Moudjib Djinadou Et Son Oeuvre (Mémoire de Maîtrise en Bloc)
Moudjib Djinadou Et Son Oeuvre (Mémoire de Maîtrise en Bloc)
Moudjib Djinadou Et Son Oeuvre (Mémoire de Maîtrise en Bloc)
RÉPUBLIQUE DU BÉNIN
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UNIVERSITÉ D’ABOMEY-CALAVI
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Facultés des Lettres, Arts et Sciences Humaines (FLASH)
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Département des Lettres Modernes
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Mémoire de maîtrise
Thème :
Professeur à la FLASH
0
Moudjib Djinadou et son œuvre
Dédicace :
1
Moudjib Djinadou et son œuvre
Remerciements :
- À mon maître de mémoire, Guy Ossito
Midiohouan, à qui je tiens à exprimer ma vive
reconnaissance pour sa constante disponibilité,
son amour du travail bien fait et ses judicieux
conseils.
INTRODUCTION
3
Moudjib Djinadou et son œuvre
1
Voir Guy Ossito Midiohouan, « La problématique de la désignation » in L’idéologie dans la
littérature négro-africaine d’expression française, Paris, Éditions L’Harmattan, 1986, p. 14.
4
Moudjib Djinadou et son œuvre
2
Notre classification s’inspire de celle proposée par Guy Ossito Midiohouan dans Le Bénin
littéraire 1980-1999, novembre 1999, « Introduction ».
5
Moudjib Djinadou et son œuvre
C’est sûr, nous sommes animé du désir de faire découvrir tous ces
jeunes auteurs, mais le premier contact avec Moudjib Djinadou, à travers l’un de
ses ouvrages, en l’occurrence MO GBE : Le cri de mauvais augure3 – le sujet
abordé, la simplicité du style, la vraisemblance des faits décrits – a été
déterminant dans le choix du thème.
3
Moudjib Djinadou, MO GBE : Le cri de mauvais augure (Roman), Paris, L’Harmattan (Encres
noires), 1991.
6
Moudjib Djinadou et son œuvre
7
Moudjib Djinadou et son œuvre
Chapitre I :
À la découverte d’un écrivain
8
Moudjib Djinadou et son œuvre
« Je est un autre »4 disait Arthur Rimbaud pour signifier qu’il importe
de faire la différence entre l’individu qu’il est et l’écrivain qui apparait à travers
les poèmes qu’on lui connait.
Donc on ne peut aller à la découverte d’un écrivain sans aller d’abord
à la découverte de l’être social dont l’écrivain n’est qu’une émanation. Dans
cette logique, ce premier chapitre comportera deux points. Le premier permettra
de faire la biographie de Moudjib Djinadou en présentant son cadre familial, son
cursus scolaire et académique, sa conception de la vie. Le second point
consistera en la présentation de l’écrivain c’est-à-dire de ses œuvres.
5
Entretien avec l’auteur, à Cotonou, le 28 janvier 2005.
6
DJINADOU (Moudjib), Blédici, chez l’auteur, 1996. Roman, P129.
11
Moudjib Djinadou et son œuvre
7
Entretien avec l’auteur, à Cotonou, le 28 janvier 2005.
8
Moudjib Djinadou, MO GBE : Le cri de mauvais augure (Roman), Paris, L’Harmattan (Encres
noires), 1991.
9
Moudjib Djinadou, Mais que font donc les dieux de la neige? (Roman), Paris, L’Harmattan
(Encres noires), 1993.
12
Moudjib Djinadou et son œuvre
Il lui a fallu encore trois ans pour publier une nouvelle intitulée
L’avocat de Vanessa10, suivie quelques mois après d’un autre roman Blédici11,
publié à compte d’auteur. C’est donc un écrivain aux multiples facettes,
romancier et nouvelliste.
Il prépare actuellement une tragédie en cinq actes sur le roi Béhanzin
et un recueil de poèmes.
Avant d’aborder la présentation de ses œuvres, il est opportun de voir
quel est le contexte littéraire qui a prévalu à l’avènement de Moudjib Djinadou
en tant qu’écrivain.
10
Moudjib Djinadou, L’avocat de Vanessa (Nouvelle), Paris, L’Harmattan (Encres noires),
1996.
11
Moudjib Djinadou, Blédici(Roman), Porto-Novo, chez l’auteur, 1996.
12
Sembène Ousmane, Niiwan (Nouvelles), Paris, Présence Africaine, 2001.
