, en seconde main, à Si
roJ:tammed b. 'Ali ed-Doll«Ui. Le ' ùJim salétln semble s'être à peine
rendu compte de la valeur historique de cd ouvrage, qui, à son avis, ne
présente d'autre inlérêt que celui de contenir un récit nouveau de la ba-
taille duWàdïl-~Iakhùzill . .le compte pouvoir bienlàt publier, avec une
t.raduction, le texte de cette relation anonyme. ,
(3) Fol. 15 l'0. Celte page contient le récit des préparatifs de guerre fa ils
par le sultan Moula)l 'Abd el-Malik contre la croisade porlugai e.
FIG. 1..
Fac-similé d'une page de la chronique satdienne de l'Anonyme de Fès.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA' DIE ' NE 133

que l'auteur, s'il s'agit de l'exemplaire original, ou le


copiste, ont fait preuve, en l'écrivant, d'un réel mépris de la
calligraphie, si en honneur pourtant au Maroc. De plus ,
aucune distinction par chnpitre n'y est établie. C'est un
récit ininterrompu des révoltes, des èomplots, des assassi-
nats, des sièges, des expéditions qui forment une bonne
partie de l'histoire marocaine du XVI e ~iècle.
La relation débute par le règne du sultan Moulay Ma};ammed
ech-Chaïkh et se termine par celui de son homonyme
Moulay M ol).ammed ech-Chaïkh, surnommé el-A$ghar et
avant-dernier. prince de la dynastie sa'dienne. On y trouve
d'abord, avec des renseignements qui diffèrent sensiblement
dans le délail de ceux que fournissent el-Ifrâni et les bio-
graphes utilisés par ce dernier, l'histoire du complot tramé
contre le savant el-WancharisÎ, la mise à mort de ce per-
sonnage, le siège de Fès par le sa'dien :Ma};ammed ech-
Cha"ikh et la reddition du dernier pt'ince de la dynastie pré-
cédente, A};n1ed el-Wattâsi ; puis, c'est la fuite en Espagne et
le passage à Alger de l'oncle d'Al).med el- Wattâsi, Aboù f:las-
soûn, son retour à Fès avec une armpe turque, sa mort pro-
chaine; l'entrée de l\10ufay Mal:wmmed dans la capitale et
l'exécution d'ez-Zaqqâq; tout cela rapporté avec des détails
très précis. On sent que l'écrivain a voulu s'attarder sur le
récit de l'avènen1ent du premier sa'dien. Ensuite, l'histoire
de la dynastie continue, se faisant de plus en plus abrégée
au fur et à meSUL'e qu'elle s'éloigne de ses débuts, si bien
que la relation du règne d'Al).med e l-Man $oùr n'y occupe
guère de place plus in1portante que celle de ses succes-
seurs. Et l'auteur, à la fin de son opuscule, ne consacre plus
qu'une ligne ou deux à chacun des quatre derniers sultans
sa'diens.
En examinant de près cet ouvrage, il sem Lie que le but
recherché par l'écl'ivain anonyme n'a pas été seulement celui
de retracer l'histoire de la dynastie sa'dienne. Ses quelques
pages sont peut-être aussi, en même temps, un essai d'his-
toire particulière de la ville de Fès à l'époque des premiers
sultans chérifiens. L'historien fait preuve, lorsqu'il s'agit
d'événements qui se déroulent dans la capitale du Nord,
134 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

d'une connaissance toponymique remarquab le. On s'en


rendra compte pal' l'exemple suivant:
L'oncle du sultan wattâsî déchu, Aboû J:Iassoûn, apl'ès
avoir obtenu de l'odjaq des j~nissaires turcs d'Alger une
armée, commandée par le pâchâ $âlil). (Salah-Raïs), s'en va
conquérir l'empire dont le trône lui revient; il lève au pas-
sage des contingents de tribus du Maroc Oriental, rencontre
les troupes de :Moulay ~{al).ammed ech-Chalkh à er-Rokn,
sur le Wàdi Innâwan (Oued Innaouen), entre Taza et Fès et
les met en déroute au début de l'année 1.554 J. C. (~afar
961 H.) (1). Alors, dit l'Anonyme de Fès, :Moulay Mal).ammed
ech-Chaïkh, ayant à travel'ser la vieille ville de Fès pour, re-
joindre sa résidence de Fès-la-Neuve, située plus à l'Ouest,
« passa par le Wàdi Wislân (2), tandis que son fils, Moulay
'Abd Allah, entra dans la ville par Bâb el-Fotoûq (3), traversa
le pont d'er-Ral?if (4), suivit le Wâdi'~-$awwâfin (5) et sortit
par la porte dite Bâb el-J:Iadid (6), de peur de traverser le
milieu de la ville; puis, il rej oigl1i t son père, après être
entré à Fès-la-Neuve ... (7) »
On est également frappé, à la lecture de cette histoire,
par le soin que l'auteur pL'end de citer les personnages
de Fès qui ont, durant la même période, joué quelque rôle
politique. Il révèle ainsi le nom d'un chef du quartier de

(1 ) Cf. el-Ifràni, Nozhal el-f),âdi, p. 30 du texte et 57 de la trad.


(2) Aujourd'hui connu sous le nom de Wàd ez-zÎtoùn; c'est le nom que
porte le W àdi Fàs, à sa sortie de la ladîna, au sud de Fàs el-Bâlî et de
Fâs el-Jadid. Cf. le plan du Lt Orthlieb (Oued Zitoun).
(3) Sur cette porte, cf. supra, p. 100, note 1.
(4) Pont sur le grand bras du Wàdi Fàs (Wàdi'l-I h:iràrib) et silué dan
le quartier de Sidi'l-<Awwàd. Connu aussi sous le nom de pont de Gzâ
Barqoûqa. Cf. A. Bel, Inscript. al'. de Fès, p. 131, note 2 el le plan du· L t
Orhtlieb (a).
(~) Bras secondaire du Wàdî Fùs , qui se jette dans ce dernier un peu en
amont du pont d'er-Ra~îf, après avoir traversé la partie ud-ouest de la
vieille ville, notamment les jardins où a été installé l'hôpital Auvert. Cf.
le plan du Lt Orthlieb (Oued es Souafine).
(6) Porte percée dans l e rempart sud-ou3st de la ville vieille à la sortie
du Wàdi Fâs. Cf. le plan du Lt Orlhlieb.
(7) Anonyme de Fès, ms. de Salé, fol. 3.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA 'DIENNE 135-

la Tara, à Fès-la-Vieille (1·) , es-Sâ ' I ; celui-ci s'était mis à la


tête des habitants de la ville pour en chasse!' 1& milice
turque d 'Aboû f:lassoûn, qui avait bien vite exaspéré la popu-
lation par ses rapines et ses actes de violenc e (2). Loutes ces·
preclsIons donnent au récit un aspect singulièrement
vivant; et il est, dès lors, infiniment probable que son
auteur ~ si bien renseigné sur la ville d'Idris , devait en être
lui-m ' me un habita.nt.
Quelle était la condition de cet auteur? Bien qu'il soit.,
pour l'instant, sinon pour toujours, impossible d'émettre à
ce sujet une hypothèse vérifiable, il semble - la lecture de
sonœuvre écrite dans une langue qui n.' a rien d'éléganl, ni par-
fois ln ê me de correct, suffit à le laisser croire - que l'his-
torien anonyme fnt un lettré de catégorie à peine moyenne.
Ce Fâsî écrivit-il son histoire à Fès m ême, dans une au tre
ville du Maroc ou dans une zâwiyya isolée; c'est ce que nous
ne savons pas non plus. On a vu plus haut qu'el-Ifrànl ne
cacha pas sa tristesse de voir sa ville natale, Marrâkech, ré-
duite de son temps, en faveur de Fès et de Meknès, au simple
rang de capitale secondaire. De mème, les gens de Fès, de
tout tmnps remuants et frondeurs , ne devaient pas ayoir de
sentiments différents vis-à-vis de la grande ville du Sud,
quand elle était le siège du gouvernement sa' dien. La rela-
tion anonyme ne serait-elle pas alors tout simplement
l'œuvre J'un Fâsl mécontent .? Quoi qu'il en soit, elle ne
renferme pas la moindre indication qui permette clairement
d'élucider ce point.
De même, il est assez difficile J'assigner une date pré-
cise à la composition de cette histoire mixte des Sa'diens et
de la ville de Fès. Est-elle contemporaine de la période
particulièrement troublée, pendant laquelle les derniers
princes sa' diens , la maison d 'ed-Dilâ' et le chérif <alawite
du Tâfllelt se partageaient le ~Iaroc, ou bien son a;uteur ne
l'écrivit-il que plus tard? Tout ce que l'on peut affirmer sans

(1) Nom d'une ruc et d'un quartier situés au nord-ouc t de Fàs el-Bàlî.
Cf. le plan du Lt Orlhlieb , n ° 111.
(~) Anonyme de Fès, ms. de Salé, fol. 4.
136 I .. ES HOMMES ET LES ŒUVRES

crainte de se tromper, c'est qu'elle est postérieure à 10G4


(1653-54), date de la mort du sultan ~IoQanlmed ech-Chaïkh
el-A~ghar, mentionnée par elle en dernier lieu, et anté-
rieure à 1139 (1729-30) , date probable, à quelques années
près, de la composition de la Nozhat el-J:tâclt d'el-Ifrânî, qui
l'utilisa comme source. En tout cas, il serait inlprudent de
conclure, du fait qu'elle ne mentionne pas le dernier prince
de la maison sa'dienne, Moulay AI)med el- 'Abbâs b.MoQam-
med ech-Chaïkh, pt'oclamé en 1064 et assaSSIn e cinq ans
plus tard, qu'elle remonte à l'époque exacle de ce court
règne.
De toule façon, même en la datant à trois quarts de siècle
près, on peut considérel' la chronique anonyme de Fès comme
le plus ancien des docunlents non officiels que nous poss é-
dions sur la dynastie des Chorfa Sa'diens au Maroc.

Cette relation est, comme on l'a d éjà dit, l'une des


sources principales d'el-Ifrâni, sinon celle qu'il mit le plus
fréquemment à contribution pour écrire son histoire. En
dehors du passage qu'il cite et condamne ensuite, il lui est
redevable de bien des renseignemcnls, surtout, ce qui est
curieux, de ceux qui ont trait à des événements étrangers
au Maroc, mais qui ont néanmoins produit un contre-coup
sur le pays: par exemple, le rapport de l'expédition envoyée
contre Tunis par le sultan ùe Turquie et dirigée par Sinân
Pâchâ, en 982 (1574) (1) est emprunté autant à la relation
d'ambassade d'et-Tamgroûti, en-NafaJ:tat el-nzisldyya, qu'à
l'Anonyme de Fès; de même, les intéressants détails que
donne el-Ifrânî, à ce propos, sqr la prise du Ijalq el-yVâdi
(la Goulette ).
Cependant l'auteur de la Nozha, parfois balancé entre des
renseignements fournis par l'Anonyme de Fès et d'autres
se rapportant au même sujet, fournis par des écrivains qu'il
tenait sans doute pou r plus clignes de confiance, rejette

('1) Cf. el-Ifrânî, No zhat eHtâdi, p. 60 du te te el 105-106 de la trad.


LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA<DIENNE 137

résolurnent les pren1Ïers. C'est ainsi que les deux portraits


. physiques d' A1).n1ed el-Nlan~;oûr, présentés par chacune des
histoires, offrent entre eux des q.ifférences sensibles. El-
Ifrânl fait de ce prince la peinture suivante: « D'une taille
élevée, de large carrure, les joues pleines et recouvertes
d'une teinte jaunâtre, brun, les cheveux et les yeux noirs,
il avait les dents bien plantées et les incisives fort bril-
lantes. Son visage agréable était de forme régulière, son
abord était affable, ses manières gracieuses et son maintien
élégant (1 ) ». L' aut~e portrait n'est pas moins pittoresque,
mais le premier n'en est évidemment pas inspiré: « Son
teint était brun, ses yeux, enfoncés dans leurs orbites et sa
barbe, fournie; il portait des balafres sur la joue gauche;
il était corpulent; sa voix était sonore. Il avait un défaut de
langue et prononçait la lettre clLÎn comme un sln. Il portait
de superbes vêtements qui trainaient à terre ... ; ses chevilles
étaient grêles et sa démarche, de ce fait, n'était pas assu-
rée (2). ». Et si l'on se rappelle que la relation de F ra)' Luis
Nieto représente le sultan Aboû'l-<Abbâs el-Manf}oûr « noir
de couleur, mal basty, quoy que grand, mais foible et sans
force (3) », il semble que le portrait tracé par l'Anonyme de
Fès se trouve plus près de la vél'ité que celui de la Nozlwt
el-f:tâdî.
Faut-il, en fin de compte, voir Jans ce pelit ouvl'age un
pamphlet violent de la dynastie sa <die~ne, et porter sur lui
la même appréciation qu'el-Ifràni? En prêtant an sultan
Moulay <Abd Allah el-Ghâlib billah des accointances avec
les souverains chrétiens, ce qui soulève la protestation
indignée de l'honnête historien de MarrAkech, il faut avouer
qu'il y a beaucoup de chances pour que l'Anonyme de Fès
ait fait preuve d'une certaine partialité. Car les documents
fournis par les al'chives européennes nous renseignent
d'une manière asse'z précise sur cet établissement des

(1 ) el-Ifrànî, No zhal el-l),ddî, pp. 78-79 du texte et 140 de la trad.


(2) Fol. 16 du ms. de Salé.
(3) Fray Luis Nicto , Hisloire véritable des dernières guerres advenues en
Barbarie, traduction française de 1579, apud de Castrie , Sources inéd. de
l'Hist. du Maroc, France, t. I, p. 501.
LES HOMMES ET LES ŒUVHES

troupes de Philippe II, roi d'Espagne. au Penon. de Velez


(1564) ; il n'avait d'autre but que c,e lui de mettre fin aux mé-
faits des pirates marocains et turcs en les chassant de leur
repaire le plus sùr. Quant au soi-disant ordre donné par
Moulay 'Abd Allah d'évacuer la ville de :Mazagan déjà prise
par ses troupes aux Portugais, il constitue uue erreur histo-
rique évidente, car l'on sait que, si la place ne fut pas
reprise par l'importante armée qu'envoya devant elle
en 1563 le prince sa'dien, ce ne fut pas à la faveur d'un
contre-ordre venu de la cour marocaine, mais bien grâce
à la belle résistanc qu'opposa la gat'nison portugaise à ses
assaillants (1).
De toute façon, il est certain que l'Anonyme de Fès ne
témoigne pas grande sympathie aux sultans dont il se fait
l'historien. JI perce toujours dans son récit une légère
pointe de dédain, parfois même de mépris. Il ne peut, par
exemple, se dispenser de relater l'envoi par el-Man~oûr
d:une expé'dition au Soudan; et, sans nier le gros succès
militaire qui suivi t et la richesse que la nouvelle provinc e
valut au sultan, il s'écrie, à la fin, de n1anière un peu
inattendue et mordante : « les uléma et les qà'Id "inrent
féliciter le monarque d'avoir causé le lneurtre d'innom-
brables musulmans (2) » !
C'est à lui qu'el-Ifrânî doit aussi ces curie~x renseigne-
ments sur l'organisati n de la cour de ~loulay Mal;1ammed
ech-Chaïkh, non encore habitué aux fastes de la vie prin.-
cière; mais l'auteur de la Nozha a volontairement abrégé
le récit de l'Anonyme de Fès, pour ne pas jeter trop de
ridicule sur le premier prince sa' dien (3). Ce récit ne
manque pas, en effet, de détails piquants, et même certai-
nement un peu tendancieux, sur cette étiquette de parve-
nus: « Qâsim ez-Zarhoûnî, ancien vizir des Mérinides,
montra au su ltan la façon de porter les vêtements, de

(1) Cf. ur ce siège et la prise du Penon de VeIez, de Castries, Sources


inédites de l'Ilist. du Maroc, France, t. l , notamment L, LI, LIX, LXI et
la bibliographie européenne citée dans le notes.
(2) Fol. 11 du ms. de Salé.
(3) ei-lfrânÎ, Nozhal el-J.1àdî, p. 29 du te te el 5" de la trad.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE SA t DIENNE 139

maintenir le turban sur la tête, de monter à ,cheval de ma-


nière élégante, de dégainer les sabres l' haussés d'or et
d'argent, de haranguer le peuple et les notables; il le
renseigna sur la manière de se tenir au diwân, entouré des
ulénla, des lettrés, des secrétaires et des qâ'ïd... La maî-
tresse du palais, Bent Ibn Lajjo (1), montra au personnel
domestique comment on fait cuire et on prépare les mets,
quelles devaient être les heure's des repas ct' les services
dont ceux-ci devaient se composer. Elle apprit aux femmes
du harem à s'habiller, à se padumer, à avoir des matelas
tendus de soie, à ornel' de broderies les coussins et les
manteaux (2) ».
Il ne faut d'ailleurs pas croire que la manière tendan-
cieuse s'affirme, sans 3l'rêt, tout au long de l'ouvrage. On
doit à la vérité de dire que parfois l 'historien anonyme
reconnaît aux princes qu'il étudie quelques sérieuses qua-
lités. Dans un tableau d'ensemble qu'il place à la fin de son
opuscule et où il passe rapidement en revue les règnes des
différents sultans satdiens, il ne se montre, certes, pas sou-
vent tendl'e pour eux; pourtant , il lui alTive, en déclarant,
par exemple, que la prospé rité fit place, sous tel prince, à
la disette qui ravageait le pays, de ne pas pousser à l'extr'ême
une c,'itique 'de parti pris à l'encontre de la dynastie.
Il est certain que l'historien ne cèle rien de son antipathie
innée pour les Chorfa venus du Sud-Ouest marocain; mais
il n 'est pas, pour cela, un pamphlétaire aveugle. Et, quand
bien mèllle il ne faudrait accueillir qu'avec prudence cer-
taines d es assertions qu'il a émises dans son his taire, il
n'en reste pas moins clu 'il. nous a laissé un document inté-
ressant et utilisable, et d'une importance d'autant plus

(1,) Le mot ~~.f · ne désigne pas au Maroc, comme Je croit Iloudas


(p. 55, n. 2 de sa trad.), la « devineres se n, mais bien la « maîtresse àu
harem impérial ». et dan le grandes ville, la « matrone chargée de la
surveillance des pro llluées ». Quant au masculin ~"f ' il désign e
uniquement dan les villes du Maroc le « chef de la corporalion des bou-
cher ».
(2) Fol. 4 du ms. de Salé.
140 LES HOMMES ET LES ŒUVHES

grande qu'il n'a rien de commun avec les panégyriques


grandiloquents et relativement vides d'historiographes-offi-
ciels ou officieux tels qu'el-Fichtâll et Ibn el-Qâçli, et qu'il
vient heureusement compléter la Nozhat el-I;âdt d'el-Ifrâni,
qui y a puisé lui-mème rnaintes fois (1) .

(1) On verra dans le chapiLre sui ant qu'Aboû 'l-Qâsim ez-Zayyânî, sur-
Lout connu comme historien de la dynasLie 'alawiLe, a consacré égalemenL
quelques pages de son el-Torjomân el-mo',.ib il l'hisLoire des Sa'diens.
II

LES HISTORlENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE


JUSQU'AU RÈGNE DE :\lOULAY EL-l;IASAN

Les historiens de la dynastie 'alawite, du moins ceux dont


les œuvres sont à l'heure actuelle lues au Maroc, ne sont
guère plus nombreux que les chroniqueurs de l'époque
sa'dienne. Pourtant, plus on approche de la période contem-
poraine, plus il paraîtrait normal de voie affluer, sans gros
effort de recherche, des documents historiques, qui, ne re-
montant pas très loin dans le passé, auraient dû échapper à
l'oubli et à l'abandon. Cette remarqne, qui se trouve vérifiée
pour quelques-uns de ces documents, ne l'est pas pOUl' les
autres. On arrive bien à découvrir çà et là de minces col-
lections de pièces d'archives, heueeusement sauvées par
quelques savants indigènes; mais, parallèlement, les ou-
vrages d'histoire suivie, rnême ceux qui ont trait à des faits
à peine antérieurs à la fin du XIVe siècle de l'Hégire conti-
nuent à faire à peu près totalement défaut. Il est probable,
d'ailleurs, qu'ils ne furent jamais très nombreux. Les com-
pilateurs marocains nl0dernes, comme en-Nâ!?iri par
exemple, viennent eux-mêmes confirmer cette hypothèse.
L'énumération de leurs sources, qui fournit d'habitude une
précieuse base d'enquête bibliographique, se réduit, dès
qu'ils abordent la dynastie 'alawite, à infiniment peu de
chose. D'où il faut nécessairement conclure à l'inexistence
presque absolue d'ouvrages historiques, produits au cours
des deux derniers siècles, et non pas à leur perte définitive
ou à leur rareté présente.
142 LES HOMMES ET LES ŒUYRES

On a vu qu'el-lfrAni avait - et encore brièvement


donné un aperçu des règnes des trois premiers sultans
<alawites : c'est pourtant le seul écrivain marocain de son
époque qui leur ait consacré un fragment d'histoire. Il
faut attendre, après lui, jusqu'à la fin du XII e siècle de
l'Hégire (1786 de J.-C. ), pour découvrir des chroniques se
rapportant aux princes de la famille chérifienne venue du
Tâfilelt. D'ailleurs, pour la période imm.édiatement anté-
rieLlre~ on n'a pas besoin d'aller chercher en dehors des
événements eux-mêmes les causes de ce manque absolu
d'activité historique: les années qui s'étendent entre la
mort de Moulay Ismâ<II (1139/ 1727) et de l'avènement de son
petit-fils Sidi Mol)ammed ben <Abd Allah fur.ent certaine-
ment trop troublées pour .engager des historiens à en fixer'
le souvenir dans leurs ouvrages (1 ).
Quoi qu'il en soit, il n'y a au total, du début du
XVIIIe siècle à la fin du XIX e , que deux savants marocains qui
aient pris la peine d'écrire l'histoire de leur pays. Ils sont
contemporains He la plupart des faits qu'ils consignent. L'un
et l'autre sont attachés au Makhzen et promettent, à ce titre,
d'être bien renseignés. Il est notable enfin que, comme
l'auteur de la 'Noz hat el-l:tâdî, ils soient d'origine berbèl'e.
Ce sont les secrétaires d'Etat Aboû'l-Qâsim ez-Zayyânl et
Mo}:lammed Akensoûs. En dehors des chroniques qu'ils nous
ont laissées, on ne trouvera, jusqu'au règne de Moulay
'e l-Basan, qu'une ébauche historique, et encore anonyme et
demeurée inachevée; et un pamphlet, œuvre de Mol)anlmed
eÇl.-I)o<ayyif.

LE MINISTRE HISTORIEN ABOÛ~L-QÂSIM EZ-ZAYYÂNÎ (2) .

.Ez-Zayyâni, comme,ministre et.comme historien, est à peu


près ignoré aujourd'hui au Maroc. Aucune de ses œuvres

(1) Contra Brockelmann, Arab. litt., t. II,,p. 455. Cf. supra.


(2) BIBLIOGRAPHIE. - En-Nâ~irî, Istiq~â, t. IV, pp. 33, 108-109, 11.3,11.6-
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE ' ALAWITE 143

n'a été lithographiée ou im primée à Fès, et fort rares en sont


les exemplaires nlanuscrits. Le dictionnaire des célébrités
de Fès, d'el-Kattànl, d'ordinaire si détaillé, ne lui consacre
qu'une notice insignifiante. Quand on parle de lui aux quel-
ques lettrés marocains qui essaient de se spécialiser dans
'les études historiques, ils ne 'peuvent s'empêcher d 'es-
quisser un s'Ourire ou une marque de dédain; et si l'on velU
savoir la cause de ce mépris à peine déguisé, ils finissent
par déclarer qu 'il n 'y eut jamais au Maroc d 1écrivain aussi
« stupide» (safîh ) (1), et que la littérature nationale n 'a pas
précisément à s'enorgueillir de ses productions.

118, 132; el-Kattânî, Salwat el-anfâs, l, p . 263; 10J:lammed es-Sâ'ïl}., el-.A1on-


takhabdt el-'abqarîyya, p. 100; Houdas, Introduction au Maroc de 1631 à
1812; Budgett Meakin, The Moorish lEmpire, p. 5'18; G. Salmon, Un voya-
fleur marocain à la fin du XV111 e siècle, la Ri~da d'az-Zyâny, in Archives
marocaines, II , 1905, pp. 330-340; A. Graulle, le Boustân adh-dharif d'az-
. Ziydnî, in Revue du Monde musulman, t. XXIV, pp. 311-317; Brockelmann,
Ar. litt., II, p. 507; Huart, Litt. ar., p. 423.
Tradu ctions françaises de l'œ uvre d'ez-Zayyânî : O. Houdas, le Maroc de
1631 à 1812, extrait de . l'ouvrage intitulé: Ettordjemdn el-mo'a1'ib 'an
douel elmachriq ou'lmaghrib (avec .texte arabe), Paris, 1886. - Coufourier
a traduit dans les Arch. ma!'., t. "\ I, 19D6, la partie de la Ri~tla d'ez-Zayyânî
qui contient la descriplion du Maroc, sous le tilre : Une description géo-
graphique du Maroc d'Az-Zyâny, pp. 436-456, el Salmon a extrait du même
ouvrage, ibid., pp. 457-460, une Liste de 'Villes marocaines.
Boudas s'est servi, pour fl'établissemertt du texlede son édition partielle
du Torjomân, de deux manu crits provenant de Tlemcen 'et d'Oran. Le
collaborateurs des Arch. mar. ont utilisé un manuscrit de la Ril:tla exis-
tant à el-Qa~r. Cf. G. Salmon, Quelques manuscrits rencontrés à el-Qçar, in
Arch. mal'. , II, p. 356. - ous sommes redevables à Si Ben 'Ali ed-Dok-
kàlî de la communicàtion des manuscrÏls salétin de la T(jrjomâna et du
Torjomân. Si Mol).ammed ben <Abd Allah el-Marrâkochî, ex-premier se-
crétaire d'ambassade du Maroc à Paris, el premier secrétaire du vizirat
de l'enseign~ment a, également, bien voulu noùs confier son exemplaire
de.la Tol'jomdna, copié il : a une dizaine d'années, à Marrâkech. Enfin,
pendant un court séjour à Fès, en mars '1921, nous avons pu obtenir
de Si AJ:lmed Ibn el-Ma wwâz, anei.en ambassadeur du Maroc à Madrid
et membre du Conseil supérieur des Uléma, la communication, pendant
une seule nuit, œl:ln manuscIrit du IBostdn, revu pal'.ez-Zayyânî lui-même.
(-1) Son contemporain, MoJ:lammed Akensoûs, le traitait déjà, dans son
Jaïch, à de très nombreuses ropri.se , de , Jj~ , « sol» 'ou « ignare ».
144 LES ·nOMMES ET LES ŒUVRES

C'est qu'en effet, il s'en faut de beaucoup qu'ez-Zayyâni


ressemble aux docteurs marocains de son temps, ou même à
ceux d'aujourd'hui. Il a rompu, sans craindre les médisances
de ses contemporains, avec les implacables lois de la tradi-
tion marocaine. A côté de l'existence figée de tous ces uléma
de Fès, de Rabat ou de l\Iarrâkech, qui n'agissent qu'avec
prudence et circonspection et sont à peu près tous, par
métier, foncièrement hypocrites, la suite invraisemblable de
ses mésaventures, qu'il dut, pour une bonne part, à sa fran-
chise et à sa lib erté de langage, donne à sa figure un relief
saisissant. C'est un tout autre homme à qui, vraiment, l'on a
affaire. « Je ne suis pas un chérif, s'écrie-t-il, un jour, en
réponse à une question du grand-vizir ottoman, mais un
berbère élevé à la ville (1 ) ! » Quel savant marocain aurait
osé avouer et proclamer ainsi sa roture de simple autoch-
tone? Il connaît son pays à merveille; malgré son effronterie,
on le juge indispensable au makhzen des sultans. Lui, se
sentant fort de ses qualités d'homme d'état, crie bien haut
que le plus grand malheur de sa vie a été d'accepter pour
la première fois une fonction publique. Pendant les courLes
péJ'iodes où il est en disgrâce, et en attendant qu'on le rap-
p elle à sa charge, ce qui ne tarde jamais, il écrit des chro-
niques ou s'occupe ll'alchimie. La littérature islâmique l'in-
téresse tout juste. C' es t enfin un voyageur infatigable, e t
ses voyages lui ont révélé qu'il existe une Europe et d'autL'es
pays que le Maroc.
Autant de raisons pour qu'il ait été et soit demeuré anti-
puthique aux uléma engourdis et poncifs, indignés de sa
rudesse et jaloux de ses hautes fonctions. Autant de raisons
aussi pour qu'à un autre titre, nous espérions trouver dans
ses œuvres historiques quelque reflet de son originalité et de
son franc-parler. .
Dans l'introduction qu'il a placée en t ête de son Afaroc de
1631 à 181.2 , :M. Houdas a fourni quelques renseignements
sur la biographie d'ez-Zayyânî. Plus tard, G. Salmon les a
complétés à l'aide de détails empruntés à la ri?da de l'his~o-

(1) el-Torjomân el-mo<rib, ms. de Salé, fol. 2.


LES HISTORIENS DE LA DYNA.STIE < ALA. WITE 145

rien car ce dernier a donné dans tous ses ouvrages des


indications souvent très précises sur sa vie. Elle vaut qu'on
s'attarde un peu à en narrer, à l'aide de documents nou-
veaux, les péripéties mouvenlentées, aussi bien à cause de la
curieuse personnalité de l'écrivain que des renseignements
qu'on y trouve m êlés sur l'organisation du Makhzen ma-
rocain à la fin du XVIIIe siècle.

Aboû'l-Qâsi m (1) ben Al.lmed ben <AH ben Ibrâhîm ez-


Zayyâni (2) naquit à Fès n 1147 (3 juin 1734 - 23 mai 1735).
Comme l'indique son ethnique, il était originaire de la
grande tribu berbère du Maroc central, les Zayyân , 0'1 son
grand-père <Ali ben Ibrâhinl, qui fut un jurisconsulte t un
généalogiste de valeur (3), habitait la zâwîyya d'Ara, ;go,
près d'Adekhsân (4). A son retour du voyage qu'il fit ~ uez
les Zayyân en 1100 (1689), le sultan Moulay Ismâ<ïl ram na
à 'M eknès ce savant, qui devint son imâm et mourut d s

(1 ) Belqâsem, dans la langue courante. Ez-Zayyânl orthographiait l

mème on nom r-~'


(2) En- à~irî, dans son Kilâb el-isLiq~â, orthographie toujours : e~-~ay-

yânÎ, el il explique, IV, p. 108: .1.ill ~.\j 6Jr~J\ ~l.aJl! <.S;~l\


~j~ ~.\} ~ .1~: « e~-~ayyânî, avec un ~âd à prononciation voisine du
zâï, comme le mol ~irât, suivant la lecture de J:lamza. )) Celle remarque
de l'hi tol'Ïen de Salé est ab olument fantaisi te; d'ailleurs, l' e~emple
qu'il donne ne s'applique guère à l'anomalie qu'il veut expliquer, car la
lecture ~iràt pour siràt n'e t qu'une particu.larité du dialecte de QoraLch.
Cf. Qor'ân, s. l , v. 5, commentaire d'el-Baïçlàwl, éd. Fleischer, l, p. 9.
Fumey , dans sa traduction de l' Istiq~â, transcrit de son côté: EHayâni.
(3) Ce ful lui qui en eigna, dans sa zâwlyya, le sept lectures du Qor'àn
à AboLL' li el-J:lasan el-loùsî, l'auteur des Mol',làcfaràt.
(4) Aroggo est un village avec une zàwîyya situé à petite distance au
sud-e l de KhQnaïfra (f henifra ). Adekhsân, ancien centre de la tribu
de Zayyân, dont l'importance est déjà attestée par Léon l'Africain
(Adacsan ), n'est plu, à l 'heure actuelle , qu'une position stratégique
à '12 kilomètre.s de Khonaïfra. Cf. Pillant, Noles conlribulives à ~'élllde de
la Confédération Zaian, in Archives berbères, '1919-'1920, pp. H4-H5 et H2.
10
146 I.ES HOMMES El' LES ŒUVRES

cette ville la même année que lui (1139) (1). Son fils AIJmed
alla alors s'installer à Fès, où le futur histol'ien devait naitre
huit ans plus tard.
Ez-Zayyânl nous a laissé sa généalogie qui, d'apr~s son
grand-pèl'e, relllontel'ait à $anhàj, l'ancêtl'e des tl'ibus $an-
hàja, pal' Zayyàn, l'ancètre éponyme de la tribu elle-même,
par Amâloù, père cl e Zayyà Il (2 ) et par el- Iasa <, qui se serait
converti à l'lslàm sous le règne du khalife omaïnde \Abd el-
Malik ben Marwân ( VIlle siècle J.-C. ). (3). Il cite comme
garant de cette ascendance le grand généalogiste berbp.re
Sùbiq hen SolaïCllàn el-.\latmàti (4).
Aboù'l-Qàsim fit à Fès de bonnes études musulmanes,
qu'il termina en 1169 · ('l785). Il avait aloc's vingt- trois
ans (5). Il a vait sui vi des cours dans les mos eruées d'el-
Qarawiyin et d'el-Andalos et fréquenté les deux médersas
d'ei?-$ahrij et d' el-' Attârin. Ses principà ux ma îtres furent
cJ'abord le Iltlib A~lIne(1 ben et-Tàhir ech-Chargi, puis le
biogl'aphe ~101).ammed b. et-TaY'yib el-Qàdiri, 'Abd el-Qâdir
Boùkhri~ (6), Mol).ammed Bennânl (7), et SUI'tOut le fameux

(1 ) Cf. el-Torjomdnat el-kobrâ, m . de Salé, et


p.33.
en-Nù~iri, Isliq$d, IV,

(2) Cette filiation est curieuse. Car, si l es A ït Amàloù ne sont aujour-


d'hui qu'ulle tribu de la confédération Zayyàn , il apparaiL très probable
que ce nom générique d'AH Amùloû (les fils de l 'ombre ) fut , à l'origine,
celui d'une grande confédération englobant elle-mème les Zayyùn (ou
lzayan).
(3) La généalogie e t donnée f.out au long par G. Salmon, op. cil., p. 331.
(4) Sàbiq ben Solaïmùn ben fJarràlh b en Doùnàs el-Ma~m(:iV, le grand
généalogiste berbère qui a servi de Source à Ibn Khaldoùn el sur lequel
cl'. R. Basset, les Genéalogisles berbères, in Arch. berb ., vol. l, année 19B,
fasc. 2, p. 7 sqq.
(5) Cf. supra, p. tG.
(6 ) Aboû J\lo~lammed 'Abd el-Qàdir b en el-'Arbî Boùkhr15 , né vers 1118
(1706-1707), mort à Fès en -1188 (1774-'177 5). Qàc;li de Fès pendant trenle-
quatre ans, il fut révoqué à la fin de sa vie par le sultan Sidi 1ol)ammed
ben 'Abd Allah. Cf. el-Kattànî, Salwal ei-aT/jds, [f , p. '12.
(7) i'lIol).ammed b en el-r:Iùjj el-/;Iasan ben Mas'oùd Bennâni', né en 1133
(1ï20-1721) , savant jurisconsulte, imùm et prédicateur, connu surtout au
Maroc par la glo e qu'il écrivit surle commentaire du Mokhla$ar de Kha_
li! par 'Abd el-B<1qî e:t.-Zorqànî et qu 'il intilula el-Fat~~ er-rabbdlii ji-md
LES Hl TOIUENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE 147

jurisconsulte Aboû l:laf~ 'Omar el-Fâsl (1), aux leçons duquel


se prèssaient des uléma déjà connus, comme 'Abd es-Salâm
Bassin, el-' Arbi el-Qosantlni, IVlol)ammed Sal)noûn (2), el-
Walid el-'If'à(li (3), lal)ià ech-Chafchâwani (4), Mal)ammed
el-Howwàel (5) et Mol)ammed ben 'Abd es-Salâm el-Fâsi (6).
Sous le règne du su ltan :M oulay 'Abd Allah, l'anné e où ses
études prirent fin, ez-Zayyânl accompagna son père et Ha
mère, qui a\'aient résolu d'accomplie le pèlerinage; il était
leur fils ' unique et ils voulaient se fixer avec lui définitive-
ment à Médine, ( pas seulement dans un hut de piété, mais
aussi ponr quilter ce :M aroc où les gens avaient par trop
changé ». Aussi, les deux maisons et la bibliothèque du
père de l'historien furent-elles vendues. Ils se rendirent
tout d'abord au Qaire, po'ur se joindre à la caravane des pè-

dhahal minho ez-Zorqdnî. Il mourut à Fès le 30 rab;' II '1194 (4 mai 1180).


Cf. el-KallànÎ, Salwal el-anfds, l, pp. 161-160; en-Nù~irî, Istiq~â, JV,
p. 129; Brockelmann, Arab. lill., IJ, p. 84; R. Basset, Rech. bibl., p.19,
nO 41.
(1 ) Aboû l,l afs 'Omar ben 'Abd Allah cl-Fùsl, de la grande famille de
Fâslyln, savant réputé qui forma de nombreux élèvcs et mourul à Fès le
29 rajab 1188 (6 octobre 1714). Cf. el-Kattùnî, Salwal el-anfds, l, p. 331.
(2) Nous n'avons trouvé aucun renseignement sur cc irois pel' onnage .
Les deux premicrs, 'Abd es-Salâm ben cl-Khayyâ~ ~lassln el el-'Arbi ben
'Ali cl-Qos'all\lnî sont cités par cl-Katlànî (Salwat el-anfds, I, p. 338),
comme disciples de 'Omar el-FàsJ.
(3) EI-vValJd ben A.boû'l-Qâsim ben Mol:tammed el-'Arbî el-'Jràqî, chérif
l:tosaïnile mort il Fès en JI86 (1112-1713 ). Cf. cl-I\.allùni, Salwal el-anfas, 1,
p. 223.
(4) Aboù Zat ariyà' Ial).ià ben e L-J[ahdi ech-Chafchàwanî, chérif iddsile,
né en 1153 (1 ï40-1741). Savanl omniscient, il ful pendant trenLe ans pré-
dicaleur et imâm à la mosquéc du sanclua irc d'Jdris à Fès et mourut le
20 dhoû'l-!).ijja J 228 ou 1'229 1,14 décembre 1813 ou 4 décembre 1814). Cf.
el-KaLLànî, Salwal el-anfds, 1, p. 95.
(5) Mal).ammed ben Tàhir el-Howwâri, jurisconsulte et logicien, qâ~1 de
Fè à partir de cha'bân H95 (juillet-août 118i), mort dans celle ville le
amedi 20 moQ.arram 1220 (20 avril 1805). Cf. el-Katlànî, Salwal el-anfâs ,
1, p. 308.
(6) Mol).ammcd ben 'Abd es-Salàm ben Mal:tammed el-Fàsî, savant, ju-
riste et grammairien, né à Fès vers 1130 ('1118), mort dans celte ville le
12 rajab 1214 (10 décembre 1199). Cf. el-Kallùnî, Salwal el-anfds, Il,
p.318.
148 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

lerins égyptiens; mais, au lieu de gagner avec elle le I:Iijâz


par voie de terre, ils préférèrent s'ernbarquer sur la mer
Rouge pour l'Arabie en louant un bateau. Le voyage était
moins fatigant et fournissait en même temps l'occasion de
faire une opération commerciale qui pouvait être fruc-
tueuse. Ils achetèrent, en effet, avec tout l'argent dont ils
disposaient, différentes marchandises qu'ils firent trans-
porter du Qaire j llSq u'à Suez sur des chameaux de location.
Mais la malchance devait déjà commencer à s'abattre sur ez-
Zayyânî : au cours de la traversée allait se produire la pre-
mière des sept {( calamités » (nakabât) qui le frappèrent
durant sa vie. Arrivé en vue de Ianboû<'~ le vaisseau qui
transportait les pèlerins trafiquants se brisa sur des récifs,
et la cargaison fut perdue: passagers et équipage échappè-
rent à la mort. Et la famille marocaine débarqua sur le sol
arabe dans le plus complet dénuement. Heureusement , la
mère d'ez-Zay'yânî avait, dans sa ceinture, cousu trois cents
pièces d'or pour parer à une mésaventure toujours possible
dans un voyage aussi lointain. Elle les remit à son mari, qui
loua des montures pour gagner Djedda et la Mekke, et tous
trois s'en allèrent faire leur pèlerin ':!ge. Puis, ils con tinuè-
rent sur Médine avec la caravane égyptienne et visit":' rent le
tombeau du Prophète (1).
Mais, avec des ressources aussi peécaires, ils ne pouvaient
plus songer à s'installer dans la ville sainte. Il fallut donc
rentrer au Maroc. Ce ne fut pas sans peine. AprèS' avoir,
avec la somme qui leur restait, acheté des provisions de
route, ils regagnèrent lentement l'Égypte, par la voie de
terre, avec la caravane des pèlerins de ce pays. Arrivés au
Qaire, ils purent se procurer quelque argent, qui leu.I' permit
de se reposer un peu avant de se .remettre en route. Au lieu
de fréquenter, pendant ce' temps, les nombreuses écoles du

(1) G. Salmon, op. cit., p. 334, traduit: « ... où ils visitèret1t les tom-
beaux du Prophèle, d'Amîna el de tous les pieux musulmans qui avaient
désiré être enseveli auprè d'eux.» Le texte arabe d'ez-Zayyânî dit:
"'~\ J J .>-.JJ <\.U\ '-?,-: <\.! _i ~.)jJ el ne parle pas du tout du tombeau
d'Amina.
LES IHSTORIEr S DE LA. DYNASTIE ·AI....\.WITE 149

Qaire où l'on pr'ofessait la science islâmique, Aboû'l-Qâsim


ez-Zayyâni ne trouva rien de nlieux que « d'apprendre l'al-
chimie et la divination et de rechercher les particularités
des métaux et des pierres ».
Près de deux ans avaient déjà passé depuis leur départ de
Fès. Au moment où ils allaient reprendre leur voyage, ils
apprirent la mort du sultan marocain Moulay 'Abd Allah et
l'avènement de son fils Si di ~Iol).ammed. A-Alexandrie, au-
cun bateau ne levait l'ancre; la pirateriè battait son plein et,
d'autre part, les Anglais se trouvaient en guerre contre les
Français et les Espagnols (1). Ils finirent cependant par
s'embarquer sur un vaisseau français en partance pour
Li vourne (2). Ils arrivèrent dans cette ville et y restèrent
quatre mois dans l'attente d'une nouvelle occasion de dé-
part, et, désespérant d'en trouver, ils finirent par décider de
regagner le Maroc par terre, jusqu'au délroit de Gibraltar,
en longeant les côtes méditerranéennes de France et d'Es-
pagne. Ils passèrent ainsi à Marseille et à Barcelone, espé-
rant voir bientôt la fin de leur odyssée. Mais, décidément,
ils jouaient de malheur! A Barcelone, ils apprirent que les
Français assiégeaient Gibralt.ar (3), et qu'il était impossible
de traverser le détroit. Il leur fallut attendre que le blocus
fut levé pour pouvoir se diriger sur le port et, de là, gagner
Tétouan. Ils arrivèrent enfin à Fès, n'ayant sur eux qu'une
somme de sept mithqcîl (4).
Aussitôt dans sa ville natale, Aboù'l-Qâsim ez.Zayyânî
alla visiter ses anciens compagnons d'études. Combien son

(1) Il s'agit de la guerre dite de Sept an , qui se termina le 10 février


1763 par la signature du ti'ailé de Paris.
(2) G. Salmon, op. cil ., traduit à tort par « Gènes ».
(3) 11 s'agit de l'un des ièges que Gibraltar, devenue pos ession an-
glai e depuis 1704, eul à soulenir, dans la econde moitié du XVlll e siècle
contre le Français et les Espagnols, et donlle plus long fut celui de 1779-
1783.
(4) A cette époque, le mithqâl d'argent pesait, au Maroc, 28 grammes et
valait 960 floùs, soit environ la valeur repré entée aujourd'hui par 4 réaux
(20 francs). Le milhqâl e t devenu au Maroc une monnaie fictive, d'une
valeur appro imative d'un demi-réaL. Cf. Mas ignon, le Maroc dans les
premières années du XVIe siècle, p. 102.
150 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

voyage si mouvementé avait d CL le rendre diffé rent de ces


étudiants, qu'il retrouva, pour la plupart, attachés au makh-
zen du nouveau sultan Sidi Mol).ammed ben 'Abd Allah!
Toutefois, pour ne pas être taxé d'infériorité par ses anciens
condisciples (1), il sollicita immédiatement un poste de se-
crétaire, qui lui fut accordé. Le père du nouveau fonc-
tionnaire, qui avait p['obablement souffert d'une disgrâce
sous le règne précédent, essaya par tous les n10yens de
dissuader son fils d'entrer dans la carrière administrative.
Ez-Zayyâni. ne l'écouta pas. « Combien, avoue-t-il, devais-je
le regretter plus tard! »
Ses débuts furent assez obscurs. l. . a tâche de secrétaire
impérial au Maroc n'a pas varié depuis bien longtemps. Le
kâtib doit tous les jours, nlatin et soir, sauf le jeudi et le
vendredi, se présenter au palais. Il y rédige, ou plus sou-
vent, il y copie, s'il a une belle écriture, les lettres adressées
aux gouverneurs des villes et des tribus, les rescrits chéri-
fiens et les circulaires. Il n'y a pas là de quoi l 'occ uper
sans arrêt : aussi bien, le J\lIakh~en marocain est-il le plus
beau foyer d 'intrigues et de médisance que l'on puisse ima-
giner. Toujours à l'affût de la. moindre inadvertance de leurs
collègues, pl'êts à se dénoncer mutuellement pour le plus
petit manquement à la règle établie, les fonctionnaires des
sultans n 'ont pas peu contribué, depuis des siècles, à en'tre-
tenir dans l'empire l'anarchie et le désordre; les sou verains
sont rares, qui ont pu mettre un frein à leurs agissements
et échapper, en quelque sorte, à leur tutelle de tous les ins-
tants. Ez-Zayyâni., qui, dans ce milieu, arri vait presque en
intrus, après un long séjour à l'étranger, avec des connais-
sances nouvelles et un esprit élargi, fut assez habile pour se
maintenir en place et faire reconnaître bientôt ses qualités.

(1 ) Ez-Zayyânî donne les noms de tous ces secrétaires. Ce sout: Al:).med


ben Nâ~ir el-Ghîyyâthî; AQ.med ben el-Mahdi el-Ghazzàl, qui devait, plus
Lard, aller en ambassade en Espagne et écrire une relation de son voyage;
Al:).med Ibnel-Wannân, l 'au teur du poème célèbre au Maroc etconnu sous le
nom d'ech-Chamaqmaqîyya (imprimé à Rabat, 1333 II.) ; MoJ:lammed Skî-
rej (ou Sokaïrej); AJ:l.med ben 'O thmân el-Miknâsî; MoQ.ammed ben ech-
Châhid; Sa'ïd ech-ChlîJ:l el-Jazoûlî.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE < ALAWITE 151

Il semble qu'on profita de sa pratique des choses et des


gens du 'M aroc central pour le charger, à la cour, de s'occu-
per spécialenlent de cette région. Il est fort probable, au
reste, qu'ez-Zayyânî co 111 prenait et parlait le berbère (1) . Et,
lorsque, en 1187 (1773) , les AH Amâloû, dont il était origi-
naire, se soulevèrent une fois de plus contre l'autorité du
sultan, il arriva naturellement qu'on le rendit responsable
de la révolte. En effet, le qâ':id qu'on avait envoyé à la tête
de la tribu, Aboû'l-Qâsim ez-Zammoûri, se vit repoussé pal'
elle et il écrivit au sultan, en accusant ez-Zayyânî d'être
cause de cet accueil hostile. Hien ne dit, d'ailleurs, que le
malheureux qâ'ïd, impuissant à faire reconnaitre son autorité
sur ses farouches administrés, n'ait pas été victime d'un
complot ourdi par le secrétaire. Toujours est-il que ce der-
nier fut, dès lors, teuu à l'écart par ie sultan Sidi Mol).ammed
ben <Abd Allah, « au point que, chaque jour, il craignait
qu'il ne le fit mettre à mort (3) ». Il fallut sévir contre les
AH Amâloû; une expédition, à laquelle put se joindre ez-
Zayyânî, fut entreprise, et le sultan alla camper auprès de la
qai:?ba d'Adekhsân, en plein pays Zayyân. Notre personnage
avait une belle occasion de se mettre en vedetle. Il ne la
laissa pas échapper. Il démontra au sultan que le qâ\d ez-
Zanlmoûrî ignorait tout de son territoire, que les troupes
qu'il commandait allaient tomber- dans un guet-apens, et il
offrit d'arranger les choses qui, immédiatement, tourn èrent
au mieux. Enchanté. le sultan accorda toute son estime à ez-
Zayyâni : ce dernier vit ainsi sa « seconde calamité » se
terminer d'une façon qu'il n'osait espérer (3)_
Dès lors, tout change pour lui. Sidi Mol~ammed ben <Abd
Allah lui donne le pas sur ses collègues, et c'est à partir de
ce moment que le secrétaire, se révélant comme un précieux
auxiliaire, va jouer au :Maroc un rôle politique de plus en

(1) Quand, dans l'un de ses ouvrages, il ci le un mot berbère, ez-Zayyânî


ne manque jamais d 'e n donner la traducLion arabe.
(2) Cf. cz-Zayyâni, et-To/"jomân el-mo<rib, éd. et lrad. Houdas, pp. 89 ==
146 et en-N à~iri, Istiq~â, IV, p. 103.
(3 Cf. le récit détaillé de cel te expédition, extrait du Bostân d 'cz-Zay-
yânî, dans en-Nà~irî, Istiq~à, IV, pp. 108-109.
152
LES nOMMES ET LES ŒUVRES

plus brillant. Il devient le négociateur attitré avec tous les


Berbères révoltés.
Nous le voyons ainsi, dans la seule année 1198 (1783-84),
accompagner au printemps le sultan à i\logador (1), puis au
Tàfilelt, où le prétendant l\loulay el-Ijasan ben Ismà'II,
oncle du sultan régnant, avait proclamé son indépendance.
C'est à ez-Zayyânl qu'est confié le soin d 'entrer en pourpar-
lers avec les Berbères des q~oûr, puis avec l'agitateur lui-
même. II accomplit sa mission, accom pagne el-I-jasan à
Meknès, puis, sans arrêt, retourne à Sijilmâsa avec les trois
fils du sultan: Solalmàn, el-Ijasan et el-Ijosa'in, et en emme-
nant des canons, des mortiers et des bombardes trainés par
une troupe d'arlilleurs renégats allemands, sous l'escorte
d'un millier de soldats des ports (2). Il ne connait plus de
.repos. Quelque temps après, il est chargé par le sultan
d'aller, dans le Gharb, lever un contingent n1ilitaire (3).
En 1200 (1786)., Sidi l\Iol).ammed ben 'Abd Allah lui confia
une mission bien plus importante encore. II l'envoya, en
ambassade, porter des lettres et des cadeaux au sultan de
Constantinople ' Abd el-Ijamid ' (4) et raccompagner un
envoyé turc qui é tait venu au l\faroc dans un but analogue.
Tous deux allèrent s 'embarque!' à ~t\Iogador Sur un voilier
.qui les déposa à l\Ialaga et, de ce port, ils continu.èrent sur
la Turquie.
C'était le second voyage d'ez-Zayyâni hors du Maroc; lui-
même en a laissé un récit détaillé à l'extrême. Nous ne re-
tiendrons de sa relation que quelques faits. Une fois de plus,
l'amhassadeur marocain continuait à n'avoir pas de chance
sur mer. Les voyageurs eurent à souffrir d'une tempête si
violente qu'un mât du vaisseau se brisa. Ils durent mettre le
cap Sur Tunis, afin d'y faire procéder aux réparations néces-
saires; dans cette ville, ez-Zayyânî fut l'hôte, pendant dix

( f) Isliq$â. , IV, p. 114.


(2) Ibid., IV, p. 113.
(3) Ibid., IV, p.1/4.
(4) Il s 'agit de 'Abd el-T.1 a mîd, fils d'Al,1med fU, qui régna de 1774 à 1789,
et ur lequel, cf. notamment l' article de 1 . Süssheim, dans l'EnCYClopédie
de l'Islâm, l, pp. 40-41.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE tALA WITE 153

jours, du bey f:lammoCLda (1782-1814.). Puis ils continuèrent


leur route et pénétrèrent enfin dans la mer Egée. C'est
alors que se produisit un incident entre ez-Zayyânl et l'am-
bassadeur ottoman qui s'appelait lbl'àhim Efendi. Ce der-
nier, voyant qu'ils étaient arrivés en vue des premières
côtes turques, devint subitement grossier et insulta le sulLan
Bt l'empire du :M aroc. Ez-Zayyâni, furieLlx, « le prit par la
barbe et l'aurait ce rtainement égorgé s'il n'en avait pas été
empèché par le capitaine du vaisseau ».
Enfin, après diverses autres péripéties, ez-Zayyàni arrive
à Constantinople. On hisse aussitôt dans le port le pavillon
.des ambassadeurs et il est attendu au débarcadère par quatre
autres envoyés du Maroc qui n'avaient pas encore rejoint
leur pays: Moulay ' Abd el-l\Ialik ben Idris, neveu et gendre
du sultan; NIol,lamnled ben ' Othmân el-~1iknâsî; ' Omar
Loùzireq et ' Abd el-Karlm ben Ial:tiâ ·(1). On prépare une
maison pour le ministre marocain, on envoie des chevaux
pour lui et sa suite et des charrettes pour ses bagages . Pen-
dant trois jours, l'agha introducteur des ambassadeurs le
met au courant du prolocole de la cour ottomane. Bref, ez-
Zayyâni est traité avec les plus grands honneurs et il est
e_ trêmenlent curieux et amusant de voir combien ce Ber-
bère de souche obscure s'étend complaisamment, dans sa
relation de voyage, sur les égards qu'on lui témoigne.
Nous ne suivrons pas ez-Zayyànî, bien qu'il nous en ait
donné le moyen, dans toutes les vi&ites et toutes les prome-
nades qu'on lui fait faire dans la capitale turque. Disons
simplement qu'il est reçu tour à tour par le grand-vizir
Ioûsof Pâchâ et par le chef des secrétaires; qu'on l'emmène
voir l es hôtels de la Monnaie et du Trésor, les mosquées et

(1 ) Ces personnages avaient été envoyé, l'année précédente ('1199 =


178a), par le ultan du Maroc, porler des pré enls aux habitant de la
Mekke et de Médine, et d ' autre de tinés aux gens du ljijâz, de l'Iaman,
de la Syrie, de l'Égypte et du 'Irùq; celle députation attendail à Con taJl-
tinople le départ de la caravane tu l'que pour le lieux du pèlerinage. Une
partie des pré cnls qu'elle apportait devait êlre soustraite, à la i\Iekke, par
le fils du sultan marocain, Moulay el-Iazid. Cf. ez-Zayyâni, et-Toljomdlt el-
mo'rib, éd. et trad. Houdas, pp. 84 = 154 et en-Nâ~iri, Istiq$â, 1V, p. 115.
154 LES nOMMES ET LES ŒUVHES

les médersas, les bibliothèques; où il n'est pas peu surpris


de voir des copistes travailler sans discontinuer. L'ambas-
sadeur maroc.a in est tout yeux et tout oreilles. Il s'enquiert
de tout et prend des notes qu'il utilisera quand il composera
ses ouYrages. Il rencontre, sur une rive du Bosphore, un
cul-de-jatte qu'il compare irrévérencîeusement à une outre
percée et s'étonne de l'entendre réciter tour à tour des vers
turcs, arabes et persans. Il consacre ses loisirs à acbeter des
livees qui enrichiront la bibliothèque de son souverain.
Cependant, il n'est pas reçu tout de suite par le sultan otLo-
man, car il doit - c'est toujours lui <lui nous l'apprend -
attendre le prochain dtwctn, pendant lequel, seulement, les
ambassadeurs peuvent obtenir une a udience du monarque,
et qui ne se réunit que tous les trois nlois et à l'occasion des
trois grandes fêtes musulmanes. Mais, privilège enviable,
ez-Zayyàni est appel-é au palais avant la date fixée, car <Abd
el-f:Iamid veut savoit' si le chérif marocain pourra lui prêter
de l'argent. L'impératrice de Russie Catherine II venait, en
effet, de déclarer la guerre à la Sublime-Porte, et les res-
sources du trésor de cette dernière ne devaient pas être
considérables. Ez-Zayyàni répondit fort habilement au sou-
verain turc: « Pour la guerre sainte, ce n'est pas un emprunt
que le sultan du Maroc consentira à la Turquie, mais, au
contrail'e, il lui enverra, sans exiger en retour une promesse
de restitution, des sonlmes importantes. »
Le ministre marocain passa cent jours à Constantinople,
au bout desquels il prit le chemin du retour, nccompagné,
cette fois encore, d'un nouvel ambassadeur ottoman. Débar-
qué à Tanger, ez-Zayyâni s'en alla, sans tarder, rendre
compte au sultan de sa mission et fut très fier de lui
remettre une lettre du G rand Turc, d ans laquelle il était dit:
« Nous avons déjà reçu de Votre Auguste Seigneurie vingt
ambassadeurs, mais le plus intelligp,nt, le plus habile, le
plus expérimenté et le plus courtois de tous a été Aboû'l-
Qâsim ez-Zayyâni. Il nous a remis votre dépêche et votre
présent de la façon la plus digne; il a pris congé de nous
dans les Ineilleurs termes, conlme il convient aux ambassa-
deurs des souverains. S'il pal'aissait utile à Votre Seigneu-
LES HlSTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWI'fE 155

rie de m'envoyer un nouvel ambassadeur, je désirerais que


vous le choisissiez encore, car il est aussi distiFlgué par ses
manières que par son espI·it (1 ). »
En faisant la part de l'exagération orientale, on voit qu'ez-
Zayyânî rapportait à son maitre un témoignage de satisfac-
tion non négligeable. Sa situation à la cour, déjà si solide-
ment établie, ne pouvait que s'améliorer encore, et le sultan
rendit, devant tous les membres de son makhzen, hommage
à l'intelligence et à l'initiative de l'ambassadeur. Les secré-
taires, accroupis auprès de leurs écritoires, en durent pâlir
ùe jalousie. Sur-le-champ, quatre caisses de réaux d'argent
furent envoyées au roi d'Espagne, qui fut prié de les faire
tenir au sultan ottoman par l'intermédiaire du roi de
France.
L'année suivante (t201 /1787), ez-Zayyânl reçut mission du
sultan d'aller conduire à Oujda un contingent de tribu gîch
et d'en remettre le commandement au gouverneur de la
ville. A son retour, il rejoignit, chez les BiâIna, le sultan
qui s'était installé dans cette tribu avec ses troupes, pour
la châtier. Sidi Mo1).amrned ben 'Abd Allah nomma alors son
secrétaire gouverneur de T'aza, vi lle dans laqu elle la situa-
tion était souyent précaire et où les tribus berbères envi-
ronnantes se livraient périodiquement à des pillages en
règle. Ez-Zayyâni, qui venait ainsi de gl'avir un nouyel
échelon de la hiél'archie du Makhzen, resta une année à ce
poste. Puis, il fut rappelé à -Mek nès pour remplir une nou-
velle fonction: celle de commandant d'un corps de fusiliers
marins que le sultan avait décidé de créer (2 ). Dans ce but,
mille hommes, fournis par la tribu des AIt 'AHâ (3) et les
'Abid du Tâfîlelt furent envoyés à -M eknès. De là, ez-Zayyâni
les conduisit à Tétouan, où ils furent habillés et armés, puis

(1) Nous emprunlons la traduction que Houdas a donnée de ce passage


dans SOIl édition du Torjomân, p. 156 de la trad. et 85 du texte arabe.
(2) Il dut même, à cette époque, être pendant quelque temps gou-
verneur de Larache, aill i qu'il semb le ressortir du Torjomdn, éd. Houdas ,
p. 88 du texte et 161 de la traduction.
(3) Grande confédération de tribus berbères, encore assez mal connue,
qui nomadise entre le Tàfîlelt et le Grand Atlas.
156 LES IIOMl\IIES ET LES ŒUVRES

à Tanger, où il dirigea lui-même leur instruction. Ce ne


devait pas ètre un spectacle banal que de voir ces grands
nomades berbères et ces nègres sahariens transformés tout
à coup ·e n marins et faisant des lnanœuvres dans le détroit
de Gibraltar et le long des côtes marocaines. Au bout de
deux mois, le sultan rappela tout ce monde auprès de lui et
nomma ez-Zayyâni gouverneur de Sijilmâsa et adjoint de son
fils Moulay Solalmàn, son lieutenant au Tâfilelt. Cette nomi-
nation ne fit pas grand plaisir au secrétaire, qui, néanmoins,
ne put s'y dérober. Dans sa nouvelle résidence, en effet, il
était a ppelé à gouverner non seulement toute une popula-
tion turbulente, mais encore de nombreux parents, plus ou
moins éloigaés, de la famille impériale (1 ).
Il put cependant conserver son nouveau poste pendant
trois ans, jusqu'à la mort de Sidi :M ol)ammed ben 'Abd
Allah, qui survint le 24 rajah 1204 (21 avril 1790). l\fais il
s'y attira la haine du fils ainé du sultan, Moulay el-Iazid, qui
devait bientôt lui faire sentir, en arrivant au pouvoir, que sa
fortune avait assez duré (2 ).
On trouvera, dans la traduction de M. Houdas (3), le
récit détaillé des mau vais traitements que le nouveau sultan fit

(1 ) Cf. et-Torjoman, éd. Houdas, pp. 85 = 157 et en-I à.irî, !slicùa, IV,
p.11S.
(2) A la suite de l'indélicatesse qu'il avait commise en Orient (cf. supra,
p. 153, note 1), Moulay el-Iazîd, n'osant se pré enter à son père, comp-
lait, en :r entranl au l\laroc, se réfugier à Sijilmâsa, auprès du tornbeau de
on ancêtre Moulay 'Ali ech-CharîL Mais, quand il apprit qu'ez-Zayyànî
était gouverneur de la ville, il eut la certitude que le fonctionnaÎl'e n'hé-
siterait pas à le Ïaire arrêter; aussi, dut-il renoncer à son projet et aller
jusque chez les Jbàla, dans la tribu des Beni 'Aroûs, chercher a ile dans
le sanctuaire du grand saint Moulay , bd es-SaJàm ben Machlch. Ez-
Zayyànî lui créa, à la mème époque, de difficultés dont le détail ,est
conlenu dans le Bostan, rapporté par en-Nà~irî, Istiq~à, IV, p. \'18.
(3) et-Torjoman el-mo'rib, éd. Houdas, pp. 86-91 du texte et '157-168 de la
traduction. Cf. également G. Salmon, op. cit., pp. 336-337. Il est à remar-
quer que, dans l'Isliq~â, en-Nà~iri fait preuve de la plus grande discrétion,
en ce qui concerne les mauvais traitements infligés par le sullan el-Iazîd
à l'historien. Il n'y fait qu'une allu~ion, l ,p. 119: ~~J <1...k. ~
~~\J , « il le fit arrêter, frapper et malmener ».
U:S HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWiTE 157

subir à notre personnage. Nous les rappellerons ici de


manière abrégée:
Ez-Zayyâni, dès la pr.oclamation d'el-Iazid, se hâta d'en-
voyer au prince une députation qui vint lui prêter serment
de fidélité au nom des habitants de la province; et, pour
éviter toute surprise, il lui demanda de fix~r lui-même le
montant des pensions à servir aux princes du sang résidant
dans le Tâfilelt. Au bout de quelque temps, el- Iazîd le fit
appelel' à Fès, pour qu 'il lui remît les contributions du ter-
ritoire qu'il administrait. Ez-Zayyâni, qui avait de sombres
pressentiments, s'étonna à peine en apprenant à son
arri vée à Dâr Dhibagh (1), près de la capitale, que ses
maisons de Meknès avaient été confisquées, eauf une petite
qui servait d'abri à sa famille. Il tomba malade, « accablé
par la fièvre et l'inquiétude», et fit venir les siens à FèsL
Une fois guéri, l'infatigable voyageur alla rejoindre devant
Ceuta son souverain, qui tentait vainement d'enlever cette
place aux Espagnols. Moulay el-Iazîd le renvoya alors à Fès,
où, dès son arrivée, il fut jeté en prison; peu de temps
après, il fut transféré de cette ville à Meknès, où on l'incar-
céra successivement à la qa~ba et dans un cachot. Pour la
troisième fois, l'adversité s'abattait sur ez-Zayyâni. Puis,
. quelques semaines après, par un brusque revirement, il
sembla revenir en faveur, puisque le sultan lui confia le
commandement de la ville d'Agadir et lui ordonna d'aller
chercher à Tanger le prince .M oulay Ihrâhim, nommé gou-
verneur de Marr-âkech : il devait raccompagner, tout en
rejoignant son poste, jusqu'à lVlogador. Àlol's, sans arrêt, ez-
Zayyâni, de Meknès, s'en va à Tanger, et, de cette ville,
passe successivement à Larache, Rabat et Casablanca. Tout
d'un coup, un nouvel ordre arrive: ce n 'est plus à Agadir
qu'ez-Zayyàni doit aller, mais à ~farrâkech, comme conseiller
du jeune khalifa Moulay Ibrâhlm. Ez-Zayyânî, qui ne sait

('1) Dàr Dbîbagh (la maison du petit tanneur) , qa:ba à 3 1 ilomètres


au sud-ouest de Fès, aujourd'hui comprise dans l'enceinte du camp qui
purtc son nom. Les conslructions sub Istallt aujourd'hui ont été édifiées
ous le règne du sultan foulay 'Abd Allah.
158 LES HOMMES ET l.ES ŒUVRES

plus quel sort l'attend, obéit à l'ordre donné et rejoint la


capitale du Sud. Mais il n'y va pas rester longtemps: qua-
tl"ièrne nakaba, qui sera peut-être la dernière; les jours du
secL'étaire semblent toucher à leur fin, et c'est par miracle
qu'il va échapper à la mOlto
EI-Iazl'd, en effet, le rappelle à Rabat, puis l'envoie
devant Ceuta porter des lettres, avec mission de le rejoindre
à ~1arrùkech, en passant par Fès. Ez-Zayyâni n'est pas
encore parti que le su'l tan décide d'aller 11li-llIême devant la
ville assiégée, et de se faire accompagner par son secré-
taire. Mais, à peine sont-ils arrivés à Tétouan, qu'il le
dépêche dans le Sud, dans les tribus des Dokkâla et de la
banlieue de Marrâkech, afin de lever des soldats destinés à
renforcer les assiégeants de Ceuta. Ez-Zayyâni s'en va sans
rechigner - il passe décidément toute sa vie sur les routes
ou plutàt les pistes nlarocaines - et trouve tout le pays en
pleine agitation. Deux solutions s'offrent à lui: ou se nlettre
au service du prétendant Moulay Hichâm, ou prendre la
fuite. C'est cette dernière qui lui senlble la moins aléatoire:
à bride abattue, il gagne l'Omm er-RabI', el-Man~oû['iyya (1),
et enfin Rabat, où il n'en tre pas sans peine. Puis, après
quelque repos, il part rejoindre le sultan, et gagne succes-
sivement el-Qa~r et Larache. Là, dans l'enceinte de la plate-
forme aux canons (2) , il se présente à el-Iazid, qui le rend

(1) Qa~ba sur la roule de Rabat à Casablanca, à 33 kilomètres environ


de celle dernière ville. Elle a pris le nom du sultan almohade Ia'qoùb el-
Man~oùr, qui la fit élever sous son règne (580-595 = 1184-1198).

(,2) En arabe, .iJlA..d\ , de l'espagnol escala. Cf. Brunot, la Mer dans les
traditions et les industries indigènes à Rabat etSalé, pp.,68-69: « e cale for-
lifiée ». La ~qùla de Larache, comme celles de Rabat, Salé, Casablanca et
Tanger, a été bàlie sur l'ordre de Sidi Mol;tammed ben 'Abd Allah. IIou-
das, ignorant le ens de ce terme marocain - ce dont il était bien excu-
sable - l'a pris pour un toponyme, et il traduit, p. 165 : « On me dit que
le sultan élait à Esseqàla ; je poursuivis donc ma roule jusqu'à celte der-
nière localité. Comme j'élais campé près de la porte de Esseqùla ... », au
lieu de: « on me dit que le sultan se lr.ouvait sur la plate-forme au ca-
nons ; je continuai dOllC mon chemin et descendis de cheval à la porte
de la batterie».
LES HISTonIE r S DE LA DY:-IASTlE 'ALAWITE 159

responsable du soulèvement de la région de l\lal'râkech, le


fait bùtonner, pu is ti l'e sur le secrétaire évanoui un coup de
son pistolet. L'arille rate heurcusement! On le jette en
prison, on le charge de chaines, lllalgeé les hlessul'es que
lui a values sa bastonnaJe.
Le sultan, continuant sa route SUL' Rahat, demanda, en
alTivant à el-~Iah(liY'ya, si ez-Zayyâni était mort. On lui
répondit que non. il l'cnvoya alors chercher par des cava-
liers et notee homme, Jans un pileux état, arriva à Habat,
monté sur une mule. Là, après avoir comparu devant le
sultan, qui rabroua vertement un chérif de Médine essayant
de prendre sa défense, il fut empeisonné à . nou\-eau. Lais-
sons l'historien raconter lui-m.ème la suile de sa pitoyable
a venture (1) :
« Le lendemain Inatin, qua nll le sultan sortit (de ses
appal'tements pl'ivés) , il plaça deux fusils à coté de lui dans
la salle du premieL' étage qui donne sur le mechWclr, puis il
ordonna aux sbires de m ' alnener en sa présence et leur dit:
« Dépouillez-le de ses vêtements, revèlez-le d'une jellâba
« et amenez-le-m.oi. » On me ramena en prison, et, après
m'avoir enlevé mes Yêlenlents, on me couvrit d'une jellâba
qu'on avait apporlée. Nous étions alors au mois de décembre
« le sourd (2) », el la pluie tombait. On était allé au marché
cheL'cher une mule pour me la faire monter; mais on n'en
avait pas trouvé. On se rendit alors chez le gouve['neuf qui
en fit chercher une (au fondaq ) des .chameliers; enfin, après
deux heures d'attente, la mule fut amenée et on me bissa
dessus. Les enfants sortirent des écoles avec leurs plan-

(1) el-Torjomân el-mo'rib, éd. Boudas, p. 90 du texte et 166 de la lrad.


Nous avons emprunlé la lraduclion Houdas, sauf en quelques poinls où
nous l'avons légèrell1ent modifiée.
(2) ~)1\ : II sourd » , d 'où: « pendant lequel aucun bruit ne se fail en-
tendre )), épilhète souvent accolée dans les calendriers 111.étéorologiques
marocains au nom de décembre. On la retrouve d 'ailleurs dans l'arabe
clas ique pour marquer l'inlensité du froid. Rappelons que, dans l'Arabie
antéislàmique, ce surnom élait donné, avec Je mème sens dérivé , à H.ajab,
parce que, durant ce mois de lrêve sacrée, on n'enlendail « ni clameurs
de cornballanls ni cliquelis d'épées ).
t6ü LES lIOMl\ŒS ET LES ŒUVRES

chettes à Qor'ân et implorèrent Dieu en nla faveur (1). Les


gens de Rabat éprouvaient un vif chagrin de ma disgrâce.
Quand nous arrivâmes au mechwâr, le sultan, qui trouvait
que nous tardions à venir, avait quitté la place à laquelle il
s'était installé pour nous attendre. Cette circonstance fut la
cause de mon salut, car le sultan ne revint point pendant
le temps que je demeurai au milieu du 172echwâr. Tandis
Cl ue j'étais ainsi exposé au froid et à la pluie, les tolba
priaient et faisaient des vœux pour moi sur le tombeau de
notre Maître le Sultan (2) . Tous les fonctionnaires, hommes
libres ou <Abid, pleuraient sur mon sort; ils décidèrent les
nègres du palais à informer le sultan de ma situation, et
celui-ci me fit reconduire en prison. Quelques-uns de
mes amis parmi les hauts fonctionnaires vinrent alors m'y
trouver et m'apportèrent des vêtements ainsi qu'un bra-
sero; j'avais tant souffert du froid que je ne pouvais plus
parler. »
Par bonheul', Moulay el-Iazid quittait Rabat trois jours
aprè , se dirigeant sur Marrâkech. Il livra bataille au pré-
tendant Moulay Hichâm et reçut, 'à la fin nu combat, une
blessure des suites de laquelle il mourut bientôt (dernière
décade de jomàdâ Il 1206/14-23 ré vrier 1792). A peine les
habitants de Rabat eurent-ils la nouvelle de la mort du
sultan qu'ils délivrèrent ez-Zayyâni., malgré l'opposition du
qâ'ïd Bargâch (3) , et Inirent ainsi Gn à sa « quatrième nlésa-
venture ». Escorté de ~erbères Beni Mtir (4), le secrétaire

(1) Il s'ag it là d'un vieux rlle de supplication, déjà employé au Maroc


au Moyen Age. Nous voyons, en effet, dans er-Rawrj, el-haloûn d'Ibn
Ghàzî, qu'Aboll <AU Man~oùr Ibn J:Iarzoùz, prédicateur de Meknès, « ac-
compagné des eniants des écoles portant leurs planchettes sur la tète,
sortit au-devant du prince almohade el implora sa clémence en faveur
des habilanls de Miknàsa »: O. IIoudas, Monographie de Méquinez, pp. 38-
39; éd. de Fès, p. 13.
(2) Ez-Zayyâni veut parler du tombeau de son ancien ouverain Sidi
Molfammed ben <Abd Allah, enterré à l'intérieur du grand Agdàl de
Rabat.
(3) La famille Bargàch, d'origine andalou e (Vargas), n 'a pas cessé depui
lors de fournir les gouverneurs de la ville de Rabat.
(4) Tribu berbère (Aït Nçlir, arabisé en Beni .Mpr) du sud de Meknès ..
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE 161

d'Etat se rendit à Meknès et décida, avec les dignitaires du


Makhzen restés dans cette ville, de mettre sur le trône
Moulay Solaïmân, prince dont il'n'avait jamais eu qu'à se
louer; puis il accompagna au sanctuaire de Moulay Idris
du Zarhoûn le nouveau sultan, qui se fit proclamer solen-
nellement et alla s'installer à Fès.
Du même coup, non seulelnent ez-Zayyânî était revenu
en grâce, mais il reprenait son rôle d'actif et indispensable
homme d'état. Ce ne fut pas néanmoins de son plein gré.
Il était fatigué d'honneurs pal' trop éphémères et demeurait,
malgré tout, assez anxieux du lendemain. D'autre pal't,
il arrivait à sa soixantième année et estimait sa carrière
suffisamment remplie. C'est pourquoi déclina-t-il tout
d'abord l'offre de Moulay Solaïrnân, qui lui proposait le
poste de gouverneur de l'amalat d'Oujda. Sur l'insistance
du prince, il dut accepter; il s'agissait d'une mission de
confiance, celle de réprimer le soulèvement des Angâd
qui mettaient à feu et à sang tout le Maroc Oriental jus-
qu'à la .M oloûïya. Ez-Zayyâni partit donc pour sa nouvelle
résidence, avec une escorte et une caravane de serviteurs.
Mais, avant même d'avoir rejoint Oujda, il était attaqué par
ses propres administrés révoltés, leur échappait à grand'
peine et n'avait que le temps de se réfugier à la qa~ba d'el-
'Oyoûn (1), tandis que ses bagages restaient aux mains des
pillards. Celte fois c'en était trop! Cette « cinquième mésa-
venture» lui donnait pour longtemps le dégoùt des fonc-
tions publiques. Ne doutant pas qu'il serait rendu respon-
sable de la défaite de ses troupes, il jugea prudent et sage
de quitter le lVIaroc, dont la limite était toute proche. Peu
de jours après, il était à Tlemcen, où il n'était connu de
personne, et louait une petite maison au faubourg d'el-
'Obbâd, près du mausolée d'AboLI :M adian, le patron de la
ville (2). « Alors, dit-il, je me reposai de mes frayeurs
(1) La qa~ba d'el-'Oyoûn se trouve à peu près à mi-route d'Oujda à
Tâoûrirt (el-Aioun Sidi Mellouk de la carte du Service géographique). Elle
fut construite en 1090 (1679) par Moulay lsmà' ïl. Cf. ez-Zayyânî, el-Torjo-
man el-mo <rib, éd. Houdas, p. 18 du texte cl 3.4. de la trad.
(2) Aboû Madian Cho 'aïb ben el-T:Iasan, surnommé el-Ghawth , grand
11
162 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

• cl u Maroc et des revirements incessan ts du pays et j'ôtai


de mon cou le lacet et. le carèan de l'esclavage (1). » Efl'ecti-
vement, il l'esta à Tlemcen plus Je dix-huit mois, pendant
lesquels il dut s'occuper principalement à lire et à écrire.
:Mais il fallait avant tout il cet honlll1e une vie d'activité
physique. Etc' est pourquoi . il décida un jour de refaire,
en simple particulier, le voyage qu'il avait fait à Constanti-
nople comme ambassadeur de Sidi ~Iol:l.ammecl ben 'Abd
Allah.
, Il partit donc pour Oran; de cette ville, il continua sur
Alger, où sévissait alors une petile épidémie de peste (2) :
il fut Lien reçu par les autol'ités turques et les uléma de la
ville, qu'il ne nomme malheureusement pas; puis, il pour-
sui vit son voyage, passa par Constantine et arriva à Tunis,
le 1er jomâdâ 1 1208 (5 décembre 1793).
Alors l'odyssée, volontaire cette fois, recommence. Ez-
Zayyàni, toujours avide de nouveauté, ne cesse pas de s'in -
truire encore durant ses pérégrinations; il profile, au coursde
ses traversées, de la moindre escale un peu ~prolongée pour
partir en reconnaissance dans l'inlérieur des terres, voir
et noter. De Tunis, ez-Zayyàni se rend, par mer, directe-
',ment à Constantinople. Il séjourne quelque temps dans la
capilale turque, où on le traite avec honneur et où l'on fait
à son égard preuve de la plus grande discrélion. Mais

saint de Tlemcen, morl en tJ94 (1197-1198). Cf. Ibn ÙonfoLldh, Ins el-Jaqîl'
/Ua-'izz el-IJ-aqîr (ms. 38<.> de Rabal); Mol:wmmed el-'Al:bJ el-Fâ î, Mir'dt el-
ma~l,âsin, p. 198; Al,lmed Bàbù, Naïl el-ibtihdj, p. 107; Ibn el-Qùçlî, Jadh-
wal el-iqtibâs, p. 332; Ibn Mariam, e.l-Bostdn, p. t08; el-Katlùni, Salwal el-
anfds, l, p. 361; Brockclmann, Arab. litt., l, p. 438; Ben Cheneb, Idjâza,
.§ 350; Bel, in Rnc. de l'Isldm, l, p. 100 el la bibliographie européenne
d.onnée.
(1) et-Torjomân, ms. de Salé, fol. 2 : '-:"~\ J\y\ 0.11 ~ -.r""\J

. ~'~J J)\ ~.J ~J ~'~~J


(2) On n'a aucun renseignement sur l'existence d'une ~pidémie de peste
à Alger ver 1793. Nous connaissons seulement celle qui ravagea la popu-
lation algéro,ise en 1787 el 1788 et sur laquelle cf. II. D. de Grammont,
Histoire d'A 1ger sous la domination turque, pp. 339-340 et enture de Pa-
radis, Alger au XVIIIe siècle, Alger, 1898, pp. 3t, 52.
I"ES HISTOIUENS DE LA DYNASTIE ALAWITE 163

bientôt arrive l'époque du pèl erinage aux lieux saints. Il


part avec le cor tège turc pour :Médine et la Mekke. Puis,
pr.ofitant de la rentrée de la caravane égyptienne, il gagne
le Qaire, avec deu.' concubines éthiopiennes qu'il vient
d'acheter. La grande ville, qu'il n'a pas revue depuis plus
de trente-cinq ans, exerce sur lui un attrail tout particulier.
Il y passe plusieurs mois, marqués d'ailleurs par un acci-
dent qui aurait pu lui coùter la vie (1) : en traversant le
Nil, la barque qui le transporte chavire; en bon montagnard
berbère qu'il est malgré tout resté, il invoque assez irrévé-
rencieusement le patron de Tlemcen, en lui disant que, s'il
est vraiment un saint, il va l'empêcher de se noyer. Il est,
en effet, repêché par une dahabieh et décide d'all er remer-
cier sans tarder le ( pôle » auquel il a adressé sa requête.
'Et le voilà, dès lors, s u'r le chemin du retour vers le
Maghrib.
A Alexandrie, il trouve un bateau en partance pour
Alger el s'y embarque. Un vent contraire l'amène d'abord
à Rhodes, puis à Anlioche, où l'on décide une escale d'un
mois. Belle occasion pour parcourir la Syrie et la Palestine.
En vingt-cinq j ours, sans perdre de temps, ez-Zayyânî
court revoir Damas e t Jérusalem, qu'il a déjà visi tées l'an-
née précédente en all an t par terre de Constantinople en
Arabie; i l revient à Anti oche assez tôt pour s'embarquer.
1\1ais l'itinéraire ayant ét é modifié, il va toucher Smyrne
avant d'atteindre enfin Tu n is, où notre voyageur juge qu'il
est p rudent de dé b arq uer.
Son journal de r oute nou s apprend que, dans cette ville,
son séj our fut attristé p ar la mo r t d' u ne de ses négresses
é thiopiennes : ell e laissa it un enfant à la m amelle; il fallut
lui procu rer un e n ourr ice esclave . Ez-Zayyân î , après avoir
l ou é d es b êtes d e s om m e e t d es montu res , s e diri gea sur
Constantine, où il passa dix jours à attendre le bey de la
pro-vince, et continua sur Alger, presque sans ressouroes.
Il y attendit pendant sept mois l'arrivée d e marchandises
qu'il avait achetées en Orient ; son vqyage d'études et

(1) « Sixième mésaventure ».


164 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

d'agrément s'était doublé, on le voit, d'un voyage commer-


cial. Il fut l'hôte à Alger du qàçlî de la ville, Aboù <Abd
Allah Mol)ammed ben Màlik (t ).
Ez-Zayyâni avait envoyé d'Algee à Fès un messager qui
devait ramener sa famille et ses concubines noires à Tlem-
cen, où il voulait s'installer pour le restant de ses jours.
On était, dans la capitale marocaine, inquiet sur le sort de
l'ancien ministre. Et la nouvelle qu'il était en Algérie fit
sensation. Tous ses proches et ses amis lui écrivirent de
rentrer à Fès, et, moyen suprême de le persuader, ils ne
lui envoyèrent qu'une seule négresse au lieu de tout son
harem. Le sultan Moulay SolaImân lui-même lui adressa
une lettre très cordiale, l'engageant à revenir à Fès sans
aucune crainte. Tous ces messages touchèrent ez-Zayyânî à
Tlemcen, où il avait déjà rejoint sa maison d'el- <Obbâd. Il
lui tarda dès lors de rentrer dans sa ville natale, et il se mit
en route sans perdre de temps (1210/ 1795-96).
Arrivé à Fès, il alla se présenter au sultan et lui offrit des
parfums et des vêtements de l'Inde. Le souverain lui fit très
bon accueil et lui proposa immédiatement de le nommer
gouverneur de Larache. Ez-Zayyâni, brandissant alors la
lettre impériale qu'il avait reçue à Tlemcen, demanda à
Moulay SolaImân de ]e laisser en paix. Le sultan fit droit à
sa requête, mais, qu elque temps après, il le pria avec insis-
tance d'aller inspecter le fonctionnement de la douane dans
les ports du Maroc. Ce n'était qu'une mission temporaire,
dont ez-Zayyâni s'acquitta brillamment. Il alla visiter La-
rache, Tétouan et Tanger et envoya son rapport au sultan
qui le félicita. Puis il resta à Fès, jusqu'en 1213 (1798-99),
sans fonction officielle; alors le souverain le convoqua à

(1) Il ex:istait à cette époque, àAlger , un el-l:Iâjj Mo1:tarnmed ben Al).med


ben Màlik, qui fut mufti màlikitc de 1210 à 1214 (1795-1800) et non qâçlî.
Cf. Joachim de Gonzalcz, Essai chronologique sur les Musulmans célèbres
de la ville d'Alger, Alger, 1887, pp. 63-6 f., e l el-J:l.afnâwl, Ta'rîj el-khalaf
bi-rijâl es-salaj, lI , p. 474. Les mèmes auteurs signalent (Gonzaler., pp. 23-
24 et el-F;lafnâwî, p. 472) un jurisconsulte Mol).ammed ben Mâlik qui vécut
vers 11 59 (1746). Peut-être s'agit-il du mème personnage que le précédent
et est-ce celui dont ez-Zayyàni ful l 'hôte à Alger.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE < ALA WITE 165

Meknès et lui demanda de reprendre dans son makhzen la


place importante qu'il avait laissée. A ce titre, il alla d'abord
à 1\1 arrâkech recueilli r l'héritage des frères de Moulay So-
lalmân, qui venaient de mourir de la peste dans cette ville (1);
puis, nommé secrétaire d'État à la cour, il ne taI'da pas à
cU111uler les fonctions de vizir et de chambellan (2). Ce fut
l'apogée de sa carrière. Il resta en place plusieurs années,
puis fut révoqué.
A cette époque s'arrête le journal de sa vie. Nous sommes
vers 1230 (1815 ). Ez-Zayyânl a alors plus de quatre-vingts
ans. Vécut-il longtemps encore après cette période? Oui,
s'il faut en croire l'auteur de la Salwat et-anlâs, qui a fait
mourir notre personnage à l'heure du <a$" du dimanche
4 rajab 1249 (17 novembre 1833) (3). Il aurait donc vécu
ainsi quatre-vingt dix-neuf ans (4).
La Salwat el-anfâs nous apprend également qu'à sa mort,
Aboù'l-Qàsiln ez-ZaY'yâni fut enterré, par ordre du sultan,
dans la zâwlyya de la confrérie des NÙ$iriyya, qui se trouve
à Fès, au quartier d'es-Siâj (5) ; son tombeau y est situé près

(1) Il s'agit de la fameuse épidémie de 1799, qui fit de très nombreuses


vicl imes au Maroc, et sur laquelle, cf. l 'élude du Dr l1enaud, la Pesle de
1799, in Hespéris, '19-21 , p. 160 sqq.
(2) Nolons que, dans l'intilulé de ses ouvrage, ez-Zayyânî sc donne le
surnom de Dhoù'l-wiz âralaïn: « celui qui a élé élevé deux fois à la dignité
de vizir », ou plutôt « le vizir de l'Inlérieur el de la Guerre )J. Ce surnom
avait été porlé et illuslré par un personnage célèbre de l'Andalousie, au-
quel ez-Zayyànî aime à se comparer, Lisàn ed-Din Ibn el-Khapb. Cf. à
propos de l'allribulion du litre à ce dernier personnage, les références
données pin de Aldecoa, Ibn el-{{halib Lisan ed-Din in Arch. berb., vol. II,
1917, p. 49.
(3) Salwat el-an{ds, l, p. 263.
(4) 11 s'agit d'année calculées ·d'après le calendrier solaire. En comp-
tant en années lunaire, ez-Zayyùni atteignit l'âge de 102 ans. El-Katlànî,
loc. cit., dit qu'à sa morl il avait environ 106 ans. l 'y a-t-il pas là une
part d'exagéralion dans ce rapporl de longévité e ceptionnelle que la pé-
nurie de documenls ne permet pas de vérifier? Pourlanl, ce n'est pas pour
e7.-Zayyùni seul qu'eL-Katlànî fail preuve, dans on dictionnaire, d'une si
grande précision chronologique. 11 nole, chaque fois qu'HIc peut, l'heure,
le jour et la date de la morl des personnage qu'il éludie.
(5) Au centre de Fès el-Bâlî, entre les quartiers d'el-'Oyoûn et de Swîqat
166 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

de l'encleoit où fut enseveli plus Lard Mol)am.nied Mas·wâk. et-


Tâzi ( L).
Dans cette notice, el-1 atlânî trace en mêlue temps un
poetrait moral qui n'est guère favorable au nünistre historien.
Le pieu.- biographe déclare qu'ez-Zayyâni, bien qu'intelli-
gent, avait la langue ùop longue et ·ne savait pas ménager
ses pa l'oIes, si bien qu'il lui arriva de luédire cles grands
sainls; et il termine en demandant à Dieu de le préserver
lui même de pareils eL'renlenls.
Quant au portl'a it physique qu'il donne d'ez-ZayyàL1Î, il
se réduit au rappel d'une difforluilé qui hise assez l'in-
vraisemblance: «( Le sommet de son crüne, dit-il, avai tété
enlevé d'un coup de sabre et l'on lnit à la place un morceau
de courge que la chair finit pal' recouvrir; l'historien put
survivre à sa blessul'e; c'est pour([uoi il ne se découvrait
jamais la têle en puhlic! » Ne s'agit-il pas là tout simplement
de l'écho prolongé d'une bonne plaisanleL'ie? Les raconlars
les plus fantaisisles, émanant du nlakhzen lui-même, nc de-
vaienL pas manquer de courir sur cet e.'traordil1aire ez-Zay-
yâni : sa personnalité et son origine y donnaient trop de
prise. Et (lui sait si le biographe moJerne, en excluant de sa
notice, pour ne pas déparer son œuvre, toutes les n1ésa-
ventures du ministre historien, n'a pas voulu pourtant n1ar-
quer, d'un trait grotesque, qu'au souvenir de ce parvenu
discourtois et secrètement mépl'isé, s'attache, encore au-
jourd'hui, un peu de ridicule?

Tel fut l'homme . Que fut l'écrivain? Et d'abord, il est


permis de se dem.ander à quels moments de sa vie mouve-
mentée le secrétaire d'État put trouver le temps d'écrire. Il

Ben ~ùn, et à proximité immédiate du palais du majlis baladî. La zùwîyya


de Sidi Al)med lbn ù~ir figure sur le plan d'Orthlieb, sub u, 289.
(1) boù 'Abd Allah Mol:unumed Maswâk. ben Mol;tamrned et-TùzL, juris -
consulte, prédicateur et gl'ammail'ien de Fès, fut, pendant un certain
Lemps, qù.çli de ~rroù. Mourut le 3 rab.î' Ir 1283 (1:5 aoùt 18(6). Cf. el-l\.at-
tâni, Salwat el-anfds, l, p . 262..
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE l ALA WlTE 167

n'eût guère, on ra VU,· de loisirs prolongés, au moins


avant d'aeeiver à l' extrême vieillesse. pourtant, il a écrit
quinze ouvrages, dont il a laissé lui-même la liste. Il ne fut
donc pas seulem.ent J'une inlassable activité physique, puis-
qu'en dépit de seB charges absorbantes et de ses voyages
lointains, il put encore s'occuper de composer des livres
dont le nOlnbre ne laisse pas d'être imporlant. '
Toute l'œuvre d'ez-Zuyyâni, si l'on excepte deux traités
d'atchimie et de divination aujourd'hui introuvables, se rap-
porte exclusive1ue1lt à l'histoire et à la géographie. On y
chercherait vainement la moindre glose sur un écrit islâ-
Hliq ne, le plus petit opuscule ressortissan t à la science tra-
ditionn elle; il tient cependant à montrer qu'il n'ignore pas
cell(~-ci, dans les longu es digressions que l'on tl'ouve dans
ses œuvres. Belle élUdace, néanmoins, de la p;irt d'un
homme Ci ui savait qu'à cause de sa situation, tous ses travaux
attireraient la curiosité et seraient soumis à une minutieuse
critique doctorale.
Nous savons, grùce à la TOl:jOI7Ulna, l'ordre dans lequel il
écrivit ces livres. Ce sont:
1() Une histoire générale depuis la création du monde jus-
l
qu'au XlUe siècle de l'Hégire, et-Tol'jomân el-71w rib lan dowal
el-1VaclLriq wa' l-lIIaghrib;
2() Une histoire de la dynastie lalawite, el·Bostân e:;,·:;,al'lf f't
dawlat awlâd Jfawlâï l.LiU 'clz-Cltarlf, qu'il intitula également
er-Haw(lat es-Solaïnzânîyya;
30 Une orjoù;:,a SUl' les hérésies de l' l slâm, ed-Dorrat es-
l
sanlyyal el-fâ'rqa ft kac/~t nUlClhâ/âb alll el-bida nân er-ra-
l
wâ(i(L (va' l-khawâr~j wa' l·mo tazila wa'z-zanâcliqa;
40 Un obituaire de 1nille vers raj(lZ, relatif à tous les sou-
verain::; rnusulmans, avec un commentaire, Alflyyat es·soloûk
ft wafayât el-1720loûk;
50 Un traité de généalogie des Chorfa du :Maghrib·, Tof~fat
el-J:uidî' l-lnotrib fl rar nasal; c/wrafâ' el·lIIag/u·ib;
60 Un traité de politiq ue à l'usage des souvel'uins, Risâlat
es-soloûk fî-mâ iajib alâ' l-lnoloûk;
l

70 Un résu1né de géographie, RilûaL el-fwdhclhâq li-mo-


châhadat el-bolclân wa' l-âfâq ).
168 LES 1I0MME~ ET LES ŒUntES

80 Une fahrasa qu'il nonlma Ja'farat et-ti'jân wa-malzrat


el-iâqoût wa'l-loû'loû' wa'l-mOl:jân ft dlûkr el-17zoloûk el-
'alawtytn wa-achiaklt Mawlânâ Solal'mân;
9 Une réfutation des hérésies de l' Islâm , Kachf el-asl'âl'
0

ft'I'-radd 'alâ ahl el-bida' el-achrâr;


100 et 11 0 Deux travaux ayant trait aux sciences occultes,
To/:llat el-ikhwân wa'l-âwlîyyâ' ft tlwboût $an'at es-stmtyyâ'
wa-botlân 'il/Il el-ldmlyyâ' et N a$fhat el-nwghta/'l'tn fi botlân
et-tadbtl' li' l-mo' tarl'În;
120 La relation de ses tl'ois voyages hors du Maroc, et-
TOl'jomânat el-kobrâ ellatl jama' at akhbâr modon el- 'âlam
bal'I'an wa- ba1:u·â.
Ez-Zayyâni compte enfin parmi ses œuvres un recueil
dans lequel il réunit les lettres de félicitalions que lui
valut son TOl'jomân et qu'i l plaça à la fin de cet ouvrage:
il l'appela !filiat el-odabâ' wa'l-kottâb ft madZ~ hadhâ'l-
kitâb (1).
Ez-Zâyyâni, en éCl'ivant, lui-m ê me cette liste, a obéi à un
petit sentiment de vanité pel'sonnelle, Jont il ne faut pa::;
s'étonne!' outre nlesure; car ses troisième, cinquwme,
sixième et sep ti ème ouvrages ne sont que des chapitees de
son et-Tol'jomân el-mo'l'ib. Nous avons pu nous en rendre
compte sur le manuscrit de cel ouvrage que nous avons eu
à notre disposition. Ses trois œU\TeS maîtresses sont, avec
le Torjomân, el-BostlÎn ei.-~artf et la Torjomâna; les deux
premières sont purement histori(jucs; la tl'oisième n'est pas
seulement, comme on pourrait le croire par son titre, d'objet
exclusivement géographique et méritera, elle aussi, d'ètre
examinée de façon assez détaillée.

( 1) G. Salmon, ap. Arch. maroc., If, pp. 339-340, donne aussi la liste des
ouvrages, liste qu'il a trouvée à la fin du ms. d'el-Qa~r de la To/:jomâna.
Elle offre avec la nôtre de nombreuses variantes, vraisemblablement
dues à une seule lecture hâtive. C'est ainsi que, dan la liste d'ez-Zayyânî,
il n'est pas question d 'un ouvrage appelé Faq,d'il hadhihi'd-dawlat es-So-
laïmânîyya, c'e t-à-dirc Gloire du règne actuel de Moulay Solaïmdn; ceLLe
phrase fait simplement partie de l'analyse sommaire qu'ez-Zayyânî place
à la suile du titre du Bosldn. Cf. égaleme nt f},arrâq pour f},odhdhâq eL f},flat
pour l),i liat.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE 169

Le premier en date des ouvrages d'ez-Zélyyânl, et-TorjOlnân


el-mot l'ib «( su l' les dynasties de l'Orient et de l'Occident »
est, depuis de longues années déjà, bien connu des histo-
riens de l'Afrique Mineure. C'est de ce livre, en effet, qu'en
1886, ?\1. Houdas donna une traduction partielle qu'il nomma:
le Mal'oc de 1631 à 1812 . Dans son introduction, ce savant
prévenait ses lecteurs que l'œuvre dont il publiait un frag-
n1ent consistait en « un résumé très succinct d'une hi:::;toire
universelle dans laquelle deux parties seules, l'histoire des
Ottomans et celle de la dyuasLie des chérifs Alides, ont été
traitées avec quelque développement. » Et il ajoutait :
« Après une COUl'te préface, l'auteur expose en quinzp, cha-
pitres les événements historiques qu'il s 'est donné la mis-
sion de retracer, puis sous le titre de djmnita, il fait con-
naitre très brièvement les dynaslies musulmanes qui ont
méconnu l'autorité souveraine des khalifes, et, enfin, il ter-
Inine son ouvrage par ulle khatima qui est consacrée à la
narration détaillée des voyages qu 'il a aCCOl1l pli s et à la
description des principales villes qu'il a visitées (1). »
Cette analyse sonlmaire n'est pas d'une rigoureusp, exacti-
tude, uniquement d'ailleurs parce que le traducteur n'a eu
à sa disposition que des copies de l'ouvrage qui offrent avec
la nôtre des différences sensibles. On s'en rendra compte
immédiaten1ent, car, alors que les copies de M. Houdas ne
comprenaient que quinze chapitres, celle que nous avons
sous les yeux en a un total de vingt.
En voici le résulné. Après une introduction rapide sur les
devoirs du souverain, ez-Zayyâni s'occupe de manière très
succincte de l 'histoire non maghribine : il passe successive-
ment en revue Adam et sa descendance jusqu'au déluge, les
fils de Noé, les dynasties perses, les lj.imiarites, les Pharaons
cl'Egypte, les Israélites, les Grecs, les Romains et arrive au
Prophète, sur· la vie duquel il s'arrête à peine. Il passe éga-

( 1) Le Maroc de 1631 à 1812, p. Ill.


liO LES HOMMES ET LES ŒUVHES

lement très vite sur les premiers khalires, sur les Omaïades
et la conquête de l'Espagne, donne un court résumé de
rhistoire des 'Abbâsides dans le 'Irâq; jusqu'à la conquête
de ce pays pal' les Tatars et les Oltomans; Je celle des
Fâ!imites en Ifriqiyya et en Égypte, des Aghlabites e t des
AyyoC,bites. Il arrive enfin anx OUOlnans, sur lesquels il
s'étend particulièrement. Ez-Zayyàni a alors achevé la pre-
mière partie de son ouvrage.
[l va ètre moins bref dans la seconde. Les chapitres y
sont consacrés chacu n à l'une des dynasties musulnlanes de
l'Occident: Idrisites, l\faghl'âwa et Beni Ifrân; Almoravides
en Afrique Mineure 'et en Espagne; Almohades dans ces
mêmes pays; branche alrnohade des I3eni Aboù Zakarij'yâ'
en Ifriqiyya; Mérinides, au l\faghl'ib et én Andalousie;
ZaJ'yânites, à Tlemcen; Beni' l-Abmar, en Espagne; Chorfa
Sa'diens, au ~lal'oc et au Soudan; Chorfa de Sijihnüsa, au
Maroc. Puis viennent des fO:~Olll, ou appendices, sur les
familles du .Maroc qui sont d'origine chérifienne, Sur la no-
menclature des groupes ethniques du l\Iaroc ct leur répar-
tition géographiLjue. L'OU\Tage se termine enfin par un
aperçu 1('lIni' a ) des dynasties lllusuimalles éphémères et une
conclusion, (IJU:tLima) , dans laquelle ez-Zayyfll1i relate en peu
de mots ses voyages en Orient.
En écri \Tant le TOljollzân, ez-Zayyâni faisait Œuvre abso-
lument nouvelle au ~laroc. Jusqu'à son époque, les histo-
riens du pays avaient limité leur activité à l'histoire natio-
nale. Toutes leurs chroniflues, enfermées en un cadre étl'oil,
bornaient leurs investigations au seul empire de l'Ouest.
Par son essai d'histoire générale, le ministre écrivain rom-
pait avec la tradition des historiographes officiels et offi-
cieux. -Se souciant peu des enseignements qui se déga-
geaient des livres de ses prédécesseurs, il écriyait en prose,
en le développant, ce qu'on n'avait jusgu'alors osé résumer '
qu'en \'ers didactiques ( L). Il visait un bu t un peu pl'éten-

(1) Ainsi, 'Abd er-Ra);nTIùn bcn 'Abd el-Qàdir cl-Fà i, dans la parUe du
!Wcib el-oqnoum fi mabddi'l-'oloûm relative à l'histoire. Cf. infra (chapiLrc
les Biographes). Cf. également la Dorral es-soloûkd'Ibn cl-QâÇli (supra, p.il 0).
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE tALA WITE 171

tieux, ce qu'il avollait lui-même: tenter de mettre sur pied


une histoire universelle, préislàmique el islârnique, daus le
genre de celles qu'avaient com posées au IX e siècle de grands
historiens conlll1e el-Balâdhori et et-Tabari. Il se sel1tait,
parmi ses cOlnpatl'iotes, spécialemenl qualifié pour entre-
prendre cette encyclopédie historique. Et, il la vérilé, il
était mieux qne C(uLcoll<lue au :Jlaroc rens eigné, par
exemple, SUL' l'histoire des souverains oltomans : il s'était,
durant son séjouL' officiel à Constanlinople, longuement do-
cUlnenté sur le sujet. Il y avait également consulté une his-
toire des Grecs el de s Romains. Il en POU\TtÙl, dès lors~
tirer des chapitres résumés pour son OLlYrage.
Il semble bien, d'ailleurs, que c'est pendant son voyage en
TurquiE', au nloment de l'amba ssa de de 1200 , (Iu'ez-Zayyâni
conçut l'idée et le plan du TOI;jomrln . Il déclare, en effet,
dans la Torjol7lrlna, que, lorsqu'au retour de cette missi on
brillamment remplie, il alla rejoindre son poste de gouver-
neur à Sijilmùsa, il soumit, dans cette ville, au prince
:Moulay Solaïlnân, qui devait mouler plus tard SUI' le trône ,
son pl'ojet d'écril'e uno histoire univer 'e lle. Le futur sultan
le félicita et l'engagea vivement à meltre son dessein à exé-
culion; il lui demanda à plusieurs reprises, par ]a suite, où
en était l'ouvrage.
Quelle date faut-il, dès 10L's, assigner exactement à la com-
position du Torjomân, ou plutÔl, pour dire le vrai, à sa mise
en circulation panni le public lettré? Dans un autre pas-
sage de ja To/jomâna, ez-Zayyâni rapporle que c'est pendant
sa retraite d'une année et demie à Tlemcen, après sa mésa-
venture de la plaine des Angâd, qu'il écrivit son histoire.
Mais ce séjour auprès du sanctuaire d'e1- tObbâd se place,
sans aucun doute, en 1207-1208 (1792-1793); d'aulre part, la
partie du TorjOlnân qu i concerne les Alawites s'arrête sous'
t

le règne de Moulay Sola1mân, à une époque très pOSlé-


rieure, en 1228 (1813) (1).

(1) \Jème le manuscrit qu'a eu en main ,1. Houdas provient d'un ori-
ginal posléri 'ur à 1231 (1816 ), dale de la morl de Moulay Solaïmùn,
puisque ez-Zayyùnt appelle la miséricorde divine sur ce pri/1ce en mème
172 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

La solution de ce petit problème n'offre, au reste, aucune


difficulté. L'ouvrage, dont le plan a été imaginé en Turquie,
a été mis en chantier à Sijilmâsa, laissé de côté pendant les
longues pél'iodes d'acti vité politiq ue d' ez-Zayyâni, rédigé
d'une manière à peu près définiti ,'e à Tlemcen en 1792-
1793 et mis a u cou ['ant des événements marocains postérieurs
à cette date, en 1813.
L'examen de la partie du TorjOlnân relative à l'histoire non
maghribine et à celle des dynasties marocaines antérieures
aux Sa'diens, n'entre pas dans le cadre de cette étude (1).
Comme l'a fo!'t bien remarqué :M. Houdas, ez-Zayyâni passe
très vite sur tou te cette première partie, tout en donnant pour-
tant un assez long développement aux pages qu'il consacre
aux Turcs. Mais, sans craindre un manque de proportions
dans l'ensemble de son ouvrage, l'historien semble arl'i\'er
à son véritable sujet en abordant l'histoire de son pays, et
surtout la partie de cette histoire qui se rapporte à la der-
nière dY' 1astie éteinte et à la dynastie régnante. Ses chapitres
sur les Sa'diens et les' Ala-wites ne sont plus des résumés
rapides, mais, au contraire, de véritables monographies. On
s'en rend compte aisén1ent, du reste, à première vue: l'un
de ces deux chapitres forn1e, avec sa traduction française,
un assez fort volume. .

Dans les manuscrits qu'a consultés l'éditeur du lJla/'oc de


1631 à 1812, le chapitre sur les Sa' diens manque (2). Il

temp5 que sur son père ~lol:tammed ben 'Abd Allah, dans le tUre du cha-
pitre relatif à ce dernier sultan. Cf. el-Torjomân el-mo'rib, éd. Houdas,
p. 70 du texte: J~l~_\ j~ .uJ\ .À~ j~ ~:>:;A '-?~ .:"l1LI\ ~~.)
. ~,U\ l~~>-.) ':"L0- ~Uy ...J\J .Y'J
(1 ) D'ailleurs, malheureusement, tout le chapitre sur les 1érinides
manque dans l'exemplaire manuscrit de Salé,
(2) M. Boudas, Illtroduclion, pp. nI-IV, remarque pourlant que dans le
seul manuscrit complet qu'il ait eu à sa disposition, le chapitre sur les
'Alawiles est précédé d'une lacune: « D'après les premiers mols de son
récit, dil-il, on pourrait croire qu' Ezziàni avait également écrit l'hisloire
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE 173

existe au contraire, heureusement, dans le nôtre. Et, bien


que relativement postérieur aux événements qu'il relate et
aux monographies de la dynastie (Nozltat el-/:lâctî d'el-Ifrânl,
Anonyme ùe Fès ), il constitue une nouvelle source inédite,
de premier ordl'e (1).
Ez-Zayyânî commence, comme il convient aux ouvrages
musulmans de ce genre, par donner une généalogie des
Chorra Sa'diens. Il ne s'y arrête pas outre mesure et profile
de l'occasion pour placer un souvenir personnel: un jour
qu'il rappelait au sultan Sidi NloQ.ammed ben 'Abd Allah les
différentes versions relatives à la généalogie des Sa'diens,
le sou verain lui enjoignit de se taire, en lui disant: « Ils
sont nos frères et nos cousins, notre ancêtre est commun et
nous avons à lanboû' le même quartier d'origine, les Beni
Ibrâhim! \) Ce trait est à noter, car il indique bien quel
était, à la fin du XVIIIe siècle, l'état d'esprit des princes
'alawites à l'égard de leurs prédécesseurs sa'diens (2).
Puis, enlpruntant le procédé des véritables annalistes, ez-
Zayyâni entame son récit dea événements, année par année.
Sa connaissance des gens et des choses de Turquie lui per-
nlet de tirer bon parti des renseignements qu'il s'est pro-
curés sur l'introduction des milices ottomanes au Maroc,
par l'intermédiaire de la nouvelle Régence d'Alger; il
montre bien l'influence prépondérante qu'elles ne tardent
pas à acquérir dans le makhzen des sultans Chorfa. Son
récit de la rébellion des (troupes contre le prétendant
wattâsî Aboû I:Iassoûn constitue une nouvelle version de

des Chérifs Saadiens et supposer que la place laissée en blanc était remplie
par celte histoire dans le lexle original; il n'en est rien cependant. » El
il voit la cause de cette lacune dans le fait que le chapitre sur les Turcs
s'arrête à 1701, au lieu de continuer jusqu'en 1812.
(1) Le chapitre sur les Sa'diens comprend, dans le ms. de Salé, vingl
feuillets in-quarlo d'écrilure serrée. J'espère le publier par la suite, avec
une traduction annotée, d'après la copie que j'en possède.
(2) On sail d'ailleurs que le sultan Mol}ammed ben 'Abd Allah élait un
grand admirateur du sultan sa'dien AJ:i.med el-Man~oûr et qu'il se plaisait
à l'imiler, el même à refaire, élape par étape, tous ses voyages de visites
pieuse_ à l'intérieur du Maroc. Cf. supra, p. 95, note 2.
174 J~ES HOMM·E S ET LES ŒUVRES

cette affaire; et c'est cell e qui doit se rapprocher le p l us


de la vérité, car elle délnontre, plus encore que les auLres,
que, sans l'esprit de décision des habitants de Fès, la capi-
tale, à ce monlent, serait devenue une yille turque. On y
sent mieux que dans la No;:Jlat el-llâdl, par exemple, la ten-
tative déguisée du sultan de Constantinople, qui veut faire
du chérif marocain son vassal, et qui exige, dans la leltre
de reconnaissance officielle fI u'illui adresse, que les prières
soient d.i tes et les monnaies gravées à son Rom .
Comme tous ses prédécesseurs, ez-Zayyàni arrive assez
vite au règne de 'Abd el<'dâlik, qui se termina par la vic-
toire d' el-Qat;;r . 1\1ais il offre une version différente et nou-
velle au sujet de la participation de 'Abel el-l\Ialik et de son
frère A4med à la prise de la Goulette par .les Turcs. Des
difficultés surgissent devant les deux princes qui veulent
reconquérir leur empire . Après avoir obtenu du sultan de
Constantinople une lettre pour son gouverneur d'Alger qui
doit leur fournir des troupes, ils voient ce dernier, appuyé
par l'odjaq des janissaires, ne pas obéir tout de suite à
l'011d,'e donné. Tout cela, relaté avec tant de détails, qu'il
semble que "la première partie du chapitre soit plutôt une
histoire des rapporls entre Turcs 'e t Sa'diens qu'une histoire
·<!le la dynastie sa'd ienne ell e-même .
La l'elation de la bataille du Wâdi'I-1\1akhâzin tient moins
de place dans le récit d'ez-Zayyàni que dans l e iJ'/ontaqâ
d'Ibn el-Qâçlî, l a Nozlta d'el -Ifrânî et l'Anonyme de Fès.
L'historien s'étend , en r evan ch e , sur l es préparatifs faits
d u côté m ar ocain à l'annonc e de la croisade portugaise et
f ourni t des indication s st at is tiqu es , qu e p erson ne avant lui
n'a pri s la peine de n o te r. E n effet, si nou s sommes aujou r-
d 'hui à p eu près complètem ent r en seignés , gr àce à la col-
l ection établi e par NI. de Castri es, s ur la nature et le Jn omb re
de s troup es europ éennes débarquées s ur le s ol maroc ain et
engagé es à la fameuse bataille du 4 août 1578, nous le
S(i)IDmes mnins quand il s 'agit <de .l',armée de Moulay ' Abd
el-Malik. Ez-Zayyâ ni vient ,dissipe r ce tte incertitude , avec
une précision très grande. ':D 'ap'rès 'l'ni, les tr0upes 'maro-
caines comprenaient un total de cinquante mille hommes ,
LES HISTORIEl'{S DE l.A DYNASTIE 'ALAWITE 175

se décomposant ainsi: quatre mi.lle soldats dits el-


mawâU (gardes du corps) ; quatorze mille, du gich (1) des
Anclalos (Andalous), qui étaient passés à la solde du sultan
'Abd el-~Ialik; dix mille, du gich des Chrâga el-'Ajam ;
cinq mille, du gich du Gharb; cinq mille, du gich des
Arabes du Ba-wz; dix mille Berbères du Soûs et deux mille
artilleurs. Ces chiffres ne sont pas seulement intéressants
par eux-mêrnes. Ils jettent une lumière nouvelle sur la poli-
tique militaire pratiquée par les Sa'diens. Ez-Zayyâni prend,
en effet, le soin d'expliquer à ses lecteurs que les gardes
du corps sont uniquement des renégats -,- précaution élo-
quente des sultans sa'diens vis-à . vis de leurs sujets j -
que le gich des Chrâga se compose de contingents des tribus
orientales Zowâwa, Beni Iznâsen, Beni Snoûs, Beni 'Amir,
T râra, Kibdâna, Gal'iyya et de contingents rifains; que le
g ich du Gharb est fourni, comme il y a vingt ans encore,
par les tribus de la vallée du Sboû inférieur: Khlot, Tliq,
Sofiân, et Beni Màlik; qu'enfin, les Arabes du Bawz de
Marràkech se nomment Zrâra, Chabânât, Oûlâd Mt â <, Qûlùd
J arrâr, ~lnâbha et, Dlim.
Cette énumération inédite) si, elle n'apporte pas de don-
n~es absolument neuves sur ce que l'on supposait des tribus
gich sa'diennes, a du moins l'avantage de fournir de cette
hypothèse une confirmation indigène, vraisemblablement
peu sujette à caution; il n'est pas sans intérêt non plus de
constater que les 'Alawites, plus tard, depuis le règne de
:M oulay Isn1â'ïl, n'ont eu qu'à suivre leurs devanciers dans
le choix de leurs contingents n1ilitaires, et qu'ils se sont
simplement bornés à fixer pour certains de ees contingents
de .nouveaux habitats.
Le récit de l'expédition au So~dan que fournit ez-Zayyâni,
dans son chapitre sur les Sa'diens, est également l'un des
plus complets qui nous soient parvenus sur le sujet. L'his-

(1) Ce mol est transcrit d'Il près 'la prononciation locale du classique
~ . On sait qu'au Maroc, le 9 dur remplace souvent le j. Un gîch
(guich) est~ dans 1e pays, un contingent militaire irrégulier, aux. ordres du
ullan, et ne prend les armes qu~en cas d'expédition.
176 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

torien avoue lui-même, d'ailleurs, avoir tiré une bonne part


de son information des Manâllil e$-$afâ' de <Abd el- <Aziz
el-Fichtâli; il Y a a.iouté des détails, qu'il a sans doute
puisés dans les archives du makhzen et qui sont toujours
remarquablement précis. Nature et nombre des troupes
envoyées à travers le désert, indication des principaJes
étapes, description des itinéraires suivis, rien ne manque à
sa documentation.
Si, comme tous ses prédécesseurs, ez-Zayyâni consacre
au règne d'el-Man~oûr le plus grand nombre des pages de
son histoire sa<dienne, il ne fait, lui aussi, que mentionner
pour mémoire les événements qui, après la mort du grand
sultan, commencent à marquer la décadence de la dynastie.
Sou vent même, il borne son récit à la simple énumération
des noms des sultans éphémères qui ne résistent plus aux
mouvemênts partis de la zâwiyya d'ed-Dilâ' et du Tâfilelt.
Là, pourtant, encore, en dépit de la sécheresse de sa
rapide relation, on rencontre parfois quelques informations
inédites.
Le chapitre se terlnine par un poème mnémotechnique
sur les princes de la dynastie sa<dienne. Ez-Zayyânî excelle
dans le genre des romoûz. Il en composera également un
sur les sultans <alawites et il le placera, de même, à la fin
de son dernier chapitre. La page qui termine celui qui nous
occupe est remplie par un tableau d'ensemble des sultans
sa<diens, avec leur généalogie.
Il ne sera pas inutile de noter, enfin, que l'auteur du
To/'jomân ne manque jamais. au cours de sa chronique
annuelle, de rappeler les dates de proclamation et de mort
des différents sultans ottomans contemporains des princes
sa<diens.

