L'ame Egyptienne

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L’AME EGYPTIENNE.

Marc-Alain DESCAMPS

1.

Tous les peuples anciens ont cru aux fantômes et par conséquent à une survie de
l’âme, mais ces âmes menaient une vie très diminuée, se traînant languissamment
dans un monde chaotique et crépusculaire.

La civilisation égyptienne pendant trois mille ans va être la première à avancer une
réflexion approfondie sur les différentes parties de l’être humain. L’ensemble paraît
relativement complexe, mais cela semble du au passage d’une conception primitive
à une forme plus évoluée.

L’être humain paraît constitué de cinq éléments : le corps, l’ombre, le double, le


nom et la forme.

1. Djet (ou sab) le corps, après le départ du reste lors de la mort, devient Khat,
le cadavre. Il peut aussi devenir une momie, si l’on opère sur lui tous les rites
de l’embaumement, qui le rendent indestructible.
2. Shout, l’Ombre est indissociable du corps, en Egypte tout corps a son ombre,
par contre le fantôme ne fait pas d’ombre et c’est à cela qu’on le reconnaît.
Après la mort c’est Shout l’Ombre qui devient Mout le fantôme harceleur
des vivants.
3. Ka, le Double, est l’élément original de l’Egypte, qui pense que chacun a son
double. Ce devait être sans doute la première forme de l’âme dans l’Ancien
Empire. De nos jours, on le considérerait comme le corps éthérique ou astral,
le double fluidique.
4. Ren, le nom est une partie indispensable de l’individu. Son nom fait son être,
sans nom il n’existe plus. L’effacement du nom était le grand châtiment des
criminels, leur mort définitive qui les condamnait à l’anéantissement total de
l’oubli.
5. Ba, la Forme est ce qui correspondrait le plus à notre notion d’âme, mais
selon une réalité toute différente : il s’agit de la forme du corps. L’âme n’est
rien d’autre que la forme du corps, qui garde une forme humaine après la
mort. D’où l’importance des rituels d’embaumement et de momification.
L’homme garde une " âme " tant que son corps garde sa forme humaine et ne
se décompose pas. Par là se comprend enfin toute l’importance de la
préservation et de la conservation des cadavres en Egypte. Le tombeau
(pyramide ou mastaba) est une garantie de survie.

Ka + Ba, plus tous les rites du réveil de l’âme constituent Akh , le Bienheureux ;
après toutes les cérémonies de l’ouverture de la bouche, du nez, des yeux … le
décédé acquiert un corps glorieux. Alors différentes possibilités s’ouvrent à lui,
grâce au Livre des Morts qui lui indique le chemin à suivre et lui donne les mots de
passe. Il peut aller dans les Champs d’Ialou où il continuera à mener la même vie
(de noble, de soldat ou de fellah). Il peut au contraire rejoindre les paradis stellaires
(Orion, Sirius …). S’il a déjà été initié à Osiris, il devient Osiris ; mais ceci s’est
surtout développé dans le Moyen Empire. Enfin Pharaon, grâce à sa momie qui
garde la forme de son corps, entre dans la grande lumière qui brille pour les morts,
représentée par le soleil de minuit, Ré : " Je suis le début et la fin, je suis l’Unique,
celui qui se créa lui-même ". Et il conduit sa barque dans le monde souterrain de
l’Amentat.

Avec le temps ce privilège fut aussi accordé à la famille royale, puis aux nobles et
enfin à tous les riches qui ont pu avoir une momie et recevoir les rites. Par là ils
pourront éviter la seconde mort qui est la mort de l’âme. Il existe pour cela une
prière spéciale : " Que je ne meure pas une seconde fois dans l’Amentat. Que je ne
sois pas victime de tous ces crimes que l’on commet dans la nuit. Que je ne sois pas
conduit dans la chambre d’abattage. Que je puisse résister aux démons Buveurs de
sang aux dents éclatantes et aux génies Mangeurs du Foie. Que je reste lumineux et
rassasié " réellement, continuellement, éternellement ".

Ainsi l’Egypte a considéré qu’un principe individuel et responsable survivait après


la mort, à condition que le cadavre garde sa forme humaine et reçoive les rites
magiques de réveil dans l’au-delà. Grâce aux rites spéciaux des cultes initiatiques
(Osiris, Phénix …), il était possible d’imiter Pharaon et de se donner une âme.

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