13
Mongo Béti, Trop de soleil tue l’amour (Roman), Paris, Julliard, 1999.
14
Jacques Chevrier cité par Maurice NEVIS, Edgard Okiki Zinsou et son œuvre : Du contexte
de publication à la réception, mémoire de maîtrise (Lettres Modernes), Université
d’Abomey-Calavi, Abomey-Calavi, 2006, p. 42.
15
Boubacar Boris Diop, Le Cavalier et son ombre (Roman), Paris, Stock, 1997.
16
Kossi Éfoui, La Polka (Roman), Paris, Seuil, 1998.
17
Kossi Éfoui, La Fabrique de cérémonies (Roman), Paris, Seuil, 2001.
13
Moudjib Djinadou et son œuvre
18
Boubacar Boris Diop, Murambi : le livre des ossements (Roman), Paris, Stock, 2000.
19
Véronique Tadjo, L’ombre d’imana - voyages jusqu’au bout du Rwanda (récit), Actes Sud,
Paris, 2000.
20
Ahmadou Kourouma, Allah n'est pas obligé(Roman), Éditions du Seuil, Paris, 2000.
21
Tierno Monenembo, L'Aîné des orphelins(Roman), Éditions du Seuil, Paris, 2000.
22
Adrien HUANNOU, « Douze ans de littérature béninoise (1983-1995) » in Notre Librairie, n°
124, octobre-décembre 1995, p. 23.
23
Jean Pliya, Les tresseurs de corde (Roman), Éditions Hatier, Paris, 1987.
24
Barnabé Laye, Une femme dans la lumière de l’aube(Roman), Paris, Éditions Seghers, 1988.
25
Barnabé Laye, Mangalor(Roman), Paris, Éditions Seghers, 1989.
26
Jérôme Carlos, Fleur du désert(Roman), Abidjan, Éditions CEDA, 1990.
14
Moudjib Djinadou et son œuvre
31
Guy Ossito MIDIOHOUAN, « Introduction » in Le Bénin littéraire 1980-1999.
16
Moudjib Djinadou et son œuvre
Mais Mogbé est un fêtard, très dépensier qui n’a jamais pris l’habitude
de faire des économies. Ainsi Mogbé use et abuse de la fortune de sa riche et
laide fiancée. Avec la voiture et l’argent fournis par Faïssa, il séduit et entretient
d’autres jeunes filles. Faïssa finit par s’en rendre compte et pour le punir, décide
de rompre et de l’abandonner dans le dénuement total :
« un jour qu’elle le savait parti faire des courses
pour Aladji, Faïssa fit venir deux énormes camions qui
chargèrent tout ce que contenait l’appartement : depuis le
32
Moudjib DJINADOU, MO GBE : Le cri de mauvais augure (Roman), Paris, L’Harmattan
(Encres noires), 1991, p. 15.
33
Op. cit. , p. 40.
17
Moudjib Djinadou et son œuvre
34
Op. cit. , p. 45.
18
Moudjib Djinadou et son œuvre
Mogbé pense subir deux peines au lieu d’une. Il en conclut qu’il n’a jamais aussi
bien porté son surnom :
« Car en langue yoruba, Mogbé signifie
littéralement : ‟ je suis foutu”. Ou plus exactement ‟c’en
est fait de moi…” […] L’appellation de Mogbé venait d’une
exclamation de sa mère au moment où elle l’avait mis au
monde. Une exclamation de frayeur, car le brave ivrogne
qui lui servait de mari l’avait avertie qu’il était hors de
question qu’elle fît une fille. […] Folle de peur, la pauvre
femme avait cru défaillir lorsque, ayant demandé la
nature du sexe du nouveau-né d’une voix tremblante à la
matrone qui l’avait accouchée, elle entendit celle-ci lui
répondre – peut-être par jeu, peut-être par erreur –
qu’elle venait de faire une belle fille qui lui ressemblait ! ‟
Yé ! Mogbé !” avait hurlé l’accouchée désespérée. »35
37
Adrien Huannou (Textes réunis et présentés par), « Panorama du roman béninois » in
Repères pour comprendre la littérature béninoise, Cotonou, CAAREC Éditions (Collection
Études), p. 14.
38
Ousmane Sembène, Le Mandat(Roman), Paris, Éditions Présence africaine, 1965.
39
Mariama Bâ, Une si longue lettre(Roman), Dakar, Les NEA, 1979.