Bien que parvenu au terme de son encyclopédie histo-


rique, ez-Zayyânl avait, en arrivant à la dynastie <alawite,
à traiter la partie de son suj et qu'il connaissait le mieux.
Les débuts de la famille des Chorfa de Sijilmâsa étaient
encore présents à peu près dans toutes les ménl0ires; le
LES HISTORIENS DE LA. DYNA.STIE <ALAWITE 177

long et glorieux règne de 1V[oulay Ismâ<ïl et la période


troublée qui l'avait suivi, jusqu'à l'avènement de Si di
Mol).anlmecl ben <Abd Allah, remontaient tout 'au plus à
quelques générations; c'était enfin une ère de tranquillité
et de prospérité, qui, commencée avec Sieli Mol,1ammed,
se poursuivait tant bien que mal avec son fils Moulay
Solaïmân, après avoir été troublée, pendant de courtes an-
nées, par le passage au pouvoie du néfaste Moulay el-Iazîd .
. Pourtant, aucune œuvl'e historique n'avait encore été
consacrée à la nouvelle dynastie chérifienne : à peine e1-
Ifrânî en avait.-il, à la fin de sa Nozhat el-J.tâclî, retracé l'ori-
gine et écrit une chronique hâlive de;:; règnes des trois pre-
miers sultans <alawites. Ez-Zayyânî, conscient d'être, pour
ainsi dire, le premier historiographe de la maison régnante,
ne pouvait pas, malgré la concision que lui imposait son
plan d'ensemble, ne pas donner une certaine étendue à son
dernier chapitre. C'est en laissant courir sa plume qu'il dut
composer l'histoire <alawite de son To/'jomân.
, Cette partie de l'œuvre du ministre historien est trop
connue depuis sa publication par M. Houdas, pour qu'il soit
nécessaire d'en faire ici l'analyse détaillée (1 ). Elle se pré-'

(1) Le jugement que nous avons emlS au sujet de la traduction de l'a


No z hat el-l},âdî par M. IIoudas vaut, dans son ensemble, pour sa traduction
du Torjomân d'ez-Zayyânî. Au moment où il publiait celte dernière œuvre,
le savant orientaliste était bien excusable de ne pas être au courant de la
toponymie marocaine, et, en particulier, de la toponymie spéciale des
quartiers de villes (cf. de même, la traduction par de Slane de l'Histoire
des Berbères d'Ibn Khaldoûn). A ce point de vue, il y a lieu de relever et
de corriger les plus imporlantes des quelques erreurs qù'il a commises:
Page 39 du texte et 72 de la trad, : Aboû'l-} harârib (Boû'l-khrâreb) n'est
pas à Fès le nom du Trésor public, mais celui du bras principal du Wâdî
Fâs qui sert d'égo~t collecteur (la remarque a déjà. été faite par Bel, Ins-
criptions arabes de Fès, p. 182, note 1).
De même, p, 5 du texte et 10 de la trad . : le gouverneur de Fès nommé
par les Dilâ'ïtes, voulant punir les révoltés de la ville, ~..)\}\ r"~ & ';,
c'est-à-dire: « leur supprima l'eau de la rivière (qui arrive par des con-
duits dans chacune des maisons de la Ville-Vieille) »1 et non comme le
traduit M. Houdas, « réussit à les empêcher d'arriver jusqu'à la rivière' ».
Corriger aussi, dans Pêdition Houdas, à la page 85 du texte (p. ,156 de
12
178 LES HOMMES ET LES ŒUVHES

sente comme la suite normale de l'œuvre d'el-Ifrâni; en


reprenant, après elle, la généalogie des Chorfa <Alawites et
leur établissement sur le trône du Maroc, elle la poursuit
pal' la relation des règnes des sultans de la dynastie, jus-
qu'en 1813, exactement.
Ez-Zayyâni continue, d'ailleurs, à employer le même pro-
cédé d'exposition que dans la partie de son histoire qui con-
cerne la dynastie sa<dienne. C'est celui de la chronique an-
nuelle; il adopte, en même temps, des di visions plus
générales, pal' règne; Ù. peine fait-il une exception à cette
règle, en introduisant, dans son récit, un exposé consacré
spécialement à la lieutenance que Sidi MOQanlmed ben <A bd
Allah exel'ça à 1\1arrâkech, du vivant de son père.
Ce sont les règnes des trois princes au service desquels
il fut lui-nlême, qui tiennent, comnle on peut s'y attendre, le
plus de place dans son chapitre. Il se nlêle à leur histoire
des événements politiques qu 'il a suivis de très près, du fait
même de ses fonctions, et il y insiste évidemnlent.
Les textes manuscrits que 1\1. Houdas a eus à sa disposi-
tion laissent croire qu'ez-Zayyânî, malgré le développement
qu 'il donne à la partie du To/'jomân qui concerne la maison
<alawite, s'est astreint néanlnoins à écrire le chapitre de
manière rapide et à laisser bien des faits dans l'ombre. Ces
textes le disent mème expressément, à propos d'une lettre
en voyée par le dîwân turc d'Alger à :M oulay 1\Ia.o.anlmed ben
ech-Charif : « Le texte de ce message est trop étendu pour
que nous le reproduisions ici, étant donnée la concision que
nous nous sommes imposée daI~s cet ouvrage, mais on la
trouvera in extenso dans le petit livre historique intitulé:
el-Bostân e~-~al'Îf ft dawlat awlâd Mawlâï <Alî'ch-Charî(,
où nous avons exposé tout ce qui est relatif au règne de ces

la trad.) le mot J-<:::" \r, traduit « I aroe » qui doit êlre remplacé par

~;L...:: , « Chràga n, nom de la grande tribu gich du nord de Fès. Il est diffi-
cile d'admettre que les habitant de Marràkech soient allés jusqu'au mau-
solée de Moulay Aboù'ch-chilà' el-l hammàr chercher un asile, ce mausolée
se trouvant à une journée de marche au oord de Fès.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALA WITE 179

princes, à leurs conquêtes, à leurs luttes intestines ou à leurs


guerres contl'e l'étranger. Quant à l'extrait que nous en don-
nons ici, il est seulement destiné à faire suite à l'histoire
des dynasties précédentes, de façon que ce travail soit com-
plet et ernbrasse toute l'histoire; toutefois, pour cette
partie comme pour les précéuentes, nous nous sommes
bornés à un résumé (1). »
Cela est clair. Le dernier chapitre du TOl:jOlnân n'aurait
d'autre raison d'être que celle de compléter l'ouvrage. Il ne
constituerait qu'un résumé d'une monographie de la dynastie
'alawite, le Bostân.
Pourtant ez-Zayyânî ne fut pas toujours du même avis, du
moins si nous en jugeons par le manuscrit que nous avons
consulté. Le passage cité plus haut ne s'y trouve pas, t~ndis
que le texte de la lettre en question y est donné tout au
long. D'ailleurs, les manuscrits Houdas et le nôtre diffèrent
corn piètement; et, si la matière est la même, elle n'y est pas
traitée de la nlême façon. On ne tarde pas à s'apercevoir, en
confrontant les deux textes, qu'ils constituent deux rédac-
tions différentes du même sujet.
Prenons des exemples précis. Parfois, on trouve dans le
manuscrit de Salé des renseignements qui n'existent pas
du tout dans l'autre recension. Ainsi, en arrivant à l'an-
née 1200, ez-Zayyâni parle, de part et d'autre, de son ambas-
sade à Constantinople. Puis, la version des manuscrits
Houdas passe immédiatement à l'année 1201. Dans le ma-

(1) et-Torjomân el-mo'rib, éd. Houdas, pp. 4-5 du texte et 8-9 de la trad.
Texte arabe:
J~ ~J .1J~\ .)La:>U\ J:>.U ~l:)J .u,~y1 [iJl-)\] ~ j
~~..r:J\
~
Je
- ~Uy ~UJ\ ~J~
.
J ~. ~J\ 0~~ t5~~J\ ~ Ô ..N
~U\ j-o r~l> j.J r'"!J? j r~b- .,:;j ~~~\ 6v} ~.,:-\ ~jJ\
JJ..J\ j-o r~~ w .lIS:;: ~~ L..;L; i~j\ ~~ L.\J r~ ~ J
l.. J~ ~~y4:>\-, JJ..J\ L:~ Ll.L;J l-l:> ,-;,l:Û\ 0';;' ~':.:>-
~~
180 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

nuscrit de Salé, au contraire, le récit qui, jusqu'à la fin du


rapport de l'ambassade, est identique à celui des autres re-
censions, continue par une longue description de Constanti-
nople' et, avant d'aborder les événements de l'année 1J01, il
contient encore, pour l'année 1200, des renseignen1ents sur
la création par le sultan Sidi l\1oQan1nled ben <Abd Allah
d'une caisse de réserve destinée à l'entretien des garnisons
maritimes, avec des d é tails précis sur le nombre des soldats
en service dans chaque port et sur le montant de leur solde
trim estrielle (1) .
D'autl'es fois, des faits, complètement identiques dans le
fond, sont rapportés en termes différents. POUl' le montrer,
nous ne pouvons mieux faire que de donner en regard l'une
de l'autre les deux versions d'un passage, pris au début du
chapitre sur le règne de Moulay Ismâ(Il (2) :
Version des manuscrits Version du lnanUSCl'it de
IIoudas. Salé.
- A la mort d'Errechid, son A la mort d'er-Rachid ben
frère Isma'LI fut proclamé sou- ech-Charlf, le sultan Ismà(ïl
verain à NIéquinez. Ce prince fut proclamé à Meknès; car
habitait l'ancienne casbah des il était lieutenant de son frère
Almohades, dans larluelle il er-Rachid dans cette ville et
s'était fait constl'uire un pa- habitait la qa~ba qu'avaient
lais. édifiée les Ahnohades (3) .
(1) Ces renseignements ont été reproduits par Akensoûs, el-Jaïch el-
(aramram, l, p. 72, et pal' en- â~irî, Istiq~d, IV, p. H 7.
(2) Cf. et-Torjomdn el-mo (rib, éd. lIoudas, p. 12 du texte et 24 de la
traduction.
(3) Texte arabe: .
Manuscrits Houdas. Manuscrit de Salé.
~i.,l:~ ~-'~ ~":;)l . ,:,,,lo Wj . ~.Y. ~.J..::J\ j~ ~.J\ .:."lo WJ
~ 0L5J" ~L-' oLhLJ\ ~\ ~~~\ j! ~~\ 0LkLl\
~l5:! ~j\ ~~..w\ j~...b-.,.J\ ~JJ\ ~\ ~l> 0L)';\ .\-~
.. ~ - 4-~ If~~ ~L:-! ~-=.J' l~ }JjLü ~!
:. 0j...b-r H
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE <ALAWITE 181

On le voit, ici les différences sont à peine sensibles et ne


portent que sur la fornle proprement dite. Enfin, autre di-
vergence notable, tandis que les manuscrits Houdas s'arrê-
tent presque e.'x: abrupto aux événements de l'année 1228
(1813), celui de Salé se termine par un long portrait moral
du ultan 1\1 oulay Solaïmân et un tableau généalogique de
tous les sultans de la dynastie, jusqu'à la fin du XVIIIe siècle.
Que faut-il conclure de cette coexistence de deux textes,
l'un plus complet que l'autre? Ils sont tous deux, la chose
ne fait aucun doute, l'œuvre d'ez-Zayyàni. Le texte de Salé
est-il celui d'une version augnlentée après coup, ou bien le
texte des manuscrits Houdas est-il celui d'un résumé de la
rédaction originale, que l'historien a émondée pour lui don-
ner la fornle concise qu'exigeait le cadre de son TOl'jomân?
La seconde hypothèse ne fait, à notre avis, aucun doute. En
effet, la phrase cl'ez-Zayyàni citée plus haut, qui rappelle,
dans le texte Houdas, la longue citation épistolaire qu'elle
supprime, démontre aisément que la version la plus résumée
du chapitre sur les . Alawites est la version postéri eure.
L'historien, ayant rédigé son récit de la dynastie <alawite et
l'ayant trouvé lrop long, l'a abrégé par des coupures en
différents endroits et par un remaniement de la forme e11e-
même.
Ce ne fut pas d'ailleurs le seul souci des proportions qui
dut pousser ez-Zayyâni à restreindee l'étendue de son der-
nier chapitre. Avec sa version développée, il avait, toute
trouvée, la matière d'un nouvel ouvrage, relatif, cette fois,
à la seule dynastie <alawite. Ce fut l'origine du Bostân.
Ainsi donc, il est tou t à fait probable, sinon absolument
certain, qu'ez-Zayyânî ayant, dans sa première rédaction du
TorjOlnân, donné à l'histoire des Chorfa régnants une am-
pleur disproportionnée au reste de l'ouvrage, la jugea en-
suite inutile et n'eut plus qu'à la compléter par la suite
pour avoir, à son actif, sans grand effort nouveau, un autre
ouvrage historique, indépendant du premier. .
Il Y a d'ailleurs des raisons de croire qu'il fut poussé à
prendre cette détermination par l'attitude de ses lecteurs,
qui ne durent voir dans le preluier TOl'jomân qu'une bis-
182 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

toire 'alawite précédée, pour ainsi dire, d'une introduction


sur les autres dynasties. 01', ce n'était pas là le but que
s'était proposé ez-Zayyàni : il voulait que son histoire fùt
avant tout une histoire universelle, et la nou velle illustration
d'un genre dans lequel de grands historiens arabes avaient
acquis leur renommée.
On conçoit sans peine que la première version du TOlio-
mân 'alawite soit devenue fort rare au "M aroc, Les exemplaires
de la version courante n'y sont guère plus nombreux (1). Et
la conclusion la plus intéressante qui se dégage de la discus-
sion qui précède réside dans le fait que des historiens pos-
térieurs, étant donnée la rareté du premier texte, en ont
pillé des passages entiers sans aucun scrupule et en se gar-
dant de citer honnêtement une source à laquelle ils étaient
bien sûrs qu'on n'irait pas se reporter. Nous verrons que
si Akensoûs a transcrit, dans son histoire de la dynastie
'alawite, parfois en mentionnant son emprunt, parfois en
jugeant inutile de le faire, la plus grande partie du Bostân,
il n'a été qu'un plagiaire sans vergogne, en insérant, Inot
pour mot, dans ce même ouvrage, le premier Torjomân,
introuvable, d'ez-Zayyânî (2).

Les conclusions auxquelles amène l'examen des deux ver-


sions du Torjomân se tl'ouvent, au surplus, vérif ié es à la
lecture de la grande histoire ' alawite d'ez-Zayyânî. Les
exemplaires manuscrits en sont encore plus rares que ceux
du Torjomân (3). Ils portent, en plus du titre sous lequel
l'ouvrage est le plus connu: el-Bostân e~-~(lI·tf ft dawlat
awlâd .J!Iawlâï 'AU 'ch-Chartf, le second titre suivant: er-

(i ) Les copies du second Torjomân que j'ai vues à Fès el à Rabat ont été
faites, ces dernières années, sur le texte de l'édition Houdas elle-même.
(2) C'est probablement de l'exemplaire salélin du TOljomdn utilisé par
nous, qu'en-Nâ~irî s'était servi au momenl de la composition de son Kitâb
el-istiq$â.
(3) H.appelons que nous n'avons pu en avoir à nolre disposition, à Fès,
qu'un seul exemplaire, pendant une nuit seulement.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE 183

Rawrjat es-Solaünanlyya fî dllik,. molottlc ed-dawlat el-ismâ-


'îlîyya wa-77Uln taqaddamahâ min ed-dowal el-islamtyya (1),
ce qui peut laisser cL'oire que l'histoire n'est pas tout entière
consacrée à la maison 'alawite, mais qu'elle embrasse toules
les dynasties musulmanes. Effectivement, la préface du Bos-
tân n'est qu'un résumé du To,.jomân, très abrégé il est vrai,
mais qu'ez-Zayyâni aurait pu se dispenser d'écrire. La pré-
sence de cette préface, au début de l'ouvrage, montre bien,
en tout cas, que le Bostân ne fut qu'une réédition du travail
antérieur, très augmentée pour toute la période 'alawite.
Cette moqaddima ne manque pas 'd'intérêt. puisqu'elle
groupe, sous forme de listes, les dates de proclamations de
tous les souverains musulmans, jusqu'aux derniers sa'diens.
Elle est, d'ailleurs, très courte, alors que la partie 'alawite
proprement dite comprend treize chapitres, quatre appen-
dices (fO$oÛl) et deux conclusions (jell7li' a et khâtima'l .
Graulle a déjà analysé, un par un, en 1913 (2), les chapi-
tres du Bostân. Ils sont chacun d'une étendue variable, s'al-
longeant d'autant plus que la période qu'ils retracent est
plus récente, si bien que l'histoil'e est avant tout une chro-
nique, détaillée à l'extrême, des règnes de Sidi Mo}:lammed
ben 'Abd Allah et de Moulay Solaïmân ; ez-Zayyânî consacre
à chacun de ces princt'S plusieurs dizaines de pages; une
seule lui suffit, pourtant, pour la relation du règne de son
ennemi Moulay el-Iazid.
Ce n'est pas seulement par l'étendue de la matière tl'aitée
que le Bostân diffère du Torjo77, 4,n 'alawite. Dans ce dernier

(1) Il semble même que ce ne fut qu'asse . . tard que l'ouvrage prllie
nom d'el-Bo~tân. Le manu crit de Sidi Al)me, Ibn el-.Mawwâz, qui fut
l'exemplaire de lravail d'ez-Zayyànî, porle à l'L 'ipit enluminé: ~~

~L-..\'\ .DJ ..0\.Jl.>\ ..::..a~ c.s:J\ ~~\ ~J~ I\J ~~.)\ ~\


rLiJ\ ,(sic) y,\ ~~\ ~.ciJ\ ~J\ ~l~\ d ~~..J\J ".. W~ ~.y\'~
. JL~jh ,~\ j!\
(2) Dans la Revue du Monde tnusulman. Cf. supra, p. 143, bibl, "'aphie
d'cz-ZayyànÎ.
:184
LE'S ' HOMMES ET LES ŒUVRES

ouvrage, ez-Zayyânî ri'est qu'un chroniq ueur et pas autre


,chose. Dans le Bostân, au contraire, il faiL preuve de culture
et de connaissances littéraires approfondies. En effet, avant
.d'écrire chacun de ses chapitres, il tient à donn~r un déve-
.loppement, assez ,COUl't d'ailleurs, Sur la qualité maitre~se
ou le défaut le plus saillant du prince dont il va s'occuper.
·Ce sera, par exemple, l'intelligence pour Moulay er-Rachid,
la b1'a\"oure pour Moulay Ismâ'ïl, la clémence pour Sidi
~Iol).ammed ben 'Abd Allah, l'orgueil pour i\Ioulay el-Iazîd
et.la justice pour .M oulay SoIaïmân. Le procédé semble un
'peu renouvelé du lllontaqâ d'Ibn el· Qàçli : l'histoire devient
en même telnps une petite anthologie n10rale, avec citations
poétiques à l'appui.
Les lettrés marocains, au lieu de constater qu'en agissant
de la sorte ez-Zayyâni sacrii'ai t légèrelnent ses procédés ha-
bituels au goût de ses lecteurs, n'ont pas manqu~ de trouver,
dans ce souci de forme littéraire, un nouveau motif d'accu-
. satlon contre l'histol'ien. Ce dernier aurait, en effet, donné
à « polie» son Hostân, tâche dont il aurait été bien incapable
lui-même, à un jeune lettré remarquablement doué, 1Iol}.am-
llled ben Idrîs (1), qui devait, par la suite, devenir premier
ministre de :Moulay 'Abd er-Ra];unân. Ez-Zayyânl aurait em-
. ployé l'étudiant pendant tout le temps de la rédaction de son
histoire, moyennant le salaire de cinq oûqîyya par jour (2).
Cette légende que ses ennelnis firent courir Sur l'histo-
rien n'était d'ailleurs qu'une riposte. Son ouvrage se pré-
. sèntait COlllme une sorte de défi, qu'il lançait aux lettrés <;le
la cour impériale où il vivait. Les prelnières pages du Bos-
tân sont une critique acerbe, presque virulente, de::; fonc-
tionnaires du makhzen marocain. HIes y traite sans ménage-

('1) Aboù 'Abd Allah Mol:lammcd ben Idrîs ez-Zammoûri el- 'Amrawî,
vizir et homme de lettres, très prisé au Maroc comme poète. Mort le 4. mo-
I:tarram U64 (12 décembre 1847),. Cf. Akensoù , el-Jaïch el-<aramram, II,
p.148 qq.; Mo1).ammed es-Sà'ïl;t, el-Mon(akhabât el-'abqarîyya, p.103 sqq,;
notes inédites de Sid el-<Abbâs ben IbrâhÎm el-MarràkochL
(2) Il faut toutefoïs reconnaître qu'ez-ZaYYùl1Î , en citant à la fin de son
. Bostdn une qa§ida de ce personnage (en rime dni) , dit qu'il lui servit de
secrétaire pendant un certain temp .
LES IlIS'rORIENS DE LA. DYNASTIE <ALA WITE 185

ment, « occupés qu'ils sont tous à s'approprier de l'argent,


des maisons, des terrall1s de culture, des jardins et des ha-
lneaux ('1 ) ! ») Là encore reparait la franchise brutale du Ber-
bère fruste; ses lecteurs marocains ne l'oublieront pas!

C'est exactement le 12 l'abrI 1233 (20 janvier 1818), jour


anniversaire de la naissance du Prophète, qu'ez-Zayyâni ter-
mina son dernier ouvrage, et-Torjomânat el-kobJ'â. Il avait,
à cette époque, l'âge respectable de quatee-vingt-six ans. Il
ne pouvait mieux faire alors, puisqu'il avait encore assez
d'activité pour couvrir d 'écriture des cahiers de papier, que
de co"mposer, en quelque sorte, son autobiographie et de don-
ner une relation détaillée de ses trois voyages hors du Ma-
roc. La TorjOlnâna partiei pe à la fois de la j'iZûa et de la
fahrasa, rnais, plus que les l'iZzla ordinaires, elle veut être
avant tout un traité de géographie. C'est même un véritable
dictionnaire, où s'accunlulent des renseignements de toute
nature. On en jugera par le titre complet, qui, traduit en
français, a le mérite de ne pas être trop ambigu (2) : « La
grande interprète, qui réunit ce que l'on peut savoir du
monde, sur terre et sur mer, y compri~ les capitales, les
villes, les bourgs, les déserts, les mers, les montagnes, les
fleuves, les sources, les mines, les puits, et qui, d 'autre part,
contient les vertus meeveilleuses des règnes animal et mi-
néral, avec à l'appui, tous cOlumentaires nécessaires, sans
corn pter la description des ruines. les ·consultations j uri di-

(1.) La traduction de ce réquisitoire a été faile et publiée par Graulle,


loc. cit.
4-
(2) UX;' ~J :. ~j 0! 2W\ .)~\ ~ ~\ LSP\ :(;l~.)\
0..,~)., :. .)4r;\I\j J~j\., )~j\., :. .)lÂAj\j LSJ-<iJ\j 0.À.J\j :. .)La..}' \ ~
:. .)l:>:>)I\j .::.,,~,~\ rf\"'> ~~;:. j" ~~ yf-j:. .)~ }'\j 0~1..J~
:.)...;;)1\ ~\yj ,-:"..rJ\ ~j ~A.ij\ J)..,;j :·.)l:')lGJ~\ j" ~~ .À!..Y.. ~-'
186
LES HOMMES El' LES ŒUVRES

ques (1) la lexicogl'aphie arabe et les exemple.s tirés des


1

pièces de vers. »
Cet intitulé si long donne à peine une idée de tout ce que
contient la Tor.Jomâna : en plus de l'étude géographique, qui
en est l'objet principal, des indications littéraires, histori-
ques, biographiques et autobiographiques yvoisinent presque
à chaque page. D'ailleurs, pas de plan rationnel; la plus
grande fantaisie a dicté à l'auteur la place attribuée à cha-
Cune des matières traitées. On peut néanmoins, à la rigueur,
y tracer de gl'andes divisions générales : ce sont celles que
Salmon a dégag.ées, dans son article consacré à l'ou-
vrage (2).
Il va sans dire qu'un livre aussi hétéroclite ne Iut pas écrit
au courant de la plume. Ez-Zayyâni devait l'avoir en chan-
tier depuis un certain nombre d'années: la date que nOl:lS
avons mentionnée plus haut n'indique même pas l'époque à
laquelle il fut définitivement terminé, puisque l'écrivain re-
late, à plusieurs reprises, des événements qui se déroulèrent
en 1234 et même en 1235 (1819-21 ). On sait, d 'a illeurs, qu'au
Maroc, un ouvrage n'est réellement terminé qu'à la mort de
son auteur: celui-ci, tant qu'il est vivant, y fait, chaquejour,
sans en modifier 1e texte à proprement parler, des additions
marginales souvent importantes (3). On s'en rendra compte
par la photographie ci-contre (fig. 2) qui reprod'lÏt une page

(1) Traduction de la locution ~1 Jjlj , d'après Milliot, Recueil de


Jurisprudence chér~(iellne, Paris, 19:20, l, pp. 17 et 18, note 1.
(2) SalmOn, Arch. mar., Il , p. 331: « Description du Maghrib; Voyage
à Istanboul (sic) en l'an 1200 ; Description de l'Andalousie; Description
d 'Istanboul et d e ses monuments, et, au retour, de l'Algérie et de la Tu-
nisie; Les sep climats; Description de l'Egypte en détail; Voyage au
Hedjaz et à La Mecque; Histoire des anciens rois de Perse; Description
des mers ct des monfagnes ; Liste des œuvres de l'auteur; Sur les pro-
phètes de l'antiquité, Noé, Enoch, etc. ; Liste des villes du monde en
commençant par le Maghrib. /)
(3) De même , bien que la préface du Bostân avertisse le lecteur que
l 'ouvrage s'arrêtera à l'année 1226, il ne prend fin véritablement qu'au
début du règne de Moulay 'Abd er-RaJ:lmân. Nous verrons qu'en-Nâ~irî
n 'a pas agi différemment en annotant en marge le Kilâb el-Isliq~â, avant
de le livrer à l'impression.
FIG. 2.
__ ~ u .... ., v un
u. 1-'''';:'''
lA.~t-l VI:JVIILUI!I.'u eL-~oora a'ez-z.ayyanI,
avec annotation marginale autographe.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE
187

de l'exemplaire de travail d'ez-Zayyàni, exécuté à son inten-


tion par un copiste calligraphe; la marge est couverte d'an-
notations, introduites après coup, de la propre main de
l'auteur (1). L'écriture en est fine et serrée; c'est de la cur-
si ve maghrihine courante (2) . Ez-Zayyânî, arrivant, dans sa
description de la Cyrénaïque, aux ,ruines de ~Iasrâla, où
Inourut en 899 (1493) le fameux chaïkh Al)med Zarroûq (3),
ajoute, dans la marge, qu'il sera utile de donner une biogra-
phie de ce personnage, et reproduit in extenso la notice que
lui consacre la Dawlwt en-nâchir d'Ibn 'Askar (4).
Au point de vue historiq ue, la TOJ'jOlnâna est un utile com-
plén'lent au TOJ'jomân ct au Bostân. Les dernières années du
règne de :Moulay Solaïmàn y sont étudiées en détail. C'est
ainsi qu'on y trouve le récit Jéveloppé de l'expédition que ce
sultan entreprit en 1234-35 contre les gens de la confédéra-
tion à Jaquelle appartenaient les ancêtres d'ez-Zayyâni : les
AH Amàloù. Cette ex pédition échoua complètement; les re-
belles, sous la conduite de leur chef Aboû Bakr Am-

(1) l ous remercions Si Ibn 'Ali ed-Dokkâlî d'avoir pu faire meUre, pen-
dant quelques heures, ce précieux manuscril à nolre disposition. Grand
in-40, il comprend plus de 200 feuillels et a été exécuté dans l'année
même où fut terminée la première recension de la Torjomàna, à la fin de
dhoû'1-1:lijja 1233 (30 octobre 1818). La photographie reproduit le verso
du folio 11'1. .
(2) Cette annotation marginale a été incorporée au texte lui-même, dans
la copie récente qui nouS a été confiée par Sidi Mol).ammed ben. 'Abd Al-
O
lah el-Marrâkochî. Elle y figure sur les folios 138 V et 139 l'0.
(3) Aboû'l-'Abbâs Al).med ben Al).med ben Mol).ammed ben '1sà el-13or-
nosî (ou mieux el-Bornoûsi) el-Fâsî, connu sous le nom de Zarroûq, ori-
ginaire de la tribu des Bdnes, né en 81,(j (141,2). Gralld jurisconsulte mu-
sulman, sanctifié et révéré dans le nord de l'Afrique. Cf. sur lui lbn
'Askar, Dawl),at en-nachir, p. 38; Ibn el-Qàçl.î, Jadhwat el-iqtibâs, p. 64;
Al).med Bàbâ, Naïl el-ibtihdj, p. 71 ; Mol).ammed el- 'A.rbi el-Fàsî, Mir'àt el-
mal),dsin, p. 192; el-'Ayyàchi, Ril),la, l, p.96 et Il, p. 318; Ibn Mariam, el-
J:osldn, p. 45; el-Kattànî, Salwat el-anfds, IJI, p. 183; Brockelmann, Ar.
litt., II, p. 253; Ben Cheneb, Idjdza, § 51 et la bibliographie cilée ; pour
la légende populaire de ce saint, cf. Trenga, les Branès, in Archives ber-
bères, vol. l, années 1915-1916, p. 293 sqq.
(4) Celte notice figure dans l'édition de Fès de la Dawl),at el1-nâchi,., aux
pages 38-40.
188 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

hâoùch (l ) , faillirent faire l\foulay Solaïmân prisonnier; la


défaite des troupes du makhzen entraîna la défection des
tribus berbères jusque-là soumises (2). Il es t prohable
-qu'ez-Zayyàni, trop âgé, ne se joignit pas à la colonne impé-
riale. En tout cas, l'approche de la lTIOrt ayant vraisembla-
bl'e ment provoqué en lui une recrudescence de piété, il ne
ménagea pas dans Son ouvrage ses anciens contribules, au
point de les considérer comme des infidèles auxquels était
faite une véritable guerre sainte. Qu 'il s'agisse de l\Ioulay
Ismâ 'ïl ou de son petit-fils Sidi l\Iol)ammed ben ' Abd Allah,
on trouve encore, dans la Torjolllâna, beaucoup de rensei-
gnements inédits, autant sur la politique intérieure de ces
sultans que sur leur vie privée. Enfin, l'ouvrage contient
une nouvelle poésie didactique sur la dynastie 'alawite, diffé-
rente de celle qui termine le dernier chapitre du TOJ'jomân.
Ez-Zayyàni est le se ul historien marocain qui s e so'it
occupé de géographie en même Lemps que d'hisloire. Re-
connaissoTI3 qu ' il y fut un peu poussé par les circonstances:
il est cer' ain qu 'au cours de ses trois longs voyages, l'au-
teur acq 'lit sur le monde méditerranéen, islâmique et non
islâmiq .le, des connaissances que ses compatriotes étaient
rares " posséder. Son esprit curieux le poussa à se rensei -
gner et à prendre, sur place, d'abondantes notes sur chacun
des pays qu'il traversa. En comparant ces notes avec les
trr vaux géographiques arabes qui existaient déjà, avec les
,. !da de ses prédécesseurs et de ses contemporains , el-
Ayyâchi et el-Ghazzâl, par exemple, il trouva qu'il avait ,
matière à un ou vrage irnportant.

('1) Sur ce personnage et ses de cendants actuels, cf. E. 'lichaux-Bel_


laire, Note sur les Amhaoa ch et les AhançaL, in Archives berbères , vol. II,
année 1917, p. 209 sqq.
(2j Cf. le récit de celle affaire dan en-. a~id, IsLiq$d, IV, p. 1~2 qq. Le
pa sage de la Torjomâna a été à peu près intégralement traduit par
E. Coufourier, in Arch. mar., VI, p. 44~ sqq. 10ulay Solaïmàn ne fut pas
heureux dans ses expéditions contre les Berbères; il avait déj à subi un
échec en 1226 ('1811) de la part de la tribu des Gerwàn. Aus i, sa mal),alla
demeura-t-elle proverbiale au Maroc. Cf. 'W. l\1arçais, Textes arabes de
Tanger, p. 1~7, note 1.
).J.'I

'~J J.?J

..6,?' J;jJJ

FIG. 3.
La « carte des mers)) d'cz-
LES HISTORIENS DE LA DYN.\STIE ALi\. \VITE 189

Il ne nous appartient pas de consacrer au Haité de géo-


graphie d'ez-Zayyâni l'étude qu'il mérite certainement. Tou-
tefois, nous croyons bon de reproduire ici (fig. 3) une
« carte des mers » qui se trouve j'ointe à l'exemplaire de
travail de l'auteur de la Torjomâna : l'intérêt de ce documen.t
lui-mêm e se double du fait qu'il a été tracé de la propre main
d'ez-Zayyânî. En voici une brève description:
Le monde est divisé (de haut en bas) en sept climats, et
chaque climat se subdivise lui-même (de droite à gauche) en
sept sections. Le premier climat comprend le Soudan et
l'Océan Indien; le second, le désert; la Mer Rouge, l'Arabie,
le Golfe Persique, l'Inde et la Chine; le troisième, le
Maghrib, l'Ifriqiyya, la Tripolitaine, l'Egypte, la Syrie, la
Perse, la Turquie et la Chine; le quatrième, l'Espagne, la
Méditerranée, la Syrie, le <Irâq et la Turquie; le cinquième"
le pays des Roûm avec l'Adriatique, la Grèce, les. Détroits
Turcs, la Mésopotamie, la Mer Caspienne, les pays des
Turcs et des Goths; la sixième, une partie de l'Angleterre,
le continent européen jusqu'à la :M er Noire, la Turquie
d'Asie; le septième, l'Irlande, le reste de l'Angleterre, le
Danemark et l'Esclavonie.
En incorporant cette « carte des mers» à sa TorJomâna,
ez-Zayyâni crut peut-être qu'elle produirait grand effet sur
ses lecteurs marocains, qui n'étaient guère habitués .à des
dessins de si belle ordonnance. Ils l'admirèrent probable-
ment, et encore avec quelque pointe de suspicion, mais n'y
comprirent rien (1). On était loin du temps où des voya-
geurs comme el-Idrîsî, Ibn Sa<ïd et Aboû'l-I):asan <AH e1-
Marrâkochî avaient créé et fait progresser la car·t ographie
arabe (2). Et si le traité géographique d'ez-Zayyâni se trouve

(1) Il en va à peu près de même aujourd'hui. Il est très rare encore de


trouver au Maroc des lettrés qui possèdent des notions exactes de géogra-
phie. Alors qu'on rencontre, en grand nombre, dans toutes les bibliothè-
ques privées, les manuels arabes modernes de mathématiques, de phy-
sique et même de médecine qui sont en usage dans les écoles égyp~iennes,
les traités de géographie et les atlas manquent dans la plupart des cas.
(2) D'après L. Massignon, le Maroc dans les premières années du XVIe siè-
cle, p. 48 sqq.
190 LES HQ MES ET LES ŒUYRES

encore au :Maroc en très , petit nomb e de copies, le croquis


qui l'accompagnait a, en revanche, disparu. L'exemplaire
récent de la TorjOlnâna (lue nous avons sous les yeux n'en
porte pas la moindre trace: sans doute, le copiste ou un
copiste précédent en jugèrent-Hs la reproduction au-dessus
de leurs capacités. Il n'est pas impossible qu'il n'existe de
cette carte que l'original, dressé par ez-Zayyânî fui-même :
ce curieux autogl'aphe n'en aurait alors que plus de valeur.

Si l'on rencontre, à diverses reprises, dans la Torjomâna,


des citations plus ou moins longues, extraites de livres
arabes, il n'en va pas de même dans les autres ouvrages
d'ez-Zayyânî. Dans le seul chapitre publié du TOI:jomân, à
1 peine deux sources sont indiquées au cours du récit : les
MO(lârjarât d'el-Ioûsî (1) et une histoire d'el-Ial).amdi (2). Où,
pour 'établir ses deux histoires, l'écrivain a-t-il puisé sa
documentation?
Ez-Zayyânî a placé la liste des sources du Torjomân en
tête de cet ouvrage. On la trouvera reproduite d'autre
part (3). Il Y groupe sous trois rubriques différentes les tra-
vaux consulté::; : les pren1Ïers sont ceux qu'il a tl'ouvés au
Maroc; les seconds, ceux qu'il s'est procurés à Tlemcen, à
Alger et à Tunis; les troisièmes, ceux qu'il a consultés à
Constantinople. Les sources dont il a eu connaissance dans
son pays sont les ou vrages classiq?es d'histoire marocaine du

(1) Sur cet ouvrage, cf. infra. La citation se trouve dans le Torjomân,
éd. Houdas, p. 9 du texte et 19 de la trad.
(2) A propos du nombre des nouvelles garnisons établies par Moulay Is-
mâ'Il (ibid., p. 16 du texte et 31 de la trad.). Il s'agit de Aboû'l-'Abbâs
Al}.med el-Ial:tamdi (ethnique des Benî Al;tmed), vizir de Moulay Jsmâ'ïl,
doot la vie a été rapportée en détail par Aboû'l-r:lasan 'Ali el-Mo~bâl).î el-
Wàrithî ez-Zarwalî, dans son livre intitulé Sanâ el-mohtadî ilâ malfâsin el-
Ialfamdî. EI-Tal;lamdî n'avait'pas composé d'histoire, mais avait simpleme,nt
été chargé de la tenue des registres de dénombrement des 'Abîd d'el-
Bokhârî. Cf. Akensoûs, el-Jaïch el-'aramram , II, p. 146.
(3) Infra, Appendice 1.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE 191

?\Ioyen Age et à peu près toutes les histoires particulières


de la dynastie sa'diènne. Celles qu'il consulta en dehors du
:Maroc, aussi bien dans l'Afrique du Nord qu'en Turquie,
sont des ouvrages d'histoire générale. Quelques-uns, pour-
tant, au nombee de trois, sont les traités des généalogistes
berbères Sâbiq ben Solalmân el-Matmâtl, Hâni ben Ma~doùr
el-Koûmi et Kahlàn ben Aboû Lowâ el-Awrâbî (1). Ez-Za)'yânî
prétend qu'il en eut communication chez le prédicateur de
1[\ mosquée d'el-'Obbâd, près de Tlemcen. Il en tira tout un
développement sur l'origine des tribus berbères du Maroc.
Les sources écrites utilisées par l'historien, pour la partie
'alawite du Torjol7'lân el pour le Bostân, se réduisent, au
contraire, à peu de chose. Il n'y a là, d'ailleurs, rien que de
très naturel, ez-Zayyâni ayant été, comme il le dit lui-même,
le premier à retracer les fastes de la dynastie des Chorfa
du Tâfilelt. La document:-.ttion de la partie la plus intéres-
sante de l'œuvre historique d'ez-Zayyâni est une documenta-
tion de première main.
En quoi consista-t-elle? Pour les règnes des premiers
sultans 'alawites, s'il fit peut-ètre quelques emprunts aux
derniers chapitl'es de la Nozha d'el-Ifrâni, il ne lui était pas
non pIns difficile de se rens~igner sur des événements rela-
tivement récents, dont le souvenir avait dû rester vivace
chez bien des personnes de son entourage; l'époque à la-
queUe il vivait et sa situation personnelle lui permettaient
de n1ener son enquête dans les meilleures conditions pos-
sibles au Maroc. Quant aux derniers souverains de la
dynastie, il avait été le témoin actif de leur fortune et les
avait suivis pas à pas durant leurs règnes.

(1) Ces trois généalogistes ont fait l'objet d'une étude complète de
M. René Basset, les Généalogistes berbères, in Archives berbères, vol. J,
rase. 2, pp. 1-1.1. C'est Ibn Khaldoûn qui en avait révélé l'existence. 11
est curieux de la voir confirmée par ez-Zayyànî. Si vraiment ces traités
furent consultés, il n'y a guère plus d'un siècle, ehez un savant de Tlem-
cen (qu'ez-Zayyànî ne nomme malheureusement pas), peut-être doit-on
garder l'espoir de les retrouver un jour. L'indication bibliographique
fournie par l'historien pourrait, le cas échéant, servir de base à une en-
quête mener dans les bibliothèques privées de celte ville.
192 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Avec son esprit curieux et sa pratiq ue approfondie des


choses marocaines, il y a beaucoup de chances pour 'qu'ez-
Zayyânî, pour la période qu'il n'avait pas vécue lui-même,
ait conduit ses recherches de main de n1a1tre. Aussi bien,
avait-il à Meknès et à Fès le moyen d'examiner par surcroît
des documents officiels. Il le reconnaît expressément dans
ses deux ouvrages (1) : non seulement lettres et rescrits
impér··iaux, mais aussi registres de comptes du makhzen
furent soigneusement dépouillés par lui.
On conçoit, dès lors, que l'histoire 'alawite écrite par un
haut fonctionnaire au service des princes de la dynastie, ait
par là-même une incontestable valeur documentaire. M. Hou-
das , quand il traduisait le l'oljomân. en faisait la remarque:
« En ce qui concerne son histoire des chérifs, Ezziâni n'est
pas un simple compilateur (2). ))
Reste à savoir si, en se faisant l'historiographe des sultans
qu'il servait, il put se garder de tomber dans la partialité
ou l'exagération. On pourrait tout d'abord lui reprocher un
petit défaut: à partir du règne de :M oulay 'Abd Allah, ez-
Zayyâni voit trop souvent l'histoire à travers la part qu'il
prit lui-même aux événements. Le « moi ) revient maintes
fois dans le Bostân, comme à la fin 'd u l'orjOlnân. N'est-ce
pas là ,un peu de vanité de parvenu et quelque besoin
d'étaler sa personnalité? On a vu d'ailleurs, dans sa biogra-
phie, qu'il ne s'y montre pas toujours en situation brillante;
ainsi, en flagellant son bourreau Moulay el-Iazid dans des
termes que ses contemporains n'auraient pas osé elll ployer,
il dépeint en même temps la mauvaise postu,re dans laquelle
il se trouvait. Et . sa franchise, q.insi, rachète un peu sa
vanité.
D'ailleurs, au Maroc, un historien tendancieux a toujour~,
en écrivant son livre, une arrière-pensée de bénéfice n1até-
riel. Ce ne fut pas le cas d'ez-ZayyânL Il dit, ~u début de sa
Torjomâna, que c'est en voyant, au temps , où il était encore

(1) ,Ainsi, et-Torjomân el-mo'rib, éd. Houdas, p. 29 du texte et 54 de la


traduction. ,
(2) Introduction au Maroc de 1631 à 1812, p. IV.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE 193

jeune, les cahiers de notes de son grand-père le généalo-


giste que le goût lui vint d'écrire l'histoire. Il semble bien,
en effet, qu'il ne l' écri vit pas pa r intérêt, d'autant plus,
comme on l'a vu, que son but initial ne fut pas de composer
une histoir~ contemporaine, et que l'idée de consacrer un
ouvrage à la dynastie 'alawite ne lui vint que plus tnrd,
après la rédaction définitive de son histoire générale.
Il ne put pas pourtant se dispenser de dédier ses trois ou-
vrages les plus inlportants à Moulay SolaImân; mais il n'y
eut rien d'obséquieux dans ce geste, qui ne fut qu'un hom-
mage discret et nécessaire. Le To/'jOlnân, premier ouvrage
d'ez-Zayyânî, n10ntre bien qu'il ne fut pas un annaliste à
gages, ni officiel, ni officieux. Il n'avait pas à attendre de
son travail d'historien de nouveaux avantages personnels;
ses capacités d'homme politique n'avaient pas, d'autre part,
besoin, semble-t-il, d'être mises en vedelte au moyen d'écrits
flatteurs pour la personne du souverain et la famille ré-
gnante.
Quoi qu ~ il en soit, la partie de l'œuvre historique relative
à la dyn~stie 'alavvite, comme d'ailleurs celle qui traite des
Sa'diens, donne une constante impression d'entière sécu-
rité. Ce qui frappe en elles, de prime abord, c'est le souci
permanent de la précision, aussi bien chronologique que to-
pographique. Aucun fait historique n'y est traité de manière
vague ou ambiguë; chaque renseignement est toujours ap-
puyé d'un chiffre, d'une date, d'un nom de lieu; les tribus, .
quand elles prennent quelque part à un événement, sont
toujours désignées nominati vernent. Le TorjOlnân et le
Bostân sont des monuments de toponomastique marocaine.
L'histoire politique n'est pas, au surplus, l'unique préoc-
cupation d'ez-Zayyânî. S'il excelle dans l' « histoire-ba-
tailles », ou pl utât l' « histoire-révoltes )), par sa sûreté
d'information et sa minutieuse connaissance du pays, il no
se dispense jamais - et c'est là un mérite qu'il partage,
d'ailleurs, avec Ibn el-Qâçlî et el-Ifrânl - de laisser dans ses
ol:lvrages une petite place aux innovations ou aux réformes
sociales. C'est ainsi qu'il tient parfois ses lecteurs au courant
de l'histoire des monnaies marocaines, sur laquelle on est
13
194 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

assez peu renseigné (1). C'est à lui que l'on doit également
d'être fixé sur les époques auxquelles furent édifiées cer-
taines constructions publiques. Les renseignements qu'il
fournit sur les immenses. demeures impériales de Meknès.
ont d'autant plus de valeur qu'ils proviennent d'un ministre
qui y vécut et en connaissait tous les recoins (2). Celui qui,