20
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40
Alexandre Dauge-Roth, « Comment faire capoter les silences de l’épidémie :
Mises en scène francophones du Sida », Bowdoin College, Brunswick, Maine, U.S.A., 2007
41
Doumbi Fakoly, Certificat de contrôle anti-sida(Roman), Paris, Éditions Publisud, 1988.
42
Dia Moussa, Kaso, le Migrant perpétuel(Roman), Paris, Éditions L’esprit frappeur, 1999.
43
Kounda Bepe Pierre, Le SIDA au village(Théâtre), Yaoundé, Éditions Clé, 1995.
44
Koné Doh Fandah, Le défilé des Innocents(Roman), Abidjan, Éditions Edilis, 1996.
45
Lamko Koulsy, Comme des flèches(Théâtre), Paris, Éditions Lansman, 1996.
46
Abibatou Traoré, Sidagamie(Roman), Paris, Présence Africaine, 1998.
47
Moudjib DJINADOU, MO GBE : Le cri de mauvais augure(Roman), Paris, L’Harmattan
(Encres noires), 1991, p. 10.
21
Moudjib Djinadou et son œuvre
51
Moudjib Djinadou, Mais que font donc les dieux de la neige? (Roman), Paris, L’Harmattan
(Encres noires), 1993, p. 85.
52
Op. cit. , p. 7.
53
Op. cit. , p. 9.
23
Moudjib Djinadou et son œuvre
finit pas de sévir aura raison de nous les uns après les
autres. Pourquoi devrions-nous nous contenter d’attendre
une mort certaine quand on peut faire autrement ? […]
J’ai moi-même reçu des nouvelles du royaume récemment.
Peut-être ne le sais-tu pas, mais les plus grands sorciers du
roi, les incontestables détenteurs de la science des dieux
n’ont rien trouvé pour venir à bout de ce temps maudit et
nous soulager ; ils en ont conclu que c’était l’ouvrage de
dieux inconnus et totalement réfractaires à leurs
injonctions. »57
petits Noirs sont aussi intelligents que nos petits »61 ; Wéman annonce à Fâ :
« contrairement à ce que nous pensions, il faut que je te dise que les enfants
blancs sont presque aussi intelligents que nos propres enfants »62.
La colonisation n’étant plus un thème d’actualité, elle n’est plus
directement et explicitement traitée par les écrivains de la jeune littérature. Et il
faut la distinguer de la ségrégation raciale – qui est aussi un fait de domination
d’une race par une autre – thème développé par Edgar Okiki Zinsou dans Le
discours d’un affamé63. Moudjib Djinadou, lui-même, ne traite pas de la
colonisation telle que le Bénin l’a historiquement connue.
Ce qui fait l’originalité de cette œuvre réside dans l’inversion des
rôles qui fait du roi d’Abomey le colonisateur et des Français les colonisés.
C’est ce qui amuse le lecteur et nourrit son intérêt à aller au bout du roman. Le
cinéaste Sylvestre Amoussou use du même procédé à propos de l’immigration
dans son film « Africa paradis »64 . Ce qui distingue fondamentalement Mais que
font donc les dieux de la neige ? des autres romans du même courant se trouve
dans la fonction narrative conférée à l’espace.
Ici l’espace physique est un espace suggéré aux contours indéfinis
dont la seule caractéristique propre est la quasi-permanence de l’hiver, avec son
cortège de neige et de froid extrême. L’hiver avec sa froidure transforme en un
espace hostile la circonscription dirigée par Codjo et oblige les colons à
envisager sérieusement le retour dans leur pays d’origine. La construction de
l’espace ici se met au service de l’expression des idées que l’auteur veut faire
passer. Ainsi l’hiver est un véritable actant dont les effets obligent les Noirs à
mettre un terme à leur entreprise coloniale :
61
Ferdinand Oyono, Une vie de boy (Roman), Éditions Julliard, Paris, 1956, p. 50
62
Moudjib Djinadou, Mais que font donc les dieux de la neige? (Roman), Paris, L’Harmattan
(Encres noires), 1993, p. 11
63
Edgar Okiki Zinsou, Le discours d’un affamé (Roman), Cotonou, Editions ONEPI, 1995.
64
Dans son film « Africa paradis » réalisé en 2001, le cinéaste béninois Sylvestre Amoussou
représente l’Afrique comme une terre promise envahie par des hordes de clandestins Blancs .
26
Moudjib Djinadou et son œuvre
65
Moudjib Djinadou, Mais que font donc les dieux de la neige? (Roman), Paris, L’Harmattan
(Encres noires), 1993, p. 116.