(1) Il donne, par exemple, le détail des modifications qui furent succes-
sivement introduites en 1081 (1670-1671) par Moulay er-Hachîd, et en 1085
(1674--1675) par Moulay Ismâ'il, au rapport des monnaies fictives mOtl zoûna
et mithqdl. Cf. et-Torjomdn el-mo'rib, éd. Houdas, p. 1 t du texte et 22 de
la trad., et l'utilisation du renseignement par Massignon, le Maroc dans les
premières années du XVIe siècle, pp. 100 et 102.
(2) En s'appuyant sur une affirma lion qu'il émet dans la partie sa'dienne
de son Torjomdn, on est en droit de se demander si certains des marbres.
qui ornent les portes monumentales et les palais de la capitale de Moulay
Ismù'ïl et de ses fils, ne proviennent pas autant du palais el-Badi' à Mar-.
ràkech que des vestiges proches de la Volubilis romaine. Ez-Zayyâni dit,
en c(fet, dans le Torjomân sa'dien, fol. 11 vO du ms. de Salé:
r,\ 6Jj .) ~ .t...b..)j ~ ~j '\!!.;.- ~.! oG~ ~~ .:.,~L:: ~.o:~.
0~ .,,\ 0.\ ':".).)jj ~k.... \ j: '\,UI ~c j! ~ ~~ ~t~.".J.\
u~rJI j: J~L-I ~'Y y rlic'Y\ .jl1U\ ~~ ~ ~l!j ~>J~\
j"~ Je ~",.i (5:J \ .).,,~~~ .)j..J\ jA ~ te .\.,l; J '\,U\ ~.)
~~~\ ~ U ~f'~ a.:. ~\ ~J~ ~~J\ ~\ J-?L:.," ~~\
~J ~-te JI .u.o:;1 \L>JJ\ ~ t:~J\ J.a.o:Jl: 0 lS- ~J-S; ~~.~j ~
.'. ~~ jA ~;){;'J\ j!.~ ~ 25l.i.)
« Je me suis rendu moi-mème compte, sous le règne de Sidi Mo}:lammed
ben 'Abd Allah ben Ismâ'Il, de l'importance de l'édifice (le palais el-Badî'),
bien qu'il fût démo1i et qu'on en eût enlevé les boiseries et les marbres.
J'aurais alors voulu qu'el-Fichtàlî (l'historiographe d'el-Man~oûr) fût vi-
vant, pour qu'il vit les constructions élevées sur la place de Meknès par le
sultan magnifique Moulay lsmà'ïl ben ech-Charif - Dieu lui fasse misé-
ricorde! - : ces maisons, ces palais, au nombre de 'plus de vingt, dont les
moindres ressemblent à el-8adi'; ceux qui sont de dimensions moyennes
le dépassent encore en magnificence, et il aurait à peine occupé un angle
des plus grands! Tous les marbres qui se trouvaient dans le palais el-Hadi'
fur ent transportés à Meknès sur l'ordre de Moulay jsmâ'ï[ ; à peine en eut-il
suffisamment pour faire décorer deux: ou trois de ses palais! » Cette as-
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE' ALAWITE 195

enfin, tenterait d'établir une histoire topographique de la


ville de Fès aurait ,à .puiser, à maintes reprises, aussi bien
dans le Torjomân et le Bostân que dans la TOl'jomâna, des
détails d'une remarquable précision sur la construction, ,la
démolition ou la réparation des mos.q uées, des médersas, des
ponts et des ouvrages fortifiés (1).
Mais le trait le plus original de l'historien est, à coup
sûr, sa connaissance des choses d'Europe. Rien ne le montre,
il est vrai, dans le TorjOlnân abrégé de l'édition Houdas (2),
où ez-Zayyânî a condensé le plus possible son récit de l'his-
toire des premiers' Ala-wites. Mais il n'en va pas de même
dans la version détaillée de l'ouvrage et dans le Bostân.
C'est évidemment aux relations turco-marocaines qu'il ac-
corde la place prépondérante, mais il rapporte aussi, briè-
vement il est vrai, chaque fois qu'il est renseigné, tout ce
qui a trait aux ambassades étrangères qui sont venues dans
l'Elnpire et à celles que les sultans ont eux-mêmes envoyées
en Europe. Ce qui est encore plus inattendu, c'est qu'il
n'ignore pas complètement l'histoire de l'Europe des temps
modernes, de mènle qu'il est à peu près fixé sur la position
géographique des princi paux états européens. Il ne faut pas

ertion de l'historien peut alors expliquer la présence des colonnades de


marbre de ]a porte de Meknès dite Bâb Man~oûl' el-<Eulj ct, plus sûrement,
celle des chapiteaux qui sont rangés dans l'une de cours d'honneur du
palai dit Dâr Baïçlà'.
(1) Ainsi, pour le seul règne de Moulay er-Rachid, on trouve, dans
1'~diLion Boudas du Torjomdn (pp. 9-12 du texte et 17-23 de 1<;1. trad. ),
quatre indications de ce genre l~elaLives à la ville de Fès: construction, eu
1080 (1669-1670), 'du pont qui traverse le \Vàdî Sboû à l'est de la ville;
restauration du pont d'er-Ra~if au mois de dhoù'l-qa'da de la mème année
(-23 mars-21 avril 1610) ; cons~r~ctiOl~ , à partir de rajab 1081 (14 novembre-
13 d écembre 1670), de la médersa dite d 'ech-Charrù(.în; con'sLl'liction , pen-
dant la mème année, de la qa~ba d'el-Khamîs (aujourd'hui qa~ba des
Chràrda). ,
(2) Cc qui fait dire ' à l'éditeur, dans son Introduction, p. II, qu'ez-Zay-
yùnî « ne parle que très rarement des relations, cepe,ndant fréquentes,
qui ont existé entre l~ , Marqf ,et les pUiSSal)<c,es européennes. C'est inci-
demment, et à propos 'du siège de Melilla, qu'il cite le traité conclu pal'
l'Espagne avec Sidi Mohammed, et, quant à Fambassad' s+ 'eDnnue d'Ibn
,Aisià à la cour de Loui XIV, il n'cn fait même pa~ mention.) "'''u
196 LES HOMMES ET I_ES ŒUVHES

oublier que, dans sa jeunesse, ez-Zayyâni longea le littoral


méditerranéen de F rance et d'Espagne et que, Jurant ce
long voyage, il eut tout le loisir de sÏnstL'uire et d'ap-
prendre, sinon le français et l 'espagnol, au moins quelques
notions de cette langue fl'anque que l 'on parlait couramment
dans les ports de son pays (1) . En tout cas, on n'est pas peu
surpris de trouver, en autres choses, dans la pal·tie sa' dienne
du Torjomân, un tableau assez long de la situation politique
de l'Eul'ope occidentale à la fin des guerres de reI.igion;
ez-Zayyâni l'introduit dans son récit à propos de l'histoire
du prétendant Moulay en-Nâ$ir et de raide promise par el-
lIIan$üùL' à l'Angleterre, quelque temps avant le désastre de
l'Invincible Armada. Cela n'est pas sans importance. On ne
savait jusqu'ici que par des pièces d'archives de France et
d'Angleterre -récemment publiées, que le sultan sa<dien
Abmed edh-Dhahabi avait entretenu des correspondances
relativement nombreuses avec la reine anglaise Élisabeth,
et que cette dernière avait recherché ou plutôt semblé re-
chercher l 'alliance du chérif marucain pour l'entrainer dans
une guerre contre Phi li p pe II, roi d 'Espagne. Les com 11101'-
çants anglais voulaient, d'autre part, s ' assurer une place
avantageuse sur le marché marocain (2). Ez-Zayyâni est le
seul écrivain musulman qui sache tous ces détails, ou qui,
uu moins, en fasse menLÏon dans ses ouvrages. Ne dit-il pas,
en effet, en donnant, à la vérité, le rôle le plus impol'lullt
a~ souverain de son pays: « L'horizon s'a~so!llbl'it autour un
roi de Casti lie, lorsq ue les nations des Roùm et leurs aHiés
décidèrent de lui faire la guerre et de le prendre à la
gorge. Parmi les monal'ques les plus décidés à le vaincee
était Élisabeth (3), reine d'Angleterre: le sultan A1}.med el-
Man$oûr la poussa à cette attitude en lui promettant de

(1 ) Cf. supra, p. 81, n. L


(2) CL, principalement, de Castries , Sources inédiles, 1 r e série, Angle-
terre, l. l, IntroducLion.
(~) Le manuscrit porte exactement ~.) . Une traduclion plus voisin e
."
de celte leçon serait «Tsabelle». Il est probable qu'ez-Zayyânî a confondu
ce deruier nom avec celui d'Élisabeth.
LES HISTORIENS DE LA. DYNASTIE <ALAWITE 197

rompre toute relation avec le souvel'ain espagnol; il s'en-


gagea en même temps à aider la princesse en lui procurant
les produits de son pays dont elle avait besoin : cuivre,
poudre, salpêtre, métaux (1). » Il est cerlain que l'historien,
pour pouvoir écrire c~tte nomenclatu['e d'articles d'expor-
tation d'une rigou,'euse exactitude, dut la trouver lui-même
dans quelque correspondance officielle. Mais qui, en re-
vanche, le renseigna sur les ' événements qui se déroulèrent
en' Europe à la fin du XVIe siècle ? Tout le passage, s'il n'était
pas trop long, vaudrait d'être transcrit. Philippe II , à la
nlort du cardinal Henri (Qardiyâl) (2 ), qui avait succédé à
Dom Sébastien SUl' le trône du Portugal, annexe le royaume
à sa couronne. Mais l'Angleterre met un frein à ses projets
ambitieux et sa flotte enlè ve à l'Espagne la maltrise des
'lners. La France, au début du' règne du souverain espagnol ,
« a les mains liées par la pauvreté et l'apathie, comme il
arrive aux pays qui tombent en décrépitude. C'était aùssi
le moment où à la religion des Chréliens (catholique) a\'ait
été substituée la nouvelle religion appelée l!lthérienne (3). ))
On est frappé par le récit d 'ez-Zayyâni, qui se poursuit
jusqu'à l'avènement d' Henri 1 V, roi de Navarre (4) : rôle
joué par la Ligue, assassinat du duc de Guise et assassinat
d'Henri III pal' Jacques Clément. On chercherait en vain
dans toute la littérature nationale, sauf peut-être dans les
relations des ambassadeurs marocains en Espagne, quelque
chose d'approchant et de si conforme, dans l 'ensemble, à la
vérité historique. Ez-Zayyâni a compris que si le Maroc se
tenait volontairement enfermé dans des cloisons étanches et
,ignorait, de propos délibéré, tout ce qui était étranger à

(1) Torjomân sa'dien , mS. de Salé, fol. 13 rO. Toute la digression tient
des folios 13 1'0 à 14 vO.
(2) Le copiste a écrit JL~.).J; le 0 du mot transcrit en arabe a été
omis par lui; ou, peut-èlre, a-t-il lu IS à la place de 0.
(3) 0L~j·'Y.

(4) ~..)~ .
198 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

l'Islâm, il n'en avait pas été toujours de même. Il n'éprouva


pas le besoin d'accoler aux noms des nations européennes
les classiques épithètes péjoratives qui les accompagnent,
d'ordinaire, chez les écrivains de son pays. De ce .c ôté, il
échappe encore à la règle établie, se rapproche de nous en
s'écartant de ses COIn patriotes.
Peut-être sa connaissance des choses d'Europe, toute su-
perficielle qu'elle soit, est l ' une des raisons pour lesquelles
ez-Zayyânî a maintenant si mauvaise réputation au Maroc.
Mais, cette mauvaise réputation, il ne l'eut pas de son vi-
vant, du moins publiquement. Les fonctionnaires auprès
desquels il. vivait, secrètement jaloux de lui, ne pouvaient
qu'approuver les écrits comme les actes d 'un personnage
si bien en cour; leur fortune dépendait presque autant du
vizir que du sultan lui-nlême. Ainsi, de leur côté, et par
conséquent du côté des intellectuels marocains, l'historien
n'avait pas à ~raindre de critique ouverte et efficiente; la
situation privilégiée dont il jouissait lui permettait d'écrire
tout ce que bon lui semblait, quitte à ne pas froisser son
maître Moulay Solaïmân, par bonheur monarque intelligent.
Les lettres de félicitations ( taqâri~ ) , qui accompagnent
les exemplaires lnanuscrits de la Torjomâna, indiquent à
quel point l'auteur, sur la fin de sa vie, était encore craint
et respecté. Elles émanent toutes de grands personnages
lettrés (1) ; celle qui est peut-être la plus flatteuse provient

(1) Ce sont: Solaïmàn el~J:lawwât j I:Iamdoûn Ibn el-t[âjj j MoQ.ammed ben


<Amir el-Ma<dânî et-Tàdilî; MoQ.ammed ben Hannoû el-Iàzighî j Aboû Bakr
ben Idrîs el-Ylanjra el-IJasanî; Al:}.med Zarroûq ben MoQ.ammed ben ~àbir
el-Ja<fari; <Abd el-Wadoûd el-Andalosî ech-Chafchâwani; AQ.med ben Aboû
Nâfi' j el-<Arbi ben MoQ.ammed ed-Damnàti; Aboû'l-Façll <Abd el-WâQ.id
ben AQ.med ben et-Tâwodî Ibn Soûda ; le frère de ce dernier, el- 'Abbâsj
Idris ben <Abd Allah el-W àdghîrî el-Idrisî; el-<Arbî ben el-Hâchimî ez:"
Zarhoûnî; MoQ.ammed ben e~-~âdiq el- <Alami Ibn Raïsoûn; MoQ.ammed
ben Al:tmed Bannânî; MoQ.ammed Ibn Mall~oûr ech-Chafchâwanî; Sa'ïd
es-Soûsî; MoQ.ammed ben el-'Arbî Qa~~âra el-An~ârî ; AQ.med ben 'Abd es-
Salâm Bannânî ; et-Tâlib Ibn Soùda ; MoQ.ammed ben AQ.med Akensoûs es-
SoûsÎ.
On donne, en général, à ces lettres d'éloges le nom de ~.";:;'. Il est
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE (ALAWITE 199

d'un de ses jeunes collègues, Mol;tammed Akensoûs. Quand


·c e dernier fut, à la rnort de l'historien, sûr de l'impunité,
il ne craignit pas, dans son Jaïch, non seulément de le pla-
gier d'une façon éhontée, rnais encore de manifester la
haine profonde et jalouse qu'il avait pour lui et qu'il ayait
dû garder secrète durant de longues années. Celui qui était
porté aux nues devenait, quelques années plus tard, un
honllne méprisable, ignare et, par surcroît, impie.
Car - et c'est là le reproche le plus violent qu'encore
.aujourd'hui on adresse, au Maroc, à ez-Zayyânî - l'histQ--
rien n'a pas toujours traité les saints de son pays avec tout
le pieux respect qui convenait. On lui fait grief de la désin-
volte liberté de langage qu'il prit à leur égard. Si Akensoûs,
« pilier» de la confrérie tijjânite au :M aroc, n'a pu s'empê-
·c her de trainer son ancien collègue dans la boue, c'est sur-
tout, au fond, parce que l'historien n'a jamais voulu s'affi-
lier ni à cette confrérie ni à une autre.
En Europe, heureusement, on a, sitôt que fut publiée
lUne partie pourtant mininle de son œuvre, traité ez-
Zayyànî à sa juste valeur. Il a été et reste le grand historien
de la dynastie <alavvite. Les chroniqueurs marocains posté-
rieurs, nlême à la fin du XIX C siècle, ne pourront offrir de
,d ocumentation aussi abondante et de sécurité d'information
.aussi grande. Leurs histoires (alawites ne présenteront
·d 'intérêt qu'à partir de l'époque à laquelle ez-Zayyâni cessa
. ·d'écrire. Pour la période déjà retracée par le ministr~,
leurs livres ne seront qu 'une suite d'emprunts avoués ou de
plagiats dissimulés de son œuvre elle-même, qu'ils enjolive-
ront et encombreront des fleurs d'une obscure rhétorique (1).

d'usage, au Maroc, que les auteurs qui en ont bénéficié en placent le texte
-en appendice à leurs ouvrages. Cette pratique est encore courante.
(1) Un lettré marocain, peul-être le seul qui juge ez-Zayyân.î à sa juste
valeur, m'a fait sur l'historien une humoristique déclaration; je la trans-
.cris ici, bien qu'il faille avoir vécu dans les milieux indigènes du Maroc
pour en comprendre tout le sel: « Un jurisconsulte célèbre, Mol;tammed
er-Rahoûni, rendait des jugements si clairs et si précis que ses compa-
triotes le surnommèrent baï:;dra (brouet de fèves, plat national des Jbàla)
et surnommèrent ses collègues el-(awd el-qmdrî (bois de santal). La même
200 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

II

MO~AMMED AKENSOtJS (1 )

Pâle figure que celle de l'historien Akensoûs à côté de


celle d'ez-Zayyânî! Alors que ce dernier est un Marocain
évolué, l'autre représente le type parfait du savant du pays.
Il a beau, comme son ainé, fournir dans le lnakhzen des
sultans une assez brillante carrière, il demeure prudent
dans ses paroles et dans ses actes, terne et prétentieux
dans ses productions littéraires. Ses gestes et sa pensée ne
s'écartent jamais du cadre étroit dans lequel s'enferme au
Mal'oc la science islâmique. Sa vie est celle de tous ses
collègues du palais: savant omniscient, il écrit son histoire
dans le seul but de flatter. Il est d'ailleurs, parmi ses com-
patriotes, moins considéré comme un historien que comme
un poète habile et un fin lettré: « l'acUb du Gharb et du
Soûs », diront ·de lui ses biographes, en reléguant ainsi sa
chronique au dernier plan.
Il s'appelait Aboù 'Abd Allah Mol,lammed b. Al,lmecl
Akensoûs. Il appartenait à une vieille famille bel'bèee qui
habitait, au Soûs, dans la trihu des Idâ où Kensoûs. Il naquit
dans ce pays . en 1211 (7 juillet 1796-25 juin 1797).
C'est de sa tribu d'origine qu'Akensoûs ti~e son patro-

dénomination au.t;ait pu être appliquée à ez-Zayyàni, qui différait du tout au


tout des lettrés et des courtisans de son époque et n'avait pas besoin, pour
boire une tasse de thé, de, l'appareil des verres de cristal, du lance-par-
fums et de la cassolette à fumigations. »
(i) BIBLIOGRAPHIE. -En-Nà~irî, Istiq~â, IV, pp.16i , 162, 253 ; AI:tmed ben
el-1:Iâjj el-'Ayyàchî Skirej, Rach! el-f:tijdb 'an man taldqâ m 'a't- Tijjdnî min el-
a~f;âb, pp. 358-373; Ibn el-Mowaqqit, es-Sa'ddat el-abadîyya, II, p. 105;
Chcikho, el-Adab el-'arabîyya Jî'l-qarn el-tâsi' 'achar, in el-Machriq, Bei-
rout, 1910, If, p. 21; Mol).ammed es-Sà'ïl}. er-.Ribà~î, el-Montakhabât el-'ab-
qarîyya , p. 107. Renseignements inédits fournis par Sidi 'Abd el-1;Iaï el-
Kattâni et Sîd el-'Abbâs ,ben lbrâhîm el-Marràkochî.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE <ALAWITE 201

nyme, que l'on trouve d'ailleurs parfois arabisé sous les


formes el-Gensoùs et el-Gensoùsî. L'un de ses biographes,
Al).med Skirej el-Fâsi, qui lui consaC'l'e une notice enthou-
siaste, fait suivre son nom d'Akensoûs d'ethniques assez
inattendus: el-Qorachi el-Hàchimi el-J a <fari. Se rattachait-il
vraiment à cettè branche de pseudo-chorfa dits Chorfa
Ja<fariyin, qui a son heeceau à la zâwiyya de Tamgroùt (1),
ou plus simplement chercha-t-il, lorsqu'il parvint aux
honneurs, à se procurer une généalogie chérifienne? Il
est vrai que sa mère était elle-même une charîfa de cette
branche.
On est assez peu renseigné sur les premières années de
la vie de cet historien. Il dut vraisemblab lement grandir
dans sa tribu natale: il la quitta en 1229 (1814), pour se
rendre à Fès, afin d'y faire ses études musulmanes. Il suivit
en effet dans la capitale intellectuelle du Maroc les cours
de plusieurs nlaitres en renom: Mol).ammed Ibn <Amir et-
Tâdili, qui avait été le conseiller politique du sultan Mo·
l,lammed b. <Abd Allah (2) ; l1amdoùn Ibn el-I7âjj (3); Mo-
l).ammed b. Aboù Bakr el-Iâzighî (4) ; Al).med b. et-Tâwodi
Ibn Soûda (5) ; <Abd es-Salâm el-Azami (6) ; Mol,lammed

• ('1) Sur cette zâwîyya, cf. supra, p. 99, note 1. Il n'y a pas bien long-
temps que les descendants de Mal:tammed Ibn Nà~îr se sont attribués une
origine chérifienne, en remplaçant leur elhnique el-Moqdàdî par celui
d'el-Ja<farî. Le Ja<far auquel ils prétendent remonter serait Ja<far, sur-
nommé et-Tayyâr, fils d'Aboû Tàlib et cousin du ProphHe, mort en l'an 7
(628), sur lequel cf. la notice de K. V. Zetterstéen, in Encycl , Isldm, l,
p. 10'21, sub Dja<far.
(2) Aboù <Abd Allah Mol).ammed Ibn <Amîr el-Ma<dùnî et-Tâdilî, ju-
risconsulte et grammairien, prédicateur à la médersa Boù<inànîyya;
'il fut l'un des maîtres du sultan Moulay Solaïmàn et mourul le ven-
dredi 3 cha<bân 1234 (28 mai 18L9). Cf. el-Katlâni, Salwat el-anfds, III,
p. 16. .
(3) Sur ce personnage, cf. infra, III, notice Mal:tammed Ibn el-~Jâjj.
(4) Sur ce personnage, cf. infra, JIl, no lice el-J:Iawwàt.
(5) Aboù'l-<Abbâs Al:tmed b. Mol).ammed et-Tàwodi Ibn Soûda, né à Fès
en 1.1.53 (n40-1741), mort en 1235 (1819-1.8'20), fut successivement qàçlî de
Fàs el-Bà1î et de Fâs el-Jadîd. Cf. el-Kaltùnî, Salwal el-anfds, T, p. 1.15.
(6) Aboù Mol:tammed <Abd es-Salàm b. Aboù Zaïd b. e['-Tayyîb el-Azamî,
chérif idrîsite originaire de la fraction des Awlâd Azam, tribu des ~anhâ-
202 LES HOMMES ET LES ŒUVRES .

b. <Amr ez-Zarwâli (1) et Mol,lammed ibn ' Man~oûr ech -


Chafchâwanî (2).
Depuis plusieul's générations déjà, l'Université d'el-Qara-
wiyin voyait un grand nombre de ses étudiants délaisser
assez vite ses cours pour devenir des fonctionnaires du
makhzen. L'administration nlarocaine, tout entière centra-
lisée aux palais du sultan, formait déjà le rouage qui existait
il y a quelques années encore; le vizirat, depuis longtemps,
n'était plus une charge d'épée, mais une charge de plume.
Autour du monarque, se pressaient en foule, dans les
bnîqa, les secrétaires, bien trop nombreux pour le service
qu'ils avaient à assurer. Comme ez-Zayyâni, Akensoûs se
sentit attiré vers la cour chérifienne. Il obtint assez vite un
poste de secrétaire. Il dut même avancer sans tarder, puis-
qu'en 1236 (1820-21 ), il était nanti de la charge de vizir, à
laquelle il parvint sans doute moins par son propre mérite
qu'à force d'intrigues. C'était le moment où le Maroc, à la
suite des expéditions infructueuses de Moulay SolaImân, se
soulevait de toutes parts contre ce souverain; la vieille ville
de Fès, toujours turbulente, avait proclamé un fils de Mou-
lay el-Iazid, Moulay Sa <Id. Il est probable qu'à cette époque,
Akensoûs ,eut à se dépenser. Il insiste d'ailleurs dans son
histoire, avec une certaine complaisance, sur les missions
que lui confia le sultan pendant ces temps de troubles. Il
fit plusieurs voyages, alla à Tétouan, à el-Qa~r el-Kablr
et à Salé comme envoyé impérial; il porta des messages
importants à travers le Nord-Marocain, bien reçu partout,
dit-il, et trouvant à toutes les étapes une belle mule à selle

jat e~-~ill , jurisconsulte et mufti, mourut à Fès le 10 cha'bàn 1241


(20 mars 1826). Cf. el-Kattânî, Salwat el-anfâs, III, p. 15.
(1) Aboû 'Abd Allah l\1o];lammed b. <Amr ez-Zarwâlî, originaire de la
tribu des B. Zarwâl, au nord de Fès, sur la rive droite du W âdî Wargha;
savant de Fès, où il mourut le 10 dhoù'l-qa'da 1229 ou 1230 ('24 octobre
1814 ou 4 octobre 1815). Cf.. el-KaUânî, Salwat el-anfds, Ill, p. 5.
(2) Aboû 'Abd Allah MoJ:tammed b. Mo"Q.ammed ibn Man~oùr ech-Chaf-
châwanî, jurisconsulte etlogicien, né à Fès en dhoû'l-l).ijja 'li 79 (11 mai-
8 juin 1766), mort dans cette ville le 22 cha 'bân 1232 (7 juillet '1817). Cf.
el-Kattânî, Salwat el-anfâs r III, p. 6.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE <ALAWITE 203

capitonnée et tendue de drap amarante, monture qui conve-


nait sans doute plus qu'un cheval de guerrier à son tempé-
rament de se~rétaire pacifique (1 ).
La mort de son protectéur Moulay Solaïmân (13 rabr 1
1238/28 novembre 1822) fut un rude coup pour lui. Il per- .
dait son rang de yizir, le nouveau sultan Moulay <Abd er~
Ral:llnân b. Hichâm ayant immédiatement désigné à cette
charge le secrétaire :M ol).ammed b. Idris, dont on a vu les
débuts sous le vizirat d'ez-Zayyânî (2). Au moment de l'avè-
nement du nouveau souverain, Akensoûs se trouvait à Mar-
râkech. Il alla se présenter à lui à el-Qa$r el-Kabîr. Le sul-
tan lui réserva bon accueil, du moins si l'on en croit le
rapport de l'historien (3). 'Abd er-RaQ.mân lui demanda des
renseignements sur la politique suivie par son prédécesseur.
Mais une intrigue de secrétaires, qu'Akensoûs relate par le
menu dans sa chronique et dans le détail de laquelle il
serait trop long d'entrer, l'écarta du makhzen des sultans:
il n'y devait reprendre qu'officieusement du service par la .
suite.
Et ce ne fut, d'ailleurs, vraisemblablement qu'en qualité
de poète attitré de la cour: c'est ainsi qu'il composa en 1265
(1849) , à la place de Mol).ammed b. Idris qui avait été chargé
de ce soin, une qasîda que devaient emporter à leur départ
en pèlerinage les deux fils du sultan, Moulay Solaïmân et
Moulay er-Rachid (4). AkensolLs s'était installé à Marràkech,
où il se livrait à l'étude et devenait l'un des adeptes les plus
en vue de la confrérie tijjânite. De temps en temps, il se
rappelait au souvenir du monarque par quelque pièce de
vers. A l'avènement de Sidi Mol,lammed b. <Abd er-Ral,lmân
($afar 1276/ septembre 1859) , il composa une élégie sur le
prince défunt et un poème de félicitations à l'adresse du
nouveau sultan. Son fils <Abd Allah se rendit à Meknès
pour porter l'hommage du poète, à qui furent offertes en

. ('1) Cf. Akensoûs, el-Jaïch el-'aramram, l, p. 218 sqq. et en-Nâ~irî, Istiq~â\,


IV, p. 161 sqq.
(2) Sur ce personnage, cf. supra, p. 184, note 1.
(3) Cf. Akensoùs, ibid., II, p. 3 sqq. et en-Nâ~irî, ibid., IV, p. i14.
(4) Cf. Akensoûs, ibid., II, pp. 2G-28.
204 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

récompense des robes d'honneur (1). Sur la fin de sa vie, il


devint aveugle. Il vécut encore pendant une partie du règne
de Moulny el-l)asan et .moul'ut à :M arrâkech, à l'âge de
quatre-vingt-trois ans, le mardi 129 mol.tarram 1294 (14 fé-
vrier 1877). Il fut enterré le lendemain, en dehors de I3â b
er-Rabb (2), près du mausolée de l'imAm Aboû'l-Qâsim es-
Sohaïli (3). Une foule nombreuse assista à son ·convoi
funèbre. Son tombeau est encore à l'heure actuelle l'objet
de'3 visites pieuses de quelques habitants de la ville .

...
.II .II

L'histoire d' Akensoûs (4), el-Jalclt-el-'al'al7ll'am el-klw17zâsf


ft dru,plat awlâd lJfawlânâ 'AU es·Sijilmâst était inconnue en
dehors du Maroc jusqu'à ces dernières années. Les spécia-
listes de l'histoire musulmane nord-africaine savaient sim-
plement qu'en-Nâ~irî y avait fait de larges emprunts pour la
partie de son histoire concernant les 'Alawites_ Elle vient

(1) Cf. Akensoûs, Ibid., II, p. 64 sqq.


(2) PorLe <I.ui se trouve au sud-ouest d e Marrâkech, près de la porle dite
Bùb Agnâoû.
(3 ) Il s'agit du grand savant et Lraditionniste andalou Aboû'l-Qâsim ou
Aboû Zaïd 'Abd er-Ral;tmân b. el-Khatib b. 'Abd Allah es-Sohaïlî el-Kha-
lh'amî, qui mourut à Marrâkech le 26 cha'bân 581 (23 novembre '1185) et
sur lequel cf. Ibn Khallikàn, Wafaydt el-a'iân, éd . d e Boùlàq, l , p. 501;
lrau. de Slane, II, p. 99; edh-Dhahabî, Tadhkîral eHw.ffd:;, éd. Wüstenfeld
(Liber classillm virorum .. . ), HI, p. 46 ; Ibn el-Abbâr, Takmilat e~-~ila (éd.
Codera), II, nO 1613, p. 570; el-Maqqarî, Naff:/, eHîb, Qaire, 1302, lI, p. 244;
Analecles, II, p. 272; Gayangos, Mohamm. Dyn. in Spain, 1, p. 434; l:lâjjî
Khalîfa, Kachf e:;--;onoûn, éd. Fluegel, lI, p. 319; III, p. 634; VI, p. 32 et
392; Ibn FarJ:toùn, ed-Dîbâj, éd. de Fès, p. Hi8; el-Katt~nî, Salwal el-an-
fds, II, p . 225; Ibn el-l\1owaqqiL, es-Sa'âdat el-abadîyya. Il, p. ·101; de
Slane, les Prolégomènes d'ibn Khaldoûn, Il, p. 160, note 6 ; Casiri, Biblio-
theca Arabico-Hispana, II, pp. 1 04,131 ; Wüstenfeld, Die Geschichtschreiber
der Araber, n O272; Pons Boigues, Ensayo bio-bibliografico , n O 201 ; p. 249;
Brockelmann, Ar. litt , l , p. 413; Huart, Lill. ar., p. 260.
(4) En plus du Jaïch, Akensoùs n'écrivit que deux ouvrages qui sont
des réfutaLions en matière de théologie: f ° el-Jawâb el-mosakkil (aurai\.
été imprimé à Tunis) ; 2° er-Radcl 'alâ risâlat el-l3akkdï.
LES HISTORIENS DE LA DYNASTlE 'ALAWITE 205

d'êtl'e lithographiée à Fès, en très petit nombre d'exem-


pla ires (1).
Le titre de l'ouvrage, que l'on peut traduire par l' « Armée
innombrable et quinti partite sur la dynastie issue de Moulay
'Ali de Sijilmâsa », est en rapport direct avec la façon dont
le livre est lui-Inême présenté. Akensoùs suppose que l'his-
toire musulmane est une armée, et que, comme toute armée
classique chez les Arabes, elle se compose de cinq groupes
distincts: une avant-garde (nzoqaclclima), deux flanc-gardes
(janâ!; ), un gros (qalb ) et une arrière-garde (sâqa). C'est
cette di\Tision qui sert de cadL'e à toute son histoÏle.
L' « avant-garde » traite, après un bref essai de cosmogo-
nie, dela différence qu'il faut établir entre les titres d'inlâm,
de sultan et de roi, d'après les autorités de l'Islâm. Ce n'est
en somme que le développement des arguments de droit
que contiennent d'habitude les lettres de reconnaissance
(bal'a), adressées aux souverains au moment où ils prennent
possession du pouvoir. L' « aile droite» est consacrée au
Prophète et aux dynasties d'Orient: Omaïades, 'AbbâsiJes,
'Obaldites d'Égypte, Ottomans. L' « aile gauche» est celle
des dynasties occidentales: Idrlsites, Omaïades d'Espagne,
Almoravides, Almohades, I:Jaf~ides, ~Térinides et Sa'diens.
Naturellement, le « gros de l'armée» n'est autre que la dy-
nastie 'alawite et l' « arrière-garde» se présente sous la
fOL'llle d'un tl'ailé de politique, avec la lisle des attributions ,
du monarque et des grands fonctionnaires de la cour.
En somme, par un assez bizarre artifice de composition,
Akensoùs cherche à justifie!' la présence dans son ouvrage
de développelnents sur l'histoire musulmane générale et la
politique, qui ne font pas partie de son sujet. Mais alors, il
donne du même coup à la dynastie 'alawite une import:l.I~ ce
qu'elle n'a pas par rapport au reste de l'Islâm. L'historien
aurait pu s'arrêter là ; mais il pousse encore plus loin sa com-
paraison factice. Chacun des règnes de la dynastie mal'o-

(1) Deux volumes in-4°, en 1336 (1918). Un exemplaire manuscrit de


l'ouvrage, établi sur l'original, a été acquis par la Bibliothèque de Rabal ,
où il figure sous le numéro 38'1.
206 LES HOMMES Err LES ŒUVRES

caine est, à son sens, une portion du « gros de l'armée »,


pOl'tion reconnaissable à ses étendards différents les uns des
autres. La couleur des insignes correspond, pour chacun
des sultans <alawites, à la manière dont le souverain s'est
comporté vis-à-vis de ses suj ets : le blanc est l'indice de la
vertu et de la perfection; le noir, celui de l'orgueil et du des-
pOlisme; le rouge, celui du c'ourage et, en même temps, de
l'autorité sans cesse méconnue. Le jaune marquera le prince
qui passe son tem ps en fêtes ou en orgies; le vert, celui
qui, doué de qualités moyennes, pratiquera la justice. Le
bleu sera le contraire du vert. Le sultan dont l'étendard sera
teint de couleurs mêlées aura sa conduite définie par la
prédominance de telle ou telle couleur. Enfin, un étendard
couleur de cendre sera attribué à celui sur lequel on est
mal renseigné (1)!
Quelle raison poussa Akensoûs à employer ces images
symboliques, artificielles et quelque peu grotesques? Ez-
Zayyânl avait bien, et dans spn Bostân seulement, accolé à
chaque relation de règne un petit déyeloppement littéraire
et moral sur la qualité ou le défaut les plus saillants des
princes auxquels il consacrait tour à tour ses lignes. Rien
de pareil dans l'histoire d'Akensoûs : ici, il ne s'agit pas de
digressions plus ou moins justifiables, nlais d'un cadre ri-
gide qu'il impose à ses lecteurs, peut-être dans un but mné-
motechnique, où plus simplement afin de les forcer à ad-
mirer son ingéniosité. C'est ainsi que le chapitre relatif à
Moulay Solaïmân s'ïntitule dans le Jaïch, « l'étendard vert,
à la hampe élevée, avec des oriflammes blanches (2) », tandis
que celui de son prédécessenr Moulay el-Iazid est « l'éten-
dard funeste et 'détestable » (3).
Akensoûs, heureusement, ne poursuit pas ses comparai-
sons trop avant dans le texte de ses chapitres. Rendons-lui
gl'âce de les avoir lÏInitées cl ses titres, sans quoi son his-
Loir e aurait risqué d'être totalement illisible.

('1) Cf. el-Jaïch el-<aramram , J; pp. 19-20.


(2) Ibid. l, p. 181.
(3) Ibid., l, p. 177.
LES HISTORIENS DE L\. DYNASTIE 'ALAWITE 207

Le Jaïch (nous entendons la majeure partie de l'ouvrage,


celle qui a trait à l'histoire de la maison régnante), va des
origines de la dynastie <alawite jusqu'à l'année 1282 H.
(1865), sous le règne de Si di Mol}.ammed b. 'Abd er-Ral).-
mân (1). Akensoûs avait, à cette dernière date, plus de
soixante-dix ans. Il déplore dans sa préface d'avoir attendu
de parvenir à un âge aussi avancé pour entreprendre la com-
position de son histoire. Ce n'est qu'à ce moment que l'an-
cien vizir, vivant à Marrâkech, loin de la cour, eut l'idée de
se faire, à l'exemple d'ez-Zayyânî, l'historiographe spontané
de la dynastie 'alawite. Il avait, lui aussi, l'avantage sur beau-
coup de ses contemporains d'avoir vécu lui-même, pendant
assez longtemps, dans le sillage du makhzen chérifien. D'autre
part, il eut peut-être l'espérance d'attirer à nouveau sur
lui de cette façon quelque parcelle de la faveur impériale.
Au début du livre, pour justifier son entreprise, Aken-
soûs n'hésite pas à proclamer qu'il est le premier savant qui
enfin consacrera aux 'Alawites l'histoire qu'ils méritent. Il
ne craint pas d'avancer, avec une fatuité personnelle qu'on
retl'ouve d'ailleurs dans tout le reste du Jaïch, que, s'il se
fait historien, c'est parce que, parmi les uléma, certains~
en premier lieu, ont avoué leur impuissance à écrire l'his-
toire; d'autres~ pressés de composer des chroniques, ont
trouvé des excuses pour n'en rien faire et ajourner indéfini-
ment leurs projets; d'autres, enfin, ont bien écrit des his-
toires se rapportant aux 'Alawites: ainsi, el-Ifrânî leur a
consacré la fin de sa Nozhat el-f;âdt et un petit ouvrage re-
latif à :J!(oulay ISlnâ'ïl, mais « il n'y a pas là de quoi étancher
la soif de l'altéré»! Il traite ez-Zayyânî avec injustice et
dédain: lui qui s'était naguère montré obséquieux et plat
devant le mini~tre tout-puissant, il le compare maintenant
à « une femme sotte qui a trouvé de la laine (2) », et l'auteur

(t) Le Jaïch fut terminé le Hi cha'bân 1283 (23 décembre 1866).


(2) Ibid., 1, p. 5, 1. 16: l.; y .:,~J ~l;~ ~. Réminiscence d'un
ancien proverbe arabe signalé par el-Maïdânî, Majma' el-amthâl, Qaire,
'.1310, l, p. 159, et el- 'Askarî, Jamharat el-amthâl (e n marge du précédent),
l , p. 282.
208 LES HOMMES ET LES ŒUVHES

du Bostân n'a été, à son avis, qu'un plagiaire d'Ibn el-Bâjj.


Quant à l'ouvrage d'el-Qâdirl, intitulé el·Azhâr en·na.dîyya
(1), il lui semble bien trop abrégé pour constituer une his-
toire suffisante. Akensoûs ajoute qu'ayant fait remarquer il
Sidi Mol).ammed b. 'Abd er-Ralfmân qu'aucune histoire
n 'existait SUL' la dynastie, ce sultan l'aurait invité à s'acquit-
ter lui-même de ce soin; l'historien aurait, d'autre part, été
poussé à réaliser ce projet par le vizir :M ol)ammed et-Tayyib
b. el-Jamânî (2).
Il importe de faire deux parts du Jaïclz pour pouvoir en
examiner la valeur: la première, celle qui va du début des
'Alawites jusqu'au règne de Moulay Solaïmân; l'autre, qui
relate les règnes de Moulay 'Abd er-Ral).mân et de son fils
Sidi Mol).ammed.
Pour la première partie, on peut affirmer qu'Akensoûs n'a
fait que plagier tout au long de leurs histoires ses deux rFé-
décesseurs : el-Ifrânî et ez-Zayyâni. Toute la fin de la Nozhat
el-f:tâdî est incorporée in extenso dans le Jalclz, l'auteur se
contentant de citer à de très rares intervalles l'œuvre qu'il
copie. Le plus souvent, il fait sienne la prose de l 'historien
de Moulay Ismâ'ïl et n'hésite pas, pour s'en attribuer la pro-
priété, à changer dans quelques phrases certains mots par
leurs synonymes. De même, si le Bostân avait disparu, on
aurait pu s'en consoler, car, pour la plus grande partie, il
est transcrit littéralement par Akensoûs, ce qui n'empêche
pas le plagiaire de traiter à tout propos ez-Zayyâni de sot et
d'ignorant (3) . Quand il ne copie pas le Bostân, il copie la

(1) Cf. infra, III. Akensoûs semble ignorer l'existence du Nachr el-ma.-
thdnî et de l 'IUiqât ed-dorar, qui contiennent des renseignements histo-
riques peut-être plus nombreux que ceux de la recension biographique
augmentée intitulée el-A zhâr el-nadîyya.
(2) Aboù 'Abd Allah Mol.:tammed et-Tayyîb b. el-Iamânî, surnommé
Aboù 'lchrîn, fut d'abord précepteur des fils de Moulay 'Abd er-Ral,lmân,
puis, tour à tour, chambellan et vizir de Sidi Mol,lammed b. 'Abd er-Ral,l-
mùn. Il mourut le 14 cha'bân 1286 (19 novembre 1869) à Marrâkech ct
fut enterré dans le mausolée de Sidi el-Ghazwânî, dans le quartier d'el-
Q~oùr. Cf. AkensoLLs, el-Jaïch el-'aram-ram, II, p. 153 sqq., et en-Nâ~irî ,
Isliq~â, IV, p. 232.
(3) Cf. par exemple, 1, pp. t71, 185, 198, etc.
LES HISTORIEiiS DE LA DYNASTIE < ALA WITE 209

premlere version <alawite du TO/jomân, plus abrégée et


inconnue. Avec elle, il est à l'abri de toute suspicion. S'il
lui arrive de nommer parfois le premier de ces ouvrages, il
se garde bien de faire Je moindre rappel du second. Aken-
soûs, dans toute la première moitié de son Jaïch, n 'est pas
seulement un écrivain indélicat et vantard; il est, aussi, fon-
·c ièrement malhonnête.
Il en va différemment de l'autre période qu'il retrace:
celle qu'il a vécue lui-même, soi t en acteur, soit en spectateur
intéressé. Il ,n'a plus, du moins ne le savons-nous pas, de
source écrite à sa disposition et ne peut faire appel qu'à ses
's ouvenirs ou à ses notes, Là seulement, son histoire prend
,q uelque valeur. Elle se présente alors sous la forme d'une
chronique annuelle, dans laquelle Akensoûs se révèle, il
faut l'avouer, bon élève d 'ez-Zayyânî. La manière est la
même: la place la plus importante est faite aux événements
politiques proprement dits, déplacements de souverains, ré-
voltes, expéditions entreprises pour mettre à la raison des
tribus rebelles. Puis, latéralement, des indications intéres-
santes (1.): renseignements sur des personnages notoires,
.à l'occasion de leur décès, dates de construction d'édifices
publics, le tout téu10ignant d'une connaissance assez appro-
fondie du Maroc et de ses grandes capitales.
Mais Akensoûs demeure surtout poète et panégyriste . On
a l'impression, en lisant la seconde partie du Jaïch, que l'au-
teur a utilisé sa relation historique comme un moyen de r<lp-
peler ses productions poétiques. Les nombreuses qa$îcla
qu'il adressa aux sultans, aux princes du sang, aux grands
Ininistres, sontîntégralement reproduites dans l'ouvrage. Ce
sont des dithyrambes d'étendue variable: Akensoûs y manie
avec aisance la langue poétique et triomphe, mieux que ne
153 font d'habitude ses compatriotes, des difficultés de la pro-
sodie arabe. Les MaroGains l'ont bien jugé: il n'est pas, à

(1) Ainsi, à propos de la maladie grave qui faillit emporter en chawwâl


1282 (février-mars 1866) le sultan Mol).ammed b. <Abd er-Ral).mân, le Jaïch
renferme des renseignements inédits sur la famille des Aderrâq - qui
fournit depuis Moulay Ismà<ildes médecins aux sultan; -, et sur les mis-
sions franciscaines au Maroc. Cf. el-Jaïch el·<aramram, II, p. 94 sqq.
14
210 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Jeur avis, un historien, mais un rhapsode de talent et l'un


des plus grands poètes officiels de la cour (alawite avec
Ijamdoûn Ibn el-Ijâjj et Ibn el- V"annân (1). On comprend,
dès lors, quel fut l'étonnement de ce juge en matière de
yers, le jour où lui furent présentés deux poèmes de louanges
qui parvinrent à la cour, à l'adresse de Moulay (Abd er-Ral,l-
mAn et de son vizir Mol:tammed b. Idris, et qui, chose éton-
nante, étaient l'œuvre d'un chrétien converti, originaire de
Malte, Fâris ech-Chidiâq (2) ? Il consacre à ce personnage
tout un développement dans son Jaïch et considère cet envoi
poétique comme un événement digne d'être relaté (3).
La dernière partie de l'ouvrage, l' « arrière-garde», pour
employer l'expression d'Akensoûs, peut apparaitre à pre-
mière vue comme tout à fait hors du sujet. Les différentes
qualités souhaitables pour un prince y sont définies à grand
renfort de citations extraites d'ouvrages antérieurs. On peut
néanmoins en tirer une somme assez considérable d'obser-
vations du plus haut intérêt sur l'évolution du nlakhzen ma-
rocain au cours de la dynastie (alawite, d'autant plus qu'Aken-
soûs y définit les fonctions de vizir, de cha-m bellan, d'inten-
dant du palais et de secrétaire; et la plupart des grands
ministres de la famille régnante, ainsi Aboû'l-(Abbàs el-
Iul,lamdi, Efendi el- (Arbi Qâdoùs, Mol,lammed b. Idris, et-
Tayyib b. el-JamAni, y ont leurs biographies. Cela d'ailleurs
à ~oté d'impardonnables longueurs: par exemple, toute une
petite anthologie poétique sur le roseau taillé, l'encre et
l'encrier.
Quand Akensoùs livra son histoire au public lettré de son
pays, il - n'obtint pas tout le succès auquel il s'attendait.
L'ouvrage , suscita de nombreuses polémiques et fut même
envoyé pour exalnen aux uléma de Fès: car, pour flatter
les sultans (alawiLes, il n'3vait pas hésité à rabaisser plus

(1) Sa r éputation poétique a mème dépassé les bornes de l'Occidenl,


puisque le P. L. Cheikho lui a consacré une courte notice dans el-Machriq
a vec la citation de quatre extraits de ses poèmes.
(1) Sur cet écrivain, cf. Brockelmann, Ar. litt _, II, p. 505, et Huart, Lill .
ar., p. 408.
(3 ) Cf. el-Jaïch el- (aramram, Il, p. 31.
J.ES HISTORIENS DE LA DYNASTIE (ALAWITE 211

qu'il n'aurait fallu l'histoire des premiers sultans chorfa du


pays, les Idrisites. Au moment où les descendants du fonda-
teut' de Fès voyaient leur puissance spirituelle s'accroitl e
sans cesse et n'attendaient qu'une occasion favorable pour
restau rel' la dynastie de leurs ancêtres depuis si longtemps
déchue, le livre d'Akensoùs leur sembla une énormilé. D'au-
tant plus que l'historien ne témoignait qu'une sym pathie rela-
ti ve à la vieille capitale du Nord, dans laquelle il avait été
em prisonné et avait. failli trouver la mort sous le règne de
~loulay Solaïnlân.
Ce (lui était aussi grave, c'est qu'en faisant au début de
son ouvrage tout un étalage de bibliographie historique, il
avait commis des erreurs, impardonnables aux yeux de ses
compatriotes savants, qui excellent dans la critique de détail.
N'avait-il pas dit que le petit ouvrage d'el-Ifrâni sur Moulay
Ismâ 'Il, qu'il ne consulta pas d'ailleurs, s'a ppelait e'f.-~ill e'f.-
?>aUl, alors qu'en réalité, il s'appelle e?>-~ill el-wadf? Il
revendiquait comme source historiq ue la $afwat el-adab
d'un écrivain de Marrâkech, A}:lmed el·Jirâwi : ,ce n'était
pas, cornme il pensait, une histoire des Almohades, mais
uue anthologie poétique dans le genre des ijmnâsa d'Aboû
Tammâm et d'el-Bol).torL! Enfin, parlant du Rawr) el-qirtâs,
il prenait une partie du titre de cet ouvrage pour 10
nom Je l'auteur lui-lnême 8t insistait, par surcroît, sur
l'en'eul' de tous ceux qui ne pensaient pas comme lui (1)!
Aussi bien, dès qu'il comnlença à circuler, le Jaïch « ful-
il une cible pour la flèche des contradï"cteurs (2) ». De telle

(fj Akensoûs dit, en effel, expressément (e l-JaÏ/; h el-'aramram, l, p. 39,


ligne 6): ,,---!l:.(' jUl1JAJ\ J19 ,« el-Qir~âs a dit dans son livre ».
Et il explique: 0ç l,:; Î.>J •.~)\ '"7"'tCJ\ ~.J4.J Io.;-'~J U l1JA)\J
. '"7"'t("".JJ u~JJ r-\ ~\ 0~. ~U
« EI-Qir~às est un surnom de l'auleur du livre bien connu. Nous insistons
SUl'cette explication, car l 'o n pense généralement que ce mol fait partie
du litre de l 'o uvrage el, à lui seul, est le litre sous lequel il est le plus
connu. » L'origine de celle erreur doit provenir du fail que les Marocains
appellent parfois le Qirtds: el-Anfs el-motrib (début du lilre).
(2) Celte expression est emprunlée à une. nole extraile d'un ouvrage , en
212 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

sorte que la publication de son histoire, entreprise par l'ate-


lier liLhographique de Fès, n'a fait que réveiller au cours
de ces dernières années, dans certains milieux lettrés du
Maroc, l'antipathie qu'on lui témoigna dans la capitale à la
fin de sa vie: il continue à payer, sous un flot d'injures) le
peu de cas qu'il fit de la cité d'Idris et sa vantardise de mau-
vais aloi. Tandis que s'il n'avait pas écrit d'histoire, il aurait
pu conserver chez ses compatriotes la notoriété que lui
valut son habileté de rimeur.
De notre côté, nous devons nous garder de considérer le
Jaïclt comme un document de haute valeur. Sans l'éliminer
des sources arabes de l'histoire du Maroc au XIX e siècle, il
ne f~udra l'utiliser qu'avec la plus grande prudence. Le seul
fait que la majeure partie de l'histoire d'AkensoltS n'est
qu'une réédition déloyale d'el-Ifrânî et d'ez-Zayyânî suffit,
en effet, à faire de son auteur un personnage antipathique,
et à l'égard duquel il faut user de méfiance. Son livre
manque de sincérité. Ce n'est qu'un hommage servile aux
princes 'alawites, dans lequelsontdes faits trop souvent systé-
matiquementdéformés (1) . De grands événementshistorigue$,

préparation de Sid el-'Abbâs b. Jbrâhîm sur les personnages notoires en-


terrés à Marrâkech. Si l'on en croit ce lettré, de nombreux volumes furent
écrits au Maroc pour réfuter certaines des allégations d'Akensoùs : un ~Ié­
dinois établi à Fès, 'Ali b. ekTâhir el-Madanl composa un livre intilulé
et-Tdli' el-man~wûs fi'r-radd 'ald Akensoûs; A1).med el-BakkâL, dans le même
but, écrivit une épître qu'il appela Falf:t el-qoddotlsff'r-radd 'ald' l-Gensoûs;
enfin, deux volumes de réfutation furent égalemen t composés par el-~Icijj
e1-'Arbî el-MachraG: el-lfosâm el-machrafî li-qat' lisdn es-sdbb el-ja'farî ell-
nâtiq bi-kharâfât el-ja'soûs sî'i '?-:?ann et-GensolÏs . Ce dernier titre mérite
d'être traduit, tant il est acerbe: « Le sabre tranchant pour couper la
langue de l'insulteur descendant de Ja'far, qui parle en radotant comme
un cou~'taud mal bâti, l 'imposteur el-Gensoùs. »
(1) En voici un exemple: el-Ifrânî, No zhal el-f:tddî, p. 113 du texte et
193 de la trad., rapporte que, 10rsqu'A1).med el-Man~oûr eut terminé le
palais el-Badî" il demanda à un bouffon, en passe de devenir saint, ce
qu'il pensait du palais. L'autre répondit: « Quand il sera démoli, il for-
mera un monceau de décombres! 1) Aken~oùs fait se poursuivre ainsi le
dialogue, parce que la prédiction fut accomplie par Moulay Ism â'ïl : « Qui
le démolira? - Un sultan puissant, descendant des Chorfa du Tâfîlelt ! ))
(e l-Jaï~h el-'aramram, l, p. 43).
J_ES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALAWITE 213

comme par exemple, la guerre hispano-maroc.aine de 1860,


y sont à peine mentionnés. Ces graves réserves faites, on ·
doit cependant reconnaître à l' histoire d' Akensoûs un ~11érite :
celui de constituer la source écrite la première en date qui
relate les règnes des deux sultans Moulay 'Abd er-Ral)mân
et Sidi Mol).anlmed.

III

MOJ;IAMMED E~-~O'AYYIF (1)

On a déjà fait allusion plus haut (2) à la chronique de


Mol)ammed e<;l-l)o'ayyif er-Ribâtî, que les lettrés marocains
considèrent comme le plus violent des pamphlets que l'on
osa rédiger à l'encontre de la dynastie' alawite. Le person-
nage qui l'écrivit se nommait exactement Aboû 'Abd Allah
Mol).ammed b. el-Morâbit 'Abd es-Salâm b. Al)med b.
Mal).ammed e<;l-l)o'ayylf er-Ribâti. Il naquit à Rabat, dans la
dernière décade du mois de dhoû'l-l).ijja 1165 (29 octobre·
8 novembre 1752) (3) . Il fit ses études dans cette ville, sous
la direction du célèbre jurisconsulte Mol).ammed es-Sijil-
mâsi (4) et d'Al)med b. 'Abd Allah el-Gharbi (5); il alla en-

(1) Au milieu de 1921, le qâ'ïd d'une ville du Maroc, ayant appris par
hasard l'existence à Fès d'une chronique où étaient retracée.s les origines
de sa famille, parvint à se la procurer pour en faire prendre copie. C'est
cette dernière que nous avons pu obtenir de voir, ou plus exactement un
seul cahier de l'ouvrage, relatif à Moulay el-Iazid. Ce sultan est, en effet,
le seul dont on put toujours trouver publiquement, au Maroc, la conduite
indigne. Aussi bien, la communication de la relation du règne de ce prince
ne risquait-elle de compromettre personne. Les renseignements fournis
sur la biographie d'eçl-J)o'ayyif proviennent d e notes particulières de Si
MoJ;tammed b. 'AH ed-Dokkâlî.
(2) Cf. supra, p. ~~9.
(3) Il fournirait lui-même c~lte date dans son histoire.
(4) Mol}.ammed b. Aboù'l-Qâsîm b. Mol}.ammed b. 'Abd el-Jalil er-Ribâti,
auteur d'un commentaire du poème didactique de 'Abd er-Ral}.mân el-
Fâsi sur la jurisprudence de Fès (el-'Amal el-fâsî) et d'un traité de la juris-
214 l,ES HOMMES ET LES ŒUVRES

suite les compléter à Fès, puis fut nommé dans sa ville


'natale aux fonctions de 'adel et de suppléant de qâçli. Eçl-
l)o'ayyif commença à se faire connaltre en composant des
poésies populaires en langue vulgaire enrichie d'expressions
classiques (17'lal{wûn) : plusieurs sont encore en vogue à
Rabat et à Salé: ainsi, ses deux qa$tda sur le printemps et
les fleurs printanières et sur le jeu d'échecs.
On ne sait quel motif l 'i ncita à écrire l' histoire de son
pays, ou plus exactement, celle de la dynastie 'alawite depuis
ses débuts jusqu'à la fin du règne de Moulay Sola"imân.
L'exemplaire autographe cie son ouvrage ne porte pas de
titre. Il commence par rapporter la chute des Sa'diens et de
la maison d'ed-Dilâ' et l'avènBment des 'A lawites; le récit se
pou~'3uit sous la forme d ' une chronique annuelle, avec, à la
fin du règne de chaque sultan, des considérations sur sa
conduite et les grands événements qui ont lnarq ué son pas-
sage au pouvoir. G'e:3t ~videmment sa ville natale, avec sa
voisine Salé, et Fès, qui retiennent le plus son attenlÎon. Et,
si l'on pouvait en disposer, son ouvrage servirait à établir
peut-être d'une manière suffisamment précise ce qu'était le
Rabat des premiers 'Alawites et quelles transfol'mations y
furent apportées quand la ville fut élevée au rang de capitale
effective de l'empire des Chorfa. On y trouverait aussi un
obituaire des pel'sonnages notables de Rabat, morts peudant
la période qu'il envisage (1).
L'histoire d 'eçl-l)o'ayyif ne serait, de l'a vis de plusieurs
lettl'és marocains, qu'une réédition accrue d'un ouvrage
écrit par un de ses concitoyens, au nOln bien andalou, el-
I)âjj MolJammed el-Masnâwl :M Ol'eno, mowaq git de la grande
mosquée de Rabat, mort dans cette ville en 1207 (1792-93).
E~ · l)o'ayyif ne ferait œuvre originale qu'à partir de cette
dernière date, jusqu'à l'année à laquelle il termina son his-

prudence de Habal inlitulé el-'Amal er-ribdtî, ful qàçlî d'Aboù'l·-ja'd (Bou-


jad), où il mourut à la fin du XVIU 6 siècle.
(5) Ce personnage, réputé pour sa comp' tence en matière de l),adîlh est
enterré à Habal, à proximité du mausolée de Moulay lbràhîm.
(1) On apprend ainsi que le père d'eçl-:Qo'ayyîf mourut à Habat, le
22 jomâdâ II 1182 (3 novembre 1768). .
u~s HISTORIENS DE LA DYNASTIE (ALAWITE 215

toire, c'est-à-dire en 1233 (1817-18). Il avait a101's soixante-


huit ans. On ne sait s'il vécut longtemp~ encore après celte
époque.
L'ouvrage de ce petit magistrat de Rabat semble offrir un
grand intérêt au point de vue purement historique, encore
qu'il faille se défie l', sem hle- t-il, de certaines informations
nettement tendancieuses, et d'autres qu'il parait assez diffi-
cile de conlrôler pour l'instant. Son livre n 'est d'ailleurs
pas un iquement une histoire. Il y a inlrod uitdivers dévelop pe-
ments de droit, d'astronomie et des poèmes à la louange du
Prophète, qu'il aurait, suivant nos informateurs indigènes,
empruntés à un autre de ses concitoyens, également andalou
d 'origine, :MoQ.ammed el-Amin Palamino er-Ribâti el-Anda-
10s1. Et il n 'a mêlne pas le mérite d 'ètre écrit en langue
arabe. Le court passage que nous avons pu en lire nous a
permis de vérifier qu'il est bien, suivant l'expeession maro-
caine employée en semblable circonstance, écrit en « langage
des rues» (kalâm zanqawt) , et qu 'il n 'enl ève rien de son ol'i-
ginalité et de sa valeur à l'œ uvre importante et presque ma-
gistrale ct u'ez-Zayyâni composa à peu près à la même époque.

IV

LA CHHOXIQUE ANO~YME ed-Do/'I' el-monar.jçlad.

Il ne reste, pour clore la brève liste des historiens (ala-


wites antérieurs au règne de ~Moulay el-Basan, qu 'à. signaler
une histoire, lnalhellreusement inachevée, qui porte le titre
d'ed-Dorl' eL-monaÇlr.jacl el-fâle/lir fi-mâ li-abnâ' ~lawlânâ
(AU 'ch-Charif nûn el-17la{lâsin wa'L-mafâkhir (1). Il s'agit
d'une chronique anonyme qui part des débuts de la dynastie

(1) Un exemplaire manuscrit de ce fragment nous a élé communiqué


pal' Si Mol).ammed b. (AU cd-Dol kâlî, de Salé. LI comprend une soixanlaine
de pages.
216 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

~alàwite et qui, dans la pensée de son auteur, devait se


poursuivre jusqu'à l'époque à laquelle il vivait. Une longue
préface, qui ouvre ce travail, pourrait laisser croire qu'il fut
complètement terminé: l'auteur prétend qu'il ne lui imposa
le titre cité plus haut que lorsqu'il eut écrit l'ouvrage en
entier. M,' ais, de toute vraisemblance, il ne faut rien croire
de cette assertion.
Comme Akensoûs, l'historien anonyme éprouve, au début
de son livre, le besoin de justifier son entreprise. Les rai-
sons invoquées sont les mêmes de part et d'autre. La préface
contient en même temps une prOlnesse engageante: l'auteur-
dit qu'il se proposè de placer dans son histoire des listes
de fonctionnaires, de savants et de saints avec leurs bio-
graphies.
En effet, autant qu'on peut en juger par le court frag-
ment qui nous en reste, cd-Dorr cl-monar/rJad se présente
bien comme une œuvre historique et biographique à la fois,
exactement comme une chronique annuelle mixte contenant,
d'une part, pour chaque année, le r ' cit des événements po-
litiques qui purent se dérouler, d'autre part, un obituaire
détaillé. Après un court chapitre sur la généalogie des <Ala-
wites, l'auteur s'occupe de leur arrivée au pouvoir, retrace
en quelques pages le règne de 1\Ioulay ~Ial.13mmed b. ech-
Charif et passe immédiatement aux biographies des person-
nages célèbres décédés sous le règne de ce sultan. Il conti-
nue de mème jusqu'à la proclamation de Moulay Ismâ <Il.
Malheureusement, on s'en rend compte à première vue,
cette suite de biographies n'a aucune valeur. Elle est simple-
ment le résumé du Nachr el-mathânî d'el-Qâdiri pour la
période retracée, les mênles personnages étant de part et
d'autre étudiés, et l'ordre suivi dans leur succession étant
absolument identique. Or, comme on va le voir, notee ed-
Dorr el-monacjçLad est bien postérieur au dictionnaire d'el-
QâdirL
De quelle époque date, en effet, cette chronique inache-
vée? On peut, grâce aux sources qu'elle a utilisées et
qu'elle mentionne, l'attribuer à un écrivain qui vivait à la fin
de la première moitié du XIX e siècle. L'historien le plus ré-
LES HISTORIENS DE LA DYNASTIE 'ALA WITE 217

cent . de ceux qui y sont cités étant ez-Zayyâni, et Akensoûs


n'étant pas une seule fois rappelé dans le cours du récit, il
est infiniment probable que l'histoire fut composée entre 1833
et 1866.
Bien qu'on ne possède aucun renseignement précis sur
son auteur, on peut, toutefois, par une confrontation de
dates, émettre l'hypothèse qu'il fut peut-être le même qu'un
savant de Fès du XIX C siècle, auteur d'une histoire de la
dynastie 'alawite : Aboû 'Abd Allah Mol).ammed h. 'Abd el-
Qâdir b. Al,lmed el-Golâlî, connu sous le nom d'el-Kardoûdi,
d'origine idrisite, qui lTIOUrut à Fès le 11 ramaQ,ân 1268
(29 juin 1852) (1).
Il importe peu, 'au surplus, d'être fixé sur la personnalité
du véritable auteur d'ecl-Dorr el-monaçl4ad, jusqu'ici de-
meuré dans l'ombre. Son ouvrage n'en vaut pas la peine. On
'ne l'a signalé ici que pour . mémoire : inspiré surtout de la
Nozhat el-/:lâdî d'el-Ifrâni et du Nachr et-J7'lathânî d'el-Qâ-
diri, il ne présente qu'un intérêt bibliographique et ne con-
tient aucune information originale.

(1) Ce personnage composa également une fahrasa, un commentaire


d'un poème sur l'utilité du Qdmoûs et un commentaire de l'introduc-
tion de l'Alfîyya d'Ibn Mâlik. 11 eut comme maîtres Aboû'l-Fat\:l Mol)am-
med et-Tohùmî b. J:Iammâdî cl-I:Tammâdi el-Miknâsî (qâQ.i de Marrâkech,
=
mort à Rabat, au cours d'un voyage à Fès, le 11 ~afar1249 30 juin 1833; cf.
el-} attânî, Salwat el-anfâs, lI, p. 103), Aboû'l-Mal)âmid el-J:Iâjj cl-'Arbi ed-
Damnâtî et 'Abd er-Ral,lmàn el-Koûhin. A sa mort, il fut enterré à Fès, en
dehors de Bàb el-Fotoûl)., près du tombeau de Joûsof el-Fâsî. Cf. el-Kattânî,
Salwal el-anfds, II, p. 333.
III

LES BIOGRAPHES

HAGIO GB.APHES, BIOGRAPHES DES FAMILLES CHÉRIFIENNES

ET DES SAVANTS

On a essayé de montrer, au début de cette étud e , com-


ment, dès le XVI e siècle, la liltérature biographique pl'it, au
Maroc, une importance qu'elle n'avait jamais eue jusqu'alors.
Son .extension, surtout à partir de l.'avènement des premiers .
sultans <alawites, alla toujours en croissant, alors que s'ac-
centuait la pénurie des œuvres historiques pures. Il ne fut
pas de saint en renom, de confrérie mystique, de faInille
chérifienne, de docteur réputé qui n'eût sa notice o'u sa mo-
nographie propre. Et ce nouvel essor fut dù à des causes
diverses en apparence, mais étroitement liées entre elles:
mouvement de réaction contre les tentatives de « recon-
quista » chrétienne, apparition de3 saints champions de la
guerre sainte, regain d'activité intellectuelle, influence
g,'andissante des conrréries et des groupements de chorfa.
C'est l'ensemble des ouvrages qui constituent cette littéra-
ture biographique que nous allons passer en revue ici. Ils ne
présentent pas tous le même intérêt; il en est quelques-uns
qui n'ont pas même survécu à leurs auteurs et qu'en dépit
de nos recherches, nous n'avons pu retrouver. Les autres,
pour la plupart, ont servi de base d'information aux collec-
tions biographiques établies dans la période contemporaine.
La Salwat el-anfâs, parmi ces dernières, en fournit un
LES BIOGHAPHES 219

tableau d'ensemble qui n'est pas loin d'être complet. C'est


sur ce tableau, dont on sait le parti qu'a, déjà depuis plu-
sieurs années, tiré NI. René Basset, que nous avons nous-
même étayé nos investigations sur les biographies maro-
caines.
En examinant la précieuse liste d'el-Kattânî, il semble, de
prime abord, qu'elle soit susceptible de classement. Les
travaux qu'elle mentionne ont trait, les uns à des saints
isolés, d'autres à un ensemble de saints, d'autres à des
familles chérifiennes, d'autres à des savants. Il en est,
enfin, qui sont des dictionnaires biographiques mixtes. Il
paraitrait, dès lors, assez rationnel, qu'on adoptât ces divi-
sions pour les analyser et les jugeL' et qu'on les gl'oupàt,
suivant leue nature et leurs titres, sous des rubriques diffé-
rentes. Mais, en réalité, ce départ est difficile, sinon impos-
sible à effectuer, si l 'on ne veut pas, à tout instant, être
exposé à d'inutiles redites. C'est qu'en effet, tel auteur n'est
pas exclusivement hagiographe, ou biographe de savants,
ou même généalogiste et historien d'une branche chéri-
fienne; il est, dans la plupart des cas, à la fois l'un et
l'autre; et si l'on classait chacun de ses écrits biographiques
à des places différentes, on l'isquerait de ne plus apercevoir
l'ensemble de son œuvre, ni le rang qu'elle occupe par rap-
port aux autres travaux du même genre. Il existe également
de grandes familles luarocaines, dont tous les membres,
depuis des siècles, ont, chacun à son tour, produit des
œuvres biographiques : par exemple, ~es Fâsiyin et les
Qâdiriyin. Étudier à la fois tous les écrivains appartenant à
ces familles présenterait des inconvénients analogues.
Aussi, nous a-t-il paru qu'il valait mieux, dans l'énumél'a-
tion hio-bibliogl'aphique qui va suivre, nous en tenir stric-
tement à l'ordre chronologiq ue, en donnant à chaque bio-
graphe la place que lui assigne la date de son décès et en
consacrant à tous une courte notice, quitte à nous étendre
un peu plus lon guement sur ceux dont l'œuvre en vaut la
peIne.
220 LES HOMMES ET LES Œ VllES

COUP D'ŒIL RÉTROSPECTIF SUR LES BIOGRAPHES MAROCA_INS

ANTÉRIEUHS AU XVIe SIÈCLE

Les plus importants de ces biographes ont vécu au


XVI e siècle et surtout aux siècles suivants. C'est avec la
Daw~tat en-nâclâr d'Ibn 'Askar, et ensuite avec les diction-
naires d'Ibn el-Qâ9-i, d'el-Ifrâni et d'el-Qâdirï, que la bio-
graphie marocaine a véritablement pris forme. Mais ces
derniers ne furent pas, eux-mèmes, de façon absolue, les
innovateurs du genre; au Moyen Age, il était déjà repré-
senté au Maroc, comme en Orient; pour ne pas être très
florissant, il avait prouvé par quelques prod uctions espa-
cées son existence et sa vitalité. Voyons donc d'abord, rapi-
dement, quels furent les ouvrages que composèrent ces
rares précurseurs.
Le plus ancien de ces travaux parait être le Kitâb et-
tacltawwo~tf ilâ l'ijâl et-ta.?awwoûf (1) , ou recueil de notices
sur les ~oùfis du monde islâmique et du Maghrib, en parti-
culier; il est dû à la plume d'un savant de la région du
Tâdlâ, Aboû'l-l:Iajjâj Ioûsof ben Ial:liâ ben 'Isà ben 'Abd er-
Ral,màn et-Tâdili (2) , connu sous le-nom d'Ibn ez-Zayyât (3).
Cet écrivain, qui fut contemporain du saint de ~1arrâkech
Aboû'l-' Abbâs es-Sabti, occupa la charge de qâ<Jï dans le
pays des Ragrâga, où il mourut, au témoignage d'el-f:la<Jrami,
rapporté par AIJ-med Bâbâ, en 627 ou 628 (1129-31). Il aurait

(1) On trouve dans el-Kattànî, Salwat el-anfds, IH, p. 357, la varianlc


ild ma'rifat rijdl el-la~awwoilf.
(2) L'elhnique du mot Tàdlà est actuellement tddldwî, l'ancicn tddili
servant de nom aux chorfa de la région.
(3) BiBLIOGRAPHIE. - A1:tmed Bàbà, Naïl el-ibtihdj, p. 386; Ibnel-Mowaqqil,
es-Sa'ddal el-abadîyya, l, p. 147; R. Basset, Rech. bibl., p. 4, nO 1 ; R03cn,
Collections scientifiques de l'Institut des Langues orientales de Saint-Peters-
bourg, Saint-Pétersbourg, 1877, l, p. 86, ap. R. Basset, Loc. cit. Ibn el-Mo-
waqqit prélend qu'Ibn ez-Zayyàt mourut à Marrâkech et fut enlerré dan '
celte ville; son tombeau se trouverait dans une qobba, en dehors de la
porte dile Bàb el-I hamîs (nord-ouest de la Madina).
LES BIOGRAPHES ANTÉRIEURS AU XVie SIÈCLE 221

également composé une monographie des saints du Maroc


l'éyérés à son époque.
Le même sujet inspira, sous un titre à peine différent,
et-Tachawwoûf ft ma<rifat ahl et-ta$awwoûf, un contribule
d'Ibn ez·Zayyàt, qui vécut à une époque légèrement posté-
rieure, Aboû Zaïd <Abd er-Ral}mân ben Ismâ<ïl et-Tâdili
el-<Omari ez·Zamrânî e1?-$awma<ï (1).
Un peu plus tard encore, une monographie fut consacrée
par Al).med b. Ibrâhîm b.Al.tmed b.Aboû Mol}ammed $âlil}
à son arrière-grand-père,' sous le titre d'el.lJlinhâj el-wâ(li?'t
ft ta(7qîq karâmât Abî 1Jfol;ammed Sâli{z (2). On ne sait rien
de l'auteur: quant au bénéficiaire du recueil de manâqib,
c'est un ancien disciple d'Aboû Madian de Tlemcen , qui
serait mort le 25 dhoû'l.l}jjj~. 631 (20 septembre 1234) ;
c'est au tour de son tombeau que fut construit le ribât d 'Asfi
(aujourd'hui Safi) (3). 1

Au VIlle siècle de l'Hégire, un lettré originaire de Bâdis,


sur la côte méditerranéenne du Maroc, écrivit une mono-
graphie des saints du Rif, sous le titre d'el-lJfaq$ad ech-
c haf'Îf w'a/ l-manza< el-latîf fî dhikr $ola~â' er-Rîf; lui-mème
s'appelait Aboû :Mol).ammed <Abd el-Baqq ben Ismâ<ïl ben
Al.tmed ben Mol}ammed ben el-KhaÇlir loûsof el-Bâdisl el-
Khazrajl el-Gharnâlî (4). Un exemplaire de l'ouvrage que
nous avons sous les yeux porte en appendice qu'el-Bâdis!
en fit lecture dans la mosquée d'el-Qarawîyîn, à <Abd el-
Mohaïrnin ben Mol).ammed el-1-:IaÇlramï (5), pendant le mois

(1 ) Mention de cet auteur et de son ouvrage est faite par el-Kaltànî,


SallVat el-anfâs (sources), III, p. 357. Cf. R. Basset, Rech. bibl., p. 5, nO 2.
(2) Source d'el-KaLtânî, Salwat el-anfâs, III, p. 359, 1. 21. Cf. H. Basse t,
Rech. bibl., p. 20, nO 47.
(3) Aboû Mol}.ammcd ~âlil}. b. ln~àren b. Ghafiyyân ed-Dokkâli el-Mâ-
jari serait né en 550 (1155). Il ne faut pas le confondre avec son hOIllO-
nyme Abo û Mol}.ammed ~àlil}. el-Haskoûrî, jurisconsulte et saint de Fès
mort quelques années plus Lard. Cf. Ibn FarQ.oûn, ed-Dîbâj, p. 132; el-
Kattânî, Salwat el-anfâs, II, pp. 43-44.
(4) Cf. Manuscrits arabes de Rabat, nO 397. On y trouvera la liste des
saints étudiés par el-Bâdisî.
(5) Sur ce personnage qui joua un certain rôle politique sur les Méri-
nides, qui fut secrétaire du sultan Aboû'l-J:Iasan, et mourut à Tunis en 749,
222 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

de rabf 1 722 (20 mars/ 18 avril 1322). Ce détail permet


ainsi de dater le Maq$acl.
Ce recueil hagiographique comprend une quarantaine de
notices relatives à des santons enterrés dans les tribus
rifaines qui vont, suivant la propre expression de l'auteur,
ùe Ceuta à Tlemcen. POUl' la majeure partie, ces person-
nages sont demeurés obscurs et on ne les retrouye pas
mentionnés dans les dictionnaires postérieurs. Beaucoup
ont des noms qui sonnent étrangement en arabe: ces mo-
destes igourramen, qui, probablement, ne connaissaient
que le parler berbère de leur pays, semblent mênle, à
l'heure actuelle, ètre à peu près complètement oubliés aux
eudroits où el-Bâdisi lapporte qu'ils vécurent (1).
On n'a pas beaucoup de renseignements sur le biogl'aphe
Aboû Abd 'Allah MoQ.am1lled ben Aboù Bakr el-l)açlrami, qui
écrivit, dans la seconde moitié du VIne siècle de l' Hégire,
deux ouvrages, l'un relatif à des saints du Maroc, es-Salsal
el-'adhb wa'l-manhal el-a!:ûcî (2), l'autre, consacré aux célé-
bt,ités de la ville de Ceuta et intitulé el-J(awkab el-waqqâd
fi man l:uIll bi-Sabta min el-' ola17zâ' wa-$-{wLaJ.tâ' wa' l-' ibâd (3).

= 1349, cf. la notice très complète de G. Marçais, dans son édition de la


Rawq,at en-nisrîn d'Ibn el-Al;tmar, p. 74, n. 1 et p. 77, n. 4 et la bibliogra-
phie citée.
(1.) 11 n'y a que le dernier saint de la liste d'el-Bâdisî, Aboû Isl;tâq Jbrâ-
him e]-Bat~âl, de la tribu des Kibdâna, dont le souvenir se soit conservé
dans le Rif, autant qu'on puisse en juger par l'exploration de Mouliéras.
En effet, le patron de cette tribu est un Sidi Brâhîm, qui semble bien
correspondre au personnage ci-dessus mentionné. Cf. Mouliél'as, le Maroc
inconnu, 1 r e partie, Exploration du Rif, p. 170.
(2) Cf. el-Kattânî, Salwat el-anfâs, III, p. 358, et R. Basset, Rech, bibl.,
p. 6, nO 4. Le titre complet de l'ouvrage est:
~:J\ ~. -.1.. ~\ ~){;dJ ~~\ ~}I\ J~~ ~ iJ\ J....LJ\
j ~L <.S~ 0 A d.L, ~ l$\:;~ ..)~..u\ ~ ~ Lo J))''j
JA

,. )\-J ~ L:CJ U 19 ~:> ~\ ~ j::~.)'j\


J'en possède une copie faite sur un exemplaire qui a appartenu à l'auteur
de la Salwat el-anfds.
(3) D'après el-KattânÎ, Salwat el-anfâs, JI, p. 298, à propos de la biogra-
phie de Mol;tammed ed-Dorrîj el-Andalosî. Cf. H. Basset, ibid., loc. cil.
LES BIOGRAPHES ANTÉRIEUHS AU XVIe SIÈCLE _223

Le Salsal est un opuscule que son auteur dédia, comme


l'ind ique le titre complet, au sultan mérinide 'Abd el-' Aziz
fils d'Aboù'I-f:Iasan (1), qui monta sur le trône en 767 (1366)
et mourut à Tlemcen en 774 (1372). Ce recueiJ se trouye
ainsi daté ù cillq ans près : el-ljaçlrami se peoposa, en
l'éc rivant de rappeLer lnoins la biogr'aphie que les manâqib
des quarante saints les plus en vue, qui, à son époque,
étaient révérés dans l es villes de Fès, de Meknès et de
Salé. Il répartit ces saints en trois catégories (tabaqâl) et
les rangea dans l'ordre décroissant de leur importance. La
plus longue notice a trait au patron de Salé, Ibn 'Achir, qui
Jevait plus tard bénéficier d'une monographie spéciale;
el-f:Iaçlramile rencontra dans sa zâwiyya de Salé, le 1 er rajab
763 (16 avril 1362) .
. C'est du VIlle siècle de l'.Hégire que date également
l'Athmad el-'aïnaïn wa-nozhat en-nâf,idn ft manâqib el-
âklwûwaïn Abî Zaïd wa-Abî 'Abd Allah el-llazmîrîyaïn.
L'auteur, Aboû 'Abd Allah Mol,lammed ben Mol,lammed
ben 'Abd Allah Ibn Tij lât el- Hazmiri el-Marrâkochi (2),
vécut à Marrâkech; il consacra son ouvrage à la biographie
et au relevé der:; manâqib de deux célèbres saints d'Aghmât,
fondateurs de la confrérie qui porta leur nom: Aboù Zaïd
'Abd er-Ral,lmân et Aboû 'Abd Allah Mol,lammed, tous deux
fils de 'Abd el-Karim el- Hazmiri (3). D'Ibn Tijlât, on ne

(1) Sur ce prince, cf. Ibn Khatdoûn, 'Ibar, Histoire des Berbères, éd. de
Stane, p. 477 sqq. ; Ibn el-Al).mar, Rawq,at en-nisrîn, p. 30 du texte et 90-
9L de la trad.; Ibn el-Qâçli, Jadhwat el-iqtibds, pp. 268-269; en-Nâ~irÎ,
l:;liq~d, II, p. '129.
('2) Cel ouvrage a servi de source à el-Kattânî, Salwal el-anfâs, Ill,
pp. 368-359. Cf. R. Basset, Hech. bibl., p. '13, no '19.
(3) Sur le premier de ces saints, mort à Fès en 706 ou 707 ('1306-'1308)
ct enterré dans celte ville, près de Bâb el-Fotoûl)., cL, en plus de l'Alh-
maLl el-'aïnaïn, Ibn el-Qâçli, Jadhwat el-iqlibds, p. 263; Al:}.med Bàbà, Naïl
el-iblihdj, p. '137; Ibn 'Aïchoûn ech-Charrât, er-Rawq, el-'âtir el-anfâs,
fol. 94 vo ; el-Kattânî, Salwat el-anfds, Il, p. 52 sqq. (avec citations d'lbn
(Jollfoùdh). Sur le second, qui mourut à Aghmât (à Marrâkech, suivant
l'auleur de la Sa'dda) le dernier jour de chawwâl 678 (3 mars '1280) à
l'ùge de plus de soixante ans, cf. Al}.med Bàbâ, Naïl el-iblihâj, p. 225; cl-
K:'l ttànÎ, Salwat el-anfâs, Il, p. 56; Ibn el-~owaqqit, es-Sa'âdat el-abadiyya,
224 LES IIOi\IMES ET LES ŒUVRES

sait rien que le nom; son livre, comme celui d'el-Bâdisl,


ne présente aucun intérêt au point de vue historique. Il est
divisé en vingt chapitres, dont la pIn part exposent en détail
la doctrine des ~oûfis apportés d'Orient. Les manâqib des
saints eux-mêmes tiennent en quelques pa'g es et senlblent
n'avoit' fourni qu'un prétexte à des digressions d'ordre
mystique (1) .
Il ne reste, pour terminer cette rapide esquisse de l'en-
semble des œu Vl'es biographiques marocaines antérieures
au XVl e siècle, qu'à signaler une monographie relative à la
ville de F'ès, intitulée .Tanâ zahrat el-'âs ft alïhbâr el-ll1aghrib
wa-tâ'rtkh madtnat Fâs. Nous n'avons pu nous procurer cet
ouvrage, qui. postérieur au Qirtâs, renfermerait de pré-
cieux renseignements sur l'histoire topographique de la
capilale, jusqu'à la fin de la dynastie mérinide et fournirait
un répertoire hagiographique étendu. Son auteur s'appelait
Aboû'l-Basan <AH el-Jaznâ'I (2).

BIOGRAPHES DU Xe SIÈCLE DE L'HÉGIRE (1495-1592 J.-c. ).

Ibn Ghâzî (3)

La ville de Meknès, Miknâsat ez-zaïtoÎLn (Miknâsa des oli-


viers)," comme on l'appelait alors, eu t également, dès le

J, p. 57 sqq. Les Hazmîrlyln tirent leur ethnique de Hazmir, l 'une des six
tribus de la confédération des Dokkâla.
(t) Un exemplaire de cet ouvrage, malheureusement incomplet et ne
portant aucune mention de date, vient d'être acquis à Fès pour la biblio-
thèque du Protectorat.
(2) Cet ouvrage a servi de source à el-Kattânî, Salwat el-anfds, III, p. 358
(cf. Basset, Rech. bibl., p. '12, nO 1.6) et à el-l;Ialabl, ed-Dorr en-nafis, p. 9.
_1. Bel, Inscriptions arabes de Fès, p.'128, n.i, annonce qu'il« prépare une
édition de ce texte datant de l'époque mérinide et postérieur au Qirtds )) ;
il appelle cet ouvrage Kitabu-l-As fî binâï madinati Fâs. EI-Jaznâ'î est la
transcription marocaine d'un ethnique qui devait vraisemblablement être
le même que l'actuel el-Gzennâ'î (de la tribu des Gzennâïya du Rif).
(3) BIBLIOGRAPHIE. - Ibn <Askar, Dawl),at en-nâchir, pp. 36-37 et passim; el-
Manjoûr, Fahrasa, fol. 20-2'1 de mon ms.; lbn el-Qâçlî, Jadhwat el-iqtibds,
LES BIOGHAPIIES DU Xe SIÈCLE nÉG. 225

début du xvr e siècle, sa monographie locale; et ce fut un


grand, jurisconsulte, d'une renommée qui dépassa les
bornes du Maroc, qui se chargea de l 'établir.
Aboû 'Abd Allah )\I10bammeo ben Ab.med ben Mobammed
ben Mobammed ben 'Ali Ibn Ghâzî el- 'Othmânî el~Miknâsî
el-Fâsi naquit à l\1el~nès en 841 (1437-38) ('1 ), ou, plus vrai-
semblablement en 858 (14.54) (2). Sa famille, qui était origi-
naire d'une fraction des Kotâma du Habt, les Banoû 'Oth-
màn, était installée dans cette ville depuis plusieurs géné-
ratio~s. C'est là qu'il fit ses premières études; il alla bientot
les compléter à Fès. Il a donné, dans sa fahrasa, la liste de
sps maUres: les principaux furent Aboû'l-Faraj et-Tanji (3),
Mobammed el-Qa"vri (4) et Aboû 'Abd Allah e$-$aghir (5).

p. 203 ; Aljmed Bâbâ, Naïl el-ibtihâj, p. 359; Ibn 'Aïchoûn ech-Charrâ(,.


er-Rawej, el-'âtir el-anfâs, ms. 389 de Rabat, fol. '106 vO; el-Kattânî, Salwal
el-anfâs, lI, pp. 73-77; Mol;tammed es-Sâ'ïl;t, el-Monlakhabât el-'abqarîyya,
p. 22; Ca~iri, Bibliotheca arabico-hispana, l, p. 369; Brockelmann, Arab.
lill., Il, p. 240; R. Basset, Rech. bibl., p. 17, nO 30 et p. 23, nO 57; Bell
Cheneb, De la transmission du Recueil de traditions de Bokhary aux habi-
lants d'Alger, p. 1H, n° H; le même, Idjâza, § 52. Cf. également une no-
tice inspirée d'el-Wancharîsî, à la page 29 de l'édition de Fès (1326) d'er-
Rawej, el-haloûn.
(1) D'après el-Manjoûr, op. cit. (biograph ie de 'Ali Ibn I1âroûn). Celte
date aurait été fournie à cet auteur par Aboû'l-'Abbâs e~-~iqâl, 'adal à
Meknès. Badr ed-Dîn el-Qaràfî, dans son Tawchif), ed-dîbâj, donnerait la
date approximative de 840.
(2) Cette date est fournie par Ibn GhàzÎ lui-même à la fin de son er-
Rawej, el-hatoûn; elle a été adoptée par lbn el-Qâçlî et rejetée par el-I( at-
tânÎ.
(3) Aboû'l-Faraj Mol).ammed ben Mol;tammed el-Omawî el-Fâsi, connu
sous le nom d'eVfanjî, mort en 889 (1484) ou 893 (1488). Cf. Ibn Ghâzi,
et-Ta'allol, fol. 5 de mon ms.; el-Manjoûr, Fahrasa, fol. 16; Ibn el-Qâçlî,
Jadhwat el-iqtibâs, p. 15'1; Al).med Bâbâ, Naïl el-ibtihâj, p. 344; el-Kat-
tânî, Salwat el-anfds, II, p. 118.
(4) Aboû 'Abd Allah Mol).ammed ben Qâsim el-Qawrî el-Lakhmî el-Mik-
nâsi el-Fâsî, mort à Fès en 872 ('146 7). Cf. Ibn Ghâzî, et-7a'allol, fol. 5 de
mon ms. ; Ibn el-Qâ<Jî, Jadhwat el-iqtibâs, p. 203; Al;tmed Râbâ, Naïl el-
ibtihâj, p. 337; el-Kattânî, Salwat el-anfds, II, p. '116; Ben Cheneb, Idjâza,
§ 257.
(5) Abou 'Abd Allah Moljammed ben el-l:Iosaïn el-Awrâbî , connu sous
le nom d'e~-~aghîr, mort à Fès en 887 (1482). Cr. Ibn el-Qâçlî, Jadhwal el-
15
226 , '
. LES nOMMES ET LES ŒUVRES

Le docteur de Tlemcen Ibn Marzoûq el-Kafif lui délivra une


ijâza (1).
Ibn Ghâzî ne tarda pas a devenir lp. plus grand savant
marocain de son époque; ses connaissances embrassaient
tous les domaines de la science islâmique. Une foÏs ses
études terminées, il était revenu s'installer dans sa ville
natale, où il avait été nanti de la charge de prédicateur.
M'ais, à la suite de démêlés qu'il eut avec l'émir de Meknès,
Aboù 'Abd Allah l\lol).alnmed el-f::Ioloû el-Wattâsi, il dut,
en l'ann ée 891 (1486), aller habiter Fès. Il fut successive-
ment, dans la capitale, prédicateur à la moscrl~ée de Fès el-
J adj d, puis à la fois prédicateur et imâm à la cathédrale
d'el-Qarawlyîn. Sa science finit par lui valoir le titre envié
de cluûkh el-jamâ'a (2). A ses cour3 de l'Université, comme
à ceux qu 'il professait dans sa maison du quartier d'el-
Blîda (3), se pressèrent des disciples de marque : ainsi,
'Abd e1- Wâl).id el-Wancharisi (4\ ed-Daqqoûn (5) , 'Ali Ibn
Hâroûn '(6), Choqroûn Ibn Abl Jam'a el- Wihrânî (7), Ibn

iqtibâs, p. 150; Af:1med Bâbâ, aïl el-ibtihâj, p. 341; el-Kaltânl, Salwat el-
anfds, II, p. 65.
(1) Aboû "Abd Allah Mo1:wmmed ben ?\lo1;t.ammed ben Al;rmed Ibn Mar-
zoûq eVAj.îsî, con nu sous le nom d'el-Kafif (pour l e différencier de son
père el-J;laftd), mort à Tlemcen, en 901 (1495-1496) _ Cf. 1bn Ghâzî, et-
Ta'aUol, fol. 1 sqq. ; AJ:tmod Bâbâ, Nail el-iblihâj, p. 354; Ibn Marlam, el-
Bosldn, p. 249; Ben Chen,eb, Idjâza, § 54.
(2) Ce titre ne coiTespond pas à une fonction officielle. Il est accordé,
dans toutes les grandes villes du Maroc et principalement à Fès, au pro-
fesseur le plus àgé et resté le seul de sa génération, ou à peu près.
(3) Important quarlier de Fès, situé à l'est de la mosquée d'ei-Qara-
wlyîn.
(4) Cf. supra, p. 89, noLe 2, b. " ,
(5) Aboû'l-'Abbàs Al).med ben Mo1;t.ammed bèn Moûsà e~-$ahhâjl ed-
Daqqoùn, morl à Fès en 921 (1515). Cf. Ibn el-Qâçli, Jadhwat el-iqtibds,
p. 66; A1;t.med Bâbâ, Naïl el-iblihâj, p. 75; el·:l(altùnî, Salwat el-anfds, III
p. 248;, Ben Cheneb, Idjd:::a, § 75: EI-Qâd iri, Nachr 'el-mathd!nî, J, p. 127,l
signale UIl homonyme de ce perso'n nage, probablement son descelldatlt,
mort en 1024 (1615). ' " '.'," '.' f, , : ' : " •

(6) Cf. supra~ ~. 89, nole 2, a. , ', '1


l' '

(7) Mo1;t.ammcd Choqroûn ben A l:uued' bÉm Abî 'Jam'a ', cl'-~1agnrâwî el-
\Vibrânî, mort à Fès en 929 ( 1522-1~23). Cf. Ibn ' eI-QâÇli;1adhwat-' el-i'q ti-
LES ' BIOGRAPHES DU Xe ~;IÈCLE HÉG. 227
, '

Khajjoù (1) et Al).med Bâbâ. Il prit, à diverses reprises, une


part active aux expéditions des « combattants pour la foi »).
Ibn 'Askar rapporte qu'à la fin de sa vie, le savant décida
de rejoindre l'armée du sultan Aboù <Abd Alh:h Mol).ammed
el-WattâsÎ (2), qui tentait d-e reprendre aux Chré.tiens la
ville d' Arzila ( A~îlâ). Tombé malade, il se fit transporter à
Fès. Pendant le voyage de retour, il rencontra à la 'Aqabat
el-masâjin (3), dans la banlieue de la capitale, l'illustre el-
Ghazwâp.l, qui, arrêté et chargé de chaînes sur l'ord~e du
sultan, était en1mené en captivité. La rencontre de ce saint
personnage fit une grande impression sur Ibn Ghâzî : il y
vit le présage de sa mort prochaine. Il s'éteignit, en etTét,
le jonr même, à Fès, dans l'après-midi du 9 jomâdâ 1 919
(13 juillet 1513) . Il fut enterré le lendemain dans le quar-
tier d'el-Kaghghâçlîn (4); le sultan, les grands person-
nages de' la ville et une foule nombreuse assistèrent à
son convoi funèbre (5).
L'opuscule d'Ibn Ghâzl, er-Rawq el-lzatoûn ft akhbâ,. Mik-

bâs, p. 204; A1;tmed Bâbâ, Naïl el-ibtihâj, p. 112; el-Kattânî, Salwat el-an..,
Jds, III, p. 280.
(1 ) Aboû'l-Qâsim ben 'Ali ben Mo1;tammed Ibn Khajjoû el-~Iassânî, mort
en 956 (1549). Cf. Ibn 'Askar, Daw7:wt en -nâchir, p. 13; Ibn el-Qâçlî, Jadh-
wat el-iqtibâs, p. 319; el-Ka ltânî, Salwat el-anfds, II, p. 149.
(2) Il s'agit d' Aboû 'Abd Allah Mo1;tammed ben l\Io1;tammed ech-Chaïk1l
el-Wattâsi, dit el-Bortoqàli, qui régna de 914 à 931 (1508-152~») et sur le-
quel cf. Ibn el-Qâçlî, Jadhwat el-iqiibâs, p. 132; , en-Nâ~irî, Isliq~ â, 11,
p. 170 sqq ; A. Cour, La Dynastie marocaine des Beni Wattâs, Constantine,
1921 , pp. 113-153. '
(3) 'Aqabat el-masâjin, « la monlée des prisonniers », est le nom d'une
piste de la banlieue de Fès: partant du Jabal Gabgab, au nord-o'u cst de
la ville, elle va aboulir au Wàdî Sboû, en suivan.t les derniers contreforls
du Jabal Zàlagh. '
(4) Le quartier d'el-Kaghghâç!.în, au jourd'hui disparu, a son emplace-
ment marqué' pa:r un cimetière. JI se trouvait au sud de Fàs el-Bâli, à
l'intérieur de l'enceinte, près de la porte désaffectée -d ite el-Bâbel-Hamrâ'
(à environ 300 mèlres à l'ouest de Bâb el-Fo(ou1;t,) . ," '
1
(5) Le tombeau d'Ibn Ghàzî est ericorc 'ti'ès ,,'i sîlé à 'Fès. Il se 1l'ouve au
bord du Wâdî'z-zaïtoûn(Oued ez-zitoun), à proximi~é d'el-Bâb el-~amrà'.
El-KaLLânî, dans sa notIce sur IbJ,l- Ghâzi,"donne le texte des inscriptions
qui se lrouvent dans le ~n~usol êe ; ce dernier fut :é'difié en~afar 1045'
(17 juill'et-14 août 1635). '. , ,. \, ' " u , , '
228 LE'S HOMMES ET LES ŒUVHES
,
nâsat ez-zaïtoûn (1), fut l'un des derniers écrits dujuriscon-
suIte, qui, vraisemblablement pour apportel' une di version
il ses incessantes spéculations jUl'idicrues, rédigea une assez
brève notice sur sa ville natale. Néanmoins, le Rawrj, en
dépit de sa courte étendue, est une très intéressante mono-
g,'aphiè, pleine de détails historiques, géographique~ et
même ethnographiques. L'auteur relate l'histoire de la yiIle
depuis ses origines, à partir du moment où toute la contrée
fut occupée et colonisée par les Romains. Il montre t'l'ès
bien comment la plupart des villages de la plaine qui s'étend
au Sud du Jahal Zarhoûn finirent par disparaitre au profit
de la ville fortifiée fondée par les Almohades. Le Raw{l
se divise en trois parties nettement séparées l'une de
l'autre : partie descriptive et géographique, partie histo-
rique, partie biographique. Dans la première, Ibn Ghàzi fait
preuve d 'une connaissance approfondie des lieux; tout au
moins en a-t-on l'impression, car, la plupart du temps, il
est difficile d'y reconnaitre la Meknès moderne, agrandie
et complètement tt'ansformée lorsqu'elle fut, sous le règne
de .\Joulay Ismâ'Il, éle\-ée au rang de capitale du Maroc (2).
La partie historique va jusqu'à la dynastie wattâsite. Dans la
dernière partie, Ibn Ghâzî reprend, avec assez de détails, un
sujet que l'auteur du Salsal n'avait fait qu'effleurer, et sa
liste biographique est relativement développée. On y trouve
des renseignements sur les grands savants de Meknès au
Moyen Age; ainsi, Aboû 'Abd Allah Mol,lammed ben Aboû'l-
Fa41 el?-$abbâgh, qui périt au COlU'S d'un naufrage près des
côtes tunisiennes; Aboû ' Abd Allah Mol,lammed ben Al;1med
ben Aboû 'Afif, qui fut son arrière-grand-père maternel; le
poète Aboû 'Abd Allah Mol:l.ammed Ibn Jâbir el-Ghas-

(1) Er-Rawcf, el-haloûn a été lithographié à Fès en 1326. M. Houdas en a


donné une traduction partielle dans le Journal asiatique, 1885, l, pp. 10J-
147 , sous le titre de Monographie de Méquinez . Sur les mss. de cet ouvrage,
cf. H.. Basset, Rech. bibl., p. 23, nO 57. Il en existe un autre à Rabat, sous
le nO370.
(2) C'est ainsi que le Bâb TiûnlÎ actuel doit correspondre à l'ancien Bàb
el-machwârîyîn, près duquel se trouvait le lieu dit Hawâ'ïmî àn lijimî
(p. H de l'éd. de Fès ~t p. 33 du tirage à part de la tard. Houdas).
LES BIOGRAPHES DU Xe SIÈCLE HÉG. 229

sân i (1), dont il utilisa l' orjoûza sur la ville de Meknès, inti-
tulée Nozhat en-nâ;,i/'. Enfin, Ibn Ghâzi passe en revue
quelques grandes familles de la ville, parmi lesquelles, en
premier lieu, celle des Zaghâbicha.
Un écrivain appartenant à cette dernière famille, le qâçli
Aboù'l-Khattâb Sahl ben el-Qâsim ben <Abd Allah Ibn Zagh-
boûch (2), avait rédigé, à une époque antérieure à Ibn
Ghâzi, une notice sur l'histoire de Meknès. L'auteur du
Rawr;l s'en inspira et même en reproduisit des passages, si
bien que son ouvrage a paru à des savants européens n'être
qu'une réédition augmentée de cette notice : opinion
d'autant plus vraisemblable que le style de la monographie
de Meknès diffère du tout au tout de celui des autres
œuvres d'Ibn Ghâzi. Il est vrai que le sujet lui-même se
prêtait à l'emploi d'un style clair, et l'uniformité de ce style
dans tout le Rawr) ne permet pas de préciser quelle part
dans la composition de ce livre peut" être vraiment attribuée
à Ibn Ghâzi.
Quoi qu'il en soit, ce petit travail contient, en assez grand
nombre, des indications qu'on n'a pas coutume de rencontrer
dans les ou vrages marocains du même genre. Les quelques
citations poétiques qui l'émaillent sont d'un pittoresque qui
ne choque pas le lecteur européen: ainsi, des vers attribués
au fameux Lisân ed-Din Ibn el-Khatib (3), qui comparent le

(L) Mo}:lammed ben Ia)::lià ben Mol!ammed Ibn .Jâbir el-Ghassâ nî com-

posa de nombreuses poésies et mourut à Meknès en 827 ('1424). Cf. Ibn
Gluizî, er-Rawq, el-haloûn, p. 22 de l'éd. de Fès et Ibn el-Qâ<;lî, Jadhwat
e7-iqlibds, pp. 201-203.
(2) Ce personnage, au dire d'Ibn Ghâzî (e r-Rawq" p. 13 de l 'éd. de Fès
ei 34 de la trad. Houdas), s'appelait exactement Aboù'I-KhaHâb Sahl ben
el-Qùsim ben <AbdAllah ben MoQ.ammed ben T:Iammâd ben Moryammed Ibn
Zaghboùch. Il naquit à Guadix, suivit son père au Maroc, puis retourna
en Andalousie en 616 (12'1 9-1220) el ful successivement qâçlî de Bonda ,
d 'Ecija, de Tanger et de Murcie, où il mourut.
(3 ) Sur la vie et les œuvres du fameux vizir Lisân ed-Din Ibn el-Kha~îb
es-Salmânî, asspssiné en 776 (1374), voir principalement les articles de
Pons Boigues, Ensayo bio-bibliograflco, n O 294 et de Brockelmann, Arab.
litt., p. 262 et références donllées. Cr. également de Aldecoa, Ibn el-
Khatib Lisân ed Din, in Archives berbères, 1917, vol. Il, pp. 44:-87. Ce per-
230 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Jaba-l Zarhoùn à ~( un B~rbère qui disparalt au ' milieu d'une,


for~~ de figuiers et d'oliviers (1) », et qui sont d'un heureux
contraste avec les la~guissantes productions de la poésie
marocaine. On y trouve même un timide essai de lexicogra-
phie comparée sur les noms des variétés d 'arbres fruiliers
qui poussaient dans la région. Et, quel que soit le véritable,
auteur du Rawrj, on peut se demander si M. Houdas, qui a
donné de l'ou,:rage une traduction partielle, n'a pas porté
sur lui un jugement un peu trop sévère.
La fahrasa d'Ibn Ghàzi, qui s'intitule el-TacaUol bi-/'asln
el-isncîd bacd intiqcîl altt el-nulnzal wa'n-nâd et qui fut ler-
minée le vendredi 18 rajab 896 (28 mai 1491), contient éga-
lement des renseignements biographiques et bibliographi-
ques sur les savants de "M eknès qui furent les premiers
maitres du jurisconsulte. Comme celle d'el-Manjoûr, elle
sera à dépouiller soigneuselnent, le jour où l'on voudra
dresser un dictionnaire des docteurs marocains. Elle ren-
ferme le résumé des ijcîza que l'auteur reçut et se termine
par une liste de ses œuvres (2).

sonnage a fait l 'objel de notices par les biographes marocains: Jbn el-
Qâçlî, Jadhwat el-iqtibds, pp. 194-197; Al).med Bâbâ. Naïl el-ibtihdj, p. 269;
cl-Kattâni, Salwai el-anfds, Ill, pp. 187-19J. Cf. également Mol;tammed
es-Sà'ïl)., e'l-Montakhabâl el-'abqarîyya, p. 213 sqq.
0) Ce vers se trouve aux pp. 2 ct 28 dc l'éd, de Fès du Rawq.,. Cf. IIou-
das, Monographie de Méquinez, p. 7 .
• , (2) Voici la lisle des œuvres d'Ibn GhâzÎ, dans l'ordre où elles furent
composées: 1 0 Inchdd ech-charîd jî q.,awdll el-qd~id (commentaire de l'or-
joùza d'ech-Chàt.ibî sur la récitation du Qor'àn); 20 un poème didactique
sur l'arithmétiquc, Moniat eHwssâb et 3 0 son commentaire Boghiat et-,
tollâb; 4° Imtâ Cdhawî'l-istil}-qdq bi-ba'q., morddel-Morâdi wa-zawâ'ïd Abî Isl}-âq
(glose sur l'Aljîyya d'Jbn Màlik); 5° el-Jdmi <el-mostawfi bi-jadâwil el-lfawfi;
6° Tal}-rîr el-maqâla fî na:?â'ir er-Risâla; 7° Taf~îl Ciqd ed-dorar; 8° Imdâd
baIJ-r el-qa~îd bi-bal}-raï ahl et-tawlîd (supplément à la Khazrajîyya); 90 Inâs
el-iq~dd wa't-tal}-rîr; 10° el-Masâ'ïl el-"Q-isân el-marfoûCat ilâ "Q-ibr Fds wa'l-
Jazâ'ïr wa-Tilimsân; H° Na~m mawâsil el-maqdl; 12° commentaire du pré-
cédenl; 13° et-Ta'allol ... ; 14° er-Rawq., el-hatoûn; '15° Chifâ' el-ghaUl Ji
"Q-all moqafl Khalîl; 16° Takmîl et-taqyîd wa-ta~îlîl et-la<qîd calâ'l-Modaw-
walla. - Les titres de douze autres œuvres, probablement postérieurcs à
ces dernières, ont été conservés par ses biographes. Ce sont: 17(' l.Iall
111:0chkil Ibn 'Araja fi mokhta~araïli; 18° Na~m mochkilât er-Risâla; 19'0 glose ·
I~ES . BIOGRAPI-lES DU XO SIÈCLE HÉG. 231

La série des dictionnaires hagiographiques s'ouvre vél'i-


tablement avec celui d'Ibn 'Askar. Son livre n'est pas encore
un répertoire complet comme le seront les recueils de ses
successeurs; mais c'est- le premier qui laisse, à côté des
rapports touffus de manâqib, une petite place à l'histoire
terrestre des pe-rsonnages qu'il étudie. .
L'<luteur s'appelait Aboù 'Abd Allah Mol).ammed ben 'AH
ben 'Omar ben el-ljo~aïn ben Mi~bâl). et était connu' sous le
nOIU d'Ion 'Askar. Il appartenait, paT ses ascendants pater-
nels , à une branche de chorfa idrisites, dont un arrière-
petit-fils du fondateur de Fès, ' Askar ben Khâlid ben " Omar
ben Idris, était l'ancêtre éponyme. La li'lère d'Ibn 'Askar,
'Aïcha bent Al).med, était elle-même de souche idrîsite et
devait acquérir une grande réputation de sainteté (2).
On est assez peu renseigné sur la vie d'Ibn 'Askar, et c'est
dans son livre qu'il faut aller chercher les éléments de sa

ur le $a(d~l d'el-Bokhâri ; 20° el-Matlab el-kollî fi mol),ddathdt el-imdm el-


Qollî; 21° Na:?m mardl),il el-lfijdz; 22° commentail'e du précédent;
23 0 Irchdd el-labîb ild maqdfiid l),adîlh el-f).abîb; 24° Is'df es-sd'ïl . fî lal),ar-
rî'l-maqâtil; 25° Dald'ïl; 26° Kollîyât (questions de droit mâlikile);
270 Orjoûza sur la récitation du Qor'ân.
(1) BIBLlOGRAPIlIE. - El-lfrânî, Nozhat el-f:tâdî, éd. Houaas, p. 76 du texte
et 135 de-la trad.; en-N â~irî, Isliq~â, HI, p. 38; Brockelmann, Arab. litt.,
II, p. 455, n . 1; Basset, Rech. bibl., p. 32, no 85; Codera, Librosprocedentes
de 1I1arruecos, pp. 372-373; T. H. Weir, The shaikhs of Morocco in the X VIth
Century. passim et principalement: pp. XI, XLIV, XLV et 295-296 (cf. le
compte rendu de ce dernier ouvrage par R. Basset,.les Cheikhs du Maroc âu
XVIe siècle, in Melanges africains et orientaux, p. '170 sqq.); Huart, Litt. ar.,
p.384.
La Dawl),at en-nâchir a été lithographiée à Fès, en 1309, à la suite d'el-
Ichrdf, d'ed-Dorr es-sanî et de la Nalîjal et-tal),qîq. Une adaptation en anglais
a été faile par Weil' (cf. supra). Enfin, une traduction française assez
exacte a été donnée, en 1913, par A. Graulle,sous le titre de la « Daouhat
.en-nâchir)) de Ibn ' <Askar, dans le vol. IX des Archives marocaines.
(2) Cf. sur elle, Ibn 'Askar, Daw~wt en-ndchir, pp. 19-23 et Mol:,:tammed
.cl-Mahdî el-Fâsî, Momti' el-asmâ'. pp. 91-92 .


232 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

biographie. Il naquit en 936 (1529-30), dans cette ville de


Chafchâwan, plus connue aujourd'hui s.o us le nom d'ech-
Châwn, qui, encerclée de toutes parts par le massif monta-
gneux nord-marocain, est le seul groupeInent urbain de
l'arrière-pays méditerranéen: elle était déjà la sentinelle
avancée du jihâd contre l'infidèle établi sur la côte proche,
et occupait parmi les grandes villes de l'empire un rang
qu'elle devait perdre au cours des siècles suivants.
Il est certain qu'Ibn <Askar fut élevé dans la haine de l'in·
fidèle; au milieu des bandes toujoursrenouve.Iées des « guer-
riers pour la foi ». Son propre père avait été c~pturé, au
cours d'une incul'sion de mojâhidîn et emmené à Tanger;
il avait subi une assez longue captivité, avant d'être tiré du
silo qui lui servait de prison et relâché (1) .
Après avoir fait quelques études dans sa ville natale, Ibn
. Askar commença bientôt à mener une existence vagabonde.
Il parcourut durant toute son adolescence les principales tri-
bus de la région des Jbâla. Il allait régulièrement au som-
met de la montagne des Beni Ijassân, visiter le savant Ibn
Khajjoù dans son ermitage d'anachorète (2). On le suit,
grâce à son livre, dans ses innombrables déplacements: chez
les Khmâs, en 954 (1547) (3) ; chez les Beni Zal'wâl, où il est
l'élève du saint <Abd el-Wârith el-Ia~loûti (4) ; à Tarzoùt (5),
aupl'ès du chaïkh Aboû'l-Qâsim el-Ijasanî (6); à Tétouan,
où, en 964 (1556-57) , il suit l~s cours du qâçli de cette ville,
Mol}.ammed el-Karasî el-Andalosi (7). Il se mêle à tous les
milieux, couchant Jans les n10squées et parcourant, pendant
le jour, les pénibles sentiers de la montagne. Il fait, entre
temps, en 964, un court séjoUr à Fès (8).
(1 ) Daw/;wt en-nâchir, p. 20.
(2) Ibid., p. 13. Sur ce personnage, cf. supra, p. 227, 11. 1.
(3) Ibid., p. 27. .
(4) Ibid., p. 5. Ce personnage est encore très révéré dans cette tribu. Il
mourut vers 970 (1562). Un de ses descendanls, son homonyme, est égale-
ment révéré à Fès. Cf. el-Kattânî, Salwal el-anfâs, l, p. 222.
(ti) Tribu du RU méridional, au nord des ~anhâja de Gheddo.
(6) Daw"Q,at en-nâchir, p. 17.
(7) Ibid., p. 17.
(8) Ibid., p. 47.


LES BIOGRAPHES DU XC SIÈCLE HÉG. 233

Celte vie errante ne prit fin que lorsque, en 967 (1559-


60), il fut nommé par le sultan :M oulay <Abd Allah el-Ghâlib
billah qâçli et mufti de la ville de Qa$r Kotâma (el-Qsar) el de
la zone côtière avoisinante (t). Sa mère le rejoignit dans
cette ville, à la suite de démêlés qu'Ibn <Askal' eut avec le
qâ'ïd de Chafchawan, :Mol:tal11lnèd ben Rachid; elle y mourut
le 12 dhoû'l-qa 'da 969 (14 juillet 1562) (2). Notre person-
nage fi t ensuite un long voyage. Il alla dans le Tâmesnâ (3) ,
il el-Brija (4) et à :Marrâkech, où il resta six mois et s'adonna
à l'étude du $oûfisme (5). Il se rendit ensuite à Fès, où il
suivit, à la mosquée d'el-Qarawiyin, les cours de Mol).ammed
ben 'Omar el-:M okhtâd (6). En 975 (1567-68), le sultan lui
confia la charge de qâçli de Chafchâwan, de Targha. 0) et de
la tribu des Ghomâr'a, avec résidence dans sa "iUe natale. Il
y resta quelque ten1ps, puis fit un assez court séjour à Zal).
joùka, dans la tribu des Rahoûna, et, enfin, à la suite de
rnauvais traitem ents dont il fut victime, alla avec sa famille
s'installer à Fès, au quarlier d'et-Tara. A la mort du sultan
Moulay <Abd Allah, son successeur Mol).ammed, le futur el-
Masloûkh, le nomma inspecteur des qàçlis (8). Mais, quand
le sultan fut battu par le prétendant Moulay <Abd el-Malik,
ILn <Askar ne voulut pas l'abandonner. Il le suivit, dans la
péninsule ibérique et revint, avec lui, dans les rangs de la
modeste armée musulmane qui allait combattre aux côtés '
des troupes de Dom Sébastien. Comme son maitre et le roi

( J) Dawl),at en-nûchir, p. 2~.


(2) Elle ne figLlre pas dans la lisle des marabout et des maraboules d'el-
Qa~r dressée par Michaux-Bellaire el Salmon, el-Qçar el-Kebir, in Archives
marocaines, JI, '1-228, Pari, 'J904.
(3 ) Dawl),at en-ndchir, p. 63.
(4) Ibid., p. 83. EI-Brîja esll'ancien nom de Mazagan; cf. supra, p.l3l,
n. 3. Le texle arabe porte ~:.~\ ~, et l'on ne comprend pas
comment Graulle a transcrit,p. 19'1 de a Lrad., ce toponyme par« Thahr».
(5) Ibid., p. 68.
(6) Ibid., p. 63.
(7) Bourgade des Ghomâra, signalée par Mouliéras, le Maroc inconnu, U,
p.255.
(8) Dawl),at en-nâchir, pp. 3u et 48.
234 LES , HOMMES ET LES ŒUVRES

portugais, Ibn <Askar perdit la vie à la journée du YVâdi'l-


~1akhâzin (dernier jour de jomâdâ 1 986 - 4 août 1578). On
retrouva son caoavre au rnilieu de ceux des infidèles, couché
sur le côté gauche et tournant le dos à la direction de la
Mekke. Ses coreligionnaires lui jetèrent l'anathème et l'on
rapporte que, plus tard, cherchant à l'excuser de l'erreur où
il se laissa entraîner, un savant, Mol.lammed ben <Abd Allah
el-nabtl, composa les trois vers suivants sur le courtisan
tombé sous les coups des mojâhidîn :
« Parmi eux (les disciples de mon père), figurait le chaïkh dont la
valeur ne saurait être méconnue, Mol;tammed 'Askar, qui eut un sort
funeste;
« Sïl avait commis une faute manifeste, son cœur, cependant, était
pur de tou t scepticisme.
« Je l'ai vu en songe, il avait le visag'e radieux et le corps éclatant
de beauté et de parure (1). »

On le voit par le rapide exposé de sa vie mouvementée,


Ibn 'Askar n'avait pas une physionomie commune. Son
œuvre présente, elle aussi, une forte empreinte d'originalité,
bien qu'elle se réduise à un livre de moyenne étendue: la
Dawlzat en-nâchir li-maf:tâsin man kân bi' l-Maghl'ib min ma-
châ'ïkh el-qarn el- <âcllil'. Comme l'indique le titre, l'auteur
se proposait d'y retracer les mérites des chaïkh qui vécurent
au Maroc pendant le xe siècle de- l'Hégire.
Les personnages qu'Ibn 'Aslear désignait sous cette appel-
lation de chaïkh n'étaient pas tous des savants, mais à tous
était échue quelque parcelle de sainteté. Le ~oûfisme maro-
cain venait, en effet, de prendre une nouvelle forme sous
l'im pulsion d'él-J azoûll, le disciple et le successeur du fa-
meux ech-Châdhili.
A ce titre, Ibn' Askar est le premier historien du III ou ve-
ment jazoûlite au Maroc. Il ne nous appartient pas ici de

(1) La traduction de ces vers est empruntée à iloudas, p. 135 de sa tra-


duction de la Nozhat el-J:tâdî.
LES BIOGRAPHES DU Xe SIÈCLE HÉG.
r ,
235

faire l'exposé de l' évolu tion de cette école , de puis sa. nais-
1

sance et de dire comn1ent, issue elle-mê'm e du , châdhilisme


avec, au sornmet de la chaine spirituelle, le célèbre 'Abel es-
Salâm ben Machîch, elle devait plus tard se scinder en fi-
liales nombreuses. L'obscur problème des confreries reli-
gieuses marocaines est loin d'être éclairci et son étude
exigerait de longues et patientes confronta~iolls de, textes
suivis et de documents d'archives. C'est parce que ces con-
fréries ont joué un 'grand rôle dans la vie intellectuelle et
politique du :Maroc, parce que jazoûlisme et qâdirisme ont
eu tour à tour, pendant les derniers siècles, une sorte d'om-
nipotence sur le pays, parce que les sultans chorfa se sont
appuyés sur le preluier pour parer à toute t entative de res-
tauration idrisite ou wattàsite, que les auteurs musulmans qui
leur ont consacré des ouvrages sont en même temps des
historiens. N:ous ne les considérerons que comme tels ici,
sans vouloir juger de leur v.aleur et de l'intérêt que présen-
tent leurs œuvres par rapport à la mystique marocaine, fille
du 1?oûfisn1e oriental.
Or- et c'est là le principal mérite d 'Ibn ' Aslear-lamono-
graphie jazoûlite qu'est avant tout la DawJ:ta présente un
aspect singulièrement vivant. On s'en rend compte à la lec-
ture de l'œuvre, plus encore à celle de l'adaptation de
T. H. 'iVeir, qui a éliminé du livre arabe la plupart des dé-
veloppements mystiques et brossé, d'a près lui, un tableau
anecdotique de la vie religieuse du Maroc au XVIe siècle.
La DawJ:tat en-nâclzir devait primitivement constituer la
fahrasa des maîtres de l'auteur. Il y ajouta, dit-il, les -chaïkh
qui vécurent au :M aghrib au xe siècle de l'Hégire, et
sur lesquels il possédait des renseignements dignes de foi.
Ibn lAslear donne ainsi à son œuvre un cadre chronologique
bien limité; indépendalument de ce cadre du XC siècle,
il semble qu'il ait procédé à une sorte de classement géo-
graphique en commençant par la région du Maroc qui est,
à ses yeux, la pl.us riche en saints: le Djebel, où naquirent
ech-Châdhili et lAbd es·Salâm ben lVlachich; cette région,
Ibn 'Aslear la connaît d'ailleurs mieux qu'aucune autre; c'est
s a véritable patrie, dans le Maroc si morcelé.
236 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

L'histoire polilique proprement dite ne tient pas une très


large place dans ]a Dawbaten-nâchir. Tout au plus peut-on,
çà et là, y relever quelques détails qui selnblent avoir
échappé à la plume de l'hagiographe (1). On dirait même
qu'Ibn <Askar se fait un malin plaisir de ne parler des pre-
miers sultans sa'diens, dont il est le . contemporain, que
pour signaler leurs défauts et collectionner les traits inlper-
tinents que leur décochent les illuminés. On sent qu'a u mo-
ment où il écrit, l'autorité de la maison sa'dienne n'est
pas encore solidenlent établie; parfois, la Dawba ne la
ménage pas et prend une allure de diatribe, surtout à
l'encontre d 'A boù 'Abd Allah :Mal)ammed ech-Chaïkh, qu'Ibn
'Askar montee, à plusieurs reprises, « persécutant les
zàwiyya (2) ».
Les indications hi:-;toriques que pourrait fournir Ibn 'As-
kar n'aul'aient d'ailleurs qu ' une valeur relative: il n'est pas,
en e(fet, d'écrivain marocain, chroniqueur ou hiogeaphe, qui
fasse plus que lui preuve d'impeécision. L'exactitude topo-
gl'allhique n'est pas sa qualité maltresse : à Tétouan, où il a
pou rlant vécu assez longtemps, il rencontre un personnage
à la porte d'une mosquée qui se troupe à l'est. N'aurait-il pas
été plus simple d'en rappeler le nom ? (3) De même, il n'a
pas le moindre souci de précision chronologique et, date la
mort de ses personnages à dix années près, en ne donnant
d'autre indication que celle de la décade du siècle. Il le re-
connait lui-même, incidemment, avant d'arri\'er à la fin de
son livre: «( Je dis dans chaque notice que le personnage
auq uel elle a trait est mort en telle décade; je ne dis ni
l'année ni le mois, car il est impossible de fixer de façon
èertaine le JOUl', le mois et l'année, et parce que, d'autre
pa'r t cela n'offl'e aucun intél'êt et que personne n'yen at-

(f ) C'est ainsi qu'il nOlIs apprend, p. 69, que le sultan )iloulay 'Abd
Allah el-Ghâlib billah envoya, en 980 {1572-1573), une ambassade au sul-
Lan de Turquie. A propos d'un mufti de Marràkech, p. 77, il relaLe briève-
menL la mort du s ulLan Mal:tamn'led ech-Chaïkh qui fut assassiné près du
Jabal Deren, à AthlâLhil, sur la route de Târoûdânt.
(2 ) Daw~wt en-ndchir, p. 64.
(3 ) ibid., p. 35.
LES BIOGRAPHES DU Xe SIÈCLE HÉG. 237

tache (1). » Tel ne fut pas, pourtant, ravis de tous ses suc-
cesseurs.
Ibn 'Askar dit, dans un passage de la Dawf;a, qu'il écrivit
son livre au milieu de la neu vième décade du xe siècle, soi t
vers 985, l'année qui précéda sa mort tragique (2). Il était
alol's à Fès. Nous ne savons pas comment le dictionnaire fut
accueilli; malgeé l'aventure de son auteur à la bataille des
Trois Rois, il semble avoir toujours joui au Maroc d'une
certaine eslinle. IlIa mérite, d'ailleurs, dans l'ensemble. Ce
petit livre est simple et n'a pas beaucoup de prétentions:
c'est une collection de célébrités passagères dont la
renommée n'a guère dépassé le XVIe siècle. L'auteur l 'a
écrit dans un but évident de piété, avec une entière sincé-
r'té et la bonne foi d'un . témoin oculaire. Lui-même s'y
Jonne l'aspect d'un ascète convaincu, et, à force de l'en-
tendre raconter des miracles auxquels il prétend avoir as-
sisté, on se demande pourquoi l'un des personnages surna-
turels dont il célèbre le pou voit' ne le préserva pas du démon
malfaisant qui allait bientôt l'entraîner vers une mort si peu
orthodoxe (:3).

('1) Daw~wt en-nâchir, p. 9'1 : e,S;j' ~\ ...\.:>\J J,) ~j' j (.$~; J


~\ ,..w fi..::J\ ~ ':J j U\ ~ Ji\ ~ ~)UJ\ ~J\ '-!;
~_.J\ .AA! J ~b:. ':J \,..w
j U\ J J~~ ,-,~\ j:::':'!
(2 ) Ibid., p. 68.
(3) Voici la traduction des principaux passages du jugement de Weil'
sur Lbn 'Askar :
P. XI: « Ibn 'Askar est un Boswell marocain ou un Jocelin de Brake-
lond (sic ), crédule et consciencieux et n'hé Hant pas à eJ alter ses h éro
à ses propres dépens ».
P. XLV: « Pour ce qui est de la bonne foi des récits d'Ibn 'Askar, on ne
peul mettre en :doule la conscience dont l'auteur a fait preuve. 11 écrit
en toule sincérité et, quand il a des doules sur l'importance de l ' un de
ses personnages, il suspend son jugement. Quand il est incertain ou igno-
rant d'un fait ou d'une date, il ne craint pa de le dire. »
238 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

BIOGRAPHES DU XI è SIÈCLE DE L'nÉGInE (1592-1689 J.-c.)

'Abd el- Wâ~lÏd es-Sijilmâsî (1).

Ce personnage était un chérif 1).asanl du Tàfilelt et appar-


tenait à la famille des futurs sultans 'ala-wites. Son nom
complet était 'Abd el- Wâ1).id ben A1).med ben Mo1).ammed el-
I:Iasanî el-<Alawi es-Sijilmâsî. Il fut, à son époque, le plus
grand traditionniste du Maroc. D'abord secrétaire du vizir
sa <dien AboLI 'Abd AUah l\101).ammed ben 'Abd el-Qâdir ben
MaÎ).ammed ech-Chaïkh, il ne tarda pas à se consacrer à
l'enseignement, à Marl'âkech, dans la mosquée des Chorfa,
il Y fut, en même temps, prédicateur et mufti. Il fit _une
partie de ses études à Fès; -il suivit les cours de Riçlwân el-
Janwl (2) et d'el-Manjoûr et reçut d'Orient des ijâza,
principalement d'el-'Alqamî (3) et d'el-Flchi (4). Il accorda
lui-même une licence à l'historien Ibn e!-Qâçli. Il se mêla
au cénacle littéraire du sultan el-l\1an~oùr et y fit remarquer
son habileté de poète.
Il' a donné la liste détaillée de tous ses maUres dans sa
fah/'asa qu'ilintitula el-llmârn bi-ba'<l man,laqtloh n'tin 'olamâ'
el-islâm . . Il mourut à Marrâkech le jeudi 25 rajab 1003
(5 avril 1595) et fut enterré dans, cette ville: a,uprès du mau-
solée du "qâçli 'Iyyàçl (5) .

(1) BlBLIOGnAPIllE, - Ibn el-Qùçll, Jaclhwat el-iq libds, p. 27:0; Mol;lammed


cl- 'Arbi el-Fâs l, Mir'dt el-ma~îdsin, p, '1 86; el-Tfrrlltl, $aj'wat man intachar,
pp . .1,1-12; el-Qàdiri, Nachr el-mathdnî, 1, p. 14; llliq ât ed-dorar, fol. 2 v o ;
Jbn el-MowaqqiL, es-Sa'cidat el-abadlyya, l, p. 7;5;, Ben Chcneb, Idj âza,
~ 313.
(~) Sur; c.e per om cre.. cf. infra. p. 255, n. 2.
(3) Cf. supra, p. 1O~, n. 5. .
. (1.) '[o1).ammcd b cn ~1ol;lammed Mo1).ibb cd-din el-Fichî, jurisconsulte
Jllù1ikile du Qaire. né en 917 (15 U). Cf. Al:) med Bàbâ, Naïl el-ibtihâj,
, p. 370; Ben Cheneb, ldjâza, § 78.
(5) Il est également l 'a uteur d'une glose sur l e commenlaire d'el-J1o-
râdî ur l'Alfîyya d'Lbn 1ùlik, d'un commenlaire sur la m,aq$oûra d'el-
~lakkoûdî et de plusieurs qa$îda en l'honneur d 'Aboù'l-'Abbâs el-Man~oûr.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE nÉG. 239

e~ - ~awma <ï et- Tâdilî (1),

L'auteur du Tachawwoûj avait consacré une longue notice


au saint Aboû Ia<~â ou Aboû Ia'azzâ (2), ' connu aujourd'hui
sous le nom de Moulay Boû<azza, qui mourut en 572 (1177)
et fut enterré à Taghiâ, à mi-chemin entre Rabat et la qat?ba
de Tâdlâ. La ,renommée miraculeuse de ce personnage alla
en grandissant au XVIe siècle. Léon l'Africain lui-m ême en
rapporta l'écho dans sa description de l'Afrique et utilisa la
notice d'Ibn ez-Zayyât (3) . Un autre écrivain de la région du
Tâdlâ composa un livre tout entier sur les m. anâqib du saint:
le Kitâb el-mo<zâ jî manâqib Abî la< zâ (4 ).
Aboù'l-<Abbâs Al).Jned ben Aboû'l-Qâsim ben Mol-J:ammed
ben Sâlim ben <Abd el-<Azîz ech-Cho<abî el-Harawî e~-$aw­
ma<ï et-Tâdilî naquit vers 920 (1514), fit de fortes études
musulmanes et se plongea bientôt dans la doctrine 1?oûfiqlle.
Il fonda dans son village d'et?-$awma' a une zâwîyya ; llli-
même finit par acquérir une grande réputation de sainteté.

(1 ) BIBLIOGRAPHIE. - El-lo"Û,si, el-M o~Lâq,arât, p. 1.04; el-Qâdirî , Nachr el-ma-


thâni, J, p. 84 sqq.; Iltiqât ed-dorar, fol. 4 VO ; R. Basset, Rech. bibl., p. 20,
nO 48.
(2) Sur ce saint, dont le vrai nom était Ialannoùr ben Maïmoûn, cf.,. en
pl us du Mo'zâ, Ibn el-Qâçlî, Jadhwat el-iqtibâs, p. 354 ~ Mol!ammed cl-
'Arbt el-Fâsl, Mir'ât el-ma~âsin, p. ,199; 'el-JoûsÎ, el-AlolfâcJ,arât, p.117 ct sur-
tout el-KatLànî, Salwat el-anfâs, l, p. 172 sqq.
(3) Léon dit, en effet (p . 30 du tome H de l'édilion Schefer): « ct y a,
entre autres choses, le sepulcre d'un sainct qui (vivant du temps d'Hab-
dull\~umen,' pontife) a montré de [grands miracles e~vers les lyons, avec
cc qu'il avoit l e don de deviner; tellement qu'un docteur appellé Ett.edle
a diligemment reduit sa vie par ecrit, racontant parliculicremenl d'un à
autre les miracles qu'on estime que ce sainct avoit fait. » -CL Massignon,
le Maroc dans les premières années du XVIe siècle, p. 37. n semble, d'après
le texte même, que Léon fasse allusion au Kitdb el-mo<zâ; mais comme ce
dernier ouvrage a été écrit en 1592, il n'a Vu être utilisé par Léon, mort
avant 151)0, et il faut concl~re que le passage cÜé plus haut rappelle
la longue notice du 'Tachàwwoû[, écrite, elle aussi,' par un « ,E Üedle ).
(4) Il en existe un eX,e mplaire' manuscrit à' la bibpothè\~u~ d~ Rabat,
sous lC(tn o 387. ' '\
240 LES nOMMES ET LES ŒUVHES

Quand le sultan el-Man~oûr monta sur le trône, il le fit ap-


peler à Marrâkech et le chargea de faire des cours dans la
mosquée d'el-Kotobiyin. E~-$awma<ï, qui avait confié la
garde de sa zâwiyya à l'un de ses fils, délivra alors de nom -
breuses licences, nQtamment au célèbre el-~laqqari, et écriy·it
plus de soixante ouvrages (1). Il rassembla l'une des plus
belles bibliothèques existant alors au Maroc. Sur la fin de
sa vie, il retourna dans son village, où ·il mourut dans les
premiers jours de rabr 1 1013 (fin juillet 1604).
Le Mo' zâ avait été terminé treize ans aup'aravant, le
9 chawwâl de l'an 1000 (19 juillet 1592). Il se compose de
sept chapitres d'étendue inégale consacrés à la généalogie
d'Aboû la <zâ, à sa vie, à ses manâqib et à ses disciples. Il
a servi de source à quelques biographes postérieurs, comme
el-Ifrâni et el-Kattâni (2).

Les premiers Fâsîyîn.

Ibn <Askar semble .avoir délibérément écarté de sa liste


des personnages marquants de la secte jazoûlite l'un des plus
illustres d'entre eux, Aboû'l-Ma}:lâsin loûsof el-Fâsî (3) . Il
est probable que c'est à une question d'inimitié person-
nelle qu'est due cette omission volontaire.
Aboû'l-Ma}:lâsin loûsof ben Mo}:lammed ben Ioûsof el-Fihri
el-Andalosi el-Qa!?ri el-Fâsî (4) fut en effet un grand mys-

(t) On en trouvera une liste partielle dans le Nachr eL-mathânî d'el-Qà-


dirÎ, l, pp. 86-87.
(2) Cf. $afwat man intachar, p. 2~8, et Salwat el-anfâs, III, p. 359.
(3) Graulle, dans sa traduction de la Dawf),at en-nâchir (Arch. mar., XIX,
p. 254 sqq.), en a fait judicieusement la remarque.
(4) BlBLlOGRAPIHE. - MoJ:lammed el-Arbî el-Fâsî, Mir'ât el-ma~l,dsin (toute
la première partie) ; Mo1).ammedel-Mahdîel-Fâsî, Momti< el-asmd\ pp. 132-
141; le même, el-Jawâhir eij-ijâfîyya min el-maf),âsin el-ioûsofîyya, ms. 407
(5) de la bibliothèque de Rabat; el-Jfrânî, $afwat man inlachar, p. 27 ;
Jbn <Alchoûn ech-Charrât, er-Rawej el-<dtir el-anfâs, fol. 25 VO sqq. ; el-Qâ-
dirî, Nachr el-malhânî, l, p. 89; Iltiqât ed-dorar, . fol. 4 vO; el-Mol:übbi,
Kholâijat el-âthar, IV, p. 507; el-Kattânî, Salwat el-anfâs, Il, p. 306 sqq.;
el-FoçlaïU, ed-Dorar el-bahîyya, H, p. 263; Ben Cheneb, Idjdza, § 19 bis.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 241

tique et un savant réputé; personne, dans le pays, n'a inspiré


autant d'études spéciales. C'est rancêtre d'une des plus
notables et des plus influentes familles de Fès, qui a fourni
au Maroc, depuis le XVIe siècle, un grand nombre de sa-
"ants, de rnagistrats et d'hom.mes politiques.
Ahoû'I-Ma1}àsin était d'origine andalouse. Ses ancêtres
appaetenaient à la famille des Banoû'l-J add, descendant
elle-même des Banoû Fihr. Vers 880 (1475-76), ils avaient
quitté la ville de :M alaga qu'ils habitaient et étaient venus
s'installer à Fès. Le grand-père d'Aboû'l-Mal;âsin, Aboû'l-
f:Ia.jjâj Ioûsof (1), quitta cette ville sept ans plus tard, car la·
peste y sévissai t, et alla s 'installer à el-Qa$r el-Kabir pour
faire du commerce. C'est à ce nloment qu'on lui donna l'eth-
nique d'el-Fâsi. La ville d'el-Qa$1> était alors un centre
d'échange important - l'auteur d e la Mil"ât el-ma1:zâsin en fait
lui-m ême la remarque (2) - à cause de sa situation de ville
hontière du :M aroc musulman et de sa proximité des éta-
blissenlents chrétiens de la côte. C'est là qu'Aboû'l-Mal;âsin
naquit en 938 (1530 -31 ). Il alla bientôt s'initier à Fès à la
science islâmique et finit par s'y installer définitivement, à
. partir de 988 (1580). Il fonda à ce moment, dans la capitale,
la fameuse zà\viyya dite des Fâsiyin (3). Il mourut l e
18 rabr 1 1013 (14 août 1604) et fut enterré dans le cIme-
tière qui s'étend à l'extérieur de Bâb el-Fotoûl;. Il avait,
en 986 (1578), combattu dans les rangs musulmans, à la ba-
taille du Wâdî'I-l\Iakhâzin (4) .
A sa mort, Aboû'l-·Mal;âsin laissait trois fils (5). L'un

(1) Aboû'l-Ijajjâj Ioûsof ben <Abd er-Ral;l.mân ben Aboû Bakr el-Fâsî,
mort vers 920 (1514). Sur cc personnage et les origines de la famille, cf.
principalement Mol;tammed eVArbî el-Fâsî, Mir'ât el-malJ,âiiin, pp. 142-
147.
(2) P. 142, in fine.
(3) Cette zâwiyya, appelée du nom de Sidi <Abd el-Qâdîr el-Fâsî qui y
est enterré, se trouve au quartier d'el-Qalqâlîyîn, près de Râs el-Janàn, au
sud de la Ville-Vieille. Cf. le plan d'Orthlieb, x.
(4) Cf. notamment el-Ifrânî, Nozhat el-l),âdî, éd. Houdas, p. 75 du texte
et 133 dè la trad.
(5) Un quatrième, l'aîné, Aboû <Abd Allah Mal:).ammed, né à el-Qa~r en
959 (1552), très versé dans l'étude du Qor'ân et du droit, était mort à Fès
16
Aboù Bakr (de 1alaga).
1
<,\bd er-Ral}lniÎn ( \'CIIU ,\ Fès, i- 887.)
1
Aboù'l-l::Iajjàj Ioù suf' (u'el-Qai? r), morl vers 920.
1
1
Mal)ammed, t 974.
1
1
1
Al,l.med, t 987.
1 1
Mol)ammed el-Akbar. 1 Al)med.
Mol)ammed es-A~gha r. 1
Anoû·L-MAJ.IÂSIN IoûsoF, t 1013. 1
<Abd er-Ral.lmân, t 1036.
1 1 1
Mal)ammed, t 998. A/:lmed, t 1021. 1
< Ali, t 1030. 1
1
1 Mohammed el-<Arbî, t 1052.
1 . 1
Mal)ammed, Aboû
1
. Asrîyya.
1
Al)med, <Abd
1.
eI-<Azlz, 1 1
t 1084. <Ann EL-QÀDIR, <Abd es-Salâm. 1 ! 1
1 t 1062. t 1089. t 1091. <Abd eI-vVahhâb, loûsof, Mol)ammed,
1
Aboû'l-Qâsim. 1 1
loûsof.
Mohammed el-.lfahdî,
1
1
t1079. . t 1089. t1129.
1 1 . t 1109.
1 Mal)ammed. <Omar.
1
el-JîIânî. Mol)ammed Tàhir. 1 1 1
Mal)ammed, <Abd er-Rahmân, <Abd es-Salâm. 1
1 1 t 1116. t 1096.- <Abd Allah, t 1146.
1 1 1
1
1 1 1 1 MO~lammed,
<Abd el- el-Mahdi. 1 1 1 1 1
Mal)ammed, el-Mahdi. Ahmed, Mohammed Aboû Jlahammed,
t -1134. t 1214. <Omar, t 1188. Mol)ammed,
1
Majîd. 1
t 1177 t' J 164. et- Tayyîb, Madian, -j- 1191.
1 1
EI-<Arbi. el-mânî. 1 ·UU, t 1089.
1
+
1
Ahmed.
1.
el-MahdI, 1
1 1
10ùsof. 1
• 1 t 1288. Mohammed Mahammed, Mohammed Aboù 1
1 el-QâsiÏp, t 1164. t -1179. Aboû Jîda, t 1188.
<Abd es-Salâm. <Abd er-Ral)màn, Madian, t 1181.
-!- 1281. 1
t 1213. <Abd el- Wâ~id,
1
1
1
1 1
t 1213. Mohammed 1 Ahmed, <Abd el-Qâdir,
<Abd el-Hâfiz f 119i. t 1:H3.
1 et-TayyîIJ, l' -
<Abd el-Qâdir, t 1213. el-Majdhoùb,
t 1266. t 1260.
1
<Abd el-Kabîr, t 1296.
Fâsîyîn.
(Les noms des b
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 243

d'eux, Aboû'I-I:Iasan <AH, n'acquit pas grande réputation et


mOUl'ut à el-Qa~r le 6 jomâdâ 1 1030 (29 mars 1621) (1). Les
deux autres, au contraire, comptent parmi les célébrités ma-
rocaines : ils consacrèrent chacun un ouvrage à leur père.
Le premier, Aboû'l-<Abbâs A1).med (2), était né à el-Qa~r
le 6 dhoû'I-1).ijja 971 (16 juillet 15(4). Il se révéla bientôt
comme un traditionniste de grande valeur; servi par une
mémoire prodigieuse, il sut très jeune par cœur tout le
Qor'ân et bientôt les deux $al;tl; d'el-Bokhârî et de Moslim,
ce qui lui valut le surnon1 d'el-I:Iâfi~. Après avoir commencé
ses études dans sa ville natale, il alla, avec son oncle pater-
nel, les achever à Fès: il y fut l'élève des grands docteurs
de l'époque, Aboû <Abd Allah Mo1).ammed ez-Ziyyâti (3), el-
Manj oûr, la1).iâ es-Sarrâj, le qâQ.î el-f:Iomaïdi (4), Aboû'l-
Qâsim Ibn Soûda (5), il reçut vers la fin de sa vie une ijâza

en 998 (1590) et avait été enterré au quartier d'el-Kaghghâçlîn. Cf. Mol}.am-


med el-<Arbî el-Fâsî, Mir' ât el-mal),âsin, p. 150, et el-Kattànî, Salwat el-an-
Jâs, Il, p. 87.
(1) Né à el-Qa~r en mi-cha<bân 960 (fin juillet 1553). Cf. Mol~ammed
eVArbî el-Fâsi, Mir'ât el-mal),âsin, p. 151; el-Qâdir:î, Nachr el-mathânî, l,
p. 139; Iltiqât ed-dorar. fol. 10 rO.
(2) BIBLIOGRAPHIE. - Mol).ammedel-<Arbî el-Fâsî, Mir'âl el-mal),âsin, p.151
sqq. ; el-Ifrânî, $afwat man intachar, p . .4,5; el-Qâdirî, Nachr el-mathânî,
l, p. H 1; Iltiqât ed-dorar, fol. 6 vO ; el-KaUânî, Salwat el-anJâs, II, p. 321;
el-Foçlaïli, ed-Dorar el-bahîyya, Il, p. 276; Ben Cheneb, Idjâza, § 63.
(3) Aboû <Abd Allah Mol}.ammed ben Ioùsof el-<Abd el-Wâdi ez-Ziyyâtî,
grammairien de Fès, mort à Kànoû, au Soudan, en 992 (158~-). Cf. MoQ.am-
med eVArbî el-Fâsî, Mir'ât el-mal),âsin, p. 165; el-Qâdirî, Nachr el-:nathânî,
1, p. 26; Ben Cheneb, Idjâza, § t 96.
(4) Aboû Mol).ammed (Abd el-Wâl}.id ben Al).med el-J:Iomaïdî, juriscon-
sulte et grand qâgÎ de Fès, mort en 1003 ( 1595). Cf. el-Ifrânî, Nozhat el-
I),ddî, passim; $afwat man intachar, p. 96; el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, l,
p. 27; Iltiqât ed-dorar, fol. 2 vO; el-Kaltânî, Salwat el-anfâs, JI, p. 60; Ben
Chcneb, Idjâza, § 249. La notice consacrée (au dire d'el-KaUânî) à ce per-
sonnage par Ibn el-Qâçli ne se trouve pas dans l'édition de Fès de la Jadh-
wat el-iqtibâs.
(5) Aboû'l-Qâsim ben Qâ~im Ibn Soùda el-Morri, jurisconsulte de Fès,
ful sùccessivement qâgi de Taza, de Marrâkech et de Fès et mourut le
-25 chawwàl 1004 (22 juin 1596). Cf. el-Ifrânî, $aj'wat man intachar, p. iOO ;
el-Qâdiri, Nachr el-mathânî, l, p. 34; Iltiqât ed-dorar, fol. 3 rO; el-Kattânt,
Salwat el-anJâs, II, p. 61.
244 LES I~OMMES ET LES ŒUVRES

du chalkh el-Qa!?!?âr. Enfin, son père Aboû'l-Mal)âsin l 'iniLia


au !?üùfisme. Il fut toute sa vie d'une rigoureuse piété. Il
alla visiter à ed-Dilâ' le ma~about Mal}.anlmed ben Ahoû
Bakr, dont le renonl allait croissant au Maroc (1) . Quand le
su ltan ech-Chaïkh ben el-:Nlan!?oûr céda, en 1019 (1610) , la
ville de Larache aux Espagnols, Al}.med el-Fâsl fut, comme
les autres uléma de Fès, invité à participer à la consullation
juridique demandée par le prince afin de justifier son gesLe.
Il préféra quittel' définitivement la capitale, afin de ne pas
se déshonorer (2), et alla, "avec sa famille, se réfugier da fi S
la région d' el-Qa!?f, s ur la luontagne d' Aboû Ziri (3) . Il
mOUl'ut à cet endroit, le mercredi 21 rabr II 1021 (21 JUIn
1612), et y fut enterré.
On a conservé les titres de plusieurs ouvrages d'AI)rned
el-Fâsl (4) ; son frère l\Iol}.ammed el- <Arbi en donne la liste
dans la longue notice qu'il lui consacre. Mais on n'y voit pas
figurer un opuscule que le savant avait compose SUl' son
pèl'e et intitulé el-lJlina!; e$-$âftyya ft'l-asânîd el-ioùsoflyya.
L'original de ce travail se trouve dans une bibliothèque
particulière de Fès; c'est une biographie d'Aboû'l-:Nlal}.âsin et
une liste des autorités sur lesquelles ce dernier s'appuyait en
matière de !?oûfisme. Il est curieux que ce livre ait semblé
inconnu même aux membres de la famille des Fâsiyin, qui
ne le mentionnent jaluais; il a pourtant servi de source à
l'auteur de la Salwat el-anfâs, qui l'attribue bien à Al}.lued
el- Fâsl (5).
Le dernier des fils de Ioûsof el-Fâsî, Aboû <Abd \.113h et

(1) Cf. el-Ifrânî, Nozhat el-lfâdî, éd. Houdas, p. 271 du lexte et 461 de
la traduction.
(2 ) Ibid., p. 199 du texte et 322 de la traduction.
(3) Dans la tribu des Ma~moûda, à l'endroit même où avait vécu le fa-
meux <Abd er-B.al).mân el-Majdhoùb, mort le siècle précédent.
(4) Il composa, entre aulres ouvrages, un commentaire de la Râ'ïyat es-
soloûk d'ech-Charîchî ; un commentaire de la <Omdat el-ahkâm de <Abd el-
Ghanî Ibn Soroùr; une glose sut le comme~1taire de la' f?oghrâ d'es-Sa-
noûsî; une glose sur le f?alfîl), de Moslim et un ouvrage intitulé ed-Dorar
el-~isân (î'l-kalâm <alâ laïlat en-nifij m.in cha<bân.
(5) T. Ill, p. 360, ligne 11.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 245

Aboù I:Jâmid lVlol).ammed el-'Arbî (1), né à Fès le 6 chawwâl


988 (14 novembre 1580). s'adonna également à l'étude pen-
dant toute sa vie. Il eut de nombreux maitres dont il a
laissé la liste: ce furent, entre autres, son père, son frère
Abmed, son oncle paternel el-tArif el-Fâsî (2), el-Qai?i?âr,
Aboû't-Tayyîb ez-Ziyyàtî (3), Al).med ez-Ziyyâtî (4), le qâçlî
el-I:Jomaïdî, lal).iâ es-Sal'râj, 'Ali Ibn 'Imrân (5) etAboù 'Abd
Allah el-Marîyyî (6). Il fu~ à la fois jurisconsulte, littér'ateur
et poète; il eut de nombreux é lèves, en plus ùe .ses quatre
·fils et de son neveu 'Abd el-Qâdil' el-Fâsî. Il sui vit dans sa
fuite son frère ainé, lors de la cession de Larache, puis
voyagea dans tout le lVlaroc et finit par aller s'installer à

(1) BIBLIOGRAPHIE. - Sa Mir'dl el-malfâsin, pp. '159 et 205 sqq.; el-Joùsî,


el-Molfdrj,arât, p. 59; el-lfrànî, fiafwat man intachar, p. 71 ; el-Qâdirî, Nachr
el-mathdnî, 1, p. 1.80; llliqdt ed-dora!', fol. 16 vO; el-Katlànî, Salwat el-an-
fds, lI, p. 313; ed-Fo<;laïlî, ed-Dorar el-bahîyya, II, p. 279; Brockelmann,
Ar. litl., H, p. 460; Basset, Rech. bibl., p. 25, nO 62; Ben Cheneb , ldjâza,
§ 65.
(2) Aboû Zaid 'Abd er-Ha:Q.mân ben Mo:Q.ammed ben loûsof el-Fihrî el-
Fàsî, frère d'Aboû'I-Ma:Q.âsin, mort en 1036 ('1626). Cf. Mo:Q.ammed el-
'Arbi el-FàsÎ, Mir'dl el-maQ-dsin, p. -147; Molfammed el-Mahdi el-b'àsl,
MomtL' el-asmâ', p. 158; el-lfrùnî, fiafwal man intachar, p. 31; el-Qùdirî,
Nachr el-mathânî, T, p. 150; llliqât ed-dorar, fol. 11 vO; el-} atlânî, Salwat
el-anfds, n, p. 302; Ben Cheneb, Idjâza, § 18.
\3) Aboû'Ffayyîb el-~[asan ben loûsof el-'Abd el-Wàdî ez-Ziyyùli, sa-
vant marocain, gendre d'Aboû'l-Malfàsin, mort en 1.023 (16'14 ). Cf. i\Iolfam-
med cl- 'Arbî el-Fàs.L, lIlir' ât el-malfdsin, p. 164; el-Ifrànî, fiafwal man inta-
char, p. 81 ; el-Qâdirî, Nachr el-malhânî, l, p. 125 ; lltiqdt ed-dorar, fol. 7
vo.
(4) Aboù'l-'Abbâs Alfmed, frère du précédent, grammairien, mort en
1003 (1594-1595) à Tétouan. Cf. Molfammcd el-'Arbi el-Fâsî, Mir'dt el-ma-
Ifâsin, p. 227 ; el-Qàd irî, Nachr el-mathdnî, J, p. 25; Illiqdt ed-dorar, fol. 2
v O; Ben Cheneb, Idjâza, § 195.
(5) Aboû'I-I;Iasan 'Ali ben 'Abd er-RaLfmàn ben Al:).med ben 'Imrùn es-
Salâsî el-Fâsî, grand qâ<;lî de Fès, arrêté sur l'ordre du sultan Moulay
Zaïdân, mourut empoisonné le 1 e r rabi' 1 de 1.018 (4 juin '1609). Cf. el-
Ifrâni, fiafwat man intachar, p. 137 ; Nozhat el-lfddî, éd. Houdas, p. 241 du
texte et 400 de la trad.; el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, l, p. 104; Illiqât ed-
dorar, fol. 5 vo; el-KaUânî, Salwat el-anfds, UI, p. 31'2.
(6) AbOlI 'Abd Allah Mo:Q.ammed ben 'Ali el-Marîyyî (d'Alméria), mort
en 10'18 (1609). Cf. el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, l, p. 105 ; Iltiq ât ed-dorar,
fol. 5 vo.
246 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Tétouan, où il mourut bientôt, le 14 rabr II 1052 (12 juillet


1642). Deux ans plus tard, il fut exhumé, tl'ansporté à Fès
et enterré auprès du tombeau de son père, dans le cinletière
de Bâb el-Foloûl). Il composa plusieurs ouvrages (1) ; il en
laissa d'autres inachevés à sa mort (2). Il avait principale-
ment entrepris d'écrire un important travail sur sa famille,
surtout"sur son pèl'e, ses maitres et ses disciples: c'est la
l}Iir'ât el-nutl;âsin min alchbâr ech-chaïlch Abî' l- l}lal;âsin (3),
Ce livre, tel qu'il nous est parvenu, comprend trois parties
distinctes : la première tl'aite spécialement d' Ioûsof el-
Fàsi; la seconde, de ses parents, ascendants et descendants;
la troisième, des compagnons du chaïkh.
Mol)ammed el-' Arbi el-Fâsl commence donc à rapporter
d'une manière détaillée les événements qui "n1arq uèrent la vie
de son père, avant de passer aux autres personnages. Mais,
dès le début, la illlr'a apparait. comme une riche collection
biographique. On y voit évoluel', autour du fondateur de,la
nou velle zâwiyya jazoûlite, tou te une série de savants
occupés à leurs travaux de science islâmique et de ~oûfisme,
on voyageant dans le pays et en Orient à la recherche de
connaissances nouvelles. Le :M aroc des Sa<Jiens s'y révèle
assez bien. L'auteul', qlli a eu, comme toute sa famille, dès
la mort d'el-Man~oûr, à souffrir de l'arbitraire des t;ultans, ne
laisse rien ignorer au lecteur de la prépondérante influence
reprise par les confréries religieuses. Il s'ensuit qu'à tout
instant, se~ développements sont parsemés de renseigne-
ments historiques. C'est pourquoi la frIl,.' ât el-mahâsin a été
l 'une des sources essentielles de ,la Nozltat el-I)âdî et des
chronicl ues annuelles d'el-Qâdiri. A côté de la citation tex-

(1) Ce sont: 1° Marâ~id el-mo'lamad fi maqâ~id el-mo'laqad; 2° TalqïT).


el-adhhân bi-lanql'T). el-borhân; 3° et-Tdli' el-mochriq min ofoq el-rnantiq ;
40 poème en imitation de l' Ajorroûmfyya; 5° <Iqd ed-dorar fl' /W?Jn nokhbâl
el-fika.r; 6° commentaire du précédent; 7° poème sur l'égorgement rituel
(dhakdt); 8° commentaire de la Chaqrdtisl'yya; go et-Tâ'lîf fl' a~tkdm el-
lafif; IOonombreU3es poésies de mad~; H° Man?oûma fi alqâb el-f},adîth.
(2) Ains i, en plus de la Mir'âl el-maT).dsl'n, un commentaire de la Bânat
So'âd, du Chifd' et des Dalâ'ïl el-khaïrât.
(3) Get ouvrage a été lithographié à Fès en 13'24.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 247

tuelle du grand /:lizb d'ech-Châdhili (1) et de la prière attri-


buée à <Abd es-Salâm ben Machîch (2 ), ou d'indications sur
la position des mi/:lrâb des mosquées de Fès, on y découvre
une relation assez étendue de la bataille des Trois Rois (3)
et des révoltes qui éclatèrent à Fès au début du XVIIe siècle,
ainsi qu'un essai. d'histoire de la ville d'el-Qa~r el-Kabir.
Il va de soi que la Ali,.' ât el-mahâsin renferme aussi la
fahrasa de ~lo1:lammed el- <Arbi el-Fàsi. Tout ce qu'elle con-
tient en fait une monographie très longue; pourtant, si l'on
en croit les biographes de l'auteur, le texte actuel ne serait
qu'une infime partie de l'ouvrage qu'il avait projeté
d'écrire.
Avec l'opuscule introuvable de son frère, la Mir' ât el-lna-
hâsin de MoJ::tammed el- <Arbi el- Fàsi ouvre la longue série
des monographies que les menlbres de la famille, et mêm e
des lettrés ùe Fès étrangers à elle, allaient consacrer au
fondateur de la zâwlyya chàdhilite de la capitale; parmi
toutes, elle est, à coup sûr, la plus instructive, au moins à
notre point de vue.

Ibn el-Qâ~î biographe ~4) .

On a déjà vu l'intérêt très limité que présente l'histoire


d' el-Man~oûr, el-Montaqâ' l-l7laq-?oûr, écrite par Ibn el-Qâçli.
Les œuvres maitresses de cet auteur sont deux recueils de
biographies, d 'une vale ur infiniment supérieure à celle de
son panégyrique royal: la Dorrat el-hijâl et la Jadhwat el-
iqtibâs (5).

(f) Mir'ât el-mal),âsin, p. 58. Sur cette pri ère d'ech-Châdhilî, cf. Brockel-
mann, Arab. litt., 1, pp. 449, '2 9, 6.
( ~) Ibid., p. 63. Cf. Brockelmann, op. cit., l, p. 440, nO 2f.
(3) Ibid., pp. 82-83. Le récit a été reproduit en partie par el-Q âdirî,
Nachr el-mathânî, l, pp . 176-177.
(4) Sur Ibn el-Qâçlî et son œuvre historique, cf. supra, p. 100, sqq.
(5) Il faut. signaler aussi lroi s opu scule s biographiques de moindre im-
portance, qui sont dus à la plume d'Ibn el-Qâçli. Ce sont: 10 un supplé-
ment jusqu'à la fin du x e siècle de l'Hégire du Charaf eHâlib (wafayât)
248
LES nOMMES ET LES ŒUVRES

La Doo'at el-hUâl ft asmâ' er-rijâl n'est pas un diction


naire de célébrités unirjuement mal'ocaines, mais une série
de biographies d'illustres docteurs de tous les pays d'Islârn.
Dans la pensée d'Ihn el-(.2âçll, l'ouvrage devait formel' la
suite' du grand répertoire d'Ibn Khallikân intitulé Waf{'IJJjât
el-a'lân. Son voyage en Orient lui pernlit de mener à bonne
fin son projet; il put incorporer dans la Doi-ra tous les ren-
seignements qu'il avait pu se procurer au Qaire et peut-être
en Arabie. Il en entreprit la rédaction en rajab 999 (25 aVl'il-
24 mai 1591 ) et y travailla plusieurs années. Encore à l'heure
actuelle, c'est un ouvrage d'une incontestable utilité, et il
serait à souhaiter qu'au nl0ins une édition lithographiée en
fût établie dans les ateliers indigènes de Fès (1). :Mais pour
l'histoire marocaine, aussi bien politjque que littéraire, il
n'offre pas l'intérêt de l'autre, répertoire d'Ibn el-QâQLr qui
est strictement maghrjbin.
En eIfet, la Jadltwat el-iqtibâs ft-man hall min el-a'lâm
madtnat Fâs (2), est, comme l'indique le titre, uniquell1ent
consacrée aux notabilités de la ville de Fès. Ihn el-Qâçii, au
moment où il l'écrivit, était toujours à la cour de Marrâkech.
En dépit des éloges qu'il décernait à la capitale sa' dienne, il
sentait a vec quelque fierté que sa ville natale denleurait le
grand centre de la science islâmique au Maghrib. La Jadhwa
est peut-être un hOlnmage qu'il tint à lui rendre, pendant
Son séjour forcé loin d'elle. Mais Ibn el-Qâçli était trop
courtisan pour ne pas trouver dans cette œuvre un nou-
veau moyen d'attirer sur lui l'attention du Souverain. Les
premièl'es lignes de son introduction rappellent toutes les
obligations qu 'ill ui doit, son rachat de cap tivité, son désir
de lui renouveler encore sa gratitude. Mais il a heureuse-

d'Ibn Qonfoûdh
0
el-Qosantinl, intitulé Laqt el-farâ'ïd min' lofd:?at f},olwi 'l-
fawâ'ïd; 2 un supplémcnl au Raqm el-f},olal de Lisân ed-Din Ibn cl-
0
KhaPb (e n vers) ; 3 safahrasa, qui portait le titre de Râ'ïd eii-iialâf},.
(1) Cf. sur la Dorra, la notice de R. Basset, Rech. bibl., p. 21, n 0 49. Il
en existe un exemplaire manuscrit à la bibliothèque de l'Université
d'Alger, sous le nO 2022; on en trouvera la description ap. R. Bassel, loc.
cil.
(2) La Jadhwat el-iqlibds a été lithographiée à Fès en 1309:
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 249

ment Je bon esprit de ne pas insister. Et il présente son pro-


jet avec clarté: d'abord, esquisser Fhistoire de Fès et rap-
porter ce que la ville a de remarquable; ensuite, donner,
pal' ordre alphabétique, la liste de ses rois et celle de ses
savants, en indiquant pour ces derniers, quelles furent leurs
œuvres, avec les noms de leurs maUres et de leurs disci-
ples. D'autre part, Ibn el-QâQ.l ne veut pas borner son réper-
toire aux seuls personnages nés dans la ville, mais parler
aussi de ceux qui y séjournèrent.
C'est hien là, en effet, en gros ce que contient la Jad/uvat
el-iqtibâs. Elle se divise netlelnent en deux parties : l' une
est l'histoire topographique de Fès, l'autre, le diction-
naire biographique. La première de ces parties pré;" ente
un intérêt extrême; elle renQuvelle et met à jour les
données contenues dans le Raw{l el-qirtâs et l'ouvrage d'el-
Jaznâ'ï (1). Après avoir rar porlé la fondation de Fès par Idrîs,
Ibn el -QâQ.l donne l'explication d e différents termes de la
toponym ie locale, la liste des prédicateurs de la mosquée
d'el-Qarawlyîn jusqu'en 1003 ('l594-95), date à laquelle il écrit
son ouvrage; il fait une description très complète de cette
mosquée à son époque, ainsi que de celle d'el-Andalos. Il
est même regrettable qu'il n'ait pas donné plus d'ampleur à
cette introduction et fourni des détails aussi précis sur les
belles médersas Inérinides de Fès, qui, à son époque, de-
vaient être encore fort bien conservées.
On peut, du dictionnaire proprement dit, dégager encore
deux parties, l ' une, historique, fournie par l'ensemble des
biographies royales, l'autre ayant spécialement trait à l'his-
toire littéraire du :M aroc. Les biographies ,royales sont, en
général, assez étendues; nlais elles ne constituent, à peu de
chose près, qu'une réédition du commentaire de la Dorrat
es-soloûk : portrait physique, liste des vizirs, rapide esquisse
chronologique, d'un côté comme de l'autre. On sent que,
seules, les notices consacrées aux savants sont la préoccupa-

(1) Au témoignage de plusieurs savants marocains, le Janâ zahrat e!-'âs


d'el-Jaznâ'ï aurait été incorporé totalement à la préface de la Jadhwat el-
iqtibâs.
250 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

tion d'Ibn el-Qâçli, et il s'applifrue à dire, d'une manière


concise, l'essentiel sur chacun d'eux. Laissant absolument
de côté la manière anecdotique à laquelle s'était complu Ibn
'Askar, il n'apporte que,des précisions. Et son livre est vrai-
ment le premier tableau d'ensemble du mouvement littéraire
pendant les belles périodes mérinide et sa'dienne; la lec-
ture en est facile et intéressante, d'autant plus qu'il prend
soin de bannir complètement de ses pages toute la termino-
logie :;;oûfiqlle : il se111ble, d'ailleurs, qu'il ait fait peu de cas
des spéculationo:; mystiques si fort en honneur de son temps
au Maroc.

A~med Bâbâ (1).

Avec ses dictionnaires, Al:ll11ed Bâbâ vise un bu t ana-


logue, mais non pas identique à celui d'Ibn el-Qùçli. C'est
un jUl'isconsulte, et c'est des jurisconsultes de l' lslàm qu'il
veut se faire l'historien.
Bien que Soudanais et n'ayant jamais renié son origine
ni sa patrie. A}:tmeJ Bâbâ est revendiqué par les Marocains
comme un écrivain national. Il a eu avec le pays assez d'at-
taches pour qu'il puisse être considéré comme tel. Il se
nommait exactement Aboû'l- 'Abbâs Al,tmed Bâbâ ben A}:tllled
'ben AIJ.med ben 'Omar ben l\101J.ammed Aqît et-Taluoùd el-

(1) I3lBLlOGHAPIIlG. - Lui-mème, Nad el-iblihdj, pp. 18-80; Kifdyal el-mo/J-


lâj , in fine; el-Ifrànî, Nozhat el-/Jâdî, éd. Houdas, pp. 91-98 du texLe et
169-172 de la Lrad.; $afwal man intachar, pp. 52-55; el-Qàdirî, Nac hr el-
mathânî, l, p. Hll ; Iltiqdt ed-dorar, fol. 11 v o-1:2 rD; el-Mol:libbi, Kholâ~at '
el-âlhar, [, p. 170; es-Sa'dî, Td'rfkh es-Soûddn, éd. Boudas, pp. 35,2'18, 't44
du texte et 07,333,314 de la trad.; en-Nà~irî, Istiq~â, III, p. 63; Wüsten-
feId, Die Geschichlschreiber der Amber, pp. '160-261 ; Chcrbonncau, Essai
sur la littérature arabe au Soudan, d'après le Tekmilcl ed-dibadje d'Ahmed
Baba le Tombouctien, in Annuaire de la Société archéologique de la province
de Constantine, 1 8;)4-1855, pp. 3'1-42; le m~me, Notice historique sur A.hmed
Baba, écrivain berbère de Tombouctou, in Revue orientale, 1805 , pp. :'l08-
314; le même, Histoire de la littérature arabe au Soudan, ibid., 1856,
pp. 293-304; Brockeimann, Arab. litt., II, pp. 466-467; Huart, Lill. ar.,
p. 389; H. Basset, Rech. bibl., nO 12, p. '11; Ben Cheneb, Idjâza, § 94; le
même, in Enc. de l'Islâm , l, p. 196.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 251

Masoûfl et était de souche ~anhâjienne. Il naquit au village


d'Arawân, dans la banlieue de Tinboktou, le 21 dhoû'l-
l).ijja 963 (26 octobre 1556) (1). S,a famille, les Aqit, qui
habitait la capitale du Soudan, y occupait un rang considé-
rable. Tous les ancêtres d'A4med BâIJâ furent, aux xv e et
XVIe siècles, soit imàms, soit qâQ,is (2). Lui-même, dès sa
jeunesse, s'adonna à l'étude sous la direction de son père,
de son grand-père et du savant Mobammed Baghio' (3). Il ne
tarda pas à devenir un éminent jurisconsulte mâlikite. Il
avait, pour son époque, une riche bibliolhèque, car elle ne
comprenait pas moins de treize cents ouvrages.
Il est probable que, comlIle ses ancêtres, Al:llued Bâbü
n'aurait pas eu gt'ands rapporls avec le Maroc, s'il n'a"ail
vécu au moment nlême où le sultan Abmed el-Man~oûr en-
treprit la conquête du Soudan., Ün sait que cette granùe opé-
ration m,ilitaire fut couronnée de succès; mais, quand le
gouverneur marocain s'installa à Tinboktou, Abmed Bâba,
ainsi que les autres nlembres de sa famille, ne voulut pas
reconnaître son autorité. Le pâchâ Mabmoùd Zarqoùn rendit
compte de son attitude au souverain, qui, d'abord, ne voulut
pas prendre de mesures contre lui. Mais, deux ans après,
au début de 1002, le sultan, ayant app"is qu'AI:nned Bâbâ
essayait de soulever la population du Soudan, ordonna son
arrestation et son exil avec tous les siens, à Marrâkech.
Cette nouvelle fit gt'and bruit au :M aroc. Abmed Bâbà, en
route, tomba de chameau el se brisa un"f.>ieJ. Les prisonniers,
enchainés, arrivèrent dans la capitale le 1 01' l'ama~ân 1002

(1) Cette date est donnée par el-Ifrânt et el-Mol).ibbi, tandis que le NachJ'
el-mathdnÎ. place la naissance d 'Al).med Bàbà le 21 dhoù'l-Qijja 960 (28 no-
vembre 1553). Les trois biographes prétendent que ce jour était un di-
manche et que le savant naquit pendant la nuit qui précéda. Cela est in-
exaçt, car, si l'on en croit les Vergleichangs-Tabellen de vYüstenfeld, le
28 novembre 1553 fut un mardi et le 26 octobre 1556, un lundi.
(2) Leurs biographies sont données par Al:).med Bàbà dans le Nad el-ib-
lihdj et la Kifdyal el-mol),tâj.
(3) MO~lammed ben Mol:).ammed el-Tinboktî, connu sous le nom de Ba-
ghio" jurisconsulte soudanais mort en 1002 (1593). Cf. Al).med Bâbà, Naïl
el-iblihâj, p. 371; el-Qâdid, Nachr el-malhd/lÎ., J, p. 23; llliqdt ed-dorar,
fol. 21'° ; Huart, Lill. ar., p. 388.
252 J~ES IIOM;\1ES ET LE ŒUVHES

(21 mai 1594) ; là, ils furent tl'aités avec un peu plus d'égards
et simplement placés en surveillance dans une maison. Ils
furènt relâchés le 2 L l'amaçlân 1004 (19 mai 1596), à la con-
dition de demeurer obligatoirement à Ivlarrâkech. Dès sa
libération, le savant soudanais, convoqué par el-11ani?oûr au
palais el-Badf, exprÏlna au sultan toute son indignation. On
tl'OuYera leur joute dialectique reproduite dans la Nozltat el-
hâdt. EI-~lani?oûr, au début de l'audience, était séparé
d'Abmecl Bâbâ par un voile, « à la manière des khalifes
<abbâsides (1) ». Le savant refusa de lui parler tant que ce
voile ne fut pas enlevé.
Abmed Bâbâ, dans sa résidence forcée, se nlit, à la mos-
qllée des Chorfa, à enseigner le droit mâlikite et à expliquer
les recueils de haditions islâmiques. Malgré sa pl'ononcia ~
tion défectueuse qui le rendait difficilement compréhensible,
il vit affluer à ses cours des savants réputés comme le qâçli
de Marrâkech, Aboû'l-Qâsim ben Aboù'n-No<a'im el-Ghas-
sâni (2), qui avait alors plus de soixante ans, <Ali Ibn <Iml'ân
es-Salâs! (3), j\10l,lammed 'e r-Ragrâgi (4) et l'historien Ibn el-
QàçlL Il rendit des fatwâ, mais refusa d'ètre officiellement
chargé de la fonction de mufti pour ne pas avoir rail' 'cPac-
cep ter son séjour forcé à :M arrâkech. Son nom bientôt se

(1) Gf. en-Nâ~irî, Isliq$â, Uf, p. 63 . Cetle hisLoire de voile rappelle', de


manière curieuse, celle du roi d'el-IJira, <Amr fils de llind, qui était ca-
ché derrière un rideau lorsqu'il entendit le poète el-rJàrllh fi] de I;Iilliza,
réciter, en les improvi ant, les vers de son plaidoyer en faveur de la tribu
de Bakr.
(2) Aboû'l-Qàsim ben :\loQ.ammed ben Aboû'n-N o<alm el-Ghassânî el-
Gharnà~i el-Andalosi el-Fàsl, qâçli de Fès, assassiné en 103'2 (1623). Cf.
Mol,lammed Mayyàra, ed-Dorr elh-thamin, début; el-Jfrâni, Nozhat eHtàdi,
éd. Boudas, p. 237 du texte et 394 de la lrad.; f$afwat man inlachar, p.74;
el-Qùdirî, Nachr el-mathâni, l, p. 147, ct 11, p. 60; Iltiqât ed-dorar, fol. 10
vo; el-Kattânî, Salwal el-anfâs, H, p. 104.
(3 ) SUL' ce personnage, cf. supra, p. 245, n. 5.
(4) Aboù <Abd Hah .\loQ.ammed ben <Abd llah er-Ragràgî, connu sous
le nom de Boû <Ab de lli., qùÇl.i de Marràkech à partir de 1002 (159:~-H)94),
mort dans celte ville en 102:2 (1613-1614). Cf. el-lfrànî, Noz hal eH"âdî, éd.
Houdas, p. 171 du texte et 277 de la trad.; el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, l,
p. 125; Ibn el-Mowaqqil, es-Sa<âdat el-abadfyya, JI, p. 13'1.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE nÉG. 253

répandit dans tous les centres cultivés du Maroc: « Je


devins illustre, dit-il, depuis l'Extrême-Soûs jusqu'à Bougie
et Alger. » Il demeura dans la capitale sa' dienne jusqu'à la
mort d'el-:~ian~oùr; le successeur de ce dernier, Moulay
Zaïdân, pernlit à Al).med Bâhâ et à tous les autres exilés du
Soudan de retourner dans leur pays (1). Quelques années
après, le jurisconsulte mourait à TinbokLou, le 6 cha'bân 1036
(22 avril 1627) (2). ,
Il lai ssait un nombre d'œuvres considérables, au moins
quaranle, la plupart ressortissant au droit mâlikite, quel-
ques-unes à la théologie et à la grammaire (3), et deux re-
cueils biographiques : le Naïl el-ibtihâj (4) et la Kifâ'iJat el-
JJloZlt{~j.
Un jurisconsulte oriental, Ibrâhîm ben ' Ali Ibn Farl;lOûn (5)

('J ) .\1(. Ben Cheneb ( Tdjd za, § 94) dit que « d 'après des traditions locales
plus ou moins sûres, il parait qu'Al)med Bàba, avant de retourner à sa
ville nalale , fit le pèlerinage de la Mekke et passa par Alger où il séjourna
quelques jours, traité avec beaucoup d'égards par les savants de l'épo-
que. »
(2) Celle date eslfournie par es-Sa'di, op, cit., pp. 244=374. La f$afwal
nwn inlachar, le Nachr el-malhdnî el l'Illiq dt ed-dorar donnenl simplemenl
la dale de 1036. Quant. à el-Mo~übbJ, il- place par erreur la morl d'AI:).lned
Bùbà le 7 cha'bân 103:".!.
(3) On trouvera la liste des litres de ceux que l 'o n connaît dans l'article
de Ben Cheneb, Enc. lsl., l , p. 196. Parmi ces ouvrages, il y a lieu de si-
gnaler une biographie abrégée d'es-Sanoùsl, inlitulée el-La'dlî es-sondo-
siyya fî'l-faq,d'ïl es-Sanousîyya (nO 407 (2) des mss. arabes de Rab at), qu'il
termina le 7 rabî' II 1001 (10 décembre 1595) et qu'il rédigea d'après el-
Mawdhib el-qaddosîyya fî'l-mandqib es-Sanoûsîyya de MoJ:tammed el-MallâlL
(nO 399 des mss. arabes de Rabat ). Il composa aussi, à Marràkech, un
opuscule sur le statut personnel des nègres et l 'esclavage, intitulé Mir'dj
efi-fio'oûd fî naïl majklb es-soûd, ou el-Kachf wa'l-baïân li-afindf majloûb es-
soûdân (nO 508 (3) des mss. arabes de Rabat).
(4) Lithographié à Fès en 1317 et imprimé au Qaire en 1329, en marge
d'ed-Dîbdj d'Ibn FarJ:toûi1.
(5) Sur ce personnage, mort en 799 (1397). cf. AJ:tmed Bâbâ, Naïl el-ibli-
hdj, p. 5 sqq. ; Ibn el-Qàçlî, DOT'rat et-ly,îjâl, fol. ~2 du ms. 2022 de la bi-
bliothèque universitaire d'Alger; Wüstenfeld, Die Geschichtschreiber der
Araber, p. 448; Pons Boigues, Ensayo, p. 348, nO ~98; Brockelmann, Arab.
lilt., II, pp. 17~-176; R. Basset, Rech. bibl., pp. 9-11, nO 11 (avec indication
des sources complètes d'ed-Dibdj); Huart, Litt. ar., p. 389.
254 LES HOMMES ET LES ŒU VRES

avait rédigé, dans la seconde moitié du XIVe siècle, un dic-


tionnaire biographique des imâms mâlikites jusqu'à son
époque, ed-Dtbâj el-modhahhab ft ma'/'ifat a'ïân 'olamâ'
el-madhhab. C'est ce recueil qu'A6med Bâbâ entreprit de
mettre au courant en y ajoutant une nouvelle liste et en
ayant soin d'y faire spécialement figurer les jurisconsultes
maghr'ibins et soudanais (1). Il donna à son livre le titre de
Naïl el-ibtihâj bi-ta.tl'Îz ed-Dîbâj (2). Plus tard, il en établit
une édition moins détaillée, qu'il appela Kifâyat el-mof:ttâj
li-ma'/'ifat man laïsa ft'd-Dtbâj.
Le Naïl fut terminé à Marrâkech le 7 jornâdâ 1 1005
(27 Jécembee 1596) ; il est probable qu'A1}.med Bâbâ dut con-
sacree à sa rédaction les loisirs forcés de sa détention, et, si
le gouvernement de l'époque ne lui fut pas sympathique, il
montre, par contre, qu'il reconnut tout le mérite de ses
collègues marocains. Parlni les très nombreux personnages
dont il fournit la biographie, il en est beaucoup de maghri-
bins : quelques-uns sont même ses contemporains. Il a
d'ailleurs utilisé pour sa documentation des ouvrages es-
sentiellement marocains, comme la fahrasa et er-Rawrj el-
hatoûn d'Ibn Ghâzi et les fahrasa d'el-Manjoûr et de 'Abd
el- Wâ1}.id es-Sijilmâsî. On peut même dire que, sortant du
cadre qu'il s'était primitivement tracé et que son titre jus-
tifiait, il se fit le biographe de tous les savants du rite mâli-
kite, qui, bien que non spécialement jurisconsultes, avaient
acquis quelque notoriété; il incorpora même parfois dans son
dictionnaire, des notices sur de grands saints maghribins,
qu'il put extraire des ouvrages antérieurs, comme celui
d'Ibn ez-Zayyât, par exemple.
Aussi bien, le Naïl est-il l'une des sources principales de
la bio-bibliographie marocaine; a"ec ce répertoire, A1}.med
Bâbâ complète heureusement les listes de maîtres des
savants officiels de l'époque et les dictionnaires de son con-

(1) A la mêqle époque, l'égyptien Badr ed-Dîn MoD.ammed ben Ia1:).iâ el-
Qarâfî (cf. supra, p. f02, n. 8), écrivait une suite au Dibâj sous le titre
de TawchîlJ- ed-dibâj wa-Q-iliat el-ibtihâj. Cf. Brockelmann, Arab. litt., Il,
p. 176, et R. Basset, Rech. bibl., p. 11, nO i4.
(2) Variant _an ieu e' m-(a{ri'z' .- lh-r:..dfi,-afraff c(rfâ.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 255

temporain Ibn el-QàÇli. A ce titre au moins, il a sa place


luarquée parmi les historiens indirects du Maroc à la fin du
XVI ° siècle.

el-Morâbî (1).

Aboû'l- <Abbâs Al).med ben Moûsâ el-Morâbi el-Andalosî,


1I101'ten 1304 (14 octobre 1624- 2 octobre 1625), est l'auteur
d'un ouvrage hagiographique intitulé Tablat el-ikhwân wa-
l7lawâhib el-imtinân fî manâqib Sayyi'dî RiÇlwân, sur la vie
et les miracles de son maître Aboù'n-No'aïrn Ri~wân ben
<Abd Allah el-Janwl el-Fâsî (2). Ce dernier, mort en 991
(1583), avait été l'un des plus grands savants de la fin
du XVIe siècle et s'était attiré une grande réputation de sain-
teté. Il était le fils d'un renégat originaire de Gênes et
d'une juive marocaine convertie à l'islâmisme; EI-Morâbî
fut son disciple assidu jusqu'à sa mort, et ensuite celui
d'Aboû'l-Mal).âsin Ioûsof el-Fâs!; il composa, en plus de son
ouvrage hagiographique, de nombreux poèmes religieux.

A~med oû <AH es-Soûsî (3).

Aboû'l-<Abbâs AI~nled oû (4) <AH oû Mol).ammed es-Soûsi

(t) BIBLIOGRAPHIE. - El-lfrânî, fiafwat man intachar, p. 125 ; cl-Qàdirî,


Nachr el-mathânî, l, p. 1.49; Iltiqât ed-dorar, fol. 1.1 1'0; el-Kattânî, Salwat
el-anfds, II, p. 261. La To1)fa a servi de source à ce dernier ouvrage: cf.
R . Basset, Rech. bibl.,. p. 23, nO ~)5.
(2) Sur ce saint, cf. Ibn el-Qâc)î, Jadhwat el-iqiibâs, p. 153; ,Mol).ammed
el-Mahdi el-Fâsi, Momti' el-asmâ" p. 86; Ibn <Aïchoûn ech·Charrât, er-
Rrltucf, el-<âtir el-anfds, fol. 74 1'0; el-Ifrânî, fiafwat man intachar, p. 6; el-
Qùuid, Nachr el-mathânî, l, p. 65, et II, p. i92 (année 1.127 ) ; el-Kattànî,
Salwal el-anfâs, n, p. 25~; en-N 4 ~irî, lstiq~â, Ill, p. 96; Doutté, les Mara-
bouts, p. 71.; Ben Cheneb, /djâza, § 23.
(3) BIBLIOGRAPHIE. - Ibn <Aïchoùn ech-Charrât, er-Rawcf, el-'âtir el-anfds,
fol. tÜQ 1'0; el-Ifrânî, $afwat man intachar, p. 68 ; el-Qàdirî, Nachr û-ma-
thdnt", l, p. 171; lltiqdt ed-dorar, fol. 1.5 rO; el-Katlânî, Salwat el-anfds, II,
p.85.
(4) Terme berbère désignant la filiation, équivalent de l'arabe ben.
256 LES nOMMES ET LES ŒUVRES

el-Boûsa 'ïdi el-Hachtoûki e:;;-$anhâji fut, lui aussi, à la ~ois


un savant et un saint. Il naquit dans le Soûs vers 990 (1582)
et, après avoir commencé ses études dans son pays, fut à
Marrâkech l'élève d'Al).med Babà qui lui délivra une ijâza,
et, du qâçli Aboû'l-Qâsim b. Aboù'n-No'aïOl el-Ghassânî (1 ). Il
alla ensuite à Fès, s'installa à la médersa el-~'li:;;bâl).îyya, où
il resta jusqu'à sa 1110rt : il y fut le disciple du savant Ibn
'Achir (2) et de 'Abd er-Ral).màR b. :Mo];tamn1ed el-Fâsl (3).
Durant toute sa vie, Al;tmed es-Soùsl se Inontra d'une piété
et d'un ascétisme scrupuleux, vivant d'une façon misé-
rable de galettes qu'il pétrissait et faisait cuire lui-mêl11e, et
se couvrant d'habits grossiers. Une telle vie de dévotion ne
tarda pas à lui valoir une réputation llliraculeuse. A sa
mort survenue le 15 dholl'l-qa'da 1046 (10 avril 1637) (4),
il fut enterré à Fès, dans une fosse qu'il avait creusée lui-
même, dans le cimetière du qualtier d'el-Kaghghâçlin.
:Malgré son détachement de la vie extérieure et son
mépris de la notoriété, l)llled es-Soùsi ne se dispensa pas
d'établir une liste détaillée de ses maîtres: il lui donna le
titre de Badhl el- Inonâ$alta ft farll el-mo$âfa(la (5). Cet ou-
vrage, d'après les passages qu'en reproduisent les biogra-
phes, semhle avoir été une sorte de « livre de raison», d3.l1s

(1 ) Sur ce personnage, cf. supra, p. 252, note 2.


(2) Aboû }Iol).ammed 'Abd el-Wâl).id b. Al;lmed b. 'AU Ibn tAchir el-An-
~àrî el-Andalosî el-FàsÎ, auteur du [amou el-Morchid el-motï:n, morl en
1D40 (1631). Cf. Mal).ammed Mayyâra, ed-1Jorr eth-thamîn, débul; el-[frànî,
$ajwal man intachar, p. 59; el-Qàdirî, Nachr el-malhânî, l, p. 154; Iltiqdt
ed-dorar, fol. 12 vO; el-Mol).ibb.î , Khol&;at el-âthar, III, p. 96; el-l altânî,
Salwat el-anjds, JI, p. 211; ol-FoÇlaïlî, ed-Dorar el-bahîyya, II, p. 363;
Brockelmann, Ar. lill., il, p. 461; Basset, Rech. bibZ., p. 41, nO 107; Ben
Cheneb, ldj âza, § i88.
(3) Cf. supra, p. 245, note 2.
(4) La Salwat el-alljds, place la dale de sa mort à la nuit du jeudi au
vendredi 13, 14 ou 16 dhoù'l-l).ijja 1046; mais, aucun de ces trois jours
n'est tombé un vendredi; le vendredi le plus proche des dates indiquée '
correspond au 15 dhoù'l-l)ijja.
(5) 11 composa aussi les ouvrages sulvanL~: 1° Wa~lat ez-zoljâ jî't-taqar-
rob bi-'âl el-mo~tajâ; 2° et-Tatrîj bi'l-tacharal el-kirâm wa-bi'l-azwâj et-tâhi-
rât; 3° Ichrdq el-badr jî't-tatrfj bi-ahl Badr; 40 Poèmes à la louange du
Prophète.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE nÉG.
257

lequel l'auteur nota, au fur et à mesure qu'elles lui vinrent


à l'esprit, <lifférentes réflexions sur la religion ou la science
islâmiques. On en trouvera une sur les différentes catégories
d'uléma, dans le passage du Naclzl' el-lnathânt qui rapporte
sa biographie.

Ibrâhîm el-Golâlî (1).

EI-Qâdiri cite également un long extrait historique qu'il


attribue à la pltune d'un jurisconsulte vivant à la même
époque et se nommant lbrâhim b. 'Abd er-Ha1)màn b. 'lsâ
el-Golâli; ce personnage naquit dans la tribu des Bani Qù-
riâgel, sur la .rive droite du Wâdi YVargha, vint à Fès, où il
acqui l uue certain~ renommée vers 994 (1586) , et mourut en
1047 (1637-38). On n'a pas conservé ses ouvrages. Les titres
de deux d'entre eux semblent quelque peu abracada-
b.rants (2) ; il est d01l1mage qu'ils soient perdus, car l'auteur
du Nachr el-17zathânt parait y avoir puisé ùes renseigne-
ments précis.

et Tinmârtî (3).

El-Ihâni, dans la $afwat man intachar, révè~e l'exis-


tence d'un savant du Soùs, qui laissa, en même temps
qu' un recueil de poésies, une fahrasa intitulée el-Fawâ'ld
el-jamma bi-isnàd 'oloûm el-ol7zma: \hoù Zaïd· ' Abd er-
Ral).ln ân b. ~101)ammed et-Tinmfuli el-Maghâfiri. Il naquit à
Târoùd ân t et Y mourut vers 1070 (1659-60), après avoir été
qâÇl.i et mufti de cette ville. Ses maUres fUI'ent 's on père (4)
et la1)iâ el-Waqqâd.

(1) BlBLlOGR.\PIllE. - E1-rrr'lnî, f$afwat man inlachar, p. 123 ; el-Qâdid,


Nachr el-malhâ nî. I, p. 173 ; /lliqàt ed-dorar, fol. 15 ,,0.
(~) Tanbîh e~-~aghir min el-wilddn 'a Id mû waqa' fi mas'dlat el-hârib
ma'a'l-hâriba min el-hadhaydn li~z d'im el-falwâ A'âjlîyyàn et el-Mas'âlat el-
amlîsîyya jiï-anki/;wl el-mon'aqidal 'a ld 'ddal el-bilâd el-gharîsîyya.
(3) BlBLlOGRAPHIE. - EI-JffÙnÎ, f$afwal man inlachar, pp. 155-157.
(4) \lorl à Tàroûdânl en 1007 ( 1598-1599). cr. el-Hrânî, f$aJwat man in-
tacha/~, p . 1.33.
17
258 J~ES nOMMES ET LE S ŒUYRES

Si l'on en juge p~r les quelques citations disséminées


dans la Nozltat el)zâdî (1), le travail d' et- TinIllârtl devait
constituer un doculnent de grand intérêt sur l'histoire de la
belle époque sa' dienne et sur celle de la capitale du Soûs.
Il demeure malheureusement introuvable, même à Târoû-
dânt, et son auteur, qui fut pourtant un des mnitres d'el-
Marghithl, n'a même pas retenu l'attention du consciencieux
biographe el-Qâdirî.

Ma~ammed Mayyâra (2).

Parmi les sources de la Salwat el-anfâs, el-Kattâni cite


le l~vre intitulé ed-Dorr eth-thamîn de Mabammed Mayyât'a.
On est assez surpris de rencontrer ainsi, dans la liste des
autorités du biographe, un ouvrage de théologie. lVIais, en le
lisant, on doit reconnailre qu'il renfernle un assez grand
n0111bre d'indications sur le mouven18nt intellectuel con-
temporain de l'auteur, et même quelques renseignements
d'ordre spécialement historique. Il semble donc qu'il faille
accorder ici une place à cet écrivain, à côté des autres bio-
graphes marocains.
Aboû 'Abd Allah Mabammed h. Abmed 1\layyâra naquit à
Fès le 15 ramaçlân~ 999 (7 juillet 1591). Il Y fit ses études
sous la direction d'Ibn' Achir (3), d' el-' Arif el-Fàsi~ d'Ibn e1-
Qâçli, d'el-Maqqari, de 'Ali el-Bottoùiyi (4), d'Ibn Aboû'n-

(1 ) Cf. entre aulres passages, p. 80 du lexte el 142 de la trad. Dans la


hste des ouvrages qu'il a consultés pour la rédaclion de la $afwat man in-
tachar, el-[frùnî cite un }<onnar:h manuscriL du même auleur (p. 228,
ligne 9).
(2) 13113LIOGRAPHlE. - EI-"lfrànî, $afwal man inlachar, p. 140 ; el-Qàdirî,
Nachr el-malhdni, l, p. 23;); Illiqrit ed-dorar, fol. 23 1'0; el-Kattâni, Salwat
el-allfas, J, p. 165; 13rockelmalln, Ar. Lill., n, p. 461 ; H. Basset, Re<;h. bibl.,
pp. 40-41, nO 107.
(3) Sur ce personnage, cf. supra, p. 256, nole 2.
(4) Aboû'I-T:Iasan 'AH b. Qàsim el-Bo~~oùiyî er-Hifi, fut grand qàçlî de
Fès el mourul en 1039 (1629 ). Cf. el-lfrùni, $afwal man inlachar, p.94; el-
Qâdiri, achr el-malhânî, l, p. '1?l3; lltiqât ed-dorar, fol. 12 vO; el-KatLànî,
Salwat el-anfâs, III, p. 179; Ben Cheneb, ldjd:::a, § 303.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 259

No'aïm el- Ghassâni (1), de :Mol:lammed b. 'Abd el-Wah-


hâb ed-DokkâH (2) et de Mohammed el- DOlYinânÎ (3). Ce
fut un des grands savants de son temps; il n'exerça pas
de ch~rges publiques et passa sa vie à ·ensejgner et à écrire.
Tous ses ouvrages sont très répandus au Maroc (4). Le plus
connu est le grand commentaire qu'il écrivit sur le poème
théologique qu'avait composé quelques années auparavant
son compatl'iote Ibn 'Achir; il le termina en 1044 (1634-35)
et l'appela ed-Dorr eth-tllamin wa'l-mawrid el-mo'ïn ft
cha/'Z~ el-.lllo/'chid el-mo'ïn 'alâ" Çl-çlaroûrî 77'lin 'oloûm ed-
dtn (5). Quatre ans plus tard, il en rédigea un abrégé (6).
Il mourut à Fès le 3 jomâdâ II 1072 (24 janvier 1662) et fut
enterré dans une maison proche d'ed-Darb et-t awil (7 ).

('1) Sur ce personnage, cf. sap ra, p. 2~2, note 2.


(2) Mo1;lammed b. 'Abd el-Wahhâb b. Mo1;lammed b. Mol;tammed b. Mo-
l.lammed b. lbrâhîm ed-Dokkâlî, qâçlî, prédicateur et mufli à l"ès, mou-
rut dans cette ville dans la première décade de dhoû'l-qa'd.a 1036
(14-23 juilleL 16~7 ) . Cf. el-lfrânî, f$afwat man intachar, p. -142; el-Qâdirî,
Nachr el-malhdni, J, p. 153; Iltiqdt ed-dorar, fol. 12 rO; el-KaUànî, Salwal
el-anfds, I lf, p. ~86.
(31 ;\lolpmmed b. Mo1;lammed b. Solaïmân el-Boû'inànî, chérif idrîsite r
mort à Fès le 6 chawwàl 1063 (30 août 1653). Cf. el-Ifrànî, f$afwat man
inlachar, p. 162; el-Qàdirî, Nachr el-mathdnî, I, p. 205; Illiqdt ed-dorar r
fol. 20 1'0; el-KaLtànî, Salwat el-an/ds, I, p. 199.
(4) Ce sont, en plus des deux commentaires du Morchid: 1° Zobdat û-
awtdb fi ikhli.~dr el-~Jattdb; 2° commentaire de la ToMa d'Ibn (A~im;
30 commentaire de la Lâmiyya d'ez-Zaqqâq, intitulé ToMat el-(1~Q.db wa'r-
ri.fqa bi-ba'çl masd'ï[ e~-~afqa; 4° glose sur el-Bokhàri: 1I1o'ïn el-qârî li-
~af)-îf)- el-Bokhârî; 5° supplément au Manhâj d'ez-Zaqqàq, intitulé Takmîl
el-manhaj ild o~oûl el-madhhab el-mobarraj; 6° commentaire du précédent;
7 0 Na~îf)-at el-moghtarrîn fî'r-radd 'alâ dhawCt-tafrîqa bai'n el-moslimîn (va-
rianle f$afwa : tanbih el-m. 'ald 'J:ionnat eH.); 8° commentaire du Mokhta-
~ar de Khalil, non Lerminé; 9° Ajwiba et Nawâzil de droit; '10° vers.
(5) Ce commenLaire a plusieurs fois été lithographié à Fès et imprimé à
Tunis en 12U3, et au Qaire en 1305 eL 1306.
(6) L'abrégé, qui a éLé lilhographié à Fès en 1~92 et imprimé au Qaire
en '130t, 1:~03, 1305, fut terminé le 30 dhoù'l-l)ijja 1048 (3 mai 1639) .
,7) Rue principale du quartier d'el-BUda, à l'es t de la mosquée d'el-
Qarawîyîn.
f260 LES nOMMES ET LES ŒUVHES

el-Marghîthî (1 ).

C'est à Marrâkech que vécut le savant Aboù 'Abd Allah


Mol)ammed b. Sa'ïd el-Nlarghithi es-Soûsl (2 ). Il naquit en
1007 (1598-H9) (3), probablement dans le Soûs, si l'on en croit
son ethnique. Ce fut un savant versé dans toutes les
sciences islâmiques, qui, par surcro1t, s'occupa avec succès
d'arithmétique et d'astronomie. Il fit ses études à Fès et à
Marrâkech et fut dans ces deux villes l'élève d'Ibn 'Achir,
de Mol:wmmed el- 'Arbi el-Fâsi, de 'Abd Allah es-Sijil-
mûsi (4), de Mol)amrued eI-Jannân (5), d'Aboù'l-Qâsim el-
Ghoûl (6) , de 'Isâ es-Sajtâni (7) , de Mol).ammed et- Tamli (8)

(1) BIBLIOGRAPIIlE. - EI-Ifrànî, $aJwat man inlachar, p. 177 ; el-Qàdirî,


Na chr el-mathânî, JI, p. 37; llliqdt ed-dorar, fol. 33 yO; el-:VIo1).ibbî, Kholâ$at
el-dthar, III, p.47t;Ibn el-Mowaqqit, es-Sa'ddatel-abadlyya, J,p.136; Broc-
kelmann, Ar. lill., II, p. 463.
('2) La vocalisation el-Marghîlhî est fournie par el-Ifl'ànî. EI-Qùdiri donne
une orlhographe el-Mîrghîlhi. Quanl à el-Mo1).ibbî, il écrit el-Marîghli.
t3) Date fournie par lui-mème, dans son ijdza à el-loûsî (Nachr el-ma-
lhdnî, Il, p. 41 ).
(4) Aboû Mol;tammed 'Abd Allah b. 'h..lî b. Tàhir es-Sijilmùsi, chérif
'alawite, morl en 1041 (1634-1630). Cf. el-Qùdiri, Nachr el-mathdnt, l,
p. 165; lltiqât ed-dorar, fol. 14 l'0.
(5) Mol;lammed b. A1).med el-Jannàn el-Andalosî, savant ct imàm de
Fès, mort à la fin de 1050 (1041 ). Cf. el-lfrâni, $aJwat man inlachar, p. 58 ;
el-Qâdirî, Nr;tchr el-mathânî . T, p. 178; llliqdt ed-dorar, fol. 16 1'0; el-Fo-
çlaïlî, ed-Dorar el-bahîyya, H, p. 106.
(6) Aboû'l-Qâsim el-FichlàH el-Choûl, qàçli de la tribu des Fichlàla,
mort en 1059 (1649). Cf. el-Hrùnî, $afwal man inlachar, p. 138; el-Qàdid,
Na chr el-mathânî, l, p. 19n; lltiqdt ed-dorar, fol. 18 V O• 11 est à noler que
c'est toujours celte famille des el-Choùl qui fournit des qùçlis à la tribu
précitée.
(7) Aboû Mahdi 'Isà b. 'Abd er-Ra1).màn c -Saktàni ou. es-Sajtànî er-Ra-
grùgî, qàçlî des qâçlîs à Marrâkech, mort en 1062 (1652). Cf. el-lfrànî, $af-
wal man inlachar, p. 111; el-Qàdiri, Nachr el-malhânî, l, p. ~01; llliqdt
ed-dorar, fol. 19 rO; Ibn el-Mowaqqit, es-Sa'ddat el-abadlyya, J. p. HW.
(8) Aboû 'Abd Allah Mo1).ammed b. loùsof et-Tamlî es-Soûsî, savant de
Marràkech, mort en 1048 (1638-1639). Cf. el-Ifrânî, $aJwat man inlachar,
LES BIOGRAPHES DU XIe SIECLE JI~G. 2Gl

et d'Al)med es-S{din1Î (1). Il se fixa dans la capit~le


sa<dienne, où il remplit jusqu'à sa mort les fonctions
d'imâln. A la fin de sa vie, en 1088 (1672), il fit un sé-
jour assez long à la zâwiyya d'ed-Dilâ'; c'est là qu'il dé·
livra à el-Ioûsi une longue ijâza, dont le texte est repeo-
duit par le Nachl' el-matlzânî. Il mourut, ù l'âge de quatI'e-
vingts ans grégoriens, à Marrâkech, le 16 l'abC 1l 1089
(7 juin 1678) (2), et fut enterré près du tombefl,u de son
maUre es-Saj tâni.
EI-Marghithi est surtout connu au Maroc par son poème
didactique de quatre-vingt-dix-neuf vers sur la détermina-
tion de l'heure, intitulé el-il1oqni' li 'illJl Abî Moq/'i', qui
est encore considéré con1me indispensable paL' tous. les
mowaqqit des lnosquées des grandes villes marocaines. Son
œuvre, pourtant, est très diverse (3) , et même sa fahJ'asci
n'est pas la simple énumération de savants telle qu'on la
trouve d'ordinaire, mais une suite importante de notes
(fawâ'ïd ) de contenu varié, que l'auteur transcrivit les unes
après les autres, sans aucun souci d'ordre ni de classement.
Elle se nomme Fahrasat el-<awâ'ïrl el-mi:uartyya bi'l-ma-
wâ'ld et commence par un éloge en vers d 'el-MarghHhi; par
son maître et ami Mol)ammed et-TamIl. On trouve dans cet
ouvrage, qui est assez étendu, de curieux renseignements
sur la société du temps, sur les personnages marquants de
la cour sa<dienne, à côté de recettes magiques ou de pres-
criptions médicales. Dans la Nozltat el-!lâdî, el-Urani en a
em prunté quelques passages; et, bien qu'assez peu répand u

p. 136; el-Qùdirî, Nachr el-malhdnî, l, p. 177 ; llliqdt ed-dorar , fol. 15 1'0;


Ibn el-Mowaqqit, es-Sa <ddal el-abadîyya, U, p. 134.
(1) Aboû'l-<Abbùs Al,lmed b. 'Ali es-Sùlimî, mufti de Marrâkcch, mort
en 1040 (1630-1631). Cf. el-Tfrùnî, f$afwal man inlachar, p. 110; Ibn cl-
Mowaqqit, es-Sa<âdat el-abadîyya, 11, p. 132.
(~) D'après el-Mol,libbi, op. cil., loc. cil., il mourut de la p es te el11090.
(3) Ses ouvrages, en plus de sa fahrasa el d' el-Moqni <sonl: '1 ° un grand
et un pelit commentaire de ce dernier poème ; 20 el-Ichdrdt en-nd$iI;w li-
man talab el-wilâyat e$-~dliQ,a; 30 el-Mosla'dn fi aJ.tkdm el-adhdn; 40 Mokh-
ta$ar el-Ia<marî fî's-siar; 5° Qa$ida fi d/cl ed-dojdj . 60 Jawdb <a n taFif
asmâ' Allah fî'l-omoûr ed-donidwîyya; 7° Qa$îda.ft' ' ilm el-jadwal.
262 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

au Maroc, il y est, encore aujourd'hui, tenu en très haute


estime (1) .

Le voyageur eI- <Ayyâchî (2).

C'est au XVIIe siècle que fut écrite la volumineuse relation


de voyage d'el- 'Ayyâchi, dont une petite partie a été, il Y a
longtemps déjà, traduite en français (3) . Ainsi qu'on l'a
dit plus haut, elle n'est, comme toutes les ribla occiden-
tales, qu'une liste nombreuse de personnages célèbres, et la
partie géographique, c'est-à-dire l'indication des itinéraires
et des étapes, est dans la pensée de l'auteur la nloins im-
portante, malgré sa précision et l'intérêt qu'elle offre encore
aujourd'hui. Le voyageur cherche, avant tout, à renseigner ses
lecteurs su r la façon dont la science islâmique est étucl iée
dans les pays qu'il a traversés.
On est assez bien renseigné sur la vie d 'Ab oû Sâlim 'A bel
Allah b. Mol)amrned b. Aboû Bakr el- 'Ayyâchi, surtout
grâce aux données autobiographiques qu e contiennent ses
œuvres. Il naquit, la veille du dernier jour de cha'Làn 1037
(4 mai 1628), dans la grande tribu berbère d es Au < \.yyàch,
proche du Târilelt: son père, qui y dirigeait une zâwiyya
filiale de celle des Nâ~iriyya, fut son premier maUl'e. El.
'Ayyachi se rendit ensuite au couvent du VVâdi Dar'a, et ce

(1) Un exemplaire manuscrit de cet ouvrage existe à Rabat, sous Je


nO 357.
(2) BIBLlOGRAPlIlF;. - El-[oùsl, el-Jlo~tâq,arât,p. 76 et 150; el-Ifrânî, $afwat
man inlachar, p. 19'1; el-Qâdiri, Nachr el-malhânî, II, p. 4~; Illiqât ed-
dorar, fol. 35 va; el-JabarU, 'Ajâ'ib el-âlhâr, Boùlâq, 1277 , l, p. 6~; Ibn
Zâkoùr, Nachr a:âhir el-boslân, p. 60; Brockelmann, Ar. liti., lI, p. 464;
R. Basset, Rech. bibl., p. 31, nO 81; Huart, Lill. ar., p. 38~; Ben Cheneb,
Idjâza, § 4 ; le mème, Encycl. Islâm, l, p. 2~3.
(3) A.vec une partie de la Ri~tla d' l)m ed Ibn Nà~ir, par A. Berbrugger,
sous le titre de Voyages dans le sud de l'Algérie et des Élats barbaresques
de l'Ouest et de l'Est par el-'Aiachi et Moula Ah'med ... (Exploration scienti-
fique de l'Algérie, Sciences historiques et géographiques, IX, Paris,
MDCCCXLVI). Un autre extrait a été traduit par de Motylinski (Alger,
'1900), sous le titre Itinéraires entre Tripoli et l'Égypte. La RilJ.,la d'el-'Ayyâ-
chî a été lithographiée à Fès, 2 vo1., 1316 H.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 263

fut Mal).ammed Ibn Nâ$ir qui l'initia à la doctrine $oûfique


dont il se Inontra, pendant toute sa vie, un adepte zélé. Puis
il gagna Fès et, dans cette ville, eut comme maitres J::Iam-
doûn el-Abbâr (1), Mal).ammed Mayyâra, 'Abd er-Ral)ll'l.ân
Ibn el-Qâ<;li (2) et surtout 'Abd el-Qàdir el-Fâsi, qui lui
délivra une ijâza au milieu de cha'bân 1063 (juillet 1653) (3) .
E-l-'Ayyâchi passa la plus grande partie de sa vie en
Orient, menant une vie d'infatigable voyageur, s'arrêta.nt
tantôt dans une ville, tantôt dans une autre', y suivant des
cours ou en faisant lui-m ême. C'est ainsi qu'il séjourna plus
ou moins longtemps à la Mekke, à Médine, à Jérusalem et au
Qaire. Ses principaux maUres furent en Orient : ' Ali el-
Ojhoùri (4), Aboû Mahdi eth-Tha'âlibi (5) et Aboû Isl).âq
ech-Chahrazoûri (6). Il composa différents ouvrages (7) et
(t) Aboû' I-'Abbâs A:Q.med, surnommé J:Iamdoûn b. Mo:Q.ammed b. MOLlSâ
el-Abbùr el-l"ùsî, kha~îb . de la mosquée d'el-Andalos, à Fès, mort en iOn
H660-1661). Cf. el-Qàdiri, Nachr el-malhdni, l, p. 228; Iltiqdt ed-dorar,
fol. 22 va.
(2 ) Aboû ZaId 'Abd er-Ra:Q.mùn b. Aboù'I-Qi:bim Ibn el-Qàçli, savant de
Fès, de la même f~mille qu'A:Q.med Ibn el-Qùçli, mort en 1082 (1672). Cf.
el-Ifl'ânî, $afwal man inlachar, p. 168; el-Qùdiri, Nachr el-mathdnÎ., lI ,
p. 6; llliqât ed-dorar, fol. 30 VO ; el-Kattùni, Salwal el-anfas, l, p. 2~3.
(3 ) Le texte de cette ijdz a est reproduit en partie par le Nachr el-m.a.-
Lhdni, II, pp. 49-53. C'es t elle qui a été traduite par M. Ben Cheneb sur une
copie complète.
(4) Noûr ed-DÎn Aboû'l-lrchâd et Aboû'l-J:lasan 'AH b. A:Q.med el-Ojhoûri,
jurisconsulLe màlikite du (Jaire, mort en 1066 ('1656). Cf. el-'Ayyàchl,
Rif:Lla, l, p. -138; el-Ioù::;Î, el-Mof:Ldcjarat, p. 6'1; el-Ifrànî, fiafwal man inlacha /' ,
p. 1'26; el-Qùdiri, Nachr el-mathdni, 1, p. '115; llliqdt ed-dorar, fol. 21 rO;
el-Mo:Q.ibbî, f{hold.~al el-âthaJ', Hl, p. un ; Brockelmann, Ar. lill., II. p. 31 ï ;
Ben Cheneb, Idjdza , § 98.
(5) Aboû Mahdi ' [sù b. Mol).ammed eth-Tha'ùl.ibî, originaire d'Algérie,
mort 0111080('1669), Cf. el-'Ayyùchî, Rilfla, H, p.1'26 sqq. et passim ; el-
lfrànî, f?afwat man inlachar, p. 163; el-Qùdiri, Nachr el-mathdnÎ., l, p. 23;);
.el-Mol).ibbî, J{hold~at el-dlhar, lIl, p. 210; Ben Clleneb , Idj dztt , § 6.
(6) Aboû Is:Q.âq Mollù Ibrùhîm b. 1:Iasan el-l(oûrùni ech-Chahrazoûri
.ech-Chahrânî, savant ct ~oùfî célèbre, mort à Médin.e en HOl (1690). Cf.
.el-'Ayyàchî, RiJ:tla, l, p. 3:20 sqq.; el-Ifràni, $afwal man inlachar, p. 210;
eI-Qùdirî, Nachr el-malhdnî, 11, p. '130; Iltiqdt ed-dorar, fol. 43 vO; el-Ja.-
bartl, <Ajd'ïb el-dthdr, I, p. 67; Brockelmalln, Ar. lill., lI, p. 38~; Ben
Cheneb, Idjdza, § 7. 1

(7) 1° Man~oùma ftl-boyoû" avec un commentaire; 20 Tanbîh dhawî'l-


264 LES HOMMES ET J.ES ŒUVRES

mourut de la peste le 10 dhoû'l-qa<da 1090 (13 décembre


1679) (1).
On n'in,sistera pas outre mesure sur el- <Ayyâchi, dont la
relation du voyage - qu'il intitula Alâ' el-17zCtwâ'ïd _
intéresse d'autres pays islâmiques que le Maroc. C'est
d'ailleurs, en même temps, une véritable encyclopédie de
science musulmane et de ~oûfisme. Il eût été difficile de
passer sous silence cet auteur marocain si connu et estimé
dans sOJa pays.

<Abd el-Qâdir el-Fâsî et son fils <Abd er-Ra~mân.

Les premiers Fàsiyin avaient à peine disparu que d'autres


membres de leur famille acquéraient à leur tour à F ès et
dans tout le Maroc une réputation égale, sinon supérieure.
Le petit-fils d'Aboù 'l-lVIal)âsin, 'Abd el-Qâdir b. 'Ali b.
Ioùsof el-Fâsi (2) n'a pas seulement laissé dans la capitale
le souvenir d'un chef actif . de la zâwlyya jazoûlite fondée
pat' son grand-père, 'nlais aussi celui d'un savant docteur de
l'Islâm. Quant à son fils 'Abd er-Ral)màn, c 'es t, aux yeux
des habitants de Fès, l'un des plus glol~ieux personnages
auxquels leur ci té ait donné naissance.
<Abd el-Qâdir ne trou ve pas sa place parrni les bio-
graphes; c'est sa personnalité elle-même qui en a inspirés.

himam el-'alîyya 'ald'z- zo hd fi'd-donid 'l-fdnîyya; 3° Opuscule sur le sens de


la particule conditionnelle law; 4° el-Uokm bi' l-'adl wa' l-'in$âf ed-ddji' li'-l-
khilâf fi-mâ baïn foqahd' Sijilmdsa min el-ikhtildf; t)o /qlifd' el-dthdr ba'd
dhahab ahl .?l-dthdr; Go Tolf.(at el-akhilld' bi-asdnid el-ajilld' (ces deux der-
niers ouvrages qui forment vraisemblablement la Ja~lrasa d'el-'Ayyâchî ,
ont servi de source à el-lfrâni, $aJwat man intachar, p. 228, ligne 14).
(1'\ Le 18 du mème mois (2 L décembre 1679), d'après el-Qùdir1.
(2) BIBLIOGRAPHIE. -El-lfrànî, $afwat man iniachar, p. '181 ; Jbn 'A'lchoûn
ech-Charrât, er-Hawq, el-<dtir el-anfas, fol. 126 sqq.; el-Q<:idiri, Nachr el-
malhant', II, p. 58 sqq.; llliqdt ed-dorar , fol. 36 1'0; Jbn Zàkoùr, Nachr
azâhir el-bostdn, p. n7; el-Mol).ibbi, !{hold~nt el-dlhnr, Il , p. 441,; el-Kat-
tc'mi, Salwal el-anlds, J, p. 309 sqq.; en-N(l~iri, /siiq~â , IV , p. 5 1 ; el-Fo-
çlaïlî, ed-Dorar el-bahîyya, Il, p , 267; R. Basset, Rech. bibl., p. 18, nO34;
Ben Cheneb, Idjdza, § L
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE H~G. 265

Il n'a pas laissé d'ouvrages, sinon quelques Ajwiba (ré-


ponses à des questions posées par écri t) et une fahl'asa,
dans laquelle il donna la chaine de ses isnâd en traditions
islàmiques et en ~oùrisme, avec quelques renseignements
biographiques sur ses maitres. Elle est, en somme, un
développement de l'ijâza ({u'il accorda à el-<Ayyâchi et que
:M. Ben Cheneb a étudiée et commentée à l'occasion du
XIVe Congrès International des Orientalistes.
'Abd el-Qâdir el-Fâsi naquit à el-Qa~r el-Kabü' le 2 rama-
çlân 1007 (29 mars 1599). Son père <Ali (1) dirigea d'abord
son instruction, qu'il alla compléter à Fès dès l'année 1025
(1616). Il s'installa à la nlédersa el-Mi~bâl,l1'yya, et étudia
sous la direction de son grand-oncle el- <Arif el-Fâsî (2), de
son oncle NIol).ammed el- <Arbi el-Fâsî (3) , qui lui délivra
une licence~ du qâçli Aboû'l-Qâsim Ibn Aboû'n-No<aïm el-
Ghassâni (4) et de <Abd el-Wâl;tid Ibn <Achir (5) ; ses autres
nlaltres furent encore Aboû'l-Ijasan <Ali b. ez-Zobaïr es-
Sij i Illlttsi, Al.lmed el-Maqqari (6) et Mol)ammed el-J an-
nân (7). Ses études tenninées, il voulut rejoinrlre sa ville
natale, mais, ayant ét' dévalisé en roule pal' des brigands :
il décida de se fixer définitivement à Fès et ne tarda pas,
en prenant la direction de la zâwiyya familiale, à devenir
le chef de la confrérie chûdhilite dans la capitale cl u Nord.
Il se mit 'égalelnent à enseigner les l;adilh et la doctrine
~oùfi(Iue. Il mourut le nlercredi 8 ramaçlân 1091 (2 octobre
1680) (8), et fut enterré dans son oratoire du quartier d'el-
Qalqallyin (9). Son tombeau est encore à l'heure actuelle
l'un des plus visités de Fès.

( l ) Cf. supra , p. 243 et tableau généalogique, p. 242.


('2) Cf. supra, p. 245 el nole 2.
(3 ) Cf. supra , p. 215.
(4) Cf. supra, p. 252, nole 2.
(5) Cf. supra , p. 256, nole 2.
(6) Cf. supra , p. 93, nole 3.
( 7 ~ Cf. supra, p . 260 , note 5.
(8; Cetle date e l fournie par el-Ifràni , cl-~Iol:tibbî et el-Katlùnt. EI-Qà-
dirî, dans ses deu répertoire biographiques , écrit 9 ramaçlùn de la
mème année.
(9) Cf. supra , p. 241 , nole 3.
266 LES nOMMES ET LES ŒUVRES

Son fils Aboû Za·ld 'Abd er-Ral).màn (1 ) ne lui survécut


pas longtemps; il mourut cinq ans plus tard, le 16 j omâdâ 1
1096 (20 avril 1685). Il était né à Fès le 17 jomâdâ II 1040
(2.1 janvieT 1631). Ce fut le plus grand des polygraphes
marocains; il possédait plus qll'aucun autre la mochâraka
et était servi par une mémoire admirablement exercée, si
bien que son père lui-même l'appelait l' « es-Soyoûti de son
époque ». Effectivement, dans une vie relativement courte,
il composa, si l'on en croit ses biographes, plus de cent
soixante-dix ouvrages, non seulement SUl' la théologIe et le
droit màlikite, mais aussi sur la jurisprudence marocaine
(son el- 'Amal el-Fâsi est encore aujourd'hui classique au
Maroc), sur la médecine, l'astronomie (2), la biographie et
l'histoire.
Il eut comme m.aitres au M·aroc, en plus de son père, les
sa.vants' Je l'époque dont on a déjà cité les noms à propos
de ses contemporains: ainsi, Mayyàra, 'Abd er-Hal.lmàa
Ibn el-Qâç}i, f:Iamdoùn el-Abbâr. On ne sait s'il fit le voyage
du pèlerinage : toujours est-il qu'il reçut des ijâ::,a de
savants orientaux; leurs noms, sont donnés par la Safwat
man inLachal' et le Naclu' eL-lnathânî. On rapporte qu'il
s'occupa d'alchimie et d'astrologie. Il eut à sou(frir, à la
fin de sa vie, d'une paralysie qui dura six années. Il fut
enterré à sa mort, aux côtés de son père, à la zâwiyya d'el-
Qalqaliy~n.
L'œuvre si diverse de 'Abd er-Ral).l1lân el-FAs! fait une
assez large place à la biographie. On y tL'ouve d'abord, en

(1) BIBLlOGRAPIIlE. - el-lfrânÎ, $afwal man inlachar , p. 201; el-'Alami, el-


Anis el-motrib, p. '13; el-Qàdid, Nachr el-malhâni, II, p. 88; Illiqdt ed-do-
rar, fol. 3U rOi el-Kaltùnî, Salwal el-anfâs, 1, p. 314; en- à~id, Isliqtjâ, IV,
p. 51; el-L<~Q.aïli, cd-DoraI' el-bahiyya, If, p. 269; Brockelmann , Ar. litt.,
H, p. 460 el 463; R. Bassel, Recherches bibl., p. 18, nO 35; Ben Cheneb,
Idjâza, ~ 3.
(2) Les plus importants de ces ouvrages ont, avec el-'Amal el-Fdsî et
son commentaire, un supplément au lWâb ech-Chifâ' du qàQ.Î 'lyyùQ. inti-
, tulé Mifldf}, ech-chifd' et le commenlaire de l'ouvrage de son oncle Mo};lam-
med el-'Arbi : Bahj el-qdtjid bi-char~, el-Jlard$id. 'Abd er-Ral,lmàn eJ-Fàsi
semble surtout avoir écrit des opuscule SUl' des sujets très limités.
LES RlOGRAPIIE S DU XIe SIÈCLE mtG. 267
effet, indépendamment de l'inévitable fahrasa, quatre mono-
graphies relatives à des membres de sa famille: la pre-
mière, 1btiltâj el-qoloûb bi-khabar ech-chaïkh Abî' l-Ala~lâs.ill
wa-c/uûkh ilt ·el-.A1ajdlwûb (1) , est consacrée à son arrière-
grand-père Aboû~l-Mal).âsin Ioùsof el-Fâsî et à Sidi 'Abd er-
Ral).màn el-:\Iajdhoùb (2) ; la seconde, Anîsat el-lrwsâkin ft
abnâ' Abtl-1I1a~lâsin, aux fils de Ioùsof el- FâsÎ, ses grands-
oncles; les deux aut.res, enfin, à son père lui-même: ce
sont la Toblat el-akâbir fi l7lanâqib ech-chaïkh 'Abd el-
Qâdir et le Bostân el-a~â/â,. fi akhbâr ech-chaïkh 'jbd el-
Qâdir (3). De même, pour honorer le souvenir de son père,
il composa un ouvrage sur les disciples qui avaient reçu
son enseigoem nt : lbliltâj el-ba$â'ïJ' fi-nzan qa/'â' 'alâ'ch-
chaïkh -A bd el-QâdiJ' (4) . On lui doit aussi sur ' le saint el·
Majdhoùb un Azhâr et-boslân fi manâqib ech-clwïkh Abi
Mof~amrned 'Abd er-Rafunân et un opuscule sans titre sur
les manâqib du saint l\Ial).ammed hen 'Abd Allah Ibn Ma'an
el· Andalosl (5).

(1) Il en e iste un extrait à la bibliothèque de Rabat , sous le n o 522(6.).


(2) Le saint Aboû Zaïd 'Abd er-Ra1).mân b. 'Ayyâd e.-~anhàjî el-Farajî
ed-DokkàH, urnommé el-Majdhoûb (l'illuminé) est surtout connu par se
sentences mystiques, dont quelques-unes ont été traduites par de Castrie ,
Gnomes de Sîdy Abder-Rahman el-m,ecljedoub, Pari . 1896. Origillaire d e
Tî\, près d'Az emmoûr, il vécut à Fès et dans le lIab~ (Gharb ), où il mou-
rut, dans. le 'Awf, n 976 ('1569). Il fut transporté et enterré à Meknès , en
dehors de Bàb 'Isù. Cf. Mo1}ammcd el-.\lahdi el-Fù i, 1\1omli' el-asmâ',
pp. 112-J20; en- i:.t.id , Isliq~â , lU, p . 41 in fin e; el-Kattàni, Salwat e.r-an-
Jds, H, p. 221; Ben Cheneb , Idjâza, § 360; \'". larçais , Tex les arabes de
Tanger , p. 142, n. 2 et la bibliographie cW'opé nne cilée.
(3) Cf. eL-Kallùni, Salwal el-anfâs, l, p. 313, ligne 12.
(4) A servi de source à cl-Ifrùni, ainsi que l'Anisat el-masâlân. Cf. $aJ-
wat man inlachar , p. 228, lignes 15 et 16.
d» Cf. el-Kaltùnl, Salwal el-anfâs, 1[, p. 288, ligne 3. - Sidi Mal:).ammed
b. "\Io1}ammed b. 'A bd Allah b. }[a'an el-Andalosî, de cendant de Ja'qoûb
el-Man.oûr l'Almoh ade, né en 978 (J 570-157 Lj, di ciple de 10LIsof el-Fâsî,
~oûfî et ai nt répu té de Fès, mourut dans cette ville le 3 jomàdù 11 1062
(12 mai 1652). Cf. Mol).ammed el-~lahdî el-Fàsî, Momti' el-asmâ', p. 161
sqq.; el-Ifr ùni, $aJwat man intachar , p. 115; lbn 'Aïchoûn ech-Ctlarrâ~,
er-Rawq. el-'dtir el-an{âs, fol. 92;el-Qùdiri, Nachr el-mathdnî,l, p.197 sqq.;
Iltiqdt ed-dorar, fol. 19 1'0; eL-Katlânî, Salwat el-a nJds , lI , p. 284 sqq.; el-
Foçlaïli, ed-Dorar el-bahîyya., II, p. 334.
2G8 LES HOMMES ET LES ŒUVRE

Il faut enfin accorder une mention spéciale à la p::lr-


tie d'un ouvrage de <Abd er-Ral)mân el-Fàsi qui con-
cerne l'histoire. En effet, cet auteur, le plus fécond des
poètes didactiques du 1\1 aroc, a voulu définir en vers raja::.,
dans un vaste ouvrage du nom de !(itâb el oqnoûm It 17zabâ-
dt' l- <oloûm, toutes les sciences connues. Le li v 1'e forme
ainsi une sorte d'encyclopédie des connaissances maro-
caines au XVIIe siècle qui n'est pas sans intérêt: l'auteur,
en deux cent quatre-vingt et un chapitres exact~ment,
y traite de ce qu'il appelle des <ill7z, mot que le français
« science» ne traduit qu'imparfaitenlent. Indépendamment
de bien des renseignements originaux sur les sciences islà-
miques, on y trou vera, en dépit de l'abondance des che-
villes imposées pat' le souci de la cadence méll'ique, des
données parfois originales sur les généalogies marocaines
et sur l'ensemble des tribus de l'empire. Le chapitre qui
concerne l'histoire, le cinquante-neuvième, comprend en
tout cent quatre-vingt-dix-sept vers. La définilion de la
science histoeique tient en un seul : « L'hi toire consiste
dans la connnissance des rois musulmans et de dynasties
et dans celle des gens qui ont été investis du pouvoir, puis
destitués (1).» Ce sont ensuite des chronogrammes encadrés
de quelques noms, depuis les premiers khalifes jusqu'aux
Sa'diens, et d'où il n'y a pas grand'chose à tirer.
Ce chapitre sur l'histoire avait, d'ailleurs, été composé
par <Abd er-Ral)mân el-Fâsi avant le reste du Kitâb el-
oqnoûm. Il portait un titre spécial: Zalu' ech-clzamârîlclz
ft <ilm et-td'rtkh (2). Or, il al'ri\'e souvent à el-Ifràni de
citee, dans le texte de sa Nozlzat el-bâcU, le commentaire
de cet ou vrage; et les quelques extr'ai ts qu'il en donne sont
de nature à faire regretter la perte de ce travail et l'anony-

(1) J~~ ~yJ~ J.J'~ <.JAJ ~ JJ..J~ <.J::~\ d .J'lA ~


(2) Il est curieux de voir quelle a été l'attirance de ce titre, qui fournit
une rime bi yllabique au si riche que rare au mot td'rikh. La paternité
en revient vraisemblablement à es-Soyoû~î (cf. Brockelmann , Ar. litt., JI ,
p. 158, nO 301) ; et il a été utilisé par la suite ·par l'hislorien algérien BOll
Râs (cf. Houdas, in traduction de la Nozhat el-I),ddi, p. 20, n. 1).
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 269

mat gardé par le commentateur. Il est possible, sinon pro-


bable, que vers et commentaire soient également l'œuvre
de 'Abd er-Ral).mân el- Fâsi; mais il serait osé de se pro-
noncer pour l 'ins tant sur ce point avec assurance.

el-Ioûsî (1).,

A la même époque, vivait un savant- marocain non moins


cé lèbre que' Abd er-Ral).'m ân el-Fâsî : Aboû 'Ali el-Hasan
el-Ioûsî (2), dont la renommée populaire s'est tellement éten-
due au :M aroc qu'il est devenu l'un des sain ts le& plus véné-
rés du pays. Pourtant, avant d'êtl'e un docteur en théologie
et un membre agissant de confrérie mystique, il fut un
homme de lettres remarquablement versé dans la littérature
arabe profane et un poète de quelque valeur. Sa vie se passa
en perp'é tuelles pérégrinations à travers le Maroc. Il naquit
en 1040 (1630-31) dans la tribu berbère des AIt Ioûsi, dont
le territoire s'étend au sud de Fès, de la banlieue de $fl'oÙ
aux sources de la Molwiyya. Dès qu'il fut parvenu à l'ado-
lescence, il alla successivement vitiiter l,e s grands couvents
du pays, dans lesquels il fit son instruction: à Sijilmâsa, dans
la région du Darta, à Marrâkech, où il séjourna assez long-
temps, avant de gagner la zâwiyya d'ed-Dilâ', devenue autant
un foyer intellectuel qu'un centre religieux important. Il y
resta jusqu'au moment où elie fut détruite par le sultan Mou-
layer-Rachid, en 1079 (1668).

(1) BlBLlOGHAPHIE. - Ses Mol),dcJ,ardt, début; sa Fahrasa;el-Ifrânî,$ajwal


-man inlachar, pp. 206-210; el-Qâdid, Nachr el-malhânî, Il, pp. 142-151 ; Il-
tiqât ed-dorar, fol. 411'0; el-Jabartl, tAjd'ïb el-âthdr, l, p. 68; el-Kattânî,
Salwal el-anjds, IJ l, p. 81 (à propos de son fils Mo\lammed i; cn-Nâ~irî,
Isliq~d, IV, p. 51; Mol)ammed es-Sà'ïQ. er-Hibâ\Î, el-Monlakhabdt el-tabqa-
rlyya, p. 52; Brockelm~nn, Ar. HU., 1T, pp. 4~5-1~6: R. Basset, Rech. bibl.,
p. 40, nO 106; Rosen, Colleclions scientifiques de l'Instilut des Langues orien-
laIes de Sainl-Pélersbourg, I, pp. 86-87 (ap. R. Basset, loc. cit.); de Fou-
cauld, Reconnaissance au Maroc, p. 38.
(2) 11 a donné sa filiation complète dans ses Mol),âcJ,arât, p. 10; ibid., p. 12,
il explique l'origine de son elhnique cl-Ioùsî par el-loùsofî ('1).
270 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

EI-Ioùsi eut de nOlnbreux n1aÎtres; sa laltrasa en donne


le détail; parmi eux, on peut citer Aboù Bakr et-Tatâfi (1),.
Mo~ammed ben 'Abd Allah el-f:Iasanl (2), 'Abd el-'Aziz e1-
Filàli (3) ; ' Mol.wmmed et- Tajmoù' li (4) ; Aboû Mahdi' Isâ es-
Sajtânl (5) ; Mol;tammed el-Mizwâr (6) ; Mol;talnmed el-Hach-
toCLki (7) ; enfin, le saint ~Ial;tanllned Ibn Nâsir et le chef de
la zâwiyya d'ed-Dilà', Mol;tammed el-~lorâbit ben NIal;tammed
ed-Dilà 'ï. Sur sa demande, il reçut une ijâza de 'Abd el-Qâ-
dil' el·l'-'àsi ; el-Marghithi lui en accorda également une. Son.
instruction étai t' fort étendue et l'on raconte qu'il savait
par cœur les dîwân des poètes Aboû Tammân1, el-Motanabbî
et Aboù'l- 'Alù el-Ma 'arr1.
Quand il arriva à Fès, à la fin de mol;tarran1 1079 (j uil-
let 1668), avec les membres de l'ancienne zâwlyya d'ed-
Dilâ', il se mit à enseigner à la mosquée d'el-Qarawiyin ..
Il est probable que cet étranger, qui avait dédaigné la
science de la vieille capitale savante (8), fut en butte ~
cerlaines vexalions de la part de ses collegues. Il n'y
continua ses cours que pendant cinq ans, jusqu'au n1ilieUl
de 1084 (1673), et exhala son amertulnc, à propos des médi-

(1) Aboû B~kr b. el-J:lasan et-Tatâfî, savant mamcain qui vivail a


XVIIe siècle. Cf. el-lfrânî, $afwat man intachar, p. 1.17; el-Qàdirî J Nachr el-
malhdnî, II. p. '125.
(2) Àboù 'Abd Allah Mo]:wmmedb. 'Abd Allah b. 'AH b. ekTâhir es-Si-
jilmàsi el-T-:h.sanî, qàçli de Sijilmâsa, mort en '1089 (1678--1679). Cf. el-Qtt-
diri, Nachr el-mathdnî, II, p. 42 ; Illiqât ed-dorar, fol. 34 VS.
(3) 'Abd el-'AzÎz b. 'Abd er-Ra1).màn el-Fîlâli, mort en 1096 (1685). Cf ~
el-Uràni, $afwal man intachar, p. 199.
(4 ) Aboû 'Abd Allah Mo1).ammed b. Mo1).arnmed et-Tajmoû'ti, assas-
Sillé en 1088 ('l677-t678). Cf. el-Qâdlrî, Nachr el-malhânî, 1J, p. 23; llli-·
qdt ed-dorar, fol. 33 rO.
15) Cf. supra, p. 260, n. 7.
(6 ) Aboû 'Abd Allah Mol,tammed cl-Mizwàr el-Marrâkochî, qâ<;lî de Mar-
râkech, mort ver 106n (1654-1655). Cf. el-Hrânî. $afwat man .intachar,.
p. HI ; Ibn el-Mowaqqit, es-Sa'âdal el-abadL'yya, J, p. '135.
(7) Aboù 'Abd Allah ~lo1;Lam.med b. lbrâhîm el-Hachtoûkî, sur lequel cL
el-Hrànî, $afwat .m an intachar, p. 202.
(~) On. remarquera que, de tous les maîtres cités plus haut, pas un n'ha-
bilait Fès.
LES BIOGRAPHES DU XIe SIÈCLE HÉG. 271

sances dont il était l'objet, en deux vers demeurés célèbres


au Maroc:
« Ni Fès, ni ses savan ts n'ont équitablement jugé mon savoir et
n'ont reconnu la grandeur de mon rang 1
« S'ils avaient été jllstes, ils m'auraient accueilli commeîe berger
des années stériles accueille le nuage chargé de pluie (1) ! ))

Il alla alors à Marràkech faire des cours à la mosquée des


Chorfa, puis partit en pèlerinage. Il'revint à Fès en chaw-
wall095 (11 septembre - 9 octobre 1684), Y séjourna quelque
temps, continuant à parler haut et avec franchise, et adressa
au sultan Moulay Ismâ<Il, à propos du désarmement des tri-
bus berbères, une longue lettre d'un ton presque agressif (2).
Il retourna pour la se'c onde fois en pèlerinage en 1101, et
mourut à son retour, le 15 dhoû'l-l:,lijja 1102 (10 sep-
tembre 1691). Il fut enterré dans son pays d'origine, à Ta-
mazzazt (3), près de la petite ville de $froû; son tombeau
s'élève encore aujourd'hui à cet endroit et fait l'objet de fré-
quentes visites pieuses des habitants de toute la réglOn.
Les œuvres d'el-Ioûsî (4), pour être moins nombreuses

~ ~

(1) ~ cD)\:> ~f 'Yj ~A>..lç. ~ ~A~I 'Yj û19 ~~I ~


w

~I Î~I JI c:..r..:.- ':fI.) ~ ~ lSjl I~ I~i .,J


(2) Le texte complet en est donné par en-Nà~id, Isliq~â, IV, pp. 39-41.
(3) Orthographié Tamzazizt par el-Qâdirî.
(4) En voici la liste: 1° Recueil de proverbes et de sellttences morales,
non lerminé, intitulé Zahr el-alwmftl-amlhâl wa'Htikam (Rabat, 3~8-359);
2° Glose sur le commentaire écrH par es-SanoûsÎ sur son résumé de lo-
gique, intitulée Nafâ'ïs ed-dorar ff ly,awâchî 'l-Mokhta~ar; 3° Ouvrage sur
]a formule lâ ilaha illa Allah, Mandhij el-khalâ~ min kalimat el-ikhlâ~ (var.
Machrab el-<âmm wa'l-khd~~ min ... ) ; 4° el-Qawl el-fa~l fi tamyîz el-khd~.~a
<an el-fa~l (var. fî'l-farq baïn el-lchâ~~a wa'l-fa~l) (Rabat, 512) (2 ) ; t)0 Kitâfb
el-moly,âc!arâl; 6° Diwan; 7° Glose sur le grand traité de lhéologie d'es-Sa-
noCrsî et son commentaire par l'auteur; 8° rel-Qânoûn fi iblidâ' el-<oloûm;
go Poème en rime dâl (Dâliyya ) à la louange d'Jbn Nà~ir et commentaire;
100 el-Kawkab es-sdW fî charly, jam< ,el-jawâmi\ non terminé; H° Glose
sur le Talkhî~ el-mifta~1" non terminée; 12° Fahrasa; 130 Opuscules di-
vers.
272 LES HOMMES ET LES ŒUVflES

que celles de son contemporain <Abd er-Ral)nlân el-Fâsî,


n'offrent pas moins d'intérêt. Ses nombreuses poésies ont
été réunies en un diwân, et l'une d'elles, la DâUyya, qu'il
composa à la louange de son nlaître Mal)ammed Ibn Nâ!?ir
et qu'il commenta ensuite, témoigne d'un réel talent poé-
tique. Il co~posa aussi un livre fort curieux, el-Qânoûn ft
ibtidâ' el- <oloû,n (1) , rem pli de consi dérations su,~ les diffé-
rentes sciences islâmiques : il était, sans doute, destiné à
faire pièce à l'Ol/oûza géante et encyclopédique du grand
savant de ~-' ès. Mais l'ouvrage d'el-Ioûsi qui offre le plus
. d 'intérêt est cel ui qu 'il intitula el- Jtlo/:lâ(lal'ât (2), « les conver-
sations », et qui, différant complètement de la manière des
fahrasa, se présente néanmoins sous forme de nlémoires,
de notes, de souvenirs réunis sans grand souci de classe-
ment. Cet ou "rage ne constitue pas d'ailleurs une autobio-
graphie d'el-Ioûsi; sur lui-même, on n'y trouve que quelques
renseignements de filiation; par contre, que de précieuses
indications sur la société lettrée marocaine du XVll e siècle, di-
visée par d'innombrahles querelles de chapelle mais dé-
ployant pourtant une activité intellectuelle digne d'attention!
Dans la pensée de l'auteur, ce livre devait être la· contre-
partie d'une réponse acerbe, par laquelle les savants de
Fès avaient riposté aux deux vers cités plus haut. En fait,
ce fut au cours d'un voyage au sud du Maroc, en 1095 (1.684),
qu'il en entreprit la composition, en rapportant de mémoire
des anecdotes, des cit ations poétiques et jusqu'à des pro-
verbe s arabes, et en reliant le tout par une chaîne de sa com-
position. Ainsi, les ~loZzâ4a/'ât sont loin de ressembler à un
dictionnaire biographique; mais elles offrent la même utilité,
parce qu'elles aussi fournlÏllent d'indication s précises sur
les lettrés et les saints du :M aroc. On peut dire qu'elles sont
un des rares livres de mémoires profanes qu'ait osé écrire
un savant du pays.

(1) LiLhographi~ à Fès en 1310.


(2) Lithographié à Fès en 1317 .
LES IHOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 273

BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE DE L'HÉGIRE (1689-1785 J . .:.c,)

Mo1).ammed el-Mahdî el-Fâsî (1).

Aboù 'Abd Allah Mol).ammed el-Mahdi b. Al).med b. 'Ali


b. Aboù'l-Mal)âsin Ioùsof el-Fihri el-Fâsi naquit à el-Ua!?r
el-Kabîr à la fin de rajah 1033 (17 mai 1624) (2 ). Son père
Al).med (3) et son oncle maternel Mal)ammed el-Fâsl (4) lui
firent entreprendre dans cette ville ses premières études,
qu'il alla compléter à Fès: il y suivit l'enseignement de son
oncle <Abd el-Qâdir el-Fâsî et de I)amdoùn el-Mizwâr. Il ne
tarda pas à acquérir une grande compétence en' matière
de science musulmane. Très pieux et très dévot, il mena une
vie ascétique et refusa les cadeaux que lui envoya le sultan
Moulay er-Rachid. Il s'initia au ~oùfisme et devint l'une des
personnalités les pl us considérables de la confrérie jazoûlite :
ses Inaitres spirituels furent Nlal).ammed b. <Abd Allah
Nla'an (5) et Qâsirn el-Kha~â~i (6). Il eut comme disciples

('1) BIBLIOGRAPHIE. - el-lfrânÎ, $afwat man intachar, p. 211 ; el-Qâdirî,


Nachr el-mathdnî, II, p. '160; Iltiqât ed-dorar, fol. 47 vO; el-Kattânî, Salwat
el-allfds, II, p. 316; Brockelmann, Ar. lilt., II,p.462;R.BasseL, Rech. bibl.,
p. 26, nO 61-68.
(2) D'après la Salwat el-anfds. El-Ifrânî donne le 19 rajab (7 mai) et el-
Qâdirî, le 27 rajah ( US mai) de la même année. •
(3) Mort en 1062 (1653). Cf. el-Q âdirt, Nachr el-mathânî, l, p. 200; llti-
qat ed-dorar, fol. 19 vO; el-KatLâni, Salwat el-anfds, II, p. 315.
(4) Aboù <Abd Allah et Aboû'l-Qâsim Mal).ammed b. Al;tmed b. ]oûsof
el-FàsÎ, fut qâçlî de Meknès, puis mufti et prédicateur à el-Qarawîyîn, à
Fès. 11 mourut en 1084 (1673). Cf. el-Ifrânî, $afwat man intachar, p. 170';
el-Qùdirî, Nachr el-malhdnî, II, p. 12; llliqât ed-dorar, fol. 32 1'0; el-Kat-
tânî, Salwat el-allfds, II, p. 320.
(5) Cf. supra, p. 267, n. n. .
(6 ) Aboù'l-FaçlL Q.\sim b. Qàsim el-Kha~à~î el-Andalosî el-FâsÎ, mystique
marocain, mort le 1,9 ramaçlàn 108318 janvier 1673). cr. el-Ifrùni, $afwat
man intachar, p. '111; el-Qàdiri, Nachr el-malhdnî, lI, p. 9; Llliqât ed-do-
rar, fol. 30 V O; Ibn <Aïchoùn ech-Charrâ~, er-Rawcj el-'âtir el-anfds, fol. 64
1'0; el-Katlùnî, Salwat el·anfds, II, p. 282; el-Foçlaïlî, ed-Dorar el-bahfyya,
H, p. 338. El-Qàdirllui a consacré un ouvrage spécial: ez-Zahr el-bdsim;
cf. infra.
18
274 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

principalement des lnembres de sa famille, déjà nombreux


à Fès Il consacra tout le temps que lui laissait l'exercice de
sa religion a l'enseignement et à la composition d'ouvrages.
Il mourut à Fès, dans la nuit du 8 au 9 cha' bân 1109 (20 fé-
vrier 1698) et fut enterré dans le mausolée de son arrière-
grand-père Ioùsof el-Fâsl.
L'œuvre laissée par :Mol)amn1ed el-~Iahdi el-Fâsi est
presque tout entière d'ordre biographique (1) ; son livre le
plus connu, le i'J!lomtt el-asmâ' ft akhbar el-Jazoûlt. wa' t-
Tabbâ' wa-mâ laho17lâ min el-atbâ' (2), est une histoire du
mouvement jazoûlite au Maroc sous forlne de notices, f{uel-
ques-unes assez longues: successi vement el-J azoùli, son dis-
ciple et- Tabbâ' (3), les disciples de ce dernier et les diffé-
rents chefs de confrérie jusqu'à la fin du XVIIe siècle y sont
passés en revue. L'auteur con1pléta son livre par un opus-
cule intitulé el-llmâ' bi-ba'r} man lam iodhkar ft Momti'
el-asmâ'. Il consacra également un troisième ouvrage à
l'école ehâdhilite et à la filiale fondée par AI~med Zar-
roûq (4) : la Tobfat ahl e$-$adtqîyya bi-asântd tt-tâ'ïfat el-ja-
zoûliyyawa'z-zarroûqîyya. Se plaçant toujours a LI point de VL:e
mystique, il corn posa enfin deux opusc ules sur son arrière-
g'r and-père Aboù'l-lVIal)âsin : el-Jawâhir e$-$afïyya min el-

('1) Ses aulres ouvrages sont: troi commentaires, grand, petit el moyen
des Dald'ï[ el-khaïrdt d'el-J azoùli ; un traité de généalogie: Dd'ï 't-tarab
bi-ikhli.5dr al.sdb el-'Arab; une réponse à des tolba de Fès au sujcl de l'ex-
lase mystique d'el-Kha~ù~i : er-Ra$d$at el-maUiyya fi jawf man radd 'aici
ahl el-mokhft'yya; des ouvrages sur la vie du Prophète: el-'Iqd el-monarj-
rjad minjawdhir mafdkhir sayyidind wa-nwwldnd Mo~wmmed; Simt el-jawhar'
el-fdkhir nûn mafdkhir en-nabi el-awwal wa' l-dkhir; Kifdyul el-mol;tdj min
. khabar $dl;ib el-ldj wa'l-liwd' wail-mi'rdj; Chifd' el-gholla wa-inqicha' e$-$a-
l;dba 'an l;okm ech-chokr awwal el-n'tilla wa-tanzîh e$-$a~~dba; ed-Dorrat
el-gharrâ' fi waqf el-qorrd'; Ma'oûnal en-ndsik bi'rj-rjaroûl:i min el-mandsik~;
el-Lom'al el-khatîra fi mas'dlat khalq ardl el-'ibdd ech-chahlra.
(2) Lithographié à Fès en 1305 et J 313.
(3 ) Aboù Fâris 'Abd el-'Aziz b. 'Abd el-T:laqq cl-T;larrâr, dit et-Tabbù',
successeur d'el-Jazoùli comme chef de la confrérie clu\dhilite, mort à Mar-
rùkech en 914 ( 1508-1509). Cf. Ibn 'Askar, Daw~wt en-nâchir, p. 99; Mc-
l.lammed el-Mahdi el-Fù"i, Mom.li' el-asmd" p. 32; Ibn el-Mowaqqit, es-Sa'e:-
dClt el-abadiyya, II, p. 59; A. Cout', Etablissement des Chérifs, p. 64.
(1) Surce personnage, cf. supra , p. 187, n. 3.
LES BIOGRAPHES DU XII6 IÈCLE nÉG. , 27 '5

mal;âsin el-ioûsoflyya et la Raw(lat el-mal;âsin ez-zahtyya


bi-l7la'âtlzir eclt-clutfkh Abî'l-lIfal;âsin el-bahtyya (1) , et un
autL'e sur son maitre ~fabammed Ibn 'Abd Allah Ma'an :
'Awâl'if el-minna ft l7lanâqib sayytdl lIIal;a77uned Ibn '4 bd
Allah mol;yî's-sonna (2) .
Par sa vie ascétique, sa science et le rôle important qu'il
joua dans le châdhilisme au XVIIe siècle, MO~lammed el-Mahdi
passe pOUl' l'un des plus illustres membl'es de la famille
des Fàslyin. On verea que plus tard, AI~med el-Wazîe
el-Ghassânî le jugea, lui aussi, digne de l'honneur d'une
nl0nographie.

Les Qâdirîyîn.

Une aulre grande fanlille de Fès donnait de son côté nais-


sance, à cette époque, à une série de savants, docteurs et
biographes, les Qàdiriyin, qui ont encore de nombreux des-
cendants dans la capitale marocaine. Ils appal'tenaient à une
sous-branche de chorfa 1).asanls, descendant d'el-Basan, fils
de 'Ali par ' Abd Allah el-Kâmil et l\'Ioûsâ cl-Jawn, ct ti-
raient leur ethnique du grand saint de l'lslâm 'Abd el-Qâdir
el-J Hûn i. L'un de leurs ancètres, Aboù ' \.bd Allah Mol:ram-
Bled, était venu de Grenade s'installer à Fès deux siècles
auparavant (3).
Aboû 'Abd Allah Mo1).ammed el- 'Arhi b. et-Tayyib b.
~101).ammed el-f:lasani el-Qàdiri (4) naquit à Fès le 6 rajab
105G (18 août 1646) (5). Il Y fut l'élève de 'Abd el-Qâdir el-

(1 ) Le premier de ces opuscules existe dans la collection des manu-


scrits arabes de Rabat, sous le nO 401 (5).
(2) Cf. cl-f altâuÎ, Salwat el-anfds, If , p. 288, ligne 4.
(3) Cf. 'Abd es-Salàm el-Qâdiri, ed-Dorr es-sanî, p. 59 ; ed-Dilà'ï, Nalîjal
et-tal:tqîq, p. 12; Cour, Établissement des Chérifs, p. 20.
(4) BlHLLOCHAPHIE. - 'Abd es- alùm el-Qùdiri, ed-Dorr es-sanî, p. 62,
ligne 1 ; ed-Dilâ'ï, NaiLjat et-laJ:tqîq, p. 20; .\lol).ammed el-Qùdiri, Nachr
el-malhdnî, II, p. -158 ; Illiqdt ed-dorar, fol. 46 yO ; , el-Kattàni, Salwal
el-anfas, 1r, p. 34G; R. Basset, Rech. bibl., p. 27, nO 69.
(~ D'après 'Abd e -Salùm el-Q,ldiri, el-'Orf el-'dtir, trad. Giacob J lIi,
p.14t>.
276 LES HOM:VIES ET LES ŒUVRES

FAsî, de Mol)ammed el-Mahdi, l'auteur du Monzti' el-asl7'lâ


et d'Aboû'Alî el-Basan el-Ioûsî (1 ). Il ne tarda pas à s'occu-
per de ~oûfisme, aux côtés de Qâsim el-Kha~â!?i (2), d'Al)-
med el-Iamanî (3) et d'Al)med Ibn 'Abd Allah Ma'an (4) ,
qu'il accompagna en pèlerinage. Il mourut à la fin de mo-
l)arram 1106 (20 septembre 1694) et fut enterré dans sa
ville natale, dans un jardin situé en dehors de Bâb el-Fo-
toûl), à proximité du tombeau d'Aboû'l-Mal)âsin el-Fâsî.
Mol)ammed el- 'Al·bi el-Qâdirl fut le premier historien du
groupement marocain des chorfa auxquels il appartenait. Il
consacra, en effet, un opuscule sans titre à la descendance
de 'Abd el-Qâdir el-JiJâni à Fès. Il composa aussi un résumé,
augmenté de quelques indications nouvelles, de la Tablat
ahl e~-~adîqtyya de Mol)ammed el-:M ahdi el- Fâsi sur la chaîne
spiriluelle des disciples d'el-Jazoùlî et d'Al).med Zarroùq : il
l'intitula et- Tarfa fi ik1tti~âr et-Tolzfa (5). On verra enfin un
peu plus loin que certains savants marocains veulent qu'il
soit l'auteur du dictionnaire biographique des célébrités de
Fès couramment attribué à Ibn 'Aïchoùn ech-Charrât.
Son frère cadet 'Abd es-Salâm fut avant tout un généalo-
giste de €horfa. Étant lui-même d'origine chérifienne, il en-
treprit non seulement de rédiger en quel(!ue sorte lial'morial
.de sa propre famille, mais en même tem ps celui de tous les
,groupe~ents qui, à Fès, revendiquaient le titre de descen-
,dants du Prophète. Il laissa, en plus, une œuvre biogra-
phique relativement considérable.
Aboû Mol)ammed 'Abd es-Salâm b. et-Tayyib el-Qâdirî (6)

(1) Cf. supra, p. 269, sqq.


(2) Cf. supra, p. 273, n. 6.
(3) Aboû'l-'Abbàs Al)med b_ ,Mol}.arnmed b. Idris el-~Iasanî el-Qâdirî el-
lamani 1 originaire de la Haule-Égypte, mort à Fès en '1113 (1701). Cf. cl-
Ifrâni, $afwal man inlachar, p. 219; el-Qâdiri, Nachr el-rnathdnî, IJ, p. 16~;
ILtiqât ed-dorar, fol. ~O rD; el-Kattâni, Salwal el-anfâs, H, p. 334.
(4) l!ïls de Mal}.ammed Ibn 'Abd Allah }1a'an, mort en 1120 (1708). Cf.
el-Ifrânî, fiafwat man intachar, p_ 221; el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, !T,
p. 18'2; el-Katlâni, Salwat el-anfds, II, p. 292; el-FoÇlaLli, ed-Dorar el-ba-
hîyya, II, p. 336.
(5) Cet opuscule existe à la bibliothèque de Rabat, sous le nO 407 (3).
(6) B1ELlOGRAPIIlE. - 'Abd es-Salâm el-Qàdirî, ed-Dorr es-sant, p. 62, ligne
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 277

aquit, comme son frère aîné, dans la capitale, le 10 rama-


çlân 1058 (20 septembre 1648) (1 ). Il Y fit des étudHs très
complètes, sous la d-irection de 'Abd el-Qâdir el-Fâsî, des
deux fils de ce dernier, Nlal;1ammed et 'Abd er-Ral;1mân,
d'el-Ioûsi, d'el- 'Arbî el-Fichtâlî (2) et d'Al;1med Ibn el-
I)âjj (3). Il se révéla bientôt comme le savant le plus versé
dans les recherches généalogiques: sa compétence en cette
matière ne fut jamais égalée au Maroc. Il fit de nombreuses
visites pieuses dans le pays, notamment au mausolée de
:Moulay 'Abd es-Salâm b. Machîch. Il alla, à la fin de sa vie,
en pèlerinage aux tombeaux des saints de l'Extrême-Soûs et
nlourut à son retour, le 13 rabr 1 1110 (19 septembre 1698).
Il fut enterré auprès de son frère M'Ol;1ammed el-'Arbî, en
dehors de Bâb el-Fotoùl;1.
'Abd es:-Salâm el-Qâdirî laissait à sa mort un assez grand
nOlnbre d'œuvres, les plus importantes se rapportant à
l'hagiographie et à la généalogie (4). Ses monographies

8; el-'Orf el-'âtir (trad. Giacobelti, Kitab en Nasab), p. 145; el-Dilâ'ï, Natîjat


el-tal),qîq, p. 20; MoJ.:tammed el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 162 ; Iltiq«.t
ed-dorar, fol. 48 V o ; el-Kattânî, Salwat el-allfds, 11, p. 34H; el-Foçlaïlî, ed-
DoraI' el-bahîyya, H, p. 192; R. Basset, Rech. bibl., p. 27, nO 7'1.
('1) Le 10 ~afar '1058 (6 mars 1648), d'après son el-'Orf el-'dtir, trad. Gia-
cobetli, loc. cit.
(2) Aboû MoJ.:tammed MoJ.:tammed el-'Arbi b. AJ.:tmed b. 'Abd el-Karîm
el-Fichtùlî, mort à Fès en 1092 ('1681). Cf. el-Urânî, $afwat man intachar,
p. '190; el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 72; Iltiqât ed-dorar, fol. 37 vO; el- ,
Kattâni, Salwat el-anfâs, II, p. 228.
(3) Aboû'l-Façll et Aboû'l-'Abbâs Al}.med b. el-'Arbi b. Mol).ammed Ibn
cl-f.lâjj el-J:Iàrithî el-Mirdâsî es-Solamî, de la famille des Ibn el-J:Iâjj de
Fès, fut qàçlî de Fàs el-Jadîd et mourut l e 1er rab!' 1 1109 (n septembre
'1697). Cf. el- Ifrànî, $afwat man intachar, p. 223; el-Qâdirî, Nachr el-ma-
lhanî, II, p. '16'1; lltiq-ât ed-dorar, fol. 48 1'0; Mol)ammed et-Tâlib Ibn el-
l:Iàjj, Ridq, el-ward, ms. 396 de Rabat, fol. 61 sqq. ; el-KatLânî , Salwat el-
anfâs, l, p. HS3; el-F'oçlaïli, ed-Dorar el-bahîyya, II, p. 321.
• (4) Les autres œuvres sont, pour la plupart, de courts poèmes didac-
tiques: '1° Na,?m mokhtafiar es-Sanoûsî fî' l-mantiq (Rab a t, kIss., 522 (9) ;
2° Il),kdm el-ma'roûf min al),lcâm e,?-;oroûf (Babat, Mss., 522 (1); 3° Na,?m qa-
wa'ïd el-i' rdb (Rabat, Mss., 497 (8); 4° er-Rajaz el-mo ~dawî 'ald masâ'ïl mo-
khtafiar es-Sanoûsî (Rabat, Mss., 423 (1); 5° Uîwdn; 60 Mafiâbil), el-iqlibds fî
madd'ï~i :4..bî'l-'Abbâs; 7° Commentaire de la sourate el-Ilchld$ (Qor ., G1.JI) ;
8° Ma'oûnat el-ikhwân bi-ma'rifat arkân el-'îmdn wa'l-islâm wa'l-il),sân;
278 LES HOl\I:\1ES ET LES ŒOVHES '

de saints sont au nombre de trois. La première est consa-


crée 'à A}:tmed Ibn <Abd Allah Ma<an el-And<:dosî et porte Je
titre d'el-Maq?ad el-aJ:wzad ftt-ta'l'if bi-sayytdinâ Ibn <Abd
Allait Alpnad; la seconde, à A}:tmed ech-Châwi, le santon si
populaire de Fès, qui est enterré dans son oratoire au quar-
tier d'es-Siâj (1) : elle se nonlme Alo<tamad er-râwtfî manâqib
wall Allah sayytdt Alpnad ech- Clzâwî; la troisième, enfin,
Nozltat el-fakr fi manâqib ech-chaïkhaïn sayytdt Maba17l1ned
wa-wâlidih sayyîdt Abt Bakr, qui semble avoir été perdue
de bonne heure, rappelait probablement la vie et les miracles
d .Lfondateur de la zâwîyya d'ed-Dilâ' et de son fils.
Le pl~ls important des traités de <Abd es-Sa]âm el-Qâdiri
relatifs aux chorfa de Fès est certainement celui qu'il inti-
tula ed-Dorr es-sant ft bct'çl man bi-Fâs n'lin ahl en-nasab el-
basant (2). C'est la première étude d'ensemble sur le ché-
rifisme dans la capitale marocaine, qui ne soit pas soumise
aux règles de la poésie didactique. Elle s'occupe des
hranches de choda descendant d'el-I)asan et de <Abd Allah
el-Kàmil par les lrois fils de ce dernier, Idrîs, NIol:lalnmed
en-Nafs ez-zakiyya et Moùsâ el-Jawn. Les premiers sont les
IJrisites, ,se subdivisant eux-nlêmes en Joùtiyîn (Tâhirlyin,

9° en-Nasiln el-mo<abbiq fi tawjl'h el-Tchildf el-wâl'Ïdfi'l-mantiq; '10° Dhakhî-


rat el-iklisdb fî man iadkhol el-janna bi-ghaïr l:tisâb (Rabat, Mss., 497 (S) ;
11 Tatmîm el-afrd~1 bi-tan<L'm el-arwâ~~ (o rjouza de '15 vers, Habal, 1I1ss.,
0

537 (5); '120 Tanbîh el-mo<ri(lin 'an dïdt es-samdwât wa'l-drâcf.în; 13° Idd' el-
l:toqoûq fi ibddl el-foroûq ( Habal, 1\1,.;s., 537 (3) ; ,14° Wasîlal es-sdlilân bi'l-
-drifîn el-kâmilln; 15° Manhaj er-rachdd fi ldmîyyal el-isndd; 1.6° Rajd' el-
ijdba fi'l-badr bain e~-~al:tdba; 17° Naïl el-qarabdt bi-ahl el-'aqabdt (orjoûza
de 66 vers, Rabat, Mss. , 537 (6); ISo Ighdlhal el-lahfân bi-âsânîd oûlî'l-<ir-
fdn,
(1.) Aboû'l-'Abbùs A~lmcd b. MoJ:lamm ed ech-Chùwl, mort à Fès le
26 mo1;tarram 1014 (13 juin 1605). Cf. Ibn <Aïchoùn ech-CharràL er-Rawg,
el-<âtir el-anfds, fol. -1OS; el-IfrânÎ, f$afwat man intachar , p. 36; el-Qàdiri,
Nachr el-mathânî, T, p. 96; lltiqdt ed-dorar, fol. 4 vO; el-Kallànî, SalwClt el- •
anfds, l , p. 274 Gaillard, F~s, p. '12S; R. Bassel, Rech. bibl., p. 27, nO 71.
(2) Lithographié à Fès cn 1303 et '1308. Cet ouvrage a été utilisé par
Salmon, pour la rédaction de ses Chorfa ldrisiles de Fès (Arch. mar. , 1,
1.904, p. 4-î5 sqq.l et de ses Chorfa Fildla et Ujildla de Fès (ibid., 111, 1.:105,
p. 1 sqq.), et par A. Cour, dans les tableaux de choda de son Établisse-
ment des Dynasties des Chérifs au Maroc.
LES BIOGRAPHES DU XU e SIÈCLE nÉG.

Chabihlyin, '1l1lrânlyîn, Tâlibiyîu, Ghàlibiyîn ), Dabbâghiyin,


Chorfa de la 'Aqabat Ibn $awwâl (ou Kattânlyîn ), 'A lam îyîn
(Chafchâwanîyin, Raïsoûnîyîn, Ral).m<1niyin et Li~iânîyîn ) ;
les descendants de Mo}:lanllned en·Nafs ez-zakîyya sont les
Chorfa de Sijilmâsa ou Filâta, c'est-à-dire ceux de la dynastie
"alawite; enfin, les descendants de Moùsâ el-Jawn sont les
Oâdirlyin. :Malgré le titre restrictif ùe l'ouvrage, el-Qâdiri
termine ce dernier en passant en revue les descendants d'el-
Bosaln, frère d'el-IJasan, 'qui sont rares au Maroc et n'y
sont représentés que par quelques Chorfa $aqalliyîn (1) et
"Il'âqîyin, venus d'Andalousie. Avec eux il épuisait tous les
groupements formant la noblesse religieuse du pays, en
donnant à chacun la place qui lui reyenait au près de ceux
qui détenaient le pouvoir tenlporel. Il le fit d'ailleurs avec
une extrême prudence, laissant délibérément de côté les
Sa'diens et retraçant en termes élogieux, mais d'une façon
rapide, l'histoire de l'accession des 'A lawites au trône ma-
rocain (2).
EI-Qâdiri consacra aussi une monographie spéciale au
groupe de chorfa auquel lui-même appartenait: el-'O'l el·
"âtil' ft man bi-Fâs min abnâ' ech-chaïkh 'Abd el-Qâdir (3) et

(1) Ou Siciliens. La vocalisation classique esl $iqiWyîn. Nous avons cru


devoir con erver la vocali sa tion adoptée par les leltrés du Maroc.
(2) El-Qùdirî écrivit aussi un traité de généalogie plus général, auquel
il donna le titre de ' Iqd el-la'dU wa-wasîlat es-soù'dl bi-md laho ($a lld'llah
<alaih wa-sallam) m,in el-'dli 'a laïh wa-sallflm) min el-'eil.
A la fin du XIe s iècle et au début du XIIe furent écrils au Maroc deux
aulre lrailés de généalogie chérifienne: l'un, consacré au Chorfa 'A la-
wîytn de ijilmâsa, ful composé par Aboû'l-'Abbàs Arymcd b. 'Abd el-Ma-
lik ech-Chadf es-Slj ilmùsÎ , sous le titre d'el-Amudr es-sanîyya fi nisbal man
bi-Sijilmâsa min el-achrâf el-moQ.ammadîyya ; -l'aulre, intitulé Chodhoûr
edh-dhahab fî /i:hai'r nasab, était l'œuvre d'e l-Tohâmi b. Moryammed b.
Arymcd Ibn RaJ:tmoûn , chérif du Jabal el-'Alam, qui le composa en 1105
( f693-94 ). cr. l'analyse que G. almon a donnée d e ce dernier ouvrage
dans le Arch. Mar., lII, p . f59-265 (Ibn Ra~lmoùn ) .
(3) C'e t de cet ouvrage, qu'il confondait d'ailleurs avec ed-Dorr es-sanî,
que le P. Giacobetli donna une traduction médiocre qui forme la deuxième
parUe (pp. 89-173) de son Kitab e n-Nasab. D'après le manuscrit qu'il a eu
entre les mains , el-'O rf el-'âtir aurait été lerminé par el-Qàdirî dans la
dernière décade de ~afar -1089 ( 16-25 mars -1678). La traduction fait suite
280 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

une autre aux chorfa 'Irâqîyln : Matta' el-ichrâq ft'l-achl'âf


el-wâridîn min el-'Irâq ; enfin, un poème didactique de cent
quarante et un vers sur les quatre « pôles» 'Abd el-Qâdir
el-Jilànî, 'Abd es-Salâm b. Nlachich, ech-Châdhili et el-
J azol1li : el-Ichl'â{' alâ nasab el-aqtâb el-arba'at el-achrâf (1),
dans lequel il fournit la généalogie de ces saints person-
na.ges et une liste sommaire de leurs descendants (2).
Pas un de ces ouvrages n'est d'étendue considérable. Le
dernier dont il entreprit la composition et qui fut inter-
rom pu par sa mort, devait, dans son esprit, constituer son
œUVl'e maîtresse. Il conçut, en effet, le projet d'établir un
dictionnaire biographique du Maroc au XIe siècle de l'Hé-
gire, mais il n'en put écrire que quelques feuilles et le
titre: Nozlzat en-nâdî wa-tol;fat el-f:z,âdî j't'-man bi'l-Maghrib
min ' ahl el-qarn el-f:z,âdt (3). On verra que son petit-fils
Mol)ammed el-Qàdirl ne fit que reprendre le même projet,
en en attribuant d'ailleurs l'origine à son grand-père, quand
il écrivit le Nachr el-17zathânt.

Ibn 'Aïchoûn ech-Charrât (4).

On est peu renseigné sur la vie du biographe Aboû 'Abd


Allah Mol)ammed b. Mol)ammed b. Mol)ammed Ibn 'AI-
choûn, surnommé ech-Charrât, né en 1035 (1625-26). Son

dans l'ouvrage de GiacobetLi à celle du traité d'el- 'Achmâwi, dont il sera


question plus loin.
(1) Lithographié à Fès en 1308, en même temps qu'ed-Dorr es-sanî du
même auteur.
(2) D'après el-Kattânî, Salwat el-anfâs , l, p. 3. 'Abd es-Salâm el-Qâdirî
serait également l'auteur d'un opuscule biographique sur l'historien Ibn
Abî Zar'.
(3) Ce début de dictionnaire existe à Rabat, Mss., 530 (5). Le litre rap-
pelle assez celui qu'el-lfrânî donna à son histoire sa'dienne. Il n'est pas
impossible que l'historien l 'ait emprunté à el-Qàdirî, par réminiscence
voulue ou inconsciente.
(4) BmLlOGRAPHlE. - el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 16'1; Illiqat · ed-
dorar, fol. 48 1'0 i el-Katlânî, Salwat el-anfâs, 1, p. 8; R. Basset, Rech. bibl.,
p.32, nO 86.
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 281

père était mort pour la foi dans une expédition qu'avaient


entreprise des mojâhidîn de Fès, sous l'impulsion d'el-
'Ayyâchî de Salé, contre les Espagnols d'el-Mahdîyya (1), en
ramaçlûn 1040 (avril 1631) (2). Lui-même passa sa vie dans la
fréquentation des illuminés et des ascètes et 'mourut à Fès '
le 7 $afar 11.09 (25 août 1697).
Les biographes marocains font peser sur ce personnage
une grave accusation: il se serait attribué la paternité d'un
recueil hagiographique consacré aux saints de Fès, écrit par
:Mol,lanlmed el- 'Arbî el-Qâdirî, dont a vu plus haut la vie et
l'œuvre : er-Rawrj el- 'âtir el-anf'cîs bi-akhbâr e$-$âlil:dn min
ahl Fâs; alors qu'à la vérité, il ne serait que l'auteur d'un
complément de ce dernier ouvrage, intitulé et-Tanbîh 'alâ
n'tan lam iaqa' bih min forjalâ' Fâs tanwîh.
L~accusation est déjà ancienne; c'est ainsi qu'on la trouve
dans le Nac1u' el-17'tathânî (3); et le strict et honnête el-Kat-
tânî a' donné à l'histoire, à deux reprises différentes dans sa
Salwat el-anfâs, une ampleur assez grande; il cite, pour
expliquer son indignation, un extrait d'el-Qâdirî qui ne
nlanque pas de saveur et qui, s'il est authentique" donne
une idée de ce qu'est au Maroc la propriété littérai l'e. - « Ibn
'Aïchoûn me demanda, dit :Mol,lammed el- 'Arbi el-Qâdiri,
d'établir un ouvrage résumé qui fût consacré aux saints de
'F ès et à leur histoire. J'acquiesçai à son désir et il me promit
de me payer la composition du livre. Je me mis à l'écrire
sur des cahiers de format petit in-quarto et les lui remis au
fur et à nlesure contre paiement. Je lui donnai ainsi en
quinze jours environ plus de trente cahiers écrits de ma
main, d'un texte ordonné, sans rature ni renvoi (4). J'y
avais consigné les biographies de soixante-dix-neuf saints, le
premier étant Sidi Darrâs b. Ismâ'ïl et le dernier, Sidi Maj-

(1.) Alors appelée par les Marocains el-Ma'moùra ou J-:lalq Sboù, et par
les Espagnols la Mamora ou San Miguel rie Uitramar. Cette expédition est
rapportée par el-Ifrânî, No z hat el-'.tddî, p. 267 du texte et 413 de la trad.
(2) Cf. el-Kattânî, Salwat el-anfds, 111, pp. '121-1.22.
(3) II, p. 1.09, 1. 1. 2 sqq.
(4) Il parait assez étrange que cet ouvrage, suffisamment étendu, ait pu
être composé pendant un laps de temps aussi court.
282 ' LES HOMMES ET LES ŒUVHES

bar. Je ne gaedai aucune trace de l'ouvrage. Très peu de


temps après - c'était en 1100 (1689) - je parlis en pèle-
rinnge et denieurai absent dix-sept mois et quelques jours.
A mon retour, je dus m~aliter et restai malade quatre ans,
pendant lesquels je ne rn'occupai que de moi. Puis, à ma
guérison, certain faqih lne fit savoir qu'Ibn <Alchoûn s'était
attribué la paternité de l'ouvrage et qu'il avait inscrit son
nom dans le préambule. Je fus vivement surpris. Je rencon-
trai ensuite Ibn <Alchoùn : il avait mon livre, mais écrit
d'une autL'e main que la mienne, en un ,volume de grand ,
format. J'y jetai les yeux; il portait son nonl comme nom
d'auteur. Ibn <Alchoûn y avait ajouté les biographies de son
père, de son chalkh Sidi f:Iamdoûn el-l\1alal).afi, de quelques
compagnons de Sidi Mas<oûd ech-Charrât et de quatre ou
cinq p_eesonnages de Fès con lem porains ... )) Interrogé par
el-Qâdirî, Ibn <A-Lchoûn rougit etdemeura sans répondre (1).
Il Y a de fortes chances pour que le passage cité par el-
Kattâni n'ait pas été inventé de toutes pièces, par lui ou
avant lui, par quelque autre biog,'aphe. La Salwat el-anlâs
ajoute que Mohammed el- <Arbi el-Qâdirî déeida de recom-
poser son ouvrage, mais que la mort l'empêcha de mettre
son dessein à exécution. Nous n'avons, de notre côté, aucun
moyen de savoir si l'histoire du vol d'Ibn <Aïchoûn doit être
, considérée comme véridique. Il est pourtant curieux qu'un
auteur qui fut presque le contemporain des deux person-
nages en cause, et dont la bonne foi ne semble pas suspecte,
ne souffe mot de l'aventure: el-Ifrâni, en effet, a utilisé le
Raw(l comme source d'information, et il en fait mention
parmi ses autorités sous le nonl d'Ibn <AIchoùn (2) .
Au surplus, que cet ouvrage soit de MO~lan1Lned el-Arbi el-
Qâdiri ou d'Ibn <AIchoûn ech-Charrât, il ne suffirait à la gloire
ni de l'un ni de l'autre. L'exemplaire que nous en avons sous
les yeux (3) porte que l'ouvrage fut tenniné en raluaçlân

(1) el-Kattâni, Salw a, t el-anfâs, lI, p. 347. Cf. aussi ibid., l, p. 8.


(2) el-Ifrânî: $afwal man intachar, p. 228, ligne 22. CL R. Bassel, Rech.
bibl. , p. 39.
(3) Ms. 389 de la bibliothèque de Rabat. La copie est elle-même assez
ancienne ('1203 = 1788).
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE nÉG. 283

1099 (juillet 1G88) ; « il fut, dit l'auteur, écrit dans un but


de piété». C'est un recueil exclusivement hagiographique,
qui comprend les biogl'aphies et le relevé des manâqib de
quatre-vingt-neuf saints de Fès, dont la plupart, moets aux
XVIe et XVIIe siècles, sont enterrés à l'extérieur de Fès, dans
le voisinage de Bâb el-FotoùQ. et de Bàb Gisa. A part quelques
gl'ands personnages célèbres, comme Idris, Aboû'l-MaQ.âsin
el-Fâsî ou AQ.med ech-Châwi, le plus grand nombre des saints
qui y sont mentionnés n'ont plus, à l'heure actuelle, grand re-
nom dans la capitale. La biographie de tous a d'ailleurs été re-
pl'ise en détail par el-Kattânl, de sorte que l'on n'a pas gl'and
profit à attendt'e du RawrJ pour l 'histoire hagiographique du
:Maroc.

Mo1).ammed et-Tayyîb el-Fâsî (1) .

Aboù \ <Abd Allah Mol,lammed et-TaY'yib b. :MaQ.ammed


était le petit-fils de <Abd el-Qâdir el-Fàsi. Il naquit à Fès en
1064 ou 1068 (1653-58) et se montra dès sa jeunesse digne
de la famille de savants à laquelle il appartenait. Son père,
son gt'and-père, son grand-oncle MoQ.ammed el-Mahdi et
son oncle <Abd e r-RaQ.mân présidèrent à son instruction . Il
eut aussi COlnme 111aitre AbotL Sàlim el- <Ayyàchi, l'auleur de
·la ril;la, et reçut une ijâza de Nlol,lammed el-Khirchi (2) . Il
enseigna bientôt lui-même et eut un grand nombre de dis-
ciples. En 1103 (1692), il fut désigné par le sultan Moulay
Ismâ<ïl pour faire partie de l'ambassade envoyée à Alger
afin de conclure une trêve avec les T'ures, à la suite de la
défaite de l'armée nlarocaine à el-Machâei<, sur le Wâdi
:M olwlyya. Cette alllbassade comprenait le propre fils du

(1) BlBLlOGRAPIIlE. - el-Qàdid, Nachr el-malhâI1 L, Il , p. '167; lltiqât ed-do-


rar, fol. 50 1'0; el-I altàni, Salwat el-anfcis, [, p. 318; R. Basset, Rech. bibl. ,
p. 33 , nt) 89.
(2) Aboû <Abd Allah Mol;lammed b. <Abd Allah cl-Khirchî, jurisconsulte
égyptien, auteur d'un commentaire très connu du Mokhla~ar de Khalil.
Mort en '1101 (1690). Cf. el-lfrànî, $afwat man intachar, p. 205; el-Jabartî,
<i\jd'ib el-cithcir, J, p. 65; el-Qùdirî, Nachr el-mathâni, Il , p. '137; llliqât ed-
dorar, fol. 41, 1'0; Brockelmann , Ar. IW. , H, p. 8~, n. et 318.
28~ LES HOMMES ET LES ŒUVRES

sultan, Moulay 'Abd el-Malik, le secrétaire lVIol,lammed el-


Wazir el-Ghassânî et plusieurs hauts fonctionnaires de la
cour de Meknès. Pendant l'absence des envoyés, le bruit
courut pendant une journée qu'ils avaient été assassinés,
mais le lendemain, la nouvelle fut démentie (1). Mol,lammed
,et-Tayyîb vécut encore dix années et mourut, du vivant de
son père, le 19 rabr II 1113 (23 septembre 1701 ). Il fut en-
terré près du tombeau de son grand-père 'Abd el-Qâdir,
dans la zâwlyya des Fâslyîn, au quartier d'el-Qalqaliyln.
Ce personnage n 'a pas laissé un nombre d'œuvres consiJé-
rable. Il se chargea du soin d'établir la fahrasa de son père,
à laquelle il donna le titre de Ashal el-maqâ~icl li-l:âliat
el-machâ'ïkh wa-l'at el-asânîcl el-wâqi'- a fi marwîyyat chai'-
khinâ'l-wâlicl. Il avait également entrepris d'écrire un diction-
naire biographique du XIe siècle de l' Hégire; il le com-
mença, l'intitula 1I1at17zal; en-na:;,ar wa-marsal el-'ibal' bi'dh-
clhikl'â bi-man ghabar min altl el-qarn el-I;âclî 'achar, mais
n'en poursuivit la rédaction que jusqu'à l'année 1013 : la
dernière biographie complète que l'ouvrage contenait était
celle de l'ancêtre de l'auteur, Aboû'l-Mal,lâsin, immédiate-
ment suivie du début de celle de Sidi Al,lmed ech-Chàwî (2).

Mo~ammed el-Wazîr el-Ghassânî (3).

L'un des membres de 'l'ambassade envoyée par :M:oulay


Ismâ'Il à Alger avec Mol,lammed et-Tayyîb el-Fâsi venait,
quelques mois auparavant, de s'acquitter d 'une mission po-
litique en Espagne. Ce secrétaire, qui s 'appelait Abou 'Abd
Allah Mol,lammed, dit f:Iammo, b. 'Abd el-Wahhâb el-Wazir
el-Ghassânî, appartenait à une vieille famille andalouse

('1 ) Cf. el-Qàdirî, Nachr el-mathâni , loc. cit.; en-Nâ!?irî, Istiq~ â , IV , p. 38;
A. Cour , Etablissement des Dyn., pp. 203-204.
(2) Ce d ernier r enseignement, d 'après el-} atlânî, Salwat el-anfâs, J,
p. 279, 1. 22-23.
(3) BlBLlO GRAPlIlE . - eL-Qàdirî, Na chr el-mathànî" II, p. 180; lltiqât ed-
dorar, fol. ~5 yO ; el-Kattàni, Salwal el-anfàs, III, p. 288; el-Fol).aïli, ed-Do-
rar el-bahîyya, [J, p. 360.
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 285

émigrée au Maroc à la fin du Moyen Age. C'était en même


temps un lettré et un bibliophile. Après avoir exercé sa
charge à la cour de Meknès pendant plusieurs années, il
mourut à FÀs, en 11 19 (1707-08).
C'est à la fin de 1101 (1690) que Mol,lammed el-Wazîr avait
été chargé par le sultan Moulay Ismâ'ïl de se rendre en Es-
pagne afin de négocierîe rachat des captifs musulmaps dé-
tenus dans ce pays, et, en même temps, d'essayer de rap-
porter les ouvrages arabes qui avaient pu rester dans les
anciennes n10squées andalouses. Arrivé à Ceuta, le 15 mû-
l,larram 1102 (19 octobre 1690), l'ambassadeur traversa le
détroit et débarqua à Gibraltar, puis se dirigea à petites
étapes su r Madrid, où il arri va le 7 rabr II de la même an-
née (8 janvier 1691 ). Il eut plusieurs entrevues avec le roi
Charles II, puis rentra dans son pays, où il écrivit, pour
.commémorer son séjour dans la péninsule, une relation de
voyage qu'il intitula Rihlat el-wazîr fî iftikâk e1.-asîr (1).
Ce journal de route est bien connu depuis la publication
.de la traduction partielle qu'en donna Sauvail'e en 1884 (2).
Il se lit avec intérêt et l'on se représente, l'esprit amusé, les
-ébahissements successi{s du sect'étaire marocain en présence
des hauts personnages de la cour espagnole: ceux-ci fil'ent
tous leurs efforts pour laisser il leur hôte une forte impres-
sion de raffinement et de courtoisie et lui montrèrent par
le détail tout ce qui pouvait exciter sa cUI'iosité. EI-Wazîr el-
'G hassâni excelle, au surplus, dans ses descriptions, et ce ne
serait pas hausser par trop la valeur de son livre que de dire
qu'il contient certaines données, évidemment vues sous un
angle assez étroit, mais par cela même curieuses, sur la so-

(1) J'en possèd~ une copie faite sur un exemplaire provenant de Salé.
(2) Voyage en Espagne d'un ambassadeur marocain (1690-1691), traduit
<de l'arab e par H. Sauvaire, Paris, 1881, in-12, La traduction de Sauvaire
.a été [aile d'après deux: manuscrits provenant du fonds Gayangos. Il est
.curieux qu'aucune de ces copies ne porte les dates que nous avons four-
nies plus haut (a rriv ée à Ceuta, arrivée à Madrid) et qui figurent dans
notre copie. Le traducteur a basé sur des - événements contemporains du
:séjour de l'a mbassade ur en Espagne et signalés par lui , la date qu'il a
indiquée dans son titre, et qui se trouve exactement vérifiée.
286 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

ciété al'istocratique et la cour espagnoles à ]a fin du


XVIIe siècle (1).
Il est dommage, par contre, que l'ambassadeur n'insiste
pas davantage sur les causes qui motivèrent sa mission. C'est
un problème encore assez obscur que celui des rédemptions
ou des échanges de captifs entre le Maroc et les nations de
l'Europe méditerranéenne jusqu'à la fin des tem ps nl0dernes;
et il eut été souhaitable d'ètre fixé par el-Wazir el-Ghassâni
sur les accords qu'il fut vraisemblablement chargé de faire
aboutir.

A~med el-l:Ialabî (2).

Sirâj ed-Dln Aboù'l- Abbâs Al).med b. Abd el-Baï el-Balahi


t t

ét.ait, comme l'indique son ethniq ue, originaire d'Alep. Il na-


quit dans cette ville, mais passa la plus grande partie de sa vie
à Fès, où il mourut. En effet, après avoir fait ses études en
Orient et suivi principalement les cours d'un grand savant
d'el-Ba~ra, Mol).ammed er ·Rifâ'J, el-I)alabi vint au :M aroc et
arriva dans la capitale en 1080 (t669-70). Là, comme il appar-
tenait au rite chùfi Cite, il11e prit guère part aux discussions
de droit des docteurs mâlikites: mais il se réyéla un lettré
de premier ordre. Ses vers, des séances qu'il composa à la
manière d'el-t{arlri, lui valurent la notoriété et les félicita-
. tions des savants marocains les plus réputés. Il demeura dès
lors à Fès, sans songer à retourner dans son pays natal; il Y
mourut en jomâdà II 1120 (18 août -15 septembre 1708) et
fut enterré à l'extérieur de Bâb el-FotoûlJ..
L'œuvre d'el-Balabi est surtout littéraire et comporte une
grande majorilé de panégyriques du Prophète (3). :Mais ce

('1) Cf. infra , la relalion d 'el-Ghazzàl, quelques années plus tard.


(2) BIBLIOGBAPHlE. - el-'Alamî, el-Anîs el-motrib , pp. 6-19; el-Qâdirî ,
Nachr el-mathânî, 1[ , p. 185 ~ Illiqdt ed-dorar, fol. 57 1'0; el-K.atlânî , Salwat
el-anfds, II, p. -161; H.. Basset, Rech. bibl., p. 28, nO 79, Ben Cheneb, Revue
des Ouvrages arabes (1322-1323), pp. 293-295.
(3) Voici la liste de ses œuvres: 1° Dîwdn; 2° Recueil de séances inlilulé
el-~{olal es-sondosîyya fi madl.t ech-chamâ'ïl el-mo~tammadîyya (Rabat, 1I1ss. ,
346-347); 30 Kachf et-lithdm 'an 'arci'ïs ni'am Allah ta'dld wa-ni'am rasoù-
LES BIOGRAPHES D xn c SIÈCLE HÉG. 287

Syrien émigré au :Maroc se classe parmi les hagiognlphes du


pays par un ouvrage qu'il consacra aux 17umâqib d'Idris H
et qui s'appelle ed-Dorr en-na/ls wa'n-noûr el-ants ft manâ-
qib el-imcun ld/'ls ben Idl'Îs (1). Cette compilation établie
d'après des sources arabes anciennes (2) forme la « légende
dorée» complète du fondateur de Fès et de son père.
Peut-être el-f:Ialabi se livra-t-il à ce travail pour, marquer
son attachement à sa patrie d'adoption, en l'honorant dans
la personne cl u plus illustre de ses saints ~ peut-être aussi
faut-il voir dans ed-Dorr en-nafîs une preuve de plus de
l'extensiol1 que prit, par réaction contre le pouvoir cen-
tral, le culte idrisite à partir du XVIIO siècle, culte au dévelop-
pement duquel, par une manœuvre habile, les sultans CaJa-
wites participèrent eux-mêmes bientôt (3). Quoi qu'il en soit,
en écrivant cet ouvrage, le savant étranger était sûr de ga-
gner la bienveillance du plus grand nombre des chorfa de
la capitale.

Ibn Zâkoûr (4).

Aboû 'Abd Allah Mo1).an1l11ed b. Qâsim b. Mo1).ammed


b., 'Abd el-Wâ1).id b. A1).med Ibn Zâkoûr el-F àsi fut avant

lih 'alaihi's-saldm; ft,o es-Sai! e!j-!jaqîl ft"l-inli~dr li-mad~L er-mbb el-jalil;


50 Fatl), el-fattâl), 'ala mardlî' el-arwdQ, (commenlairo d'un de ses poèmes) ;
6 0 lI1i'rdj el-wosoûl fi'ii-~alâl 'ald akram nabî wa-rasoûl; 70 .Uandhil e~-~afd'
fî jamdl dhâl el-mo~tafd; 80 Mandhil ech-chifd ft' roû't'yyd'l-mo$tafâ; 90 er-
Rawcf, el-bassdm fi roù't'yyri ghairih 'alaihi's-saldm; '10 0 es-Sai! el-masloùl
fi qat' awddj el-falloûs el-makhdhoûl; /1 t 0 el-[(onoùz el-makhloLima ft' sa-
ma~wt el-maqsoûma li-hadhihi'l-ommat el-tnarQ,oûma; '12 0 Rail),dn el-qoloùb
Jt'-md li'ch-chaUch 'Abd Allah el-Barndwî min asrdr el-ghoyoùb; 13 0 ed-Dorr
en-naft's.
('1) Lithographié à Fès en 1300 et 131ft,.
(2) M. R. Bassel a donné, op. cit., loc. cit., la liste des sources et un l'é-
umé de l'ouvrage.
(3 ) C'est égalemenl à celte époque qu'apparaît, dans la littéralure et
l'épigraphie marocaines, l'expression ~~..J~}I\ ~ ~\ (1 la capitale
iddsile », par laquelle on désigne toujours, d'une façon courante, la ville
de Fès. Cf. A. Bel, Inscriplions arabes de Fès, p. 11.
(ft,) BLBL10CHAPUlE. - el-'Alami, el-Anis el-motrib, p. 19 sqq.; el-Qùdirî,
288 LES HOMMES ET LES ŒU VRES

tout un voyageur et un lettré épris de culture classique. Il


naquit à Fès vers le Inilieu du XVIIe siècle et se livra de bonne
heure à l'étude, dans sa ville natale, où il reçut l'enseigne-
ment de docteurs célèbres, comme <Abd el-Qâdir el- Fâsi,
Mol;tammed el-Mahdi el-Fâsî, <Abd es-Salâm el-Qâdirî, el.
ijasan el-Ioûsi, le qâdî Bordola (1), Mol;tammed el-Qosan-
tinî (2) yt A~med Ibn el- f:Iâjj (3). Il alla ensuite à Tétouan
suivre les cours du professeur el-f:Iâjj <Ali Bal'aka (4), et, à
Alger, ceux de Nlol)ammed Q(\ddoûra (5), qui lui délivra une
ijâza dans la première décade de rajah 1094 (26juin - 5 juil.-
let 1683). Il passa toute sa vie à composer des ouvrages,
entre autres un dtwân poétique et des commentaires de
poèmes classiques. Il mourut à Fès le 20 mo1).arram 1120
(11 avril 1708) et fut enterré en dehol's de Bâb Gîsa.
Parmi l'œuvre d'Ibn Zàkoûr (6), il Y a lieu de nlentionner

Nachr el-malhrinî , n , p. 186; Illiqât ed-dorar, fol. tn V O ; el-} aLLànî, Salwat


el-anfds,UI, p. 179, in fine ; 10çammed es-Sà'fl:t, el-Monlakhabdl el-<abqa-
rîyya, p. 58; H.. Ba set, Rech. bibl., p. 13, nO 18.
(1) Aboù <Abd Allah Mo"Q.ammed el-<Arbi b. A1).med Bordola (suivant la
Salwal el-anfds; Bordala, suivant le Nachr el-mathdnî ) el-Andalosî el-
Fâ î, mufti, qârf,i'l-jamd<a, puis nâ;ir des 1).oboùs à Fès, né le 2 jomâdâ II
1042 115 décembre 1632), mort le 15 rajab 1.133 (12 mai '1721) et enterré
en dehors de Bâb Gisa. Cf. el-Qâdid, Nachr el-malhdnî, JI , p. 200; lltiqdt
ed-dorar, fol. 61 V O; el-} altànî, Salwat el-anfds, ru, p. 138; en-Nâ~jrî, Is-
tiq~d, [V , p. 43.
(2) Aboù <Abd Allah Mo1).ammed b. A"Q.med el-Qosan~înî el-I;Iasanî, sur-
nommé el-Kammâd, originaire de Constantine et émigré à Fès où il se
consacra à l'enseignement. Mort en 11'16 (i704-17 05). Cf. el-Qàdirî, Nachr
el-malhdnî, IL, p. '174; Illiqdt ed-dorar, fol. 54 va.
(3) Cf. supra, p. 277, n. 3.
(4) Aboù'l-tlasan <Ali b. Mo1).ammed Baraka el-Ti~tàwanî el-Andalosî,
disciple de MaJ;tammed Jbn Nù~ir, vécut à Tétouan, où il mourut le
29 chawwàl 1120 (10 janvier 1 70~ ) . Cr. el-Qàdirî, Nachr el-mathdnî, II,
p. 184; Iltiqdt ed-dorar, fol. 57 l'0.
(5 ) Aboù <Abd Allah Mo1).ammed, fils du célèbre Aboù <OLhmân Sa<ïd
Qaddoùra el-Jazà'ïri, mufti d'Alger, mort dans celte ville, d'après el-Qâ-
dirî, le 5 dhoù'l-qa<da '1098 (12 septembre 1687). cr. el-Qùdiri , Nachr el-
malhdm', II , p. 93; Jlliqdt ed-dorar, fol. 40 1'0; Joachim de Gonzalez,
Essai chronologique sur les Musulmans célèbres de la ville d'Alger, p. 20; el-
~lafllàwi , Ta<rij el-khalaj bi-rijdl es-salaj, 11, p. 382.
(6) Ce sont, en plus des trois ouvrages mentionné plus bas: 1° Glose
LES llIOGRAPHES DU Xli tJ SIÈCLE HÉG. 289

ICL un travail de généalogie chérifienne consacré aux des-


cendants du 'maître du Jabal el-'Alam, ~Moulay 'Abd es-Sa-
lâm b. Machich, intitulé el-/stisfâ' min el ·'âlam bi-dltikrâ
âthâr $âl;ib el-'Alam, dans lequel il donne la liste des pa-
rents du saint et celle des villages montagnards actuelle-
ment habités par les chorfa, ses descendants; une sorte de
fahrasa, où il se fit le biographe des savants de Tétouan et
d'Alger 'qui lui accordèrent des licences, Naclu' azâhir el-
bostltn (t-nuln ajâzant bi'l-Jazâ'ïr wa-littawân min forjalâ ' el-
akâbir wa-l a'ïân (1) ; enfin, un opuscule historique qu'il
appela el-Mo'l'ib el-lnobîn 'ammâ tarjanunanalw el-Ants el-
mo{rib wa-RawÇlat en-nisrln (2), qui, comme on en peut ju-
ger par le titre, est une sorte de complément du Rawl)
el-qi/'tâs d'Ibn Abi Zar' (3) et de la Rawrjat en-nisl'În d' Ibn
el-AQmar (4).
Le kfo'rib, qui comprend à peine une trentl;l.ine de feuil-
lets, fut terminé par Ibn Zâkoûr à la fin du mois de rab!' 1
1097 (24 février 1686) . L'auteur avertit le lecteur dans son
préambule, qu'il voulut compléter les deux chroniques des
anciennes dynasties marocaines, par l'indication des dates
de décès des personnages notables qui vécurent au cours
des périodes étudiées pal' ses prédécesseurs. Mais, suivant

sur la Khaz rajiyya; 2° Glose sur les Qalâ'ïd el-' iqiân d'el-Fatl). Ibn Khâqân;
3° Commentaire en trois volumes de la lfamâsa d'Aboû Tammâm; 40 Dî-
wàn intitulé er-Rawq, el-ârîq, fî badî' el-tawchîl), wa-montaqâ'l-qarîq, ;
5° Commentaire de la Lamîyyat el-'Arab d'ech-Chanfarà; 60 Commentaire
de la BadNyya de ~afî ed-Dîn el-J:Tillî; 70 Commentaire d'el-Maq~oûr wa'l-
mamdoûd d'Ibn Màlik; 8° Urjoù z a de tawqît; 9° Anfa' el-wasâ'il fi ablagh
el-kho?ab wa-abda' er-rasâ'ï[; 10° el-E;Iollal es-sfard' fi l),adîth el-bar'd' ;
11 ° ed-Dorrat el-maknoûna fî ladhyîl el-orjoûza (appendice à l'orjoûza
d'Ibn Sînà' sur la médecine) ; 12° Mise en vers d'el- Waraqât de l'Jmâm el-
~Iaramaïn , etc.
(1) Imprimé à Alger en 1319.
(2) Un exemplaire de cet opuscule est conservé à la bibliothèque de
Rabat. CL l'incipit dans nos Manuscrits arabes de Rabal, nO 498 12), p. 215.
(3 ) On sait que le titre exact de cet ouvrage est el-Ani's el-mot;ib bi-rawq,
el-qirtds fi akhbâr moloû/c el-Maghrib wa-tâ'rîkh madînat Fâs.
(4) (~e projet d'écrire un complément au Rawq, el-qirtâs et à la Rawq,at
en-nisrin devait être repris peu de temps après par el-Ifrânî, qui, d'ail-
leurs, ne le mit pas à exécution. Cf. supra, p. '123.
19
290 LES HOMMES ET LES ŒUYRES

le procédé ordinaire des historiens de son époque, il entre-


mèla ses wafayât d'un récit très bref des dynasties idrlsite ,.
maghrâwite, almoravide, almohade et mérinide, s'arrêtant
exactement àl'année 803 (1400-01), avec le rappel de lamort
de MoI:tammed b. :.\Iol,lammed Ibn <Arafa de Tunis. Ce petit
texte, qui, on le voit, oHre surlout un intérêt biographique~
mériterait néanmoins d'être publié (1).

el- Wallâlî (2).

Les biographes marocains du XVIIIe siècle empruntent


assez so uvent des informations à un savant de .l \Ieknès,
Aboù'l- <A bbâs A1).med b. l\lol).ammed b. Mol,lammed b.
la <qoù b el-\Vallâli (3) , profes eur à la mosquée du palais \
de Moulay Ismâ <:d, mort dans celte capitale le 2 rajab 1128
(22 juin 1716.). Il fut initié au '$oùfisme par l).mcd el-
lamant (4), Al,lmed Ibn <Abd Allah Ma<an (5) et s'urtout pal'
Mol;tammed b. <Abd Allah es-Soù~l (6), dont il fut pendant
longtemps le disciple. Il composa différents ouvrages (7),

(1) NeÎgcl, dans la Revue du Monde Inusulman, t. XXIV, p. 296, signale


d:lJ1s la bibliolhèquc d'Aboù'l-Ja<d ITùdlù), un manu crH : « '-:'" J1..~.J\

,-:""j;~J\ 0:1 )\..... )~\ ~ ,·par Mohammed ben Qacem ben Zakour
Fasi (IlisloÎre d s sultans au Maroc, descriplion de Fès). Ouvrage composé
vers l'année 1200. » Sans autre indication. Il doit s'agir vraisemblable-
lllcnt d'u ne copie d'el~Mo <rib el-mobîn.
(i) B1BLLOGHAPIIiE. - el-Qàdiri, Nachr el-mathdnî, II, p. 194; Iltiqdt ed-do-
/' Il'' .fol. 59 vO; R. Basset, Rech. bib(, p. 31, U O 80.
(3 ) 11 était originaire des Bani Wallùl, fraction des AH <A~t.â (confins de
la haute vallée de la Molwiyya).
(4) Cf. snpl'a, p. 276, nole 3.
(J) cr. sup/'a, p. 276, note 4.
(6) Sur ce personnage, mort en 1079 (1668-i669) à la Mekke, cf. el-Qâ-
did, Nachr el-mathânî, [, p. 269; Illiqdt ed-dorar, fol. 28 l'0.
,(7.) Ce sonl: 1° un commentaire du Mokhta~a/' d'es-SanoÛSl sur la 10-
giLjuc; 2° un commentaire d'es-Sollam d'el-Akhçlari; 30 un commenlaire
(l'el-Jomal d'el-Kha.vinji; 40 un commentaire de la Risâla d'el-Jorjànî;
;)0 un commelltaire de la khotba du Motawwal d'et-Taftàzânî sur la rhéto-
LES BIOGRAPHES DU XIl c SIÈCLE nÉG. 291

parmi lesquels une liste biographique des grands person-


nages mystiques qu'il rencontra; elle s'intitulait ~fabâ~'lith
el-anwâr ft ak/lbâr ba' (l el-aklziâr et semble être aujourd'hui
perdue.

A~med Ibn Nâf?ir (1).

Al.uned b. Mal).all1med b. Mol).ammed Ibn Nâ$ir ne doit


rien de ' son immense renommée marocaine à l'œuvre qu'il
a laissée et qui le range ici aux côtés des autres biogeaphes.
On sait, en effet, qu'il fut le véritable organisateur de la si
importante branche châdhiLite du Sud-Marocain, dite con-
frérie nâ$i/'îyya (2), en même telnps que l'auteur d'une rela-
tion de voyage aux lieux saints de l'Islâm.
Il naquit à Tamgroût, siège d'une zâwîyya depuis long-
temps célèbre (3), le 18 ramaçlân 1057 (17 octobre 1647 ), et y
fit ses études sous la ' direction de son père Mal).ammed (4) ,
auqueL il succéda comme chef de la zâwlyya, quand ce del'-
nier mourut, en 1085 (1674) ; il eut aussi comme maîtres
Aboù Sâlim el- <Ayyâchi et divers autres savants du sud du
Maroc. Il avait fait son premier pèlerinage avec son père,

rique; 6° un commentaire du Tallihlfj el-mifld(i d'el-Qazwînî; 70 un


commentaire des lIfaqdfjid eHâlibîn fî ofjoûl ed-dt'n d'el-Taftàzànî; 8° un
commentaire de la Lâmîyyal el-af'âl d 'Ibn Mâlik; go une glose sur le
commentaire d'el-Mal,lallî sur le Jam' 'e l-jawâmi'; 100 un commentaire ::iue .
la Rawq,al el-azhdr d'el-Jàdirî.
(1) BlBLIOGB.APHIE. - el-Ifrâni, f$afwat man intachar, p. 221; e1-Qàdiri,
Nachr el-mathâllî, II, p. 196; Illiqdt ed-dorar, fol. 60 rO; el-K.altàni, Sal-
wal el-allfds, 1, p. 264; en-Nâ~iri, ratal el-mochlarî ff'n-nasab el-ja'fari,
Il , p. 17 sqq., el Isliqfjd, IV, p. 53.
(2) Sur la tarîqa des à~ir.iyya, cf. la bibliographie européenne cilée
par W. i\Iarçais, Textes arabes de Tanuer, p. 133 n. 2, et E. Lévi-Provençal,
Un Chaltl poplllaire religieu x du Dje.bal marocaill, in Revue africaine, 1918,
p . 242, et, en plus, M. Bodin, la Zaouia dé Tamegroul, in Archives ber-
bères, 1918.
(3) Sur cette zâ wiyya, cf. supra, p. 99, n. 1.
(4) ur Mal;t.ammed b. Mol,lamm ed Ibn Nà~ir, cf. el-Ifrânî, $afwal 'm.an
inlachar, p. 173; el-Qùdir.i, Nachr el-mathdllî, JI, p. ·1.6; llliqdt ed-dorar,
fol. 32 1'0; el-Kattc\ni, Salwal el-anfâS', 1,- p. ,261; en-Nà~irî, Tal'al el-moch-
Lad, l, p. '162 sqq., el Istiqfjà, IV, '5 0~ ..
292 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

à l'âge de dix-neuf ans; i l accomplit encore trois fois, par


la suite, ce devoir religieux; ses voyages lui permirent
d'ailleurs d'ol'ganiser des filiales de sa confrérie dans tout
le nord de l'Afrique et mème en Egypte. Il reçut au Qaire,
ainsi qu'à Médine, un grand nOlnbre d'ijâza. En relations
suivies avec le sultan Moulay ISlllâtïl, dont il ne voulait pas
d'abord reconnaitre la souveraineté, il forma de nombreux
disciples dans sa zâ wlyya et mourut à Tamgroût, le 1~ l'abC
1 1129 (3 mars 1717) (1) . Il fut enterré dans le sanctuaire,
pl'ès du tombeau de son père.
L'ouvrage d'Ibn Nâ~ir, assez volumineux (2) , relate le
voyage que ce personnage fit à la Mekke et à Médine en
l'année 1121 (1709-10). Il Y avait déjà deux ans qu'il se pré-
parait à partir, mais le sultan n'avait accordé à aucun de
ses sujets l'autorisation du voyage. Cette /'if:z,la comprend,
comme celle d'el- tAyyâchl, des renseignements d'itinéraires
et de fort nombreuses indications sur les savants d'Egypte
et d'Arabie qui acquirent de la célébrité au d ébut du
XVIII e siècle. Malgré la personnalité re.l igieuse de l'auteur ,
elle parait avoir joui au l\Iaroc de moins de vogue que la
première.

A4med Ibn tAtîyya (3).

C'est encoee nn mystique et un biographe de ~oûfis


qu'Aboù'l-tAbbâs Al).med h. Nlal).ammed el-f:lârithi b. Ma-
1)ammed Ibn tAt1yya ez-Zanâtî el-Andalosi es-Salâwî el-
Fâsi, qui fut l'é lève de son grand-père paternel (4) et de

(1) La $afwat man inlachar donne la date du 23 rabi t l 1128, qui est
probablement erronée.
(2) Elle a été lithographiée à Fès en 1320 (2 vol. ). Une traduction par-
tielle (de Tamgroùt à Tripoli et retour) a été publiée par A. Berbrugger
à la suite d'un fragment d 'el-tAyyàchî (Explor. scient. de l'Alg., .sciences
hist. el géog,.., IX), p. '16;> sqq. Cf. supra, p. 262, n. 3.
(3) BlBLIOGl\APHIE. - el-Qàdirî, lltiqât ed-dorar, fol. 43 rO; el-KaUànî,
Salwal el-anfas, l , p. 371; R. Basset, Rech. bibl., p. 43 , nO 119.
(4) Mal).ammed b. Mol;tammed Ibn tA~îyya, mort en 10;>2 (1642-1643),
sur lequel cf. el-Ifrànî, $afwat man inlachar, p. 80 ; el-Qàdirî, Nachr el-
LES BIOGRAPHES DU XII e SIÈCLE HÉG. 293

<AB b. <Abd er-Ral)rnân ed-Dara<i (1). Il composa deux


ouvrages médiocrement écrits, l'un, de petite étendue, inti-
tulé et- Tafakkor wa' t-t tibâr ft tâ' rtkh el-lJ!lo$fafâ wa-ba< rJ
a$bâbih el-akltiâr wa-man atbu<a!zOln min el- <olamâ' es-sâdât
e$-$oûftyyat el-abl'âr (2), et un autre, plus important, el-
Anwâl' fî dhikr !artqat es-sâdât e$-$oûjîyyat el-akltiâr. Il
mourut, au dire d'el-Katlùni, le 18 rab1' II 1129 (1er avril
1717), la même année qu'Al)mcd Ibn Nà~ir.

el- < Omaïrî (3).

En 1131 ( 1718-1~ ), mourut à Meknès un savant orlglnail'e


du Tâdlâ, Aboû 'Othmân Sa<ïd b. Aboù'l-Qâsim el- 'OmaL1"Î,
qui avait été l'élève d'el-IoûsJ' ; remarqué par le sultan
Moulay Ismâ<ïl, il fut attaché à la mosquée du palais impé-
rial en qualité de mufti et de professeur. Il fut également
qâ~l de la nouvelle capitale (4) . Il n'a laissé qu'une jaltl'asa,
qui donne, en plus du texte d'un certain nombre d'ijâza,
quelques renseignements historiques, utilisés par les
annalistes postérieurs, sur le règne du grand sultan'
<alawite (5).

lnathdllî, l, p. 184; Illiqât ed-dorar, fol. 17 rO; el-KaLtânî, Salwat el-anfâs,


l , p. 369.
(1) Aboù'I-T:Iasan 'AH b. <A bd er-Ral).mân b. Al:tmed b, la'qoûb b. !3àlil,l
b. 'Ali ed-Dara'î et-Tâdilî, saint réputé au Maroc , mort en rabi' 1 1091
(avril '1680) et enterré dans sa zâwîyya du Jabal Tamojjot, dans le Tàdlâ.
Cf. el-Qâdiri, Nachr el-malhânî, II , p. 75; el-[ attâni, Salwat el-anfds, l,
p. 183. Mal).ammed el-Manâlî ez-Zabâdî lui a consacré une monographie.
Cf. infra, p. 334.
(2) Cet opuscule aurait été terminé le 18 rabî' JI 1'111. (13 octobre 1699).
El-Qâdirî, qui mentionne cet auteur parmi les personnages du XIe siècle
de l'Hégire dont il ignore la date exacte de décès, donne comme d ate du
même opuscule l'année 1096 (1685 ).
(3) BlBLIOGRAPHIE. - el-'Alamî, el-Anî~ el-motrib, p. 19; el-Qâdirî, Nachr
el-mathânî, II , p. 197; Iltiqdt ed-dorar, fol. 60 1'0; B. Basset, Rech. bibl.,
p. 1.9, nO 39.
(4) Son frère, Aboù'l-T:Iasan 'Ali, fut vizir de Moulay el-Mosta<;lî.
(Q) Cf. par exemple, e ll-Nâ~irJ, I~li'Hri, ) V, p. 31: in fine,
294 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Al)med el-Qâdirî (1 ).

Aboù'l-'Abbàs et Aboù'l-FaQJ Al).med b. 'Abd el-Qâdir b.


<Ali ('Allâl) b. Al;uned b. Mol).ammed el-Qâdiri, qui appar-
tenait au gl'oupe de chorfa qâdirlj'in installès à Fès, naquit
dans cette ville en 1050 (1640-41); dès son adolescence, il
se consacra à l 'é tude, m~na une vie ascétiqup. et prit, à plu-
sieurs reprises, les armes pour la guerre sainte. En 1083
(1672-73), il partit en pèlerinage et demeura au Qaire envi-
ron sept ans: il y suivit l(-'s leçons des fameux commenta-
teurs de Khalil, 'Abd el-Bâq L ez-Zorqânî (2) et Mol).ammed
el-Khirchl (3) . Les descendants de 'Abd el-Qâdir el-Jilânî
installés en Egypte l'iniLièrent en même temps à la doc-
trine qàdirite. Après un séjour à Fès, il repartit pour
l'Orient en 1100 (1688-89), en compagnie d'Al).med Ibn 'Abd
Allah :l\1a'an (4), dont il fut le disciple assidu, et y séjourna
Je nouveau quelque temps. Il mourut à Fès le 19 jomâdâ 1
1133 (18 mars 1721) et fut enterré en dehors de Bâb el-
Fotoûl)..
Al).med el-Qâdiri a laissé une ribla, qui est surtout
une biographie et un recueil des manâqib de son saint
compagnon de route, pendant son second pèlerinage;
elle s'intitule NasCllnat el- 'âs ft biJ/al sayyîdinâ Abî' l-
'Abbâs (5).

('1) BIBLIOGRAPHiE. - el-Qàdirî, Nachr el-mathdnî, II, p. 201 ; Iltiqdt ed-


dorar, fol. 61 vO; el-Kattâni, Safwat el-anfds, 11, p. 353; R. Basset, Rech.
bibl., p. 28, nO 75.
(2) 'Abd el-Berqi b. Ioûsof ez-Zorqânî, savant jurisconsulte du Qaire, né
en 1020 (1611), mort dans celle ville le 24 ramaçlân 1099 (23 juillet '1688),
Cf. e~-Ifrànî, $afwat man. intachar, p. 204; el-Qâdirl, Nachr el-mathânl, H,
p. 105; Iltiqât ed-dorar, fol. 40 vO; el-Jabarlî, 'Ajd'ïb el-âthâr, 1, p. 66;
Brockelmann, Ar. litt., II, pp. 84 et 318.
(3) Cf. supra, p. 283, n. 2.
(4) Cf. supra, p. 276, .n. 4.
(5 ) Il en rédigea aussi un résumé (ikhli$âr). Il composa, en plus, divers
opuscules en prose et en vers, ainsi qu'un poème sur les compagnons du
Prophète, lors de la fui le des Mohàj iroûn en Abyssinie.
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 295

Mal.tammed b .. Abd er-Ral].mân el-Fâsî (1).

Aboû 'Abd Allah nlal).an1med b. 'Abd er-Ral.lmàn b. 'Abd


el-Qâdir el-Fâsl fut un digne émule de son père et de son
grand-père. Né à Fès le 19 jomâdâ II 1058 (11 juillet 1648),
il fit de très complètes études musulmanes, sous la direc-
tion de 'Abd el-Qâdie, de son père et de son oncle Ma1}am-
n1ed. Il reçut une ijâza d'el-' \yyâchl et, au cours d'un
voyage de pèlerinage, obtint d'autres licences d'el-Khirchi,
cl' ez-Zorqâni et
d'ech-Chahrazoûrl. Il fut à son époq ne l'un
des savants les plus distingués de la capitale et eut de
nombreux élèves, parmi lesquels l'historien el-Ifrâni. Sur
la fin de sa vie, il fut, con1me son père; atteint de paralysie
et nlOurut au milieu de l'année 1134 (1722) (2) ; il fut ense-
veli dans la zâwiyya de son grand-père, au quartier d'el-
QalqaUyin, à Fès. On lui doit quelques ouvrages (3), dont le
plus intéressant paraît être une fahrasa qu'il appela el-1I1inaf;
el-bâdtyya ft'l-'âsânld el-'altyya, dans laquelle il donna
d'abondants renseignements biographiques sur ses maîtres
et ses parents; el-Ifrânlla n1it à profit à plusieurs reprises,
aussi bien dans sa chronique fI ue dans son dictionnaire
biographique.

el-' Alamî (4).

lJn chérif descendant du saint du Jabal el-'Alam, Aboû


t \bd Allah n101}ammed b. et- Tayyib ech-Charîf el-' Alamî,

(1 ) BIBLIOGRAPHIE. - el-Ifrànî, $afwal man ' inlachar, p. 226; el-Qâdirî,


Nachr el-malhânî, II, p. 202; Illiqdt ed-dorar, fol. 62 rO; el-Kattânî, Salwal
el-anfds, l, p. 3'19; R. Basset, Rech. bibl., p. 18, nO 36.
(2) D'après la $afwat man intachal', il mourut au milieu de cha'bân 1134;
el-Qàdirî donne la date du ~ jomàdâ II de la même année; el-KaLtânî,
celle du 15 jomâdâ II.
(3) 1 0 Kachf el-ghoyoûb 'an roû'iat fJ-abîb el-qoloûb; 2° el-Kawkab ez-zâhir
jî sial' el-mosâjir.
(4) BIBLIOGHAPIIIE.- el-Anîs el-motrib, passim; el-Qàdirî, Nachr el-mathânî,
296 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

fut l'un des plus grands lettrés du Maroc sous le règne de


Moulay Ismâ<ïl. Il naquit à Fès; il eut dans ' cette ville de
nombreux maitres (1), parmi lesquels on peut citer Mas<oûd
Jommoû < (2) , Mol).amlned el-Qosantinî (3) , <Abd es-Salâm
el-Qâdiri (4), Mal).ammec.1 b. <Abd el-Qâdir el-Fâsî et les
autres pl'incipaux savants de l'époque. Il perfectionna son
instruction à la zâwiyya de Moulay Idris, dans le Jabal
Zarhoûn, puis à Meknès et à Tétouan. Il semble qu'il vécut
ensuite dans sa ville natale et à la cour de Meknès, jusqu'au
jour où il entreprit le pèlerinage. Mais, avant d'arriver en
Arabie, il mourut au Qaire, en 1134 ou 1135 (1721-23).
Mol).ammed el- <Alami fut avant tout un poète, qui chercha
aussi bien son inspiration dans des sujets profanes que dans
la mystique religieuse ' alors si florissante. Il a laissé un
ouvrage dans le(1uel il a incorporé tous ses vers; comme
l'indique son titre - el-.A.nîs el-motrib (t-17utn laqîtolzo min
odabâ' el-Magh/'ib (5) - ce livre rapporte des entretiens
littéraires que l'auteur eut avec douze de ses contempo-
rains du Maroc : el-Balabi (6) ; Ibn Zâkoûr (7) ; lVlas<oûd
el-Marini; les secrétaires impériaux el-Bâjj Mal).ammed b.
el-<Arbi ech-Charqi et el-Mahdi el-Ghazzâl (8), le vizÎl' Aboû
Baf~ <Omar el-Barrâq el-Basani, originaire de Chafchâwan,
à qui el- <Alami demanda, pour les insérer dans son livre,

II, p. 204; Iltiqdt ed-dorar, fol. 62 vO; Mol).ammed es-Sâ'ïl)., el-Monlalïhabâl


el-<abqarîyya, p. 63; R. Basset, Rech. bibl., p. 39, nO iOO; Brockelmann,
Ar. litt., 11, p . 458 .
(1) 11 en a donné une liste complète dans el-Anîs el-motrib, p. 290 sqq.
(2) Aboù'l-FaçlL Mas<oûd b. Mol).ammed Jommoû" savant de Fès_origi-
naire de Sijilmàsa; alla enseigner à Salé, où il mourut, dans la dernière
décade de jomâdà 1 1119 (22-31 juillet 1707). Cf. el-Qàdiri, Nachr el-ma-
lhânî, lI, p. 180; Illiqdt ed-dorar, fol. 55 vO; en-Nà~ir.i, Istiq~â, IV, p. 52.
(3) Cf. supra, p. 288, n. 2.
(4) Cf. supra, p. 276 sqq.
(5) Lithographié à Fès en 13HL
(6) Cf. supra, p. 286.
(1) Cf. supra, p. 287.
(8) Ce personnage fut le père d'Al,lmed el-Ghazzâl, l'ambassadeur de
Sidi Mol,lammed b. <Abd Allah auprès de Charles III d'Espagne et sur le-
quel, cf. infra, p. 327 sqq.
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 297

des vers qu'il avait composés sur sa ville natale; le kâtib


Al,lmed Dâdoûch; Mol,lammed el-Boû'a~âmî (1), qui lui
enseigna la musique; 'Abd el-Qâdir Ibn Choqroûn (2) ; le
secrétaire Mol,lammed b. Solalmân; el-I)âjj 'Ah Mandoû~a
et Mol,lammed b. Ia'qoûb.
EI-' Alam t profita du cadre très peu rigoureux qu'il choisit
pour faire de son livre non seulement une anthologie poé-
tique, mais aussi un · pot-pourri d'anecdotes, de bons mots,
de digressions techniques, où l'on trouve une histoire des
Barmakides (3), un précis d'astronomie (4), un traité de
l'usage du luth (5) et nlême des recettes thérapeutiques (6).
Cet ouvrage rappelle tout à fait les Qalâ'ïd el-'iqiân d'Ibn
Khâqân, ou mieux encore, el-Montaqâ'l-maq$oû'r d'Ibn el-
Qâçli, dont il est, en quelque sorte, le pendant. A ce titre,
comme celui de l'ancien protégé d'el-Man~oûr, il a surtout
l'intérêt de fournir une abondante documentation sur les
belles-lettres au :M aroc, au XVIII e siècle, et montre qu'elles
étaient encore à peu près réservées à un petit cénacle de fonc-
tionnaires impériaux, vivant dans le sillage de la cour de
Meknès.

el-Ma'dânî (7).

A la fin du XVII e siècle, la famille maraboutique des


Charqàwa installée dans la région du Tâdlâ, et dont la
zâwiyya se trouve encore au village d'Aboû'l-Ja'd, prit au
Maroc une importance à laquelle n'avait atteint jusque-là
que la maison d'ed-Dilâ'. Le sultan Moulay Ismâ'ïl, quand il

(1) Ethnique de Taboô'~amt, dans le Tâfîlelt.


(2) Cet Aboû Mol,lammed 'Abd el-Qâdir. Jbn Choqroûn, qui vécut à
Meknès et sur lequel, cf., en plus d'el-'Alami, el-Anîs el-motrib, p. 193, el-
Kattânî , Salwat el-anfds, 1, p. 96, est à ne pas confondre avec son homo-
nyme qui vécut à Fès sous le règne de Moulay Solaïmân.
(3) el-Anîs el-motrib, p. 69.
(4) Ibid., pp. 110 et 185.
(a) Ibid., p. 172.
(6) Ibid., p. 202.
(i ) BlBLlOGRAPIIlE. - el-Qàdirî, Nachr el-malhânî, H, p. 214; Illiqât ed-
dorar, fol. 65 vO; R. Basset, Rech. bibl., p. 34, nO 91.
298 LES HOMMES ET LES CEUVRES

eut la certitude que cette famille n'avait aucune ambition de


puissance temporelle, la combla d'égards et d'honneurs et le
tombeau de l'ancêtre des Charqâwa devint l'un des san-
tuaires les plus l'réquentés de l'Enlpire. On a déjà vu que
cette zâwiyya ne fut pas seulement un centre religieux, mais
qu'elle abrita aussi des écrivains comme el-Ifrâni. Elle eut
son premier historiographe dans la personne d'Aboù 'Ali
el-Basan b. Hal).l)âl el-Ma'dàni et- Tâdili, éminent j uriscon-
suIte mâlikite, élève d'el-Ioûsi et de 'Abd es-Salâm el-
Qâdiri. Après avoir professé à Fès, à la 11lédersa el-Mota-
wakkiliyya (1) et avoir été qâçli de Fès-la-Vieille, il fut
appelé par le sultan Moulay Ismâ ':il au poste de q açii de
Meknès, qu'il conserva jusqu'à sa nlort. Ce fut lui qui pro-
nonça la prière à l'enterrement du souverain marocain,
en 1139 (1727) (2). Lui-même moul'ut dans la capitale ismâ'ï-
lienne l'année suivante, le 3 rajah 1140 (14 février 1728).
L'ouvrage biographique d\:d-J\fa'dâni porte le titre d'er-
Rawçl el-iâni' el-tâ'ï(l ft manâqib ech-chaïkh Abî 'Abd Allah
Mo{zamined e.J-Sâli(l; il est consacré à l'un des chefs de la
zâw(yya d'Aboûl -Ja'd, Mol)ammed e~-$âlil) b. Mol)ammed
el-1\1o'tâ ech-Charqi, celui-là même qui avait été le protec-
teur d'el-Ifrâni (3). Ses autres œuvres dont on a conservé les
titres sont toutes d'ordre juridique (4).

Les Dilâ'Ïyîn.

Ce n'est pas ici l'endroit de faire un historique de la mai-


son d'ed-Dilâ'. On sait que la zâwiyya, fondée par l'ancêtre

(1) 11 s'agit de la médersa' plus connue sous le nom de Boû' inânîyya


sur laquelle cf. surtout A. Bel, Inscriptions arabes de Fès, p. 2~ti sqq. Ces
deux appellations gardent le souvenir du fondateur de la médersa, le
sultan mérinide Aboû 'Inàn .Fàris el-Motawakkil 'alà'llah.
(2) Renseignement fourni par el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 214, 1. O.
(3) Cf. supra, p. 119, n. 2.
0
(4) Ce sont: 1 une grande glose sur le Mokhtafjar de Khalil; 20 une
glose sur le c.ommentaire de Mayyàra sur la Tolyfal el-l).okkâm d'Ibn 'A~im;
3 0 el-Iriâq fî masâ'ïl el-isti~lqâq.
Ahmed
. ,.

Sa'id.
1
Mahammed .
. 1

1
,
Ibrâhîm. Anoû BAKR, t 1021.
1
/ 1 1
<Abd / , 1 1
MAflAMMED, AJ:tmed el-I:Iàrïthî, ech-Charql, Mol).ammed el-Khadim, t 1059. 'Abd el-Karîm.
cr-Ral).mân, t 1020. f IO'~6. -1- 1051. t 1079. 1 t 1049.
1
Mol).ammed, t 1022 . Mol).ammed,
/
t 1072.
1
Al).m cd.
1
/
j1ol;lammed, t J088. Aboû Bakr, t 1149.
/

Jlol)ammed, t 1141. / 1
/ 1 1 1 1 1
,
1 MAWLAÏ l\IAVAMMED Mohammed 'Abd 'Omar , Aboû 'Amr, Mohamm ed l\Iohammed el-GhazwânÎ., A~1med,
:vIol)ammed, -EL-I:lÀJJ, el-iÙasnâwl, el-Khâliq, t 1055. t 1069. 'ech- el-Jl o râbi~ , t 1089. t 1091 . t 1075.

\
-;- 1197.
....
1
t 1084.
1 - - - ;,, - - - - " - -/ /
AI.lm ed, Mol.lammed, 'Abd Allah, et-Tayyîb, Al).med,
t 1059.
/
/
t 1059.
Mol).amm ed,
t 1099.
1
t fa.,
Châdhilî

Mol).ammed,
t 1099.
1 1
'Mohammed.
. /
/

Aboû Bakr.
1

1
t lOG4. t 1070. t 1087. t 1077. t 1ll7. <Abd cl -Kbàliq. Mohamm ed.
/ . 1
/

1 1 Jlol).ammed 1 1 1 Mol).amme d.
1
Iol).ammed, Ahmed, el- 'Abd es-Salâm, Moh amm ed, AI).med, t 1106. Et-Tayyib, t 1107.
t 1089. ti09J . Masnâwî t 1090. -r' 1107. 1 1
t 1136. 1 i\Iol).ammed, t 1149. Mol.lammed.
1 1 1 1
Mohamm ed EI-I:Iàrith,. l\Iol,tammed, t lJ66. Aboû Bakr.
el-Bakri, 'f 1174. t ll7l. /.
1 • /
Al).med J-Bakrî , 'Abd es-Salam, Mol).ammcd,
t 1198. t 1238. 1
1 • Mol).ammed el-Makki, t 1247.
e t-Tayylb. /
}[ol).amlll cd, t 1264.
Tableau généalogique de la faInille des Dilâ 'ïyîn,
D'après el-I-)awwàt, el-Bodoûr eçl-rf.âwîyya e l cl-Iâzi ghî, .E:I adâ'ïq el-a zhâr en-nadîyya .
300 LES HOMMES ET J~ES ŒUVRES

de la famille, Aboû Bakr b. Mal).ammed ed-Dilâ'ï (1 ), au


centre du Maroc, en un point de la yallée de l'Omm er-
Rabi' dont il n'a pas encore été possible de situer l'empla-
cement exact, acquit une très grosse importance religieuse,
d'abord pendant la vie de son fondateur, mort le 10 cha ' bàn
1021 (6 octobre 1612), puis sous l'im pulsion de l'un de ses
fils, Mal)ammed (2). Mal.Iammed el-I:Iâjj (3), fils de ce der-
nier, voulut profiter de l'ascendant spirituel que sa famille
exerçait au Maroc pour donner au pays une dynastie nou-
velle destinée à remplacer les Sa ' diens en pleine déca-
dence; il régna effectivement SUl' une partie du pays, jus-
qu 'au moment où, battu par Moulay er-Rachid, en 1079
(1668), il dut abandonner tout rêve de puissance tem porelle.
Le sultan 'alawite, s'il accorda son pardon aux Dilâ'ïyîn,
n'hésita pas néanmoins à raser l'agglomération importante
que fOl'mait leur couvent familial; les descendants d'Aboù
Bakr, après un court exil à Tlemcen, vinrent s'établir à Fès
où ils reçurent du monde savant de la ville l'accueille plus
sympathique. Eux-m êmes avaient, d'ailleurs, pendant que
florissait leur zâwlyya, reçu avec la plus grande bienveil-
lance les lettrés qui leur rendaient visiLe. Peu d'années
après Jeur arrivée dans la capitale, ils formaient déjà un
noyau de sav::lnts corn parables à ceux de la famille des
Fâsiyin; pur la sui te, ils ne tardèrent pas à se placel' au
premier rang de l'aristocratie religieuse et intellectuelle de

(1) Sur ce personnage~ cf. principalement el-Lfrànî, Nozhal eH~âdî,


p. 274 du texte et 456 de la trad .. sqq.; $afwal man intachar, p. 46; el-
Qùdirî, Nar:hr el-mathânî, 1, p. 112; Illiqât ed-dorar, fol. 6 vo; el-1:IawwàL,
el- Bodoûr erj-rjdwîyya, fol. 7-21; el-Iâzighî, ~-Iadâ'ïq el-azhdr -en-nadîyya,
vers 10-46.
(2) Mort le H rajab 1046 (9 décembre 16h6). Cf. el-lfrànî" N~zhat el-
~ddî, p. 276 du texte et 459 de la trad., sqq . ; el-Qâdirî, Nachr el-malhânî,
l, p. 170; lltiqdt ed-dorar, fol. HS 1'0; el-J1awwât, el-Bodoûr erj-rjdwîyya,
fol. 24-99; el-Iâzighi, lf.add'ïq el-azhdr en-nadîyya, vers 51-i1.
(3) Mort à Tlemcen le 4 mol}.arram 1082 (13 mai 1671) (-1081, d'après le
.Yachr el-mathânî). Cf. el-Ifrànî, Nozhat el-l),âdî, p. 279 du texte et 464 de
la trad., sqq.; el-Qâdirî, Nachr el-malhânî, II, p. 7; el-T;Iawwàt, el-Bodoûr
erj-cj,âwîyya, fol. 110-123; el-Iâzighî, (-Iadd 'ïq el-azhâr en-narlîyya, vers 96-
109.
LES BIOGHi\.PIIES DU XU C SIÈCLE HÉU. 301

Fès. Quand, au XIX siècle, el-I)awwât les jugea dignes


Il

d'èLre groupés en une monogl'aphie étendue, ce fut plus à


cause de la place qu'ils occupaient dans le monde savant du
Maroc que des succès politiques éphémères que leurs an-
c ~ tres avaient pu rem porter.
Les deux Dilâ'ïyin qui s'illustrèrent le plus sous la dy-
nastie <alawite furent Nlol,lammed el-Masnâwi et Mol,lammed
Ibn <Abd er-Ral).mân. On donnera sur chacun quelques ren-
seignements : tous deux ont, d'ailleul's, consacré un ouvrage
à des choda de leur pays.
Aboù 'Abd Allah Mol).ammed el-Masnâwi b. Al,lmeJ h.
Mol,lammed el-Masnâwi b. Mal,lammed b. Aboù Bakr ed-
Dilâ'ï (1 ) naquit à la zâwiyya d'ed-Dilâ' en 1072 (1661-62), et,
lors de la destruction de celle-ci, cinq ans plus tard, fut
amené par son père à Fès, où il fut bientôt le disciple de
' Abd el-Qâdir el-Fâsi, de rVlal,lammed el-Fâsî, fils de ce del'-
nier, d 'el-<Arbi el-Qâdiri et de son frère <Abd es-Salâm, de
l\Iol,lammed el-Qosantil1i, d'Al,lmed Ihn el-I)âjj (2), d'el-Ioûsi
et de <Abd el-Malik et-Tajmoù<ti (3). Il devint à Fès le plus
grand savant de sa génération, et son autorité et sa science
lui attirèrent, quand lui-même se mit à enseigner, un très
grand nombre d'auditeurs. On verra que la plupart des bio-
graphes du XVIIIe siècle comptèrent parmi ses élèves. Il fut,
pendant quelque temps, prédicateul' et imàm à la médersa
Boù'inâniyya, puis au sanctuaire Je Moulay Idris II, qui
venait d'ètre reconstruit, en 1132 (1720) . Il fut également
11lUfti. D'une grande piété, il composa, quand il sentit sa

('1) BlBLIOGRAPHIE. - eI-Qàdiri, Nachr el-malhànî, II, p. 204; Iltiqâ-t ed-do-


rar, fol. 63 1'0; eI-l;Tawwât, el-Bodoûr eq,-q,àwîyya, fol. 183 sqq.; eI-Iâzighi,
~-ladà'iq el-azhâr en-nadîyya, vers 136-148; en-Nâ~iri, Istiq~â, IV, p. 44. el-
Ka Uttni, Salwat el-anfâs, lIT, p. 44; eI-FoçlaLli, ed-Dorar el-bahiyya, Il,
p. 342: R. Basset, Rech. bibl., p. 34, nO .92; F. Codera, Libros procedenles
de Marruecos, p. 372; Ben Cheneb, Idjàza, § 13.
(2) Cf. supra, p. 277, n. 3.
(3) Aboû Marwân <Abd el-Malik b. Mol).ammed et-Tajmoû<Li, tradition-
niste et prédicateur, fut qâçlî de Sijilmàsa et de Meknès et mourut dans
le TâfHelt, en ~afar H18 (15 mai-12 juin 1706). Cf. eI-Qâdiri, Nachr el-
malhànî, II, p. 176; Illiqàt ed-dorar, fol. 55 l'0.
302 LES IIO~JMES ET LES ŒUVRES

mort approcher, une pièce de quarante vers, dans laqu~lle


il implorait la miséricorde et le pardon divins. On chanta ce
poèm e à ses funérailles, quand il mourut, le 16 chawwâl
1136 (8 juillet 1724). Ce fut, dans la capitale, un véritable
deuil public. Il fut enterré, dans une fosse qu'il avait creusée
lui-m ême trois ans auparavant, à l'inlérieur du nlausolée de
Mol)ammed el- 'A'ïdi (1), à la Rawçlat el-"olclInâ', en dehors de
Bâb el-Fotoûl).
Mol)ammed el-NIasnâwl composa un certain nombre d'ou-
vrages (2), parmi lesquels un petit traité généalogique SUl'
les descendanls de 'Abd el-Qàuir el-JHânl, intitulé Natîjat
et-taZzqtq ft ba'çl ahl ech-charaf el-wathîq (3); après une no-
tice biographique sur l'ancêtre des Qâdirlyin, l'auteur
fournit d'intéressantes précisions sur ceux de ces chorra qui
habitaient l'Égypte et sur ceux qui. étaient installés à Fès.
La Nattjat et-taZzqîq, écrite en jomâdâ l 1127 (mai 1715), fut
composée, si l'on en croit Mol).ammed el-Masnâwl, sur la
demande de Tâhir, l'un des fils de 'Abd es-Salâm el-Qâdirl,
qui voulait l'emporter dans son voyage de pèleeinage, pour
avoir sur lui un titre indéniable de sa noblesse chérifienne.
On doit aussi à 1\Iol)amnled el-~lasnâwi eu-Dilâ'ï une courte
notice sur le saint Al).med el-lamani (4), intitulée et- Ta 'l'tj.
bi'ch-chaïkh Abt'l-'Abbâs AZunecl el-lamanî (5).
Aboû 'Abd Allah Mol).ammed b. Mol)ammed b. Mol)am-

(1) Aboû 'Abd Allah ~lol:t ... mm ed b. Al;lmed el-'A'ïdi es-Sagîrî, sainL de
Fè. , mort en ramaçlàn 984 (22 novembre-21 décembre 1576). Cf. Mol:tam-
med e l-~fahdî el-Fàsl, Momli' el-asmâ', p. 119; Ibn 'Aïchoùn ech-Chal'rùL
er-Rawrj, el-'dtir el-anfds, fol. 80 vo; el-K.attùnl, S a, lwat el-anfds, ur, p. 43.
(2) Ce sont : '1° Jahd el-moqill el-qd~ir fl na~'rat ech-chaïl1:h 'Abd el-
Qd~ir; 2° el-(Jawl el-l1:âchif 'an a~tkdm el-islindba ftl-wa ,?d'if; 3° Na$I'at
el-qabrj, fî'r-radd 'ald m,an ankrJ.r machroû'iyyataho jï $aldtaï en-nafl wl'l-
j'arrj,; 4° fiatj el-himma ild laly,qiq ma'nâ' dh-dhimma; nO ombreux opus-
cules.
(3) Elle a éLé lithographiée à Fès en J 309 et sans daLe et publiée à
Tunis en 1296. Une traducLion anglaise d e la partie concernant 'Abd el-
Q:\dir el-Jîlànî a été publiée à Edinburgh en '1903, par T. H. vVeir, sous le
titre de The Jlrst parl of the Natijalu'l Tahfjiq.
(4) Sur ce saint, cf. 'supra, p. 276, n. 3.
(5) Conservée à Rab3.L, Mss., 407 (6) ..
LES nrOGRAPHES DU XU C Sl~CU: UÉG. 303

med b. 'Abd er-Ral,lmân b. Aboù Bakr ed-Dilâ'I (1), petit-


cousin de Mol,lammed el-Masnâwi et son contemporain,
avait été à Fès l'élève de ce dernier, d'el-Basan b. Rab~lâl
el-Ma'dâni (2) et de 'Abd es-Salâm b. et-Tayylb el-QâdirL
Son éloquence et sa voix très forte le désignèrent de bonne
heure au poste de prédicateur et d'imâm à la , médersa
Boû'inâniyya et à la mosq uée des Chorfa (3). Mais, en 1141
(1729), désirant accomplir le pèlerinage et se fixer en Orient
pour le' restant de ses jours, il vendit tous ses biens et se
mit en route avec la caravane marocaine. Il arriva à la
l\Iekke, y accomplit les prescriptions rituelles, mais en-
suite, en se dirigeant sur -Médine, il périt victime d'un
accident de cheval et fut enterré près du Wâdi 1;{âtima.
Nlol,lammed Ibn' Abd er-Ral,lmân ed- Dilâ'I composa, entre
au tees ouvrages (4), un poème sur les chorfa du Maghrib,
qu'il intitula Dorrat et-tîjân wa-laqtat el-loû'loû' wa'l-mo/'-
jân (5) ; il s'astreignit, moins par piété que par dilettan-
lisme littéraire, à Jonner à cette orjoûza le même nombre
de vers que celui des compagnons du Prophète qui as-
sistèrent au combat de Badr. Elle fut, par la suite, .l'objet
d'un commentaire de J\IIal,larnmed b. Al,lmed b. Mal,laullned
el-Fâsl (6) .

(1) BlBLlOGRAPHlE. - el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, Il , p. 217; el-l:lawwùl,


el-Bodoûr eg-gâwiyya , fol. 253 ; el-Iâzighî, ijadâ'ïq el-azhâr en-nadiyya, in
fine; el-Kallànî, Salwal el-anj'âs, II, p. 8, lignes 19-21.
(2) Cf. supra, p. 297-298.
(3) Celle mosquée, fondée par Idris H, et reconstruite par les "l\,[éri-
nides, se trouve dans la ville vieille, au quartier d'el-Karrâtîn. Cf. Gail-
lard, Une ville de l'Islâm, Pès, p. '11, et Bel,' Inscriptions Arabes de Pès,
p. 108, note 5.
(4) Ce sont: 1° Pakhr eth-tharâ bi-sayyîd el-warâ; 2° Sawâkib el-afgdl
fl kawâsib el-aj'âl; 3° ez-Zahr en-nadî fi'l-khalq el-mol:wmmadî; 4° Zahr el-
~wdd'ïq wa-kholâ~at el-J:wqâ'ïq min sirat sayyîd el-khald'ïq ; 5') Commentaire
dJ~ch-Chifâ' du qàçli 'lyyâçl ; 6° TalJrîq el-'azm es-sâlân wa-tahyîj ech-chawq
el-l1:âmin ilâ afgal el-amâkin; 7° Qa~îda fî mandsil1: el-1;âjj.
(5) 11 en existe deux copies à Rabal, Mss., nOS 498 (1) el 522 (2).
(6) Au milieu du Xllle siècle de l'Hégire, un opùscule portant le litre de
Boghial er-râ'ï fCt-ta'rif bi'ch-chaikh Abî 'Abd Allah Mo~wmmed el-Makkl
ed-Dilâï' fut consacrée à MoJ:lammed el-Makki b. MoJ:lammed b. MoJ:lam-
med b. MoJ:lammed b. AJ:lmed b. ech-Châdhilî ed-Dilâ'ï, mort le 27 ~afar
304 LES IIO~IMES Er LES ŒUVRES

A\lmed el-Wazîr el-Ghassânî (1).

Aboû'l-<Abbâs Al).med b. <Abd el-Wahhâb el-Wazir el-


Ghassàni était le frère cadet de Mol).ammed el- Wazir, l'am-
bassadeur de :M oulay Ismà<ïl en Espagne (2). Il naquit à
Fès le 1er ramaçlân 1063 (26 juillet 1653) et fut un disciple
assidu d'Al)med Ibn <Abd Allah Ma<an. Il occupa à Fès les
fonctions de notaire et celles d'imâm au sanctuaire de
Mal)ammed Ibn <Abd Allah Ma<ari, auprès duquel il fut
enterré, quand il mourut le 2 rab!'I 1146 (13 août 1733). Il
composa de nombreux ouvrages, parmi lesquels il y a lieu
de signaler : une biographie de Mol)ammed el-Mahdi el-
Fâsi, Jalâ' el-qalb el-qâsî bi-mal;âsin sayyîdî' l-Malidî' l-Fâsî;
un poème à la louange d'Al)med Ibn <Abd Allah, avec com-
mentaire; un autre, du mètre sart, sur les chaïkh du même
personnage; un autre, qu'il lui consacra également sous le
titre d'el-Miqbâs ft mal;âsin sœyyîdînâ Abî' l- <Abbâs ; une
notice sur la vie et les œuvres de <Abd es- Salâm el-Qâdi ri
et de Mol)ammed el-Masnâwi ed-Dilâ'ï.

el-Modarra< (3).

Un résumé en vers du recueil biographique attribué à Ibn


<Aïchoûn ech-Charrât fut composé au début du XVIIIe siècle
par Aboû <Abd Allah Mol).amlned el-Modarra< el-Andalosî,
. qui vécut à Fès et y acquit un grand renom de science 6t

1247 (6 août 183t), par son fils MoQ.ammed, mort lui-même en 1264
(18~8) . Cf. el-Kattànî, Salwat el-anfâs 111, p. 48.
('1) BIBLIOGRAPHIE. - el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, II , p. 236 ; Iltiqât ed-
dorar, fol. 71, rO; el-Kattânî, Salwat el-anfâs, II, p. 299; el-Fodaïlî, ed-
Dorar el-bahîyya, n, p. 360.
(2) Cf. supra, p. 284 sqq. .
(3) BIBLIOGRAPHIE. - el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, n, p. 237; Iltiqât ed-
dorar, 71 vO; el-Kattànî, Salwat el-anfâs, II, p. 35 ; R. Basset, Rech. bibl.,
p. 3B, nO 88.
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 305

de sainteté. Il fut, dans cette ville, le disciple du f;wûft


1Io]:lammed ed-Dorrij (1) et suivit les cours de }Abd es-
Salâm Gessoùs (2), de 'Abd es-Salâm el-Qâdirî, de Mo]:lam-
med el-Qosantîni (3), d'A]:lmed el-Jarnidi' (4) et de Mo]:lam-
med el-Masnâwi ed-Dilâ'ï. Il alla en pèlerinage et fit un
assez long séjour à Médine. Il .n lourut dans sa ville natale
en 1147 (1734-35). '
Le poème mnémotechnique consacré par el-Modarra' aux
célébrités de Fès comprend à peu près cinq cents vers
l'ajaz . C'est l'une des principales sources mises à profit par
el-Kattâni, qui en fait, dans la Salwat el-anfâs, d'abondantes
citations. Trois ou quatre vers suffisent, en général, pour
chaque personnage: ils ont surtout pour but d'amener et
de justifier le chronogramme du décès.

Al].med b. el-Khayyât (5).

Au début du IXe siècle de l'Hégire, é~ait venue s'installer


à Fès une fanlille originaire de la région des Dokkâla; ses
membres portèrent depuis le patronyme d'Ibn Ibrâhim ed-
Dokkâlî. Elle donna bientôt naissance à des savants réputés
~t à des titulaires de charges élevées. Trois siècles après

(1) Aboù 'Abd Allah Mol)ammed b. el-~[âjj Mal)ammed ed-Dorrîj el-An-


dalosî et-Tittâwanî, élève d 'A l)med Ibn 'Abd Allah Ma'an et d'Al)med el-
lamanî, mourut à Fès en 1126 (1714). Cf. el-Qâdirî, Nachr el-mathdnî, II,
p. H)O; Iltiqdt ed-dorar, fol. 5~ v O ; el-Kattânî, Salwat el-anfâs, II, p. 298.
(2) Aboû Mol)ammed el-Tjàjj 'Abd es-Salâm b. Al)med (J:Iamdoûn)
b. <Ali b. Al)med Gessoûs , <âlim de Fès, assassiné dans cette ville en 1'121
(1709). Cf. el-Qâdirî, Iltiqdt ed-dorar, fol. 58 rO; el-Kattânî, Salwat el-
anfds, II, p. 14; en-Nâsirî, Istiqfid, IV, p. 44.
(3) Cf. supra, p. 288, n. '2.
(4) Aboû'VAbbâs el-I:Iâjj Al).med b. <AH b. 'Abd er-Ral)mân el-Jarnidî
el-Andalosî, imàm et professeur à Fès, mort dans cette ville en 1125
(1713), ou 1124, d'après l'lltiqdt. Cf. es-Sijilmâsî, ed-Dhahab el-ibrîz, dé-
but; el-Qâdirî, Naehr el-mathdnî, II, p. 190; lltiqât ed-dorar, fol. 58 V O;
el-Kattânî, Salwat el-anfds, II, p. 16.
(5) BIBLIOGRAPHIE. - el-Kattânî, Salwat el-a nfds , II., p. 79; R. Basset,
Reeh bibl., p.43, nO 122.
20
306 J~ES HOMMES ET LES ŒUVRES

son arrivée dans la capitale, elle avait acquis assez de


renommée pour mériter une monographie sur ses origines
et ses personnages célèbres. Ce fut la Salsalat edh-dlzalwb
el-manqoûcl ft clhikr el-a'lâl7't min el-aslâf wa'l-jodoûd, que
composa Aboû'l- ' Abbâs Ab.med b. l\1ol)ammed el-Khayyàt
b. Qâsîm b. Mol)an1med b. 'Abd el-'W ahhâb b. Mol)ammed
b. Mol)ammed b. lVlol),ammed b. Ibrâhîm ed-Dokkâlî el-
Machanzà'ï (1). Ce lettré eut pour maîtres le qâçli el- 'Arbi
Bordola (2) et surtout Mol)ammed el-Masnâwi ed-Dilâ'J', dont
il fut le suppléant à l ' imâmat de l'oratoire de l\1oulay Idl'is.
Il fit un voyage en Orient et demeura longtemps au Qaire,
dans le,s environs de 1130 (1718). Il mourut quelques années
plus tard, sans avoir achevé son ouvrage biographique:
ce dernier 'fut terminé par son frère cadet, Mal)ammed,
surnommé Ibn Ghâzî (3).

EI-Ifrânî biographe.

On a vu plus haut que la Nozhat el-I)âdî aurait suffi à


assurer à el-Ifrânî une place enviable parmi les littérateurs
marocains. La Sajwat man intachar dénote les mêmes qua-
lités de sérieux, d 'honnêteté et de sûreté d'information que
l'hisloire sa'dienne. Elle ne dépare pas l'œuvre de l'his-
torien.
On se rappelle que le répertoire biographique d'el-Ifrâni
fut le dernier ouvrage qu 'il entreprit avant sa mort, et qu'il
le termina, au rapport d'el-f::Iawwât, en 1137 (172l!-25) (4). Il
lui donna lè titre de Safwat lnan intacltar min akhbâr
$olal)â' el-qa/'n el-I)âdt 'achar, limitant ainsi, dans sa pen-
sée, la collection des personnages qu'il se proposait d'étu-

('1) Dans la liste de ses sources, el-Kaltânî, III, p. 362 , nO 122, atlribue
, l'ouvrage à Al)med Ibn Jbrâhîm ,e d-Dokkâli , sans autre précision.
(2) Cf. supra, p. 288, n. 1.
(3) Parce qu'il descendait de la fille du grand savant Ibn GhâzL Sur ce
personnage , mort le 23 jomâdâ 1 1'184 (14 septembre 1'770), cf. el-Kattànî ,
, Salivat 'el'-anfds, II, p. 78.
(4) Cf., supra , p. 1US.
LES mOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 307
dier aux saints marocains du XIe siècle de l'Hégire, et dési-
rant continuer - il le reconnaît dans l'introduction de son
ouvrage -l'œuvre qu'avait consacrée Ibn 'Askar aux saints
notoires du xe siècle.
Mais on a vite fait de s'a percevoir, en feuilletant le dic-
tionnaire d'el-Ifrâni, que l'auteur a dépassé, comme pour
la Nozhat el-lJâdî, le cadre assez étroit dans lequel son titre
aurait pu l'enfermer. Alors que, sans nul doute, la DawlJat en-
nâchir n'est et ne veut être qu'une monographie exclusive-
ment hagiographique, la Safwat man intachur comprend,
en plus d'une abondante liste de saints marocains, un
nombre important de biographies de savants du pays ou
même de l'Islâm non rnaghribin. C'est plus un répertoire
de docteurs musuhl1ans qu'une anthologie de manâqib.
Ce ne sont d'ailleurs pas là les seuls points sur lesquels
l'ouvrage d'el-Ifrâni difl'ère de celui d'Ibn 'Askar. La manière
est complètement renouvelée PQr l'historien; de la forme
anecdotique et de l'im précision voulue de l'hagiographie du
siècle précédent, rien n'a subsisté dans ce travail. On a
affaire à un biogra phe nourri de culture littéraire, qui
apporte dans son livre, plus encore que son contem porain
el-Qâdiri n'allait le faire dans ses deux dictionnaires, des
renseignements puisés à bonne source, des dates soigneu-
sement contrôlées, avec un choix judicieux de citations
poétiques, qui rappellent que l'auteur fut en même temps
un commentateur de poèmes profanes.
Il allait de soi qu'el-Ifrânl fût bien renseigné sur les
célébrités de sa ville natale, Marrâkech; il fournit, à cet
égard, des biographie.s que l'on ne retrouve pas dans
d'autres ouvrages. Il connaît aussi les notoriétés de la cité
de Moulay Idris. Le plus intéressant, et là seulement il est
comparable à Ibn 'Askar, est qu'il ne fait pas fi des saints
ou des lettrés « de campagne », qu'ils aient vécu dans le
Soûs ou dans le Jabal méditerranéen. Il permet ainsi de
préjuger 'que le mouven1ent littéraire, comme on l'a remar-
qué pour le mouvement religieux, ne se restreignit pas
dans la période moderne aux seules grandes villes de
l'empire. Le savant espagnol Codera en a déjà fait, ' avec
308 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

juste raison, l'observation: sur les biographies de soixante-


quinze auteurs du XI e siècle de l'Hégire fournies par el-
IfrAni, huit seulement furent reprises par el-Kattâni dans la
Salwat el-anfâs, parce qu'elles se rapportaient à des per-
sonnages morts à Fès (1).
Après s'è tre étendu, à peu près de même façon pour cha-
cun, sur les personnages dont il a dressé la liste pour le
siècle qu'il étudie, el-Ifrânî consacre quelques lignes à un
certain nombre de santons, sur la biographie desquels il n'a
pu obtenir beaucoup d ' indications; et, avant de clore son
livre, il fait une place à quelques notoriétés du xn siècle de ll

l 'Hégire. Ce fut exactement le procédé d'el-Qâdirî.


La Safwat man intachar est avant tout un ouvrage de tra-
vail, à consulter plus qu'à lire d'un trait. Pourtant, quelque-
fois, l'auteur se laisse aller à y rapporter des histoires édi-
fiantes. A côté de grands savants comme Ibn \'-\.chir, Mayyâra
ou el.MaqqarJ, il est piquant d'y voir apparaître quelques
« illuminés», comme ce <Antar el- Kholtî, qui étalait sa nu-
dité sur les marchés (2), ou cette sainte de :M arrâkech, élevée
dans un mysticisme ardent et tellement belle que le sultan
Moulay Zaïdân voulait la séduire (3).
Enfin, au lieu de s'en tenir, comme Ibn <Askar, à une in-
formation à peu près exclusivement orale, el-Ifrâni a uti-
lisé pour son répertoire la presque totalité des ouvrages
hiographiques composés avant lui au J\1aroc. Il en fournit le
détail, à la fin de son liyre (4) et ajoute qu'il fit en plus
appel à des notes nlanuscrites et à quelques témoignages
Ol'aux, jugés par lui dignes de foi. Il pousse la prudence et
l'honnêteté, malheureusement bien rares chez les écrivains
du Maroc, jusqu'à dire que lorsqu'il utilise une autorité

(1) Codera, Considerable numero ... , p. 590.


(2) $afwat man intachar, p. 189.
(3) Ibid., p. 162.
(4) Ibid., p. 228. Cf. R. Basset, Rech. bibl., pp. 37-39, nO 99, et Codera,
Libros procedentes de Marruecos, pp. 373-374. Ces ources sont au nombre
de quarante-deux; parmi elles figurent deux ouvrages qui semblent
avoir disparu: la fahrasa d'Alfmed eVAjamî et la ril),la de Ral}lfo el-Ghan-
nâmî ech-Châwî.
LES BIOGRAPH&S DU XUe SIÈCLE HÉG. 309

quelconque, il lui arrive de ne pas la citer textuellement:


on ne doit donc pas lui faire grief du changement de forme
qu'il pu apporter à la citation. Le biographe, on le voit,
n'avait rien perdu des qualités de l'historien; la Saj'wat man
intachar est un dictionnaire dans lequel on peut avoir une
confiance relativement gl·ande.

AQmed es-Sijilmâsî (1).

Aboû'l- 'Abbâs Al).med b. Mobârak h. Mol)ammed b. 'Ali


es-Sijihnâsî el-Lamatî (2) naquit à Sij ilmâsa vel's 1090 (1679).
C'est dans cette ville qu'il r,ommença ses études; il Y suivit
les cours d'un de ses cousins maternels, Al).med el-J:Iabib (3),
qui devait, par la suite obtenir un grand renom de sainteté.
En 1110 (1698-99), Al).med b. Mobârakse rendit àFès, oùil de-
meura jusqu'à la fin de sa vie. Il y fut d'abord l'élève assidu
de Mal).3nlmed b. 'Abd el-Qâdir e l-Fâsi, de Mol).ammed el-
Qosantini (4), d'Al).mecl el-Jarnidi (5), de Mol).ammed el-Mas-
nâwi ed-Dilâ'I, de 'Ali el-IJoraïchi (6) et du qâ~i Bordola.
Puis il versa dans la mystique et devint le disci pIe et le dé-
fenséut' du saint 'Abd el-'Aziz ed-Dabbâgh (7) : il réunit les

(1) BlBLlOGRAPlIIE. - el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 247, Iltiqât ed-


dorar, fol. 79 rO; el-KaUânî, Salwat el-anfâs, lI, p. 203; Brockelmann,
Ar. litt., JI, p. 462; H. Basset, Rech. bibl., p. 32, nO 83.
(2) Et non el-Lam~i (Nachr el-malhânî, H, p. 2rj4l. Cet ethnique se rap-
porterait à Lamata, quartier de Sijilmàsa.
(3) AQ.med el-J:Iabib b. ~oQamm e d el-'Ammàri es-Sijilmâsî el-Lama~î,
~oùfî de Sijilmàsa, mort dans cette ville le 4 moQ.arram 11.65 (23 novembre
17~1 ) . Cf. el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 253; Iltiqât ed-dorar
fol. 88 Vo .
(4) Sur ce personnage, cf. supra, p. 288, n. 2.
(5) Sur ce personnage, cf. supra, p. 305, n. 4
(6) Aboû'l-f:l-asan 'AH b. AQ.med el-J:Ioraichî, 'àUm de Fès, mort en 1 H5
(17331, en accomplissan.t le pèlerinage et enterré à Médine. Cf. el-Qàdirî,
Nachr el-malhânî, H, p. 235 ; Iltiqât ed-dorar, fol. 70.
(7) Aboù Fàris 'Abd el- 'Azîz b. Mas'oûd ecl-Dabbâgh, chérif idrîsite et
grand saint de Fès, né le 11 ~afar 1095 (29 janvier 1684), mort le
20 dhoù'l-qa'da 113-1 (4 octobre 1719). Cf. el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, II,
p. 198; Iltiqôt ed-dorar, fol. 60 vo; el-Kattànî, Salwat el-anfâs, H, p. 197.
310 LES HOMMES ET LES ŒUVUES

manâqib de ce personnage devenu' célèbre par tout le Nord de


l'Afrique dans un ouvrage qu'il intitula edlt-Dhaltab el-ibrîzfî
manâqib ech-chaïkh. tA bd el- 'Azîz (1). En plus de cette mono-
graphie, il composa différents ouvrages, traités' ou commen-
taires (2), et fit des cours dans la capitale, où il nlourut le 12 jo-
mâdâ 1 1156 (4 juillet t 743) (3); il fut enterré dans le mausolée
de son maUre, au cimetière qui fait face à Bâb el-Fotoûl).
Le livre hagiographique d'es-Sijilmâsî est fort connu et
apprécié au ~Jaroc, peut-être simplenlent parce qu'il a été
imprimé à deux reprises en Orient (4). Il n'offre pourtant
pas beaucoup d'originalité; ce n'est qu'un recueil de kara-
mât ou de développements mystiques et il est difficile d'y
tmu ver, à défaut de renseignements historiques, même
quelque indication J'histoire littéraire (5).

'Abd el-Wahhâb Aderrâq (6).

Les rares études relatives à la médecine ancienne au Ma-


roc ont déjà révélé l'existencè d'une curieuse famille maro-

(J) Brockclmann, loc. cît ., appelle l'ouvrage Al ibrîz mîn kalâm Sîdî 'A bd
al 'azîz .
(2) En voici les titres: '1 ° Un ouvrage sur un verset du Qor'àn (SOÛl'. LVll,
vers. 4) ; 2° Kachf el-labs 'an el-masâ'ïl el-khams; 3° Radd el-lachdîd fî
mas'alat et-taqlîd (Rabat, JltIss., 96); 4° nouvrage intitulé Dalâ:'at el-'âm;
5° une gLose sur le cOffimenlalre de Sa 'ïd Qaddoùl'a sur es-Sollam, d'el-
Akhçlarî; 6° el-Qawl el-mo'tabar fî baïdn ânn jomlal el-f),amd inchd' lâ kha-
bar (Rabat, Mss., 275 (1 ) ; 7° Mablagh el-amâl li-tdlibî 't-ta/idf fî'l-aj'âl
(Rabat, Mss., 543 (3); 8° Ajwiba.
(3) Le '19 jomàdà 1 '1'155 ou '1'156, d'après el-Kattâni.
(4) Au Qaire, en 1278 et 1304.
(5) Il Y a lieu de signaler que 'Abd el- 'Azîz ed-Dabbàgh a fait, au
Xll e siècle de l'H. , l'objet d ' une autre monographie, intitulée Taïsîr el-
mawàhib ft' dhikr ba'rj mâ li'ch-chaïkh Abî Pâris min el-manâqib. Cet ou-
vrage, signalé par el-l\.attànî, dans la liste des sources de la Salwat
el-anfâs (III, p. 361, 1. 3 ; cf. R; Basset, Rech. bibl. , p. 32, nO 84), aurait
pour auteur Aboù 'Abd Allah MoQ.ammed b. MoQ.ammed b. 'Abd el-'Aziz
b. 'AH el-Moràbitî es-Sijilmàsi, !Sur lequel on manque de renseignements.
(6) BlBLlOGHAPHlE. - el-Qàdi.rî, Nachr el-mathânî, 11, p. 251; llliqât ed-
dorar, fol. 82 V O ; el-KattânÎ, Salwat el·anfâs, II, p. 34.
J~ES BIOGRAPHES DU XU tl SIÈCLE H1~G. 311

caine d'origine berbère, les Aderrâq, qui, sous la dynastie


'alawite, fournit, de père en fils, des médecins attachés à la
famille régnante (1). Parmi les plus connus de ses membres,
on peut citer 'Abd el-Wahhâb b. Al).med Aderràq el-Fâsî,
qui mourut à Fès, à l'âge d'environ quatre-vingts ans, le 28 !?a-
far 1159 (22 mal'S 1746). Il composa plusieurs opuscules se
rapportant à la science qu'il pratiquait, principalement des
formulaires de thérapeutique; nlais- et c'est la raison pour
laquelle il trouve sa place ici - 11 fit en même temps œuvre
de biographe, en consacrant aux saints enterrés à Meknès
une qa$tda analogue à celle q u'el-Modarra< avait composée
sur ceux de Fès. On n'en connait d'autre titre que celui de
Man?>oûma ft madf;. $cUif;.t Miknâsat ez-zaUoûn; elle est, à
l'heure actuelle, probablement per-due.

Ibn Ikhlef (2).

Au début du XVIllC siècle, une nouvelle et importante zà-


wiyya fut fondée à Fès (3), par un personnage religieux,
depuis devenu notoire au NIaroc, Mal).ammed Ibn el-Faqih (4);
ce saint, originaire des Ma!?moûda, près d~ Wâzzân, fut dans
cette dernière ville le disciple du célèbre Moulay <Abd Allah
el-Wâzzânj et s'en alla, dans la capitale, représenter en
quelq ue sorte l'école de son maitre. Peu de temps avant la

(1) Cf. supra, p. 209, n. 1.


(2) BIBLlOGHAPlllE. - el-Qàdirî, Nachr el-malhdnî, H, p. 253; Iltiqdt ed-
dorar, fol. 85 1'0; el-I attàni, Salwat el-anfds, l, p. 298; R. Basset, Rech.
bibl., p. 41, nO 124.
(3) Dans le quartier d'el-<Oyoûn.
(4) MI:wmmed bel Fqîh dans la prononciation courante. Le nom com-
plet du personnage est AbOLI <Abd Allah Mal).ammed b. Mol).ammed
b. Mol).ammed b. <1 à b. < bd Allah ez-Zajàni, surnommé Ibn el-F'aqih ; il
était originaire du village d'As je n, dans la tribu des Ma~moùda. La mon-
tagne d'Asjen est le théùtre de z iâra fréquentes à l'adresse du saint mu-
sulman <Omar ez-Zajani, ancêtre d'fbn el-Faqih, et du saint juif Rabbi
<Amràn b. Dîwàn. C'est à cet endroit que s'installa aussi, à son arrivée
dans le pays, le fondateur de la maison chérifienne de Wâzzàn. Sur Ibn
el-Faqîh, cf. la longue notice d'el-Kaltâni, Salwal el-anfds, l, pp. 292 sqq.
312 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

mort d'Ibn el-Faqih, survenue le 7 rabr 1 1136 (5 dé'-


cembre 1723), un de ses disciples, ancien notail'e au simât
d'el-Qal'awlyln, établit un recueil de ses manâqib, il s'appe-
lait Aboû Mol.lammed <Abd Allah b. Mol.lammed Ibn Ikhlef (1)
el-An~ârl el-Andalosi et avait obtenu du chaïkh le titre de
maqaddim des affiliés à son ordre. Il passa toute sa vie dans
la zâwlyya de son maître et y fut enterré, quand il mourut
le 27 dhoû'l-qa<da 1162 (8 novembre 1749).
Le livre d'Ibn Ikhlef porte le long titre de Salwat el-ma-
I;ibbîn wa'l-lJ'lortdîn wa-nikâyat el-I;âsidtn wa~l-jâl;idin fî
manâqib sayytdî lJfal:zanuned Ibn el-Faqîh al;ad el-afrâd 'el-
târifîn. D'après el-Kattâni (2), il comprendrait une introduc-
tion et six chapitres et serait relativement peu étendu.

Ma~ammed b. <Abd es-Salâm Bennânî (3) .

Sous les <Alawites, une famille juive de Fès du nom de


Bennân.i convertie à l'Islâm fournit au Maroc d'éminents ju-
risconsultes. Parmi eux, le plus célèbre fut Aboû <Abd Allah
Mal).ammed b. tAbd es-Salàm b. ÇIamdoûn, qui mourut dans
la capitale, à l'âge d'environ quatre-vingts ans, le 16 dhoû'l-
qa'Ja 1163 (17 octobre 1750). Il fut, à son époque, l'un des plus
grands savants qui professaient à l' llni versité d' el-Qarawiyin;
lui-mème avait assisté aux leçons de maîtres comme le qà~i
Bordola, Al.lmed Ibn el-Bâjj (4), Mol.lammed el-Qosantinî,
Ibn Zâkoûr, Al.lmed el-Wallâli, el-<OlnaIri, 'Abd es-Salâm
Gessoûs (5), 'Ali Baraka (6), el.Ioûsi, 'Abd es-Salâm el-Qâ-
dirî, Mol.lammed el-Masnâwi ed-Dilâ'ï.

(1) Prononciation dialectale pour lakhlof.


(2) Salwat el-anfds , L, p. 297, 1. 3-6.
(3) BIBLIOGRA.PHŒ. - el-Qàdiri, Nachr el-mathdnî , II, p. 257 ; Iltiqât ed-
dorar, fol. 87 1'0 ; el-! atlâni, Salwat el-anfâs, l, p. 146; R. Bas el, Rech.
bibl. , p. 19, nO 40.
(4) Cf. supra, p. 277, n. 3.
(5) Cf. supra, p. 305, n. ~.
(6) Cf. supra , p. 288, n. 4.
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. :113

Entre aut,'es ouvrages (1), :M abammed Bennâni a laissé


une importante fahrasa (2), qui contient une biographie
étendue de son maUre Ibn el-I:Iâjj et des renseignements pré-
cis sur les jurisconsultes de Fès au milieu du XVIIIe siècle (3).

Ibn <Achir el-l:Iâfî.

En luème temps qu'à Fès s'établissaient les recueils de


manâqib des innombrables saints de la métropole, un Sa-
létin consacrait au patron de sa yille, le fameux el-IJâjj
Abmed Ibn <Achir (4), une monographie intitulée TO{lfat ez -
zâ'ïr bi-ba<rJ manâqib sayytdî'l-ljâ.li A{uned ibn <Achir (5 ).
Cet hagiographe, qui portait le mème nom que le saint, à la
seule différence de l'ethnique, Abmed Ibn <Achir el-IJâfi (6),
vivait au temps des sultans Moulay Ismâ<ïl et Moulay <Abd

(1) Voici la li te des principaux : 1° Commentaire de l'Ikl({d' d'el-


Kalâ<ï; 2° Résumé du commenlaire d'ech-Chifd' du qàçli <Jyyàçl par
Chihâb ed-Din Efelldi (Al)med b . el-I.Iosaïn b. Rislân er-Roûmîl.î ; cf. Bro-
ckelmann, Arab. litt., 1, p . 369, k); 3° Commentaire de la Làmiyya d'ez-
Zaqqùq ; 4° Commentaire du grand lJ,iz b d'ech-Châdhilî; 5° Commentaire
de la prière dite el- Machîchiyya; 6° Commenlaire de la khotba du Mokh-
ta~ar de Khalîl; 7° Deux commentaires du poème de 'Abd er-Ral)mâu
el-Fàsî ur l'astrolabe; 8° Complément au commentaire des (Iodoûd d'Ibn
<Arafa.
(2) Exi te à Rabat, Mss., nO 414.
(3) Il de ses homonymes , mort quelques années plus tard, en 1191
(1790), e l lui aus i l'auleur d ' une fahrasa e limée. Cf. supra, p. 146, n. 7.
(4) Aboû'l-<Abbâs Al)med b. fol)ammed b. 'O mar Ibn <Achir el-An~ârî
el-Andalosî ech-Chommonî, grand saint de alé, mort dans celle ville en
rajab 764 ou 765 (avril 1.362 ou 1363) . Cf. en plus de la TolJ,fat ez-zd'ïr,
Ibn Qonfoudh, Ins el-faqîr wa-<izz el-lJ,aqir, ms. 385 de Rabat, fol. 1.6; el-
l;Iaçlramî, es-Salsal el-<adhb, fol. 2 de mon ms.; Ibn el-Q âçli, Jadhwal el-
iqtibds, p. 78; el-Kattânî, Salwat el-anfds, 11, p. 276 ; en-Nâ~irî, Istiq~d,
Il, pp. 99, 114 et 143; el-Foçlaïlî, ed-Dorar el-bahîyya, p : 363 ; Brunot, la
Mer ... à Rabat et Salé, p. 57, § 93.
(5) Cet ouvrage e t signalé par en- â~irl, Istiq~â, II, p. 99 et Brp.not, op.
cit., p. 58.
(6) Ethnique de la fraction d 'el-E;làfâl, dans le pays des Saghârna, au
nord de Marrùkech.
314 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Allah. Il fit ses études à Fès et à Salé et mourut dans cette


dernière ville en 1163 (1750) : il y fut enterré dans la nécro-
pole qui entoure le mausolée de son illustre homonyme. En
plus, il avait, en 1140 (1727-28), écrit une fahrasa qui
fournit d'intéressantes données sur les uléma de Salé au
XVlIIcsiècle (1) .

<Abd el-Majîd el-Manâlî ez-Zabâdî (2) . .

Le 11 (3) cha<bân 1163 (16 juillet 1750), mourut de la


peste, à Fès, un chérif idrisile qui portait le nom de <Abd el-
Majid b .. Ali b. Mal~ammeJ h .. Ali el-Manâli ez-Zabàdi (4)
et avait acquis au Mal'oc une assez gl>andè notoriété
comme lllystique, poète et médecin. Il a laissé une relation
de son pèlerinage à la Mekke, inti tulée Boloûgh el-marâm
bi'r-ri{ûat ilâ baïti'lla/t el-{utl'a771 et un opuscule hagiogra-
phiq ue : J/âdat el-mol'âd btt-la' rif bi'c/t-clzalklt Ibn <Ab-
bâd (5), consacré au saint Ibn <Abbâd (6), que la Salwat el-
c.tnf'ctS a pl'esque intégralement reproduit dans sa notice sur
ce dernier personnage.

(1) Celle j'ah rasa, ain i que la TolJ,j'at ez-zâ'ïr sont conservées à alé, en
as ez grand nombre d'exemplaires.
(2) Bl13LlOGRAPHlE. - el-Qùdil'Î, Nachr el-mathânî, II, p. 257 ; Tlliqât ed-
dorar, fol. 86 V O; el-Kallàni, Salwat el-anfâs, Il, p. 184; R. Basset, Rech.
bibl., p. 31, nO 82.
(3 ) Le 12 cha'bàn, d'après le Nachr el-mathânî.
(4) EI-Manàli e l l'elhnique de Manùla, loponyme du oÙs.
(5) Un exemplaire ms. de cel opuscule existe à l~abal, nO 407 (8).
(6) Aboù 'Abd Allah 1al).ammed b. Jbrùhim lbn 'Abbàd en-Nafzi el-
~Timiari er-L\ondî, soùl'l cl jurlsconsulle, prédicateur à Fès, où il mourut
le 4 rajab 792 (18 juin 1390) et sur lequel cf. Ibn el-Qùçli, Jadhwat el-
iqtibds, p. 200; Al).med Bùbà, Naïl el-ibtihâj, p. <287 ; el-Maqqarl, NaflJ, et-
tîb, HI, p. 175; el-Katlàni, Salwal el-anfâs, 11, p. 133; en-Nâ~iri, Isliq~â,
il, p. 143; Ben Cheneb, Idjâza, § 343.
LES 810GB.APlrES DU XII e SIÈCLE llÉG. 315

Mol,1ammed el-Makkî ed-Dara'ï (1).

C'est également vers le milieu d\1- XVIIIe siècle qu'il faut


placer la mort d'un écrivain du Sud Marocain, Abou 'Abd
Allah :Mol).ammed, dit el-~1akki, b. Moûsâ b. Mol).ammed el-
Kabir b. Mal).ammed b . -Mol).amnled Ibn Nâ~ir ed-Dara'ï el-
Moqdâdi, qui descendait du fondateur de la confrérie nil~i­
riyya et fut, à la nlort de son père, Aboû ' Imriln Moûsâ,
en 1142 (1729) , appelé à diriger la zâwlyya-mère de Tam-
groût. Il fit toutes ses études dans son pays, puis alla à plu-
sieurs reprises visiter les chapelles filiales de son ordre, à
~Jarràkech et à Fès. C'est dans la pl'emière de ces villes
qu'il rencontra, en 1151 (1738), l'historien el-Ifl'âni à la mé-
dersa d'Ibn loûsof. Sept ans plus tard, au cours d'un séjour
à Fès, il composa un poème en l'honneur d'Idris II, puis il
alla à Meknès et obtillt du qâçli de cetle ville. Aboù'l-Qâsim
el- 'Omaïr! (2), une ijâza complète. On ne sait exactement la
date de sa mort, qui l'atteignit à l'âge d'environ soixante-
dix ans. Il laissa un fils, Aboû ' Imrân Moùsâ, qui mourut
lui-même quelques années plus tard, à Fès (3).
Mol).ammed el-:M akki composa pendant sa vie un certain
nombre d'ouvrages se rapportant à son ancètre et à sa fa-
mille : ainsi, le Fatl} el-malik en-nâ$ir fî ijâzât mat'wtyyât
banî Nâ$ir; la Talfat ecl-da'a; el-Barq el-17'lâtir ft clzat,J:t en-
nasîm el-'â!ir, commentaire d ' un poème de sa composition à
la louange d' Ibn Nâ~ir; une relation de voyage à l'intérieur
du Maroc, intitulée er-Ril}lat el-nul/'l'âkochtyya; une biogra-
phie d'un saint de Tamgroût, 'Abd Allah b. el-I:Iosaïn el-
Qabbâb (4), dont il n'écrivit que la moitié et qu'il intitula

(1) BIB LlOGRAPHlE. - cn- à~ir.î , Tal'al el-mochtarî fî' n-nasab -el-ja'rarî, II ,
p. 149 ; R. Basset, Rech. bibl. , p. 40, n° 102. Renseignements four!1is par
le chérif 'Abd el-I1aï cl-Katlànî.
(2) Fils d e Sa'ïd el-'Omaïl'Î, sur lequel , cf. supra , p. 293.
(3) On trouvera la biographie de ce personnage dans el -KaltàllÎ , Salwat
el-anfds , l , p. 265.
(4) Mort en 1045 (J636-3t». Cf. cl-Urànî , ~afwal man inlachar , p. 70;
eL-Qàdiri, Nachr el-malhdnî, I, p, '169 ; Illiqât ed-dorar, fol. 14 yO •
316 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

er-RawÇl ez-zâhir (t't-ta< rif bi' ch-chaikh Ibn lf osain wa-


atbâ<ïh el-akâbir. Mais son œuvre la plus importante fut
son dictionnaire biographique des célébrités religieuses et
littéraires du pays du Wàdl Dar<a, auquel il donna le titre
d'ed-Dorar el-mora$$a<a bi-akhbâ,. a<ïân Da/'<a (1).
Ce répertoire se présente suivant la forme classique.
Dans son introduction, l'auteur confie qu'il s'intéresse à
l'histoire biographique et veut consacrer un ouvrage aux
personnagHs notoires de sa région d'origine; puis, après
avoir rappelé l'épisode de Râ'ïs er-Roû'asâ' (2), il donne une
liste de ses sou L'ces (3) et étudie chacun de ses personnages
classés dans l'ordre alphabétique de leurs prénoms, à lama-
nière d 'Ibn el-QâçJj et d ' A1).med Bâbâ. On trouve dans ses no-
tices, à coté de relations miraculeuses, des renseignements
littéraires parfois inédits, ainsi que des extraits de poèmes
religieux ou profanes. Son livre est, en même temps, l'his-
toire la plus ancienne du mouvement nâ. irite dans le Sud
du Maroc. Il fut terminé à la zâvvlyya de Tamgroût, si l'on en
croit l'auteur, le 14 mol)ë:lrram 1152 (13 avril 1739 ).

Al:tmed el-Hilâlî (4).

Al)med b. <Abd el- < zi~ el- Hilâlî es-Sijilmâsl descev.dait


d'un savant de Sijilmâsa, Ibrâh'im b. Hilâl. Dans cette ville,
il fut l'élève d'Al~med el-fjablb (5), et, à Fès, celui d'A1).med

(1) Cet ouvrage est aujourd'hui très rare au Maroc. L'exemplaire que
j'ai eu en main provient de la bibliothèque de Sidi <Abd el-l;Iaï el-Kattânî.
C'est une copie du 21 rabi 'I 1278 (26 septembre 1861 ), comprenant
28 cahiers à 20 pages petit in-4°. Le titre , dans l'introduction de l'ouvrage ,
esl annoncé de la façon suivanle :
~ ~ ~l! 0AJ ~.)~ 0~\ -,l~~ .\.~,..)"'J\ -'.J..J~ ~....
~-'~ ~l~La, ~:.~\ ~ ~j)\
(2) Cf. supra , p. '25-26 .
. (3 ) Cf. infra , Appendi~e 1.
(4) BIBLIOGRAPIIIE.- el-Qâdirî, Nachr el-malhânî, II, p. 273 ; Iltiqât ed-
dorar , fol. 93 rO.
(5) Cf. supra, p. 309, n. 3.
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 317

b. Mobârak es-Sijilmâsi (1), de Mol:lammed el-Gendoûz (2) et


d'es-Sarghini (3). Il se fixa ensuite dans le Tâfilelt, à Madaghra
et à Sijilmâsa, où il se liyra à l'enseignement; il fit de nom-
breux voyages à Fès et acconlplit à deux reprises le pèleri-
nage de la Mekke. Les docteurs d'Arabie et d'Egypte, entre
autres Mol,lammed el-f:lafnawi el-Mi!?rl (4), lui délivrèrent
des licences. Il forma de nombreux élèves, parmi lesquels
on peut citer Mol}ammed b. et-Tayyib el-Qâdirî, et mourut
à Madaghra le 21 rabr 1 1175 (20 octobre 1761 ). Il laissait
un certain nombre d'ouvrages, dont une relation de ses
voyages en Orient et une fahrasa qui a été résumée dans le
Nachr el-matltânt (5).

Idrîs et 'Abd er-Raqmân el-Manjra.

Une famille de souche idrisite, originaire de Tlemcen et


établie à Fès, connue sous le curieux sobriquet d'el · Man-
jra (6), acquit au XVIIIO siècle au Maroc une grande répu-
tation religieuse et littéraire, grâce à deux de ses membres,

(1) Cf. supra, p. 309.


(2) Aboû 'Abd Allah MoQ.ammed b. el-l;Iosa:Ln el-Gendoûz el-Ma~motJdî
el-Fàsî, savant de Fès, mort dans cette ville le 3 moQ.arram '1148 (26 mai
'1735). Cf. el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 237 ; Iltiqât ed-dorar, fol. 72
V O; el-Kattàni, Salwat el-anfâs, J, p. 235.
(3) Moi)ammed el-l abîr b. MoQ.ammed es-Sarghînî el-'Anbarî, imâm et
prédicateur à Fès, mort dans cette ville le 4 ou le 5 jomâdâ II 1164
(30 avril ou 1e r mai 1751). Cf. el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 258;
Iltiqât ed-dorar, fol. 87 vO; el-l attânî, Salwat el-anfâs, II, p. 340.
(4) Moi)ammed b. Sâlim el-l;Iafnawî. professeur et ~oûfî du Qaire, sur
lequel cf. el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 379.
(5) 10 Noûr el-ba~ar fi charfj, el-Mokhta~ar (de Khalîl); 2° Fatl). el-qaddoûs
fî charI), khotbal el-Qâmoûs; 3° el-Marâhim fî'd-darâhim ; 4° Commentaire
d'er-Rajaz el-mol),tawî 'alâ masâ' ïl Mokhta~ar es-Sanoûsî de 'Abd es-Salâm
el-Qâdiri; 5° Orjoûza min soknat bail fî'l-madrasa; 6° lq,â'at el-odmoûs wa-
ridq,at ech-chomotls min i~tildl:t ~âJ:tib el-Qdmoûs; 7° Qa~îda fî madi),
el-Qâmoûs.
(6) Ce mot désigne dans le langage courant un « atelier de menuiserie»
et, dans les ports, un «( chantier de constructidns navales ».
318 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Idris b. Mal)ammed b. Al) med el- fJasani el-Idrisi el-Man-


jra (1.), mort le 26 mol:larTam 1137 (15 octobl'e 1724), et l'un
de ses fils, 'Abd er-Ral)mân (2), mort le 5 dhoû'l-l)ijja 1179
(15 mai 1766). Ces deux savants, qui furent des j uriscon-
suItes, ont laissé chacun une fahrasa, dont on trouve encore
d'assez nombreux exemplaires daNs les vi ll es du pays (3).

Ma~ammed b. A~med el-Fâsî (4).

Mal)ammed b. A~lmed b. Mal)ammed, arrière-retit-fils


de <Abd el-Qâdir el-Fâsi, naquit à Fès en 1118 (1706-07)
et assista aux leçons des savants de l'époque, Mal)am-
med b. 'Abd er-Ral)mân el-Fâsî ( 5 ) , ~1ol)ammed el-
Masnâwi ed-Dilâ'ï, el-vVajjârî (6) , A}:lmed es-Sijilmâsi,
et-Tammâq (7), Mol)ammed Ibn 'Abd er-Ra}:lmân ed-Dilâ'ï (8),
Bennâni, Mal)ammed Mayyâra (9), Mol)ammed el- Gen-

(1) Né en 1076 (1666). Cf. sur lui el-Kattânî, Salwal el-anfâs, Il, p. 272 ;
R. Basset, Rech. bibl., p. 19, nO 37.
(2) Né en 1111 (1700). Cf. sur lui el-Kattânî, Salwal el-anfâs, lI , p. 270;
R. Basset, Rech. bibl., p. 19, nO 38.
(3) En 1179 mourut également, à Tétouan, un savant affilié à la con-
frérie nâ~irite, Mol).ammed b . 'Ali el-Warzâzî et-TigâwaFlî, qui a laissé
une fahrasa, source de la Salwat el-anfâs (III, p. 359, 1. 19-20; cf. R. Bas-
set, Rech. bibl. , p. 20, nO 44 ).
(4) BIBLlOGRAPlIlE. - el-Kattânî, Salwat el-anfâs, l , p. 321; R. Basset,
HëCh. bibl., p. 40, nO 103.
(0) Cf. supra, p. 29;:;.
(6) Aboû'l-'Abbâs Al).med b. 'Ali el-Wajjârî el-Andalosî el-Fâsi, savant
de Fès, mort dans cette ville le 11 jomâdâ 11 1141 (12 janvier 1729). Cf. el-
Qâdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 216; Iltiqât ed-dorar, fol. 67 rO; el-Kat-
tânî , Salwat el-anfâs, II , p. -148.
(7) Aboû 'Abd Allah Mol).ammed b. Al).med b. Mol).ammed b. 'Abd er-
RaJ:lmân et-Tammâq el-Andalosî el-Fâsî, savant de Fès, mort dans cette
ville le 10 jomâdâ 11151 (26 août 1738). Cf. el-Kattânî, Salwal el-anfâs, II,
p.125.
(8) Cf. supra, p. 302-303.
(9) MaJ:lammed b. Mol)ammed (ou Al)med) 'b. Mal)ammed Mayyâra el-
Fàsî (surnommé el-lJafîd (le petit-fils) ou el-A~ghar (le plus récent), pour
le différencier de son grand-père, l'auteur du commi:mlaire d'el-Morchid
LES BIOGRAPHES DU XIl 6 SIÈCLE HÉG. 319

doûz (1). Il fut d'abord notaire aux l)oboûs cl'el-Qarawiyln,


puis prédica teLlr à la mosquée d'el-Andalos. IL mourut le
20 rabrI 1179 (6 septembre J7 65) et fut enterré dans la
zâwlyya de son ancètre, au quarliee d'el-Qalqali}in (2).
En dehoes cl u commentaire d'un opuscule de son arrière-
grand-père, ~Ial)ammed el-Fâsi n'a composé quP- des travaux
de biographie ou de généalogie chérifienne; un commen-
taire de la Don'at et-ttjân de son maiLre Mol)ammed Ibn' Abd
er-Ral)mân ed-Dilâ'ï; une biographie étendue de 'Abd es-
Salâm el-Qâdirî, intitulée el-Mawrid el-hanî bi-akhbâr el-
imâm el-mawlâ 'Abd es-Salâm ech-chal'ifel-Qâdil'Îel-lJasanî;
une sorte de répertoire des auteurs et des savants musulmans
de son époque; enfin, un opuscule sur les choda du Maroc.

Moqammed b. et-Tayyîb el-Qâdirî (3).

En même temps que la famille des Fâsîyin continuait à


garder intacte, dans la capitale, son influence religieuse et
intellectuelle, la branche des chorfa Qâdiriyin ne perdait rien
de sa puissance: zâwîyya châdhilite et qâdirite ne cessaient
pas de se faire concurrence, pacifiquement d'ailleurs. A la fin
du XVIIIe siècle, le personnage le plus marquant de cette del'-
nière famille est le petit-fils du généalogiste 'Abd es-Salâm

el-mo'ïn d'Ibn 'Achir, sur lequel cf. supra, p. 208), grand imàm de Fès,
mort le 15 moJ:larram 1144 (20 juillet 1731). Cf. el-Qâdirî, Nachr el-ma-
lhdnl, ] [, p. 235; Iltiqât ed-dorar, fol. 70 1'0; el-l attânî, Salwal el-anfâs, I,
p.167.
(1) Sur ce personnage, cf. supra, p. 317, n. 2.
(2) Mal)ammed el-Fâsî eut un frère, Mol)ammed, dit Aboû Madian, mort
le 11 cha'bân 1181 (2 janvier 1768), qui composa un ouvrage intitulé el-
Mof},kam f'î'l-l),ikam, source de la Salwal el-anfâs (I ll , p. 362, 1. 1; cf.
. H. Basset, Rech. bibl., .p. 40, nO 105), et qu'il ne faut pas confondre avec
son homonyme Aboû Madian b. MaJ:lammed el-Fàsî, mort de la peste en
1080 (1678). Cf. el-Kattànî, Salwat el-anfâs, I, p. 322.
(3) BIBLIOGRAPHIE. - Nachr el-malhânî et Iltiqât ed-dorar, in fine; el-Kat-
tâûî, Salwal el-anjâs, 11, p. 351 j R. Basset, Rech. bibl., p. 34,' nO 93. Graulle,
dans son introduction à sa traduction du Nachr el-malhânî, a traduit, sans
eu respecter l'ordre, la notice d'el-Kattùrtî sur él-Qâdir1.
320 LES HOMMES , ET LES ŒUVRES

el-Qâdirî, qui, lui aussi, va consacrer la plus grande part de


son activité à la composition d'ouvrages de science islâmique
et surtout de recueils biographiques sur les chorfa et les no-
tables de son pays.
Aboû 'Abd AUahMol},amrned b. et-Tayyîb b. 'Abdes-Salâm
el-l:Iasanî el-Qâdiri naquit à Fès le 7 rabr 1 1124 (14 a vri11712)
et, dès l'adolescence, comnlença à fréquenter les cours
des savants de la ville : Al},med es-Sijilmâsî (1 ), Ma-
1}ammed b. 'Abd es-Salâm Bennâni (2.) , ,Mol},ammed el-Gen-
doûz (3), Mol)àmmed el-Kabir es-Sarghînî (4), et :Mal},ammed
Gessoûs (5), qui, tous, délivrèl"ent des licences écrites ou
orales.
A l'encontre des autres lettrés de Fès, dont la culture ap-
profondie et les tendances au mysticisnle s'alliaient fort bien
au souci d'une existence matérielle abondante et facile, Mo-
1}arnrned el-Qâdirî fit preuve, durant toute sa vie, d'un déta'-
chernent à peu près complet du monde, vivant seul et con-
sacrant la plus grande partie de son temps à la prière et à
l'étude. Il versa assez tôt dans le ~oûfisme, auquel l'initiè-
rent Aboû Bakr ed-Dilâ'ï (6), el-Modarra' (7) et 'Abd es-Sa-
lârn et- Tawâtî (8). Il ne voulut jamais remplir de charges

(1) Cf. supra, p. 309.


(2) Cf. ,supra, p. 312.
(3) Cf. suprd, p. 317, n. 2.
(4) Cf. supra, p. 317, n. 3.
(5) Aboû 'Abd Allah Mal).ammed b. Qâsim Jassoûs (Gessoûs), chaïkh el-
jamd'a à Fès, né en 1089 (1678-1679), mort le 4 rajab 1182 (14 novembre
1768). Cf. el-Qàdiri, Nachr el-mathânî, Il, p. 284; el-Kattânî, Salwat el-an-
fâs, l, p. 330; en-Nâ~irî, Istiq!iâ, IV, pp. 92, 255; Brockelmann, Ar. litt., l ,
p.162.
(6) Aboû Bakr b. Mol).ammed b. Mol).ammed el-Khadîm b. Aboû Bakr
ed-Dilâ'ï, ~oûfî réputé, mort à Fès le 10 jomâdâ I 1149 (21 septembre i 736).
Cf. el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 240; Iltiqât ed-dorar, fol. .74 rO; el-
I:Iawwât, el-Bodoûr er/--cf.,âwîyya, fol. 229; el-Iâzighî, {iadâ'ïq el-azhdr en-na-
dîyya, vers 175-179; el-Kattânî, Salwat el-anfâs, II, p. 339.
(7) Cf. supra, p. 304.
(8) Aboû Mol).ammed 'Abd es-Salâm b. el-l,Iâjj Mol).ammed et-Tawâtî
el-Ja'farî el-Fâsî, mort à Fès le 1. er rajab 1155 (1 er septembre 1. 742). Cf. el-
Qâdid, Nachr el-mathânî, II, p. 246; Iltiqât ed-dorar, fol. 79 vo ; el-Kattânî,
Salwal el-anfâs, J, p. 248.
LES BIOGRAPHES DU XU tl SIÈCLE HÉG. 321

honorifiques et ne resta que peu de temps titulaire de celle


d'imâm et de pr'édicateur à la mosquée d'el-Andalos, qu'il
avait dû accepter par ordre impérial. Il se contenta, pour
gagner sa vie, d'exel'cer la fonction de témoin-notaire, dans
une boutique du simâ! d'el-Qarawiyln, qu'il quittaitdès qu'il
avait gagné une once. En 1176 (1762-63), il sollicita et obtint
du savant égyptien el-I-:Iafna"vi (1) une ijâza générale dontil
nous a conseL'vé le texte (2). Il mourut à Fès, le 25 cha'-
hân 1187 (11 novembre 1773} et fut enterré le lendemain,
dans le jaL'din proch'e de Bâb el-Fotoûl,l qui servait de cime-
üère à sa famille.
Mol,lammed el-Qâdiri a laissé une œuvr~ relativement con-
sidérable; l'histoire et la biographie y tiennent la place la
plus large. Dans la liste de ses tl'avaux telle qu'ill'a dressée
lui-même (3), on peut rele\'er, en effet~ en plus de ceux qui
se rapportent à la science nlusulmane (4) : une monographie
relative au saint Qâsim el-Kha!?â~l (5), intitulée ez-Zahr el-
bâsùn âw el-'or( en-nâsim fl manâqib ech-chaïkh sayytdî Qâ-
sim wa-ma'âtlzi,. man lalto min el-achiâkh wa'l-atbâ' ahl el-
makâJ'im (6) ; un opuscule consacré à la branche des Chorfa
descendant d 'el-I:IosaIn et connus au l\1aroc sous le nom de
Chorfa $aqalHyin (Siciliens) : LamIJat el-bahjat el- 'âlîyya ft

(1) Cf.supra, p. 317, n. 4.


(2) Cf.Nachr el-mathânî, II, pp. 280-283.
(3) Cf.lllirzdt ed-dorar, fol. 104 vO.
(4) Ce sont: i ° Farîdat el-ichtîydq fi tartîb lâmiyyal ez-Zaqqâq; 20 el~
Fall). wa'l-taïsi,. fî âïat et-tarjhîr (s ur Je verset 33 de la soûrate XXXIII du
(Jo,..); 3° A chraf el-wasd'ïl bi-roûdt ech-chçunâ'U; 4° LamT:tat ed-dorr en-na-
fis fi-man oû~ifa bi't-tadlîs; 5° el-Mawrid el-mo'in fi charI). el-Morchid 'el-
mo 'ïn; 60 el-Ta'bîr 'an chanâ'at monaklcir et-takbir; 70 Iqtitdf el-ma'ârif
min soû' dl ech-chaïkh el-'Arif (réponses à des questions posées par Ai:lmed
Ibn 'Abd Al Lah Ma 'a n) ; 8° Mawâhib et-lakh~î~ Ji charI). chawâhid et-talkhî$;
90 e~-$awdrim el-falakîyya fî nof),oûr ahl el-qa~îdat el-afalcîyya; 1.0° Dorrat
el-mafd/chir li-sayyîd el-awwalîn wa'l-awâkhir wa-ghorar dl-baïtih el~ma­
châhir.
(5) Sur ce saint, cf. supra, p. 273, l1. 6. ,
(6) Connu aussi sous le titre abrégé d'e z-Zahr el-bâsimfî'l-[{hâ~â~î sayyîd:.i
Qâsim. D'après el-Katlàni, qui indique le plan et l'étendue de l'ouvrage,
cette monographie avait été commencée par le grand-père d'el-Qàdiri
(Salwat el-itn{ds, lI, p. 284).
21
LES' 'HOMM:atS - ET LES- ŒUVRES

bac rt' foroû' ech-chd bat el-lJosaïnîyyat e?-?aqall?yya; un


t

obituaire de 313 vers rajaz sur la famille des Fâsiyln, intitulé


Farîdat ed-dorr e..,>-?afî fî wa?f el-jamâl el-io~îsofî (1) ; un ap-
pendice à la Kifâyat el-molJtâj d'A1).med Bâbâ : el-Iklîl wa't-
tâj fî tadhyîl Kifâyat el-mol)tâj " des notes marginales sur-
ed-Dorr es-sanî, le traité généalogique de son grand- pèrer
:Mais l'œuvre la plus importante d'el-Qâdiri est son double
dictionnaire des célébrités des XI e et XIIe siècles de l'Hégire ,.
le Nachr el-mathânî et l'lltiqât ed-dorar.
,- Il Y a déjà assez longtemps que, grâce à l'édition litho-
graphiée de Fès (2), le preluier de ces dictiorinaires est connu
des historiens de l'Afrique du Nord et des orientalistes; le
second, par contre, n'existe qu'en un très petit nombre
d'exemplaires et n'a pu, de ce fait, être encore utilisé (3).
Tous deux furent vra'i semblablement les derniers ouvrages
d~e l-Qâdirî et répondaient dans son esprit exactement au
même but. Alors qu'en effet, le répertoire hagiographique
d'Ibn' Askar avait été continué, pour le XI e siècle de l'Hégire,
par l'historien el-Ifrânî, il n'existait pas, pour ce même
siècle,' dans la littérature marocaine, de dictionnaires des
célébrités musulmanes de tout ordre. Ce fut cette lacune
que se' proposa de comLler Mo1).ammed el-Qâdirî, qui d'ail-
leurs, ignorait l'existence de la $afwat man intachar, écrite
pourtant à peu près à la même époque.
Les premiers résultats de l'enquête d'el-Qâdirî futent con-
signés dans l'lltiqâ; ed-dorar wa-rnostafâd el-rnawâ c i:? wa' l-
' ibar min akhbâr aCïân el-mi'at eth-thânîyya ,wa-l-I)âdîyya

(1 ) Cf. el-Kattànî, Salwat el-anfâs, Il, p. 311, in fine .


. (2) Deux volumes lithographiés en 1310. Le copiste a commis une
erreur dans la pagination du tome II, entre les pages 161 et 249. Nos
r'éférences à celte partie de l'ouvrage donnent toujours le numéro de la
page tel qu'il devrait figurer sur l'exemplaire. La plus grande partie du
Nachr el-mathânî, jusqu'au début du Xll e siècle H. (1689' J. C. ), a été tra-
duite, d'abord par Graulle et Maillard , puis par Michaux-Bellaire, dàns les
tomes XXI et XXIV des Archives marocaines, en 1913 et 1917, sous le titre
de Nachr al-:-Mathânî de Mouhamm-ad al-Qâdirf .
.(3) Le seul exemplail:e que nous en 'c onnaissions au Maroc est celui que
possède 'la bibliothèque-de Rabat. On en trouvera l~ 'deseripÜql?- d!l?,~. nos
Manuscrits arabes de Rabat, nO 379, p. 130. . . " - ( , ,- \ , ' 1

... .,.
LES BIOGRAPHES DU xù e SIÈCLE HÉG. 32,3

(achar (1 ), dont l'auteur - termina la première rédaction


en 1170 (1756-57) et qu'il li,v'ra au public de son pays à
partir du 27 ~afar 1182 (13 ' juillet 1768). Ce réper-toire était
suivi de plusieurs appendices; dans l'un ' d'eux, fournis l
sant la liste complète de ses ouvrages, il ne mentionne
pas son autr~ dictionnaire, beaucou'p plus étendu:' 'qù.e
l'Iltiqât ed-dor(lr, et ,donc vraisemblablement postérieur à
ce dernier: le Nach,. el-mathânî li~ahl el-qarn el-IJâdî 'achap
wa' th-thânî. '
Ces deux travaux se ressemblent étrangement ;' ils ne peu-
vent être résumés ou examinés séparément; ce sont deuxédi-
tions d'un mênle livre, sous une forme à peine différente. ,Il
est probable qu~el~Qâdiri, ayant éCI'it, sans trop entrer dans
le détail, le premier de ses dictionnaires , éprouva 'p ar la suite
le besoin de le remanier, en l'accroissant de renseignements
nouveaux sur chacun des personnages qu'il étudiait. Tous
deux ont comme point de départ l'année 1001 H.; tous deux
~'arrêtent à l'année' 1170; l'ordre de succession des biogra-
phies est le même, et, dans la plupart des cas, il n'est pas' de
fait notoire consigné dans l'un, qui ne soit également ra'p"
porté par l'autre. .
" L'Iltiqàt ecl-clorar, si l'on ajoute foi aux quelques li.gnes
de préface qu 'el-Qâdirî a placées au début de l'ouvra'ge~, ié
présente, ' dans l'esprit du biographe, comme une' sUIte,
jusqu'à son époque, du supplément qu'Ibn el-Qâ~i, sous le
titre de. Laqt el-farâ'ïcl, avait composé pour compléterjusqu'à
l'an 1000 H: , le répertoire de wafayât d'Ibn Qonfoûdh inti:
tulé Charaf e!-tâlib fî asnâ' l-matâtib (2). Il 'justifie encor~
~'une autre façon lis raisons qui l'ont poussé ,à écrire le
Nachr el-mathânî. Ce n'est plus seulement le'complémeht
d'une œuvre antérieure, mais aussi la reprise d'un projet que
son grand-père ' \Abd es-Salâm el-Qâcliri a'v ait , à pein~ ébau-
, .

(1) Tradüis,a nt ,l a notic~ de la Salwat ;~l-anfâs relative à ei-Qfldir1,


Graulle (loc. cit. , XXI, p. 3) a 'eu la malhe/~reu e idée de couper en deuX'.
l'e titre complet de l' Iltiqât ' ed-dorar, jét, du mêmé coup, fait du diction.-:-
, naire biographique dc'tix travaux, êitstincts. '
p.
(2) Cf. Iltiqâr ed-do'r ar, fol. ·jf ·ét supra, 98. )J) JI 1;':
324 " LES · HOMMES ET LES ŒUVRES

ché dans un QPuscule que la mort l'empêcha de terminer, et


qui devait porter le titre de Nozltat en-nadt (1) .
, En toutcas, ce qui fait l'originalité de l'un et de l'autre réper-
toire, c',est qu'à la suite de 1'0 bitu 'lire de chaque année, prend
plac~ presque toujours une SOl'te de r'é~umé des événements
politiques saillants d~ celte même année. A la matière bio-
graphique des deux cl i.ctionnaires se joint ainsi une docu-
·mentation d'annales, qui, n~algl'é sa concision, offre pour-
tant un indéniable intéeêt. C'est surtout dans ces brèves
relations hi.storiques annuelles que la comparaison est fruc-
tueuse entre l'lltiqât ed-dorar et le Nachr el-mathânî. Le
premiel' selnble, à cet égard, encore plus précis ct plus dé-
taillé que le second (2).
Le premier dictionnaire d'el-Qâdiri se distingue encore de
l'œuvre postél'Îeure par les élénlents autohiogt'aphiques qu'il
renfer,me. Le dernier tiers de l'ouvrage est en effet constitué
par une série d'appendices, où l'on trouve la lisle détaillée
.des maîtres du biographe, la liste de ses ouvrages, celle des
traités qu'il. expliqua au temps où il professait à la mosquée
d'el-Andalos, un~ généalogie complète des èhorfa Qâdiriyin
de Fès, et l'indication des différents quartiers qu'ils habitè-
rent dans la capitale, 'depuis le moment de leur venue d'Es-
pagne. 1

. On est frap pé, dès que l'on parcourt l' œu vre biogra phique
de MOQammed el-Qâdiri, par le peu de cas qu'il semble faire
de la mystiq~e ~oûfique et de la ter'minologie relative aux
titres hiérarchiq ues spirituels qu'eUe a instaurés. Il en donne
des raisons, un peu obscures d'ailleurs, au début du Nachl'
el-matltânî. D'autre part, il déclare Ci ue les' notices de son
répertoire seront consacrées à des souverains, des savants et

(i) Cf. Nachr el-malhânî, 1, pp. 3 et 33 in .fine et supra, p. 280,


(2) Ainsi, pour l'année 114f, alors que le Nachr el-malhdnî (11, p. 218) ne
signale dans sa chronique historique que la proclamation de Moulay <Abd
Allah, l'Illiqât ed-dorar ·(fol. 67-69) insiste longuement, et avec beaucoup
de détails précis, sur l'a narchie qui., à cette époque divisait le Maroc. Il
.y aurait peu~-être intérêt à publier et à traduire séparément les « annales )
de l'lltiqdt ed-dorar, confrontées avec celles du Nachr el-mathânî, en lais-
sant de côté la liste d~s wafayât, qui présentent un intérêt différ~nt.
LES BIOGHAPHES DE - XIIe SIÈCLE HÉG. 325

des saints; mais les seconds y sont, en définitiv~, les plu"s -


nombreux. - Cet ascète tire surtout vanité de sa science; et
ses sympathies vont avant tout aux lettrés, marocains comme,
lui, ou même musuhnans étrangers. Il accorde à ces der·
niers une lél'rge place, en puisant surtout aux -ribla de ses
contemporains et de ses deva.nciers.
En dehors de la Safwat man intachal', dont il n'a pas soup-.
çonné l'existence, el-Qâdiri connaît fort bien tous les ou·
vrages biographiques écrits avant lui au Maroc: il semble
en avoir til'é le plus gTand parti. Il est, de mêm.e, au courant
de toute la littérature historique relative à la dynastie saC.
dienne, et l'on a vu, dans les pages qui précèdent, que,
tout comme celle d'el-Ifràni, son œuvre met sur la trace de
quelques sources de l'histoire du Maroc aujourd'hui perdues.
EI-Qâdirî est un enquêteur qui parait avoir mené ses re-
cherches a vec assez de conscience. ~r ais il a un défaut qui
fatigue le lecteur, et qui consiste dans l'abus qu'il fait de di-
gl'e.ssions de tous genres; d'autre part, il arrive souvent que
des considérations strictement religieuses, un appel au re-
noncement et à l'humilité viennent clore très brusq uement
tout un développement auqnel il s'est laissé entl'ainer. Le
principal grief que l'on puisse, dès lors, faire à el-Qâdirî est
le manque d'unité de son œuvre. Il n'a pas su rendre at-
trayant le sujet qu'il s'est proposé de traiter, en dépitdeson
information solide et en général, complète. Il y a loin de sa
manière à celle d'un Ibn el-Qàçli, ou encore plus à Gelle du
maître de la biographie nlal'ocaine, ~/lol).ammed b. Ja<far el-
Kattâni.
Il est permis de se demander si el-Qâdiri, non content
d'avoir fait d'un même sujet deux ouvrages de titre diffé-
rent, l'un abrégé, l'autre plus développé, n'a pas encore
jugé nécessaire d'établir du Nachr el-mathânî, une version
autre que celle dont l'atelier lithographique de Fès édita
plus tard le texte. C'est du moins ce qu'affirme l'auteur de
la Salwat el-anfâs (1). De fait, il semble que ce dernier

' ('1) Cf. m, p. 361, 1. '15. Il semble que cette rédaction développée ait
porté aussi le titre d'e l-A zhâr en-nadîyya. On en -trouve quelquefois des
~
',LES
, ,
lI'OMMES
. , ,.ET
. , LES ŒUVRES.
, .

~it :eu, entreles 'J !lains un Nachr el-mqthâni plus ,c omplel et


$urtout mis à jour au de)à de 1170 t jusqu'au moil~s , en 1183,
(1,769). On n~ ,~ ()i~ pas, ~ependant, quel,s mo.tifs o.nt pu
po.w~ser e<l-Qâ~iri à écrire par trois fo.is le même o.uvrag€,
sous ~.ne forme résumée, moyenne , et étendue. Il est vrai
qu'ez-Zayyâni n'allait pas agir bien différemment, en rap- .
portant à trois ' reprises l'histo.ire des sultans 'alawites.

Les biographes des Chorfa de Wâzzân.

C'est au XVIIIe siècle que la maiso.n des Chorfa de 'Vâzzân


prit au Maroc to.ut son esso.r (1). La célèbre zâwlyya, fo.ndée
par Moulay 'Abd Allah ech-Charlf, acquit à cette épo.que une
importance sans cesse grandissante, et les co.nfréries éta-
blies par les petits-fils de ce personnage, Mo.ulay et- To.hâmî
et Moulay et-Tayyîb, so.us les no.ms de To.hâma et de Tayyi-
biyya, co.mmencèrent à former des adeptes sur to.us les '
points de l'Afrique du No.rd. Aussi, est-il naturel que cette
famille chérifienne ait trouvé bientôt ses histo.riographes.
La première mono.graphie qui leur fut consacrée po.rte le
titre de Tob/at el-ikhwân bi-ba'4 manâqib clzorafâ' Wâzzân.
Elle est due à la plunle d'un chérif l,lasanî de la branche des
Joûtîyîn, Abo.û'l-'Abbâs Al,lmed, surno.mnlé Bamdoûn, b.
Mol,lammed b. Bamdo.ûn b. Mas'o.ûd et-Tâhiri el-Jo.ùti (2), '
qui fut à Fès l'élève d'Al,lmed b. Mobârak es-Sijilmâsl et de
Mal,lammed Gessoûs, devint un disciple assidu d'et-Tayyîb

passages chez les biographes postérieurs (ainsi el-I:Iawwùt). Ils correspon-


dent d'ailleurs exactement au texte du Nachr el-mathânî lithographié', Cf.
aussi en- â~irî, Istiq$â, IV, p. 31.
(1) La bibliographie européenne des Chorfa de Wâzzân est fort nom-
breuse. Cf. principalement, R. Spence Watson, A Visit Lo Wazan, London,
'1880; Depont et Coppolani, les Confréries religieuses musulmanes,
p. 445 sqq. ; E. Michaux-Bellaire, la Maison d'Ouezzân, in Revue du Monde
mus., mai 1908. Les dates de la mort des premiers chefs de la zâwîyya
sont fournies par en-Nâ~irî, Istiq$â, IV, p. 51.
(2) BIBLIOGRAPHIE. - el-Kattânî, Salwat el-anfâs, II, p. 72; R. Basset,
Rech. bibl., p. 43, nO 117.
LES l;lIOGR!PHES DU XIIe .SIÈCLE nÉG. 327,

el- Wàzzâni et mourut dans la capital~, le 22 jomâdà II 1191


(28 juillet 177'7) , après avoii' exercé une , suppléance de pré-
dicateur à la mosquee d'el-Qarawiyin. Son ouvrage, qui a
été lithographié à Fès (1), 'retrace l'histoire de la maison de
VVâzzân .e t rapporte les manâqtb attribués à son fondateur.
En marge de la l'oh/at el-ikhwân est lithographié, dans
l'édition de Fès, un opuscule qui a trait à l'un des membres
de la même famille chérifienne, 'Ali b. Al).med b. et-Tayyîb
b. Mol).amn1ed b. 'Abd Allah ech-Charif el-Wâzzânî (2), et
qui porte le titre d'el-J(awkab el-as'ad fî manâqib sayyîclinâ
wa-mawlânâ 'AU ben Al;med. L'auteur, qui était originaire
du bourg de Miknâsa de Tâzâ et qui vivait au XIX e siècle,
s'appelait Aboli 'Abd Allah Mol).ammed b. Bamza el-
Miknâsi.
Enfin, la Salwat el-anfâs (3) signale qu'un recueil des
nUlnâqib de Moulay.' Abd Allah el-Wâzzânî fut dressé par
un chérif qâdirite, du nom d' Aboû ~ol.lammed 'Abd es-
Salâm b. el-Khayyât b. Mol).ammed b. 'Allâl, vers la fin du
XIIe siècle de l'Hégire (4).

el-Ghazzâl (5) .

On a vu plus haut que, sous le règne de Moulay Ismâ'Il,


un secrétaire de ce sultan, envoyé en ambassade en Espagne,
avait écrit, à cette occasion, une relation de voyage. Dans
la seconde moitié du XVIIIe siècle, un autre secrétaire des
princes 'alawites fut chargé d'une mission analogue, et,
comme son prédécesseur, crut utile de laisser de ses péré-
grinations à travers la Péninsule un récit détaillé.

(1) En 1324 H.
(2) Mort à Wàzzân à la fin de rabi'l '1226 (24 avril '1811). Cf. el-Kattânî,
Salwat el-anfâs, l, p. 104.
(3) Ill, p. 362, 1. 13-14. Cf. R. Basset, Rech. bibl., p. 43, nO 118.
(4) Son oncle paternel Hàchim naquit à Fès en '1120 (1708-1709) et y
mourut au début de 1'187 (1773 ). Cf. el-Kaltânî, Salwat el-anfâs, l , p. 285.
(5) BiBLIOGRAPHIE. - en- J a~irî, Istiq~â, IV, pp. 99, 100, 107 , 108 et 114;
el-Kattàni, Salwat el-anfâs, l, p. 33'1 ; Brockelmann, Ar. litt., II, p. 465.
328 J... ES HOMMES ET LES ŒUVRES

Aboû'l- 'Abbâs Al)med b. el-Nlahdi el-Ghazzâl el-Anda-


losî el-Mâlaqi avait d'ailleurs grandi dans le voisinage
immédiat de la cour de Meknès. Son père, el-Nlahdi, des-
cendant d'anciens érn igrés de Malaga, et qui peu t-être aussi
avait 'fait un voyage en Espagne, avait été secrétaire de
Moulay Ismâ'Il; on a vu qu'il figure dans la liste des adtb
aveclesquelsel-'Alaml, l'auteur j'el-Anis el-motrib, échangea
des poèmés. A.b.med, qlli fut en relations avec l'historien ez-
Zayyâni, et acquit comme son père la réputation d'un lettré
délicat, faisait également partie, en qualité de secrétaire,
du makhzen de Sidi Mo.b.anlmed b. 'Ahd Allah. Ce fut à ce
titre qu'il fut désigné par ce sultan, à la fin de 1179 (1766),
pour accompagner, puis diriger une ambassade qui compre-
nait deux qâ'ïd du gich des Oûdâya, Aboù la'lâ 'Amâra b.
MoÎlsâ et Aboû 'Abd Allah 1\10l)amnled b. Nâ~ir; ils anlÎent
mission de se rendre auprès de Char·les III d'Espagne, pour
négocier l'échange de captifs appartenant aux deux nations.
EI-Ghazzâl, comme auparavant el- VVazir el-G hassànî, dut
passer pal' le préside de Ge uta, où il arl'iva le 15 dhoù'l-
1).ijja 1179 (15 mai 1766). Six jours après, il débarquait à
AIgésil'as ; puis, soit à cheval, soit en carrosse, il trayersa
successi vement Séville et Gord oue avant d'arriveJ' à Mad rid,
où il fut reçu en gl'ande pompe et eut avec le nlonarque
esp::lgnol plusieurs entrevues. Une fois sa mission l'emplie,
il rentra dans son pays, après plus de huit mois d'absence,
acconlpagné d'une ambassade espagnole ayec laquelle Sidi
Mol)ammed b. 'Abd Allah conclut, peu 'de temps en 'uite, le
26 mai 1767 ~ un traité de paix et un accord réglementant
Véchange des ca ptifs. Trois ans plus tard, en 1182 (1768),
el-Ghazzâl fut à nouveau chal'gé, avec les deux qâ'Id Oûdâya,
de se rendre' à Alger, pour présider à la restitution de pri-
sonniers algéL'iens et espagnols. Il s'acquitta brillamment
de cette seconde mission, et il était l'un des fonctionnaires
les plus en vue de la cour du sultan, quand ce dernier,
venu assiéger Mélilla au début de 1185 (avril 177'! ) et rap-
pelé par le roi d'Espagne à l'observation du tl'aité de paix,
fut obligé de se retirer et dut même ramener son matériel
d'artillerie sur des navires espagnols! Fort mécontent de '
T~ES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 329 .
,
cette déconvenue, Sidi Mol)ammed b. 'Abd Allah s'en prit
à el-Ghazzâl, qui avait rédigé le texte du traité, et Je révo-
qua de ses fonctions de secrétaire. L'ancien ambassadeur
se retira alors à Fès, perdit bientôt la vue et mourut en 1191
(1777) ; il fut enterré dans la zàwÎyya de <Abd el-Qâdir el-
Fâsi, au quartier d'el-Qalq'aliyln.
A son retour d'Espagne, el-Ghazzâl avait été invité par
son maitre à écrire une relation détaillée de son voyage
officiel. Il lui donna le· titl'e de Nad/ca el-ijtilzâd fl'l-mohâ-
dana wa'l-jihâd (1). Elle est écrite exactement à la façon de
la l'ibla d' Al~rned el- Wazir, dont elle est certainement ins-
pirée en maints endl'oits. COll1me cette del'nière, elle s'ar-
rête à de longues descri plions de toutes les étapes du voyage,
mais elle a sur elle l'avantage de s'exprimer de manière
plus nette sur le but exact de la mission: libération immé-
diate des captifs invalides; relevé complet des noms des
captifs lnusulmans, sujets marocains, Il s'agissait éga lement
d'obtenir des autorités espagnoles la promesse de tf'aiter
les prisonniers avec plus d'humanité et de leur permettre
d'obéir aux prescriptions religieuses de l'Islâm.
D'ailleurs, la description de l'Espagne d'el-Ghazzâl
est aussi pittoresque que celle d' el-'\Vazir el-Ghassâni.
Il s'attache à noter soigneusement tout ce qu 'i l a vu ou
entendu; par contre, il est par trop infatué de sa personne
et de son pays, dont il souligne à chaque page la supé-
riorité en toutes choses. Néann10ins, la rilJ,la d'A1)med el-
Ghazzâl, tout enjolivée qu'elle soit dè réminiscences litté-
rair'es, a, en plus de son intérêt historique, une valeur
documentaire certaine: elle trace de l'Espagne, à la fin du
XVIIIe siècle, un tableau « à l 'orientale» assez comparable,
par exemp le, à celui que l'ambassadeur turc Méhémet Efendî
donna de la France au temps de Louis XV. Ez-Zayyâni se sou-
vint peut-être de certains passages de cette ribla, quand il

('1) 11 en exi le un exemplaire à Paris (Bibl. nat., n ° 2291 ), à Londres


(BrH. Mus., n'o 381), à Alger (Bibl. naL., n O t138 (2)) et deux à Rabat
(nOS 411 el 418), M. Bodin a donné de la ril),la un résumé parfois tendan'-
cieux, in Archives Berb ères , vol. 3, Paris , '1918, p. 145-l85, sous le litre
d'Un e Rédemption de captifs musulmans en Espagne au VIll e siècle,
330 LES BOMMES ' ET LES ŒUVRES

écrivit lui-même la volumineuse relation de ses v?yages à


tl'avers l'Orient et l'Occident luéditerranée·
, .
n s.

Avant de passer en revue les biographes qui vécurent au


xqr e siècle de l'Hégire, on mentionnera trois recueils de 17l(t-
nâqib 9-atant du siècle précédent et sur les auteurs desquels
on n'est qu'imparfaitement ~enseigné.
Ce sont d'abord deux ouvrages se rapportant à la famille
des Charqâwa, àlaquelle el-Ma'dânî avait déjà consacré une
monographie. Le premier, qui a trait au fondateur de l'ordre,
Mal:lammed ech-Charqi (1 ), fut écrit par un lettré nommé.
Ahoû Mol).ammed 'Abd el-Khâliq b. Mol).amnled b ..Al).nled
el-' Aroûsi et-Tâdill ech-Charqâwi. qui comptait vraisembla-
blement lui-même parmi les descendants du saint dont il se
fit le biographe. Son livre porte le titre d'el-Jlloraqqî fî
dhikr ba'rj 17ulnâqib el-qoJb sayytdt Mal:zammed eclz-
Charqî (2).
L'autre ouvrage, qui doit être assez postérieurau premier~
est intitulé Iatîmat el- 'oqoûd el-wastâ ft n'l-anâqib ech-chaïkh
el-Jllo'fâ. (3). C'est la biographie d'un descendant de Mal).am-
med ech-Charqi, Mol).ammed el-Mo'tâ (4), qu'écrivit son se-

('1) Ma!).ammedb. Aboù'l-Qùsim ech-Charqî es-Somaïrî ez-Za'rî el-Jabirî,


dlscip~e d'et-Tabbà',. mort le 1el' mOQarram '1010 (2 juillet '160'1), a sa bio-
graphie dans Mo!).ammed el-Mahdi el-Fàsî, Momti' el-asmd', p. '121 ; el-
Ifrânî, $afwal man intachar, p. 25; el-Qàdirî, Nac1.r el-mathânî, 1, p. 5S;
Iltiqât ed-dorar, fol. 4 1'0; el-KaLtàni, Salwat el-anfâs, 1, p. 193. Cf. sur la
famille des Charqâwa (l'ethnique ech-Charqi est devenu ech-Charqàwi) et
la zàwîyya d'Aboû'l-Ja 'd, un rapport de Cimetière, publié dans la Revue
du Monde mus., XXIV, p. 277.
(2) Signalé par el-Kattânî, Salwat el-a nfds , III, p. 362, in fine. Cf. .
R. Basset, Rech. bibl., p. 40, nO 128.
(3) Signalé par eigel, Revue du Monde Mus. , XXIV, p_ 297, qui le classe
parmi les mss. existant à la zàwiyya Cl' AboÛ'I-Ja'd.
(4) Mo!).ammed el-Mo'tù b. Mo!).ammed e~-~âli!). b. Mo!).ammed el-Mo'tâ
b. 'Abd el-Khàliq b. 'Abd el-Qàdir b. Ma!).ammed ech-Charqî, rénova-
teur de la zâwîyya de son ancêtre et auteur d'un recueil de prières qui ne
comprendrait pas moins de 40 volumes, intitulé Dhakhîral el-ghanî wa'.l-
LES BIOGRAPHES DU XIIe SIÈCLE HÉG. 331

crétaire Mol;anHned b. , 'Abd .el-Karim el: 'Abdoûni, mort


en 1189 (1775-76).
Le troisième, dont l'auteur, inconnu; vivait au XIIe sièclè',
de l'Hégire à Fès, est relatif à un saint 'enterré dans la 'mon-
tagne du Zarhoûll, au nord de Meknès, Sidi '!bd Allah ,el-
Khayyât (1)', 'e t à ses descendants: 'd 'après el-Kattâni, il porte
le titre de Jawâlzi,. es-simâf fî 17lanâqib sayyîdî 'Abd Allah
el-Khayyât (2).
Enfin, c'est peut-être à cette place qu'il y a lieu de signa-
ler l'ouvrage sur la généalogie des chorfa, par l'énigmatique
el- 'Achmâwi, qu'el-Kattânî,. sans autres détails, cite parmi
les sources de sa Salwat cl-anfâs (3). Le trailé de cet écri-
vain, dont on ne sait rien au 'Maroc, est aujourd'hui considéré
comme apocryphe par les généalogistes de Fès; il a été
traduit en français, il y a quelques années, par le P. Giaco-
betti (4), qui n'a tiré du manuscrit qu'il avait entre les mains
aucun élément biographique ou chronologique sur le per-
sonnage en question. On peut croire qu'el- 'Achmâwi, dont
le nom cemplet serait Al;med b. Nlol;ammed b. Aboû'l-Qâ-
sim b. AI).med b. 'Abd er-Ral;n1ân b. Mol;ammed el-'Ach-
mâwî, était :Mekkols d'origine (5), qu'il fut imâm et qu'il
passa une partie de sa vie dans l'Afrique du nord. Il appela
son ouvrage Kitâb et-tal;qîq fî'n-nasab el-watlzîq (6). Quant

mo~llâj fi ~âQ.ib el-liwâ wa'l-tâj (cf. Manuscrits arabes de Rabat, p. 36,


nO 100), mourut dans la première décade de mol)arram 1180 (9-18 juin
1766). Cf. el-Qàdirî, Nachr el-mathânî, II, p. 271; lltiqàt ed-dorar,
fol. 94 v O ,
(1) Aboû Mol)ammed 'Abd Allah el-Khayyât el-l,fosaïnÎ er-Rifâ'i ez-
Zarhoûnî, mort en 939 ('1532-33). Cf. Ibn 'Askar, Dawf),at en-nàchir, p. 63;
Mol)ammed el-Mahdi el-Fâsî, Momii' el-asma', p. 62; el-! attânî, Salwat
el-anfâs, l, p. 229, 1. 5 et 111, p. 19L
(2) Cf. R. Basset, Rech. bibl., p. 39, nO 101.
(3) III. p. 360, 1. 6. Cf. R. Basset, Rech. bibl., p. 24, nO 58.
(4) J{itab en-Nasab, Généalogie des Chorfa, par le R. P. Giacobelti, extrait '
de la Revue africaine, Alger, 1906.
(5) La traduction, p. 2, 1. 3, porte, après le nom el-'Achmàwî, le nasab
el-Makkî, qu'il y a probablement lieu de considérer comme un ethnique
effectif.
(6) Il en existe un exemplaire ms. à la bibliothèque de Rabat, sous le
332
, LES HOMMES ET LES ŒUVRES

à la date de sa vie, il parait impossible de la préciser; tout


au plus, pourrait-on inférer du fait qu'il parle de Chorfa
Tijjânlyin et de Chorfa de Wâzzân (1), qu'il composa son
ouvrage au cours du XIIe siècle de l'Hégire. Il s'y occupe
d'ailleurs uniquement de branches chérifiennes ayant fait
souche en Algérie, et son travail est loin d'offrir pour le
Maroc l'intérêt de livres comme celui de 'Abd es-Salâm el-
Qâdiri, par exemple.

BIOGRAPHES DU XIU e SIÈCLE DE L'HÉGIRE (1786·1883 J.-c. ).

Ibn Soûda (2).

Au début du XIIIe siècle, le 29 dhoù'l-bijja 1209 (17 juil-


let 1795), mourut à Fès l'un des plus g,'ands savants que le
Maroc ait produits, Aboû 'Abd Allah NIol}ammed et-Tâwodl
b. et-Tâlib Ibn Soûda el-Morri. Il appartenait à une vieille
famille de lettrés originaire d'Espagne, qui, dans dès temps
reculés, avait habité le bourg des Banoù Tâwoda, au nord de
Fès (3). Il fut, dans sa jeunesse, l'élève des plus grands sa-
vants de la capitale, tels qu'Al}med b. Mobârak es-Sijil-
mâsî (4), Mol}ammed Ibn Jelloùn (5), el-Wajjârl (6), ech-

no 406 (1), qui ne contient aucune indication précise sur l 'au teur. D'après
Giacobelti, p.1 et 'l73, note 1, il semble que l'exemplaire sur lequ el il a tra-
vaillé ait porté le tiLre d e Chajarat el-achrâf wa-ma' dan el-jawd wa'l-in~âf.
( 1) Cf. pp. 2 et 50 de la trad. Giacobetti.
(2) BIBLlOGRAPHIE. - er-RahoùnÎ, Awcjaly, el-masâWc, début; MortaÇl.à, Tâj

el-'aroûs, éd. de BoCdâq, 1306, Il, p. 387 sub V,).J- ; en-Nâ~irî, Istiq~â , IV ,
p. 134; el-Kattânî, Salwal el-anfàs, T, p. 1'12 el-FoÇl.aïlî, ed-Dorar el-
bahîyya, II, p. 294 ; R. Basset, Rech. bibl. p. 20, nO 42.
(3) Ce bourg est aujourd'hui en ruines et porte le nom de Fâs el-Bâli. Il
se trouve sur la rive gauche du 'Vàdi Wargha , à environ 80 kilomètr.Js
au J ._ .-0. de Fès. cr. mes Ruines almoravides du pays de l'O uargha , in
Bulletin archéologique, 1918, p. 194-200.
(4) Cf. supra , p. 309.
(5 ) Mo~ammed b. A~med b. Moi)ammed b. 'Ali b. Ai)med Ibn Jelloûn
el-FâsÎ, savant de Fès qui vivait au début du XVIIIe siècle.
(6) Cr. supra, p. 318, n. 6. .
LES BI0GHAPIIES DU Xl11() ~IÈCLE IIÉG. 333

Chaddâùi (1), el-Gendoûz (2) , Ia(Ich ech-Châwi (3), et-Tam-


tnâq (4), et Mal:tammed Gessoù::; (5). Ce fut le célèbre AI;med
e~-$aqalli (6) qui l'initia au ~oùfisme.. Il alla en pèlerinage en
1191 (1777 -78) et fit un assez long séjour en Orient, où il ren-
contra, entl'e autres lettl'és, le chaIkh Mortaçlâ (7). Dans son
pays, Ibn Soùda finit par acquél'ir une réputation de science
telle qu'on lui décerna le titre de chat:kh el-jamâ(a (8) ; il
eut de nombreux disciples, parn1i lesquels on peut citer son
fils Al:trned (9), :Mol:tamll1eJ L. 'Ali el-Warzàzi, et-Tayyib
Ibn Klrân (10) , Idris el- (1 l"âq i (t 1), Ial:tjà ech-Chafchâ-
wani (12) , NIol).ammed b. (Amr ez-Zarwâli (l~j) , er-Ra-
boûni (14) , f:lamdoùn 1b n el- f:lâjj et el- f:lawwâ t. Il composa

(1) Aboû'l-(Abbâs Al).med b. Al).med b. Mol).ammed ech-Chaddâdî, qâçl.î,


imâm et prédicateur à Fès, mort à la zâwîyya d'Idrîs l, dans le Jabal
Zarhoûn, le 15 jomâdâ Il '1146 (23 novembre 1733). Cf. el-Katlùnî,
Sillwat el-anfâs, lU, p. 196: en-Nâ~irî, Istiq~â, IV, p. 128.
(2) Cf. supra, p. 317, n. 2.
(3) Mol).ammed, surnommé Ia(ïch b. er-Raghghài el-Gorârî ech-Châwi
el-Fâsi, professeur de Fès, assassiné dans cette ville le 29 ~afar 1150
:28 juin 1737). Cf. el-Qâdirî, Nachr el-malhdnl, II, p. 244; el,Kattânî,
Salwat el-anfâs, III, p. 208.
(4) Cf. supra, p. 318, n. 7.
(5) Cf. supra, p. 320, D. 5
(6) Al).med b. Mal).ammed e~-~aqallî, grand sa int de Fès, mort le
7 ramaçl.àn 1177 (10 mars 1764). Cf. el-Katlânî, Salwal el·anfâs, l, p. 133.
(7) Mortaçl.à ez-Zabîdî, auteur du Tâj el-(aroûs, grand commentaire
du Qamoûs d'el-Fîroûzâbâdî, mort en BU6 (1791-921. Cf. Brockelmann,
Ar. litt., II, p. 183, b; R. Basset, Rech. bibl., p. 41, nO 108; Huart, Lill. ar.,
p.382.
(8) Sur ce titre, cf. supra, p. 226, n. 2.
1(9) Cf. supra, p. 201, D. 5.
(10) Aboù (Abd Allah Mol).ammed ek'fayyîb b. 'Abd el-Majîd lbn Kîràn ,
savant de Fès, mort dans cette ville le '14 ou le 17 rriol).arram '1227
(29 janvier ou 1e r février 1812). Cf. en-Nà~irî, I:;tiq~â, IV, p. 149; el-
Kattànî, Salwat el-allfd:;, Ill, p. 2.
(U) Aboù'l-(Alâ' Idris b. Zain el-(Abidin el-Irâqi el-T:Iosainî, mort à Fès
le 14 ramaçl.ân 1228 (10 septembre 1813 . Cf. el-Kattànî, Salwal el-anfds,
III, p. 33.
(12) Cf. supra, p.147, n. 4.
(13) Cf. supra, p. 202, Il. 1,
(4 ) Aboû 'Abd Allah Mol).arnmed b. Al).med b. Mol).ammed b. Ioûsof el-
1:làjj er-Rahoûnî, jurisconsulte marocain mort à Wâzzàn, le '13 ramaçl.àl~
334 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

différ~nts ouvrages (1), parmi lesquel~ une fahrasa (2),


1

très ,connue dans res milleux lettrés du Maroc et fort sOu-


yent consultée à cause de lu précision des isnâd qu'eIlecon:"
tient (3) . .

Ma1)ammed el-Manâli ez-Zabâdî (4),.


r "

Aboû 'Abd Allah Mal).ummed b. 'Ali el-Manâlî ez ,Zabâdî


était le hère du savant dont on a signalé la mort en 1.163 (5)
~t qui fut, à Fès, son principal nlaître, avec Mal).amm.ed Ges-
soûs, Mal).ammèd es-Sijilmâsî et es-Sarghînî (6). Il compléta
ses études en Orient, au cours de son voyage de pèlerinage,
qu)il accomplit en 1166, (1753), en compagnie du !?oûfî 'Abd
el-Wahhâb et-Tâzî '(7) . ~ l exerça la profession de notaire au
sùnât d'el-Qarawîyîn et lllourut le 1 er rabr 1 1209 (26 sep-
tembre 1794). Il laissa différents ouvrages, parmi lesquels
une longue monog~aphie consacr~e à un saint du Tâdlâ, 'AIr
b. 'Abd er-Ral).mâned-Dara'ï (8) , Dawf;at el-bostân wa-noz)zat

1230 (19 août 1815), auteur d'une gLose estimée sur le commentaire du
Mokhta~ar de Khalil par ' Abd el-Bàqî ez-Zorqâni, intitulée Awq,a~~ el-
masâlik wa-ashal el-mardqî ilà sibk ibrîz ech-chaïkh 'A bd el-Bâgî. Cf. en-
Nâ~irî, Istiqfiâ , IV , p. '150; el-l atlânî, Salwat el-anfàs, l , p. 104; Brockel-
mann , Ar. litt., II, p. 84, m.
(1) Ce sont :' 1° Tâli' el-am,ânî 'a lâ char~ ez-Zorqânî; 2° Commentaire
de la To~fat el-~okkàm d'lbL1 .'A~ im; 3° Commentaire de la Lâmîyya d'ez-
Zaqqâq; 4° Zâd el-mojidd es-sarî fî matàli' el-Bokhârî; 5° Commentaire
d'el-Jami' de Khalîl; 6° Manasik el~~ijj; 7° Fahrasa; 8° Opuscule hagio-
graphique.
(2) Elle fut terminée le 21 jomâdâ 1 1'182 (4 octobre 1768). Un exem-
plàire existe à Rabat, Mss" nO 414 bis.
(3) Le nombre des p ersonnages cités dans cette fahrasa, et dont Ibn
Soûda se réclame, a valu à ce dernier le surnom ~\~)I~ ~l.ci.:>-)l\ ~,
celui grâce auquel grands-parents et petits-fils se rejoignent. ))
II.

(4) BIBLIOGRAPHIE. - El-Kattâni, Salwat el-anfâs, II; p. 188; R; Basset


Rech. bibl., p. 43, nO 1'16. '
(5) Cf. supra, p. 314.
(6) Cf. supra, p. 3t 7, n. 3.
(1) Aboû Molfammed 'Abd el-Wahbâb et-Tftzî, mort à Fès le 21 cha'bân
~206 {20 avril 1792). Cf. el-Kattânî, Sa.lwat el-an!â~ . qI, p. ~2~
(8) Sur ce saint, cf. supra, p. 293, n. 1. '
, ' ,1

LES BIOGRAPHES DÙ XIIIe SIÈCLE HÉG. 335

el-ikhwân fî manâqib ech-cltaïkh Ibn :Abd er-Ra!;mân (1), et


un dictionnaire de saints et de savants marocains, ' SoloÛk
e!-tarlq el-warîyya fî'ch-chaïkh wa'l-morîd wa'z-zâwîyya,
malheureusement Jevenu introuvable, bien qu'el- Kattânî
l'ait utilisé à maintes reprises pour la rédaction de sa Salwat
el-anfâs,.

<Abd ' el-Wâ~id el-Fâsî (2).

Aboû Mâlq( <Abd el-Wâbid, fils de Mabammed b. Abmed


el-Fâs! (3), naquit à Fès en 1172 (1758-59). Après avoir étu-
dié auprès de son père, c;le MabÇlmmed Bennâni (4), d 'Ibn
Choqroûn (5), de NIobamrried b. ~ Abd es-Salâm el-Fâs,i (6)
et de <Ali el-:Irâqî (7), U s'adonna lui-même à l'enseigne-
ment et fut le premier prédicateur de, la mosquée d'er-Hal?îf,
bâtie SUl' l'ordre du sultan Moulay Solaïmân (8). J.l mourut
de la peste, le 2 dhoû'l-l:lijja 1213 (7 mai 1799) (9), après avoir
écrit un opuscule sur les Chorfa QâJirîyîn, Ighâthat el-
laltfân wa-salwat el-al;zârl- bi'l-qâdù:îyîn <i:?âm ech-châ'n (10) ,
et une monographie des. C)19rfa $aqalliyin, Ghâïat e,l-a7n~

('1) Un exemplaire manuscrit de ce recueil de manâqib existe à Rabat,


sous le nO 393. EI-Kattânî donne pour le premier mot du titre la variante
Rawq,al .
. (2) .6LBLlOGRAPHIE. , - EI-Kattânî, Salwat el-anfâs, l, p. 325; R. Basset,
I!ech. bibl., p. 44, n O125.
(3) Cf. supra, p. 318.
(4) Cf. supra, p. 312.
(5) Aboû MoQ.ammed <Abd el-Qâdir b. AQ.med b. el-<Arbî IbnCho-
qroùn, savant de Fès, mort dans cette ville le 1'1 cha<bân 12'19 (15 no-
vembre 1804). Cf. el-Kaltânî, Salwat el-/wfâs. 1, p. 95.
(6) Auteur d'une fahrasa. Ci. supra, p.147, n. 6.
(7) Aboû'I-I;Iasan :Ali Z~ïn el-<Abidîn b. Hâchim el-<Irâqî el-I;Iosaïnî,
savant de Fès, mort le 29 jomâdâ 1 1194 (3 juin .1780). Cr. el-Kattânî, '
S_alwal el-anfâs, III, p. 1'14. ,
" (8) Cf... en-N~~irî" Istiq~â, IV \lP. .1.71 , A. Bel, Inscrfptions arabes de Fès,
P.. 12. ' . .
(9) La même ~nnée ou l'année s~ivante mourut, à Fèsl .u n autr~ savan.t,
aute,ur d'unefahrasa, Aboû . ,~bd Allah Mohammed b. Ahmed b. Moham-
ffi-éd BeI:n~s" Cf. ~1-I}att'4nî, ~a~WÇll ~l-, an!d~, 'r, p. , 20~. . " ,:~' :.,:, ": '" "
('10) Cf. el-Katlânî,-Salwat el-anfâs, III, p. §62, l'. 4 ante finem.
336 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

nlyya wa-irtiqâ' er-ratab el- <aUyya fl dhikr el-ansâb e~-~a­


qallîyya dhât el-anwâl' el-baldyyat es-sanly.ya (.1).

Ibn 'Ajîba (2) .

Abuù'l-'Abbâs Abmed b. ~lo.Qammed Ibn 'Ajîba et-Tittà-


wani était un chérif .Qasani ; il naquit dans la tribu des
Anjra, qui s'étend sur le littoral méditel'ranéen du Maroc,
entre Tanger et Tétouan. Il alla à F~s suivre les cours d'Ibn
Soûda,' de Bennâni et d'el-Warzâzi. et s'affilia à la nouvelle
confrérie, des Darqâwa, dont il fut le représentant dans la
partie septentrionale de la région des Jbâla. Il passa toute
sa vie à Tétouan ou dans le pays avoisin"a nt et mourut de la
peste en 1224 (1809-10). Il est Fauteur d'un assez grand
nombre d'ouvrages (3), parmi lesquels on peut signaler un
répertoire des imâms uu rite mâlikite, rangés par classes
(!a baqat ) depuis Mâlik jusqu'à er-Rahoûni, intitulé A;:,hâr
el-bostân ft fabaqât el-a' iân, et une, fahrasa qui fournit
d'intéressants rensèignements sur le centre intellectuel
qu'était la ville de Tétouan, au début du XIX e :ûècle.

el-1:Iawwât (4).

Aboû 'r-Rabi' Solaïmân b. Mo.Qammed b. "<Abd Allah b.


Mobammed b. 'Ali b. Moùsà ech-Chafchâwani, connu sous
le sobriquet diel-l)awwât, était, comnle Ibn <Ajîba, origi-
naire de . la .montagne marocaine et corn ptait . parmi les
Chorfa 'Alamiyin, descendants du « pôle» <Abd es-Salâm

(1) Le titre complet est donné par el-Kattânî, Salwat el-anfâs, l, p. 343.
(2) BIFLIOGRAPIIIE. - 'Abd el-Qàdir el-Koûhin, Imdâd dhawî'l-isti'dâd
[Rabat, Mss .,' ~14 (1 )], passim . .
(3) Ainsi un commenlaire du Qor'âll e n quatre 'Volumes, intitulé el-
Baf},r el-madid; 'un commentaire' des lfikam de Jbn 'A~à Allah, imprimé
au Qaire; ?-n commentaire d'un poème d'lbn ,e l-Ballnà' (el-Foloûl)"ât el-
ilahîyyafî ('.har~l, e,l-Mabâf).ith el-a~liyya): .
(4) . BLBLIOGRAPUlE. ' - El-Kattà~î, Salwat el-f!nfâs, In,' p : H6; el-Foçlaïlî,
éd-Dorar el-bahiyya, II, p. '95; R. Bassel, Rech. 'bibl., p. "41, nO ' 109.
o - ' " .
LES BIOGRAPHES DU XIIIe SIÈCJJE HÉG. 337

b. Machîch et installés, pour la plupart, 'non loin du mau..;


solée de .leur ancêtre, à Chafchâwan. C'est dans cette petite
ville qu'il naquit, vers 1160 (1747); son père, Mo}:lammed (1 ),
y exerçait les fonctions de qâçli et mourut peu après la nais-
sance de son fils. Ce dernier, une fois parvenu à l'adoles-
cence, alla s'installer à Fès pour y faire ses études et ne
tarda pas à se révéler COlnme l'un des l.ettrés les mieux doués
de son époque. Il suivit, à l'Uni versilé et dans le's médersas
,d e la capitale, les leçons de Ma}:lammed Ibn Ibrâhim ed-
Dokkâli (2), de Mo}:lammed b. et- Tayyîb el-Qâdirî, de 'Abd
el-Qâdir Boûkhrî$ (3), de 'Abd el-Karîm el-Iâzighî (4), de
Mol)ammed b. 'Abd es-SalAm el-Fâsî (5), de 'Omar el-Fâs:i (6),
de Bennâni et d'Ibn Soûda.
EI-I-:Iawwât consacra toute sa vie à l'étude. Vivant dans
une grande aisance des revenus qui lui parvenaient de son
pays d'origine, il n'eut pas besoin de solliciter de fonctions
judiciaires ou religieusés et se refusa même à accepter la
modiq ue pension que l'adlninistration des biens de main-
Inorte allouait, COlnlne aujourd'hui, aux savants du Maroc (7).
Mais, alors qu'il avait atteint un âge avancé, il fut choisi par
le sultan Moulay Solaïmân pour la charge honorifique de
naqtb des chorfa et dut accepter. Il était ainsi placé à la
tête des nombreuses familles aristocratiques de la capitale
et eut à cœur de mériter son titre, en se spécialisant étroi-
tement dans la généalogie chérifienne. Il eut des disciples
de marque, conlme 'Abd el-Qâdir el-Koûhin, un chérif
'alawite de Sijilmâsa, ~Ioulay ez-Zak:i b. Mo}:lammed el-

(1) Cc personnage, mort en 1160 ou 1161, serait l'auteur d'un ouvrage


sur les disciples d'Ibn Nâ~ir, intitulé Tof)fal el-ma'â~ir fî ba'q, ~âlilJ.,î
, lalâmidhat Abî 'Abd Allah Ibn Nâ~ir. Cf. el-Qâdid, Iltiqât ed-dorar, fol. 84 r O ;
el-I attânî, Sa/tUat el-anfâs, III, p. 119.
(2) Sur ce personnage, cf. supra, p. 306, n. 3.
(3) Sur ce personnage, cf. supra, p. 146, n. 6.
(4) Aboû Mol).ammed 'Abd el-K.arîm el-Iàzighî, savant de Fès, auteur
d'une fahrasa, mort le 27 dhoû'l-qa'da 1199 (2 octobre '1785). Cf. el-
K.attânî, Salwat el-anfâs, II, p. 115.
(5) Sur ce personnage, cf. supra, p. 147, n. 6.
(6) Sur ce personnage, cf. supra, p. 147, n. 1.
• (7) Cf. supra, p. 15_
22
. 338 LES HOMMES ÉT LES ŒUVRES

Hâchimi, et el·'<Abbâs, le petit-fils d'et-Tâwodi Ibn Soùda (1).


Il mourut à Fès le 29 ~afar 1231 (30 janvier 1816) et fut
enterré à l'extérieur de Bûb Gisa.
L'œuvre d'el-Baw'w ât est à peu près uniquement biogra-
phique. Il consacra, en effet, des ouvrages à certaines
familles lettrées de Fès et un autre à lui-même. Ce de rnier
potle le titre de Thamarat onsî ft't-ta' rîf bi-nafsî; il cons-
titue, en somme, sa fahrasa, accrue néanmoins de rensei-
gnements autobiographiques que l'on n'a pas coutume de
trouv er si détaillés dans les travaux de ce genre: il y fournit
des précisions sur le milieu lettré de la montagne , dans
lequel se déroula sa jeunesse, et s ur celui qu'il trouva à
Fès, lors de son installation dans cette ville.
Sous le nom de Qo/'rat el-' oyoûn ft' ch-chorafâ' el-qâtinîn
bi'l-'Oyoûn, il s'occupe des chorfa qui habitent dans la capi-
tale, au quartier d'el- 'Üyoûn (2), les Dabbâghiyin (3). Avec
son es-Sirr e;,-;,âllir fl-man a/:lraz bi-Fas ech-cha/'af el-bâhir
min a'qâb ech-chaïkh 'Abd el-Qâdir, les chorra Qâdiriyîn
bénéficient d'un nouveau panégyrique de Jeur famill e . De
mème, son er-Rawqat el-maq~oûda wa' l-/:lolal el-mamdoûda
ft ma'âtlzir banî Soûda est une histoire biographique de la
maison des Ibn Soùda , d epuis ses origine s jusqu'au falneux
et-Tâwodi et au fils et au petit-fils de ce dernier.
L'ouvrage d' el-Bawwât le plus important est certainement
sa grande monographie de la zâwiyya d'ed-Dilâ', el-Bodoûl'
e{l-rjâwtyya fî't-ta'rîf bi's-sâdât ahl ez-zâwîyyat ed-di-
lâ'ïyya (4). Sous ce titre l'auteur groupe toutes les biogra-
phies des membres de cette famille , à partir de leur ancêtre
Aboù Bakr , avec des détails beaucoup plus nombreux quand
il arrive à ceux qui, après la de s truction de la zâwiyya paL'

(1) Aboû'l-Façll el-'Abbùs b. AJ:lmcd b . MoJ:lammed et-Tâwodî Ibn


Soùda fut qâçlî de Fès et mourut le 26 jomàdà 1 1241. (6 janvier 1826).
U. el-Katlânl, Salwat el-anfâs, f, p. 116 .
. (2) Cf. supra, p. 88, n. 4.
(3) Branche de Chorfa idL'Îsiles. Cf. su.pra, p. 279 .
(4) 11 en exisle un exemplaire manuscrit, daté de '1236 ('1821) à lIa
bibliothèque de Rabat (no 394) et un autre à la bibliothèque de la Sec lion
sociologique du Maroc, à Tanger. . ,'!
LES BIOGRAPHES DU XI n e SIÈCLE lIÉG. 339

:Moulay er-Rachid, vinrent s'établir à Fès et y firent souche.


Il donne pour la plupart d'entre eux, non seulement la liste de
leurs maîtres, Inais encore, e n général, le texte complet de
leurs ijâza, les correspondances littéraires qu'ils échangèrent
avec leurs contenlporains et, parfois même, des extraits de
leurs œuvres poétiques. C'est malheureusement à l'histoire
politique de la maison qu'el-f:lawwât attache le moins d'im-
portance; il n'apporte guère d'éclaircissements ou de ren-
seignements que nous ne connaissions déjà sur la souverai-
neté exercée pendant quelques années par Moulay Mal)am-
med ei-Uâjj ed-Dilà'ï et se borne, la plupart du temps, dans
la biographie de ce dernier personnage, à répéter les indi-
cations historiqu€s fournies par la No::,hat el-f;âdt ou le
Nacltr el-mathânî. Et les quelques informations originales
qu'on y trouve çà et là ne sauraient permettre de classer
l'ouvrage parmi les sources arabes inédites de l'histoire
politique du Maroc, alors qu'il constitue un document
d'histoire littéraire loin d'être négligeable (1).
Il existe enfin un livre consacré à la famille des Fàsiyin,
intitulé 'Inâyat oûlt'l-majd bi-dhikr 'âl el-Fâsî Ibn el-Jadd,
que certains lettrés du Maroc attribuent à el-f:lawwât, tandis
que d'autres, y compris l'auteul' de la Salwat el-anfâs (2),
prétendent qu'i:l est l' œuvre du sultan 'alawite Moulay
Solaünân (3) . On sait que ce prince était cultivé et qu'il
s'intéressa de manière effective au mouvement littéraire de
son temps; aussi n'est-il pas impossible qu'il ait eu l'idée,
en composant à son intention une monographie louangeuse,
d'honorer toute une famille aristocratique et puissante, sur
laquelle il avait beaucoup à conlpter. Mais, en l'absence de

(1) Vers la même époque, un letlré de Fès du nom de Mol;ammed b.


Aboû Bakr b. 'Abd el-Karîm el-Iâzighî, composa sur les membres de la
famille d'ed-Dilâ' une orjoûz a mnémotechnique de 273 vers, qu'il inti-
tula J/adâ'ïq el-az hdr en-nadîyya fî't-ta'rîf bi-ahl ez-zdwîyyat ed-dilâ'ïyyat
el-IJakrîyya. Elle se trouve en tête du ms. de Rabat d'el-Bodou!' e«-gâwîyya.
Cf. l'incipit de ce poème dans nos Manuscrits arabes de Rabat, p. 138.
(2) H, p. 312, 1. 1-4 et HI, p. 362, avant-dernière ligne.
- (3) Pourtant el-Kattânî, Salwat el-anfâs, III, p. 231, dans la biographie .
de ce sultan, ne cite de lui aucune œuvre littéraire.
340 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

tout exemplaire de l'ouvrage, il est, pour l'instant, difficile


de se prononcer sur la question avec quelques chances de
vérité.

<Abd el-Qâdir el-Koûhin (1 ).

Comme l'indique son nom, qui est, à l'origine, celui du


titulaire d'une dignité sacerdotale hébraïque, Aboû Mol}am-
med <Abd el-Qâdir b. Al}med b. Aboû Jida el-Koûhin appar-
tenait à une ancienne fan1ille juive du Maroc, qui, sous les
Mérinides ou sous les Sa<diens, avait dû abjurer sa religion
et embrasserl'islâmisme, afin de pouvoit' conserver les
richesses qu'elle avait acquises. Ce p~rsonnage, qui fut un
savant d'une rigoureuse orthodoxie, naquit à Fès dans la
seconde moitié du XVIII e siècle et y eut, plus tard, comme
maîtres Mol}arnmed ekTayyib Ibn lGrân (2), f:lamdoûn Ibn
el-I)àjj et Al;tmed b. et- Tàwodi Ibn Soûda (3). Il accomplit
le pèlerinage, s'affilia à la confrérie des Darqâwa, puis, alla
s'installer pour finir ses jours à Médine, où il mourut en
~afar 1254 (26 avril-24 mai 1838). Il e~t l'auteur de quatre
ouvrages (4) , dont une rif;la sur son premier voyage en
Orient et une fahrasa (5) sur les chaïkh de son temps, qu'il
termina le 17 chawwâl1245 (11 avril 1830) et intitula lmdâd
dhawt'l-isti<dâd ilâ ma<âlim er-râwîyya wa'l·isnâd (6).

(1) BlBLIOGRAPlIlE. - el-Kaltânî, Salwat el-anfds, JI, p.169 ~ date de la mort


du personnage) ; R. Basset, Rech. bibl., p. '20, nO 46. Renseignements re-
cueillis à Fès et à Salé.
(2) Cf. supra, p. 333, n. 10.
(3) Cf. supra, p. 201, n. 5.
(4) Les deux autres consistent en un commentaire de l'Ajorroûmîyya,
qui aurait été publié à Constantinople, et un commentaire de l'intro-
duction et de la conclusion du $al}.îI), d'el-Bokhârî, intitulé Minai), ilahîyya
wa-mawâhib ikhti~â~îyya <alâ' l-jâmi<e~-~al}.îl}..
(5) E iste à Rabat, Mss., nO 514 (1).
(6) A peu près à la même époque, un grammairien de Fès, du nom
d'Aboû'VAbbâs Al,lmed b. Mol).ammed Aboù 1 âfi\ qui mourut le 23 ou
le 24 dholl'l-qa'da 1260 (24 ou 25 décembre 1844), composa lui aussi une
Jahrasa qui est assez peu estimée au Maroc. Cf. el-} aÙânî, Salwat el-an-
[âs, Ill, p, 236.
LES BIOGRAPHES DU XHI e 'SIÈCLE HÉG. 3~1

el-'Irâqî (1).

De même que les Chorfa $aqalliyin de Fès avaient vu


l'histoire de leur famille fixée grâce aux ouvrages de Mo-
Q.ammed el-Qâdiri et ,d e 'Abd el-'iVâb.id el-Fâsî, de même
l'autre branche b.osaïnite, constituée par les Chorfa 'Irà-
qîyin installés dans la capitale, eut son historien dans la
personne de l'un de ses l11embres, Aboû Mob.ammed <Abd
Allah, dit el-WaBd, b. el-'Arbi b. el-WaUd el-'Irâqi el-
I:Iosaïni. Ce dernier, né en 1208 ou 1209 (1793-95), devint,
après avoir suivi les COUI'S des professeurs de son époque,
imâm et prédicateur à l'oratoire de Moulay Idris; il ensei-
gna également dans ce sanctuaire, ainsi qu'à la mosquée
d'el-Qarawîyîn. Il mourut le 7 ou le 8 rab1' Il 1263 (2 ou
3 mars 1849), et fut enterré dans le mausolée d'un de ses
parents, à l'extérieur dp. Bâb el-Fotoûb..
Le livre d'el- 'Ieâqi poete le titre d'ed-Do/'r en-nafîs fî-man
bi-Fâs min banî Mo!:tcufllned ben Nafîs (2 ). Il Y ajouta, après
l'avoir teeminé, un supplément assez important. Il consacra
aussi, d'après el-Kattâni, un opuscule à l'un de ses parents ,
le traditionniste Idris el- 'Irâqi (3).

Moq.ammed el-Mahdî Ibn el-Qâ~î (4).

C'est au début du XIX e siècle que naquit et se propagea,


au Maroc et dans le reste de l'Af.rique Mineure. l'ordre '
mystique des Darqâwa. Le fondateur de la confrérie, el-

(1) BIBLIOGRAPHIE. - El-KaUâni, 'Salwat el-allfâs, III, p. 36; R. Basset,


Rech. bibl., p. 46, nO f33.
(2) Publié à Fès, s. d.
(3) Aboû'l-'Alâ' Idris b. MaQ.ammed b. Idris b. Hamdoûn b. 'Abd er-
RaQ.mân el-'Irâqî el-J;Iosaïni, traditionniste de Fès, ~ort en cha'bân 1183
(décembre 1769). Cf. el-KaUâni, Salwat el-anfas, l, p. 14L
(4) BIBLIOGRAPHIE. - EI-Kallânî, Salwal el-allfas, l, p. 36i; R. Basset,
Rech. bibl., p. 46, nO 134.
"342 LES ' HOMMES ET LES ŒUVRES

<Arbi ed-Darqâwî (1), enterré â Boû Bril.I (2), au nord de


Fès, avait fait un assez long séjour dans cette ville et s'y
était entouré de disciples, dont le plus agissant fut un ~oûfî
du noUl de <Abd el-Wâl).id ed-Dabbâgh (3). C'est à ces deux
personnages qu'un lettré de Fès. leur élève, consacra une
petite monogl'aphie intitulée en-Noûr el-qawî bi-dhikr ech-
chaïkh Mawlâï <Abd el- Wâbid ed-Dabbâgh wa-chaïklâh
Mawlâï el-<Arbî ed-Darqâwî. Cet auteur, qui s'appelaIt
Mol)ammed el-Mahdi b. Mol.Iammed Ibn el-Qâçll, mourut à
Fès, le 10 chawwâl 1271 (26 juin 1855).

Ma\lammed et- Tâlib Ibn el-~âjj (4).

Aboû <Abd Allah :Mal.Iammed et- Tâlib b. f:lamdoûn Ibn el-


I:Iâjj es-Solami el-NIirdâsî était le fils de l'un des lettrés les
plus marquants du règne de Moulay Solaïmân. qui a laissé
d'importantes œuvres poétiques (5). Lui-même, né il Fès, se

(1.) Aboû 'Abd Allah Moi).ammed el-'Arbi b. A i).med b. el-f:Iosaïn b.


<Ali ed-Darqâwî el-Idrîsî , né vers 1'150 (1737), mortle 23 :?afar 1239 (29 oc-
tobl'e 1823), fut lui-mème le disciple de ' Ali el-Jamâl el-'Jmrânî el-Idrisi.
Cf. en-Nà~irî, Isliq~â, IV, pp. 140 et 175; el-Kattânî, Salwat el-anfds, l,
p. 1.76; el-Foçlaïli, ed-Dorar el-bahîyya, II, p. 163 ; la bibliographie
donn ée par R. Basset, Nédromah et les Traras, p. 54, note 2. Sur la con-
frérie, cf. l 'article documenté de A. Cour, s. v. Derlfâwâ, in Encyc. de
l'lsl., l, pp. 971-70 et la bibliographie citée.
(2) Sur la rive gauche du Wàdî Awodoûr, dans la tribu des BanîZarwàl.
'. La zàwîyya des Darqâwa a été transportée ensuile à quelque distance de
Boû Brî!)., au lieu dit Amejjoût, où fut enterré le fils d'el-'A.rbi, Moi).am-
med et-Tayyîb, mort le 8 jomàdâ Il 1287 (6 août -1870). Cf. en-Nâ~irî, Is-
tîq~â, IV, p. 232.
(3) Aboû Màlik et Aboû'l-Mawâhib 'Abd el-Wà!).id b. <Allâl b. Idrîs el-
Hasanî el-Idrisi ed-Dabbâgh, né vers 1190 (1776) , mort le 17 ou le 1~ ra-
bi' l 1271 (8 ou 9 décembre 1.804) . Cf. el-Kattâni, Salwat el-anfâs, l, pp. 258
et 360.
(4) BlRLIOGRAPHIE. - EI-Kaltânî, Salwat el-anfâs, 1, p. 157; el-Foçlaïlî,
ed-Dorar el-bahîyya, JI, p. 330; H. Basset, Rech. bibl., p. 47, nO 138.
(5) Aboû'l-Faïçl 1j.amdoûn b. 'Abd el'-Hai).mân . b. f:Iarndoùn b. 'Abd er-
., Rai).màn Ibn el-f:Iâjj es-Solami el-Mirdàsi el-Fâsî, naquit à Fès en 1174
(1760-61) et mourulle 7 rabî' II 1232 (24 février 181;) . Ses poèmes, dont
I.ES BIOGRAPHES DU XIIIe SIÈCLE HÉG. 343

voua de bonne heure à l 'é tude et eut pou'r principaux mai-


tres son frèl"e aîné Mol).amlned (1), Mol).ammed el-Iâzighî (2),
le qâçli el-I-;Iammâdi (3), <Abd el-Qâdir el-Koûhin, Idris el-
Wâdghiri (4), <Ali el-Mthiwi (5), le qâçli <Abd el-Hâdi (6) et
<Abd es-Salâm Aboù Ghâlib (7). Il fut initié à la doctrine
mystique des Darqâwa par IVlol).ammed el-tIarrâq (8) , et re-
çut, en dhoù'l-qa<da 1260 (novembre-décembre 1844), une
licence d'un $oùfi oriental, l\fol).ammed $âlil). b. KhaIr Allah
el-I:IosaIni er-Riçlawi el-Bokhâd es-Samarqandi, quiétaitvenu
visitet' Fès (9). Entré dans la magisLraLure, Mol).ummecl et-

la plupart sont des panégyriques du sultan Moulay Solaïmàn, onl élé


réunis en un dîwân, lithographié à Fès, sans daLe. Cf. sur lui, en plus du
Riâcj, el-ward, en-Nà~irî, Tstiq$d, vr, p. H)1; el-KatLànî,Salwal el-an{âs, III,
p. 4; el-Foçlaïll, ed-Dorar el-bahîyya, II, p. 327; MOQammed es-Sà'ïl:t- er-
Rjbâ~î, el-Montakhabdl el-<abqarîyya, p. 83.
(1) Aboû 'Abd Allah .i\1oQammed b. ijamdoûn [bn el-Hâjj, mort à Fès,
le 17 chawwâl1274 (31 mai 1858). Cf. el-KaUànl, Salwal el-anfâs, 1, p. 156.
(2) Cf. supra, p. 339, n. 1.
(J) Aboû' I-FatQ. MOQammed et-Tohàmî b . .f:Iammâdî b. 'Abd el-vVâQid
el-ijammàdi el-Miknâsî, qàçlî de Marràkech , SUl' lequel cf. supra, p , 217,
n. 1.
(4) Abnû'l- 'Alà' Idris b. 'Abd Allah el-Hasanî el-Jdrîsî e!-Wadghîri el-
Bagrâwî, prédicateur de Fès, mort dans ceLLe ville le 16 mOQarram 1':157
(ou 1238) (10 mars 1841). Cf. el-Kattânî, Salwal el-anfds, II, p. 343.
(5) Aboû'I-f:Iasan 'Ali b. 'Abd Allah el-Mthiwî, savant de Fès, mort
dans cette ville le 4 ramaçlùn 1'247 (6 février 1832). Cf. el-KatLànî, Salwal
el-anfâs, lII, p. 132.
(6) Aboù'l-Majd 'Abd el-Hàdî b. 'Abd Allah el-Hasanî el-'Alawî, savant
et qàçli de Fès, mort le 9 ramaçlàn 1272 ('l4 mai 1856). Cf. el-Kattânî,
Salwal el-anfds, l, p. 1'17 ; el-Foçlaïlî, ed-Dorar el-bahîyya, I, p. 2~9.
(7) Aboû MOQammed 'Abd cs-Salàm b. ckTà'ï' Aboù Ghàlib, chérif
- idrîsile de la branche des Joûtîyîo, mort à ,Fès le 18 dhoû'l-qa'da 1290
(7 janvier '1874). Cf. el-Katlànî, Salwal el-anfâs, ILl, p. 96.
(8) Aboû 'Abd Allah l\'JoQ ammed b. MoQ.ammed cl-Harrâq b. 'Abd el-
WâQid, chérif Qasanî et savant de Tétouan, où il mOl!.lrut le 21 cha'bàn
1261 ('25 août 18 ;5). U fu L l'un des principaux disciples d'el-'Arbî cÎ:l-
Darqâwî; ses pièces mysliques en l'honneur de la confrérie ont été :réu-
nies en un dîwdn publié à Tunis en 1031 et à Fès , sans date. Cf. sur lui,
cl-Kaltànî, Salwal el-anfds. l, p. 342; el-Foçlaïlî , ed-Dorar el-bahîyya, II,
, p. 96.
(9) Savant de famille royale, originaire de Samarqand, né en 1201
(1786-87), rpOI;'t en 1166 (1849~5_0) . Il resla une année à Fès 'e n 126'0, -pal'-
344 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Tâlih, d'abord qâçli de Marrâkech, fut appelé, en dhoû'l


qa'da 1272 (juillet 1856), ·par le sultan ~toulay <Abd er-Ral).-
mân, au poste de qâçli de Fès, en remplacement de son an-
cien maître <Abd el-Hâdi, qui venait de mourir. Il ne'
cOnsel'va cette dernière charge qu'un an, carla mort l'attei~
gnit le 9 dhoû'l-l).ijja 1273 (31 juillet 1857). Il fut enseveli
dans le mausolée d'un de ses ancêtres, qui se trouve dans
un qual-tiel' de Fès appelé ed-Dal'b et-tawil (1) .
.L'œuvre laissée pal' Mol).ammed et-Tâlib Ibn el-t1fljj est
en grande partie biogl'aphique (2). En effet, dans un opus-
cule intitulé el-Ichl'âf <alâ ba<ç/nzan baU bi-Fâs min maclzâ-
hiF el-achrâf, il rénnit des renseignements sur les notabi-
lilés intellectuelles et religieuses issues des branches
chérifiennes de la capilale; dans un autl'e, en vers, il établit
l'une des premières histoires de la branche idJ'isite des
Kattâniyln, sous le nOm de Na~m ed-dorr wa'l-la'âl ft clzo-
rafâ' 'aqabat Ibn Sawwâl (3): il écrivit la biographie de ses
maîtres dans une fahrasa qu'il appela Rawçl el-balzâr ft
dhikr jomlat min machâ'ïkhinâ 'llad/dna faÇllohom ajlâ min
chams en-nahâr ; enfin, il consacra à son père et à sa propre
famille une monographie d'assez grande étendue, le Riâq;
el-ward ilâ mâ intamâ ilaïh hadlzâ'l-jawhar el-fard (4 ).

courut tout le Maroc et acquit une grande réputation dans les milieux
lettrés du pays. Sidi 'Abd el-f::Iaï el-Katlânî lui a consacré une notice
intitulée Kawkab el-nwjd es-sârî fî tarjamat chaïkh choïoûkhinâ Mol;wm-
med $âlil), er-Riq.,awî el-Bokhârî.
(1) Cf. A. Bel, Inscriptions arabes de Fès, p. 108, note 6. « C'est la rue
tortueuse parcourant, à l'est de la MùsCluée d'El-Qarwîyyîn, le quartier
d'El-Blîda. » Cf. supra, p. 226, n. 3.
(2) Ses autres œuvres consistent en un ouvrage didaclique intitulé el-
Azhâr et-tayyîbat en-nachr fî'l-mabâdî'l-'achr (lithographié à Fès en 1317),
et en deux gloses, l'une sur le commentaire d'el-Morchid el-mo<ïn par
Mayyâra, l'autre sur le petit commentaire de la Lâmîyyat el-'afâl d'Ibn Mâ-
lik par Aboû Al:lraq el-I:Iaçlrâmî.
(3) On donne parfois en effet aux Chorfa KaltânîyÎn le surnom de
Chorfa de la 'Aqabat Ibn ~awwâl, c'est-à-dire d'une rue (à forte pente) de
Fès-la-Vieille, où ils habitèrent à leur arrivée dans la ville et qui porte le
nom d'un personnage sur lequel cf. el-Kattânî, Salwat el-anfâs, l, p. 3D!.
(4) Un exemplaire manuscrit de cet ouvrage est conservé à Rabat, sous.
le nO 396. Cf. l'incipit dans nos Manuscrits arabes de Rabat, p. 139.
LES BIOGRAPHES DU XIIIe SIÈCLE HÉG. 345

Ce dernier ouvrage offre beaucoup plus d'intérêt, malgré


l'étroitesse du sujet qu'il traite, que la plupart des autres his-
toires des grandes familles marocaines; il peut être, dans
ce sens, comparé à la Mir'ât el-mal;.âsin. Il com prend cinq
chapitres d'étendue différente: le premier s 'occupe de la
généalogie de la branche des Ibn el-Bâjj et contient une
foule d'indications sur ses premiers représentants et sur la
grande tribu des Banoû Sola'im, contemporaine du Prophète
et de laquelle elle prétend descendl'e; le second raconte
l'émigration de la famille du Bijâz en Espagne; le troisième
donne la liste des hautes fonctions qu'occupèrent les Ibn el-
I-:Iâjj dans ce dernier pays; le quatrième, à propos de l'ins-
tallation de la famille au Maroc, à son départ d'Espagne, est
une véritable histoire de l'expulsion des Maures de la pénin-
sule ibérique et contient le texte de nombreux poèmes de
regrets datant de cette époque. Mais toute cette partie du
livre n'est, pour ainsi dire, qu'une introduction au chapitre
suivant, dans lequel l'auteur, arrivant à son véritable sujet ,
établit le répertoire des meInbres de la famille qui se sont
illustrés au Maroc, s'attarde à la biographie d 'Al,lmed b. el-
'Arbi (1) et à celle de son fils Mal,lammed (2), et termine
son ouvrage· par un récit détaillé il l'extrême de la vie de
son père I;Iamdoûn. Somme toute, le RiâÇL el-ward n'est
pas autre chose qu'une compilation; mais son intérêt ré-
side justement dans le fait qu'elle a été écrite surtout à
l'aide d'archives familiales. Les renseignements littéraires
qu'elle contient et les nombreuses citations poétiques
dont elle est parsemée lui assignent un rang honorable
parmi les meilleures productions de la littérature maro-
caine. Quelques lettres de Moulay Ismâ'ïl et de Moulay
Solaïmân, qui y ont été incorporées, lui donnent enfin, au
point de vue de l'histoire moderne du Maroc, un petit in-
térêt documentaire.

(1) Sur ce personnage , cf. supra, p. 277, n. 3.


(2) Aboù 'Abd Allah Mal).ammed b. Al).med b. el-'Arbî Ibn el-ijâjj, sa-
vant de Fès, mort dans cette ville à la fin de 1128 (1716). Cf. el-Kattânî,
Salwat el-anfâs, l, p. 155.
346 LES HOMMES ·ET LES ŒUVRES

'Abd el-Kabîr el:·Fâsî.

Presque à la fin de la liste des sources de la Salwat el-


anfàs se trouve mentionné un ouvrage qui, s'il faut en croire
son titre; Tadhkirat el-17'lobsinîn bi-wafayât el-a' lân wa-f;a-
wâdith es-sintn, serait un répertoire chronologique se rap-
portant à la fois à des personnages célèbres et à des événe-
ments historiques. Ce li vre est malheureusement introuvable
à l'h.eure ctueUe, et il est même peu probable qu'el-Kattâni
l'ait utili~é ; on fournira néanmoins quelques renseignements
sur son auteur (1). Il appartenait à la famille des Fâsiyin et
s'appelait 'Abd el-Kabir b. el-Majdhoûh b. 'Abd el-BaH:? : il
descendait en droite ligne de 'Abd el-Qâdir el- FâsL Il ac-
complit à deux reprises le pèlerinage de la Mekke et occupa
à Fès la charge de prédicateur à la mosquée d'el-Qarawiyin,
après avoir été l'élève de Mol)ammed el-Barrâq (2), et de
'Abd es-Salâm el-Azami (3). Il mourut en 1296 (1879), au
cours d'un voyage, dan s la q a$ba de Façlâla, entre Casa-
blanca et Rabat, et fut enterré à l'intérieur de l'enceinte de
Challa, dans le mausolée de Sidi lal)iâ b. Ioûnos.

Mo};lammed el-Amîn e~-~a};lrâwî (4).

La même année mourut à :M arrâkech un savant qui s'ap-


pelait Aboû 'Abd Allah Mol)ammed el-Amin b. 'Abd Allah el-
I:Iajjâji el-J a 'fari e$-$al)râwi. En pl us de diffé['ents op uscules,
il composa deux travaux hagiographiques, l'un, sur les
Sab'atou Rijâl de Marrâkech (5), eL-Irtijâl ftmanâqib l7lCtchâ-

(t) Cf. H. Basset, Rech. bibl., p. 47 n O i~i9. Renseignements fournis pal'


le chérif 'Abd el-l;faï el-Kattânî.
('2) Sur ce personnage, cf. supra , p. 343, n. 8.
(3) Sur ce personnage , cf. supra, p. 201, n. 6 .
. (4) BlBLIOGRAPIIIE. - Ibn el-Mowaqqit, es-Sa'âdat el-abadîyya, l , p.l00.
(:J) Sur les « sept saints» de Marl'àkech, cf : el- 'Abbâs b. lbrâhîm ~l-
LES BIOGRAPHES DU XIII c STÈCLE HÉG. 347

hid sab'at Fijâl, l'autre, sur les manàqib d'el-Mokhtâr


el-Konti (1), el-Minhâj el-17l0khtâr ft Inanâqib ec/t-chaïkh
el-lJlokhLâr.

Aboû Amlâq.

Il n'est peut-être pas de personnage de l'histoire du Ma-


roc, sauf les deux Idris, qui, à l'heure actuelle, soit plus po-
pulaire dans le pays que le mojâhid Mol,lammed el· 'Ayyâchi
de Salé. Si sa physionomie se dégage de mieux en mieux,
au fur et à mesure que se révèle le contenu des al'chives
européennes contemporaines de la chute des Sa' diens, l'his-
toire de sa vie s'est déjà, sur la côte atlantique et dans le
pays des Jbâla, passablement mêlée de légendes et de ma-
nâqib, qui viennent donner à sa personne un semblant cie
sainteté. A la fin du XIIIe siècle de l'Hégire, il bénéficia
d'une monographie que l'on signalera pour terminer la liste
des ouvrages de ce genre. En effet, un lettré qui vivait dans
la petite tribu des "Ylthiwa de la plaine, au nord-est de Fès,
'Abd el-Qâhir b. Mol,lammed b. Al,lmed b. 'Ali b. el-f:lasan
Aboû Amlâq écrivit sa biographie, sous le titre d'el-](habal'
'an ~olwûf' ellaqtl~ el- 'A.yyâchî bi·had/tihi'l-bilâd wa-dhikl'
sabab qiyâmih bi-wa~îfat el·jihâd (2).
Cette petite histoire de l'intrépide champion de Salé n'offre
malheureusement pas un intérêt puissant. L'auteur s'est
souvent borné à reproduire tout ce que les historiens anté-
rieurs avaient écrit sur le mojâhid, principalement el-lfrâni,
dans la Noz lzat el-I)âdt, et el-Qâd iri, dans le Naclu' el-ma-
thânî. Néanmoins , 'cette compilation, réunissant en une
biographie étendue des renseignements éparpillés 9ans la
littérature historique du XVIIC siècle, mérite de retenir un
peu l'attention. Une grande partie de l'opuscule est consa-

Marrâkochî , Iq.hâr el-kamâl; Ibn el· Mowaqqit, es-Sa'âdat el-abadîyya, l ,


p. 24 sqq.
( 1) Sur ce saint de l'Extrême-Sud marocain , cf. AJ:!med b. el-Amin ech-
Chingîtî , el-Wasît fî tarâjim odabâ' Achingit, Qaire , 1329, p. 356.
(2) Un exemplaire de cet opuscule existe à la bibliothèque de Rabat,
sous le nO 380.
348 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

crée à la reproduction de la correspondance échangée entre


el-' Ayyâchi et les villes de la côte et des lettres qu'il reçut
des marabouts de la 'zâwlyya d'ed-Dilâ' ou qu'il leur adressa
lui-m ême . Ces dernières, il est vrai, avaient déjà été insérées
presque toutes par el-Bawwât dans el-Bodoûr erJ-rJâwtyya.
Mais, des unes et des autres, on pourra peut-être dégager une
conception nouvelle de ce qu'était la croisade marocaine à
l'époque d'el- <Ayyâchî, qui, comme on le sait, fut assassiné
au cours d'un voyage, chez les Khlot, le 19 mol)arram 1051
(30 avril 1641) : sa tête, portée à Salé, fut ensuite enterrée,
comme il l'avait prescrit de son vivant, à proximité du mau-
solée du saint Aboû'ch-chitâ' el-Khammàr, à la limite du
pays des Jbâla (1).

(1) Cf. el-Hrânî, Nozhat el-l),âdî, p. 271 du texte el 450 de la traduction


el el-Qâdirî, Nachr el-mathânî, 1, p. 179. Ce fait, d'allure légendaire ,
paraît pourtant exact, car il se serait trouvé vérifié il y a quelqu es années.
Il exi te, en effet, en face de la zâwîyya de Moulay AbOû'ch-chÜ:à', dans la
tribu des Fichtâla, une rawrJa de Sidi 'l-'Ayyâchi , dont tou les gens du
pays font le nwjdhid de Salé. Voici ce que j'ai recueilli sur place: « Lors
du bombardement de la zàwîyya, en 1910, par les colonnes du général
Gouraud et du colonel Pein , un obus éventra le catafalque d'el-'Ayyâchî
et on s'a perçut qu'il contenait un coffret. Les gens, intrigués, ouvrirent
le coffret et y trouvèrent une tête, au lieu d 'un trésor, comme ils l'es-
comptaient. »
IV

HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS

Le nombre très limité des écrivains qui, sous les règnes


de :M oulay <Abd er-Ral).mân b. Hï'châm et de son fils Sidi
Mo"Qammed, composèrent des ouvrages biographiques,
semble montrer qu'à cette époque dut correspondre un
sérieux ralentissement de l'activité littéraire au Maroc. La
petite élite citadine lettrée se retrouve bien à chaque géné-
ration, toujours aussi peu variée et aussi disciplinée, maiS'"
ne produit pas d'œuvl'es dignes d'être signalées. Au con-
traire, le règne de Moulay el-Basan marque une sorte de
renaissance des lettres musulmanes. On pouvait alors
croire que les beaux jours de paix et de prospérité de jadis
allaient revenir et laisser libre cours aux spéculations in-
tellectuelles, au milieu du bien-être matériel et de l'apaise-
ment des es prits. L'importance assez grande prise à ce mo-
ment par les ateliers lithographiques de Fès ne fut pas, de
son côté, étrangère à ce renouveau; même, quelques années
plus tard, une équipe de typographes improvisés allait, sous
la direction d 'un musulnlan égyptien, entreprendre l'im-
pression de quelques ouvrages à l'arsenal hétéroclite de la
capitale, que l'on connaît encore sous le nom de Makîna.
Les libraires in's tallés autour de l'Université d'el-Qaraw1yîn
commençaient à faire venir, à grands frais, des éditions
arabes de Boûlâq et de Constantinople, voire quelques tomes
épars de la Bibliotheca arabico-hispana, qui contenaient
les œuvres de biographes andalous célèbres.
350 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Les bareières rigides du Maroc des Chorfa n'étaient plus


d'autre part, par la force des choses, aussi rigoureusement
fermées. Les villes de l'intérieur et les ports de l'Atlantique
se mettaient, en s'en défendant très fort, à pl'endre un
contact assez étroit avec l'Europe; les missions étrangères,
diplomatiques et commerciales, qui se rendaient auprès du
sultan, excitaient malgré tout la curiosité générale. On ne
leur témoignait, il est vrai, qu'une sympathie très limitée;
on portait encore dans les cœurs le désenchantement et la
honte des désastres d'Isly et de Tétouan. Mais l'élite sen-
tait confusément que l'état de choses arriéré gui faisait du
'Maroc un anachronisme figé ne pouvait plus durer. Peu à
peu, une insensible tendance à la modernisation se faisait
jour. Les uléma ne furent pas les derniers à dénoncer le
péril, surtout à la mort du sultan pacificateur et énergique
que fut Moulay el-Basan. Les ouvrages didactiques d'Orient,
conçus à l'européenne, les journaux de Syrie et d'Égypte
les remplissaient pourtant d'un profond étonnement. « Que
~era demain? » s'écriait l'un d'eux, dans un vers qui fer-
mait son livre (1). Car cette inquiétude se manifestait par-
fois dans leurs écrits; elle provoqua vraisemblablelnent une
réaction passagère, qui fut peut-êtt·~, elle aussi, en assez
intime corrélation avec l'activité littéraire des dernières
générations. Il semble bien que ce fut avec un peu d'amer-
tume au fond d'eux-mêmes qu'en-Nâ!?iri et el-I(attâni com-
posprent à cette époq ue le Kitâb el-istiq.Jâ et la Salwat el-
anfâs.

On a vu, en retraçant la vie d'ez-Zayyâni, combien les


fonctionnaires de l'administration chérifienne étaient faci-
lement déplacés d'un point à un autre du Maroc, ' pour rem-
plir des missions de durée variable. Sans avoir jamais
exercé de hautes charges au Makhzen, le salétin Al,lmed
h. Khâlid en -Nâ~ir1 passa lui aussi la plus grande partie de
sa -vie dans des résiden~es assez nombreuses, où l'avaient

(1) en-~â~ir1, Istiq~â, IV, p. 279.


HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 351

envoyé l'une ou l'autre des bnîqa de la cour impériale. Il


est probable que si sa carrière administrative s'était tout
entière déroulée au nlême endroit, il n'aurait eu ni l'occa-
sion ni la possibilité d'écrire une histoire générale de son
pays. Pour qui veut trouver des documents, et des docu-
ments destinés surtout à une compilation historique, une
existence mouvementée à l'intérieur des frontières natio-
nàles est presque toujours, au Maroc, une condition néces- \
saire. L'auteur de l'Istiq.Jâ, à cet égard, fut bien servi par \
les circonstances (1).
Il s'appelait Aboù'l- <Abbâs Al:tmed b. Khâlid b. I:Iammâd
b. l\1ol:tammed el-Kabir b. Al:tmed b. Mal:lammed e~-Saghîr b.
Mal:tammed Ibn Nâ~ir; sa généalogie remontait ainsi, en ligne
droite, au fondateur de la confrérie des Nâ~iriyya, par l'in-
termédiaire de l'un des frères d'Al:tmed Ibn Nà~ir. Des des-
cenda'n ts du saint de Tamgroût, une branche vint s'installer
à Salé à la fin du XVIIIe siècle et prit les deux ethniques
d'en-Nâ~iri et d'es-SalâwÎ (2). L'historien lui-même naquit
dans cette ville le 22 dhoû'l-l:tijja 1250 (20 avril 1835) (3).
On lui donna plus tard le surnom honorifique de Chihâb
ed-Dîn.
A l' é poque où grandit .t\l:tmed en-Nâ~id, l'ancien camp
des mojâlzidîn n'était plus qu'une petite cité somnolente,

(t) Les renseignements qui suivent proviennent en partie du Kitdb el-


istiq~â lui-même. On a utilisé également deux biographies d'en-Nâ~irî,
l'une, sans titre, écrite par ses fils Ja<far et MaQ.am,med, l'autre par son
ancien élève, MoQ.ammed Ibn <AH ed-Dokkàlî, intitulée: Takhlîd el-ma'â-
thir tUa tachyîd el-mafâkhir bi-tarjamat ech-chaïkh Chihâb ed-Dîn Al),med
Ibn Nâ~ir. Nous remercions les trois fils de l'auteur, qui occupent au Makh-
zen chérifien d'aujourd'hui une place marquante, d'avoir bien voulu nous
communiquer l'exemplaire manuscrit de l' Istiq~â annoté de la main même
de leur père.
(2) L'auteur de l'Istiq~â est surtout connu des orientalistes européens
sous le nom d'es-SlàwÎ, qui n'est que l'indication du lieu dl\ sa nais-
sance, alors que c'est sous son véritable patronyme d'cn-~â~irl qu'il est
constamment désigné au Maroc.
(3) Istiq~d, IV, p. 193. Passage indiqué en marge. Son père mourut le
27 dhoû'l-qa'da 1277 (22 mai 1861) dans la tribu des Sofiân et fut enterré
dans le mausolée de Moulay Aboû Salhânl, dans le Gharb. Cf. ibid., IV, '
p.225.
352 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

déchue de son importance passée au profit de Rabat, sa


voisine; celle-ci avait pu attirer à elle tout le trafic du port
formé pal' l'embouchure du Boû Regreg et être élevée au
rang de capitale adnlinistrative de l'empire, presflue au même
titre que les anciennes 'm ét.ropoles du pays. Une antipathie
parfois haineuse séparait nettement les « Deux-Rives », qui
s'observaient ou se raillaient l'une ou l'autre. Salé, pour-
tant, renfermée en quelque sorte sur elle-même, acq uit
hientôt quelque renommée de ville studieuse et devint
comme une petite succursale de la capitale savante. Ses
lI10squées réunirent, en assez grand nonlbre, des maîtres
épl'ouvés, tous, d'ailleurs, ayant reçu à el-Qarawîyin la
conséceation de leur savoir. C'est alors que dans la vieille
cité florissait l'ense ignement islâmique de ?\Iol.léunnled
Ma1}boùba (1) et du qâçli Abolt Bakr 'Awwâd (2). Ces deux
personnages furent les principaux maîLres d'en-Nâ$irî,
quand il parvint à l'adol esce nce. Témoignant d'un goût fort
vif pour la science, il ne négligea pas so n instruction lilté-
raire profane et étudia de manière approfondie le s dtwân
antéislàmiques et les poèmes d'el -Bo1} lorî, d'Aboû Tarn-
mâm et d'el-Molanabbi.
Ce n'est qu 'à l 'âge d'e nviron quarante ans qu'en-Nâ$irî
entra dans l'àdministration judiciaire chérifienne, en qualité
de notaire ou d'intendant des domaines de l'État. Il y
occupa, par intervalles, des postes plus ou moins impor-
tants. C'est ainsi qu'il alla d'abord à Casablanca, où il
séjourna de 1292 à 1293 (1875-76). L'année suivante, il se
rendit à Marrâkech, revint ensuite à Salé, et repartit pour
le capitale du Sud en 1297 (1880); il y fut employé au service
des dépenses de la nlaison impériale. Puis il habita quelque
temps Mazagan, en qualité d'attaché à la douane . Il quitta
cette ville en 1299 (1882), alla à Tanger, puis demeura assez

(1) Aboû 'Abd Allah Mol).ammed b. 'Abd el-'Aziz Mal).boûba es-Salhvî


mourut à la Mekke au cours d'un voyage de pèlerinage, en 1279 (1862).
Cf. ibid., IV, p. 227.
(2) Aboû Bakr b. Mol).~mmed 'Awwâd, qâçlî et prédicateur de Salé,
mourut dans cette ville le 10 ~afar 1296 (3 février 1879). Cf. ibid., IV,
p. 255, in fine.
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 353

longtemps à Cas : lblanca, où il fut chargé, à la mort de


Moulay el- f:lasan, de faire le dénombrement des biens
appartenant au domaine du makhzen. Il fut, entre temps,
'adel à Fès, au sef\'ice des biens de mainmorte. Revenu
dans sa ville 11 atale, à la fin de sa vie, il Y fit des cours et
mourut le 16 jomàdâ 1 1315 (t3 oclobee 1897) ; il fut enterrr
dans le cimetière (lui sUl~plombe la mer', en dehors de la
porte dite Bàb Ma'allqa, del'rière le tombeau de Sidi
Hichâm.
Telle est, en substance, la biographie d'Al;med en-Nâ!?iri :
ce fut un petit fonctionnaire chérifien doublé d'un lettré et
aussi d'un historien. Sa vie n'offre pas l'originalité de celle
d'ez-Zayyânî, ou nlême, à un degré moindre, de celle
d'Akensoùs. Pourtailt, en dehors de son œuvre historique,
il a laissé plusieurs travaux qui peut-être auraient suffi à
le mettre en vue et à lui assurer un rang assez honorable
parn1Ï les littérateurs lnarocains de la période contem-
pora,i ne.
Avant d'examiner le Kitcîb el-istiq~cî, on passera rapide-
ment en revue ces autres ouYrages. Ils comprennent, d'après
les renseignements que nous avons pu recueillir, di\'erspetits
écrits (1) , en plus de trois livres importants: un commen-
taire de la Cflamaq172aqîyya, le poème d'Ibn el-Wannân,
qu'il intitula Zahr el-ajncîn minZ2adîqatlbn el-Wanncîn (2); un

(1) Ce sont: 1° un commentaire d'un poème de MaQ.ammed Ibn Nâ~ir


inlitulé Mosâ'adat el-ikhwân; 2° un traité sur la différence entre les
lettres iâ' et (d', el-Fawâ'ïd el-mo!:taqqaqa fî ibtâl da'wâ man qâl dnn el-td'
hiya'Hâ' moraqqaqa; 3° un commentaire inachevé de la Tablfirat el-!:tok-
kâm d'lbn Farl)oûn: el-Falak el-machl:wûn bi-nafd'ïs Tablfiral Ibn Far!:toûn;
4° Risdla jî'r-'radd 'alâ'Habî'ïyîn; 5° Risâla ff ta~lqîq dmr sab'al rijdl;
6° poésies réunies en dfwân après sa mort.
(2) Lithographié à Fès en 1314, 2 vol. Un peu auparavant, le poème
d'Jbn el-Wannân avait fait l'objet de deux autres commentaires: l'un
par Aboû 'Abd Allah Mol)ammed el-Jarîrî, savant de Salé; l'autre, par le
qâ<;li de Rabat Aboù Ijârnid el-Ijâjj Mol)ammed el-Makkî b. Mol)arnmed
el-Bi\àwri cch-Charchâlî el-IjasanÎ (Iqlitâf zahrat el-afnân min daw!:tat
qdft'yyal Ibn el- Wanndn; cf. mes Manuscrits arabes de Rabat, · p. 28, n~ 80
et p. 1'15, nO 340). Dans l'Istiqlfâ, IV, p. '122, en-Nâ~id annonçait qu'il avait
déjà écrit de ce commentaire quatre cahiers. Il ajouta, en marge, après
23
354 LES HOMMES ÊT LES ŒUVRES

apèrçu des schismes et des hérésies de l'Islâm, Ta'f.lm el-


minna bi-no$l'at es-son,na (1); enfin, une monographie d'e la
maison des Nâ~iriyin, à laquelle lui~même appartenait: fatat
el-mochtarî ft'n-nasab et-jarad (2). En écrivant ce dernier
ouvrage qu'il termina le 17 l'abC II 1309 (20 novembl'e 1881),
en· N'â1?irî avait l'intention de démontrer l' ori gine chérifienne
d(3s Ibn Nâ1?ir et par là-mêrne, sa propre noblesse religieuse.
CCHr1me toutes les familles maraboutiques herbères, la mai-
son de Tamgroût avait, de bonne heure, afin d'accroître son
inflüence, émis la .prétention de posséder uue généalogie
remontant au Prophète; elle y était arrivée, en reliant
par une chaîne d'ascendance l\<Ia}:lammed Ibn Nâ1?ir et
Ja'far fils d'Aboû Tâlib. On a Vu plus haut qu'Akensoûs
8" etait l~éclamé de l'ethnique el-J a' farî, en tant que descen-
dant des Ibn Nâ1?ir par sa famille maternelle (3). Néanmoins
cette origine chérifien he des rllarabouts du Wâdi Dar'a
avait paru suspecte aUx généalogistes de Fès, qui les
avaient accusés de remplacer par l'ethnique tiré de Ja'far
leur ancien patronyme d'el-Moqdâdi (4). A}:lmed b. Khâlid
éut le oourage de se poser la question (5) et de discuter
l'authenticité de la généalogie fan1Ïliale, avec évidemment
l'arrièrè-pensée qu'il la démontrerait à l'aide d'arguments
prohânts. Nous y gagnons, en tout cas, une bonne histoire
de la zâwîyya de Tamgroût; bien qu'elle reproduise souvent

coup, qu'il louait Dieu de lui avoir permis de terminer ce livre, « parfait
en son genre >l.
(t) Un exemplaire manuscrit de' cet ouvrage est conservé à Rabat, sous
le nO 68.
(2) Lithographié à Fès, 2 vol., sans date (du vivant de l'auteur). Il a été
r~sumé en ftaI1çais par M. Bodin, la Zaouïa de Tamegrout, in Arch. berb.
1918.
(3) Cf. supra, p. 201 et note L
(4) Il est de fait q'u'aucun des premiers biographes de Mal).ammed Ibn
Nâ~it et de S011 fils ne fait suivre leurs ethniques de' celui d'el-Ja'farî : ainsi,
el-lfrânî et et'-Qâdirî.
(:S) Cf. Istiq~â, IV, p. 50 (à la fin du passage consacré à Mal).ammed Ibn
Nâ~ir). Il l'eptodoit èe paSsage au début de la Tal'at el-mochtarî, en ajou-
tant qu'un séjoUl' il Fès lUi permit de se procurer différents ounages de
géhéâlôgie chél'ifienne qu'il mit à profit.
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTE!\fPORAINS 355

le travail de :M ol).ammed el-~Iakkî ed-Dara'j, intitulé ed-


Dora/' el-17'lora$$a'a (1) , elle a pourtant utilisé d'autres ou-
vrages conservés à la zâwiyya nlère de la confrérie. et qu'en-
Nâ~irî arriva à se procurer (2 ).

Ce fut un événement sans précédent dans l'historiogra-


phie maghribine que la publica tion de la grande œuvre
d'en-Nâ~irÎ, le Kitâb el-istiq$â li-akhbâr dowal el-Maghrib
el-aq$â (3). Pour la première fois, un historien marocain, de
son vivant, allait pouvoir être à la fois jugé par ses compa-
triotes et par le public étranger, musulman ou non. Il pré-
sentait non pas une chronique limitée, mais une histoire
générale de son pays, par. surcroit imprimée en Orient. Pa-
raissant en dehors des linlÎtes du Maroc, elle était assurée

('1) Cf. supra, p. 316.


(2) Principalement la fahrasa de I;Iosaïn Ibn Nâ~îr et l'Indrat el-t:;:,;~.' ~·.~
jl' manâqib el-qotb Ibn Nâîjir d'AQ.med b. loQ.ammed el-Hachtoûki es-
Soûsî.
(3) Le livre a fait l'objet de diverses appréciations plus ou moins éLen-
dues. Cf. principalement, Codera, Un Historiador Marroqui contemporaneo,
in Boletin de la Real Academia de la Historia, Madrid, t. XXX, pp. 251-
274; le même, Considerable numero ... , pp. 584-585; Doutté, Bulletin bi-
bliographique de l'Islam Maghribin, extrait du Bull. de la Soc. arch. Oral'l',
Oran, 18!:J8, pp. 56-57 ; R. Basset, Rech. bibl., p. 4, note 1 et p. 47, nO 140;
Mouliéras, le Maroc inconnu, 2e partie, Exploration des Djebala, pp. 24-
26; Budgett Meakin, The Moorish Empire, pp. 497-498; Gaillard, Arch.
mar., t. 1 T, 1!J06, pp. XIV-XV. Cf. également Brockelmann, Ar. litt., II,
p. MO et références citées, et Huart, LiU. Ar., p. 423.
L'Istiqîjâ fut publié au Qaire en 1312 H. (1894), en 4 vol. in-4. Le tome
IV de l'édition arabe fut traduit par E. Fumey, sous le titre de Chronique
de- la dynastie ' 'alaouie au Maroc..; cette traduction a été publiée dans les
tomes IX et X des Archives marocaines, Paris, 1906-1901 . . La Section
sociologique du Service des renseignements du Maroc (a~cienne Mi sion
scientifique du ' :\1aroc) entreprendrait à l'heure actuelle la traduction
'des trois premiers volumes de l'Istiqîjâ, de façon à compléter la traduc-
tion Fumey. D'autre part, les fils d'Al).med en-Nâ~irî nous ont .fait part
de leur projet, peut-être légeJ1ement prématuré, d~ publier d'ici quelques
années une nou.velle édition de l'ouyrage; paternel, accrue de renseigne.-
}!l~ntg puisés aux sources européennes ..de la collection de Castries.!.
356 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

du succès l'auteul" avec assez de désinvolture, montrait


qu'il se souciait à peine des jalousies que son livre avait déjà
suscitées dans l'empire et qu'il ne mépl'isait pas la notoriété
qu'il pourrait tiret' de son œuvre dans le reste du Blonde
musulman. On verra que si l'Istiq~â est aujourd'hui consi-
dél'é par les lettrés marocains comme la meilleure des rela-
tions de leur histoire Ilatio'n ale, il n'en fut pas de-mème au
déLmt. En revanche~ signalé dès son apparition par les orien-
talistes cl'Europe, il auira sallS tarder l'altention des histo-
riens de l'Ahique du NOl'd, pour les travaux desquels il de-
vint un document d'éHLtant plus consulté qu'une trélduction
en rendit bientôt le dernier qual't - l'histoire des <Alawites
- accessible même aux non-arabisants.
Ces spécialistes, d'ailleurs, jugèrent tout de suite l'Istiq~â
à sa juste valeur. L'ouvrage d'en-Nj~irl fut une déceplion:
alors qu'on pouvait avoir l'espoir d'y trouver une histoire
du Maroc pleine de fails inédits et écrite suivant des pro-
cédés renouvelés, on s'aperçut vite qu'elle était semblable
aux autres p"roductions de l'historiographie arabe occi-
dentale; ce n'était qu'une compilation, dont le mérite
le plus appréciable était peut-être d'ayoir rassemblé, en
un texte suivi, des indications d'histoire politique parse-
mées dans les chroniques ou les bi'ographies précédemment
composées.
Telle est, en effet, l'impression dominante qui se dégage
à l'analyse du Kitcib el-istiq~â. Il n'y a pas lieu de s'en éton-
ner, car il eût été anormal qu'en-Nâ~irî usât de nouveaux
procédés et eût du métiel' d'historien une conception diffé-
rente de celle de ses pt'édécesseul's ; s'il a offert au public
une œuvre imprimée et dès lors largement répandue et re-
lativement facile à trouver, il a été, pour la composer, en
butte aux mêmes obstacles matériels que les autl'es histo-
riens arabes du Maroc. On s'en rend compte encore mieux
pour lui, car la date récente de son œuvre permet de suivre
assez bien les étapes de la composition.
Il faut reconnaître en tout cas qu'en-Nâ~iri fut le premier
à ne pas craindre d'épuiser en quelque sorte le sujet que
d'autres avant lui n'avaient traité qu'en partie. Car il est
~.

·1

FIG.4.
Fac- similé de la dernière page de la copie du Kitâb el-isliq$â, revue par l'auteur.
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 357

difficile de considérer comme des histoires générales du


Maroc musulman le TorjOlnân d'ez-?ayyâni, qui embrasse,
sous une forme résumée, toute l'histoire islâmique, et non
pas seulement l'histoire marocaine, ou le Bostân, où les
dynasties précédentes sont pour ainsi dire sacrifiées à la
dynastie (alawite, encore moins le Jaïch d'Ake:q.soûs, qui a
usé d'un factice procédé de contraste pour faire mieux res-
sortit' les louanges qu'il prodiguait aux Chorfa de Sijilmâsa.
On peut admettre qu'en ne·voulant pas se cantonner en une
périoJe quelconque de l'histoire marocaine, en-Nâl?irî fit
preuve d'une assez grande confiance en lui-même, peut-être
aussi d'une certaine largeur de vues.
Encore ne fut-ce pas là son premier but. S'il mit plus
tard à exécution son vaste projet, c'est que les circonstances
jusqu'à un cer·tain point le lui permirent. Ses prétentions,
en effet, n'allèrent d'abord pas au delà de celles de ses de-
vanciers. Ce fut une idée chère à el-Ifrâni que l'histoire de
la dynastie mérinide pouvai t donner lieu à une chronique
nouvelle, ([ui formerait le complément du Rawd el-qir!âs et
de la Rawrj.,at en-nisrîn. On a vu qu'en écrivant son petit el-
Mo(rib el-/J2obtn, Ibn Zâkoûr, avant l'auteur de la Nozltat el-
l:tâdt, avait obéi à une suggestion analogue. De même, en-
Nâ~iri, avant de quitter sa ville natale, conçut le projet de
se faire l'historien de la grande dynastie du Moyen Age.
Peut-être les monun1ents de Salé, de Rabat et le cimetière
royal de Challa l'incitèrent-ils à écrire l'histoire des sultans
de Fès, qui avaient laissé sur les « Deux-Rives» d'incompa-
rables vestiges de leur splendeur. Toujours est-il qu'en-
Nâl?irî débuta dans les lettres et dans l'histoire par un assez
long ouvrage sur la dynastie mérinide ; il l' écri vit tout entier
avant son départ de Salé et l'intitula Kachf el-(arîn ft loyoûth
Banî kfartn (1) ; il l'avait composé surlout à l'aide des œuvres
d'Ibn Abî Zar( et d'Ibn Khaldoûn.
Peu après, commencèrent ses déplacements à trave1'S le

(1) L'exemplaire autographe est aujourd'hui conservé dans la biblio-


thèque des fils de l'llislorien ; ces dern.iers onl bien voulu nous permettre
de l'examiner en. délail.
358 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Maroc. Son manuscrit en n1ains, il se mit alors à la recherche


des sources de l'histoire lnérinide qu'il n'avait pu décou vrir
à Salé. A Marrâkech, où il séjourna longtelnps, il n'en
trouva pas, ou guère. Par contre, successivement, la Nozhat
el-?2âdî d'el-Ifrânî, le illontaqâ d'Ibn el-Qâçlî, le Jaîch
d'Akensoûs et certains dictionnaires biographiquos contem-
porains des Sa'diens et du début des 'Alawites y tombèrent
sous ses yeux, à la bibliothèque impériale. Dès lors, il
commença à tü'er de ces ouvrages toute la documentation
qu'ils contenaient et entreprit de consacrer aux dynasties
antérieures aux Mérinides, comme à celles qui les suivirent,
une histoire générale. Il se mit au travail et, en deux ans
environ, établit une première ébauche de son Kitâb el-is-
tiq$â, allant jusqu'à la tin des Sa' diens; pour la période
mél'inidp, il se borna à reproduire, en y faisant des addi-
tions au fur et à mesure de ses trouvailles bibliographiques,
le texte primitif du Kachf el- 'aFÎn. La découverte du Bostân
d'ez-Zayyânî, surtout celle du TorJomân développé, du même
auteur, lui permirent de mener rapidement son ouvrage à
sa fin. Il fut encouragé dans sa tâche, lorsqu'il alla à 1\Iaza-
gan, par le gop.verneur de cette ville, :Mal).an1med el-Jirârî.
Pen cie temps après, il mettait la dernière main au KiLdb el-
istiq~â; l'ouvrage fut terminé le 15 jomâdâ II 1298(15 mai 1881),
avant la fin du règne de l\10ulay el-Basan.
En-Nâ!?irî se hâta d'offrir son histoire au sultan, car il
espérait en retirer un avantage pour les siens et pour lui-
même (1) ; il chargea l'un de ses frères d'aller la présenter
en son nom. 1\1ais l'Istiq~â ne fut pas accueilli comme l'au-
teur l'espérait; on repr.ocha au livre de n'avoir pas quel ..
(Iuefois caché suffisamment la vérité et d'avoir fait aux vizÎrs
des derniers sultans 'alawites la part trop belle au détrinlent
de leurs maitres. En-Nâ!?irî dut même perdre l'espoir de
recouvrer le manuscrit autographe imprudemment offert;
mais il avait pris la précaution d'en faire auparavant exé-

(1) On comprendra qu'Ici et dans les passage qui suivent, on ait dù


faire preuve de quelque discrétion, ces événements touchant de lrè
près quelques personnes actuellement vivan les.
FIG. ~ . •

~. 1 ac-similé d'une page de la copie du [(itâb el-istiq§â, avec annoLation marginale


de la main d'en-Nâ~irî.
HISTORIENS E'.l' BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 359

cuter une copie par un cQ.lligraphe, Moh.ammed el-Mak}î


b. el-Bachîr, qui avait pour fonction officielle et peu rétri-
buée d'orner les chandelles allumées dans les mosquées
salétines la nuit du :M oûloûd.
L'historien prit le parti d'attendre des jours meilleut's. Il
poursuivit sa carrière administrative, et, à la mort de Mou-
lay el-Basan, se hâla de faire imprimer l'Istiq~â au Qaire,
par l'intermédiaÎl'e d'un ancien <âlim de Fès établi en Égypte,
Moulay e l-Babîb el-Belghîthî. L 'ouvrage qui, primitivement,
ne relatait pas d'événements postérieurs à l'année 1297 (1),
fut augmenté par en-Nâ1?irî du récit des dernières expédi-
tions que le vieux sultan entreprit encore dans son empire;
il nota simplement pour finir, l'avènement du jeune Moulay
<Abd el- <Azîz. Il avait eu quelques années plus tôt, en 1307
(1'889) (2), l'occasion de faire à la dernière partie quelques
additions importantes sur la copie qui le suivait partout (fig·4 ).
Il était, en eITet, resté jusqu'alors sans pouvoir utiliser le
Nachr el-mathânî d'el-Qâdiri ; lors de son séjour à Fès~ ,à
l'intendance des biens (wboûs, il arriva à se procurer le
dictionnaire biographique et en extraire divers passages,
parfois assez étendus. Il les in;;crivit en marge de son
ouvrage, et, lors de l'impression, ils furent insérés dans
le texte. La photographie ci-contre (fig. 5) permettra de
se rendre compte du procédé qu'on a déjà vu employer

(1) La reprodùcllon de la dernière page de la copie de l'[stiq~â , revue


par l'auteur, porle la dale à laquelle la première version fut terminée.
C'e t cetle date que l'on a fournie plus haut. On voit d'ailleurs très
bien, encore maintenant, sur le texle imprimé, l'endroit où l'ouvrage
s'arrêtait prlmilivement. L'arrêl brQ.sque du développement el la courte
conclusion sur le qualités de Moulay el-Ij.a an que l'on trouve t. IV,
p. 261 (après les vers) permetlent en effet de fixer la fin de la ver ion de
1288 à cet endroit.
(~) Cf. dans la reproduction de la dernière page, les quelques lignes
de la propre' main d'en-I â~irî, dans le qu elles il déclare avoir revu son
te te et y avoir fait des additions et des corrections, pendant le mois de
rabî< 11 1307 (23 novembre-23 décembre 1H8!:J). C'est cette copie -.- que
nous avons eu la bonne fortune d'avoir entre les main - qui a servi à
l'impression au Qaire. On y œmarque encore des indicatio.n s correspon-
dant aux feuilles de compositioll.
360 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

par ez-Zayyânî, sur son exemplaire de travail de la Tor:fo-


mâna (1).

Dans l'édition du Qaire, le Kitâb el-istiq~â se compose de


quatre parties d'étendue sensiblement égale et dont voici le
bref résumé. Après une courte inteoduction, dans laquelle
il expose l'utilité de l'histoire, et qui n'est pas différente de
celles que ses prédécesseurs n1arocains placèrent en tête de
leurs chroniques ou de leurs biographies, en-Nâi?iri passe
rapidement sur le Prophète et les quatre premiers khalifes
et arri ve aux Berbères, dont il fournit, d'après Ibn Khal-
doûn, la généalogie légendaire. Il ne commence à développer
son récit qu'avec les deux Idris et la fondation de Fès; il
termine la première partie de son ouvrage après avoir
exposé d'une façon résumép, l'histoire dp,s dynasties almo-
ravide et almohade. Au contraire, les trois autres sections
de sa chronique traitent ensuite dans le détail, l'une des
Mérinides et des Banoû Wa~tâs, l'autre, des Sa<diens, la
troisième, enfin, des <Alawites.
On trouvera en appendice la liste aussi complète que pos-
sible des autorités musulmanes, marocaines ou non, qui sont
mentionnées, au fur et à n1esure de leur citation; par l'au-
teur de l'Istiq~â. Bien qu'elles forment un total relativement
considérable, il ne faudrait pas croire que toutes furent uti-
lisées de première lnain par en-Nâi?ir1. Il en e~t un grand
nombre qu'il se contenta de rappeler à la suite des auteurs
qui les avaient consultées pour écrire leurs l'hroniq~es; et
il ne prit pas toujours la peine de les séparer les unes des
autres de façon précise, ou d'indiquer nettement la prove-
nance de chacune (2).

(-l) Le passage reproduit (texte et marge) figure dans l'édition du Qaire,


t. LV, p. 68.
(~) M. R. Basset, Rech. bibl., p. 4 et note t , a déjà fait remarquer que,
comme l'auteur de la Salwat el-anfâs , cn-N â~irî n'a pas utili é de pre-
mière main les histoires d'el-Bornoù~l , d'Ibn Ghâlib , d'lbn Ma~roû1:t, d'ibn
Khachchâb, d'Ibn el-Bàz , d'Ibn Jannoûn ou d'el-vVarrâq : « Les passages
d'El-Somou 'i et des au tres écrivains ..... , cités par Es-Selaoui dans le Kitâb
HISTORIENS 'ET BIOGRA.PHES CONTEMPORAINS 361

Pour la période de l ' histoire lnarocaine antérieure à l'avè-


nement des Chorfa Satdiens, c'est-à-dire pour les débuts et
le Moyen Age, les SOU t'ces les plus souvellt utilisées pal' en-
Nâ~irî semblent avoir été le Hawrj el-qi/'{âs et l'histoire des
Berbères du KiLâb el-tiba/', Il ne put mème jamais se pro-
curer la chronique d'Ibn el-Al).mar, Rawrjat en-nisl'În , encore
nloins une autre chronique antérieure à cette dernière et
connue sous le nom d'edh-DhaldLÎ/'at es-sanZ1Jya (1), Par
contre, il semb le avoit' pu mettre à p,'ofit un livre auquel il
accorde une importance capitale, le Rawrj el-mit,tâl' d'Ibn
<Abel el-Montim el-Birniarî (2 ) ; de même, Ja Jamharat el-
ansâb d'Ibn Bazm, la Jadltwat el-iqtibâs d'Ibn el-Qâçli et le
résumé historique d'Ibn Zâkoûr, el-Jl/o t /'ib et-lnobt'n,
On sent, au contraire, quand il al'l'ive à la fin des Méri-
nides et approche cie la période troublé e qui précéda l'ar-
rivée des Satdiens au pouvoir, que l'historien commence à
utiliser les biogra phies marocaines écrites pendant les
quatre derniers siècles: si le Nac/u el-mathânt, auquel il a
fait de larges emprunts, ne lui a seryi qu'après coup, on
s'aperçoit que des ouvrages comme la Daw{lat en-nâclâl', la
Mir'ât el-ma!lâsin ou le Alomtl' el-asmâ t lui fournirent
d'abord une aide précieuse, L'histoire des Satdiens, néan-
moins, s'inspire de très près de la Nozltat el)lâdt d'el-Ifrâni.

el-Isliqs'a sont, non pa emprun tés aux ouvrages originaux, mais copiés
(sans avertissement) dan. le Qirl'ds n,
('1 ) Le texte de cct ouvl'age"établi d'après un cul manuscrit, vient d'èlrc
publié par Mohammed Ben Cheneb, dans le Publications de la Faculté
des lellres d'Alger (t. LVII, Alger, 192t), sous le titre de adh-Dhalîhfrat as-
saniyya (Le Trésor magnifique). Chronique anonyme des 1I1erinides.
(2) Cet ouvrage, qui , d'après Brockelmann (Arab. liti., JJ, p. 41, 1. 2)
aurait été résumé par cl-Maqrizî, est signalé pal' ~Iùjji Khama, Kachf e~­
~o noûn, éd . d.e Constantinople, 13 l0-H , J, p. 580 , ous le titre de RawQ,
el-mittdr fî Ichabar el-aq[âr, et comme étant l'œuvre d'AboLL 'Abd Allah
Mof:1ammed Ibn 'Abd cl-Montim el-f:Iimiarî. Le bibliographe signale en
même temps un ouvrage de titre presque identique, Rawrj, el mittdr fi
alîhbd,. el-aqtdr, qui serait trè postérieur, pui que , d'après lui, l'auteur,
Aboù t bd Allah Mof:1ammcd b. i\Iof:1ammed b. Mof:1ammed el-f:I imi arî,
serail mort en 900 II. (t494-95). Le RawQ, el-mi'[dr utilisé par en-Nà~irî se
trouverait d'après nos informateurs, à l a BibJiothèque d'el-Qarawîyin.
Pourtant il ne figure pas sur le catalogue éd ité à Fès.
362 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

On ne peut affien1er qu'en-Nâ-?iri n'utilisa pas directement


les histoires d'Ibn el-Qâ<;lî, el-lYlontaqà' l-maq~oû/' et DO/'l'al
es-soloûk; mais, à coup sûr, il fut obligé de citer en seconde
main les llIanâ/til e~'-~afà' d'el-Fichlâlî. De toute façon, la
partie sa'dienne de l'Istiq$â doit ètre considérée comme une
refonte de l'œuvre d'el-Ifrânî, avec quelques indications
nouvelles, extraites des biographes postérieurs.
POUL' la période 'alawite, les sources, rnoins nombreuses
peut-être, lui furent en tout cas plus accessibles. A l'époque
à laquelle il .écrivit son histoire, les principales étaient au
nombre de trois: d ernière partie de la JVozltat el)zâdî, chro-
niques d'ez-Zayy ân î, farcit à' Akensoûs, Ces ouvrages furent
copieusement mis à contribution par l'historien de Salé; il
refit le même travail qu 'Akensolis j usq u'au règne des sul-
tans du milieu du XIX e siècle. Ensuite, pour la période pos-
térieure, le Jaie/" demeurant sa seule SOlll'ce écrite, il se
servit aussi des informations qu'il recueillit auprès de ses
'co m patriotes.
Dans quelle mesure peut.-on dil'e qu 'e n-Nâ~iri n'a pas
plagié les ouvrages qu 'il a utilisés? Il faudrait, pour pou-
voir répondre de manière sûre, soun1ettre l'Istiq§'â à un tra-
vail de confrontation aussi long que fastidieux. En général,
pourtant, l'écrivain rappelle le début et la fin de ses cita-
tions. Il a même parfois le mérile de soumeltre à quelque
critique le texte qu'il répète, en indiquant à la suite la façon
dont il y a lieu de l'interpréter. On s'aperçoit, à la leclure
de la partie ' alawite, qu'il ne cache pas combien il doit à
ses devanciers ÏlTIlnédiats, ez-Zayyâni et Akensoùs. ~Ialheu­
reusement, il est une coïncidence troublante: on trouve en
effet, mot pour mot, en différents endroits de son livre, des
. passages plus ou Inoins longs de la première version du
TOl'jOlnân 'alawite d'ez-Zayyânl, sans qu'il soit fait mention
de l'auteur. On se rappelle que le secrétaire d'Etat, ayant
d'abord donné à la dernière partie de son histoire islâmique
une ampleur disproportionnée, la modifia ensuite profon-
. dément: d'une part, il l'abrégea, et ce fut le texte Ju Tor-
jOlnân, tel que l'a connu Nf. Houdas; d',a utre part~ illa reprit
pour elle-même et en fit, en la développ~nt encore, le Bos-
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAIN ' 363

tân toujours inédit. Pendant le court moment qui précéda


ce remaniement, la version primi.tive put êtt'e copiée par
quelques lettrés. C'est ainsi que n0US avons eu la chance de
relever l'une de ces reproductions et que nous avons pu la
signaler plus haut. Conservée à l'heure actuelle à Salé, tout
permet de croire qu'elle s'y trou vait déjà à la fin cl UXIX e siècle .
.Aussi n'est-il pas impossible qu 'en-Nâ~irî l'ait eue entre les
mains eten aittranscrit des pages entières: ainsi, pour donner
un exemple probant, tout le début du chapitre qui s'intitule
« Nombl'e des soldats en garnison dans les pl::lces fortes
maritimes sous le règne du sultan Sidi ~101)amm e d b. <Abd
Allah ... (1 ) », est le Inên1e dans le manuscl'it salétin d'ez-
Zayyânî et dans l'lstiq$â.
S'il en était ainsi, il faudrait admettre qu'en-Nâ~irl lui
aussi, croyant que la supercherie ne serait jamais décou-
·verte, se laissa entraîner au plagiat pur et simple d'une
œu vre considérée comme perdue; et il serait alors difficile
de l'absoudre complètement; du moins, n 'a urait-il pas poussé
à l'extrême la déloyauté d'un Akensoûs, puisqu'il n'a pa
cru utile d'accabler d 'injures celui qu:il utilisa peut-être à
son tour plus qu ' il 'ne veut bien le dire.
Qu'il ait d'ailleurs cité textuellement, interprété après les
avoir répétés ou simplement plagié par endroits les ouvrages
dont il s'est servi, en-Nà~irl, étant donnée l'époque à laquelle
il vécut, ne pouvait guère apporter d'informations origi-
nales. Peut-être son désir n'a-t-il été que d'assembler des
textes à peu près inaccessibles au moment de la composition
de l'Istiq$â. Mais, depuis l'apparition de son livre, le plus
grand nombre des travaux qu'il mil à profit sont publiés ou,
au moins, signalés. 11 est certain que même la mauvaise
édition lithographiée du Jaïch d'Akensoûs a porté un rude
coup à l'histoire du savant salétin; et l'on peut dire sans
risque d'erreur que le jour où la gt'ande monographie con-
sacrée par ez-Zayyâni aux <Alawites sera tirée de l 'oubli et
traùuite, il ne restera pas beaucoup à l'lstiq$â de sa valeur
documentai re.

(1) Istiq~â , IV, p. 1i 7.


364 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Mais il marquera encore dans l'histoire de la littéJ'alure


marocaine une époque nouvelle. Car en-Nâ~iri a fait ce
que personne avant lui n'avait osé; écrivant uniquement
pour des musulmans comme lui, il n'a pas craint d'avouer
qu'il avait, pour établir son livre, consulté des sources eu-
ropéennes.
Dès l'apparition de l'ouvrage, au l\![aroccomme àl'ét,'anger,
cette particularité fut signalée. C'était, de la part de l'his-
torien, faire preuve d'une assez belle audace; il avait beau
témoigner, en maints endroits de l'Jstiq~â, de ses sentiments
xénophobes, il n'en pensait pas moins que des écrivains
chrétiens pouvaient avoir écrit sur l'en1pire des Chorfa des
ouvrages de quelque va]eur. Ses compatriotes virent d'un
mauvais œil et non sans méfiance ce souci d'étendre sa
documentation à d'autres œuvres que les musulmanes.
D'ailleurs, ces ouvrages européens n'étaient pas nom-
breux; l'histoire de la place de :Mazagan sous la domination
portugaise de Luis Maria da Cunha et la « description
historique du lVlaroc ) de Manuel P. Castellanos (1). Ce fut

(1) En-Nâ~iri ne désigne jamais ces deux auteurs que par leurs pré-
noms, le premier, ~~.)L. -..i..} ; le second, ~.r. Il se réfère aus i troi
foi dan l'Istiq~â (L, p. 32; II, p. 170; IJJ, p. 32), à des « histoires de
chrétiens» : e. ./Y\ ~-~..)\f.. L'histoire de Mazagan s'intitule Memorias
para hisloria da praça de Ma z'lgao, para Luis i\1aria do Couto de Albu-
qUCI'que da CunL1a, Lisboa, 1864 (cf. BudgeLt Meakin, The Moorish Em-
pire, p. 465). En-N (i~iri la mentionne pour la première fois dans son his-
toire à la page '168 du tome II : « J 'ai en connaissance de l'ouvrage d'un
Portugais nommé LoùÎz Mària sur l'histoire d'el-Jadida (Mazagan) depui
sa fondation par les Portugais ju qu'à sa reprise par les Musulmans. J'y
ai cL10isi pour ce récit des renseignements qui m 'ont paru e acts.» L'ou-
vrage de Castellano a d'abord été publié sous une forme abrégée avec le
Litre de Descripci6n hisl6/"ica de lIIarruecos y breve rese/la de sus dinastias,
pOl' Fr. ~lanuel Pablo Castella nos, à Santiago, 1878 ; une seconde édition
a paru en 1881 à Orilmela; une troisième , très augmentée et ous le
simple Litre de Historia de Marruecos , a été publiée à Tanger en '1898.
Dans le Maroc inconnu, 11, p. 238, n. 3, Mouliéras a identifié le Manuel
d'en-Nà~ir1. Budgett Meakin , op. cit., p . 498 , avaÜ soupçonné lui au si
quelle était la source exacte uLili ée par l ' Istiq~â (<< 00' un Manuel, que je
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 365

le hasard qui les lui fit connaître. Comme il se trouvait à


Mazagan, il put, gl'clCe à l'internlédiaire du qâ'ïd el-Jil'ârî
qu'il avait intéressé à son œuvre, se mettre en relations avec
un juif pOl·tugais, interp l'ète au consulat d ' Espagne. Ce
personnage, nomnlé loûsof, avait une grande admiration
pour l'œuvre d~ son co,'eligionnail'e, le poète espagnol
Ibrâhîm Ibn Sahl, qui était, comme l'on sait, d'origine
j Il ive; il proposa il en-N i1!?i ri de lui tl'ad uire de vive voix
des passages des histoi I.'es de da Cunha et de Célstellanos;
en échange, il demandait au lettré marocain de lui com-
menter les poèmes qu'il affectionnait.
De ces deux ou vrages, comnle il est naturel, c'est l'his-
toire de Castellanos qui a le plus servi à en-Nâ!?iri; il ne
la cite pas moins de vingt fOlS à propos des Mérinides, des
Sa'diens et des 'Alawites (1), non pas textuellement d'ail-
leurs, mais en interprétant de manière très large les pas-
sages qui lui furent traduits. Bien qu' il se défende, à pro-
pos de la pl>ernièr"e citation (2), d'avoir grande confiance en
l'œuvre de l'historien espagnol, il lui doit beaucoup d'in-
formations nouvelles, qu'il n'aurait pu se procurer autre-
ment: ainsi, de nombreux détails sur la bataille des Trois-
Rois ou sur la guerre hispano-marocaine de 1860. Par
contre, il lui repl'oche d'avoir inventé de toutes pièces un
sultan nlérinide, qui aurait régné entre Aboù Sa'ïd 'Othmân

n'ai pu identifier, - apparemmenl un écrivain porlugais - à moins


qu 'il ne s'agisse de Caslellanos »).
(1) On a cru utile de donner, à la suite des sources arabes de l'Jstiq~â,
la concol'duuce des passages inspirés de Castellanos, avec références à
l'édition de Tanger, 189M.
(2) Voici la traduction de ce passage (Isliq.5â, IV, p. 142, ligne '10 ante
finem ) : « J'ai eu connaissance du livre d'un Espagnol nommé Manoûîl
Bùoûloû el-Qachtîlî (sic: Castellanos a été ainsi pris pour un ethnique
au lieu d'un patronyme), écrit sur l'histoire du Maghrib-Extrème. J'ai
emprunté à cet auteur quelques informations que je n'ai trouvées que
dans son ouvrage. S'il rapporte du maigre el du gras (réminiscence d'un
passage des Prolégomènes d'Ibn Khaldoûn, chère à tous les historiens
marocains), du cher et du bon marché, celui qui sait trier avec clair-
voyance n'en pourra pas moins distinguer ses petits cailloux de ses "
perles, et séparer ses dattes desséchées de ses dattes mûres. »
366 LES HOMMES El' LES ŒUVRES

et son fils <Abd el-I:Iaqq, Sidi <Abbo, de son vrai nom <Abd
Allah b. Al).med (1).
Le Kitâb el-istiq~â n'est pas seulement une chronique
annuelle; c'est aussi, dans une certaine lnesure, un réper-
toiee de wafayât. Il n'a pas, bien entendu, l'ampleur d'un
livre d'annales semi-biographiques, semi-historicJues, comme
celui d 'el-Qâdirl, par exemple. Mais on trouve quelquefois
dans l'ouvrage - procédé d'ailleurs déjà noté chez el-
Ifrânî, - des obituaires à la fin d'un règne ou d'une pé-
riode. D'ailleurs, ces wafayât sont la plupart du temps salé-
tines; il n'est guère de grand personnage de la ville
maritime qui nlj soit mentionné par en-Nâ~irî, à la page ,
que la date de sa mort lui assigne (2) .
L'histoire de Salé tient, au reste, une large place dnns
l'Istiq~â. Il semble bien que l'écrivain air voulu enfermer
dans sa chronique marocaine une monographie de sa ville
natale; c'est ainsi qu'il insiste longuelnent sur la fondalion
de sa médersa par le sultan mérinide Aboù'l-I:Iasan en 742
(1341-42) (3) ou, dans un autre oedre d'idées; sur le bom-
bardement de la place le 1 er ~afar 1268 (26 novembre 1851),
par une escadre française (4). Pour l'histuire des Deux-Rives
le livre d'en-Nâ~iri contient même parfois des données
inédites (5).
(1) Cf. Istiq~â, Il, p. 148 et Cas'tellanos , Historia de Marruecos, éd. de
Tanger, p. 345 , n. 1. Castellanos s'était d'ailleurs aperçu que son travail
avait été utilisé par en- â~irî: « •.• el. ilustrado é inteligente morD de
Salé ex-Xiéj Ahmed ben-Jâled ... , que sin duda ha leido detenidamenle la
'la é 2a eclicion de nuestros ApuNTEs, pues nos cita en su historia muchi-
simas veces ».
(2) Ainsi pour la période moderne, Istiq:jâ, IV, pp. 49, 51, 52, 54, U8,
140 r 194, etc.
(3) Ibid., II, p. 86.
(4) Ibid., IV, Pl 202. On connaît aussi le récit anonyme de ce bombar-
dement traduit de l'arabe par L Coufourler, Un récit marocain du bom-
bardement de Salé par le contre-amiral Dubourcl.ieu en 1852 (sic), in Arch.
mar., VIII, 1906, pp. 396-403.
(5) L'histoire des Deux-Rives a fait en 1330 (1912) l'objet d'une orjoûza
historique d'Aboû <Abd Allah MOQammed b. MOQammed" Ibn <Ali ed-
Dokkâli es-Salâw.î, élève d'en-Nà!Ziri et de Moçammed b. Ja·fa~ el-~at­
tânî , actuellement hisroriographe de Sa Majesté chérifienne Moulay Ioù-
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 367

Ce fut d'ailleurs à la mémoire de ses concitoyens qu'iL


s'adressa surtout pour obtenir cette documentation locale,
au moins .pour la période moderne (1). De même, il lui.
arri va d'obtenir des informations verbales sur certains événe-
ments politiques (2); il utilisa à maintes reprises, égale-
ment, des notes de son grand-père maternel Mol}.ammed b.
Zarroûq (3).
Dans la présentation de sa chronique, en-Nâ~irî ne pro-
cède pas autrement que les historiens de son pays. Il s'en
tient, en général, au récit annuel, toute l'histoire du Maroc
gravitant autour de celle du sultan régnant. Quelquefois,
néanmoins, dans ce qu'il appelle des « retours en arrière »,
il fait preuve d'un peu plus de largeur de vues (4). Et les
considérations générales que lui sug.gèrent les événement!';
sont, dans certains c.as, assez étendues et non dépourvues
de quelque sens critique. Mais, comme el-Hrânî et comme
Akensoûs, il est historien par occasion, et lettré par voca-
tion . . L'adib reparaît chez lui à chaque page, et de façon
parfois assez originale. On le sent tout imprégné de littéra-
ture arabe profane. Il a de temps à autre sur la culture de,
ses compatriotes des réflexions hardies, qui dénotent une
indépendance relativement grande. On s'étonne moins, du
même coup, de le voir consulter des ouvrages non musul-
mans. N'est-ce pas un signe des temps nouveaux que de
l'entendre dire que l'étude des abrégés mnémotechn~ques
est funeste (5) ; insister, à propos de l'apparition de la
secte des Wahhâbites, sur rimportance prise au Maroc par

sof. Une copie de ce poème, qui porte le titre d'Itl),âf achraf el-malâ bi-
ba<fj akhbâr er-Ribdt wa-Salâ, est conservée à la Bibliothèque de Rabat,
soas lé nI) 383.
(1) Cf. Istiq~â, IV, p. 13'1.
(2) Ainsi, au sujet de l'affail'e des Za'Yyân en 1234 (ibid.,lV"p. 152 sqq.).
De même, il a recueilli directement deux récits pittoresques, l'un de
l'ambassade marocaine envoyée à Paris en 128~ (186~-66) (IV, p. 229) ;
l'autre, de l'txposition universelle de Paris en 186'7 (IV, p. 231).
(3) Ainsi, ibid., IV, p. 09 et 65. Il Y a lieu de corriger dans la traduc-
tion Fumey (Arch. Mar., 'IX, p. 170 et 189) paternel par maternel.
, (4) Ainsi, ibid., IV, p. 89.
(0) Ibid., IV, p. 120.
368 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

le culte des saints et se déclarer ennemi des lnollsall2 CI ) ?


Si ces remarques sont le fait d'un esprit curieux, par
contre en-Nâ1?il'i joue de malheur dans certains essais
d'étymologie (2). Néanmoins, il est peut-être l'historien
marocain y'ui a manié la 1angu e arabe avec le plu~ de faci-
lité et d'élégance. Il faut -au moins lui reconnailre ce
mérite; son style. clair et châtié, n'a que rarement recours
à l'appareil factice des métaphores et de la prose rimée.
S'il n'a fait, la plupart du temps. dans l'IsÛq~â, que répéter
les ouvrages de ses devanciers, il a, dans les quelques
passages qui sont vraiment de sa composition, donné la
mesure de ses qualités d'écrivain: sans les louer à l'extrême,
il sera juste de dire que sa langue, en général, forme un
heureux contraste avec l'arabe pompeux et lourd de la
plupart de ceux qu'il mit à profit d'un bout à l'autre de
son histoire.

Si, dans l'lstiq~â, en-Nâ1?irî ne donna pas au règne de


Moulay el-Basan toute l'ampleur à laquelle on aurait pu
s'attendre, ce fut peut-être pour ne pas s'appesantir sur un
sujet que quelques-uns de ses contemporains étaient eux-
mêmes en train de traiter. Le sultan, en effet, voulut
comme Moulay Al).med el-Man 1?oûr et peut-être l\loulay
Ismâ'ïl, avoir à son service un historiographe en titre. Les
histoires particuqères de la dynastie s'arrêtaient au plus
tard, avec la chronique d'Akensoûs, au règne de Sidi
Mol).ammed b. 'Abd er-Ral).mân. Son choix, pOUl' l'établis-
sement de cette nouvelle monographie des 'Alawites, se
porta sur son ancien précepteur, un petit-fils de I)anldoûn
Ibn el-I)âjj '.
Ce personnage, qui se nommait Aboù'l-'Abbâs Al).med b.

(1) Istiq~â., IV, p. 145 sqq. 00. remarquera aussi le pamphlet presque
virulent que forme en réalité son long développement sur l'armée maro-
caine, à propos de la guerre de 1860, IV, p. 219.
(2) Ainsi les explications fantaisistes qu'il donne de Chrâga (IV, p. 20)
ou de I;Iartânî (LV, p. 27) .
HISTORIENS ET BIOGRAPHES (CONTEMPORAINS 369

Mo}:lammed b. I:Iamdo(ln Ibn el-,I:Iâjj es-Sellamî el-Mirdâsl el-


Fâsî (1) , naquit à Fèè dans la 'première moitié du XIXO
siècle. Son père, témoin-notaire dans cette ville, fut un
écrivain remarqué, et mourut en 1274 (1858) (2). A}:lmed
Ibn el-~Iâjj ·se destinait à .la même profession, après avoir
été, à el.Qara"vîyîn, l'élève de . 'Abd es-Salâm Aboû·Ghâlib (3)
et de 'Ali Qa$$âra (4) , quand il fut invité par le sultan
Sieli 1\lo}:lammed b. 'Abd el'-[1a}:lmân, à se rendr.e, en qualité
do précepteur, dans la tribu d' Al)mar, près de Marrâlœch:
c'est là Hu'étaient élevés les princes impériaux. Il fut ainsi
l'un des maîtres du futur sultan ~Ioulay el-I:Iasan; quand ce
dornier eut terlniné ses études, A}:lmed Ibn el-I:Iâjj s'on
retourna à Fès, où il vécut surtout des libéralités de son
ancien élève.
1

Peu après son avènenlent, 1\10ulay el-I:Iasancle nomma son


historiographe et lui donna 'l'ordre d'écrire une histoire
complète de,ladynastie (alawite. Ibn el-I:Iâjj, alors, entreprit
la composition d'un ouvrage de grande étendue, auquel
il donna le titre d' ed~Dorr el-l7lontaldutb el-mostaf:z.san ft
ba(çl lJut'âtllir amtr el-moû'nûntn Mawlânâ'l-lfasan. Quel-
ques années plus tard, il en avait terminé le onzième volume,
qui s'arrêtait 'à peine au règne de 1\f oulay Solaïmân; l'his-
toire complète devait compter vingt-cinq volumes. Mais le
sultan ne voulant pas attendre la fin de la relation de la dy-
nastie pour voir consigner son propre règne, donna l'ordre
à l'historio.graphe d'interronlpre son travail et de rédiger
les annales du rVlaroc à partir du jour où il étai t monté sur
le trône. Ibn el-I:Iâjj s'acquitta bientôt de cette nouvelle tâ-

(1.) Cf. el-FoÇJ.aïlî, ed-Dorar el-bahîyya, II, p. 329. Renseignements four-


nis par le pelit-fils de ce personnage, Mol).ammed el-Mahdi b. Aboû
Bakr b. Al).med Ibn el-f:Iâjj, savanL de 3° classe, prOfesseur à l'UniversiLé
d'el'-Qarawîyîn ét au ' Collège musulman de Fès.
(2) Sur ce p ersonnage, cf. supra, p. 343, n. 1.
(3) Sur ce personnage, cf. supra, p.' 343, n. 7.
(4) Aboû'l-Hasan 'AH b. Jdrîs b. 'AH Qa~~âra el-I:Iimiarî el-Fâsî, savant
de Fès SUl'tout connu par sa glose sur le commentaire d'es-Sollam d'cI-
Al hÇJ.ari 'par el-'Bannânî, mourut le '1.3 rajab 12()9 (9 août 1843). Cf. el-
Kattânî, Salwat el-anfas, II, p. 265.

24
370 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

che: il donna au nouveau livre, qui contenait également


plusieurs volumes, le même titre que celui de l'histoire
tout entière et satisfit son maltre qui le comhla de présents.
Jusqu'à la mort de Moulay el-?asan et même ensuite, il con-
tinua à tenir son ouvrage au courant de tous les événements
notables. Il fut en même temps professeur à l'oratoire de
Moulay Idris et à la mosquée d'el-Qaraw1'yin, composa d'au-
tres ouvrages (1 ) et mourut le 27 dhoù'l-l)ijja 1316 (8 mai
1899). Il fut enterré dans la zâwiyya des Chorfa de \Vâzzân
qui se trouve, à Fès, au quartier de TchertchoLir, près de la
Saqâyat ed-Damnâti.
La première, comme la seconde version d'ed-Dorr el-mon-
takhab el-mostaf:z,san ne circulent guère aujourd'hui au Ma-
roc. De la dernière, il n'existe vraisemblablement que deux
exemplaires, l'un conservé à la bibliothèque impériale de Fès
ou à celle de Rabat, l'autre resté entre les mains des descen-
dants de l'auteur. C'e:;t le premier volume de ce second
exemplaire que nous a\'ons pu voir (2).
~n l'examinant, on a pu préj uger sans peine du contenu
du re8te de l'ouvrage. Il renferme en effet l'intL'oduclion et
le sommaire de l'his toire de Moulay e1- E:Iasan: la relation
chronologique du règne du sultan semble avoir été la moin-
dre préoccupation de l'historiographe. Des douze chapitres
que comprend son œuvre, seulleneuvièmé, d'après son titre,
semble répondre au véritable sujet. Les premiers sont pleins
de toutes sortes de considérations générales sur les qualités
souhaitables pour un prince musuhnan : justice, respect de 1
la loi di vine, clé m ence, générosité, culture littéraire; d'au-
tl'es chapitres suivent sur l'opportunité qu'il y a, dans cer-
tains cas, à consulter les uléma de l'empire, sur la façon

(1 ) Ce sont: 1 0 un ouvrage de médecine en 3 volumes, intitulé ed-Dorar


eHibbfyya el-mohddt lïl-~taq,rat el-f)-asanîyya; 2 0 un ouvrage sur la généa-
logie des <Alawites; 30 une glose sur le commentaire d'el-Makkoûdî sur
l'A IJîyya; 40 une glose sur le commenlaire d 'el-Azhari sur l'Ajorroû-
.mîyya.
(2) Manuscrit relié s'arrêtant à la fin du 3e chapitre de l'ouvrage
(240 feuillets à 16 lignes, 230 millimètres de hauteur sur 180 millimètres
de largeur).
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 371

de conduire la guel're, sur les résultats qu'il faut savoir tirer


des expéditions heureuses. En un mot, c'est plutôt un traité
de politique conçu par un esprit marocain, ou même une
longue compilation d'ouvrages antérieurs, qu'une histoire
proprement dite. L'auteur termine son travail, à la façon des
historiographes sa'diens, parune liste des maîtres du sultan,
par un panégyrique Je ses vizirs, secrétaires ou chambel-
lans, et par la citation intégrale des poèmes de félicitations
et de louange parvenus à la cour à l'occasion des fêtes reli-
gieuses, des naissances ou des mariages de princes dans la
famille impériale. On voit, par ce résumé, qu 'il n'y aura pas
grand intérêt à tirer de l'oubli cette histoire par trop prolixe,
d'autant plus que les quelques événements qu'elle doit
relater ne sont pas tellement anciens qu'ils ne puissent
être reconstitués sur place, à l'aide de renseignements
oraux.
Dans le premier volume des Archives 17wl'ocaines, la
Mission scientifique du :Maroc signalait l'existence d'un
autre ouvrage écrit sous le règne de Moulay el-E:Iasan, et
qui, vraisemblablement, était dû à la plume d'un haut fonc-
tionnaire marocain, alors encore vivant, pour lequel on dé-
sirait garder l'anonymat (1). Quelques années plus tard, des
extraits de cette chronique, signalée sous le titL'e d'el-lfolal
el-ba/dyya, étaient traduits dans le même recueil (2). Il est
difficile, à travers cette traduction fragmentaire, dont la
lecture est parfois rendue pénible par des commentaires
hors de propos, de se rendre compte de ce que fut exacte-
ment cet ouvrage. Le traducteur y voit un panégyrique de
"M oulay el-f:fasan, surtout destiné à montrer par contraste

(1) Arch. mar., T, p. 1'29: « Ce manuscrit anonyme et acéphale se com-


pose d'environ 300 feuillets non num éro tés . 11 a été rédigé 11 y a peu de
temp , dit-on, par un personnage de la région de Fas dont il n'y a pas
lieu de faire connaître le nom. C'est en réalité une histoire du Maroc,
depuis les origines, analogue au Kilàb el-Tsliq~à. L'auteur a mi à con-
tribution les mêmes sources que celles de ce dernier ouvrage, aussi ne
pré ente-t-il qu'un intérèt econdaire.»
(2) Chronique de la vie de Moulay El-l,iasan , par L. Coufourier, in Arch.
mar., VUI, Paris, 1906, pp. 330-395.
372 LSS HOMMES ET LES ŒUVRES

l'antipathie que l'auteur porta au successeur du geand sulLan.


Dans l'extrait publié, on trouve, en tout cas, 'maintes indi-
cations dignes J'intéeêt sur les expéditions de :Moulay el-
I;Iasan dans le SOlLS, chez les Beni :Mgîld et chez les Jhâla,
ainsi que sur les constructions publiques qui fUllent entre-
prises sous son règne.
Enfin, un troisième ouvrage fut consacré au même sultan
par un lettré do i\larrâkech, Aboû <Allah Mo1:tamnled b.
Ibrâhim es-Sabâ<ï (1), qui fut mufti et professeur dans cette
ville, après 'avoir été à Fès l'élève d'el-~âjj Mol).ammed
Gennoùn (2) et du qâçH <Abd el-:M alik el- <Alavvl eçl-l)arîr. Il
mourut il 'Y a quelq ues années (6 rajah 1332 - 31 mai 1914).
Son histoire du su ltan (3) porlerait le ti lre d' el-13ostân el-
jâ17li' li-koll noû< basan wa-fann mosta~lsan ft <idd ba'çl
ma'ât/âJ' es-soltân lIIawlânâ'l-I:Iasan.

C'est surtout sous forme d'ouvrages d'ensemble que la


période contemporaine marque au Maroc un renouveau du
genre biographique. Les petites m.onographies consacrées à
un seul personnage.~ saint ou savant, restent en effet très
rares. On ne trouve ainsi que deux livres de lnanâqib (4) :
l'un, relatif à un saint de Rabat qui vivait à la fin du
XVIIIe siècle, <AIl el-<Aqqârl (5), écrit en 1304 (1886-87) par
son petit-fils <Ali b.:Mol).an1n1ed h. <Ali (ti) ; l 'autre, dll à la
plume d'un qâçll de Fès mort en 1328 (1910), <Abd es-Salâm

(1) Cf. Ibn el-Mowaqqit, es-Sa'âdat el-abadiyya, fI, p. 84.


(2) Sur ce personnage, cf. infra, p. 373.
(3) II composa également: 1 0 un commentaire du Kitâb el-arba'in l),a-
dîthân d'en-Nawawl; 2° un résumé du Zahr el-akam d'el-Joùsî.
(4) On a vu également plus haut (p. 49, n. 1) que de cette époque
date le recueil des manâqib de Moulay Aboù'ch-Chità'el-Khammâr, écrit
sur commande par un savant de Fès de 'la famille des Ibn Soûda.
(5) Chérif J:lasanî enterré à Rabat, dans une ruelle proche de1a Sowaïqa,
.entre la mosquée de Moulay Solaïmân et la rue d'el-Gazzàrln. Mouru t le
11 chawwàlH18 (16 janvier 1707).
(6) Une copie de cet ouvrage est conservée à Rabat, Mss., nO 398.
HlSTORIE~S ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 373

el-Howwâri, sur le santon carnpagnarcl el-Ijasan G.enboûr (1).


En pl'ésence du nombre toujours grandi snnt des gens
qui se réclament d'une origine chérifienne deux savants de 1

Fès mettent à jour les travaux antérieul's qui sont relatifs à


la noblesse religieuse marocaine, ed-Dor7' es-sant d'el-Qâdirl
et lVatîjat et-tabqlq d' e1- ~[asnâwl ed- Dilâ:ï.
Le premier de ces savanLs, Aboù <Abd Allah ~Jol;ammed
b, e 1- Bâjj e 1-'M adan i b . <A li Gen no lîn (2), fi ui appartenait
vraisemblablement à une ancienn.e famille juive islâmisée,
mourut à Fès le 1er dhol4'l-f;lijja t302 (11 septembre 18H5 ),
en laissant, mltee autres ouvrages (3), une liste de choda
maJ'ocrtins intitulée ed-Do/'al' el-/JutknOllna fl'n-nisbat ech-
chartfat el-17Ul$OÛna. Il avait, dans la capitale, été l'élève
d'el-VValid el-<I,'âqi (II), d·A1:.un.e d el-?\Inrnisi (5), d'Aboli
Balu Ibn Küân (6) , de Badr ed-Din el-ijall1l11oùml (7) et
de <Abd es-Salâl1l Aboû Ghàlib (8). Ce fut un jurisconsulte

(1) Sur cc sainL cnLrLTé d a ns la LrilJn d'el-Jilia (rive dwiLe du Wâdi


Wargha), cf. Mouliéras, Le Maroc Inconnu , H, p. 37 ; ~IonLeL, Le Culle des
saints muslllmans dans l'Afrique du NOI'd, p. 27 cL E. Lévi-Provençal, Notes
d'hagiographie marocaine (extrait, des Archives Berbères, 1919-20), p.14-J5.
(2) Cf. el-Katlànl, Salw:"ll el-allfds, H, p. 361.; cl-FoÇlaLll, ed-Dorar el-
bahîyya, H, p. 366.
(3) Ce sont: 1° un résllmé de la· glose d'er-Rahoûnî sur le commentaire
du MokhlaIiar de Khalîl par <_\:.bd el-l3àqi ez-Zorqùnî ; 2° une glose sur le
commentaire de Hennîs sur la partie du Mokla$w' de K.halil relalive aux
successions; 3° er-Raj:~ wa'l-Ï(jmâ< fî ta (/,rîl11 'âldl el-lahw wa's-simd<;
4° Na$î~"/'at dhawi'l-himam el-akids fî-md iaLa<allnq bi-kholtal en-nds ;
;)0 NaIii~wl en-nadhir el-<oridn ftl-laT-;dhîr min el-gh(Œba !Ua' il-namîma wa'l-
bohlan; 6° el-Taslia wa's-solwân li-man iblalà bi'l-idhâya wa'l-bohldn ;
7° el-Ta<lîq el-faUT-; min Jl{owaqd Mdlik.
(1,) Sur ce personn.age, cf. supra, p. 341.
(5) Aboû'l-<Abbàs At)med b. Ma]:wmrned b. <l\.lî cl-)larn.îsî el-Fàsî, gram-
maLrien et- imâm de Fès, morl dans celle ville le 13 ~afar 1277 (3 1 août
1860). Cf. el-Kattànî, Salwal el-anfâs, J, p. 259.
(6) Aboù Bakr b. et-Tayylb rbn. Kîràn, imàm de [<'ès, morlle 4 jomâdâ
11 1267 (16 avril 1851). Cf. cJ-KatLânÎ , Salwal el-anfds, JlI , p. 8.
(7) Aboù <Abd Allah \1ot) ammed, dit Badr ed-Din, b. ech-Châdhilî b.
At)med el-f:IammoùmÎ, chérif t)asanî, savant de Fès, né en 1177 ou 11.78
(1763-65), mort le 8 moQ.arram 1266 (14 novembre 181.9). Cf. el-l attânî,
Salwat el-anfas, 1, p, 178.
(8) Sur ce personnage, cf. supra, p. 3'.3, n. 7.
374 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

éminent, et de nombreux disciples assistèrent aux cours


qu'il professait à el-Qarawîyin et dans le mausolée de
Sidi Qâsim Ibn Ral).moûn (1). Il fut quelque t~rnps qâçlî de
Marrâkech (2).
Le second était un chél'if <alawite du nom d'Aboû 'l-<Alâ'
Idris ben Al)med ben Aboû Bakr ben Aboû Zakri el-Foçlaïlî
el- <Alawl es-Sijilmâsi el-Fâsi (3). Il naquit yers 1260 (1-844)
à Fès, où son père, originaire de Madghara, s'était installé
après un séjour à Meknès. Lui-m~me fit dans sa ville natale
de fortes études, et eut COInme principaux maitres (4)
Mol).ammed Gennoûn, Ja<rar el-Kattânl (5) , Al).med el-
I:IojraU (6), el-Mahdî Ibn el-I~lâjj (7), et Mol).ammed Mas-
wâk et-Tâzi (8) ; il mourut en 1316 (1898-1899). Il avait
composé quelques opuscules, surtout des panégyriques
du Prophète, et un grand ouvrage d'ensemble sur les
généalogies de~ chorra de la capitale, ed-DoJ'ar el-baldyya
wa 'l-jawâhir en-nabawtyya fî'l-foJ'Oû< el-/:lasantyya wa'l-
/:losaïnlyya (9) .

(1) Ce tomb eau e lrouve dans le qUaI'Lier d 'en- aJJafln. Le person-


nage qui y est enseveli est un saint du nom d'Aboû Mol).ammed Qùslm b.
Moryammed, dil I;:lammo, b. <A mr Ibn Ral;moLln ez-Zarhoùni el-Fâsi, qui
mourut le 7 dhoû'l-I;ijja 1149 (8 avril 1737). Cf. el-Qâdirî, Nachr el-ma-
lhâni, 11, p. 239 ; llliqât ed-dofar, fol. 74 rD ; ekTàhiri, TO~lfal el-ikhwân,
p. 208; el-Kattânl, Salwat el-anfâs , J, p. 100.
(2) Un opuscule biographique lithographié à Fès sans date, lui a élé
consacré par Mol;ammed b. el-Mo~tafà el-Machrafi, ancien qùÇlî de la tribu
des f:iiâïna.
(3) Lui-même, ed-Dorar el-bahîyya, J, 235. Henseignement fourni par
<Abd el-I;:laï el-Kallâni.
(4) Il en a fourni une liste complète dans ed-Dorar el-ba/dyya, loc. cit.
\5) Sur ce personnage, cf. injra, p. 379.
(6) Aboù'l-'Abbâs Al;med ben Mol;ammed ben 'Abd er-Ral;mân el-Fî-
lâlî el-I;:lojratî, qâçli et professeur de Fès, mort dans cette ville le 11 jo-
màdi 11 1303 (17 mars 1886). Cf. el-l allâni, Salwat el-anfâs, lJJ, 9.
(7) A.boû <Abd Allah Mol;ammed el-Mahdi ben Mol;ammed ben I;:lam-
doûn Ibn el-I;:lâjj, frère de l'historiographe de Moulay el-I;:Iasan, mort à
Fès en cha<bân 1290 ('24 scptembre-22 oclobre 1873). Cf. el-IZattânî, Sal-
wat el-anfâs, l, p. 238 ; el-FoÇlaïlî, ed-Dorar el-bahiyya, II, p. 329.
(8) Sur ce personnage, cf. supra, p. 166, n. 1.
(9) Cet ouvrage a été lithographié à Fès, 2 vol., en 1314.
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 375

Ce livre est un excellent répertoire de l'aristocratie int el-


lectuelle et religieuse de Fès. Après une introduction dans
laquelle l'auteur déclare que bien des gens qui se pro-
clament chorfa n'ont aucuneluent le droit de revendiquerce
titre, il se fait successivement l'historiographe des descen-
dants d'el-Basan et de ceux d'el-Bosaïn. Ce travail ne serait
en somme qu'une réédition des œuvres d e ses prédécesseurs
du XIIIe siècle, mais mise à jour jusqu'à son époque, s'il'
n'avait donné à la partie qui traite de la branche Calawite
descendant d'el-Basan, à laquelle il appartenait lui-même,
une extension fort grande. Aussi bien, indépendamment des
brèves notices qu'il a consacrées à chacun des chorfa mar-
quants de Fès, fournit-il des détails abondants sur tous les
groupements Calawites du Tâfllelt, sur lesquels, sans lui, on
ne serait guère renseigné. Son livre est d'ailleurs une liste
de noms plutôt qu'un dictionnaire biographique: mais c'est
en même temps, jusqu'à un certain point, un « armorial»
des grandes luaisons marocaines. En effet, après avoir
épuisé la liste des chorfa du :M aghrib, il termine son ouvrage
par une longue conclusion qui présente le plus haut intérêt,
car elle renferme d'assez abondants renseignements sur
vingt familles non chérifiennes de Fès: ainsi, les Fâsiyjn,
les Ibn el- Bâjj, les Dilâ'ïyîn, les Ibn el-Qâçlî, les Ibn el-
Wazir el-Ghassâni, les Gennoûn. Et, comme il est probable
qu'el-Foçla'Lli alla puiser l'essentiel de sa documentation dans
des archives de fanlilles, ed-Dorar el-baldyya offrent, sur
un sujet un peu limité, il est vrai, des indications inédites
et assez clairement présentées.
côté de ces ouvrages de généalogie chérifienne, appa-
raissent, à la fin du XIX e siècle et au début du xx e , des
travaux assez nombreux sur les confréries du Maroc. A ce
nl0ment, les plus prospères sont au nombre de cinq, procé-
dant elles-mêmes, pour la plupart, des deux grandes écoles
qâdirite et châdhilite. Dans le nord du pays, les plus impor-
tantes sont celles de Wâzzân (Tohâma) et des Darqâwa;
dans le sud, celle des N â~irîyya l' em porte de beaucoup;
enfin, dans les villes, où d'ailleurs ces dernières ont aussi
des adeptes nombreux, deux autres ont grand succès parmi
376 l,ES HOMMES ET Lb ŒUVRES

les milieux aristocr<l tÎques: les confréries de Tijjânîyya et


des Kattâniyya (1).
On a déjà vu plus haut que des monogI aphies furent res-
pectivemenL. consacrées aux Chorfa Wàzzâniyin et au fonda-
teur de la zâwiyya de J30ù B ri 1.1 , el- 'Arbi ed-Darqâwi. De
1llème, les Nâ~iriyin eueenl encore un historien dans la per-
sonne de l 'auteur du Kitâb el-istiq$â. On tl'ouve encore, dans
la période contemporaine, une étude relative à l'un des suc-
cesseurs les plus agissants d'el- 'Arbi eu-Darqàw" e l-T\1ahdi
b. Mol:wmmeJ. b. '.\bd eL'-l1al).mân ed-Dal'qâwi (2), par l'un
de ses élèves, ~lol).ammed h. el-~lobùl'ak el-Hachtoùki (3),
mort le 7 jomâdà 1 1313 (27 octobre 1 95) à Marràkech, sous
le titre d'eL-.Jlafâkltil' eJr'altyya fl'clt-clwl7lâ'l'l el-malt-
dtyya (4).
On sait que le fondateu L' de la confrérie des Tijjàn iyya,
Aboû'l- 'Abbâs Al).mecl h. l\1ol;amme(1 h. el-Mokhlàr et-
Tijjâni (5), arait eu, à Fè , conune principa~ disciple Aboù'l-
~asan 'AH h. el-'Aebi Baerâda, surnommé I:Iarâzim (6) : ce

(1) Les aulres confréries Jllll'ocaincs, qui sont des confréries «( an-
glallle » Crsùwa, Ijamùdcha) ont surtout leurs adeples dans le monde
des arlisans des villes el sont méprisécs par l'élément leLLré. JI s'ensuit·
normalement qu'cl Le ' n inspirent aucun auleur marocain.
(2) Sur ce personnage, mort dans la prclnière décade du XIVe siècle II.
(1883-93), cf. Ibn el-.\lowaqqit, es-Sa'âdat el-abadîyya, l , p. 98.
(3) Cf. Tbn el-\fowaqqil, es-Sa'âdat el-abadiyya, T, p_ ~O.
(4) 11 a également écril d'autres œuvres donl voici la lisle : 1° Ghoniat
el-miskîn fi char~l ' el-morchid el-nw'ïn; 20 el-Masâlik es-sanîyyafi charI), el-
Ajorroûmîyya; 3° Miftt1~l el-kholâ~a fi char~l el-Alfîyya; 4° el-Mawârid
ech-chahîyya fl char~l el-Bordat el -Boû~irîyya; 5° el-Amànî el-moblahija fî
char~l el-Monfarija; 6° el-Kaw /wb ez-zdhi r fî char~l el-wird el-bâhir (sur le
wird de son maître); 7° rllhmad el-moqalfi charZl mohimmal el-Jomal; 8° el-
l'IIawâhib el-qaddosîyya fl char~l el-'aqîdal es-sanoLlsîyya; 9° commenlaire
d'e~-$alât el-bakrîyya (d' Abo Ct Bakr ed~ D.ilù 'r) ; 10° rlolal e 1-'aroûs fl lazldy yat
en-nofous .
(5) J[ort à Fès l e 17 chawwàl 1230 (22 scplcmbrc 1815). Cf. sur lui la
bibliographie européenne cilée par R. Ba:isel, Nedromah el les Trams,
p. 124. Cf. en plus de c biographes, au -'[m'oc, en- à~irî, Istiq~â, IV ,
Il. 150 et cl-I allànî, Salwal el-anj'âs, T, p. 180.
(6) Cf. AQmed Skirej, Kachf el-I),ijâb, J, p. 72 sqq. ; Rinn , lVIarabollts et
Hhouan, p. 421 sqq. ; R. Bassel, Rechl b~bl., p. 45, nO '130.
HISTORIENS - ET BIOGRAPHES CONTEMPORAIN S 377

dernier compos·a sur son maJtre, en 1214 (1799), une longue


biographie qu'il intitul; Jawâhir el-ma'ânî wa-boloû'gh el-
amânî fî faïçl ech-chaïkh Abî'l-'Abbâs A~17necl et- Til/ân î, (1).
Inquiet de l'influence grandissante acquise par Barrâda, le
fondateur de la conhérie l'engagea à partir pour accomplir
le pèlerinage; le biographe mourut au cours de son voyage.
Plus tard, un qâçll de Chingit, dans l'extrème sud maro-
cain, AQ.med b, Bâbâ ech-Chingîtî (2 ), mort à Médine
vers 1260 (1844), lui consacra. une orjoû'Za qu'il intitula
Jfoniat el-mol'Îd (3). Ce poènle (lt lui-même récemment
l'objet d'un long cowmentaire, Boghiat el-mostafîd li-charf:z.
Afoniat el-morîd (4), œuvre d'un savant $oûfî de Rabat, au-
jourd'hui sanctilié par l~s habitants de la ville, Aboû ijâmid
l\lo}:lammed el- 'Arbi b. es-Sâ'ïQ. ech-Charqi el- 'Omal'! (5),
qui mourut le dernier jour de rajab 1309 (28 février 1892).
Un recueil biographique des membres les plus notables
de la confréri~ des Tijjâniyya a, enûn, été composé il y a
quelques années à peine pal' un savant marocain, aujoue-
d'hui qâçli d'Oujda, Aboù1l- 'Abbâs AQ.med b. Al:1med el-
(Ayyâchî Sokall'aj (Skîrej), sous le titre de Kac/lf eL-f:z.ijâb '(ln
man talâqâ lJut'a't-TiJ/ânî n'lin el-a$f:z.âb (6).

La confeérie la moins ancienne du Maroc a pris le nom


de son fondateur, qui appartenait à la branche idrîsile des
Kattâniyin (7), appelés parfois aussi Chorfa de la 'Aqabat

(1) Publié au Qaire en 2 vol.


(2) Il ne faut pas confondre ce personnage avec Aboû'l-'Abbâs A!).med
b. Mol;ammed el-Amîn ech-Chingî~î, qui est l'auLeur d'un ouvrage COll-
sacré aux lettrés de SOI1 pays de Chingi~, sous le Lilre d' el-Wasît fî tarâ-
jim odabd' Chingît (imprimé au Qaire en 1329).
(3) Cf. R. Basset, Rech. bibl., p. 4~, nO 131,
(4) Publié au Qaire en -1304.
(~) Sur ce personnage, cf. A!).med Skîrej, Kachf el-l),ijâb, J, p. 343. Le
tombeau de Sid el-'A.rbi b. es-Sa'll; se trouve à Rabat, au quarlier d'el-
tOl oû , près du tombeau de Sidi Fâti!)..
(6) Lithographié à Fès en. 1325 et 1332.
(7) Et non Kiltânîyin, comme on le voil quelquefois transcrit.
378 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

Ibn $awwâl (1). Cette famille chérifIenne avait déjà, on l'a


VU, fait, au milieu du XIX e siècle, l'objet d'un opuscule d'et-
Tâlib Ibn el-f:Iâjj (2) : au début du xxo, elle acquit à Fès une
importance consiJérable et ses membres écli psèrent tous
les savants des grandes familles, Fâsîyîn, Qâdi l'Îyin, Ibn
Soûda. Celui de ces chorra qui a le plus de notoriété dans
les milieux marocains est encore vivant: c'est l'auteur de la
Salwat eL-anfâs . Avant de donner sur lui quelg ues indica·
tions et d'examiner son œu "re, on passera rapidement en
revue les autres écrivains de sa falnille, pour la plu part
morts depuis quelques années (3).
Parmi eux, il y a d'abord lieu de citer el-Mà'moûn b.
'Omar b. et-Tàhir b. Idris el-Kattânî (4), qui fut l'élève
d'AJ).med b. Mol).alnmed ol-I,lojratL (5) et d'Al).med el-
'Irâqi (6). Il composa entre autres ouvrages un traité sur
les familles islâmisées de Fès et une nlonogl'aphie sur le
saint Ml)ulay et-Tayyib el-Kattânî (7), el-Ghamâl7'l e$-$ayytb

(1) Cf. supra, p. 344 , n. 3.


(2) Cf. supra, loc. cil. u début du XVlIl e iècle, un savant de la tribu
des 'Abdu, Mobàral b. 'Omar el- 'Abdî el-A 'afJ, qui fut pendant quelque
temps mufti à Fè ,composa sur la branche un ouvrage généalogique
inlilulé er-Rawq, es-sanl fell-nasab el-katlànî.
(3) J ous devons la pluparl de rcnseignemcnt qui suivenl au chef
actuel de la confrérie, Aboû'l-As'âd l\1ol)ammcd 'Abd el-Ija'( b. 'Abd el-
Kabir b. ~10l)ammed b. ' bd el-"rùl)id el-ljasunÎ el-1 allùnL. Cc savanl,
né Ct) 1;)03 ( l885-86), esl acluellcmcnl profes eur de l)adîth à el-Qarawîyin
et bibliolhécaire de cette Univcrsité. n fil, à partir de 1323, un long
séjour en Orient, où il suivit des cours ou professa, à Médine, à Damas,
au Quire et à Jérusalem , el reçul une ijâza du gralld mufti d'Egypte, le
cha:tkh 'Abdo. n a déjà composé un grand nombre d'ouvrages (relations
de voyagcs, histoire de la zàwiyya des Qanàd a, Màq,î'l-Qarawîyîn wa-
mostaqbalohâ) et LI r~e histoire de a famille, intitulée el -Ma;âhir es-sa-
mîyya ji'n-nisbat ech-charîfal el-kaltânlyya. Cf. Manuscrits arabes de Rabat,
nO 40~, p. 143-145.
(4) Cf. el-Foçlaïli, ed-Doral' el-bahîyya, II, p. 122.
(5) Sur ce personnagc, cf. supra, p. 374, n. 6.
(6) Aboù '1-'Abbâs Al)med b. Mol)a mmed b. el-Mahdi el-'1 râqi el- I:f osaïnî,
mort à Fès le dernicr jour de jomùdâ II 1286 (6 octobre 1869). Cf. el-
Kaltânî, Salwat el-anfâs, III, p. 37.
(7) Aboû'l-Mawàhib Ioulay ekTayyib b. Mal)ammed el-I altânî, mort
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 379

ft ,nanâqib Mawlâï e.t-Tayytb; il mOUl'ut en 1309 (1891-92)


et fut enterré à l'extérieur de Bâb el-Fotoùl;.
Aboû <Abd Allah JaÏar b. Idl'Îs b. et-Tâhir b. Idri s el-
Kattânl (1) naquit à Fès en 1240 (1824-25). Après avoir été le
disci pIe de nombreux maîtres comm e e l- Walid el- ' hâqi (2),
Ibn Sa' cl et-Tilin1sânî (3), el- Ij.âjj ed- Dâwoùdi et-Tilimsânî (4)
et le qâçli ~Iaball1med e l- ' .A lawi (5), il se révéla bientôt l'un
des savants le8 plus remarquables de la capitale; il n'exerça
jan1ais aucune charge publique, mérita le titre de chaïkh el-
jcunâ'a et mourut en 1323 (1905). Il fut enterré à l' extérieur
de Bâb e l-Fotoùl), près du tombeau de Sidi Darrâs b. Is-
mâ<ïl (6). On affirme qu'il COluposa plus de cent ouvrages, dont
une fahrasa, qui a été lithographiée à Fès; un ouvrage sur
sa famille: er- FliâÇl e/'-/'ayyânîyya ft cfl~cha' bat eL-kattânîyya;
et un opuscule sur les personnages de Fès morts au
XIII e siècle de l' Hégire : ech- Cha/'b el-mol;tarJal' wa's-si/'r
el- Inonta~ar ft 1720' ïn allt el-qa/'n etlt-thâlith 'achal' (7).
Son fils (8) Aboù 'Abd Allah ~obammed b. Ja' far (9)

le 3 jomâdâ II 1253 (4 septembre 1837). Cf. el-l\.atlànî, Salwat el-allfds,


IL , pp. 2H-2M. >'
(1) Cf. el-FoçlaUi, ed-Dorar el-bahîyya, 11 , p. 120.
(2) Sur ce personnage, cf. supra, p. 341.
(3) Aboû <Abd Allah Mol)ammed Ibn Sa'd b. el-fjâjj el-ljasani el-Baïdarî
el-Tilimsânî fut qâçlt de Tlemcen et mourut à Fès le 27 mol)arram 1264
(4 janvier 1848) . Cf. el-Kallânî, Salwal el-anfâs, 111 , p. 78.
(4) Aboù Mol)ammed cl-fjâjj ed-Dùwolidi et-Tilimsâni, savanl ct qàçH
de Tlemcen, qui se réfugia à 1< ès, lors de l'occupa lion de sa ville par les
troupes françaises, el y mourut le 14 mol)arram 1271 (7 octobre -18M). Cf.
el-KaltânÎ, Salwat el-allfds, l, p. 262.
(5) Aboù 'Abd Allah l\'[al)ammed b. 'Abd cr-RaJ:tmân el-Fîlâll el-M ada-
ghrî el-l:Iasanî el-'Alawî, qâçli de Fès à partir du 7 ~afar 1274 (27 seplem-
bre 18Q7) jusqu'à sa mort, l e 27 ramaçlùn '1299 (12 aoùt 1882). Cf. cl-Kat-
làni. Salwal el-anfds, J, p. 205.
(6) Sur ce saint, cf. principalement el-Kattânî, Salwat el-anfâs, Il, p.1ï5
sqq.
(7) Lithographié à 1; ès en 1309.
(8) Il eut un autre fils, 'Abd er-Ral)mân, né en 1296, qui fut mufti ct
prédicateur à Fès ct mourut en '1334 (1916) . Il composa entre autres
ouvrages une orjoûz a sur la généalogie de sa famille.
(D) Cf. el-Foçlaïli, ed-Dorar el-bahîyya, TI , p. 121.
380 LES HOMMES ET ~ES ŒUVRES

naquit à Fès en 12ï5 (1858 -59) et fut so n principal élève. Il


sui vit aussi les cou e~ d u,qâçli l\1al)ammecl el-' .AJa \V i, d'el-Mahdî
Ibn el-{j8jj (1), d'el-l\ladanl Ibn J elloùn (2), de Mo]:tam-
med b. 'Abd el-Wùl:lÏJ Ibn Soùda (3), d'el-Hâdi o~-$a.
qalli :4). Il fit à deux reprises le pèlerinage de la l\1ekJ\:e,
en 1323 et 1325 (1905-07) ; puis, trois ans plus taed, renon-
çant à habiter le Maroc, il alla s'établir à l\lédine. Expulsé
de cette ville par les Turcs, il se serait réfugié à Damas
où il enseignerait à l'heure actuelle (5).
Parmi les travaux de :Mol).ammed b. Ja'far el-Kattânî, il y
a lieu de citer un teaité résumé de la généalogie de sa
fa mille, intitulé en-Nabdhat el-ias/rat en-nâfi'at ellatî /tiya
li-a!chbâr es-salâlat el-kattânîyya jânû'a et un recueil des
manâqib d'Idris II, el-A:zùâr el- 'âtirat el-anfâs bi-dhikr
ba'<l mafJâsin qo{b el- J.l lag/lrib wa-tâj mad/nat Fâs (6), qui
est une refonte très augmentée des travaux antérieurs d'e1-
Ijalabi et d'et-Tâlib Ibn el-~-lâjj; mais son ouvrage le plus
important est son répertoire biographique des célébrilés
de Fès.
La Salwat el-a17fâs wa-mofJâdatlwt el-akiâs bi·man oqbira
min el- 'olamâ ' wa' $- $olafJâ' bi-Fâs (7 ) est le modèle des
œuvres de ce genre au Maroc. Mol).ammed el-Kattâni la

(1 ) Sur ce personnage, cf. supra, p. 374, n. 7.


(2) .\.boû 'Abd Allah ~lol)al11med el-Madani b. 'Ali Jbn Jelloùn el-Goûmî
el-Fùsi, savanL de Fès, né en rabî' J 1264 (6 février-6 mars 1848) , auLeur ·
de nombreux ouvrages, mourut le 14 rabî' l 1298 (14 février 1881) . Cf. el-
KatLànL, Salwat el-anfds, 11, p .. :J63.
(3) Aboù 'Abd Allah Mol)ammed b. 'Abd el-vVâl;lid b. Al).med b. et-
Tàwodi Ibn Soûda, qâçlî d'el-Qa~r et prédicaLeur à Fès, où il mourut
dans la dernière décade de dhoù'l-qa'da 1299 (4-13 oclobre 1882). Cf. el-
KalLùnl, . Salwal el-anfds, J, p. '121.
(4) EI-IIàdi b. Al)med e~-$aqallî, qâçlî de Fès, mort à i'\lédine en mol).ar-
rem 1311 (H) juillet-13 aoûL 1893). Cf. el-KaLlâni, Salwat el-anids, 1,
p. 139.
(~) .\. en croire des renseignements de source indigène, Mol)ammed b.
Ja'far cl-KatLànî recevrait à l'heure actuelle une pension du HauL-Com-
missariat Français en Syrie.
(6) Lithographié à Fès en 1314.
(7) Lithographié à Fès, 3 vol., 1316.
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 381

termina en 1313; il demeura quinze années à l' écrire. Il se


proposait 'de consacrer à chacun des personnages marquants
- savants ou saints - enterrés à Fès une notice de plus
DU moins longue étendue; de refaire, en somme, sur une
plus large échelle et jusqu'à son époque, le travail accompli
par Ibn el-Qâçli dans la Jadhwat el-iqtibâs et, plus tard, par
l'auteur d'er-Raw(l el-' àtir el-anfâs . Il Y réussit pleinement,
et de telle sorte que son dictionnaire constitue, à l'heure
actuelle, l'instrument indispensEl-hle de quiconque s'occupe
de bio-bibliographie marocaine.
L'ouvrage se divise en trois grandes parties: la première
est une ample introduction relative à la visite des saints;
la seconde, de beaucoup la plus longue, est le répertoire
des célébrités de la capitale, classées dans un cadre topo-
graphique, suivant le quartier Jans lequel elles furent ense-
velies; la troisièn1e est une liste alphabétique de person-
nages morts à Fès, mais dont l'auteur ne put retrouver
les tombeaux.
L'introduction de la Salwat el-anfâs forme à elle seule
toute unA œuvre du plus haut intérêt. C'est, en effet, sui-
vant la définition de 1\1. vV. Maeçais « un véritable petit
traité du culte des saints élU point Je vue de la doctrine
maghribine et un rituel de ce culte (1) ». Le début est une
longue justification de l' hagiolütl'ie, dans laquelle el-Kat-
tâni s'efforce de démontrer, en .citant de hautes autorités
de l'orthodoxie musulmane (2), que la dévotion pour les
saints s'accorde parfaiten1ent avec la lettre de la religion.
Saints .et savants, d'ailleurs, méritent d'être révérés au
m ême titre; 'et Inême ceux de (la vie ou de la carrière m{ra-

(1) W. Marçai,s, Textes arabes de Tanger, p. 163, note 2. Cf. également


ibid., p. 164, n. 1 et 4; 165, n. 2; 166, n. 1 et Codera, Considerable nu-
mero, p. ~81.
(2) Ce sont les anciens hagiographes marocains ou de grands théolo-
giens musulmans comme Mol).ammed b. Mol).ammed Ibn el-I:fâjj el-'Ab-
dari el-Fâsi, dans son Madkhal ech-char' ech-charîf 'alâ'l-madhâhib el-
.arba'a; 'Abd er-Ra'oûf el-Monâwi dans son commentaire des quarante
J:ladîth recueillis par en-Nawawî, et Ibn I:fajar cl-Haïthami, dans son el-
Jawhar el-monauam fî z iârat el-qabr el-mof.carram.
382 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

culeuse de qui on ne sait rien, ne doivent cependant pas être


délaissés ou moins vénérés, car si les visiter peut ne procurer
aucun profit, il va de soi qu'on n'en tirera du moins aucun
dommage (1). La suite constitue une sorte de vade-mecum
du pèlerin, qu'el-Kattâni nomme lui-même âdab ez-ziâra (2);
on y trouve toutes les prescriptions auxquelles doit obéir
le visiteur: descendre de sa monture, s'il est à cheval,
dans un cimetière en plein air; ôter ses sandales en péné-
trant dans un mausolée, se courber et baiser le sol devant
le tombeau. Puis el-Kattânl dit quelles sont les prières
qu'il faut réciter; quel genre de victimes on peut immoler;
quand il y a lieu d'allumer des chandelles dans le sanctuaire.
Tout l'exposé de ce rituel aboutit à cette conclusion que le
saint de Fès à qui doivent s'adresser les dévotions les plus
nomb!'euses est le patron et le fondateur de la ville, Mou-
lay Idris el-Anwar, fils d'Idris el-Akbm'.
C'est par lui que la Salwat el-anfâs commence sa série de
notices. Comme le sanctuaire se trouve au cœu!' de la ville,
el-Kattânî, continuant sa revue des saints et des savants
d 'après l'endroit où ils ont été enterrés, suit à travers la
ville une marche assez cu rieuse. Il tourne en erret en
spirale autour du luausolée d'Idris, dans le sens des
aiguilles d'une montre, et ap['ès avoir traversé ainsi les
quartiers du centre de Fès, il finit par arriver à ceux qui
sont limités par les remparts extérieurs. Voici l'ordre des
princi paux qua l'tiers, grâce auq uel on pourra facilement
sui vre, sur un plan de la capitale, le biographe dans ses tours
concentriques: en-Najjârln et GernJz, el-Qattânîn, e~-$âgha,
ed-Darb et-tawîl et el-Blida, Fondaq el-Iahoûdl, intérieul'
de Bâb Gisâ et Zoqâq er-rommân, ech-Charabliyin, et-
Tal'a, es-Siâj, ed-Doûl)., el-Jorf et el-"Oyoùn, Râs el-janân~ el-
Kaddân. L'auteur passe ensuite aux grands ci~etières qui
s'étendent de chaq ue côté de la porte dite B âb el- Fotoûl).
et dont l'un s'appelle Rawçlat el- 'olamà' (ou el-Gbeb, dans
le langage courant), puis à ceux que l'on trouve en dehors

('1 ) J, p. 8.
(2) l, p. 35 sqq.
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 383

des portes dites Bâb Sidi Boû J îda, Râ b Gîsa et Bâb el-Mal).-
roûq. Il n'arrive qu'en dernier lieu à Fâs el-Jadid, où sont
enterrés des sultans <alawites (1).
On sait que Fès a depuis longtemps mérité le titre de
« maison de science )), qu'elle devrait à une invocation spé-
ciale d'Idris (2). Tombeaux de saints et de savants y foison-
nent, et l'on comprend que leur étude ait, à travers les
siècles, tenté des biographes. D'autant plus que, pour la
plupart, les saints de la capitale ont été des docteurs d'Islâm
renommés. et quelques-uns même, des écrivains. Les notices
d'el-Kattâni sont consacrées à tous, chorfa notables, maîtres
de science nlusulmane. juristes, théologiens ou professeurs
sanclifiés après leur mort. On conçoit dès lors que le
nombre des personnages qu:il passe en revue sÇ>it immense;
parmi eux, on peut com pter plus de cent quarante auteurs
d'ouvrages islâmiques, comme le savant Codera en a déjà
fait judicieusement la remarque (3).
D'ailleurs, on trouve dans la Salwat el-anfâs, à côté des
saints lettrés, quelques saints nettem en t populaires. Les
noms de ces derniers font tache dans cette œuvre. Cepen-
dant, ces petits marabouts, qui s'a ppellent Sidi'l-Mokhfi
(Monseigneur le Caché) (4), Sidi Amsâ'l-khaïr (Monseigneur
BonsoÎL') (5), ou encore Sidi Qâçli'l-1).âja (Monseigneur qui
exauce les vœux) (6), sont uniqu ement signalés pour
m é nloire; comme ses devanciers, l'auteur laisse délibéré-

(1) Le procédé de descripti<?11 d'une ville, en s'éloignant graduellemen,t


d ' un point central, n'est pas nouveau. C'est par exemple celui qu'emploie
Léon l'Africain dans sa description de Fès (cf. Massignon , le Maroc dans
les premières années du XVIe siècle, p. 22i, § 242) .
(2) Cf. déjà Ibn Abî Zar', Rawcf el-qir(âs , éd. Tornberg, p. HL
(3) On n'est pas complètement de l'avis de cet orientaliste, quand il
déclare au sujet de ces auteurs: « il est cerlain que des cent quatre au-
leurs correspondant aux: XI e, XU", XlIl e et XIVe siècJes de l'hégire, le plus
grand nombre est incon nu en Europe; ils mérileraient que leurs œuvres
fussent l'objet d'éludes spéciales » . Cf. F. Codera, Considerable numero,
pp. t>88-589.
(4) Salwat el-anfâs, 1, p. 342.
(5) Ibid., 1, p. 129.
(6) Ibid., III, p. 234.
384 LES HOMMES ET LNS ŒUVHES

ment de côté toute leur légende vulgaire, qui pourtant a bien


dû paDvenir à ~es oreilles et a peut~être enchanté, o.ans
son enfance, son~esprit de jeune ciladin.
Pour établir son dictionnaire, el-Kattânî, gui connait mer-
veilleusement sa ville, a dû la parcourir dans ses moindres
recoins. On sent Hans son livl~e qu'il a fouillé partout, qu'il
a consulté, chaque fois qu'il l'a pu faire, les archives fami-
,!iales, qu'il a pénétré dans les moindres sanc tuaires, noté la
.place exacte de chaq ue tombeau relevé avec soin toutes les
l

insceÎptions funéraires. A ce titre, la ,Salwat el-anfâs témoigne


d'un souci d'enquête que l'on n'a pas coutume de trouver' au
Maroc poussé à un pareil degré.
Mais surtout el-Kattânî a utilisé tous les ouvrages de ses
compalriotes, et d'une manière aussi scrupuleuse qu'hon-
n ète , La liste de ses autorités, établie, il est vrai, de façon
sommail'e et sans la 1110indre préoccupation d'ordre chrono-
logique, est fo uenie par lui à la fin 'cl e son œu v L'e (1) ; e lle
montre qu:à les rechercher, à les lire et à noter tout ce qu'il
avait à y prendre, les quinze années de tra vail que lui coùta
la Salwat el-anfâs durent à peine 'suffire.
On a déjà vu l'intérêt que présente cette liste de sources,
qui d'ailleurs a fait déjà, il Y a quelques années, l'objet d'une
étude spéciale (2). Cette liste ).l'e-8t pas loin èl'être complète
en ,ce qui concerne le genre biographique, et si, pour ce
'qui a tllait aux ouvrages histoeiq ues , les lacunes s ont nom-
bl'cuses, elle comprend néanmoins l'essentiel de la biblio-
graphie des œuvres n1arocaines autres que celles qui se rapc'
iportent à la science purement islâmique.
Non pas (d'ailleurs qu'el-Kattânî en utilisant ces sources,
1

ne se soit pas montré 'surtout, comme ses prédécesseurs,


biographes ou histol~ien.s, un compilateur. Mais il.a sur eux
l'avantage de ne pas être :un ,compilateur médiocre; et c'e-st
un ,compiltlteur honnête. Dans ,son ,dictionnaire, chaque bioC'
gnaphie est 'b ien en effet le résumé ou la r~prnduètion bout

(1) Salwat el-anfâs" III, pp. 357-363.


(2) R. Basset, Recherches bibliographiques sur les sources de la 'Salouat
el-anfâs, Alger, 1905.
HISTORIENS ET BIOGRAPHES CONTEMPORAINS 385

à bout de toutes les biogl'aphies consacrées avant lui au


même personnage; mais il laisse à chacune de ses autorités
la responsabilité de ce qu'elle avance. Et surtout - et en
ceci il est certainement un novateur - il donne pour cha-
cune de ses notices une bibliographie marocaine complète.
Si à ces indications se joignaient des références de tomai-
son et de pagination, la Salwat el-anfâs ne serait !las indigne
des ouvrages arabes écrits en Orient ces dernières années
et conçus selon des n1éthodes plus modernes. Telle qu'elle
est cependant, elle constitue le meilleur' des dictionnaires
biographiques marocains, et sera un document de premier
ordre pour qui entreprendra d'écrire les fastes de la ville de
Fès. Il serait Inême à souhaiter qu'on en publiât bientôt une
traduction, à tout prendre beaucoup plus utile que celles
qu'on a données de recueils biographiques plus anciens.

D'ailleurs, la Salwat el-anfâs fut accueillie au Maroc avec


la plus grande faveur. L'ouvrage valut à son auteur une noto-
riété qui dépassa celle de ses parents, et inspil'a bientôt des
imitateurs. Il y a quelques années à peine, un lettré ue lVIar-
râkech, Mol).ammed b. Mol).al1lmed b. 'Abd Allah Ibn el-
Mowaqqit el-Masfiwl el-1Vlarrâkochî, déjà connu comme bio ..
graphe pour avoit' écrit deux opuscules, l'un sur' Aboù'l-
'Abbâs es-SabU (1), l'autre sur' sa propre famille (2), composa
un répertoire topographique des célébrités de Marrâkech : il
l'intitula es-Sa'âdat el-abadtyya fi"t-ta'/'if bi-maclzâhir el-
f:z,cu)rat el-mar/'âkochtyya (3); ce n'est, somme toute, qu'un
pastiche fort pâle de la Salwat el-anfâs. On y trouve néan-
moins quelques renseignements intéressants (4) ; et la Sa'âda

(1) Ta'tîr el-anfds fî't-ta'rîj bi'ch-chaïkh Abî'l-'Abbâs, lithographié à Fè~


en 1336.
(2) IrJhdr el-malJ,âmid jî't-ta 'rîf bi-mawlând'l-wâlid, lithographié à Fès
en marge du précédent.
(3) Lithographié à Fès, 2 vol., 1336.
(4) C'est ainsi que parmi les quelques ouvrages qu'lb)) el-Mowaqqil
2.j
386 LES HOMMES ET LES ŒUVRES

restera utile jusqu'au moment où un .savant de Mal'fàkech~


actuellement qâçli de· Settât, el-'<Abbâs b. Iorâhim el-Mar-
râkochî, qui s'est déjà signalé par une bonne monographie
des Sab<atou Rijâl de la capitale du sud: IrJhâr el-ka17'lâl ft
tatmtm manâqib sab< ati Fijâl (1), livrera au public de son
pays un dictionnaire biographique des savan ls du ~laroc méri-
dional, auquel il travaille depuis plusieurs années.

·cite comme ayant servi à l'éla blissement de la Sa<âda (II, :pp. 177-179), il
indiqUe le nom de l'au leur , jusqu'ici inconnu, du travail hislorique inti-
tulé : el-~-Iolal el-mawchîJ'J'a fi dhikr el-akhbdr el-marrâkochîYJ'a. La mau-
vaise édition de Tunis (13:29 hég.) l 'a ltribue en effet, à tort , à Usân ed-
dlo lbn el-Kl1a~îb (mort en 776 hég. ; l'ouvrage fut terminé le 1"2 rabî' 1
783; cf. p. '136, 1. ':.1 ). Or, d'après 1bn el-Mowaqqit, qui a dû trouver
cetle indication SUl' un manuscril de 1arràkech, la chronlque serait
l'œuvre d'un écrivain qu'il appelle Aboû 'Abd Allah Moi)am.med b _
A.boù'l-Ma<àlî Ibn Sammùk el-Màlaqi.
('1 ) Lithographié à Fès , 2 vol., 1334.
CONCLUSION

On est arri vé au terme de cette étude. On y a examiné tour


à tour les littérateurs du Maroc qui, au cours de la période
moderne, consacr~rent quelques-unes de leurs œuvres à des
sujets spécialement maghribins. Leur nombre a pu sembler
relatiyement considérable: il est vrai qu'ils s'échelonnent
sur quatre siècles entiers, et qu'ils ont vécu dans un pays
qui a toujours revendiqué, en matière de culture intellec-
tuelle, la supériorité sur ses voisins de l'est. On y trouve
quelques historiens, surtout une foule de biographes. Chacun
de ces écrivains apporte assurément sa contribution, impor-
tante ou modeste, à l'histoire de son pays. Quelques-uns
nlême ne seraient pas trop déplacés à côté des grands his-
toriens musulmans, leurs nlodèles. Mais combien? Avant
tous, ez-Zayyânl, qui fut une exception et soufi'rit assez,
pendalJt et après sa vie, de son originalité, et, à tout prendre
aussi, le prudent el-Ifrâni el en-Nâ!?irî;' de tous les biographes
émergent, avec le même el-Ifrânî, l'austère Mo.b..ammed el-
Qâdirî et surtout l'auteur encore vivant de la Salwat el-
anfâs. Au total, cinq noms. Et encore n'est-il pas sans inté-
rêt de remarquer que, de ces cinq écrivains, deux sont des
contemporains. Leurs œuvres, venues à une époque tardive,
- un essai d'histoire générale de l'Empire et une chrono-
Jogie de la métropole marocaine d'après ses célébrités, ~
,t~m~ignent encore d'une stricte observation des lois ar:-
388 LES HISTORIENS DES CHORFA

chaïques de composit.ion. Elles donnent la mesure de ce


que les genres traditionnels pouvaient inspirer de plus
ample.
Mais, si faible soit la proportion des littérateurs de quelque
envergure que l'on a rencontrés au cours de cette étude,
elle n'est peut-être pas inférieure à celle que l'on pourrait
trou ver depuis le M oyen Age d ans les autres pays de langue
a1'abe. Là aussi, sans p'oui'tant que l'histoire ait eu à souffrir
de la même mésestime qu'au "M aroc, elle a toujours été
considérée comme secondai re au regard des sciences pro-
prement islâmiques, enfermées dane;; les règles d'une scolas-
tique étroite. D'ailleurs, même dans le Maghrib de l'époque
médiévale, on s'aperçoit que le nombre des historiens n'est
pas sensiblement plus grand que celui des annalistes de
l'époque moderne. Et cependant, leurs sujets n'étaient pas
restreints à un cadre limité géographiquement; leurs chro-
niques relataient à la fois des événements qui s'étaient
t

déroulés en des points fort distants de l'Occident musul-


man, voi re de l'Ol'ient. Les circonstances historiques ont,
depuis le XVIe siècle, enferrné le Maroc dans des frontières
bien' closes, auxquelles, du mên1e coup, les historiens ont
horné leurs regards; mais leur manière est restée la même.
Le Kitâb el-istiq$â et la Salwat el-anfâs sont bien dans la
tradition du RawrJ el-qirtâs ou des collections biographiques
andalouses; leurs auteurs n'ont pas eu d'autre idéal; ces
livres sont l'aboutissant d'une forme de littérature ances-
trale.
Ils en sont aussi la fin. C'est en effet d'un autre côté que
s'orientent les jeunes générations du Maroc contemporain.
Les quelques uléma qui sont nés dans la seconde n10it.é du
siècle derniel' ont encore pour le passé un respect tradi-
tionnAl; peut-être même, par esprit de réaction, s'enferme-
ront-ils dayantage dans leurs formules surannées. Mais c'est
en vain qu'ils reprocheront à leurs fils de chercher, à notre
contact, à élargir leur horizon. Que nous le voulions ou non,
l'évolution est fatale: elle a déjà commencé. Pour la plupart,
les -jeunes lettrés marocains ne ressentent aujourd'hui pour
l'histoire et les célébrités de leur pays qu'une curiosité
CONCLUSION 389

modérée. De joue en jour, ils se rendent compte que le


Maroc n'est point tout dans le monde, que d'autees nations
ont fait, ptus que lui, progresser la civilisation et la science.
C'est vers cet étranger, musulman ou non, que se dirige
leur attention. Ils cherchent à pénétrer des méthodes dont
ils commencent à soupçonner la valeur; même l'arabe',
l'idiome savant et in1muable que l'Orient s'est efforcé d'a-
dapter aux exigences de la pensée moderne, n'apparait plus
à leurs yeux comme le seul qui soit digne d'être écrit;
beaucoup ne sont pas loin de reconnaître que d'autres
langues se prêteraient mieux, en maintes disciplines, à la
clarté de l'exposition.
Quelles répercussions dans l'avenir ces idées nouvelles
auront-elles sur la littérature marocaine? Quelles seront,
dans quelques dizaines d'années, les œuvres des historiens,
s'il en existe encore? Il serait assurément difficile de le pré-
voir. Dans tous les cas, elles seront fort difl'érentes de celles
qu'historiens et biogeaphes des siècles précédents compo-
sèrent, dans l'en1pire des Chorra, suivant les règles d'une
tradition millénaire.
APPENDICE 1

A
Sources de la Nozhat el-l].âdî d 'el-Ifrâni.

""Abd er-Rarymàn el-Fàsi, Ibtihâj el-qolo&b.


Aboû Mal)allî, Kitdb i~lît el-Il,hirrît fî qat' bol'oûm el-'ifrît en-nifriL
Afoqà"i (Aboû'l-'Abbàs) el-Andalosi, Ril.ûal' ech-chihâb ilâ liqâ' el-af),bâb.
Al)med b. ' Abd el-Malik ech-Charîf es-Sijilmâsî, el-Anwâr es··saniyya fi
nisbal man bi-Sijilmâsa min el-achrâf el-mof),ammadîyya.
Al)mcd Bâbâ, Kifâyal el-mo~lldj .
Al)med oû 'AU es-SoûsÎ, Badhl el-monâ~af),a fî faeJ,1 el-mo~âfa~a.
Al)med el-Wazîr el-Ghassâni.
Anonyme de Fès, Chronicpte de la dynastie sa'dienne.
Ibn 'Arçloûn.
Ibn 'Askar, Uawl},al en-nâchir.
el-'Ayyàchî, Ril},la.
To~~fat el-al1:hilld' fi asânîd el-ajfllâ' .
.€l-Azwarqànî, ed-Dawl},a.
Ibn Ba~oûla, Ri~tla.
·ed-Dilâ'ï ~Iol)amm ed el-Masn.àwr.
.el-Fichlàlî Aboû Fâris 'Abd el-'Azîz, Mandhil e~-~aJâ' fî al1:hbâr el-moloûk
. ech-chorafâ'.
el-Ghannâmi ech-Châwî 'Abd cr-Ral)mân, dit Ral)l)o , Ri~la.
lbrâhîm b. Uilâl , el-Monsil1:.
el-Ioûsî el-J:lasan, et-Mol},âeJ,arât.
~l-Ioûsi MOQammed b. Ja'qoùb, Fahrasa .
.el-~lanjoû r, Pahrasa .
.el-Maqqarî, Az hâr er-rîâeJ, Ji al1:hùJr manâqib el-qâeJ,î '!yyâq,.
Naft;, et-tîb .
.el-Marghîthî , Fahrasa.
392 LES HISTORIENS DES CHORFA

Mayyàra, ed-Dorr eth-ihamt'n fi char~l el-lIlorchid el-mo'ïn.


~oQ.ammedb . 'Tsâ, el-Mamdoûd wa' l-maq$oùr min sand' es-solttin Aùî'l-'Abbâs
el-Man$oûr .
~fol)ammed el-'Arbi cl-Fâsl, Mir'ât el-malJ-âsin.
el-Mahdi el-Fâsl, Momii' el-asmd'.
ekTayyib cl-FâsÎ, el-l'l.âm bi-man mag,â wa-ghabar min ahl el-
qal'n el-IJ-ddt' 'achar (1).
rbn el-Qâçlî, ed-Dorr ei-~wloulc.
Dorrai el-(~ijdl.
Dorral es-soloulc.
Jadhwal el-iqtibds.
Laqt el-farâ'ïd.
el-Monlaqd'l-maq$oùr .
.él-Qâdid 'Abd es-Salâm, ed-Dorr es-sanf.
es-Sajlàni Aboù Mahdi 'lsâ, Nawd:il.
es-Samlâli 'Abd er-HaQ.mân b. Ja'qoùb , Fahrasa.
et-Taluoùr:î, Na$flJ-at ahl es-Soûddn.
et-Tamgroùlî, en-NafalJ-at el-mislcfyya (i's-sifârai ei-iorlcîyya.
cl-TawàU AQ.med , Maqâmal et-la~wlU wa'l-lakhallf min $o~lbat ech-chailfh
Abl MalJ-allî.
el-Tinmàrli 'Abd er-RaQ.mân, el-Fawa'ïd el-jamma bi-isnâd 'oloûm el-
omma.
Zahral ech -chamârfkh (commentaire) .

Sources du Nach r el-mathânî de Mol},ammed el-Qâdirî.

on cl-Abbùr, Takmilal el?-I?ila.


Abd el-Qâdir el·Fâsl, Risâla.
'Abd er-RaQ.mân el-Fâsî, Azhâr el-bosldn.
Ibtihdj el-qoloûlJ.
Kitdb el-oqnoum.
Ibn Abî Zar', Rawrj el-q irtds.
Al)med Bâbâ, Kifâyal el-mo ~llâj.
Al)med où 'Ali es-Soûsi, Badhl el-monâ$alJ-a fi fag,l el-mo$âfalJ-a.
]bn 'Aïchoûn ech-Charrât, er-Rawg, el-'âtir el-anfds.
l bn 'Askar, DawlJ-at en-nâchi,..
cl-'Ayyàchi, Fahrasa.
Ri ~tla.

(1) il s'agit sûrement de l'ou nage inLilulé Matmaf) en-/w:f.ar sur lequel cf.
supra, p. 284:.
SOURCES DES PRINCIPAUX HISTORIENS 393
1bn 13a~oLI ~a, Ril},la.
ech-Cha'rùnî, Dhad et-tabaqât .
cclh-Dhahabî, KitâfJ el-tahdhîb f l mokhta~ar lahdhib el-kamâl.
eù-Dilâ'ï Mol)ammed cl-'1"asnùwî, Jahd el-nwqill el-qâ~ir fl na$fal ech-
chaïkh 'Abd el-Qddir.
c L-Fi chlâlî Mol)ammed, Wafayâl.
cl-Golâlî Ibrâhîm , Tanbîh e.5-~aghîr m,in el-wilddn.
Jbn ~Tajar, Bahjat en-nd~ir.
cl-~lalabî Al)med b. 'Abd el-tlal, Rail},dn el-qoloûb p ,-mâ li'ch-chaïkh 'Abd
Allah el-Barnâwi min asrâr el-ghoyoûb.
Jbn l~ azm, Jamharal el-ansâb.
cl-Jfr ânî~ Noz hat el-l},âc1î.
el-Iollsi, el-Mol},dq,ardt.
eL-Isl)âqî Mol)ammed b. 'Abd el-)1o'!i, Lalâïf akhbâr el-owal Jî man ta~ar-
raf Ji Mi~r min arbâb ed-dowal.
.Ibn Jarîr cch-Cha[\anawfî, Bahjal el-asrdr wa-ma'dan el-anwâr.
el-Jawzî, Mir'ât ez-zamân fi tâ'rîkh el-a'ïdn.
el-Khafàjî, Rail},ânal el-alibbâ'.
Jbn cl-Kha~lb, el-I~tdta bi-lâ'rikh Ghranâ{a.
Mothlâ 'Harfqa fi dhamm el-wathiqa.
el-Maklâtî, Wafaydt.
el-Maqqarî, Nafl}, et-tfb.
Mal)ammed b. 'Abd er-Ral)mân el-Fâsî, el-MinaI}, el-bâdiyya.
Mol)ammed el- 'Arbi Mir'âl el-ma~1dsin.
el-Mahdi el-Ilmd'.
Momti' el-asmâ'.
Rawq,at el-ma ~lâsin.
TOI},Jal ahl e~-~adfqîyya.
ekTayyîb Fahrasa.
MatmaQ. en-/w?ar.
c L-~~orâbî , TOl),Jat el-ikhwân wa-mawdhib ei-imlinân fi manâqib sayyîdl
Riq,wân.
Ibn à~ ir el-I~osaln, Fahrasa.
Ibn el-Qâçl.î Al)mcd, Dorral el-~LÎjâl.
Jadhwal el-iqlibâs.
Qàsim b. Mol)ammcd, Tanwlr ez-zamân bi-qodoûm mawldnâ
Zaïdân.
el-Qâdiri 'Abd es-Salâm, ed-Dorr es-sani.
el-Maqijad el-aQ,mad.
Matla' el-ichrdq.
Mo'lamad er-rdwi.
No z hat el-fakr.
Nozhat en-nâdî wa-iol),fat el-I),âdi.
Mol)ammed el-'Arbi, Konnâch.
el-Qarâfî Badr ed-Din, Tawchîl}, ed-clibdj wa ·~LÎliat el-iblihâj.
394 LES HISTORIENS DES CHORFA

el-Qa~~âr, Fahrasa.
el' Rachchâtî, lqlibâs el-anwâr (avec un résumé par tAbd el-l;laqq el-Azdî
el-Jchbîlî).
es~Sobki' Tâj ed- Diu, Mo 'îd en-nitam wa-mobîd en-niqam.
Taqyîd el-l),aqîqat el-tâlîyya wa-ta chyîd eHarîqat ech-châdhilîyya.
el-Wallâlî AQ.med b. Iatqoûb, Mabdl}.ith el-anwdr fi akhbdr ba\j el-akhiâr.
el-Wancharîsî, Wafayât.

c
Sources d 'et-Torjomân el-motrib et d 'el-Bostân e~-~a.rîf

d 'ez-Zayyânî (1).

10 Ouvrages consultés au Maroc.

Ibn Abî Zar" Rawq, el-q irtâs.


lbn tAskar, Dawl),at en-ndchir.
el-tAyyâchî, Ri~ûa.
Ibn el-Azraq, Kitâb es-sîydsa.
el-Balâdhorî.
el-Fichtàlî, Manâhil e.~-~afd'.
Ibn ~Iazm, Jamharat el-ansâb.
el-Ifolal el-mawchîyya.
el-Jfrânî, Nozhat eHtâdî.
el-Ioùsî, el-Mol),âq,ardt.
Ibn Khâqân, Qalâ'ïd el-tiqidn.
Ibn Khaldoùn, Kilâb el-tibar.
Ibn el-Khatîb, Ouvrages historiques.
el-Maqqarî, Naf!), eç-çîb.
el-Marwazî.
Ibn el-Qâçlî, Dorrai eHtUâl.
Jadhwal el-iqtibâs.
Ouvrages d~s Qâdirîyîn, des Fâsîyîn et des BakdyÎn (Dilâ'"Lyîn).

20 Ouvrages consultés à Tlemcen, Alger et Tunis.

Ibn 'Abd el-Barr, Bahjat el-majâlis.


ech-Chàtibî, Kitâb el-jommân fî tajâ'ïb ez-zamdn.

(1) La répartition des sources suivant les twis divisions qui sui vent est fournie
par l'auteur lui-mèmc, en tête de ses deux ouvrages.
SOURCES DES PRINCIPAUX HISTORIENS 395

, llâni b. Ma~doûr el-Koûmî.


Généalogi tes berbère ( 1 ahlân b. Aboll Lowâ el-Awrâbî.
Sâbiq b. Solalmân e l-Ma~mâtî.
cl-Karmâni.
lbn 1 alhir, el-Bidâya wa'n-nihâya.
el-Maqrîzî , el-Khitat.
Morlaçlà ez-Zabîdî , Ba!),r el-ansâb fî o~oûl el-achrâf eHwsanîyîn waï-~wsai-
nîyîn bi'l-Machriq wa'l-Maghrib.
en-Nawawl.
Ibn Qotaïba, 'Oyoûn el-akhbâr.
er-Râghib el-l bahânî , Kitdb el-Mo l.1âcf.arât.
es-Samarqandî MoQ.ammed b. 'Abd Allah, To!),fat eHâlib.
et-Tanasî, Na;.m ed-dorr wa'l-iqiân.
el-Wàqidi, Foloâ!), Ifrîqîyya.

30 Ouvrages consultés à Constanlinople.

Histoires des dyllasli~s islâmiques , pur 1bn 'Asùkir, edh-Dhahabi cl Ibn el-
1 ha~îb.
Histoires d'Alexandre, des Grecs, des Persans el de~ Turcs, traduites du
Lure en arabe.

Sources d 'el-Jaïch el-'aramram d'Akensoûs.

"Abd es- alàm b. loQ.ammed b. 'Abd Allah, Dorral es-soloiik.


Ibn Abî Zar', Rawq, el-qirtâs (1) .
AQ.med b. 'Abd el- 1alik es-Sijilmâ i , el-Anwâr es-sanîyya.
AQ.med Bâbâ , Nan el-iùlihâj.
el-'Ayyâehî , Ri!),la.
el-Batalioûs,î, el-Iqticf.âb.
eeh-Châ~ibî, Kitâb el-jommân fî 'ajâ'ïb ez-zamân.
ed-Dilâ'ï MoQ.ammcd el-Masnâwî, Nalîjal el-ta!),qîq.
el-Fiehlâlî 'Abd el-'Azîz, Manâhil e~-~afâ'.
Ibn el-'ldhârî, el-Bayân el-moghrib.
d-Ifrânî, No z hal el-!),ddî .
f$afwal man intachar.
e:;-J.,ill e f -~alîl (el-warîf)·
d-Joûsî, el-Mo!),âq,arâl.

(1) Cf. supra, p. 211 et note l.


396 LES HISTORIENS DES CHORl<A

Ibn Joba'Lr, Ril).la.


el-Jorjânî Alfmed, Kitâb lânâyât el-odabâ'.
Ibn l hallikân, Wafayât el-a'ïân.
eI-Maqarrî, l\'afl), eHib.
el-Mi . bâl)î 'AH, Sonan el-mohladi ilâ ma~~dsin el-Ia~wmdî.
el-'Omaù'i, Fahrasa.
cl-Qâdiri, el-Azhâr en-nadt'yya.
cz-Zayyânî, el-Bostân e-;--;arif.

E
Sources du Kitâb el-istiq~â d 'en-Nâ!?irî.

1. - AUTOI\.lTÉS :\IUSUL)I[ANES INVOQ ÉES (1).

a) Jusqu'à la fin des Almohades.


Ibn 'Abd el-Barr, Kilâb el-tamhîd.
Ibn 'Abd el-:\lalik el-~1arrâkochÎ, Kilâb edh-dharL wa'l-la/i:mila.
Ibn 'Abd ePdon'im el-I.Timiari, er-Rawg, el-mi'târ.
Jbn Abi Zaïd el-Qaïrawànî.
Ibn Abi Zar', Rawg, el-qirtâs.
Ibll 'A âkil'.
Ibn el-Athir, el-Kâmil.
Jbn l3achkowâl, Kitâb e~-~ila.
el-liakrî.
e l-Bornoû~î.
cch-ChàPbi, {{ilâb el-j<;>mmân fi' 'ajâ'ïb ez-zamân.
Dâwoùd b. el-Qâsim el-Awrâbî.
cd-Dilù'ï 1ol)ammed el-Ma nâwj.
lbn Ghàlib.
Ibn J:[ajar.
lIânî' b. Bokoùr e<,l-l)oraïsî.
Ibn J:Iayyân.
Ibn J;Iazm.
eI-~Iom<:üdÎ, Jadh.wat el-moqlabis.
Ibn el-Jasa'.
el-Ifrânî, Nozhat el-I),âdî.
loùsof b. 'Omar (A.boû'l-~Iajj âj), Hisloire des Almohades.
'lyyàçl, J{itâb ech-Chifâ'.
el-Madârik.

(1 ) Rappelons qu'en-Nâ~irî n'a eu en mains que quelques-uns de ces ouvrages.


Beaucoup d'entre eux, aujo urd'hui perdus, ne sont cités que d'après les extraits
qu'en donnenlles historiens anciens, tels qu'Ibn Abl Zar' ou Ibn Khaldoùn.
SOUttCES DES PBINCIPAUX HISTORIENS 397

Ibn Jannoû n.
el-Jorjânî 'Ali.
Ibn cl-Kalbî.
lbn Khaldoùn, KitdIJ el-'ibar.
Ibn Khallikàn, lVafaydl el-a'ïdn.
Ibn el-Kha!ib, Raqm el-l:wlal.
el-f{hold~at en-naqîyya fî omarâ' Ifriqiyya.
cl-Maqqarî, Naf/), et-tib.
Ibn 1arzoùq, Kilâb el-mosnad e~-~ahî/), el-/),asan.
cl-Mas'oudt, Moroûj edh-dhahab.
Ibn Ma\,roùQ. el-Qaïsi.
MoQ.ammed el-'Arbi cl-Fàsî, Mir'dt el-maT),âsin.
Mol)ammcd b. Ibrâhîm el-An~ârî.
en-Nawawi.
er-H.âzi.
Rifâ'a Eek et-Tal)tàwî, Biddyat el-qodamâ'.
e~-~adafi AboLL Choba'(b.
Ibn a'id.
eVl'abari.
Ibn '\tVahboùn 'Abd ci-Jalll.
cl-Wùqidî, Poloù~l, lfriqîyya.
el-vVareàq Aboù -'Lan ân '.\.bd el-Malik.
lbn Zakoùr, el-Mo'rib el-mobin.
Zammoûr b. ~âliJ:t.
ez-Zayyâni, el-Boslan e~-?arîf.
lbn cz-Zayyât, Kildb el-tachmvwoûf ilâ rijâl et-ta~awwoûf.

b) Période métinide.

Ibn Abi Zar" RaweJ, el-qirtâs.


Ibn el-AJ:tmar, RaweJ,at en-nisrin.
Ibn 'Askar, DawT),at en-nachir.
Badd"i' es-sille.
el-Ifrànî, No z hat el-/),ddi.
Ibn cl-Kha~îb, el-l/),âta.
el-lklîl.

\ Ibn 1 haldoLIll, Kitâb el-'ibar.


el-.\raqqarÎ, NafT), et-tîb.
\ el-Maqdzi, es-Soloûk li-ma'rifat dowal el-moloûk.
] bn ' 1arzoùq, Kitâb el-mosnad e~-~ahî/), el-T),asan.
MoJ:tammed el-'Arbi cl-Fâsi, Mir'dt el-ma~l,âsin.
el-Obbt, Commentaire d'el-Jâmi' de Mœ1im.
cl-Qàçliri, Nachr el-malhdnî.
el-Wancharisî, el-Mi'yâr el-moghrib.
Zahrat ech-chamdrîkh (commentaire).
Zarroùq (le cha'(kh Al:tmed).
398 LES HISTORIENS DES CHORFA

c) Période sa<dienne.

<Abd cr-Ra!)màn el-Fâ i, Commentaire des Dalâ'i'l el-khaïrât.


lblihâj el-qoloûb.
Aboû Ma/:lallî, el-lslît el-khirrU.
/:lmed Bàbâ, Mi'râj e$-$o<oûd.
A/:lmcd oû <Alî e - oûsî, Badhl el-monâ$a~w.
Ibn 'Askar, Daw~wl en-nâchir.
el-'Ayyâchi, Ril),la.
el-Bol'zolî, Nawâzil.
el-Fichlâlî, lIIanâhil e$-$aJâ'.
el-Ghazàlî, ll).ià 'o loum ed-dîn.
cl-Iddsi, Nozha t el-mochlàq.
el-Ifrânî, Nozhal el-I).âdî.
$aJwat man inlachar.
el-loù i, el-Mol).ârj,arât.
Ibn Khaldoûll, Kilâb el-' ibar,
Ibn 1 hallikân, Wafayàl el-a'ïd n.
el-Khqlà$al en-naqîyya Ji omarà' IJrîqîyya.
el-Manjoûr, Fahrasa.
Mayyùra, ed-Dorr el h-lhamîn.
Mo/:lammed cl-'Arb i cl-Fù i, Mir'àl el-mal).àsin.
el-'\'\ a Il di - ,Momli' el-asmà'.
cl- :Uo/:l ibbi , J<hold$al el-dthar.
Ibn cl-QâçU, Dorral eHûjàl.
Dorral es-soloûk e l commenlaire.
el-Monlaqà'l-maqijoûr.
cl-Qùdiri 'Abd es- alàm, Mo'lamad er-/'âwi.
Mo/:lammed, Nac hr el-malhânl.
es-Samlùlî 'Abd cr-Ra/:lmù n b. Ia'qoùb, Fahrasa.
el-Takl'oùri, Kildb nafi~wl ahl es-Soûdân.
e l-Tamgroû Li, en- NaJal),al el-miskîyya jî's-siJdral el-lorliÎyya.
el-Tinmârlî, el-Fawâ'ïd el-jamma bi-isnâd 'o loum el-omma.
Zah/'nl ech-chamârikh el commenlaire.
ez-layyàni, el-Boslàn er--,?arîJ.

d ) Période 'alawile.

<Abd e -Salàm b. Mo/:lammed b. <Abd 'Allah cl-<Alaw.Î, Dorral es-soloùk.


A/:lmed b. <Abd cl-Malik ech-Charif es-Sijilmâ i, el-Anwàr es-sanîyya.
ken so ûs, el-Jaïch el-'aram,ram.
el-' yyâchî, Ril),la.
ed-Dllâ'ï Mo/:lammcd el-Ma nâwl, Nalîjat et-lal),qîq.
el-Ghazzâl, Nalîjal el-ijlihâd ]î'l-mohâdana wa'l-jihâd.
Ibrâhim b. IIilâl.
cl-Ifrâni, Nozhal el-l),âdî.
SOUHCES DES PH I NCIPAUX HISTOlUENS 399

lbn Khaldoûn, Kilâb el- 'iba/'.


Ibn Khallikân, Wafayâl el-a'idn.
el-[{holâ~al en-naqîyya fi omarâ' Ifrîqîyya.
el-Ghazâlî, el-Mosta~fâ min 'ilm el-osoûl.
el-Ioûsl, Fahrasa .
e l-Mo ~tdrj,arâl.
Mi~bâlf es-sârÎ..
MoQ.ammcd el-'Arbi el-Fàsi, Mir'ât el-ma~tâsin.
cl-'Omaïri, Fahrasa.
el-Qâdiri MoQ.ammcd, el-A z hâr en-nadîyya.
Nachr el-malhânî.
Qat! ez-zohoûr.
es-Sadràli es-Salâwl AQ.mcd b. el-~'Iakkî.
et-Tastâwatî 'Abd el-Qàdir, Fahmsa.
cz-Zayyânî, el-Boslan e;-~arîf.

II. - EMPHU ' TS D'EN-~À~lRi A L'Historia de Marruecos


DE MANUEL P. CASTELLANOS Cl).

Jsliq~â, tome H, p. 147 Hisl. de Marr. , p. 346-47.


U8. M3.
H9. 346-~7 .
160. 347-48.
162. 34-31'>.
no. 204.
nt. 164 sqq.
171. 73.
Ot. 129.
tome Hl , p. 5. 356.
9. 132.
39. 377 sqq.
'106. 419.
128. 402.
133. 408.
134. 4'11.
1.46. 420.:21.
tome IV, p. 14. 52.
34. 81-82.
197. M3.
202. 102.
230. 529.

(1) La concordance a été établie sur la troisième édition de l'histoire de Caslel-


lanos (Tanger, 1898).
APPENDICE Il

A
Liste des fonctionnaires impériaux et des grands qâq.îs
de Fès et de Marrâkech.

Dynastie Sa' dienne .

ABOÛ'L-'ABSÂS AlplED EL-A'RAJ (923-946/1517-1539).

Secrélaire: Sa'ïd b. 'Ali el-I:Iomaïdî.


Chambellans: Mol;ammed b. 'AH el-Angartî el-Jamlàlî.
Moi).ammed b. Aboû Zaïd el-Matrâzî el-I:Iâi).î.

ABOO 'ABD ALLAH MAl,IAM.\iED Ecn-CHAïKII EL-'\iAHDî (9~1-964/ 1544-1507) .

Vizir: son fils Aboû 1\Joi).ammed 'Abd el-Qàdir.


Secrétaire: Aboû'Imrûn el-Wajjânî.
Chambellans: Qàsim ez-ZarhoûnÎ.
'AH b. Aboû Bakr Azik el-I:Iài).î.
Moûsà b. Aboû Jmâda el-'Aml'i.
Qârjîs de Fès: Aboû Mol)ammed 'Abd el-Wài).id b. Ai).med el-"\iVancharîsÎ,
t 955 (1518).
Aboû Mo~ammed 'Abd el-' Vahhùb ez-Zaqqâq, t 96\ ('1054).

MOULAY 'ABD ALLAH EL-G UÀLIB BILLAII (964-981 / 1501-10ï4).

Vizirs: Aboû 'Abd Allah Moi).ammed b. 'Abd el-Qâdir b. Mai).ammed ech-


Chaïkh, t 916 (1568-69).
Aboû'l-I:Iasan 'Ali b . ~!as'oud Ibn Chaqrà.
FONCTIONNAIRES IMPÉRIAUX 401
Secrétaires: 'Abd el-WâQ.id b. AQ.med ech-Charîf es-Sijilmâsî.
MoQ.ammed b. 'Abd er·RaQ.mân es-Sijilmâsî.
MoQ.ammed b. AQ.med b. 'lsà.
Chambellans: Qàsim ez-Zal'hoùnî. ,
'Abd el-Karîm b. foû'min b. IaQ.ià el-Jondî el-'Eulj.
Ibn Tàwoda.
AQ.med el-Habti.
Qdcj,îs de Fès: Aboù 'Abd Allah MoQ.amrncd el-'A wfl.
Aboù Mâlik <Abd el-WàQ.id el-l:Jom nïdi.
Qâcj,î de Marrâkech: Aboû 'l-Qâsim 'AH b. Mas'oûd ech-Châtibi.

ABOO <ABD ALLAH MOULAY ~IoI.IA:\nmD EL-;\!ASLOOK.H (981-983/ 1574-1576).


Viz ir: 'Ali Ibn Chaqrâ.
Secrétaires,' MoQ.ammed b. AQ.med b. ' Isâ.
Ioùnos b. Sola'lmân et-TamIL
'Ali b. Aboû Bakr.
Oâcj,î de Fès,' Aboù ~1âlik 'Abd el-WàQ.îd el-l:Jomaïdî.
Qâcj,î de Marrâkech: Aboù'l-Qàsim 'Ali b. ~1as<oùd ech-Châçibî.

ABOÙ l\-lAawKN 'ABD EL-~1ALIK. (983-986/ 1576-1578).


Vizi rs: '"\"bd el-'Az iz b. Sa'id b. ~Ian~oùr el-~Iizwâr.
Oùld lawlàt en-nâs el-Oùzgi~î.
Secrétaires,' MoQ.ammed b. Al)med b. <Isâ.
MoQ.ammed b. 'Omar ech-Châwl.
Chambellan: LUçlwàn cl-'Eulj.

ABOO'L-' _\"BBÀS ,\..~IMED EL-\1ANSO ÛR. EDU-DHAUASL (9S I5-1012/ H>78-1bOî).


Vizi J's: Oûld ~1awlùt en-nlÎs el-Olhgi~î.
Aboù'I-l:Jasan 'Ali b. 'I an~oùr ech-Ch iyù?mi el-~I orâbitî.
Aboù Fàris 'Abd el-'Aziz b. MoQ.ammed b. Ibrùhim el-Fichtàli e~-
~anhàjl, wau'r el-qalam.
Moùloùd.
en-N à~ ir b. '\..I i Jbn Chaqrà.
Ibràhîm es-SofiànÎ.
Sec rétaires,' Mo];ammed b. Al)med b. 'Isâ.
MoQ.ammcd b. AU el-Fichtâlî.
'Abd er-HaQ.mân b. Mol)ammed b . '.\bd \118h el-'Annâbî.
Mol)ammcd b. 'Omar ech-Châwi el-Jazâ' 'lrL
'Mol)ammcd b. 'Ali cl-HawzàU, châ'ïr ed-d'lwla, dit en- Jâbigha.
Mol)ammcd b. 'Ali el-Wadji, t 1033 .
'AU b. Al)med ech-Châmî.
Mol)amm ed b. Ja'qoùb el-Ioûsî.
Qâsim 'Alîlich.
Chamb ellan,' 'Abd el-I arîm b. ~10ùsâ b. IaQ.iâ el-Oùzgîp.

26
402 LES HISTOnIENS DES CIIOHFA

Qdrj,îs de Fès: AboLL Màlîk 'Abd el-Wàt:lid el-J-:Iomaïdî , t 1003.


'Abd el-Wahhâb b. 'Abd el- VV àt:lid el-J:Iomaïdi.
'Ali b. 'lmràn es-Salàsl, t 10{8.
Aboù'l-Qâsim b. ~lot:lammed Ibn Abî'n- o'aïm el-Ghassânî,
t 1032.
Qârj,i's de Marrdkech: Aboù'l-Qâsim 'Ali ech-Châtibî, t 1002.
Aboù'l-Qâsim Ibn Soùda, t 1004.
'1ot:lammed b. 'Abd Allah er-Ragrâgî, t 1022.

MOULAY EL-i\L\'J\lOÛN ECH-CUAïKIl (1012-1022/1602-161il).

Secrétaire: At:lmed b. Mot:lammed el-Ghal'dis et-Taghallobi, t 1020.

'Al3o ALLAH B. Ecn-CIIAïKH B. EL-MAN~OÙR (1022-1033/ 1613-1624).

Vizir; f:Iammo b. 'Omar (A t:lmed b. 'Omaïra).

ABo 'L-MA'ÂLÎ ZAÏDÂN B. F.L-)I.\N~OÛR (1012-10311'1603-1628).

Vizirs: MaQmoùd Pùchà el-'Eulj.


IaQiâ Ajànà c~-Oùdkî.
Secrétaires: 'Abd el-'Azîz el-Fichtâl1.
'Abd el-'Aziz ' b. Mot:lammed elh-Tha'alibi.

ABO l\IARwÀ J 'ABD EL- fALIK B. ZAÏDÀN ('lO37-1040/ 1628-1631 )


ct EL-VVALÎD B. ZAïDAN (1041)-104,5/163'1-1636).

Vizirs: 1al)moùd Pâchà el-'Eulj.


JoÙdar.
Ial)iâ Ajànà cl-Oûr.îkî.
Qârj,î de Fès: Moùsà el-BaHiwi, t '1045.
()ârj,î de Marrâkech: 'Isâ b. 'Abd er-RaQmàn es-Sajtànî.

l\IOI.IAMM;\IED ECIl-CHA'lKII B. ZÜDÂN EL-A~GHAR (1045-1064/1636-1654)


ct AI;L\1EO EL-'ABBÀS B. l\IOI;IAMMED ECH-CHAïKIl ( 1064-1069/ 16~4-1659).

Vizirs: Iat:liâ Ajânà el-Oùrîki.


MOQammcd b. Iat:lià Ajùnù el-OùrikÎ.
()ârf,î de Fès: Mol).ammed b. Mot:lammed Ibn SOLlda, t 1076.
t
Qârj,îs de Marrâlœch: ' Jsà b. 'Abd er-RaJ:!mân es-Sajtànî, 1062. 1
Mol)ammed el-)Iizwâr el-Marrâkochî.

Dynastie 'Alawite.

MOULAY ER-RACHiD (1075-1084/ 1664-1672) .

Secrétaires: Ibrâhim b. 'Ab d el-Qâdii' ez-Zarhoùnî, t 1080.


Sola'lmàn b. 'Abd el-Qàdir ez-Zarhoùnî.
I:ONCTIONNAIRES I:\IPÉRIAUX 403
Qd(lis de Fès: f:lamdoùn cJ-\Iizwàr el-MozjînÎ, t 1084.
l\Ial)ammcd b. Ioùsof b. Al)mcd cl-Fùsi, t 1084.
Mol)ammed b. el-tl asan el-1[ajjâ~î.

ABoù'N- A!?R )[OULAY JSMÀ 'IL (1082-1139/1672-1727).


n::irs : 'Abd er-Ral)màn el-;\latràrî.
.\.boû'l-'Abbàs Al)med el-Jal)amdl.
'Omar el-tyarrùq el-Hasanî.
Secrétaires: SolaImàll b. 'Abd el-Qàd ir ez-ZarhoLll1î, t 1098.
cl-Kh ayyâ~ b. Man~oûr, t 1125 (1).
'Omar b. Qâ im 'Alilich.
l ol)ammed e~-Tayyîb b. Mas'oûd el-Marîni, t 1145.
Mo~ammcd cl-'Ayyâchi el-Miknàsî.
'Omar el-Waqqàch .
Mol)ammed b. Solaïmân.
el-Hâjj Mal)ammed b. cl-'Arbî ech-Charqî.
el-M ahdî el-Ghazzâl.
Al)med DàdoLlch.
Mol)a nmcd b. 'Abd el-Wahhâb el-'Vazlr el-Ghassânî, dit
T-;Tammo.
Chambellan: Ibn Màmi.
Qdcj,is de Fès: )IoQammed b. el-Hasan el-Ma jj â~î.
el-'Arbi l3ordola.
Qricj,i de lI1eknès : Al)mcd b. ' \.bd el-'Vahhàb cl-vVazÎr el-Ghassânî.
()dcj,i de Marrdkech : Aboù 'Abd Allah ~Iol)ammcd cl-JIac lllollkî.

A l.IM ED EDH-DuAuAni B. ISMÀ 'IL (H39-H4 '1/ '1727 -1728).

Qdcj,i de Fès: Jdrîs b. cl-'Arbi el-Machchà~ cl-\Ianâfl.

l\IOULAY 'ABD ALLAH B. ISMÀ'IL ( lHI-H71/ 1728-1757).


Vi z ir: 'AH el-'OmaIrÎ.
Chambellan: 'Abd el-vVahhâb el-Iammoûrî.
Qâcj,is de Fès: Joûsof Aboù 'Jn ân.
Aboù'l-Qâsim el-'Omaïri .

SID! MOI;IAMMED B. 'ABD ALLAH ( 1171-:1 204/1757- 1789 .


Vizirs: Jdds b. el-~Jocha"ar.
)Iol)ammed b. Haddo ed-Dokkàli.
'lol)ammed b. Al)mcd el-'Alawî.
Efcndî el-'Arbi Qâdol'IS.

(1) D'après Akensoùs, el-Jaïch el-'aramram, I, p. 75 ct en· lâi\>irî, Jsliq,~â, l V,


p. 33. Ce personnage, qui aurait été ministre ùe la guerre, serait mort à 'fùroù-
dù.nt en 11:38.

____ ~ _ L ~ ...:... . _~~ _ _ _ _..._ __ _ _ _ -=~ ____


404 LES HISTORIENS DES CHORfA

Secrétaires Aboû'l-Qâsim ez-Zammoûr1.


Mol).ammed b. 'Olhmân.
'Omar Loùzireq.
'Abd el-l adm Jbn Zâkoùr. -
Aboû'l-Qàsim ez-Zayyànî.
Al).mcd b. el-~lahdi el-Ghazzâl.
Mol).amm cd el-J:::lùfi.
'a'td cch-Chlll). el-Jazoùl1.
eL-Slalldi cl-J:::la1 kàk eL-l\Iarrâkochi.
'Abd cr-Hal).mùn b. el-K.àmil el-Slarrâkochî
Al).med b . 'O lhmân el-Miknâsî.
Jlol).amm cd Slircj el-Fâsi.
c~- Tàhir cl-Bannàni cr-H.ibà~i.
eVràhir h. 'Abd cs-Salâm es-Salâwî.
Ibràhim .\.gbil es-Soûsi.
Ibn el-l\l obàrak.
Al).med b. l à~ ir el-Ghîyyâ lhî.
Al).med Ibn el-'Vannà n.
Mol)ammcd b. cch-Chàhid.
Cham,bellans: 'Abd cl- Wahhâb el-I ammoûrî.
cl-l\lokhLùr.
QdrJ,î de Fès: 'Abd cl-Qùdir B oukhri~.
QâcJ.i de Marrdkech: 'Abd· cl-'AzÎz Aboù 'Ab d ellî.

){ o LAY EL-lAziD (1204-1206/ -1789-1792).

Secrétaires: Aboù'I-Qùsim cz-Zayyânî.


Sa'ùl cch-Chlil). cl -Jazoûli.

~l OllLAY SOLAtMÀN (1206-1238/1792-1823).

Vi zirs: Aboû'I-Qâsim cz-Zayyànî.


Mol).ammcd b . .\..I)med ,\..kensoûs.
?l1ol). ammcd b. Idri ez-Zammoûri.
Al).mcd b. Mobùrak el- Wa~if, garde de sceaux, t 1235 .
Secrétaires: SIol)ammed cl-J:::lakmàwi.
i\lol)ammcd el-l3 okhâri es-Salàwî.
Mol)ammed b. 'Olhmân el-Miknâsi, t 1212
~Iol)ammcd er-H.ahoûnî.
SIoulay Al).mcd el-Fichlâlî.
Al).med cr-Rifà'i er-Ribâ ~î el-Qa ~âlî.
Al).med .\..ch aqrâch.
QdrJ,îs de Fès : el-'.\.bbà Ibn Kiràn.
Al).mcd b. e l-Tâwedî Ibn Soûda.
el-'Abbâs b. Al)mcd b. et-Tàwodi Ibn Soûda.
~lol).ammcd Ibn lbrâhîm ed-Dokkâli.
COMMA~DEl\IENTS 'rERIlITOIlIAUX AU MAHOC 405

:IoJ:tammcd Ibn '.\.bd er-RaJ:tmân el-Dilà''i.


el-'Arbi er-Hahoûni.
QârJ,î de Marrâkech: el-~Iizwùrî.

MOULAY 'ABD ER-RAI.!\l \X ( 1238-1276/ 18~3- '18 ~9) .


Vizirs: el-Mokhtàr b. 'Abd cl-Malik el-JAma ''i , t 125t,
J\1oJ:tammed b. Idri ,t 1261.
el-'Arbi b. cl-Mol htùr el-Jùma'L
MoJ:tammed Gharrî~.
MoJ:tammed b. 'Abd _\.llah e.-~a{fùr el-Tit~àwanî.
QârJ,îs de Fès: AJ:tmed b. 'A bd el-)Jalik el-'Alawî.
'Abd el-ll âdi b. 'Abd .\.llah el-'AlawL

SlDI [Ol.lAMM ED B. 'ABD ER-RAlplÀN ( 1 27G- 1 290/ 18~9-1873).

Vizirs: el-'Arbi b. el-"Iokhtàr el-JÙma'ï.


MoJ:tammed ekTayyib Ibn e1-Iamàni, surnommé Aboù 'Ichrin ,
t '1286.
Secrétaires: el-Uàjj Idris b. J\IoJ:tammed b. ldrî .
'Abd er-RaJ:tmân b. MoJ:tammcd ech-Charif el-FàsL
Moûsà b. AJ:tmed.
loJ:tammed b. el-'Arbi b. el- \Iok Lllâr el-JÙma'ï.
Chambellan: 'Abd .\.l1ah b. AJ:tmed.

B
Liste des commandements territoriaux au Maroc
sous le règne de Sidi Mo~ammed b. 'Abd Allah (1 ).

Titre. Résidence. Territoire.


'Amil. Oujda. Tribu d'origine ar abe jusqu'au Wàdi
Zà.
'Amil. Tafarsikl. Tribus de Gal 'iyya (Rif), ju qu'aux li-
miles des Ghomâra.
'Amil. Taza. De Taza à Oû~ât el-l.{àjj (Wàdi Mol-
wiyya).
Qà'id. en tribu. Tribu des Uiàina.
Qà'id. Fè . Fès et banlieue Sud.
Ami!. ~froCr. AH loû î ct tribus :Iarmoûcha et Za-
nàta ju qu'à la Haute Molwîyya.
l halîfa. Fè . Fàs el-Jadîd et tribus de la vallée
moyenne du Wâdî Wargha.

(1) D'après ez-Zayyânî, et-Tol'jomân el-mo'I'ib,ms. do Salé.


406 LES HISTORIENS DES CHORFA

Titre. Résidence. Territoire.


Qà'Id. Oûdâya. Tribus du Hab!, jusqu'aux Banoll Go1'-
falil.
Meknès. Aü Jdrù en.
Garwân.
Zammoûr el Balloû Ijakam.
Fès Awlàd Jâma'.
Chrâga.
en tribu. Awlâd 'lsâ cl Banoù Màlik.
Sofiàn.
Wàzzân. Wâzzùn.
el-Qa~r . el-Qa~r.
Tribus des I,-hlo~ cL des Tliq.
Larache Larache et région.
A~îla. A~na et région.
Tanger. Tanger el FaJ:l~.
Télouan. Tétouan el ~.iawz jusqu'à Ceula.
Chafchâwan. Chafchâwan cL tribus environnan te
' Amil En lribu. Tribus des GLlOmâra.
Qà'Id. el-Mahdiyya. wlàd bîta.
alé. Salé.
Habat. Rabat.
Salé. Banoû AI) an.
Qa~bat Tàdlà. Tàdlà et AH Amàloù.
en tribu. AH Ghannâb.
Qà'Id. el-Qal'a. Saghùrna ct ,Banoù 'Amir.
'Amil. Damnât. Dit' de Damnùt.
Qà'Id (deux) . en tribu. Tùmasnà,
zemmoùr. Azemmoùr cl banlieue.
en tribu. Dokkùla.
'Am il. Safi. AQll1a1' el' bda.
Qà'Id. Marrâkech. Soùs (gen du SOlls habitant la ville).
Ral)àmna.
Zrâra el Chabànàt .
Dît' de MarrâkecL1.

Qà'Id.
OùzgL~n.
MasfLwâ.
1
Takna.
Imejjà~.
Idâ où Blâl.
~Iogador. Chiyyàpna.
Mogador.
Agàdîr. Agàdir.
'Amil. Tàroudànt. Soùs, jusqu'à la mer et au désert.
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412 LES HISTORIENS DES CHORFA

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INDEX DES NOMS D'AUTEURS ET DE PERSONNAGES CITÉS

Les patronymes des auteurs d'o uvrages historiques ou biographiques ayant


vécu au Maroc pendant lf! période étudiée ont élé imprimés en ilalique.
Il n'a pas été tenu compte, dans le classement par ordre alphabétique, de
l'arlicle, de b. (ben), d'Ibn, d'Aboû: chercher Aboû Bakr s. Bakr, ibn el-
QâcJî s. Qâgî, etc.

Ibn <Abbâd, s. Mal).ammed b. Ibrâhîm.


el-Abbâr, s. tlamdoûn b. Mol).ammed.
Jbn cl-Abbâr, 392.
el-<Abbâs b. Al).med Ibn Soûda, 198 (n. 1), R38 el n. 1, 404.
b. Ibrdhîm el-Marrâ/wchî, 212 (n.), 386 .
Ibn Kîràn , 404.
Aboù 'l-<Abbâs es-SabU, '118, 220, 385.
<Abbo <Abd Allah b. A1:tmed, 366.
<Abd Allah b. Al;lmed, 405.
b. <Ali es-Sijilmùsî, 260 et n. ~.
b. ech-ChaLkh (sultan sa<dien), 402.
el-Ghàllb billah (s ultan sa<dien), 116 (Il. '1), t20 (n. 1), 129,
131, 134, '137, 'l38, 233, ô236 (n. 4), 400.
b. el-~losaïn. el-Qabbàb, 3i5 et n . 4.
b. Ismà<ïl (s ultan <alawite), 147, 149,192,313,403.
el-I âmil, 27;), 278.
el-Khayyât, 331 et n . 1.
b. Mol}ammed Akcnsoûs, ~03.
el-<Ayyâchî, 66 (n . 3), 74, '188, 26'2-264, 283 ,
29 1, 292, 295, 391, 392, 394, 395, 398.
Ibn i k h lej, 3H-3i2.
el-Wa zzânî, 3H, 326, 327.
414 LES HISTORIENS DES CIIOHFA

'Abd el-'Azîz b. 'Abd el-tTaqq cl-Tabbâ" 274 et n. 3.


b. 'Abd er-HaJ::tmân el-L·'îlùlî, 270 et n. 3.
Aboù 'Abdellî, 404.
b. Al;tmed el-Man~oûr (prince sa'dien), 70.
b. 'Ali (sultan mérinide), 223 et n. 1.
b. el-l~ asan (sultan 'alawite), 359.
b. Mas'oùd ed-Dabbâgh, 309 et ll.. 7, 3'10 et Il. 5.
b. Mol).ammed el-Fichtâlî, 30, 59, 63, 77, !l2-97, 109, 114,
120, 11;), 126, HO, tï6, 362, 391, 394, 395,
398,401,402.
eth-Tha'alibî, 402.
b. Sa'ïd b. Man~oûI' el-Mizwâr, 401.
'Abd el-Bâqî b. Ioùsof ez-ZoI'qânî, 14, 16, 146 (n. 7), 294 et n. 2, 295,
333 (n. 14).
Ibn 'Abd el-Barr, 394, 396.
'Abd el-Ghanî Ibn SoroùI', 244 (n. 4).
'Abd el-Hâdî b. 'Abd Allah el-'Alawî, 343 et n. 6, 344, 405.
'Abd el-J;laï b. 'Abd el-I abîI' el-Kattânî, 344 (n .), 378 (n. 3).
'Abd el-J:Iamîd b. Al;tmed III (sultan oltoman), 152 et Il. 4, 104.
'Abd el-T:laqq el-Ichbîlî, 3~H.
b. Tsmà'ïl el-Bâdisî, 221-222.
b. 'Olhmâll (sultan mérinide), 366.
'Abd el-Jalîl Ibn Wahboûn, 397.
'Abd el-Kabîr b. el-Majdhoûb el-Fdsî, 346.
'Abd el-KaI'îm b. Ial;tiâ, 153 et n. 1.
el-Iâzighi, 337 et n . .4.
b. Moù'min b. Ial).iâ· el-Jondî el-'Eulj , 401.
b. Moùsà el-Oûzgî~î, 401.
Ibn ZâkoûI', 404.
'Abd el-Khâliq b. Mol;tammed ech-Charqî, 330.
'Abd el-J\!Iajîd b. 'Alî el-ManâU ez-Zabâdî, 314 , 334.
'Abd el-Malik el-'Alawî eçl-l)arîr, 372.
b. Idris (prince 'alawile), 1~3 et n. 1.
b. Ismâ 'U (prince 'alawite), 284.
b. Marwân (khalife omaïade), 146.
b. Mal;tammed ech:-Chaïkh (sultan sa'dien), 81, 107 (11.
124, 129,132 (n. 3), 174, 175, 233, 40l.
b. Mol;tammed et-Tajmoû'tî, 301 el n. 3.
b. Zaïdân (sultan sa'dien), 402.
Ibn 'Abd el-Malik el-Marrâkochî, 396.
'Abd el-Mohaïmin b. MoJ::tammed el-l;Iaçlramî, ~21 et 11. 5.
'Abd el-Qâdir b. Al;tmed Ibn Choqroùn, 335 et n. 5.
el-l{oûhin, 337, 340 , 343.
b. 'AU el-Fâsî, 241 (n. 3), 245, 263, 264-265 , 267, 270, 273,
275,277,283, 284, 288, 295, 301, 329, 346,392.
l ' DEX DES 1\'01'115 D'AUTEURS lt15

Abd cl-Q âdir b. cl-'Arbî Boûkhri~, 16, 1.46 ct n. 6, 337, 404.


Ibn Cl1oql'OÙ n , 297 et n. 2.
el-Jilà ni , 27~, 276 , 280, 291., 302.
b. ~Ial;tammed ech-Chaïkh (prince et vizir sa'dien), 400.
et-T as làwati, 399 .
'Abd el-Qâhir b. Mo1).ammed AboÎl Amldq, 347-348.
:Abd er-Ra1).îm b. el- 1:10 aï n el-' l râqî, 14.
'Abd cr-Ra1).mân b. 'Abd el-Karim el-IIazmîrî, 223 ct n. 3.
b. 'Abd el-Qâd ir el-Fdsî, 51, ~8 (n. 4), 1~8, 170 (n. 1),213
(n. 4), 264, 266-269 , 277, 283, 295, 313 (n. 1), 392, 398.
b. 'AH Soqqaï n , 88 et n. 3.
b. Ilichâm (s ultan 'alawitc), 131 (n . 3), 1 8~, 203 , 210, 344,
349, 40:5.
b. Ja'qoûb es-Samlâlî, 392, 398.
b. l drîs el-Manjra, 318 .
b. Ismù 'ïl e~-.?awma'ï el-Tddilî, 221 et Il. 1.
b . Ja'far el-Kattdnî, 379 (n. 9) .
b. el-Kâmil el-Marràkochi, 401.
Ibn Khaldoûn , 2, 10 (n . 1), 30 (n. 4), 31 , 68, 128, 131, 146
(n. 4), 191 (n. 1), 3~7, 365 (n. 3), 394, 397,398,399.
b. el-KhaPb es-Soha;m, 204 ct n. 3.
el-Koûhin, 217 (n . 1) .
el-Majdhoùb, 244 (n. 3), 267 cl n. 2.
cl-MalrârL, 403;
b. Mol).ammcd cl-'Annâbi, 401.
Ibn lbrâhim cd-Dokkàlî, 89 (n. 2, c).
el-'Arif el-Fast, 245 e l D.• 2,256, 25R, 265.
ech-Charif cl-Fùsî, 405.
e(-Tinmdr lî, 257 -258 , 392, 398.
b. Aboû' l-Q âsim Ibn el-Qâçlî, 263 cl J1. "l, 266.
'Abd er-Ra'oûf el-~l o ll ùwi, 38 1 (n. 2).
'Abd es-Salâm b. Al:uncd cçl-J)o'ayyîf, 214 (n. 1).
Gessoûs, 30:.> et Il. 2, 312 .
el-Ilowwdri, 372.
b. el-f h ayyà~ .F:Iassîn, 147 cl n. 2.
b. Machîch, 1 ~6 (n. 2), 235, 277, 280, 289, 336.
b. Mol;tammcd el-'Alawî, 398 .
et-Tawàli, 320 cl n. 8.
b . ekTà'ï' Aboû Ghàlib, 343 el n. 7, 369, 373 .
b. eVfayyîb el-Qddirî, 276-280 , 288, 296, 298, 301, 303, 304,
305 , 312, 317 (n. 5, 4°), 319, 323, 332, 392, 393, 398.
b. Aboû Za'(d cl-Azamî, 201 el Il. 6, 346.
'Abd cl-Wadoùd cch-C hafchùwanî, 198 (n. 1) .
'Abd el-Wahhâb b. 'A bd el-\\Tù \:li d el- r.l ornaïdi, 402.
b. Al).med Aderrâq, 310-311.
416 LES HISTORIENS DES CHORFA

'Abd el-Wahhâb el-Iammoûri, 40~.


b. Mol)ammed cz-Zaqqt\q,89 (n. 2, d), 91 (n. 2, f), 133,
400.
et-Tâzî , 33~ et n. i.
'Abd el-Wâl)id b. Al)med Ibn 'Achir, 12, 14,52,256 el n . 2, 258, 260, 26~,
308.
cl-T:fomatdî , 95 (n. 2) , 126, 243 el n. 4, 24tl, ~Ot.
es-Sijilmâsî, 101 et n. 6, 238 , 254, 401.
Ibn Soûda, 198 (n. 1).
el-lVancharîsî, 52, 89 (n. 2, b), 133, 226, 3g4,
397, 400.
b. 'Allâl ed-Dabbâgh, 3~2 et n. 3.
b. Mal)ammed el-Fâsî, 335- 336 , 341.
'Abd el-vVàrith el-Ia~loûtî, 23 2 et n . L
Aboû 'Abdelli, s. ' bd el-'Azîz.
'Abdo (le chaïkh), 378 (o. 3).
el-'Abdoûnî, s. Mol)ammed b. 'Abd el-Karîm.
Achaqràch, s. Al)mcd.
Ibn 'Achir, s. 'Abd cl-Wâl)id b . A}:lmed, Al)med b. Mol)ammeel.
el- r:r Mi, . A1;tmcd.
el·'Achmâwi, s. AQ.meel b. VIol)ammed.
Adcrrâq, s. 'Abd cl-vVahhâb b. Al).med.
Afoghàï, 100 (n. 1).
Afoqàï, s. Al)meel.
Agbîl, s. Ibràhîm .
.Tbn cl-AQ.mar, 30 et Hole 1'1, 36 (n . .1 ), 123 ct n. 1,289,361, 397.
Al)med el-'Abbù b. Mol)ammed ech-Chail h ( ulLan sa'dien), l36.
b. 'Abd Allah cl-Gharbî, 213 et n. 5.
b·. 'Abd cl-'AzÎz el-HilâU, 316-317.
b. 'Abel el-T.lat el·Ilalabf, 74, 113 , 286-287 , 296, 380, 393.
b. 'Abd cl-Malil es-Sijilmd 'f , 270 (n. 2), 391, 395, 398.
b. 'Abd el-Qàd ir el-Qddirî, 294.
b. 'Abd es- alàm Bennànî , 198 (n. 1).
cl-JirùWJ', 30 ct n. 9, 2 lL
b. 'Ab el el-\Yahhàb el-Wazîl' el-Ghassdnf, ~n) , 304 , 391, .'.03.
Achaqrâch, 40 t
Ibn 'Achir el-Jielfî, 313-314.
Afoqdi, 100, 391.
b. AQ.med ech-Chaddàdi, 333 et n. 1.
cl· 'Ajùmi, 308 (n. !').
b. 'Ali el-Fàsî, 2'73 cl n . 3.
cl-llawzùlî, 99(n. 2).
el-Jarnidî, 305 ct n. 4, 309.
el-Manj oLll', 88-92. '!Ol', '102, H6, 230, 238, 24·3, 254, 394,
398.
INDEX DES NOMS D~AUTEURS 417

Al).med b. 'AH el-Mawâî, '113 et n. 3.


es-Sâlimî, 201 ct n. L
_ oû - es-Soûsî, 255-257, 391,392, 398.
b. - el-Wajjârî, 3iS et n. 6, 33~.
el-A'raj (sullan sa'dien), 400.
b. eVArbî Ibn el-T:Iàjj, 217 et n. 3, 2~8, 30 l , 312,313 , 345.
b. eVAyyâchi Skirej, 201, 377.
Bâbâ, 24, 26, 90, 102, 2~0, 227, 250-255 , '2~6, 316, 322, 391, 392,395,
398.
b. Bâbâ ech-Chingîtî, 377.
el-Bakkâï, 212 (n.) .
Dâdoûch, 297, 403.
el-Fichtâli, 404.
el-Hab~î, 401.
b. J:Iasan Ibn Qonfoûdh, 98 et n. 2, M7 (Ll. 5), 323.
b. el-J:Iosaïn er-Roûmîlî, 313 (n. 1, 2°).
el-Ia1;lamdi , 190 et n. 2, 210, 403.
b. lbrâhîm Ibn Aboû Mo1).ammed $âlil)" 221.
b. Ioûsof el-Fâsi, 98 et n. 5, 104, 243-244, 245.
ez-Ziyyâlî, 245 et n. 4.
b. lsmâ'ïl (sullan 'alawite), 403.
el-Jorjânî, 396.
b. Khâlid en-Nât;irî, 3, 26, 64, 61, 68 , 141, 156 (n. 3), 182 (n. 2),
186 (n. 3), '104, 350-368, 381, 396.
b. el-Khay yâ~ ed-Doklcâlî, 305-306 .
b. Ma"Q-ammcd ibn 'Atîyya, 292-293.
ibn Ma'an, 276 ct n. 4, 218, 290, 294, 304, 32t
(11.. 4, 7°).
el-Marnîsî, 373 el n. 5.
Ibn Ndt;ir, H6, 166 (n.), 29i-292, 351.
e~-~aqa llî , 333 et n. 6.
b. el-~ahdi el-Ghazzâ l, 66 (n. 3), 150 (n. 1), 188, 327-330 , 398, 404.
b. el-~1akkî es-Sadrâtî es-Sa làwî, 399.
el-Man~oûr edh-Dhahabî (sultan sa'dien), 34, 63, 6:>, 68 , 70, 71,
72, 81, 87, 88, 90 sqq., 108, 10~, HO, '1.23, 124, '1'25, '127, '.130,
133, 137, 138, 173 (n. '2), i14, 196, ~38, ~HO, 251, 252, 368, 401,
402.
b. Mobàrak es-Sijilmâsî, 309-3i1l, 311, 3i8, 320, 320, 3iH.
el-Wa~îf, -404.
b. Mol).ammcd Ibn'Achir es-SalàwL, 223, 3i3 et n. 4.
. el-'Achmawî,33i-332.
lbn 'Ajîba, 336.
el-Amîn ech-ChingÎ~Î, 377 (n. 2).
ech-Châwî, 278 et n. 1, 283, 284.
cd-Daqqoûn, 216 cl n. 5.
418 LKS HISTORIENS DES CHORFA

AJ.:tmed b. Mol}.ammed ei-Ghard is, 402.


e l-I:Iabib, 309 et n. 3, 316.
el-llachloûkî, 3t>5 (n. 2).
Ibn el-lfâjj, 368-37f.
el-I,lojratî, 374 el n. 6, 378.
el-Iamanî, 276 ct n. 3, 290, 302.
eI-'Irâqi, 3Î~et n. 6.
el-Maqqal'î, 93 et n. 3, 9't (n. '1), 95, 104, 240, 258 ,..
265, 308, 3!H, 393, 094, 396, 397.
Aboû Ndfl\ '198 (n. '1'), 3~0 (n. 6) .
Ibn el-Qâcjî, 69, 77,90 cl n. '1,93, !H, %, 98, iOO- H2 ,
125, '1'26, 140,170 ( n. 1), 174, 18i, 193,2.20, 238,.
247-250 , 252, ~55, 258,29 7, 3:16, 323, 325,361, 362.
381, 392 , 393, 398.
el-Tâwodî Ibn Soùda, 201 el n. 5, 333, 340, 404.
et-Tijjâni, 376 et n. 5.
el- Wallâll', 290- 291 : 312, ~i94.
b. Moûsù el-Mo/'dbî, 255 , 393.
b. â~ir el-Ghîyyâthi, '150 (n. 'l), 404 .
.b. 'Othmân, HW (n. 1), 404.
b. Aboù'l-Qâ illl e$-:)awma'ï el-Tddilî, 239 .240 .
er-Rifà'ï er-Ribùp,. 404.
b. ekTàhir ech-Chargi, 16, '14"6.
cl-TawàLi; 3!J2.
Ibn el-'Vannàll, WO (n. 1), 210, 353 ct n. 2, 404.
el-"Ya~~âsî, 133.
Zarroûq el-l3oruosi, 187 et n. 3, 274, '276, 3n.
b. Mol}.ammed el-J a'farî, '198 (n. '1 ) .
<Aïcha bent Al}.mcd (mère d'Ibn (Askal'), 231 cl n. 2 , 233.
Ibn 'Aïchoùn ech-Chal'ràt, s. Mo1).ammed b. Mol}.amll1ed.
el-'A'ïùi, s. lol).ammed b. A1).med.
el... 'Ajamî, s. Al}.med.
Ajàllâ el-Oùrîkî, s. Ial:lià, Mol}.ammed b. Ial}.iâ.
Ibll 'Ajîba, s. Al).med b. Mol}.ammed.
'Ajîsa b. Doùnf!.s, '105 (n. 1).
Akeusoûs, s. 'Abd Allah b. Mol}.ammcd, l\Jol}.ammcd b. AJ.:tme
cl-Akhçlarî, 290 (n. 7, 2°), 310 (n. 2, 50).
el-'Alamî, s. Iol}.ammed b. e~-Tayyîb.
cl-'Alawî, s. ~la1:tammcd b . 'Abd er-Ral).mân, foJ:tammcdb. A1).mcd, nom .
des sultans 'alawiLes.
'A U (Aboû'l-I:Ia an) uHan mérinide, 116 (n. 1), 366.
b. 'Abd "\.llah ech-Chàdhili, 234, 235, 247,280,3 13 (n. 1, 40) .
el-Mthîwî, 343 et n. 5.
b. 'Abd er-Ral}.mân ed-Dara'ï, 293 cl n. 'l , 334.
Ib n 'Iml'âu es-, alàsi, 245 el n . 5, 252, 402.
I~BEX DES NOMS D'AUTEUH& 419

, li b. A1).med ed-Châmî, 401:


el-T:Toraïchî, 309 et n. 6.
cl-Ojhoûrî, 263 et n. 4:
el- W àzzànÎ, 327 et n. 2.
cl-'Aqqâd, 372 et n. ~.
b. el-'Arbî ~laràzim Barrâda, 376-377.
b. Aboû Bakr AzÎk el-~làl)j, 400.
ech-Chadf (Moulay , ancèb'c dcs 'Alawilcs), 106 (n. 2).
b. lIùchim cl-' lr elq!, 33~ ct n. 7.
b. Ibrùhîm cz-ZayyùL1Î, 14~ cl n. 3.
b. Idds Qa~~ùra , 369 et n. ~.
b. Ioùsof (s ultan almohade), '116 (Il. 1).
el-Fùsî, 243 ct n. 1, 26~.
b. '1 Ù er-R.ùchidi, 89 (n. 2, h) .
el-Jaznâ'ï, 224 et n. 2, 249 ct n. 1.
Mandoù~a , 297.
b. MaL1~oùr ech-ChÎyù~mî , 401.
cl-Marrâkochi, 180.
b. Ma s'oùd Ibn Chaqrù , 400.
ech-Châtibî, 401.
b. Mol:tammcd el-' AJ]qârî, 372.
Baraka, 288 et n. 4, 3'J2.
cch-Chàdhili, 14:
el- Tamgroàtî , 97, 98-99 , 136, 392, 398.
cl-Mo~bâl:lÎ , 190 (n. 2), 396.
b. J\!oùsù Ibn l1ùroûn cl-Matgbarî, 89 (n. 2, 0), 2~6.
b. Qâsim cl-BoHoûïyî, 258 et n. 4,.-
ez -Zaqqâq, '14, 313 (n. 1 ,3°), 334 (n. 1, 3°L
b. Aboù'l-Qâsim cl-'Omaïrî, 293 (n. 4),403.
b. ckTàhir el-Madanî, 212 (n. ) .
b. Aboû Tùlib, 26.
b. , adda cl-Ghamrî, 99 (n. 2), 131.
b. cz-Zobaïf es-S ijilmâsî , 265.
'Alilich s. 'Omar b. Qà im , Qù im.
cl-'Alqamî, s. Ibràhîm.
Amùloù, '146.
'Amùra b. 1\1où sù, 328.
mhàoùch , s. Aboù Bakr.
Aboû Amlâq, s . 'Abel cl-Qùhir b. i\Iol).ammed.
'Amr b. Llind, 20i (n. J).
'A mrùn b. Dîwùn , 311 (n. 4) .
cl-'Arnrî, s. Moùsà h. Aboù Jmâda.
Amsà'l-Khaïr (S idi), 383.
cl-An garp, s. Mol).amrncd b. 'A LL
cl-'Annàbî, s. 'Abd cr-Ha1).mùn b. Mol:tammed.
420 LES HISTORIENS DES CHOUFA

Anonyme de Fès, 65, 76, {3i-UO, 173, 174,391.


:Antar el-Khol~î, 308.
el-'Aqqâd, s. 'Ali, 'AH b. MoÇ.ammed.
Jbn 'Arafa, s. MoJ:tammed b. MoJ:tammed.
el-'Arbi b. 'AH el-Qosan~înî, 14.7 et n. 2.
b. el-Hâchimî ez-Zarhoûnî, 198 (n. 1).
el-Machrafî, 212 (n. ).
b. MoÇ.ammed ed-Damnâlî, 198 (n. 1), 2f1 (n. 1).
b. el-Mokhtâr el-Jâma'ï, 40':>.
Qâdoûs Efendî, 210, 403.
er-Hahoûnî, 405.
Ibn 'Arçloûn, 391.
el-'Arif el-Fâsî, s. 'Abd er-RaÇ.mân b. Mol).ammed.
el-Asafî, s. Mobarâk b. 'Omar.
Ibn 'Asâkir, 396.
Ibn 'A~im, 14, 298 (n. 4, 2°), 334 (n. 1, 20).
'Askar b. Khâlid b. 'Omal' b. Idris, 231.
Ibn 'Askar, s. Mol).ammed b. 'Ali.
Ibn el-Alhîr, 29, 60, 396.
Jbn 'Atîyya, s. AÇ.med b. MuÇ.ammed, Mal).ammed. •
'Awda bent AÇ.med b. 'Abd Allah el-Wazgîti el-Warzâzâlî, 108.
el-'Awfi, s. MoÇ.ammcd.
cl-'Awrâbî, s. Dàwoùd b. Qàsim , s. KahIân b. Aboû Lowâ, s. MoÇ.ammed
b. el-~Tosaïn.
'Awwâd, s. Aboû Bakr b. MoÇ.ammed.
cl-'Ayyâchî, s. 'Abd Allah b. Mol).ammed, Mol).ammed.
el-Azamî, s. 'Abd es-Salâm b. Aboû Zaïd.
el-Azhari, 13.
Azik el-I:IâÇ.î, s. 'AH b. Aboû Bakr.
Ibn el-Azraq, 394.
cl-Azwarqânî, 391.

Ibn Bachkowâl, 396.


el-Bàdisî, s. 'Abd el-tIaqq b. Ismâ 'ïl.
Baghio', s. Mol}.ammed b. MoÇ.ammed.
13al).ruq, 13.
el-BakkâL, s. AÇ.med.
AboCI Bakr Amhâoùch, 188 et n. 1.
b. el-J:lasan et Tu\.âfi, . 270 ct n. 1.
b. Idrîs el-Manjra, 198 (n. 1).
el-I hatîb cl-Baghdâdi, 26.
b. MaÇ.ammed ed-Dilâ'ï, 104, 300 ct n. i, 333, 376, n. 4, 90.
b. MoÇ.ammed 'Awwâd, 352 et n. 2.
ed-Dilâ'ï, 320 e t n. 6.
b. ekTayyîb Ibn Kîrân, 373 et n. 6.

1
INDEX DES NOMS D'AUTEURS 421

el-Bakrî, 396.
el-Balâdhorî , 17'1, 39 L
Baraka, s. Ali b. Mol).ammed.
Bargâch, 160 et n. 3. .
Barràda, s. <Alî b. el-<Arbi J:1.aJ'àzim.
el-Batalioùsî, 395 .
Jbn Batoùta, 83 (n. ), 391, 393.
el-Battâl, s. Ibrâhîm.
el-Battîwî, s. Moùsâ.
Ibn el-Bàz, ~60 (n. 2).
el-Belghîthî, s. el-f:labîb.
Bennânî, s. Al).mcd b. <Abd es-Salâm, Fall). Allah, Mal).ammed b.
<Abd es-Salâm, Mo1).ammed b. A1).med, Mo1}.ammed b. el-T;Tasan, et-
Tâhir.
Hennîs, s. Mo1;lammed b. A1).med.
el-Bitàwl'Î, s. ~Iol).ammed el-Makkî.
el-Bo~ttorî, 211, 352.
el-Bokhârî, 14, 29, '104.
Bordola, s. Mol).ammed cl-<Arbi.
el-Bornosî, s. A1;lmed Zarroùq.
el-Bornoû~î, 360 (n. 2), 396.
el-Borzolî, 398.
el-BoHoûïyî, s. <Ali b. Qâsim.
el-Boû<a~amî, s. Mo1).ammed.
el-Boû<inânî, s. Mol;tammed b. Mo1).ammed.
Boûkhrî~ s. <Abd cl-Qâdir b. el-<Arbi.

. ech-Chaddâdi, s. A1).med b. A1;lmed.


ech-Châdhilî, s. <Ali b. Mo1).ammed.
ech-Chafchàwanî, s. <Abd el-Wadoûd, Ial).ià b. el-Mahdi, Mol).ammed Ib:l
1an~oûr.
ech-Chahrazoùrî, s. Ibrâhîm b. IJasan.
ech-Chaïkh b. el-Man~oûr (sultan sa<dien), 244, 402.
ech-Chàmî, s. <Ali b. A1).med.
ech-Chanfarâ, 289 (n. 5°).
Ibn Chaqrâ, s. <AH b. Mas<oûd, en-Nâ~ir b. <Ali.
ech-Cha<rânî, 393.
ech-Chargî, s. A1;lmed b. et-Tâhir.
Ibn Abî Charif Kamâl ed-Din, 14.
ech-Charqâwî, s. <Abd el-Khâliq b. Mol).ammed.
ech-Charqî, s. Ma1).ammed b. el-Arbî, Mal).ammed b. Aboù'l-Qàsim, Mo-
l).ammed el-<Arbi b. es-Sâ'ïl}, Mol.tammed el-l\1o<tà, Mol}ammed el-
Mo<tâ b. Mol}.ammed e~-~âli1)., Mo1).ammed e~-~âlll)..
ech-Charràt, s. Mas<oûd.
ech~Chàtibî, S,. <AH b. Mas<oûd, Mo1).ammed, Aboù'l-Qàsim b. <Ali.
·422 J~ES HISTOnIE~5 DES , CH0RF:A.

cch-Chàwî, s. Al).med b. Mol).ammed, la'ïch b. er-Raghghàï, Ibràhîm,


Mol).ammed b. 'Omar, Ral).l).o el-Ghannàmî.
cclh-Chingîtt, s. Al).med b. Bàbà, Al).med b. ~1ol).ammed el-Amin.
Aboû 'ch-chilà' el-Khammàr, 49 (n. 1), 'l78 (n.), 3~8 et n. 1, 37-2 (n. 4).
cch-Chiyâ~mî, s. 'Ali b. Man~oùr.
Cho'a'(b b. el-J:Iasan Aboù Madian el-Ghawth, 16L et n. 2, 'l63 , 221.
ChoqroùI1 Ibn Abi Jam'a, . ~lol).amm ed Choqroùn b. Al:).med.
lbn ChoqroûI1, s. 'Abd el-Qàdir, 'Abd cl-Qàdir b. Al:).med.

ed-Dabbàgh, s. Abd el-'Azîz b. ~Ias'oùd , 'Abd cl- Wàl).id b . .\.Uà1.


Dàdoùch, s. Al).med.
ed-DJmnàti, s. el-'Arbi b. Mol;tammed.
ed-Daqqoûn, s. Al).med b. Mol).ammed.
ed-Dara'ï, s. Ali b. 'Abd er-Ral).màn, ~lol).ammed el-~Iakkl.
ed-Darqàwi, s. el;Mahdi b.Mol).ammed,jlol).ammed el-'Arbi, Mol).ammed
cVfayyîb.
Darràs b. lsmà ' ïl, 281, .379 et n. 6.
cd-D.1soûqî, '14.
Dà woûd b. Qàsim el-Awràbî, 396.
edh-Dhahabi, 30 et n. '2, 393.
ed-Dilà'ï, s. Aboû Bakr b. Mal).ammed, Aboû Bakr b. Mol).ammcd, Ma}:lam-
med b. Aboû Bakr, Mal).ammed el-J,làjj, Mol).ammed cl-i\lakki , ~lo};tam­
med el-Masnà wi, Mol).ammed b. ~lol).ammed, Mol).ammed b. Mol;tammed
cl-jlakkî, Mol).ammed el-Moràbi~. Tableau genéalogique de la fam.ille des
Dilâ'ïyîn, p. 299.
eçl-l)o'ayyif, s. 'Abd es-Salàm b. Al;tmed, i\'Iol).ammed b. 'Abd .es-Salâm.
ed-Dokkà1i, s. 'Abd er-Ral).màn b. ~rol).ammcd, Alpned b. el-Khayyà~,
~lal).ammcd b. el-Khayyà~, Mol).ammed b. 'Abd el- \' ahhàb, Mol).ammed
Jbn 'Ali, MoQ.ammed b. 1:Iaddo, Mol).ammed Ibn Jbràhîm.
od-Dor-rij, s. i\Iol:tammed b. ?l1al).ammed.

Aboù'!-l!'açllibn e~ -~ abbàgh, 91 (n. 2, e).


lbn el-Faqîh, s. l\1al).ammed b. Mol).annned.
Ibn Farl:toùn , s. ]bràhîm b. 'Ali.
Fàris (Aboù 'Inàn), sultan mérinide, 298 (n. 1).
- cch-Chidiàq, 210 ct n. 2.
cl-Fàsî, s. 'Abd el-I abir b. el-~lajdhoùb, 'Abd el-Qàdir b. 'AU, 'Abd er-
Hul).màn b. 'Abd el-Qàdir, 'Abd cr-Ral).mân.b. Mol).amm.ed, <Abd el-Wàl;tid
b. Ma}:lummed, Al).med b. 'Ali, Al).med b. Ioùsof, <Ali b. Ioùsof, loùso[
b. (Abd er-Ral).màn, Ioûso[ b. Mol).ammed, Aboù Madian b. Al).med, Aboù
Madian b. Ylal).ammed, Mal).am.med b. Al).med b. Joûso[, Maljtammed b.
Al).lIned b. Mal).ammed, Mal:tammed b. (Abd el-Qàdir, Mal,tammed b. (Abd
er-Ral).màn, Mal).ammed b. Ioùs-of, Mol;tammed b. (Abd es-Salàm, Mo-
l,tammed el- (Arbi, Mol).ammed el-Mahdi, lol).ammed eVfayyîb, (Omar
b. (Abd Allah. Tableau généa10gique de la famille des Fàsîyîn. p. 2,*2.
INDEX DES NOMS D'AUTEURS 423

Fall.l Allah cl-Bennàni, 47 (n.).


el-Fîchî, s. Mo1).ammed b. Mo1).ammed .
.el-Fichtàlî, s. 'Abd el-'AzÎz b . .\loQ.ammed, A1).med,_ .\IJo1).ammed b. <Ali ,
Mo1).ammed el-'Arbî, Aboû'l-Qàsim .
.e1·Fîlàlî, s. <Abd cl- 'Azîz b. 'Abd er-Ral).màn .
.el-F'îroûzàbàdî, 333 (n. 7).
·el-Foc;laïlî, s. IdrÎs b. A1).med.
el-Fotoû1). b. Doùnàs, '105 (n. 1).

Genboûr, s. el-J:Ia san .


.el-GendoÙz, s. Mol:tammed b. el-f:losaïn.
Gennoûn, s. Mo1).ammed b. cl- 1ad :lI11.
Gessoûs, s. 'Abd es-Salàm b. A1).med, Ma1).ammcd b. Qàsim.
Aboû Ghàlib, s. 'Abd es- alàm b. et-Tà'ï'.
Ibn Ghàlib, 360 (n. 2), 396 .
.el-Ghamrî, s. 'AU b. ' Vadda.
el-Gharbî, s. A1).med b. 'Abd Allah .
.el-Ghardîs, s. A1).med b. i\Io1).ammed.
-Gharrit, s. Mo1).ammed.
cl-Ghassânî Ibn Abî'n-No'aïm, s. Aboû'l-Qàsim b. Mo1).ammed .
.el-Ghazâlî, 398 , 399.
lbn Ghâzî, s . .\101).ammed b. A1).med, -~dol.lammed b. el-Khayyât- ed-Dok-
kalî.
.cl-Ghazwànî , -227.
cl-Ghazzâl, s. A1).med b. cl-.\Iahdî, el-Mahdî.
d-Ghîyyâthi, s. A1;lmed b. J à~ir.
el~Ghoûl s. Aboû'l-Qàsim el-Fichlâlî .
.el-Golâlî, s. Ibrâhim b. 'Abd cr-Ral.lmân, .\IoQ.ammed b ..'Aibd el-Qàdir.

<el-l.[abîb, s. A1;lmed b. Mo1).ammed.


el-Belghîthî, 359.
cl-IIabp, s. A1).med, Io1).ammed b. 'Abd Allah.
I1âchim b. Mol)ammed el-Qàdirî, 327 (n. 4) .
.el-Uachtoûkî, s. A1).med b. Mo1).ammed , \Iol:tammed b. Ibràhîm, Io1).am-
med b. el-?l/I obàrak .
.el-Hàdî b. A1;lmed e~-$aqallî , 380 et n. 4 .
.e1-J:Iac;lramî, s. 'Abd el-Mohaïmin b. ~[o1).ammed, Mo1).ammed b. Aboû
Bakr.
e l-l;lâfî, s. Al:tmed Ibn 'Achir, .\101).ammed .
.el-l:lafna i, s. Mo1).ammed.
Ibn l:lajar el-Haïthamî, 381 (n. 2), 393, 396.
Ibn el-J:Iâjj, s. A1).med b. el-'Arbî, A1).med b. Mol:tammed, l;Iamdoûn b.
<Abd er-Ra1).màn, Mal:tammed. b. A1:tmed, Mal}.ammed et-Ta-
lib b. I:lamdoûn, Mo1).ammed b. J:lamdoùn, Mo1).ammed e -
Mahdi.
424 LES HISTORIENS _ DES CHORI.'A

Ibn el-l:Iàjj el-'Abdarî, s. Mol;lammcd b. Mol;lammcd.


T:Iâjji KhaHfa, 3:2.
el-J:Iakkàk, s. el-Mahdi.
el-Hakmàwi, s. Ylol;lammed.
el-l:Jalabî, s. Al;lmed b. 'Abd el-~IaL
tlamdoùn b. 'Abd cr-Ral;lman [bn el-J:Iâjj, '19, 198 (n. 1), 201,210,333,
340, 342 et n. 5, 345 , 368.
el-Malahafî, 2·82.
el-Mizwâr, 273.
b. Mol)ammed el-Abbâr, 263 ct n. '1, 266.
b. :\'Iol)ammed et-Tâhirî, 326-327.
el-tlammâdi, s. iVIol)ammed et-Tohàmi.
l:Iammo b. 'Omar, 402.
J:Iammoùda (bey de Tunis), 153.
cl-1:lammoùmî, s. Mol;tammed b. ech-Chùdhili.
Hâni' b. Bokoùr e<;l-J)oraïsl, 396.
- b. Ma~doùr el-Koùmî, 191 et n. 1, 395.
el-tTârith b. tTilliza, 252 (n. 1).
Ibn Hâroûn el- Iatghari, s. 'AH b. MoûséÎ.
el-tlarrâq, s. Mol;tammed b. Mol;tammed, 'Omar.
lbn T:Iarzoùz, s. J\1an~oÛr.
cl-l":1asan (fils de 'Ali), 278.
Genboùr, 373 ct n. 1.
b. Ioùsof cz:-Zîyyàtî, 245 et n. 3.
b. Ismà'ïl (prince 'alawite), 152.
b. 1\Ias'oùd el-Ioûsî, 21, 32 (n. 2), 1'19, 145 (n. 3), 190, 261, 269~
272, 276, 27ï, 288, 293, 298,301,312,391,393,394,395,398,
399.
b. lol;tammed b. 'Abd Allah (prince 'alawite), 152.
b. 'Abd er-Ral;tmân ( ultan 'alawite), 84,142,204,
349, 350, 353, 358, 359, 368, 369 , 370, 371, 372.
b. Ral;tl;làl el-Ma'dânî, 297-298, 303.
1;Iassîn, s. 'Abd es-S alâm b. el-Khayyât.
Aboù I:!assoûn el- Wa~tàsî, 133, 134, 135, '173.
el-tTaHâb, s. Ial;llâ b. Mol~ammed.
cl-T:Iawwàt, s. :\lol;tammed b. 'Abd Allah, Solaïmân b. Mol;tammed.
el-Hawzâlî, s. Al;lmed b. 'Ali, 1ol;tammed b. 'AIL
Ibn J:Iayyân, 30 el n. 5, 396.
Ibn J:Iazm, 361 , 393, 394, 396.
el-Hazmîrî, s. 'Abd er-Hal;tmân b. 'Abd el-Karîm, l\Iol)ammed b. 'Abd el-
Karîm, l\Iol;tammed b. fol;tammed Ibn Tijlât.
Hichâm b. l\IoI).ammed (prince 'alawile), 158, 160.
el-Hilâlî, s. Al)med b. 'Abd el-'Azîz.
el-J:Tlllî ~afî ed-Din , 289 (n., 60).
el-J:Iimiad, s. fol)ammed b. 'Abd el-Mon'im.
INDEX DES NOMS D'AUTEURS 425

el- f:[ojralî , s. Al).m'ed b. Mo"Q.ammcd.


el-J:lomaïdi s. 'Abd el-Wahhâb b. 'Abd el-Wàl).id , 'Abd el- Wàl).idb. Al).m.ed,
Sa'ïd b. 'Ali.
el-J:loraïchî, s. 'Ali b. Al).mcd.
el-J:lo aïn (fils de 'Ali), 279.
b. ~Iol).ammed (prince 'alawite), 39, t52.
b. Nâ~ir , 355 (n. 2), 393.
el-Howwârî, s. 'Abd es-Salàm, ~Ial).ammed b. Tâhir.

el-Iadrl, s. la'qoùb b. lal).iâ.


el-Ial).amdî, s. Al).med.
la"Q.iâ Ajânâ el-Oûrîki, 402.
b. Ioûnos, 346.
Ibn Khaldoûn , 30 c t 11. 7.
b. el-Mahdi ech-Chafchâ wanî, i47 et n. 4, 333.
b. ~lol;tammed el-l:lanâb, i02 et n. 1, 103.
es-Sarrâj (el-A~ghar), 1.01. et n. 7, 243, 2 i5.
cl-Waqqâd, 257.
la'ïch b. er-Raghghàï ech-Châwî, 333 et n. 3.
el-Iamanî, s. Al).med b. Mol;tqmmcd.
el-Iammoûrî, s. 'Abd el-Wahhâb.
la'qoûb b. 'Abd el-I:Iaqq (sullan mérinide), 128 (n. 2).
b. Ial.lÏà el-ladrî, tOt el n. 5.
Iâqoût, 25.
el-Iasa', 145.
Ibn el-Iasa', 3~6.
el-la~loûtî, s. 'Abd el-Wàl'ith.
el-Iassitnî, s. Mol).ammed b. Al).med.
Aboû la'zà, 239 et n. 2.
el-Iazîd b. ~lol).ammed (s ultan 'alawite), 153 (n. 1), 156 et n. 2, un, 158,
160, '177 , 183, '184, 192, 206, 213 (n. '1 ), 404.
el-Iàzighî , s. 'Abd el-Karîm, Jlol;tammed b . .\..boû Bakr, Mol).ammed b.
Hannoû.
lbrâhîm b. 'Abd el-Qàdir ez-Zarhoûnî, 402.
b. 'Abd er-Ral).mân el-Goldlî, 257 , 393.
Agbîl es -Soûsî, 404.
b. 'Ali Ibn Far"Q.oûn, 44, 253 et n. 5, 353 (n. 1. , 3°).
el-'AlqamÎ, 1.02 et n. ~ , 238.
el-Ba\tà1 , 222 (n. 1).
ech-Ch âwÎ, 90.
Efendî, 153.
b. l;lasan ech-Chahrazoûrî, 263 el n. 6, 295.
b. Hilâl el-I:Iarrànî e~-~âbî Aboù Isl).àq, 29 et n. 3, 39t, 398.
- es-Sijilmâsî, 3t6.
b. el-Iazîd (prince 'alawite), '157.
LES HISTOflIENS DES CHORFA

Ibrâhim Ibn Sahl, '1'14 , 365.


es-Sofiànî, 401.
Aboù <Ichrîn, s. Mol;tammed et-Tayyib b. cl-lamanî.
Ibn el-<Idhàrî , 395.
Idrîs 1er , 161, 278.
II , 22, 283, 287 et n. 3, 380, 38~ , 383.
b. <Abd Allah el-Wàdghirl, -198 (n. 1), 343 et n. 4.
b. Al;tmed el-Poc!aïlî, 374-375.
b. el-<Arbi el-Machchàt, 403.
b. Mal;tammed el-<Iràqi, 34 1 et n. 3.
el-Manjra, 317-3i8.
b. el-Mochattar, 403.
b. Mol;tammcd ez-Zammoql'Î, 1.05.
b. ZaIn el-<Abldin el-<Iràqi, 333 et n. 11.
el-Idrisi, '189, 398.
el-Ifrànî, s. Mo1;tammed e~-~aghir.
Ibn lkhlef, s. <Abd Allah b. Mol;tammed.
Imâm el-J:IaramaIn, 289 (n. , 120) .
lounôs b. SolaImàn e l-TamB, 401. /

el-Ioùsi, s. el-l;Iasan b. Mas<oùd, :\Iol;tammed b. Ia <qoûb.


Ioûsof b. <Abd er-R aJpnà n cl-Fàsi , 211 et n. 1.
b. Fajla ez-Zorqànl, 10:2.
b. lal;tià et-Tàdili Ibn ez-Zayy âl, 220-22i , 239, 251,397.
Aboû <Inàn, 403.
b. Mol)amm ed el-Fàsî Aboù'I-J\Ial;tàsln, 51, 102, 217 ( n. 1), 240-24t,
244, 255, 267 , 274, 276, 283, ~81.
b. <Omar, 396.
Pàchà , 153.
el-<Jràqî, s. <Abd er-RaJ:l.im b. el-l;IosaIn, Al:tmed b. MOJ:l.ammed, <Ali b.
Hàchim , Idri b. Mal)ammcd, Jdrîs b. ZaIn el-<Abidîn, el-Walîd b. el-
<Arbi, el-'Valid b. Aboû'l-Qàslm.
"IsA b. <Abd er-Ral;tmàn es-Sajlànî ou e -Saktânî , 260 et n. '1, 261 , 270,
392,402.
- b. ~Iol:lammed eth-Tha'àlibî, 263 e t n. 5.
cl-Isl;tâqî, s. l\fol;tammed b. <Abd el-Mo<p.
lsmà<ïl (Moulay), sultan <alawlle, 22 ,68, 72, 114, B5 , 121 , t22 , 123,124,
130,142, 145, 161 (n. 1), 175, 177, 180, '184, 188, 194 (Ll. 1 et 2), 216, 271 ,
283 , 284 , 2~5, 2J2, 293,296,297,298,304, 313, 3~7 , 345,368, 403.
<Jyyàçl., 14, 238, 246 (n. 2), '256 (n. 2), 303 (n. 4, 5°), 313 (n. 1, 20), 396.

Ibn Jàbir el-Ghassànî, s. Mol;tammed b. lal;tià.


el-Jàdirî, 291 (n. , 10°) .
Ja<far, fils d 'Ab@ù Tàlib, 201 (n. 1), 354.
b. Idrîs el-hattânî, 374, 379.
Ibn Jallàl , s. Mol;tammed b . <Abd er-Ral;tmàn
INDEX DES NOMS U'AUTEU S 427

el-Jàma<ï, s. el-<Arbi b. el-)lokhtàr, Mo1).ammed b el-<Arbi, el-Mokhlàr b.


<Abd el-)1alik.
cl-Jannàn, s. MoQ.ammed b. AQ.med.
Ibn J.a nnoùn, 360 (n. 2), 397.
el-Janwi, s. Riçl wàn b. <Abj Allah.
Jbn Jadr ech-Chananawfi, 393.
el-Jarîrî, s. Mo1).ammed.
el-Jarnidî, s. A1).med b. <Ali.
J:lssoûs, s. Gessoûs.
cl-J awzÎ, 393.
el-Jaznà'ï, s. <Ali.
el-Jazoûlî, 234, 214, ~76, 280.
Ibn Jelloûn, s. Mo1).ammed b. AQ.med, MoQ.ammed-el-Madani.
el-Ji:rârî, s. Mal;tammed.
el-Jiràwî, s. A1).med b. <Abd cs-Salàm.
Ibn Jobaïr, 396.
Jommoû" s. Mas<oûd b. ~loQ.ammed.
cl-Jorjànî es-Sayyîd, 14, 391.
Joûdar el-Wazîr, 402.
cl-Joûti, s. Mo1).ammed b. <Ali.

K<lhlàn b. Aboû Lowà cl-Awràbî, 191 ct n. j, :·HltS.


el-Kalà<ï, 313 (n. 1, 1°) .
Ibn el-Kalbî, 30 ct n. 1, 397.
el-Kammàd, s. MoQ.ammcd b. A1).med.
el-Karasî, s. Mol:tammed.
el-Kardoùdi, s. )IoQ.ammed b. <Abd el-Qàdir el-Golàli.
el-Karmàni, 395.
Ibn Kalhîr, 395.
cl-l atlànî, s. <Abd el-l:laï b. <Abd el-Kabir, <Abd ~r-Ra1).màn b. Ja<far,
Ja<far b. Idris, el-Mà'moûn b. <Omar, Mo1).ammed b. Ja<1'ar, et-l'ayyîb b.
Ma1).ammed.
Ibn Kh?chchàb~ :160 (n. 2).
cl-} hafàji, 71,79,393.
Ibn Khajjoû, s. Aboù1-Qà im b. <Ali.
Ibn Khaldoùn, s. <Abd er-Hal:)ll1àn, la1).ià.
Khàlld b. f:Iammà!'l en-Nù~i.ri, 351 (n. 3).
Kb.alil b. Aï.bak e~-~afadl, '25, 26, 51,.
b. Is1).àq, 14,16,146 (n. 7), 2~8, (n. 4, 1°) , 334 (n.).
Ibn Khallikàn, 25, 44, M, 1~7, 248, 396, 397, 398, 3~9.
Ibn Khàqàn, 77, 289 (n., 2ù ) , 291, 39L
Kharoûf, s. MoQ.ammcd b. Aboù'l-Façl.l.
el-l ha~à~Î. s. Qâsim b. Qàsim. .
Ibn el-Khat ib Lisàn cd-Din, 30 et n. 10, 94, 97 (n. 2, 2°), 165 (n. 2), 229 et
Il. 3, 386 (n.), 393, 394, 3U7.
428 LES HISTORIENS DES CHORFA

el-Khawinjî, 290 (n. 7, 3 0 ) .


el-Khayyàt b. Man~oùr , 403 et n. 1.
el-Khirchî, . :\Io1;tammed b . <Abd Allah.
Ibn Kîràn, s. eI-<Abbàs , Aboù Bakr b. c!-Tayyib , Mo1;tammed e!-Tayyîb
b. <Abd el-Majîd.
el-I onU , s. el-Mokhtàr.
eI-Koùhin, s . <Abd cl-Qàdir b. Al}med , \ \bd c r-R~l:tmàll.
el-Koûmî, s. IIànl b. Ma~doCIl·.

Bent Ibn Lajjo , 139.


el-Lamtî , s. 'Olhmân b. <Abd el-'Và1;tid.
Loùzireq, s. <Omar.

Ibn 1a<an el·Andalo 1, s. A1;tmed b. :\Ial.1a mmed, Ma1;tammed b. Mol).am-


med.
eI-Ma<arrî Aboù'I-<Alà, 270.
el-Machchàt, s. Idris b. el-<Arbî.
el-Machrafi, s. el-<ArbL
eI-Ma<dànl, s. el-J:Iàsan b. Ra1;t1;tàl , :\Io1;lammed b. <Amir.
Aboû Madian el-Ghawlh s. Cho<aïb b. el-f:Iasan.
b. A1;lmed cl-Fàsî, 321 (n. 2) .
b. Ma1;lammed eI-Fàsi , 32i (n. 2) .
el-Mal:talli Jalàl ed-Dîn , 14, 291 (n., 90).
Aboû 1al,lallî, 391, 398.
Ma1;lammed b. <Abd el-Qàdir el-Fàsî, 277 , 283, 295, 30'1, 309.
b. <Abd er-Ra1;tmàn el-<Alawî, 379 et n. 6, 380.
el-Fâsî, 1 t3, 295, 3'18, 393.
b. <Abd es-Salâm Bennânî, 312-313, 318, 320, 330,336, 337.
b. A1;lmed b. Ioûsof el-Fâ sî, 273 et n. 4.
b . Ma1;lammed el-Fds î, 303, 318-319, 335.
Ibn el-T:Iàjj, 345 e t n. 2.
Mayyâra, 14, 52, 258-259, 263, 266, 298 (n. 4, 20).
308, 392, 398.
b. <Ali el-Manalî ez-Zabâdî, 334-335.
b. el-<Arbî ech-Charqî, 296, 403.
Ibn <Atîyya, 292 et n. 4.
b. Aboû Bakr ed-Dilà'ï , 104, 244, 299 et n. 2.
ech-Chaïkh el-:\iahdi (sultan sa<dien), 89 (n. 2, b), 133, 134.
138, 236 et n. i, 400.
b. ech-Charîf (sultan <alawite) , 124, 178, 216.
el-T:Iàjj ed-Dilà 'ï, 300 et n. 3, 339.
b. eI-~Ia s an , 105 el n. 2.
b. Ibràhîm Ibn <Abbàd, 314 et n. 6.
b. Ioûsof eI-Fâsî , 241. (n. 5) , 403.
el-Jiràrî, 358, 365.
Ii'iDEX DES NOMS D'AUTEURS ·429

Mal)ammed b. el- i hayyà~ ed-Dokkàlt Ibn GhâzÎ, 306 et n. 3, 337.


b. Mol).ammed Lbn el-Faqîh, 3H ct n. 4, 312.
Ibn Ma<an el-A.ndalosÎ, 267 et n. 5, 273, 215,
304.
fayyàra el-l;lafid, 318 et n. 9.
Ibn Nà~ir, ~63, 270, 29i et n. 4, 3t)3, (n. 1, -} O).
b. Qàsim Gessoùs, 320 et n. 5, 326, 333, 334.
b. Aboù'l-Qàsim ech-CharqÎ, 330 et n. 1.
es-Sijilmàsî, 334.
b. Tâhir el-I-Iowwârî, 141 et n. 5.
ct-Tàlib b. l;Tamdoûn Ibn el-lfâjj, 342-345 , 378, 3~0.
Ial).boùba, s. Mol).ammed b. <Abd el-<AzÎz.
cl-~1ahdl el-Ghazzâl, 296 et n. 8, 328, 403.
el-l;Iakkâk: 404.
b. Mol).ammed ed-Darqâwî, 376 et n. 2.
~Ial).moùd Pàchà el-<EuIj, 402.
Zarqoùn, 251.
Majbar , 281.
el-Majdhoùb, s . <Abd er-Ral).mân.
el-Majjà~î, s. Mol).ammcd b. el-J:Iasan.
el-Makkoûdî, 13, 91 (n. 2, 1°).
el-MaklàLî, s. Mol),ammed b. Al)med.
el-MaIal)afî, s. J:Iamdoùll.
Màlik b. Anas, 14, 336.
Ibn Màlik, 13, 289 (n., 7°), 291 (n., 8°).
el-Mallàlî, s. Mol).ammed.
lbn Màmî, 403.
el-Mà'moûn ech-Chaïkh (s ultan sa<dien), s. ech-Chaïkh.
b. <Omar el-Kaltânî, 378-379 .
el-Manâli ez-Zabàdî, s. <Abd el-Majid b. <Ali, Mal)ammed b. <Ali.
MandoLI~a, s. <AIL
el-.1 anjoùr, s. Al).med b. <Ali.
el-Manjra, s. <Abd cr-Ral)màn b. Idris, Aboû Bakr b. Idris, Idris b. Mal;tam-
med.
Man~oùr Ibn tfarzoùz, 160 (n. 1) .
cl-Maqqarî, s. Al)med b. Mol),ammed.
cl-Maqrîzî, 361 (n. 2), 395, 3~7.
cl-Marghîthî, s. Mol).ammed b. Sa<ïd.
cl-Marînî, s. Mas<oùd, Mol)ammed et-Tayyîb b. Mas<oûd.
cl-Marîyyî, s. Mol).ammed <Ali.
cl-Marnîsî, s. Al).med b. Mal;tammed.
cl-Marwazî, 394.
Ibn Marzoûq, 397.
el-Kafîf, s. Mol).ammed b. Mol)ammed.
Mas<olid cch-Charràt, 282.
430 LES HISTORIENS DES CIIOIWA

Mas'oûd el-Marini, 296.


b. Mol;tammed Jommoù', 296 et n. 2.
el-Mas'oûdt~ 30 et n. 3, 397.
el-Massàri , s. MoJ:tammed b. Al;tmed.
el-Matmàti , s. Sàbiq b. SolaImàn.
cl- Matràvl, s. <Abd er-Ral).màn.
el-Matràzi, s. Mol;tammed b. Aboû ZaId.
Ibn MatroûJ:t, 360 (n. 2), 397.
el-Mawàsî , s. AJ:tmed b. 'Ali.
Mayyàra , s. MaJ:tammed b. Al;tmed, Mal;tammed b. Mol;tammcd.
Méhémet Efendî, 329. .
el-Mizwàr, s . 'Abd el-'Aziz b. Sa 'ïd, I:Tamdoûn , Mol)ammcd.
el-Mizwàrî , 405.
Mo'awîyya , 26. .
)![obàrak b ; 'Omar el- Asa fî , 378 (n. 2) .
Ibn cl-.\lobàrak, 404.
el-~1odarra' , s. Mol.lammed.
Mol;wmm ed (Moula y), -viûr d ' el-~an~oûr , 126.
b. 'Abd Allah (s ultan 'alawite) , 39, 95 et n. 2, 142 , 146 (n. 6),
149 , 150, 151,1 52, 'J 55, 156, -158 (n. 2), 160 (n. 2),
162 , 172 , (n. ), 17 ;-$ et n. 2, 177 , 178 , 180 , 183 , 184,
188 , 201 , 328, 329, 403.
el-J]abp , 234.
el-T;lawwàt , 337 e t n. 1.
el-Khirchî, 14, 283 et n. 2, 294 , 290.
dit el-Masloùkh ( ultan sa'dien ), 7J , 129, 23;{,
401.
cr-Ragràgî, 90, 252 et n. 4, 402.
c~-~affàr, 405.
es-Samarqandî, 395.
es-Sijilmàsî, 270 et n. 2.
es-Soùsî , 290 et n. 6.
b. 'Abd el-' Azîz 1al}.boùba, 352 e t n. 1.
b. 'Abd el-Karîm el-'Abdounî, 331.
el-Hazmîr.î , 223 ctn . 3.
Ibn 'Abd el-MoD ' im el-1:Iimiarî , 361 e t n. 2, 396.
b. 'Abd el-Mo'~i el-lsl;tàqi, 393.
b. 'Abd el..:Qàdir b. Mal).ammcd ech-Chaïkh, 23 ;~ , 401.
el-Golâlî el-Kardoûdî, 217 e t n. 1.
b . 'Abd er-Ral).m à n (s ultan 'alawite), 84, 207 , 208 , 209 (n . 1),
349, 368, 369, 405.
Ibn Jallàl , 101 et n. 8.
es-Sijilmàsî, 401.
b. 'Abd e -Salàm erJ,-l)o'ayyîf er-IUbà~Î, 39, 142, 213-2f5.
cl-Fàsî , 147 et n. 6, 335, 337.
INDEX DES NOMS D'AUTEURS 431

Mo1;tammed b. 'Abd el-Wahbàb Ibn Ibràhîm ed-Dokkàlî, 259 et Il. 2.


el- Wazîr el-Ghassânî, 66 (n. 3), 28-4-286 ,
304, 328, 029,403.
b. 'Abd el-Wà1;tid Ibn Soûda, 380 et n. 3.
b. Al)med b. Aboû <Afîf, 2~8.
el-<A'ïdi, 302 et n. 1.
Alœnsoûs, 24, 26, "29, 30, 31, 62, 63, 61, 69, 70, 77,
90, -142, 143 (n . '1), 182, 198 (n. 1), -199, 200-2i3 ,
~16, 217, 353,354,357,362,363,367,368,395,398,
401,.
el-<A.lawî, 403.
Bennàni, 198 (n. 1) .
Bennis, 335 (n. 9) .
Ibn Ghdz î , 5 (n. 2), 14, 71, 83 (n.), 160 (n. f ), 224-
230, 254.
el-Iussilnî, 89 et J1. 1, 90.
b. <Isà, 40l.
el-Jullnàn, 260 et n. 5, 265.
Ibn Jclloûn, 332 et n. 5.
e l-Kammàd cl-Qosan~îflî, 288 et 11.2, 296 , 301 , 30;),.
309, 312.
el-Maklàlî, 98 et fl. 4, 393.
el-Massàrl, 89 (n. 2, f ), 102.
er-Rahoùni, 199 (n. '1), 333 eL J1. 14, 336.
. el-Tammàq, 3i8 et 11. 7, 333.
b. <Ali el-Sngarp, 400.
_ Ibn 'Aslwr, 27, (io, 79 , 83 (n.), 187, 210, 227 , 231 -237 t
240, 2JO, 307, 312, 391, 392, 394, 397 , 398.
Ibn 'AU ed-Dokkàli c'-Salàwî, ~51 (n. 1), 366 (n. 5).
b. <Ali el-Fichlati, 97-98 , 39 ;~, 4U1.
el-Bawzàli, 101 (n. 2),401-
el-Joù~i , Hl.
cl-~1arîyyi, 245 et n. 6.
Ibn <Odda, 89 (Il. 2, g).
el-Wajdl, 401.
el- Warzàû, 3i8 (n. 3), 333,336.
el-Amin Palamino er-ltibàp, 2H>'
b. 'Amir el-Ma'dàui, '198 (n. 1), 20i ct n. 2.
b. 'Amr ez-Zarwàli, 202 et D. 1, 333.
el-'Arbi Bordora , 288 et n. 1, 306 , 309, 312,403.
cd-Dal'qi:lwi, 342 el 11. 1, 3~3 (n. 8), 3i6.
el-'Arbî e l-Fu~î, 21, 74, 244-247 , 260, 265, 392, 393, 397, 398.
399.
el-FichLali , 2ii el n. 2.
b. el-'Arbi el-Jàma'ï, 405.
432 LES HISl'OllIENS DES CIIORFA

~101;tammed el-<Arbî el-Qâdirî, 275-276, 277, 281, 282, 301, 393.


b. el-<Arbî Qa~~àra, 198 (n. '1).
el- <Arbi b. es-Sâ'ïlJ, ech-Charqî, 377.
el-<Awfî, 401.
el-<Ayyàchî (mojàhid), 124, 281, 347, 348.
el-Miknàsî, 403.
b. Aboû Bakr eL-IJarj,ramî, 220 , 222-223.
el-Idz ighî, 201, 339 (n. t ), 343.
el-Bakr1 c~-~iddîqî, 30 (n. 6).
el-Bokhàrî es-Salà wi, 404.
el-Boû <a~ami, 297.
b. cch-ChàdhlJi el-I:Iammoûmî, 373 el n. 7.
b. ech-Chàhid, 150 (n. 1), 404.
ech-Chaïkh el-A.~ghar (sultan sa<dien), 13;1, 136, 402.
ech-Chà~ibî, 27 (n. 3), 394, 395, 396.
Choqroûn b. A1;tmed b. Abî Jam<a el-vVihrànî, 226 ct n. 7.
b. Aboû'l-Façll Khàroûf, 90 (n., i).
e~-~abbàgh, 228.
GharrîL 405.
b. l:Iaddo ed-Dokkàlî, 403.
el-1:Iàfi, 404.
el-l:Iafnawî, 317 et n. 4, 321.
el-l;làjj ed-Dàwoûdi et-Tillmsànî, 379 et n. 5.
el-1:Iakmàwi, 404.
b. T:!amdoûn Ibn el-1:Iàjj, 343 et ll. 1,369.
b. 1:Iamza el-Miknâsî, 327.
b. Hannoû el-Iàzlghî, 198 (n. 1).
b. el-l:lasan Bennànî, 16, f46 et n. 7.
el-Majjà~î, 403.
el-1:Ioloû el-W a ~tàsî, 226.
b. el-~Iosaïn el-Gcndoùz, 317 et n. 2, 318, 320, 333.
e~-~aghîr el-A wràbî) 225 et n. 5.
b. lal).ià Ajànà el-Oûrikî, 40~.
Ibn Jàbir el-Ghassànî, 228, 229 (n. -1).
el-Qaràfi, 2ô, f02 et n. 8, 254 (n. 1), 393.
b. la<qoûb, 297.
el-Ioûsî, 391, 401.
b. Ibràhlm el-An~àrî, 397.
Ibn el-Dokkàlî, 16, 404.
b. el-Hachtoûkî, 270 el n. 7, 403.
es-Sabâ<ï, 372.
b. Idris ez-Zammoûrî, f84 et n. 1, 203, 210, 40~.
b. Ioûsof et-Tamlî, 260 et n. 8.
ez-Zîyyàlî, 243 et 11. 3.
b. <Isâ, 97, 392.
'-

INDEX DES NOMS D'AUTE RS 433


Mol).ammed b. Ja<far el-Kqlldnî, 21, '143, 166, 219, 210, 2;$S, 281, 282, 283,
30~, 30S, 312, 315, 331, 346, 350, 379-384, 387.
el-Jarirî, 353 (n. 2).
cl-Kabir cs-Sarghinl, 3i9 el n. 3, 320, 334-
el-Kara i, 232.
b. Aboù'l-Ma<àlî Ibn Sammàk, 386 (n. ).
el-Madanî Gennoûn, ;)72, 373-374.
b. cl-)Iadani Jbn Jclloùn, 380 el 11. 2.
b. Mal).ammcd ed-Dorrîj, 222 et n. 3, 305 el n. L
el-Mahdi el-Fâsî, 273-275 , 276, 283 , 288 , 304, 392 , 393 , 398.
Ibn el-l,làjj , 374 et n. 7, 380.
Ibn el-QâcJ,î, 34i- 342.
el-)lakki b. el-Bachîr es-Salà"Î, 3;$9.
el-Bi~àwrî, 353 (n. 2).
ed-Dara<i, ~6, 116 , 3i5 -3i6, 35~.
Ibn Nà~ir ed-Dilà'ï, 303 (n. 6) .
b. ~1àlik el-Jazà'i:ri, 164 el n. -1.
el-MallàH, 253 (n. 3).
Ibn Man~oClr ech-Chaft:hâwanî, 198 (n. 1), 202 et n. 2.
el-Masnâwi ed-Dilâ'ï, 301-302 , 303 , 304, 305, 306, :-:109 , 3 1':2,
318, 391, 393, 395, 398.
loreno , 214.
Maswàk et-Tàzi, 166 et n. 1, 374.
el- Iizwàr, 270 el n. 6, 402.
b. Mobàrak el-Hachloûlâ, 376.
el-Modarra<, 80, 304-305 , 311, 320.
b. Mol).ammcd Ibn Aïchoûn ech- Char/'ât, 73, 276, 280-283 , 304,
392.
Ibn <.'..l'afa, 290 , ·3 13 (n.1 , 8°) .
Baghio<, 2~1 el n. 3.
el-Bou<inànî, 2;$9 et n. 3
ech-Cha"lkh el-Borloqàlt (s ultan waHàside),
2~7 et n . 2.
ed-Dilâ'ï, 302-303 , 318, 319.
el-Fichî, 238 ct n. 4.
Ibn el-f:làjj el-<Abdarl, 381 (n. 2) .
el-J,larrâq, 343 et n. 8, 346.
el-:\lakkî cd-Dilà'ï, 303(n. G) .
Jbn )Iarzoùq el-h. afif, 226 et Il. 1.
Ibn el-Mowaqqil, 26 , 28, 31, 46 (n. 1), 118 ,
385.
es-Sijilmâsî, 310 (n. :».
Ibn Soùda, 402.
el-Tajmoù<lî, ~no et n. 4.
eFfanjî, 21;) cL n. 3.

28
434 LES IIISTOnIE~S DES CHOHFA

MoJ:léImmcd b. Mo1)ammed Iun Tijldl el-fla.:mîn', 223-224.


el -~loràbit b. Mot)ammed ed-Dilà 'i, 'i70.
el-Mo'~à ech-Cllarqi, 1 J9 ct n. 2.
b. "Jol.wmmed e - :éUil~ cch-Charqî,119 ( Il. ~ ), 330 el
n. "..
en-Naf ez-zakîyya , 278.
b. Nà~ir, 328.
b. 'Olhmàn el-l\1iknà î, 1;53 ct 11. 1, 404.
b. 'Omar ech-Chàwl , 101.
-;- e1-Mokhlàrî , 233.
b. Qàsim el-Qa~~àr , toi et Il. 4 , 2~4, 21;) , 394.
- el-Qawrî , 21:5 et n. 4.
- Ibn Zdku ùr , U:3 (n. 2), 287-290, 206, 31:2, 357 , 36 1_
b. Aboù'l-Qàsim es-Sijilmàsi cr-RibàP, 213 cL n. 4-,
b. Rachid, 233.
cr-HaholIOÎ, 404.
er-Rifà'I, 286.
Ibn Sa'd el-TilimsànÎ , 379 ct n. 3.
b. e~-$àdiq Tbn Raisot'ln, HI8 (n. 1) .
ffi-$aghir el -lfrdnî, 3, 21- , 40, 58, 63, 65 , 66 (n. 4), 69, 70 , 72 ,
77, SO , 95 , 97 , 99 el n. 2 ct 3, 106 , 108, H2 - i3t , -, 3:2, 133,
13;5, '136, 140, 142, 173 , 174, -l77, 178,191,193,207,208,
211 , ~12, 217, 220 , 240 , 2;57,282 (n. 4),295,298, 306- 309 ,
315, 3~2, 3~;), 357,361 , 3GG, 367 , 387 , 391 , 393, 391-, 395,
396 , 397, 398.
SaJ:tnOI'1I1, 147.
b. Sa'Id el-lIJarghîthî, 14, 258 , 260-262 , 270, 391.
- Qaddoùra , 288 et n . 5.
es-Sà'ïl:l el-Andalosî er-Ribàp, 79 .
q- .' àli\:l ech-Charqi, H9 et n. 2, 298 .
~à1il:l cr-HiçlawÎ, 74 , 313 et n. 9.
Skircj , -150 (n. 1), 404.
b. olaimàn , 297, 403.
el-Tdwodi b. ckTàlib Ibn SOllda, 332-334,336,337,338.
ekTayyîb b. 'Abd el-Majid Ibn Id ràn, 333 cL n. 10, 310.
el-'A lamî , 295-297 , 3::18.
ed-Darqàwî, 31~ (n. 2).
el-Fdsî, 283- 284 , :10:2, 393.
b. cl-Jamanî Abol'I 'lchrin, 208 et Il. 2, 210, 405.
b. ){as' oùd cl-Marini, 40~.
b. et-TaJ'yîb el-Qddirî, 16, 2G , 72 , 73 , 75, 78, 98, 1'16 , 146.
208, 216, 217 , 220 , 2'.6,257, 258, 280, 308 , 317, 3i9 326,
337, 3~ l , 3p9 , 3G6, 387, 396, 398, 399.
el-Tohàmi e l-~T ammàdî, 2f 7 (n. 1), 343.
b. Aboù Zaid cl -M a~ ràzî, 400.
INDEX DES NOMS D'AUTEURS 435

Mol).ammed b. Zarroûq, 361.


el-Mohibbi , 398.
el-Mojràdî, 13.
Mokhfi ( idi '1-), 383.
el-~ol hlàr (chambellan), 404.
b. ' Abd el-Malik el-Jàma'ï, 405.
el-I onti , 341.
cl-Mokhlàrî, s. Mol).ammed b. 'Omar.
el-Monàwî, s, 'Abd er-Ra 'oûL
el-Moràbî , s. Ai).med b. Moùsà.
Moreno, s. Mol).ammed cl-Masnâwi.
Morlaçlà ez-Zabîdî, 333 et n. 7, 390.
el-)Io~bài).î, s. 'Ali.
Moslim , "l1.
el-Moslaçlt b. Ismà'ïl (prince 'alawite), 293 (n. 4).
el-)1otanabbî, 210, 352.
Moûloùd el- vYazîr, 401.
Moûràd III (sultan de Turquie), 99 el n. 2,107 (n. 1).
Mou sù b. Aboù'l-Afïyya el-MiknâsÎ, 101 el n. 1, 11i.
b. Al).med, 405.
el-Batpwî, 402.
el-Jawll, 215, 279.
b. boù Jmàda el-'_\.mrî , 400.
b. Mol).ammed el-Kabîr Ibn Nà~ ir ed-Dara'ï, 3U.
b. Mo1:tammed el-J\Iakkî Ibn Nà~îr ed-Dara'ï, 315 et n. 3.
Ibn cl-~Iowaqqil, s. Moi).ammed b. Mol;tammed.
el-Mlhiwi, s. 'Alî b. 'Abd Allah.

Aboù Nàfi' , s. Al).rued b. Mol).ammed.


en-Nà~ir (prince sa'dien ), 196.
b. 'Ali Ibn Chaqrà , 401.
Ibn ~à.ir , s. Ai).med b. Mai).ammed, l;Iosaïn, Ma1:tammed b. )Iol).ammed,
Mol.lammcd cl-Ylakki, l\1oùsà b. Mo1:tammed el-Kabir, ~Ioùsà b. Mol)am-
med el-Makkî.
en-Nà~iri, s. Ai).med b. Khàlid, I\.hàlid b. ~Iammàd.
en-l awawî, 14, 3M (n. 2), 395.
Nizàr el-Azîz b. el-Mo'izz, 127.

el-Obbî, 391.
Ibn 'Odda, s . Mul).anlmed b. 'AH .
el-Ojhoùri, s. 'Ali b. A1:tmed.
el-'Omaïrî , s. 'Ali b. Aboù'l-Qà im , Aboû'l-Qàsim b. Sa'ïd, Sa'ïd b. Aboù'l-
Qàsim.
'Omar b. Abd Allah el-Fà i, 16, i47 et n. 1, 337.
- el-~Iahàq, 296, 403.
436 LES HISTORfENS DES CIIORFA

'Omar Loûzîreq, 11)3 et n. 1, 404.


b. MoJ:,:tammed es-Soùdî, 49 (n. 1).
b. Qàsim 'Alîlich, 403.
el-Waqqàch,403.
ez-Zajanî, 31'1 (n. 4).
'Olhmân (Aboù Sa'ïd), sultan mérinide, 365.
b. 'Abd el-' VàJ:,:tid el-Lamtî, 89 (n. 2, e).
el-Oûzgnî oûld Mawlàt en-nâs, 401.

Palamino, s. Mol).ammed cl-Amin.

el-Qabbâb, s. 'Abd Allah b. el-~Iosaïn.


Qaddoûra, s. MoJ:,:tammed b. Sa'ïd.
Ibn el-Qàc;Iî, s. Abd er-RaJ:,:tmàn b. Aboû'l-Qàsim, AJ:imed b. Mol).ammed,
Mol;tammed el-Mahdi, Qàsim b. ~Iol.lammed.
QàgÎ 'l-J:.:tâja (Sidi), 383.
cl-Qâdiri, s. 'Abd es-Salàm b. el-l\.hayyà (, 'Abd es-Salàm b. ct-Tayyîb,
Al:nned b. 'Abd el-Qâdir, lIàchim b. Mol.lammed, MoJ:,:tammed cl-'Arbi,
MoJ:,:tammed b. ckTayyîb, Tàhir. b. 'Abd es-S alàm .
Qâdoùs, s. el-'Arbî .
cl-Qala~àdî, 14.
el-Qaràfi, s. MO\lammed b. IaJ:.:tià.
Qàsi m 'Alîlich, 401.
b. MoJ:,:tammed Ibn el-Qâçli, 393.
Ibn RaJ:.:tmoùn, 374 cL IL 1.
b. Qàsim cl-Kh a~à~î, 273 et n. 6, 276, 321.
ez-Zarhoûnî, 138, 400, 401.
Aboû'l-Qàsim b. A1,lmcd e:::-Zayyânî, 2, 16, 23 , 26, 29, 61, 62, 64, 66 e
n. 4, 67,68,76,77,78,82,140 ( Ll.1), 1.42-1.99, 206, 207,
208 , 2J 2, 215, 217, 326, 328, 329, 350, 353, 357, 360, 362,
363, 387 , 394, 396, 397, 398 , 399, 40 L
b. 'Ali ech-Châtibî, 93 (n. 1).
Ibn Kllajjoù, 227 el n. 1, 232.
el-Fichtàli el-Ghoûl, 260 et n. 6.
el-T;Iasanî, 232.
b. IoJ:.:tammed Ibn Abî'n-No'aïm el-Ghassànî, 90,252 cl n. 2,
256, 259, 265, 402.
b. Qâsim Ibn Soûda , 243 et Il. 5, 402.
b. 'a'ïd cl-'Omaïrî, 315 eL n. 2, 40q.
cz-Zammoùri, 151,404.
cl-Qa~~àr, s. MoJ:,:tammed b. Qàsim.
Qa~~àra, s. 'Ali b. Idrî , Mo1,lammed b. el-'Arbi.
el-Qawrî, s. MoJ:.:tammed b. Qàsim.
cl-Qazwînî, 14, 29'1 (n., 6°).
Ibn Qonfoûdh, s. AJ:.:tmcd b. J:fasan.
INDEX DES ;'o\OMS D'AUTE RS 437

n Qotaïba, 395.

-Rachchàti, 394.
r-Rachid ($ultan <alawite), 72, tH (n . 2), 122, 124, 180, 184, 194 ( n . 1)
195 (n. 1), 269, 273, 300, 339, 402.
b. <Abd er-Ra1).màn (prince <aIawite), 203.
'r-Ràchidî, s. <Ali b. <lsâ.
r-Ràghib el-lsbahànî,
r-Ragràgî, s. Mo1).ammed b. <Abd Allah.
Ra}:l1).o el-Ghannàmî ech-Châwî, 308 (n. 4), 39t.
Ibn Ra1).moùn , s. Qàsim b. Mo1).ammed, et-To1).âmî b. Mo1).ammed.
er-Rahoùnî, s. el-<Arbî, Mol:)ammed, Mol;tammed b. Al;tmed.
Rà,olS er-roû'asà, 25-27, 3'16.
Ibn Raïsoùn, s. Mo1).ammed b. e. -~àdiq.
Ibn er-Raqîq, 30 et n. 4.
er-Rasmoùki, 13.
e.r-Ràzi, 397.
cr-Riçlawi, s . Mol:)ammed ~âli}:l.
Riçlwàn b. <Abd Allah el-Janwi, 238, 255 et n. 2.
el-<Eulj, 40L
Rifâ<a Bek et-Ta1).\âwî, 397.
er-Rifà<ï, s. A1).med, Mo1).ammed.

es-Sabà<ï, s. Mo1).ammed b. Ibràhîm.


Ibn e~-:?abbàgh, s. Aboû'l-Façll, Mo1).ammed b. Aboû'I-Façl1
Sàbiq b. Solaïmàn el-MatmàP , 146 et n. 4, 191, 395.
cs-Sabti, s. Aboû'l-<Abbàs. °

es-Sa<d, s. et-Taflàzànî.
Sa<d b. Mo<àdh, 27.
e~-~adafi Aboû Chobaïb, 397.
es-Sadràtî es-Salàwî, s. A1).mcd b. el-Makkî
eê-~afadî, s. Khalîl b. Aïbak.
e~-~affàr, s. Mo1).ammed b. <Abd Allah.
Sahl b. el-Qàsim Ibn Zaghboûch, 229 et n. 2.
Sa1).noûn, 6. Mo~tammed.
e~-~a1).rà wi s. Mo1).ammed el-Amin.
es-Sà<"l, 135.
Sa<ïd b. <Ali el-J:Iomaïdî, 400.
ech-Chlîl). el-Jazoûlî, 150 (n. 1)~ 404.
b. el-Iazîd (prince <aIawite), 202.
b. Aboù'I-Qàsim el- <Omaïrî, 293 ,312, 396, 399.
es-Soûsî, 198 (n. 1).
Ibn Sa<ïd, 189, 397.
Saïf b. <Omar, 29 et n. 5.
es-Sajlànî ou es-Saklàni, s. <lsà b. <Abd rr-Ral).mân..
,
438 LES HISTORIENS DES CHORFA

c~-Sakkàkî, H.
cs-Salàsî, s. 'AH b. '.\..bd er-Ral).mân.
~àlil). (Salah-Raïs), 134.
Aboû Mol).amm ed ~àlil). cd-Dokkàli, 221 et n.3.
- el-Ilaskoûri , 221 (n. :~) .
'àlim b. ~1ol).ammed es-Sanhoûrî, 102 et n. 6.
es- à/imî, s. Al).med b. 'Alî.
cs-Samarqandî, . Mol).ammed b. 'Abd SHah.
es-Samlàlî, s. 'Abd er-Ral,lmàn b. la'qoClb.
Tbn ammàk, s. Mol).ammed b. Aboû'l-Ma'àlî.
~anhàj, 146.
es-Sanhoûrî, s. Sàlim b. Mol).alOmed.
es-Sanoûsî, 14, 91 (n. 2, c), 290 (n. 7, 10).
e~-~aqallî, s. A.l,med b. Mal).ammed, e1-IIàdî b. Al).rned.
es-Sarghînî, s. Mol).ammed el-Kabir.
es-Sarràj, s. Ial).ià b. Mol.lamm ed.
c~·~awma'ï et-Tàdilî, s. ' Abd er-Hal).màn b. Jsmà'ïl , Al).med b. AboLl'l-
Qàsim.
lbn ~awwàl , 34~ (n. 3).
cs-Sijilmàsî, s. 'Abd Allah , 'Abd el-Wàl).id b. AI,med, Al).med b. 'Abd el-
Malik,At).med b. Mobàrak, 'Ali b. ez-Zobaïr , Mal).ammed , Mol).ammcd
b. ' Abd .Ulah , 'fol).ammed b . ' .\..bd e r-Ral).màn , Mol)..ammed b. Mol).am-
med , ~101,ammed b. Aboù 'l-Qàsim.
Jbn Sînà', 289 (n., H O) .
Sinàn Pàchà, 136.
Skîrej, s. Al).med b. el-'Ayyàchî, Mol).ammed.
e -Sobkî Tàj ed-Din , 1~ , 40 e t n. 4, 394.
es-Sohaïlî, s. '.\..bd er·H.al).màn b. el-h.h atîb.
Solaïmàn b. 'Abd el-Qàdir ez-ZarhoûnÎ, 402.
b. ' Abd er-HaJ:tmàn (prince 'alawite), 203.
b. \[ol).ammed (s ulta n ' ala wile), ;{9, 152, 156, 161 , 165, 17'1 , 1 ï7,
181 , 1Sa, 184, 188 et n. 2, 193, 198, 202, 203,
206 , 335, 337,339, 34;), 369 , 404.
el-~-Iaww â t , 70, 75, 113. 1 J4 , 121 ct n. 1, 198,
(n. 1) , 301 , 306, 326 (n. ), 333, 336-340.
Soqquïll, s. 'Abd cr-Ral).mân b. 'Ali.
Ibn Soûda, s. el-'.\..bbàs b. Al).med, 'Abd el-vVàl,l.id b. Al:llued, At).med b.
Mol).ammed el-Tà:w odî, MoJ,ammed b. ' .\..bd el-WàJ:!id, Mol,l.amm ed b.
Mol).ammed, Mol).ammed et-Thvodi b. eVfàlib , Aboû'l-Qàsim, ek
'fàlib.
cs-Soûsî , s. Al).med oû 'Ali, Mol)..ammed b. 'Abd Allah.
es-Soyoûti Jalàl ed-Din, 24, 25, 29, 80 (n. 1) .

ct-l'abari, 29 el n. 5 et 6,60, Iii , 397.


cL-Tabbà', s. 'Abd el-'Azîz b. 'Abd el-T;Taqq.
INDEX DES NO~IS D'AUTEUHS 43~

Tàdilî, . Toùso f b. lal;1ià , e~-~awma'ï.


kTàhir b. ' .\.bd es-Salàm eJ-Qàdid. 30-2.
es-Salàwî, 401,.
cl-BcnnànÎ,1,04.
Vfàhirî , s. t1arndoùn b. ~Iol~ammcd.
~t-Taftàzàllî (cs-Sa'ù), '14, 290 (n. 7,5°), 291 (n. , ; 0).
~t-Tajmoû'ti, s. 'Abd el-~alik b. Mol).amrn cd, ~Iol;1 :1mmed b. Mol;1ammed.
~l-Takroûri, 3!J2, 398.
eVfàlib Ibn oùda, 198 (n. -1).
~t-Tamgroûtî, s. 'Ali b. Mol;1ammed.
~t- Tamlî, s. loùnos b. Sola"lmàn,1Iol;1ammed b. loÙ so C.
Aboû Tammàm, 21-1, 270, 2~9 (n., 3°), 352.
et-Tammâq, s . .\1ol;1arnmed b. Al;1med.
et-Tanasi, 30 et n. 8,395.
~FfanjÎ, s. Mollammed b. Mol).ammed.
cl-Tastàwat1, s. 'Abd el-Qàdir.
et-Ta~àfî, s. Aboù Bakr b. el-l;Iasan.
et-Tawàti, s. ' .\.bd es- alàm b. Mol).arnmcd , Al;llned.
Jbn Tàwoda, 401.
ekTayyîb b. }[al).ammed el-Kaltànî, 378 et n. 7.
b. Mol;1ammed el-vVàzzànî, 326.
~t- Tàzî, s. ' _\.bd el-'Vahhàb, Mo/;lammed Maswàk.
elh-Tha'àlibî, s. 'Abd el-'Aziz b. Mol).ammed, ' Isà b. ~lol).ammed.
et-Tijjànî, s. Al;1med b. i\Iol:ta mmed.
Ibn Tijlà t, s. Mol).ammed b. \Iol;1ammed.
~t-Tilimsànî, s. Mol).ammed el-l:Iàjj ed-Dàwoùdi, ~lol;1amm e d [bn Sa'd.
el-Tinmàrtî, s. 'Abd er-Ral).màn b. \Iol;1ammed.
d- Tirmidhî , 14.
et-Tohàmî b. Mol;1ammed Ibn Ra~lmoûn, 279, (n.2). .
el-Wàzzânî, 326.

el-Wàdghîri, s. Idris b. 'Abd Allah.


Ibn Wahboûn, s. ' bd el-Jalil.
el-"\Vajdî, s. \Io~lammed b. 'AH.
el-Wajjânî Aboù 'Jmràn, 400.
el-vVajjàrî, s. Al).med b. ,'Ali.
el-Walîdb. cl-'Arbi el-'Irâq'i, 341, 373, 379.
b. Aboll'l-Qàsim el-'[ràqi, 147 et n. 3.
b. Za"ldàn (sultan sa<dien), 402.
el-Wallâlî, s. Al).med b. \Iol).ammed.
7
el-Wancharîsî, s. <Abd el-V\ àl).id b. Al).med.
Jbn el-Wannân, s. Al;1mcd.
cl-Wàqidî, 29 et n. 4,395,397.
e1- Waqqàch , s. <Omar.
cl-Waqqàd s. lal;1ià,
440 LES HISTOrUENS DES CHOR}<'A

cl· Warràq <Abd el-Malik, 360 (n. 2),307.


el-Warzàzî, s. Mo1;tammed b. <Ali.
cl-Wazîr el-Ghassànî, s. AJ:tmed b . <Abd el-Wahhàb, Mol)ammed
el- VV ahhàb.
el-vVàzzàni, s. <Abd Allah, <Ali b . .\.J;ltlled, ekTayyîb b. iol;tammed,
Tohàmi b. MO~lammed.

]bn Zaghboûch, s. Sahl b. el-Qàsim.


Ibn Abî Zaïd el-Qaïrawànî, 14, 16, 396.
Zaïdàn b. A1;tmed el-Man~oûr (s ultan sa< dien), 67, 253, 308, 402.
cz~Zajani, s. <Omar.
cz-Zakî b. Mo1;tammcd el-Hàchimî, 337.
Ibn Zàkoûr, s. <Abd el-} arim, Mot).ammedb. Qàsim.
Ibn Zakrî, 91 (n. 2, a).
Zammoûr b. ~àliJ:t, 397.
cz-Zammoûrî, s. IdrL b. 1Iol;tammcd, Jlol:lammed b. Idris , boû'l-Qàsim.
ez-Zaqqàq, s. <Abd el-\ ahhàb b. lo1;tammed, <Ali b. Qàsim.
Ibn Abî Zar' 2, 68, 122, 131, 289, 357,392, 394, 395, 396, 397.
ez-Zarhoûnî, s. el-<1\.rbî b. el-Hàchimi, Ibl'àhim b. <Abd el-Qàdir, Qâsim~
Solaïmân b. <Abd cl-Qàdir.
Zarqoûn, s. Mal;tmoûd.
ez·Zarwàlî, s. Mol;tammed b. <Amr.
Zayyàn, 146.
ez-Zayyànî, s. <Ali b. Tbràhim , .\.boù'l-Qàsim b . .U).mcd.
Ibn ez-Zayyàt, s. Ioûsof b. laJ:tià et-Tàdilî.
ez-Ziyyâtî, s. AJ:tmed b. Ioûsof, el-T~a an b. IOl! of, Mol,:lammed b . IoÛsoC.
ez-Zorqânî, s. <Abd el-Bàql b. loûsol', loûsof b. Fajla.
INDEX DES TITRES D'OUVRAGES

Les titres des ouvrages historiques et biographiques écrits au Maroc pen-


dant la püiode éludiée sont imprimés en italique.

Achraf el-wasà'ïl bi-roùàl ech-chamà'ïl, 32'1 (n. 4, 3°) .


el-Ajorroûmîyya, '12, 13, 16.
(commenlaire), 340 (n. 4).
(glose), 370 (n. '1, 4°).
(poème en imitation d') , 246 (11.1, 4°) .
Ajwiba (de <Abd el-Qâdir el-Fàsî) , 265.
(d'es-Sijilmâsî), .310 (n. 2, bO).
majmoû<a fi masà'ïl min el-fiqh wa'l-kalàm, 92 (n, j).
el-Alfiyya fi i~tilàl,l el-l,ladith, 14.
fi' n-naQ.w, 13, 16.
(commentaire) , 92 (Il , 11,).
(glose), 238 (n. 5), 370 (n. i, 3°) .
Alfiyyat es-soloûk fi wafayàt el-moloùk, '167,1,° .
el-'.\..mal el-fàsî (et commenlaire), 128, 213 (n. 4), 266 el n. 2.
er-ribàti, 213 (n. 4).
el-.\..màni 'l-mobtahija fi charl,l el-Monfarija, 3i6 (n. 4, 5°) .
A.ufa' el-wasà'ïl.fî ablagh el-kho~ab wa-abda<er-rasà'il, 28U (n., go).
el-Anîs el-motrib fî-man laqîtoho min odabâ' el-Maghrib, 296-2971 328.
Anîsal el-masâkin fî abnâ'Abî'l-Maf:Ldsin, 267.
el-Anwâr fî dhikr tarîqat es-sddât e~-~oûfiyydt el-akhiâr, 293.
es-sanîyya fî nisbal rnan bi-Sijilmâsa nlÏl1 el-achrâf el-mol),am,ma-
dîyya, 279 (n. 2) , 39'1, 395, 398.
<Aqida (commentaire d'e~-~oghrà), 14, 241, (n. 4).
_ (glose), 9'1 (n. 2, c et d), 17i (n. 4, 7°).
442 l,ES HISTORIENS DES CIIORFA

fI iLàb] el-arba'ïn l:ladiLhàn (commenLaire), 3H (n. 3, '10) .


11shal el-maqà~id li-f:tiliat el-machà'ikh wa-raf' el-asanfd el-wJqi'a fl ma/'-
wîyyat chaikhind 'l-wdlid, 281,.
Alhmad el-'ainain wa-noz hal en-nû::;in'Il fi m a nâ'jib el-akhoûwain Abt' Zaid
wa-Abî 'Abd Allah el-Haz ml'rîyain, 223-224 .
Athmad el-moqal fi mohimmat el-JomaI , 376 (n. 4, jO).
'Awârif el-minna fl' mandqib sayyîdl' -~Iaf:tammed Ibn 'Abd Allah molfyî 's-
sonna, 27~ .
•\. wçlal). el-masàlik wa-a hal el-maràqî ilà sibk ibrtz ech-chai:kh 'Abd el-Bàqi,
334 (n.).
el-A z har el-'âtiral el-an~ 'ris bi-dhikr ba'rf, ma~tâsin qotb el-Maghrib wa-lâj
madt'nât Fas, 380 .
A z hârel-bostân fi manâqib eeh-chaïkh Abi Mulfammed 'Abd er-Ralfmâll~
267,392.
fi tabaqât el-a'idu , 336.
el·Az hâr en-nadl'yya, 20B, ;j2~ (n. '1 ), 396, 399.
Azhàr er-riàçl fi manàqib el-qàçli ' ryyàçl , 391.
el-Azhàr eHayyîbat en-nachr fi'l-mahàdi 'l-'aclll', 3H (n. 2) .

Badà'ï' es-silk, 397.


Badhl el-monâ~aha fl' farf,l el-mo~âfalfa, 256-257 , 39 l, 392, 398.
Badî'îyya (commentaire), 289 (n., 60) .
Bahj el-qà~id bi-chal'l). el-Marà~id , 266 (n. 2) .
Bahjatel-asràr wa-ma' dan el-anwàr, ~~93 .
- el-majàlis, 394.
- en-nà~ir, 39:~.

BaJ:tr el-ansàb fi o~oùl el-achràf el-l).asaniyin wül-l:lO ai:llÎyîn bi'l-)lachriq


wa'l-Maghrib, 395.
el-Bal).r el-madîd, 336 (n. 3).
Bànat So'àd (commentaire), 246 (n. 2).
el-B<.trq el-màtir fi charl) en-nusîm cl-'àPl', lB5.
d-Bayân el-moghrib, 395.
el-Bidàya wa'n-nihàya , 395.
Bidàyat el-qodamà', 397.
el-Bodoùr erf,-rf,dwîyya ft"l-la'nj bi';;-sddJl ahl e:=-:=dwiyyat ed dild'l'yya, 51,
104, 338-339, 348.
Boghiat el-mostafid li-charlf Moniat el-morld , 377.
er-râ'ï fî't-la'rl'f bi'ch-chaïkh Abi 'Abd Allah Mof:tammed el-Makkî
ed-Dild'ï, 303 (n. 6).
et-~ollàb fi charl). Moniat el-l).ossàb, 230 (n. 2, 30) .
er-roûwàd, 30.
Boloûg h el-marâl11 bi'r-ri~tlal ilâ baUi'llah el-f:taram , 3 14.
Bostdn el-az àhirfi akhbdr ech-chaîkh <Abd el-Qâdir , 267.
el-Bostânel-jâmi' li-koll 'lOtl'~laSan wa-Ianll moslaf:tsanft' 'idd ba'rf, ma'dlhir
es-sol'an Mawlânâ 'l-~fasan , 3ït.
INDEX DES TITRES D'O VRAGES 443

el-Boslân e?--?arîf fî dawlal awlâd Mawldï 'AU 'ch-Charîf, 62, 6~, 78, 167 (2°) ,
168, 178, 179, 181, f82-f85, 206, 2ü8, :~57, 3~8, 362 , 394, 396,
397, 398, 399.

ech-Chamâ'il, 14.
ech-Chamaqmaqîyya, f50 (n. t) , 353 et n. "2.
eeh-Chaqrâtisîyya (commentaire), 216 (n. i , 8°).
Charaf eHàlib fi asnâ'l-matàlib , 98 , 247 (n. 5, 1°), 323.
ech-Charb el-mol},laq,ar wa's-sirr el-monla; ar fî mo'in ahl el-qarn eth-thâlith
'achar, 3i9.
ech-Charl) el-rno~awwal (commentaire du TalkhÎ~ el-miflàl).), 14.
(commentaire de la Kho\.ba d' ), 290 (n. 7, 5°) .
rKitàb] ech-Chifà', 14, 396.
(commentaire), 246 (n. 2), 303 (n . 4, 50) .
(résumé du commentaire d'AJ:tmed er-Roûmîlî), 313
(n. 1,2°) .
Chifà' cl-ghalîl fi l:tall moqafl Khalil, 2:-10 (n. 2, 15°).
- el-gholla wa-inqicha' e. -~al).àba 'an l).okm ech-chokr awwal el-milla
wa-tanzîh e~-~ahàba, 274 ( n. 1).
Chodhoûr edh-dhahab fî khaï,. nasab, 279 (n. 3) .

Dà'ï 't-~arab bi-ikhti~âr ansàb el-'aI'ab, 274 (n. 1) .


Dalà'ïl, 231 (n. , 25°) .
el-khaïràt (commentaire), 246 (n.2), 2ï4 (n. 1),398.
Dalàlàt el-'àm, 310 (n. 2,4°) .
ed-Dàlîyya, 119, 271 (n. 4, 9°), 272.
ed-Dawl).a, 391.
Daw~tat el-bostdn wa-nozhal el-ikhwdn fî mandqiù ech-chaïkh Ibn 'Abd er-
Ral},mdn, 334.
en-nâchir li-mal},âsin man kân bi'l-Maghrib min machâ'ïkh el-qarn
el-'âchir, 27 , 61 , B, 8:-:1 (n. ), 187 , 220 , 234-237 , 307 , 361, 391,
392, 394, 397, 398.
ed-Dhahab el-ibrlz fî mandqib ech-chaikh 'Abd el-'Azî: , 310.
Dhaïl ck~abaqàt, 393.
[Kitàb] edh-dhaLl wa't-lakmila , 396.
edh-Dhakàt (poème sur l'égorgement rituel), 246 (n. 1, 7°) .
Dhakhîrat cl-ghani wa'l-moQ.làj fi .àQ.ib cl-liwà wa't-tàj , 119 (n. 2), 330
(n. 4) .
el-iktisàb fi man iadkhol el-janna min ghaIl' l).isàb, 278 (n.
10°) .
edh-Dhakhirat es-sanÎyyà, 361.
el-Dîbdj el-modhahhab fl' ma'rifal a'iân 'olamâ' el-madhhâb, 254.
Dîwàn (de 'Abd es-Salàm el-Qàdirî), 277 (n' 4, 5°).
(d'el-Fichtàlî), 93 (n. 1), 96.
(d'Ibn el-I:I'àjj), 343 (n. ).
444 LES HISTORIENS DES CHORF.\.

Dlwàn (d'el-Ijalabî), 286 (n. 3,1 °),


(d'el-ijarràq), 343 (n. 8).
(d'el-Joûsî), 27'l (n. 4, 6°), 272.
(d'en-Nà~irî), 353 (n. 1, 6°) .
Dorar el-athmàn, 30.
ed-Dorar el-bahîyya wa'l-jawâhir en-nabawîyya fCI-foroû< el-I;wsanîyya
wa'l-l).osaïnîyya, 374-37~.
Dorar el-T),ijâl fî ma'âthir sab<at rijàl, '115.
ed-Dorar el-l:lisàn fî'l-kalàm <alà laïlat en-ni~f min Cha<bào, 214 (n. 4).
el-maknoûna fî'n-nisbal ech-charîfal el-ma~oûna, 3n.
el-mora~~a<a bi-akhbâr a<ïàn Dar<a, 26, 116, 316, 3~5.
ek~ibbîyya el-mohdàt li'l-1).aç1.rat el-l).asaniyya 370 (n. 1, 1°).
ed-Dorr el-T),aloûq el-mochriq bi-Dorrat es-soloûk, HO , '125, 392.
el-monaq.q.ad el-fâkhir fî-mà li-abnà' 111awlànà <AU 'ch-Charîf min
el-maT),âsin wa'l-mafâkhir, 215-217.
el-monlakhab el-mostal),san fi ba<q. ma'àthir âmî,. el-moû' minîn
Mawlânâ'l-/:Iawn, 369.
en-nafîs fi-man bi-Fàs min banî MoT),ammed ben Nafîs, 341.
wa' n-noùr el-anîs fî manâqib el-imâm Idrîs ben Idrîs,
287.
es-sanî fî bà<q. man bi-Fâs min ahl en-nasab el-i;wsanî, 278, 373,
392, 393.
(notes marginales), 322.
eth-thamîn wa'l-mawrid el-mo<ïn fî charT), el-Morchid el-mo<ïn,
259, 392, 398.
ed-D orrat el-gharrà' fî waqf el-qorrà', 274 (n. 1).
Dorrat el-T),ijâl fî asmâ' er-rijâl, 111, 247, 248 , 392, 393, 39~, 398.
el-mafàkhir li-sayyîd el-awwalîn wa'l-awàkhir, 321 (n. 4, 10°).
ed-Dorrat el-maknoûna fi tadhyîl el-orjoùza, 289 (n. , 11°) .
es-sanîyyat el-fà'ïqa fî kacbf .madhàhib ahl el-bida< min er-
rawàfiçl wa'l-khawàrij wa' I-mo< tazila wa'z-zanàdiqa, 167, 3°.
Dorrat es-soloûk fî-man I),awâ'l-molk min el-moloùk, 105, 110-112, 125, 17(}
(n. 1), 249, 362, 392, 398.
et-·tîjân wa-laqtat el-loû'loû' wa'l-morjân, 303.
(commentaire), 319.

Fahrasa (de <Abd el-Qàdir el-Fàsî), 265.


(de <Abd er-Ha1).màn el-Fàsî), 267.
(de el-Manjra), 318.
(d'Ibn <Achir el-ijàfî), 314.
(d'el-<Ajamî), 308 (n. 4).
(d'Ibn<Ajîba), 336.
(de Mal}.ammed et Mol}.ammed Bennânî), 313 et n. 3..
(de Bennis), 335 (n. 9).
(d'el-Hilàlî), 3n.
445
INDEX DES TITRES D'OUVRAGES

Fahras (de },losaïn Ibn Nà~ir), 355 (n. ~), 393.


a
(d' el-là zi.ght) , 331 (n. 4).
(d'Idris el-Manjra) , 31.~ .
(d'el-Ioûsî el-~asan), 271 (n. 4, 1~0), 399.
(d' _ Mol}am med), 391.
(de Ja<far el-Katlànt), 319.
(d'el-Kardoûdî), 211 (n. 1).
(d'el-Manjoûr), 91 , 391, 398.
(de Mol;lammcd el-Fàsî), 3:15 (n. 6).
(d'A.boû Nàfî<), 340 (n. G).
(d' el-'Omairî), 293, 396, 399.
(d'el-Qa~~àr), 394.
(d'es-Samlàli), 3~2, 398.
(d'lbn Soûda), 334.
(d'et-Tastàwalî), 399.
(d'el-Warzàz1), 31.8 (n. 3).
Fahras el-'awâ'ïd el-mizbarîyya bel-mawâ'id, 26 ,-262 , 391.
at
Fakr clh-tharà bt-sa-y-yîd el-warà, 303 (n. 4, 1°).
el-Falak cl-rnachl)oùn bi-nafà'is T.b,irat Ibn ~-arl)oùn, 353 (n,l, 3').
Farîdat ed-dorr e~-~(tfi fî wa~f el-jamâl el-ioûsofî, 322.
el-ichli-yàq fi tartîb làmî-y-yat ez-Zaqqàq, 321 (n. 4, 1.0).
Fal!). el-fattà\l <alà roaràti< el-arwâ!)., ~81 (n., 5°).
_ el-rnaghîth bi-l}akm el-1a!).n fîl-!).adllh, 1 \5 (n. '2, 3°).
_ el-malik en-nâ~ir fî ijâzât manvîyyaL banî Nâ~ir, 315.

cl-Fal!) en-nabi! fi-rnà ta~arnmanaho


_ el-mola<àt fi madl;l en-ni'àl, 94 (n. 1).
min asmà' el-'adad et-tanzil, 1 J5

Fat!) 3,1°).
(n. el-qaddO fi charl) kho\bat el-Qàmo,'" 317 (n. 5,
ùS
~').
fî'r-radd 'alà'l-Genso ûs , 212 (n.) .
cl-~-at\l
. er-rab
bàni
fi-mà dhahal minho ez-Zorqânî, 146 (n. 1).
wa't-taisir fi àiat cl-taQ.hîr, 321 (n. 4, 2°).
el.Fawâ'ïd el-jamma bi-isndd 'oloûm el-o mma , 257-258, 39~,
el-mol;laqqaqa fi ib~àl da<wà man qàl ann et-là' hiya'~-tà' mo-
398.

raqqaqa, 353 (n. 1, 2°).


Fotoû!). lfrîqî-yya, 395, 391.
e 1-F 0 Loùl)a l cl- ilahi yya Cl charl) cl-Mabà\l i Ih cl-a,liyy a, 336 (n. 3\.

G Itâi al el-arn yy a wa-ir tiq d' er-ra lob e[-' oUy yo fi d Itikr e l-a n,âb eNaq al-
ni
lîyya dhâL el-anwâr el-bahîyyat es-sanîyya, 335.
el-Ghamâm e~-~ayyîb fi nwnâqib l\1awlâï et-Tayyîb, 318.
Ghonial c\-miskin fi char\l el_~!orchid el-mo'in, 316 (n. 4, 1°).
~abaqàt
er-rà'ïQ fi abl el-l;lisàb wa'1-farà'ïQ., 105 (n. 3, 2").

lfadd"q el-azltâr en.nodiyya fi't-ta<l'if bi-altI ez-:àwiyyat ed-dilâ'iyyaL eI-

bakrîyya, 339 (n. 1.,.


446 LES HISTOHIENS DES CHOR}'A

J:lall mochkil Ibn <th'afa fi mokhla~ar(ùh, 230 (n. 2, 17°).


J:lamàsa (d'Aboù Tammàm, commentaire), 289 (n., 3°).
el-~likam el-<atà'ïyya (commentaire) , 336 (n. 3).
I;Tilial el-odabà' wa'l-kollàbfi madl) hadhà 'l-kitàb (el-Torjomàn cl-mo<rib),
'168.
el-~Tizb el-kabîr, 241 et n. L
(commentaire), 313 (n. 1, 4°).
el-I:1odoùd (commentaire), 313 (n. '1 , 8°) .
el-l;lokm bi'l-<adl wa'l-in~àf ed-dàfi< li'l-khilàf fi-mà baïn foqahà' Sijilmàsa
min el-ikhlilàf, 264 (n., 4°).
J:Tola1 el-<aroûs fi tazkiyyal en-nofoLls, 3i6 (n. 4, 10°).
el-~-Jolal el-bahîyya, 371.
el.mawchiyya fi dhikr el-akhbàr el-murràkochîyya, 386 (n.) , 394.
es-sondosîyya fi madl,l ech-chamà'ïl el-mol,lammadiyya, 286 (n. 3,
2°).
el-J:Tollat es-sîarà' fi l)adith cl-bar'à', 289 (n., 10°) .
el-fJosâm el-machrafi li-qar 113àn es-sàbb el-ja<furi, 212 (n .).

làqoùtat el-bayàn, H5 (n. 2) .


Ialîmat el-<oqoûd el-wastâ fi manâqib ech-chai'kh el-.Uo<tâ, 330.
[Kitàb] el-<ibar, 10 (n. '1), 361, 394, 397,398,399.
lbtihdj el-ba~â'ir Jî man qard' <alâ'ch-chaikh <Abd el-Qddir, 261.
el-qoloùb bi-khabar ech-chaikh Abî'l-MaJ:t,dsin wa-chaïkhih el-J1aj-
dhoùb, 267 , 39 l , 392, 398.
el-Ichârât cn-nà~îl:ta li-man ~alab el-wilâyat e .. -~ù)il,la, 26'1 (n. 3, 2°).
el-Ichrâf <alâ ba<rj, man (Lall bi-Pds min machdhir el-achrdf, 344.
- nasab el-aqtdb eL-arba<at el-achl'âf,280 .
lchrâq el-badl' fi't-la<rif bi-ahl Badr, 256 (n. 5, 3°).
Idà' el-l,loqoùq fi ibdàl el-foroùq, 278 (n., 13°).
Idâ'at el-odmoùs wa-riàçlat ech-chomoùs min i~~ilàl,l ~âl,lib el-Qàmoùs,
3n (n. 5, 6°) .
Irj,hdr el-kamâl fi laLmim manâqib sab<al rijâl, '1'19, 386.
_ el-maifâmid fi't-la<rîf bi-mawlânâ 'l-wâlid, 38~ et n. 2.
Ifâdal el-mordd bi'L-la<rîf bi'ch-chaïkh Ibn <Abbâd, 314.
el-lfâdàt wa'l-inchâdât, Ji5 (n. 2, 1°) .
Ighâthat el-lahfân bi-asùnîd où!i'l-<irfân, 218 (n., 18°).
wa-salwat el-af:tzân bi' l-Qâdirîyîn 'i;;âm ech-châ'n, 335.
el-It:tâ~a bi-tà'rîkh G harnâ\a, 393, 391:
ll,liâ <oloùm ed-din, 398.
Il,lkàm el-ma<roùf min ô4kâm e~-~orolif, 277 (n. 4, 2°) .
el-Ikhlà~ (commenlaire de la ~ourale), 271 (n. 4,7°).
el-Iklîl, 397.
wa'l- lâj ft' tadhyîl Kifâyat el-moly,tâj, 322.
el-Jktifà' (commenlaire), 3i3 (n. 1, 1°),
el-llmâ< bi-ba'rj, man Lam iodhlwr fî Momli< el-asmâ', 274, 39:{.
lNDEX DES TITRES D'UuVHAGES 447

el-llmâm bi-ba'q, man laqîloh m.in 'olaJnâ' el-islâm, 238.


llliqât ed-dorar wa-moslafâd el-mawâ'i; wa'l-'ibar min akhbâr a'iân el-
mi'at eth-thânÎJ'J'a wrtï-f:tâelîJ'J'a 'acha!', 7'2 , HG, 322-324 .
Imdàd bal).r el-qà~id bi-bal).raL ahl et-tawJîd, 'i30 (n. 2, 8°) .
dhawCl-Îlili'dâd ilâ ma'âlim er-râwîJ'J'a waï-isnâd, 340.
Imtà' dhawî'l-istil).qàq bi-ba'Çl moràd el-Moràdi wa-zawâ'ïd Abî IsJ:tàq,
230 (n. 2, 4°).
lnâral el-ba~â'ir fî manaqîb el-qotb Tbn Nâ~ir, 355 (n. 2).
Inàs el-iq~àd wa'l-tal).rîr, 230 (n. 2, 9°).
'Inâyat oûlî' l-majd bi-dhi/fr 'âl el-Fàsî Ibn el-Jariel, 339-340.
rnchàd cch-charîd fi Çlawàll el-qa~id, 2;:\0 (n. '2, 1°).
'Iqd ed-dorar fi na~m nokhbat el-fikar, 24tj ( n. 1, 5° et Go).
_ el-la'àli wa-wasîlal es-soù'àl bi-mà laho (~allà'llah 'ala"(h wa-sallam
min el-'àl, 219 (n. '2).
el-'Iqd el-monaçlçlad min jawàhir mafàkhir sayyîdinà wa-mawlànà Mo-
l).ammed , 271 (n. 1).
[qtibàs el-anwàl', 394.
el-lqtiÇlàb, 39~.
Iqtifâ' el-âlhâr ba'q, dhahab ahl el-âthâr, 2G/~ ( n. , 5° ) .
lqtitàf el-ma'àrif min sOLI'àl ech-chaïkh el-'.\..rif, 321 (n. 4, 7°)~
zahrat el-afnàn min clawl:l<lt qàfîyyat 1bn el- Wannàn, 3tl3 (n. 2).
Irchàd el-labib ilà maqà~id J:tadith el-l).abib, 231 (n. , 23°).
el-lrfàq fi masà'il el-istiJ:tqàq , 29~ (n. 4, 3°).
el-Trlijâl fî manâqib machâhid sab'al rijâl, 31G.
Js'àf es-sà'ïl fi tal::arri'l-maqàtil, '231 (n. , '24°).
[Kitàbj i~lit el-khirrît fî qat' bol'oûm el-'ifril en-nifrît, 393, 398.
[KitâbJ el-lsliq.5 â li-akhfJâr dOWCll el-Maghrib el-aq~â, 3, 26, G1} 156 ( n. 3),
186 (n. 3), 350 , 355-368 , 396.
el-Islisfâ' min el-'âlnm bi-dhikrâ âthâr ~âJ:Lib el-'A lam, 289.
Ttl),âf achraf el-malâ bi-ba'el akhbâr er-Ribât tva-Salâ, 367 ( n. ) .

Jadhwal el-iqlibâs fi-man I),all min el-a'lâm, madînal Fâs, H 1, 247 , 248-
250, 361, 381, 3~2, 393, 394.
e1-moqtabis, 396.
Ja'faral et-tîjân wa-mahrat el-iâqoût wa'l-loù'loû' wa'l-morjân fî dhîkr el-
moloûk el-'ala-wîyîn wa-achiâkh Mawlânâ Solaïmân, 'JG8, 8°.
Jahd el-moqill el-qà~ir fi na~rat ech-chaïkh ' .\..bd el-Qàdir, :102 (n. 2, 1°}.
el-Jaïch el-'aramram el-khomâsî fî dawlat awlâd Mawlânâ 'AU es-Sijil-
mâsî, ~6, 62, 68, 95, t9!l , 204-2i3 , :n7, 3ti8, 362, 363, 3~5, 398.
Jaïch et-tawchîl). (com mentaire ), 91 (n. 2, 2°).
Jalâ' el-qalb el-qâsî bi-maf:tâsin sayyîdî 'l-Mahdî'l-Fâsî, 304.
Jam' el-jawàmi', '14.
(glose sur le commentaire d 'el-Mal:tallî), 29'1 (n., gO).
Jamharat el-aL1sàb, 3tH, 3\13 , 3!H.
el-Jàmi' (commenlaire ), 331- (n. t, 5°), 391.
448 LES HISTORIENS DES CHORFA

el-Jàmï el-mosLawn bl-jadàwll el-T~Tàw[j, 230 (n. 2, 50).


Janâ zahral el-'âs .fî alfhbâr el-Maghrib w::t-la'rîlfh madînal Fâs, 224 , 249
(n .).
Jawàb 'an ta~rîf asmâ' Allah [i'l-omollr ed-donlàwîyya, ' 261 (n. 3, 60).
el-J awàb el-mosakkit, 204 (n. 4, 10).
Jawâhir el-ma'ânî wa-boloûgh el-amânî ji-.fairJ, ech-chaïlfh Abî'l-'Abbâs
A~!med el-Tijjânî, 377.
el-Jawâhir e$-$afiyya min el-maf}-âsin el-ioLÎsofîyya, 274.
Jawâhir es-simât.fî manâqib sayyîdî 'Abd Allah el-Khayyât, 33l.
el-Jawhar el-monaHam fi zlàral el-qabr el-mokarram, 381 (n. 2).
cl-Jomal (commentaire), 290 (n. 7, 30).
[ f iLàb] el-jommân fi 'ajà'ib ez-zamàn, 27 (11.3),3 94,395,396.

[(ach.f el-'arîn.fî loyoûlh Banî Marîn, 357, :1G8.


el-asràr fi'r-radd 'alà ah1 el-blda'el-achràr, 168, 90.
e1-ghoyoûb 'an roû'iat ~ablb el-qoloùb, 29G (n. 3, 10).
eHûjâb 'an man lalâqâ ma'a 't-Tijjânî min el-a$T),âb, 377.
el-labs 'an el-masà'ïl el-khams, 310 (n. 2, 20).
el-lithâm 'an 'arà'is ni'am Allah La'àlâ wa-ni'am rasoûlih 'alaïhî'
s-salâm, 286 (n. 3, 30).
cl-Kachf wa'l-bayàn ll-a~nàf majloûb es-Soûdàn, 253 (n. 3) . .
el-Kàmil, 39C.
el-Kawlfab el-as'ad.ft' manâqib sayyîdî wa-mawlânâ 'AU ben AT),med, 327.
}{awlfab el-madj es-sârî fl' larjamal cha[lfh cho[oûlfhinâ MoT),ammed $âlif;
er-RirJ,awî el-Bolfhârî, 344. (n.).
el-Kawkab es-sâW 1ï charQ. Jarn' el-jawàmi', 271 (Il. 4, 100) .
el-}{awlfab el-waqqâd .fl' man f}-all bi-Sabla min el-'olamd' wa' $-$olaT),â' wa'l-
'ibâd, 222.
ez-zàhir fi charQ. cl-wlrd cl-bàhir, 3i6 (n. 4, 60).
fi. siar el-mosàfir, 295 (n. 3, 20).
el-l{habar 'an ?ohoûr el-.faqîh el-'Ayidchî bi-hadhihi 'l-bilâd wabdhikr saba-
qîyâmih bi-wa:?îfat el-jihâd, 347.
el-Khazrajiyya (glose), 288 (n. 6, '10) .
el-Khi ~a t, 39G.
Kholà~at el-àthar, 398.
cl-Kholà~Ett en-naqîyya fi omarà' lfrlqîyya , 397, 398, 3!J9.
]{ifdyat el-moT),lâj li-ma'rifat man laisa ftd-Dîbâj, .253, 254, 322, 391,
39:.1.
min khabal' ~àQ.ib et-Iàj wa'l-ll ",à wa'l mlr'àj , 274-
(n. 1).
(KilàbJ Kinàyàt el-odabà', 396.
Kolliyat , 23t (n. , 260).
[(onnâch , 258 (n. 1), 39J.
el-Konoûz el-rnakhloûma fi samaQ.at el-maqsoûma li-hadhlhi 'l-ommat cl-
marl;lOûma. 287 (n., Ho).
INDEX DES TITRES D'OUnUGE 449
e1-La'àli es-sondosîyya fî 'l-façlà'ïL es-SanoùsÎyya , 253 (n. 3).
LamJ:!-at el-bahjal el-<dUyyafi ba<g forou< ech-cho<bat eHwsaïnîyyat e~-~aqal­
lîyya, 321.
ed-dori" en-llàfis fi-man oll~if bi't-tadlîs, 321 (n. 4, 1°) .
Làmîyyat el-af<àl, U.
(commentairc), 291 (n. , 8°) .
(glose sur le commentaire d 'Aboù AJ:traq), 344 (n. 2).
el-<Arab (commentaire), 289 (n. , 5°) .
el-Làmîyya fi'l-qaçlà', 14.
(commentaire), 313 (n. 1, 3°) , 3:21 (n. i , 3°) .
Laqt el-fard id min lofd?at J:!-olwi 'l-fawu'id, 98 (n. 3), 248 (n. ), 323,392.
Lalà'ïf akhbàr el-owal fi man la~arra[ fi Mi~r min arbàb ed-dowal, 393.
Law (opuscule sur le sens de la particule conditionnelle), 264 (n. 3, 30).
el-Lom<at el-kha~îra fi mas'àlat khalq af<àl el-<ibàd ech-chahira, 274
(n. 1).

Mâ' el-l1wwâ'ïd, s. RLl}.la d'e1-<.\.yyàchi.


Mabâl).ilh el-anwâr fî akhbdr ûa<~ el-akhiûr, 291, 3!H.
Mablagh el-amàlli-~àlibi ' l-La~rîf fi 'l-a[,<àl, 310 (Il. 2, 7u ) .
Madad el-jaïch, 97 (n. 2, 2°) .
el-Madàrik, 396.
Mâgî 'l-Qarawîyîn wl,-moslaqbalohâ, 378 (n. 3).
Madkhal ech-char< ech-charif <alà 'l-l!ladhàhib el-arba<a, 381 (n. 2) .
cl-Madkhal fi'l-hindasa, 105 (n. 3, 3°) .
el-lIfafâkhir el-<alîyya fî'-ch-chamâ'ïl el-ma hdîyy a, 376.
el-lIfamdoûd wa'l-maq~ot1r min sanâ Abî'l-tAbbâs el-Manfioûr, 97, 392.
Manàhij el-khalà~ min kalimat el-jkhlà~, 271 (n. 4, 30) .
Manàhil ech-chifà' fî roû'iyyà'l-Mo~~afà, 287 (n., 8°) .
e~-~afâ' fi akhbâr el-moloûk ech-chorafd', 30, 77, 95-97, 120,176,
362, 391, 394, 395, 398.
fi jamàl dhàt el-:vro~tafà, 287 (n., 70).
Mandqib <Abd Allah el-lVâzzânî, 327.
Ma~wmmed ben <Abd Allah Ibn Matan el-Andalosî, 267.
Manàsik el-l).ijj, 334 (n. 1, 6°).
Manhaj iltiqàt ed-dorr (commentaire du résumé du), 92 (n., h) .
e1-Manhaj el-montakhab ilà qawàtid el-madhhab (commentairc et résumé
du commentaire), 91 (n. 2, f et g).
Manhaj er-rachad fi làmîyyat el-isnàd, 278 (n., 150) .
Man~oûma fi alqàb el-l).adîth, 246 (n. 1, 11°).
fi '~boyo~t, 263(n. 7, 1 ~ .
fi madJ:!- ~âliJ:!-î Miknâsal ez-zaitoûn, 31'1.
Matoûnat el-ikhwàn bi-ma<rifat arkàn el-'îmàn wa'l-islàm wa'l-il).sàn, 278.
(n. 4, 8°).
en-nàsik bi'çl-çlaroûd min el-manàsik, ~74 (n. 1).
Maqàmat et-tal~allî wa't-takhalll min ~ol~bat ech-chaïkh Abi Mal}.alJî,392.

29
450 LES IHSTORIENS DES CIIORFA

Maqà~id e!-!àlibin fi o~oùl ed-din (commentaire), 29 1 (n., 70).


el-Maq$ad el-afpnadfi'l-la'rîj bi-sayyîdind Ibn 'Abd Allah A~lIned, 278 ,393'•.
ech-charîf wa'l-manza' el-laNf fi dhilîr $olal),â' er-Rîf, 221-222 .
el-Maq~oùr wa'l-mamdoL'ld (commeutaire), 289 (n. , 70).
el- laq~oùra (commen taire), 97 (n. 2, 1"), '233 ( n. 5).
el-~laràhim fi'd-daI'àhim , 317 (n . 5, 30).
i\1aI'àqi 'l-majd fi à"Làt es-sa'd, 92 (n., IJ.
Marà~id el-mo'tamad fi maqà~id el-mo'laqad, 246 (n.1, 10) .
Ma~àbil}. el-iqtibà fi madà'ïl}. Abi 'l-' .\..bbàs, 277 (n. 4, 60).
el-Masà'n el-l}.i san ~el-marfoù' aL ilà l}.ibr Fà wa'l-Jazà'ïr wa-Tilimsàn, 23
(n. 2, 10°) .
el-Mas'dlat el-amlî~îyya fi 'I-anlâl),at el-rnon'aqidat 'alâ 'ddal el-bilâd el-
gharîsîyya, 257 (n. 2).
cl-Masàlik es-saniyya fi chari). cl-.\..jorroùmi yya, 376 (n . 4, 20).
el-Ma lak es-sahl fi charl}. tawchil}. Ibl1 ahl, 113.
il1atdIi' ech-chomoûs wa'l-aqmâr fî tarjamal AM 'ch-Chitâ el-]{hammâr , 49
(n. '1), 372 (n. 4).
Matla' el-ichrâq fi 'l-achrâf el-wâridin min el-'Irâq, 280 , 393.
el-~ra~Lab el-kolli fi. mol;tàda lhàL cl-imàm el-Qolli, 23-1 (n., 200).
Matl1w~t en-na;ar wa-marsal el-'ibw' bi'dh-dhilîrâ bi-Inan ghabar min alll
el-qarn eHlâdi 'achar, 284, 392 et Il. '1 , 393.
el-~lawàhib el-qaddosiyya fi Cllal'~l el-'aqiclaL es-Sanoù iyya , 376 (n. 4, 80).
fi 'l-man qqib e - 'anoù iyya, 253 (n. 3).
Mawàhib el-lakb .. l!:, fi chari). chawùhid el-lall~lll., 321 (n. 4, t;O).
el-)Iawàrid ech-chahiyya fi charl;t el-Borclal cl-Boù . iriyya, 376 (n. 4, 40).
el-Mawrid .el-hanî bi-alLhbâr el-imâm el-mawlâ 'Abd es-Salâm ech-charîf
el-Qâdirî el-~iasaJlt', 3J9.
el-mo'in Iï cbad). el-~Iorchid el-mo'ïfl, 32J (n. 4, ~ n) .
el-Jla,?âhir es-~âmt'y'ya fi ' n-nisbal ech-charîfal el-Kallànîyya, 318 (n. 3).
Miflàl). ech- chifà', 2G6 ( n. 2).
cl-kholà~a fi charl). el-.\..lfiyya , 376 (n. 4, 30) .
d-lIIina~t el-bâdîJ'ya fi'l-asânîcl el-'aUyya, 295, 393.
.
inal). ilahîyya wa-mawàhib ikhti.à~iyya 'alà'l-Jàmi' es-~a J~n!, 340, n. 4.
el-Mina~l, e$-$âft'yyà ft"l-asânîd el-ioûsoft'yya, 211-.
el-Minhâj el-mulîhlâr fi manâqib ech-chai"kh el-lIIo/chlâr, 341.
el-wâq,i~l, ft' la~tqîq lcaramât Abî lIIo~lammed $âlil)., 22'1.
el-Miqbâs fi mal),âsin saJ'J'îdinâ AM 'l-'Abbâs, 304.
Mir'àj e~-~o'oùd fi nall majlab e - oùd, 2~3 (n . 3), 398:
- el-wosoùl fi '~-~alàt 'alà akram nabi wa-ra oùI, 287 (n., 60) .
Mir'ât el-mal),â:>in min akhbâr ech-chaïkh Abî 'l-.1fal),dsill , 21, 51, 74, 126,
246-247 , 345, 361, ~~92, 3!:13, 397,398,399.
ez-zamàn fi tà' rîkh el-a'ïàn 393.
Mi~bà1). es-sàri, 399.
el-Mi'yâr, 52, 397.
el-Mol),âq,arât (d'el-Toùsî), 21) 190, 272 , 39l, 393, 394, 395, 398, 399.
INDEX DES TITRES n'OUVHAGES 45t
el-Mo1:1âÇlarât (d 'er-Ràghib), 395.
el-MoQ-kam fi'l-l;likam, 319 (n. 2).
~Io <ld en-ni<am wa-mobîd en-niqam, 39~.
l\Io <ïn el-qàrî li ~aQ-ÎQ. el-Bokhàrî, 259 (n. 4, 4 0 ) .

Mokhta~ar el-Ia<marî fi's-siar, 261 (n . 3, 4°).


~lokhta~ar fi'l-fiqh, 14.
(commentaire) , 259 (n. 4, 8°) .
(glose), 298 (n. 4, 'lu), 334 (n.).
(résumé de glose), 373 (n. 0. l ").
(commenlaire de la Kho!ba ), 313 (n. ·1, 60) .
(glose sur le commenlaire de. la parlie relalive aux suc-
cessions), 373 (n. 3, 2°).
fi ' l-man~iq (commentaire) , 290 (n. 7, 1°) .
Jlom.li< el-asmâ<J î akhbâ r el-Ja:oLilî W l' l-Tabbâ< wa-ma lahomâ min. el-albâ"
274 , 361, 392 , 393, 398 .
.\lonial el-1:1o sàb, '14, 23u (Il. 2, 2°).
el-morîd, 377 .
el-.\lon ik, 391.
el-.\Iontakhabàt cl-<abqarlyya li-! ollàb el-madàris elh-lha ll aw iyya, i9 (n. 1).
el-lIlontaqâ ' l-maq$oûr <ald ma'dlhi,' khildfal el-Man~oûr, 68, 6\!:l, 77, 105,
HO , 11'1, '112, Hi5 , 125, 174, '18~ , 247 , 297,3;58 , 362,3 92 , 398.
\loqaddima li-tartib diwàn cl-.\lotanàbbi , 97 (11 .2,3°).
el-.\Ioqni< fi <ilm Abi Moqri<, 14, 261 el 11. 3, 1°.
el-lI!oraqqi F dhikr ba <cj manâ(Jib el-fJoçb sllyyfdi Ma~wmm ecl ech-Charqi,
330.
el-.\Iorchid el-mo<ïn, '12, 14, (H.
(glose sur le commentaire de Mayyàra), 344 (n. 2) .
el-Mo<rib fi akhbâ,. el-llfaghrib, 11~.
el-mo!.î n <a mmâ tacjammanaho el-Anfs el-moçrib wa-Rawcjal en-
nisrîn,289-290 , 3?>7; i:l61, 397 .
.\Ioroùj edh-dhahab, 397. .
.\losa<àdat el-ikhwàn (commentaire), 353 (n. 1, 1°).
[Kilàb] e l-~I o Ilad e~-~a1:1il! el-\13san , 397.
el-.\Iosla<an fi al:tkàm el-adhàn, 26 1 (n. 3, 3°) .
Mo<lamad er-râwifi manâqilJ walL Allah sayyicli A~uned ech-Châwî, 278, 393 ,
398.
el-J\1osLa~fà min <illTi el-o~old, 399.
,}Iolhlà ' Hariqa fi dhamm el-walhlqa, 39:-L
Moùloùdiyyàt , 93 (n. 2) .
[Kîlâb] el-mo<za fi manâqilJ AbL' Ia <zâ, 239-240.

en-" abdhal el-iasîral en-nâfi <al ellatî hiya li-akhbâr es-salâlat el-kallânîyya
jâmi<a , 380.
;'v achr azâhir el-boslân fî-man ajâzani bi'I-Ja zâ'L'r wa-TiHawân min focjala.'
el-akâbir wa'l-a<[ân, 289.
452 LES HISTOJUENS DES CHOnFA

achr el-mathânî li-ahl el-qarn el-l),âdî 'achar wa' lh-lhânî, ~6, 61, 72, ~ 16,
~17, ~57, ~61, ~66, ~80 , ~81 , 317, 322-326 ,339, 347, 3~9, 361, 392,
:197, 398, 399.
en-Nafal),al el-miskîyya jî's-sifârat et-torlâyya. 99 , 136, 39:2, 398.
afà'ïs ed-dorar fi l:tawàchî 'l-MokhLa~ar, 27'1 (n. 4, ~O).
afQ. et-Fb mi'n gho~n el-Andalos er-ra~tb wa-dhikr wazÎrhà Lisân ed-Dîn
el-Khattb, 93 et n. 3, :i91, ;l9J, 394, 396, 3!:J7.
Naïl el-amal tï-mà bihibaïna 'l-Màlikîyyat jarâ'l-'amal, 105 (n. 3, ~o).
_ el-ibtihâj bi-latrîz ed-Dîbâj , ~6 , 253-255, 3~5.
_ el-qarabàt bi-ahl el-'aqabàt, 278 (n., 17°).
Nasamat el-'âsfi ~lijjal sayyîdinâ Abî'l-'Abbâs, ~!-l4.
Na~îQ.at ahl es-Soûdàn, :1!:J2, 398.
dhawî'l-himam el-akiàs fi-mà iaLa'allaq bi-kholtat en-nâs, :n3(n. 3,
4°).
el-moghtarrîn ft botlàn et-tadbîr li'l-mo'tarrîn, 168, 11°) .
fî'r-radd 'ala dhaw1't-tafrîqa baïn el-moslimîn,
259 (n. 4, 7°).
en-nadhîr el-'oriàn ft't-tal:tdhîr min el-ghaïba wa'n-namlma wa'l-
bohlàu, :-373 (n. 3, 5°) .
en- asîm el-mo'abbiq fî Lawjîh el-khilàf el-wàrid ft'l-mantiq, ~78 (n., 9°).
Na~rat el-qabÇl ft'r-radd 'alà man ankar machroû'lyyataho fî ~alàta"( en-
nail wa'l-farçl, 302 (n. 2, 3°).
alîjat el-ijtihâd fî'l-mohâdana wa'l-jihâd, 329-330, 39 '.
et-ta~Lqîq fr ba'rJ, ahl ech-charaf el-walhîq, 302, 373, 3'1S.
awàzil (d'el-Borzolî), 3$-1S.
(d'es-Sajlànî), 3!J2.
Na~m 'alâqàt el-majàz (commentaire), 91 (n. 2, e).
ed-dorr wa'l-'iqiân, 30, 395.
_ -la' âl fî chorafâ' 'aqabat Ibn $awwâl, 344.
el-farà'ïd wa-mobdî'l-fawà'ïd li-mal:t~al cl-maqà~id, 91 (n. 2, a cL IJ)
el-jomal, 13.
0
mantiq es-Sa'd, 105 (n. 4, 7 ) .

maràl:til el-J:lijàz, 231 (n., 2Lo et 22°).


mawàsil el-maqâl, 230 (n. 2, 11° et 12°).
mochkilàt er-Hisàla, 230 (n. 2, 18°).
mokhta~ar es-SanoûsÎ ft'l-mantiq, 277 (n. 4, 1°).
qawà'ïd eI-i'râb, 277 (n. 4, 3°).
talkhî~ Ibn el-Bannâ', 105 (n. 3, 4°).
el-Waraqàt, 289 (n., 12°).
okhbat et-tollàb fi 'amai el-'astarlàb (commentaire), 313 (n.1, jO ).
J oûrel-ba~arfi char!). el-~lokhta~ar, 317 (n. 5,1°).
en-Noûr el-qawî bi-dhikr ech-chaïkh Mawlâi 'Abd el-Wâl:iÏd ed-Dabbâgh wa-
chaikhih Mawlâï el-'Arbî ed-Darqâwî, 342.
Nozhat el-fakr fi manâqib ech-chaïkhaïn sayyîdî Mal).ammed wa-wâlidih say-
yîdî Abî Balcr, 278 , 393.
454 LES HlSTOHIENS DES CHORFA

er-Rajz wa'l-iqmà< fi tahrîm 'àlàL el-Iahw wa's-simà<, 373 (n. 3, 30).


Haqm el-l:lO}al, 30, 122 (n. 2),248 (n.), 397.
er-na~â~at el-ma !f1yya fi jawf man radd <aJà ahl el-l\lokhfiyya, 274 (n. 1).
er-Rawçl cl-àrîçl fi badi< cl-tawchîl;l wa-monlaqà 'l-qarîc:1, 289 (h., 40).
el-<âtir el-anfâs bi-akhbâr q-~âliQ-în min ahl Fâs, 281-83, 381, 392.
Rawrj, el ·baQ-àr fi dhilïr jomlal min machâïlchinâ 'lladhîna farj,lohom ajlâ
nûn chams en-nahâr, 31.4.
er-Rawçl el-bassàm fi roù'lyyà' ghaïrih< alaïhi' s-salàm, 287 (n . , 90).
el-haloün fî alehbâr Miknâsal ez-zaUoûn, ,) (n. '2), 71, 83 (n.), 160
(n.1.), 2L.7-230 , 254.
el-iâni < el-fâ'iQ- ft' manâqib ech-chal'kh Abî <Abd Allah lI1oQ-ammed
e~-$âliQ-, 298.
Hawçl el-mi<tàr fi khabar el-aqtàr, 361 et n. 2, 396 .
- el-qir~às, 2, 30 el n. 4,7 1, 83 (n .), 122, 211 et n. 1, 224, 249,289, ;·H57 ,
361, 392 , 394, 395, 396, 397.
er-Rawrj, es-sanî fî'n-nasab el-kallânî, 37.8 (n. 2).
ez-zâhir ft"l-ta<rîf bi'ch-chaïlch Jbn ~[osafn wa-atbâ<ih el-akâbir, 316.
Hawçlat el-azhàr (commen taire), '291 (n ., 100).
el-ma~tâsin ez-zahîyya bi-ma'âlhir ech-chai/ch Abî'l-Ma~lâsin e[-
bahîyya, 275 , 393.
er-Rawrj,al el-maq~bûda wa'l-l:tolal el-mamdoûda fi ma'âlhir banî Soûdâ,
338.
HawçlaL en-nisrîn, 30, 36 (n. 1), 123 ct n . 1, <:!89, 357, 361, 397.
er-Rawrj,al es-solâfmanîyya fi dhikr moloûle ed-dawlat el-ismâ<ilîyya wa-
man taqaddarnahâ mined-dowal el-islâmîyya, 167 (20), 'J83.
Rawc:ial el-la< rîf fî mafâlïhir Mawlânâ Jsmâ<ïl bni 'ch-Charîf, 1 H.
er-Riârj, er-rayyânt'yya fl'ch-cha<bat el-katlânîyya, 379.
Riârj, el-ward ilâ mâ inlamâ ilaïh hadhâ'l-jawhar el-fard, 344-345.
Ri~tla (d'cl-<Ayyàchl), 262- 264 , 39 1, 392, 394, 395, 398.
(d'Ibn Batol1ta), 83 (n.), 391, 393.
(d'Ibn J obaïr), ~96.
(d'el-Koùhin), 340.
(de Ral;lI:to ech-Chàwî), 308 (n . 4), 39J .
RiQ-lal ech-chabâb, 'lOO (n. 1).
- ech-chihâb ilâ liqâ ' el-al:tbâb, iOO, 391.
- el-l:todhdhâq li-mochâhadat el-boldân wa' l-âJâ'l, 167 (i0) .
er-RiQ-lat el-marrâlïochîyya, 315.
Ril:tlal el-wazîr ft' iftikâk el-âsîr, 285-286.
er-Risàla, 14, 16.
Hisàla fi ' r-radd <alà ' HabNyîn, 353 (n. 1, 40).
- fi tal)qîq amI' sab<at rijàl, 353 (n. -1, 50).
Bisâlat <Abd el-Qàdir el-Fàsî, 392.
cl-Jorjânî (commentab::e), 290 (n. 7, 40).
es-soloâk fî mâ iajib <alâ 'l-moloûk, '167 (60).
iNDEX DES TITRES D'OUVRAGE::; 453

No z hal el-(tâdî bi-alîhbâr moloûk el-qarn el-fy,âdî, 24, 40, 58, 63, 68, 71, 77,
80, 8 1, !H5 , 96, 9U et n. :1, 107 , 108, 1'12, '115 , H~ , 120-131 , 132,
136, 137, 138, 140, 14~i, 173, 174, 111, 191, 201, 208, 211, 246, 252,
258, 261,268,306,301,339,341,351,358,361,362,391,393, ;i94,
395, 397, 398.
el-moch làq , 398.
en-nâdl' wa-tofy,fat el-I,tâdî fi man bi'l-JIaghrib min ahl el-qarn el-
~lâdi, 280, 324, 393.
en -n â~ir, 229.

<Omdat el-a1).kàm (commentaire), 244 (o. 4).


[Kitâbl el-oqnoùm fi mabâdî 'l-'oloûm, t 70 (o. 1), 268, 392.
el-'Orf el-'ât ir fî-man bi-Fâs min abnâ' ech-chaïkh 'Abd el-Qâdir, 279.
Orjoùza fi qirà' at el-Qor'ân, 231 (n., 27 °) .
fi ' t-tawqit , 2~9 (n., 8°).
min soknat baït fî 'l-madrasa, 3'11 (o. 5, 5°) .
<Oyoùn el-akhbàr, 395. .

Qalà'ïd el-'iqiàn, 291, 394.


(glose), 289 (n. , 2° ).
el-Qâmoùs, 333 (n. 7).
(commentaire d 'u o poème sur l' utilité d'), 211 (o. 1).
el-Qànoùn fi ibtidà' el-'oloùm, 32 (n. 2), 211 (o. 4, 8°), 2H.:
Qa~îda fi àkled-dojàj, 261 (0.3,0°).
fi 'ilm el-jadwal, 261 (o. 3, 7°).
fî mad1). el-Qàmoù , 317 (n. 5, 7°) .
fi manàsik el-1).ijj, 303 (n. 4, 7°).;
Qatf ez-zohoûr, 399.
Qawà'ïd (commentaire), 92 (o. , i).
el-Qawl el-fa~l fi tamyiz el-khà~~a 'an el-fa~l, 271 (o. 4, 4°).
el-kàchif 'an al;tkàm el-i tinàba fi'l-wa~à'ïf, 302 (n . 2, 2°) .
el-mo'tabar fi baïàn aon jomlat el-l.lamd inchà ' là khabar, 310
"en.2,6°).
Qorrat el- 'oyoûn fî'ch-chorafà' el-qâtinîn bi' l-'Oyotin, 338.

er-Radd 'alà risàlat el-Bakkâï, 204 (n. 4,2°).


Radd et-tachdîd fi mas' alat et-taqlid, 31.0 (n. 2, 3°).
Râ'ïd e~-~alâfy" 248 (n. ).
Raïfy,ân el-qoloûb fî-mâ li'ch-c haïkh 'Abd Allah el-Barnâwî Irl.Ïn asrâr el-
ghoyoûb, 287 (n., 12°), 393.
Raï1).ànat el-alibbà', 79, 393.
Rà 'ïyat es-soloùk (c ommentaire), 244 (n. 5).
B.ajà' el-ijàba fi'l-badr baïn e~-~al;tàba, 278 ( n., -16°).
er-Rajaz el-mo1).lawî 'alà masà'ïl Mokhta~ar es- anoùsî, 277 (n. 4, 4°).
(commentaire), 3'17 (o. 5,4°).
l~DEX DE:; 'l'n'ilES D' 0 VnAGES 455

-es-$a<âdal el-abadîyya fi' l-la<df bi-machâhir el-f:!,arf,ralel-mn.rrâkochîyya, 26,


385 .
. afwat el-âdab, 30 el n. 9 ,211,
man inlachar min akhbâr ~ola~tâ' el-qarn el-f:!,âdi <achar, 73, 115,
J120 , -121,121,2:17 , 266, 306-309 , 3~2, 325, 3Utl, 398.
~alftl). (d'el-Bokhàrî), 29, 104.
- (glose), 230 (n. 2, 19°).
_ (de Moslim), glose, 2H (n. 4).
cs-SaLf el-masloùl fi qal < awdaj el-falloCls el-makhdhoCll, 281 (n ., '10°).
e~-~aqn fi'l-inli~àr li-mad1). er-i'abb el--jalîl, 287 (n., 4°).
-e~-~alâl el-bakrîyya (commenlaire), 376 (n. 4,9°) .
< e1-machîchîyya, 241.
(commentaire), 313 (n. 1, 5°).
es-Saisai el-<adhb wa'i-manhai el-a f:!,lâ, 222-223 .
.saiwal el-anfàs wa-mof:!,âdalhal el-al-ciâs bi-man oqbira min el-<olamâ' wa'~­
~olaf:!,â' bi-Fâs , 2 \ , 104, 165, 218, 2H, 258, 281, 305, 308, 3l4, 325,
350, 380-385, 381.
el-mof:!,ibbîn wa' I-morîdîn wa-nikâyal el-/:Lâsidin wa'l-jâ/:Lidîn fi ma-
nâqib srtyyîdî .lIfa~wmmed Ibn el-Faqîh rt~trtd el-afrâd el-<ârifin,
312.
Banâ el-mohtadî iIâ maf:!,âsin el-Ia~wmdî, 190 (n. 2), 396.
~arf el-himma ilà talNîq ma<nà 'dh-dhimma, 302 (n. 2, 4°).
Sawàkib el-afçlàl fi kawâ ib el-af<àl, 303 (11. 4, 2°).
e. -~awàrim el-fatakîyya fi nol).oûr ahl el-qa .. idal cl-afaldyya, 3:21 ( n. 4,
9°) .
TKitàb] e~-~ila, 396.
Sim~ el-jawhar cl-fùkhir min maràkhir en-nabi cl-awwal wa'l-àkhîr, 274
(n. 1) .
es-SirI' e,?-,?âhir fî-man a/:Lraz bi-Fâs ech-charaj el-bâhir min a<qâb ech-
chaikh <Abd el-Qâdir, 338.
fKitâb] es-sîyàsa, 394.
es-Sollam el-;rnorawnaq (co mrnentail'e), 290 (n. 7, 2°) .
(glose), 310 ( n. 2, 4°), 369 (n. 4).
(Kilàb] es-Soloûk li-ma<rifal dowal el-moloûk, 391 .
.soloûk et-tarîq el-warîyya fî'ch-chaikh wa' l-morid wa'z-:;àwiyya, 33~ .

.et-Ta<alloi bi-rasm el-isnâd ba<d inliqâl ahi ei-manzai wa'n-nâd, 230.


et-Tabaqàt, 40 (n. 4).
el-Ta<bir an chanà<at monakkir el-lakbîr, 321 (n. 4, 6°).
et-Tachawwoûffî ma<rifat ahi el-ta~awwoûf, 221.
1Ki tâb] et-tachawwoùf iIâ rijâl et-ta~awwoûf, 22i , 239, 397.
Tadhkiral el-mof:!,sinîn bi-wafayât el-a'ïân wa-f:!,awâdilh es-sinîn, 346.
en-nisiàn, 3.
et-Tafakkor wa'l-ttibâr fi tâ'rîkh el-Mo~tafâ wa-ba<q, a~1:Lâbih el-akhiâr wa-
m,an alba'ahom min el-'olamâ' es-sâdât e~-~oûJîyyat el-abrâr, 293.
456 LES HI~TORIENS DES CHORFA

Taf. il 'lqd ed-dorar , 230 (n. 2, 70 ) .


[1 ilàb] et-lahdhib fi mokhta~ar lahdhib el-kamàl, 393.
[1<ilâb] el-taf},qîq fi 'n-nasab el-walhlq, 331-332.
Tal).riq el-'azm es- àkin "\va-lahyîj cch-chawq el-kàmin ilà afçlal el-amâkin,
303 (n. 4, 6 0 ) .
TaJ:lrîr el-maqàla fi ma~à ' ïl cr-Risàla , 230 (n. 2, 6 0 ) .
Taisîr el-mawâhib fî dhilïr ba'q, mâ li'ch-chaïlïh Abi Fâris min el-manâqib,
310 (u. 5).
Tâj el-'aroùs min charl;t el-Qàmoùs , 333 (n. 7).
Talïhlîd et-lIla'âthir wa-lachyîd el-mafâlïhir bi-Larjamat ech-chai/ch Chihâb
ed-Dîn Af},med Ibn Nâiiir, 351 (n. 1) .
Takmîl el-manhaj ilà o~oùl el-madhhab el-mobarraj, 259 ( n. 4, 50 et 60 ) .
et-taqyîd wa-tal)Jîl et-ta'qîd 'alà 'l- lodawwana, 230 (n. 2, 16 0 ) .
Takmilat e~-~ila , 392.
Tal'al el-mochtarî ji'n-nasab el-ja'jarî, 354-305.
fi thoboùt lawbat ez-Zamakhchari, 115 (n. 2, 20 ) .
Tàli' el-amàni 'alà charl). ez-Zorqànî, 334 (Il. 1,1 0).
et-Tàli' el-man':toLls fi 'r-radd 'alà Akensoüs, 212 (n .).
el-mochrîq min ofoq el-man~iq , 246 (n . 1, 3(') .
TaU'at ed-da'a, 3HS.
et-Tà 'lif fi a1).kàm el-Iafîf, 246 (n. 1, 9 0 ) .
cl-Ta'lîq el-fàlit,l min MowaHà i\Iàlik, 373 (n. 3, 70 ) .
Talkhî~ el-miftà1). (commentaire), 291 (n. , bD) .
(glose), 271 (n. 4 , 11 0 ) .
Talqîl). el-adhhàn bi-tanqîJ;t el-borhàn , 246 (n. 1, 20 ) .
[1 itàb] et-tamhîd, 396 .
et-Tanbîh 'alâ man Lam iaqa' bih min foq,alâ' Fâs tanwîh, 281.
Tanbîh dhawî 'l-himam el-'alîyya 'alà'z-zohd fi'd-donià 'l-fànîyya, 263
(n . 7, 20 ) .
el-mo'riçlin 'an à'( àt es-samàwàt wa'l-àràçlin, 218 ( n. , 120 ).
eii-$aghir min el-wildân 'alâ mâ waqa' fi 17ws'dlal el-hârib ma'a
'l-hâriba min el-hadhayân li-z â'im el-fatwâ A'ajlîyyân, 258
(n. '1 ), 393.
Tanwir ez-zal11àn bi-qodoùm )lawlànà Zaïdàn , 393.
Taqyîd 'alà jadàwil el- l~awfi , 100 (n. 3, 6 0 ) .
el-l:wqîqàt el-'aliyya wa-lachyid ek~arîqat ech-c~làdhilîyya, 3t-14.
et-Ta'rîj bi'ch-chaïlïh Abî'l-'Abbàs Af},med el-Iamanî , 302.
bi'l-'acharat el-kiràm wa-bi'l-azwàj cHàhiràt, 256 (n. 5,2 0 ) .
Tà'rîkh el-kholafà', 80 (n . 1).
es-Soùdàn, 3.
el-Taslîa wa's-solwàH li-man ibtalà bi' l-idhàya wa'l-bohlàn , 373 (n. 3,
60 ) .
Ta'tîr el-anjâs fCI-la'rîj bi'ch-chaïlïh Abî ' l-'Abbâs, 38;:; et 11. 1.
Tatmîm el-afrà1). bi-tan'îm cl-arwà1)., 278 (n ., 1jO).
TawchîJ;t ed-dibàj wa-l).iliat el-ibtihàj, 251, (Il. 1), ~93.
INDEX DES TITRES D'OUVRAGES 457

Tat~ im el-millna bi-no~rat cs-sonna, 354.


Thamarat onsl fU-Latrîf bi-nafsî, 338.
TO~tfQt ahl elj-Ijadîqîyya bi-asânîd eHâ'ifal el-jazoûllyya wa':=-zarroûqîyya,
274 , 276, 393.
el-alcâbir fi manâqib ech-chaUch tA bd el-Qâdir, 267.
el-alchillâ' bi-Qsânîd el-ajillà', 264 (n. , 60) 391.
el-a~}:tàb wa'r-rifqa bi-b a tc.l masà' ïl e~-~afqa, '259 (n. 4, 3°) .
el-l),âdl ' l-motrib fi raft nasab charafâ' el-Maghrib, 167 (5°) .
el-}:tokkàm, 14.
(commentaire), 259 (n. 4,2°),334 (n. l , 3°).
(glose sur le commentaire de l\Iayyàra), 298 (n. 4, 2°) .
To~~raL el-ilchwân bi-batq., manâqib chorafâ' Wâzzân, 326-327.
wa'l-àwlîyyà' fi thoboùt ~antat es-sîmiyyà' wa-bopàn
tihn el-kîmîyyà', 168 (J 0°).
wa-mawâhib el-Ïtntinân fî manâqib sayyielî Riq.,wân, 255 ,
393.
el-matâljir Jî batq., Ijâlil),î talâmidhal Abî tAbel Allah ~n Nâljir, 337
(n. 1).
eHàlib, 395.
ez-zâ'ir bi-batq., m,anâqib sayyîeli 'l-(-Iâjj A~tmed Ibn tAchir, 313.
et-Torfa fî ilchtiljâr et-Tol),Ja, 276.
et-Torjomân el-motrib tan dowal el-Machriq wa'l-Maghrib, 26, 68, 78, '140
(n. 1), 167 (10), 170-182, 209, 357, 358, 362, 394.
el-Torjomânat el-lcobrâ ellatî jamatat alchbâr modon el-tâlam barrân wa-
bohrâ , 61, 167 , 168 (12°), 17 1, 185-190, 360 .

WaJayât (d'el-l;lâfi~ el-Fàsî), 98.


(d'el-Maklàlî), 98,393.
(d'el-Fichtàlî), 98 et n. l, 393.
(d 'el-Wancharîsî), 394.
el-atïàn, 248, 396, 397 , 398 , 399.
el-vVàfi bi' l-wafayàt, '26.
\Vasîlat es- àlikîn bi'l-tàrifîn el-kàmilin, 218 (n., 14°).
el-Wasîtfi tarâjim, odabâ'Chingît, 377 (n. 2).
V a~lat ez-zolfà' fi't-taqarrob bi-'àl el-Mo~~afà, 206 (n. 5,1°).

Zàd el-mojidd es-sârî fî matàli el-Bokhàrî, 334 (n. 1,4°) .


t

Zahr el-afnàn min }:tadîqatlbn el-\Vannàn, 353.


_ el-akam fi'l-amthàl wa'l-}:tikam, 271 (n. 4, 1°) .
(résumé), 372 (n. 3, 2°).
ez-Zahr el-bâsim âw el-torf eh-nâsim fî m,anâqib ech-chaïlch sayyîdî Qâsim,
i>21.
Zahr ec h-chamârîlch fî tilm et-lâ'rîkh, 268-~69.
(commentaire), 392, 397, 398.

- - - -______. u__________________~______________________. . . .
458 LES HISTORIENS DES CHORFA

Zahr el-1;tadà'ïq wa-kbo]à~at cl-l).aqà 'ïq min sîral sayyîd el-khalà'ïq,


303 ·(n. 4, 4°).
cz-Zahr en-nadî fî'l-khalq cl-mo1;tammadî, 303 (n. 4, 30).
e:f-Zill el-warîj jî majâkhir mawlânâ Ism â'i'l bni 'ch-Chadj, 68 , 114-115,
121, 211,39;).
Zobdat el-aw[àb fi ikhli~àr el-1Ja[tàb 259 (n. 4, 1°).
INDEX ETHNIQUE ET TOPOGRAPHIQUE

Adekhsân, 145 el n. 4, 15'J. l30rj nord et sud (à Fès) , 108 eL


Aghmât , 95 et n. 1. n.2.
AJ:tmar , 369. Boù Brîl) , 342 el n. 2.
mâloù (Aït) , 146 (n. 2), 151 , 187. Boû'inânîyya (médersa de F@s),
Amejjoût, 342 (n. 2) . 298 (n. 1), 301, 303.
(Amir (B.) , 175. el-Brija, 131 el Il. 3, 233.
el-Andalos (mosquée de Fès), 146,
249, 319 , 321, Chabànât, 175.
,\.ngàd, 161, 171. Chafchâwan, 232.
Anjra, 336. ech-Charràtill (médersa de Fè ), 114
'.\.qabat el-ma àjin (pisle de la ban- el n. 2. '195 (n. 1) .
lieue de Fès), 227 ct n. 3. Aboû'ch-chllà' el-Khammàr (za-
~ Aqabat Ibn ~alY\vâl (rue de Fès), wîyya d'), 49 (n. 1) , 178 (n.) .
341, n. 3. ech-Chorfa (mosquée d') à Fès, 303,
Arawân, 2~1. et n. 3.
Aroggo, 145 et n. 4. ech-Charabliyîn (quartier de Fè ),
'Aroù (B.), 156 (n. 2). 382.
Asjen, 311, n. 4. Chrâga el-cAjam, 175, 178 (n.).
Athlàlhil, 236 (n. 1).
( Hà' (AH), 155 ct n. 3. Dàr Baïçlâ' (palais de Meknès), 195
el-(Attàrîn (médersa de Fès), 104 (n.) .
(n. 4), 146. Dàr Dbîbagh, 157 ct n. 1.
'Ayyâch (AH), 262. ed-Darb et-~awîl (rue de Fès), 259 et
n. 7, 344 et n. i, 382.
el-Badî( (palais), 93 et n. 1, 96,123, ed-Dilà' (zâwlyya d'), 124,244,261,
124,127,130,194 (n. 2),212 (n. 1), 269, 278, 300, 348.
252. Dlîm, 175.
cl-BUda (quartier de Fès), 226 et Dokkâla, 1~8.
n. 3,382. Dokkâla (Bâb), 108 ct n. 3.
460 LE HISTORIENS DES CHORFA

ed-Doûl}. (quartier de Fès), 382. KhioL 17;).


Kibdàna, 175.
Fihr (B.), 241.
el-Kolobîyin (mosquée de Marrà-
Fondaq el-iahoûdî (quartier de Fès), kech), 240.
~82. .
cl-Fotoûl}. (Bâb el-) , 90, 105 (n. 1), Ma<allqa (Bàb), porte de Salé, 353.
134, 217 (n. 'J), 241, 246 ,276 ,277, el-:\lachàrl <, 283.
283, 286, 294, 310, ~2 '1, 341, 382. el-Machwàrîyîn (Bàb el-), ancienne
Gal<îyya, 175. porte de Meknès , 2'28, n. 2.
el-Mahdîyya, 281 et n. 1.
el-Gbeb (cimetière de Fès), 382.
el-Mal}.roûq (Bàb el-), 383.
Gernîz (quartier de Fès), 382.
Gharb , 1~2, 175. el-Makhàtin, 103.
:.\1akhàzin (Wàdî '1-), 28, 72, 103,
Gîsa (Bàb), 105 (n. 1), 283, 288, 338 ,
'107 , 132 (n. 2),175, 241.
382, 383.
l\Iàlik (B.), 175.
Jàma < el-gnâïz (à Fès), '118 (n. 3).
Man~oùr el-<Eulj (Bàb), porte de
el-J:ladîd (Bàb e l-) , 134 et n. 6. Meknè ,195 (n.) .
el-I;Tàfàt, 313 (n . 6) . el-Man~oûrîyya, 158 el 11. 1.
I;Ialq el-Wàdî, 136. Iasjid Ioûsofi, s. Madrasat Ibn Ioù-
T:Iawz , 175. sof.
T:Iazmîr, 224 (n.) . . Ma ràta, 187.
I;Tiâïna, 155. Mi~bàl}.îyya (médersa de E è ), 256 ,
I;lojr Bàdis , 131 et n. 2. 265.
Mnàbha, J.7~.
Idà où Kensoûs, 200. Iolwîyya (Wàdi), 161.
Ifrân, 113. el-Motawakkilîyya (madersa de Fès),
Innàwan (Wàdî), 134. et n. 1.
Joùsî (Aït), 269. M~à< (O.), 175.
Ibn loùsof (Madrasat), à Marrâkech , 1 ~ir ( B.), 1GO et n. 4.
11G et n. 1, 118, aHL
Jznàsen ( B.) . 175. en- Jaj j àrîn (quartier de Fès), 382.

Aboù'l-Ja<d (zâwîyya d'), '119, 297. el-<Obbàd (faubourg de Tlemcen),


Jadd (B.), 241. 161, 164, 17 t", 191.
Jarràr (O.), -175. Omm er-rabî<, 1~8.
Boù Jîda (Bàb Sidi) , 383. 'Olhmân (B.),225.
el-Jorf (quartier de Fès), 382. el-<Oyoùn (qa~ba d'), 161 ct n. 1.
el-<Oyoùn (quartier de Fès), 88 (n.
el-Kaddàn (quartier de Fè ), 382. 4), 38'2.
el-l aghghâçlîn (cimetière de Fès),
227 et ll. 4, 256 . el-Qalqaliyîn (quartier de Fès), 241
el-Khamîs (qa~ba d', à Fè ), '195 (n. 3), 265, 266, 284, 295, 3-19,
(1\. 1). 329.
boû 'l-Kharàrib (égout de Fès), el-Qarawîyîn (mosquée d'), 9, 16,
177 (n. 1). 58,80,108,113,146, 202, 249, 321.
INDEX ETH~IQUE ET TOPOGHAPHIQUE 461

cl-Qanànln (quartier de Fès) , 382. c kTal'a (quartier de Fès), 135 et n.1,


233, 382.
cr-Rabb (Bàb), porle de Marràkech , Tamazzazl. 271.
204 et n. 2. Tamgroùt (zà\ lyya de), 99 et n. 1,
Hachidîyya (\1édersa) , s. ech-Char- 201, 291, 292, 316.
râ!în. Targha , 233 et n. 7.
Hagràga , 220. Tarzoùt, 232 ct n. ~.
llàs el-janân (quartier de Fè ), 382. Tàwoda (13.), 332 et n. 3_
cr-Ra~tf (pont de Fès), ,134 et n. 4, TcherLchoûr (quartier de Fès), 370.
195 (n. 1) . Tlîq, 175.
cr-Ra~tf (mosquée de Fès), 335 el n. 8. Trâra, 175.
Hawçl at el-'olamà' (cimetière de Fès),
382. Wls1ân (Wàdî), 134 et n. 2.
er -Rokll , 134.
Za};ljoùka, 233.
c~-$àgha (quarlier de Fès), 382. Zarhoûn, 161, 228, 230.
c~-$ahrîj (méder a de Fès), 116, Zayyàn, 145.
n. 1, 146. Zcrbtàna (quartier de Fès) 98 et n.
e~-$awma'a, 239. 4.
$awwàfin (Wàdi '~-), 134 et n. 5. Zirî (monlagne d'Aboû), 244 cl n. 3.
es-Siàj (quarlier de Fès), 165 el n. Zoqâq el-};ljar (quartier de Fès), 88
5, 278, 382. (n. 4).
Snolls (B.), t75. Zoqâq er-rommân (quartier de Fès),
Sofiân, 175. 382.
Zowâwa, '175 .
Tàdlà, 220 et n. 2. Zrâra, 175.
TABLE DES PLANCHES

Pages.
ne
FIG. i. _ Fac-similé d'une page de la chronique sa'dien de
l'Anonyme de Fès . 132
. FiG. 2. _ Fac-similé d'une page d'et-Torjomânat el-kolJrâ d'ez-
Zayyànl, avec annotation marginale autographe. 186

~-IG. 3. _La , carle des mcrs " d'ez-Zayyànî . 188


FIG. 4. _ Fac-similé de la ùernière page de la copie du KiLâb el-
~isliq~â,
revue par l'auteur 351
}'IG. 5. _. Fac-similé d'une page de la copie du Ki/âb el-isLiqsâ,
avec annolation marginale de la main d'eJl-Nà~irî. 3~9
TABL E DES MATI ÈRES

Il

SYSTÈ)1.E DE TRANSCRIPTlON.

INTROD CTlON

,. _ 0 urees arabes de l'his lo ire du Maroc p ubUées ava n t 1900, 1. -

Documenls nouveaux, européens et arabes, 4


Il. _La littérature arabe marocaine, 6. - Elle commence avec le
Maroc des Charra. 8
lII. _ La culture du ,..ant marocain, il. - Les « manuels », 13.
_ Tjâza et fahra,a, 15. _ Les œuvres sonl le refiet de celte cul- 16

lure .

PREMIÈRE PARTIE: LA CONCEPTION DE L'HISTOIRE

1. _ LES MAROCAINS ET L'UISTOll\E.

1. _ Les ~Iarocains parlent peu d'intérêt à l'histoire, 19. -


Ileso de juSlificatiO/l de la part des historiens. 23
in
Il. _ Utililé de l'histoire, d'après le historiens, M. - C'est une
science ortbodo , 2,. _ L'exemple classique de l'utilité de
xe
l'histoire, 26. _ Arguments pseudo-philosophiques. 28
Ill. _ Les historiens clas ique s, 29. - Définitions de l'histoire, 91.
_ Le mot tâ'rîl<h. . 30 32
466
LES IIISTOnIE~S DES CHOHFA

11. - LEs Gr·; RES rusTonrQUEs

A. - L'histoire dynastique. . 34
L'historiographie officielle, 34. - Le historiens officieux, 35. _.
Le contenu de leurs livres, 36. - Les historiens partiaux, les
pamphlétaires, 39. - Les historien politiques sont nécessai-
rement prudents, 40. - Un genre d'hi toire politique: l'orjoûza,
42. - Toutes ces histoires laissent de côté la vie intérieure du
pays 42
B. - La littérature biographique. 44

Cette littérature n'est pas particulière au )jaroc musulman, 44.


'- Le Maroc, pays des saints et des chorfa, 45. _ L'extension
de la littérature biographique dans l'empire date de l'avènement
des Chorfa, 47. - Les généalogistes, 48. _ Les hagiographes, 49.
- Ces écrivains sont les eu ls historiens du mou vement reli-
gieux, 50, - mais leurs Ouvrages ne sont pas dépourvus d'indi-
cations politiques. 5t
La COn cepti on de l'h is toire n'es t pas pa !'li c uli è"e aux lettrés dupa ys,
53 ; - et les œuvres qui en découlent ne sont que des bribe
d'histoire. 54

III. - LES PROCÉDÉS.

Les procédés communs à tous les historien marocains sont égale-


ment COmmun à lous les hi toriens arabes. 55
1. - Procédés d'information, 56. - Le Sources écrites, 57. _
Difficulté de se les procurer, 58. - La répétition de tonte les
informalion relativcs à un méme événement, 59. _ Retouches
Successives, 60. - Le plagiat tentant et rarement dénoncé, 62.-
Seules, les Sources marocaines conlemporaines des faits qu'clles
relatent sont dignes de confiance, 63. _ Leur valeur, 64. _
Rejet des informations POpulaires, 65. - Indifférence à l'égard
de ce qui n'est pas le Maroc. 6S
II. - Procédés d'e.~posilion,
68. - La chronique royale ou dynas.
tique, 68. - Les portraits, 69. - Les fonctionnaires du makh-
zen, 70. - Lcs chl'Oniques sont des chre tomalhies littéraire,
70. - Reproduction de correspondances royales, 71. _ Le chro-
niqueurs mentionnent la construction ou la réparation d'édi-
fices publics, 71, - les phénomènes météorologiques, les épidé.
mies, 72. - La chronique annuelle mixte marque la transition
entre la chronique politique et le dictionnaire biographique, 72.
- Le cad"e des biographies, 73. - Le riMa. 74
'fABLE DES MATIÈRES 467

II. - Procédés d'expression, 74. - Le style est uniforme: c'est


celui des devanciers; mais la langue a évolué dans une cer-
taine mesure, ï 4. - Les chroniques sont en général lisibles, 76,
- avec 'ouvent des tendances à l'afféterie et à l'emploi de la
pro e rimée, 77. - Le style des biographes et surtout des hagio-
graphes s'accroît de la terminologie du ~oùfisme, 78. - Style des
orjoùza mnémotechniques de chronologie ou de wafayâl, i9. -
Le images , 80. - La langue s'est enrichie d'apports nouveaux;
causes, 80, - de même que la langue officielle. . 83

DEUXIÈME PARTJE LES HOMMES ET LES ŒUVRES

1. - LES HISTORIENS DE LA DYNASTH; SA 'DIENNE.

A. - Al;lmed e]-~Ian~oûr, protecteur des savants, 88. - Son maître


el-"M alljoùr, 88. - Ses hi loriographes: 'Abd el-',\.ziz el-Fichtàli,
92, - dont les .\ fanâhil efi-fiafâ', 95, sont aujourd'hui perdues, 96.
- Mol}.ammed b. 'lsà,97 ; - Mo:Qammcd el-Fichtà1i, 97 ; - et-
Tamgroûti, 98 ; - Afoqàî, 100. - Jbn el-Qàçli : sa vie, 101, -
ses œuvres historiques: el-Monlaqâ, 105 ; - Dormi es-soloâlî. 110
B. - el-Ifrànî, 112 ; - peu de renseignements sur sa vie, 114 ; - .
imprécision de la date de samort, 115. - Sa So z hai el-f),âdî, 120;
- date , 121 , - contenu, 12~, - sources, 125, - valeur de l'ou-
vrage, 128
C. - L'_\.nonyme de Fès, -131 ; relation de la dynastie sa'dienne et
histoire particulière de Fès, '133. - Son auteur '1 135. -- Est-il
un pamphlétaire ? 136

Il. - LES HISTOJUENS DE LA D"l' NASTlE 'ALAWITE, JUSQU 'A U


RÈGNE DE MOULAY EL-J;IASAN.

J. - Le ministre historienAboù 'l-Qâsim ez-Zayyàni, 142. - Son ori-


ginalité, '144. - " Ses études, 146. - Premier voyage en Orient, '14 7,
et retour par l'Europe, 149. - Ez-Zayyànî secrétaire de Sidi-
~lol;lammed b. 'Abd Allah , 150; - ambassadeur à Constantinople,
HS2; - persécuté par ~Ioulay el-lazîd, 156 ; - ez-Zayyànî et
Moulay Solaïmân, 161 ; -- retraite à Tlemcen et deuxième
voyage en Orient, 161; - reLour à Fès, 164 ; - ez-Zayyànî vizir,
165; - sa mort, 165. - L'écrivain, 166. - Liste de ses œuvres,
167. - Le Torjomân, 169 : - partie sa'dienne, 172 ; - partie
'alawite, 177; -existence de deux version, 179. - Le Boslân, 182.
- La Torjornàna, 185. - Sourëes d'ez-Zayyànî, HIO. - Ses ten-
dances , 192. - Sa connaissance des choses d'Europe. . -i9.'
468 LES HISTORIENS DES CHORFA

Il. - Mol).ammed Akensoûs, 201, - vizir de Moulay Solaïmàn, 202;


- poèLe officieux, 203. - Le Jaich, compilation médiocre, 204 ;
- Akensoùs plagiaire . 208
Ill. - Mol).ammed eçl-l)o'ayyîf . 213
1V. - La chronique anonyme ed-Dorr el-monaq.lj,ad 215

HI. - LES BIOGRAPHES.

Coup d'œil rétrospectif sur les biographes marocains antérieurs au


XVie siècle, 220. - Ibn ez-Zayyàt, 220 ; - et-Tàdili, 221 ; - Ibn
Abi Mol).ammed ~àlil,l, 221 ; -el-Bàdisî, 221; - el-tlaçlrami, i22;
- I.bn TijJàt, 223 ; -- el-Jaznà'ï, . 224

Biographes du xe siècle de l'Hégire (1495-1592 J.-C. ).


Ibn Ghàzi, 224 : - er-Rawq., el-haloun, 2~7 ; - el-Ta'allol, 230. -
Ibn 'Askar, 231 : - la Dawzwl en-ndchir. 234

Biographes du XIe siècle de l'Hégire (1592-1689 J.-C. ).


'Abd el-Wà1) id es-Sijilmàsi, 238. - e~-~awma'L et-Tàdili, 239. - Les
premiers Fàsîyîn : .\..bo ù'l-)Ial,làsin , 240. - Tableau généalo-
gique de la famille , 242. - Les fils d'Aboù'l-~Ial).àsin : _\..l,lmed,
243) - et l\Iol).ammed el-'Arbi, 245; - la Mir'dl el-ma~tâsin, 246.
- Ibn el-Qàçli, biographe, 247 ; - la Jaclhwal el-iqtibds, 248. -
Al).med Bàbà, 250 ; - ses biographies de jurisconsullcs, 253. -
el-i\Joràbi, 255. - Al).med oLL'Ali es-SoùsÎ, 255. - IbràhÎm el-
Golàli, 257. - et-Tinmàrli, 257. - i\Ial.wmmed Mayyàra, 258. -
el-Marghithi, 260. -- Le voyageur el-'Ayyàchi, 262. - '.\..bd el-
Qàdir el-Fàsî, 264, - et son fils 'Abd er-Hal).màn, 266 ; - cl-
IOLLsi, 269, - ses Mo~'/,dq.,arâl, 272.

Biographes du XIIe siècle de l'Hégire (1689-1185 J.-C.).


Mol,lammed el-Mahdi el-Fàsî, 273. - Les Qàdirtyin : Mol,lammed
el-'Arbi, 270; - 'Abd es-Salàm, 276. - Ibn ' _Uchoùn ech-Char-
rà t, 280, - peut-être plagiaire de Mol,lammed el- 'Arbi el-Qàdiri,
281. - Mol).ammed eVrayyîb el-Fàsl, 283. - Mol,lammed el-vVa-
zir el-Ghassànî, 284, - ambassadeur de Moulay lsmà'ïl en Es-
pagne, 285. - Al).med el-~lalabi, 286. - Ibn Zàkoùr, 287. -- el-
'W a llà li , 290. - Al,lmed Ibn Nà~ir et sa ril),la, 291. - Al).med Ibn
'A~îyya, 292. - el-'Omaïrî, 293. - Al,lmed el-Qàdirî, 294. - Ma-
l).ammedb. 'Abd er-Ra1)màn cl-Fàsi, 295.:- el-'Alami, 295. -el-
Ma'dànî f 297. - Les Dilà'ïyin , 298; - tableau généalogique de
la famille, 299; - ~Iol).ammed el-~I[asnàwj , 301 ; - Mol,lammed
Ibn 'Abd er-Ra1)màn, 302. - A1;tmed el-'Vazir el-Ghassànî, 304.
- el-Modarl'a', 304. - A1).med b. el-Khayyàt, 305. - el-[frànî bio-
. graphe; la $afwat man il/Lachar, 306. - A1)med es-SijiJmàsî, 300.
TABLE DES MATIÈRES 469

<Abd el-vYahhàb Adcrràq, 310. - Ibn lkhlcf, 311. - .l\Ial~ammed b.


<Abd es- alàm Bcnnàni, 312. - Ibn <Achir el-f.Iàfi r 313. - <Abd
el-Majî.d el-Manàli ez-Zabàdl, 314. - Mol;lammed eV\1akkî ed-
Dara\i, 3H>. - Al.lmed el-HilàU, 316. - Idris et <Abd er-Hal).-
mân el- Manjra, 317. - J\lal~ammed b. Al).med el-Fàsl, 318. _
Mol).ammed b. eVfayyib el-Qàdirî, 319-21 ; - le Nachr el-ma-
thânî et l' llliqât ed-dorar, 322. - Les biographes de chorfa de
Wàzzàn: et-Tàhirî, 326; - Mol).ammedb. T;Iamza el-)Iikl1àsl, 327 ;
< bd es- alàm b. el-Khayyàt el-Qàdiri, 3:27. - el-Ghazzàl, 327,
- ambassadeur de Sidi :\Iol~ammed b. <Abd Allah en Espagne,
-328; - sa relation, 329. - Les biographes des Charqàwa : <Abd
el-Khàliq ech-Charqà" l, 330, - et el-<Abdoùni, 330. - l1-fanâqib
de Abd .\.llah el-l hayyàL 331. - el-<Achmàwj, . 331

Biogral,hes da Xl Ile siècle de l'Hégire (1186-1883 J.-C.).


lbn Soûda, 33'2. - Mol).ammed el-Manàl1 ez-Zabàdî, 334. - <Abd el-
vYàl).id el-Fàsi, 335. - Ibn 'Ajîba, 336. - el-~Iawwàt, 336 : el-
Bodoûr ecf--cJâwîyya, 338; -la </nâyat oûlî ' l-majd., 339. - <Abd
el-Qàdir el-Koûhin, 340. - cl-<Iràqî, 341. - Mol~ammed el-
Mahdi Ibn el-Qàgi, 341. - ~Iol:lammed et-Tàlib Ibn el-J:Iàjj,
342; - le Riâq, el-ward, 315. - <Abd el-KabiJ: cl-Fàsj, 3~6. _
i\1ol).ammed el-Amin e~-~(:IlFàwi, 346. - ..\.boù .\.mlàq, biographe
du mojàhid el-<Ayyàchi 347

IV. - HISTORIENS ET BlOGHAPlIES CONTE:llPOltAINS.

Quelques tendances nouvelles semblent se faire jour, 349 ; - -en-


Nà. id, 350; - sa carrière administrative, 352; - ses œuvres; la
Tal<at :el-nwchtarî, 354. - L'Istiqljâ, 355 ; - devait d'abord être
limité à l'histoire des Mérinides, 357 ; - utilisation postérieure
de nouvelles sources, 358 ; les sources arabes, 360 ; - ulilisation
de Sources européennes, 364; - l' Istiqljâ, histoire de alé, 366 ;
- en-l à~iri lettré, 367; - et écrivain. 368
l).med Ibn el-T;Iàjj, historiographe de Moulay el-~Iasan, 368; son
ouvrage, 369. - La chronique anonyme el-riolal el-bahlyya, 371.
- e - abà<ï, 372
Hareté des recueils de manàqib, 372. - Deux généalogistes: Gell-
noûn, 373, - et el-FoçlaïU, 374. - Travaux sur le confréries
Darqàwa, 316 ; - Tijjàniyya, 377. - La famille et la confrérie
des Kattànîyya, 377; - ses historiens, el-:\1à'moùn el-I aLtàni,
378 ; - Ja<far el-KatLàni, 379; - Mol~ammed el-I attànl, 379; _
auteur de la Salwat el-anfâs, 380; - l'introduction, 381 ; - le
réperLoire, 382; - utilisaLion scrupuleuse des source, 384. _
Ibn el-Mowaqqit, 385. - el-<Abbàs b. Ibràhim, 386

CONCLUSlON • 387
470 LES HISTORIENS DES CHORFA

ApPE "DICE 1.
391
a) Sources de la Nozhal el-lJ,âdî d'cl-Hrânî 391
b) Sources du Nachr el -malhânî de Mol:).ammed el-Qâdirî . 392
c) Sources d'et-Torjomân el-mo'rîb et d 'el-Boslân e:r--;arîf d'ez-
Zayyâni. 394
d) Sources d'el-Jaïch el-'aramram, d'Akensoûs 39Q
e) Sources du Kitâb el-Istiq~â d'en- T à~irî . 396
10 Autorités musulmane invoquées 396
20 Emprunts d'en-Nâ~irî à Castellanos. 399

ApPENDICE II
400
a) Liste des fonctionnaires impériaux et des grands qàÇl.is de Fès
et de Marrâkech
b) Lisle des commandements territoriaux au Maroc sous le
règne de Sidi Mol).ammed b. <Abd Allah. 405
OUVRAGES EUROPÉE S ET ORIENTAUX CONSULTÉS. 407
1 "DRX DES NOMS D'AUTEURS ET DE PE1"\.SOlSNAGES CITJ~S. 413
IlSDEX DES TITRES D'OUVRAGES. 441
INDEX ETHNIQUE ET TOPOGRAPHiQUE . 4Q9

5122. _ Tour, imprimerie E. RRA LT . e t Côe.

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