66
Op. cit. , p. 70.
67
Op. cit. , p. 85.
68
Op. cit. , p. 77.
27
Moudjib Djinadou et son œuvre
par l’auteur pour désigner cette attitude des Blancs à singer les Noirs
colonisateurs dans le moindre détail, jusqu’au reniement de leur propre identité.
Par tous ces procédés l’auteur innove et son œuvre est difficile à
classer dans les différentes catégories de roman connues jusque-là. À la fin du
roman, les Noirs prennent soin de se faire remplacer par ceux des « Blancs qui
assureraient la pérennité de l’œuvre entreprise au nom du seigneur
d’Abomey »69 et le néocolonialisme est installé. C’est dans son troisième roman,
Blédici, que Moudjib Djinadou travaille ce thème.
I-2-5- Blédici
Délé, de son vrai nom Bello Oladélé, est un étudiant béninois
poursuivant ses études en France à l’université d’Amiens. Dès le premier cours
il s’intègre à un groupe d’étudiants français dont l’animateur principal est
Renaud Le Garrec. Ce dernier sera, pendant son séjour en France, le meilleur
ami de Délé. En même temps que Renaud, il fait la connaissance d’Ysa Pasco,
« une brune piquante »70, qui tombe éperdument amoureuse de lui. Le nouveau
groupe d’amis évolue régulièrement dans leurs études sauf Renaud qui échoue
par deux fois à l’examen de licence. Il abandonne les études pour travailler dans
une usine pharmaceutique d’où il est bientôt licencié. Pendant ce temps, Délé
décroche son diplôme d’ingénieur. Mais deux handicaps l’empêchent de trouver
un emploi ou un simple stage : les trois millions de chômeurs que compte la
France et son statut d’étranger. Il décide de rentrer au Bénin. Personne dans la
communauté africaine d’Amiens ne comprend cette décision. Seul M. Doucy
comprend Délé et l’encourage dans son désir de rentrer :
« C’est une nouvelle ère, qui fera sans doute le plus
de bien à vos pays pauvres, car elle permettra que soit
faite la démonstration que la misère n’est pas moins
69
Op. cit. , p. 125.
70
Moudjib Djinadou, Blédici(Roman), Porto-Novo, chez l’auteur, 1996, p. 6.
28
Moudjib Djinadou et son œuvre
73
Op. cit. , p. 155.
74
Op. cit. , p. 166.
75
Ahmadou Kourouma, Les Soleils des indépendances(Roman), Montréal, Presses de
l’Université, 1968.
76
William Sassine, Saint Monsieur Baly(Roman), Paris, Présence Africaine, 1973.
77
Sony Labou Tansi, L’État honteux(Roman), Paris, Editions du Seuil, 1981.
78
Barnabé Laye, Mangalor(Roman), Paris, Éditions Seghers, 1989.
79
Edgar Okiki Zinsou, Les Sanglots politiques(Roman), Cotonou, ONEPI, 1995.
30
Moudjib Djinadou et son œuvre
80
Maurice Nevis, Edgard Okiki Zinsou et son œuvre : Du contexte de publication à la
réception, mémoire de maîtrise (Lettres Modernes), Université d’Abomey-Calavi, Abomey-
Calavi, 2006, p. 24.
81
Moudjib Djinadou, Blédici(Roman), Porto-Novo, chez l’auteur, 1996, p. 153.
31
Moudjib Djinadou et son œuvre
85
Op. cit. , p. 70.
33
Moudjib Djinadou et son œuvre
87
Vu sur internet, sur le site www. Premiere.fr
35
Moudjib Djinadou et son œuvre
36
Moudjib Djinadou et son œuvre
Chapitre II :
Le contexte socioculturel et politique de l’œuvre de
Moudjib Djinadou
37
Moudjib Djinadou et son œuvre
Sur le plan international, la décennie qui commence avec 1991 est une
décennie de mutation et de bouleversement pour beaucoup de pays. En effet on
assiste à l’effritement du bloc socialiste. Les anciens pays communistes et
satellites de l’U.R.S.S. connaissent des mouvements sociaux de grande ampleur
qui, dans la plupart des cas, ont abouti à un changement de régime. Malgré la
Pérestroïka de Mikhaïl Gorbatchev, l’U.R.S.S. n’échappe pas à ce vent de
démocratisation.
Désormais nous passons d’un monde bipolaire, avec deux camps
rivaux et aux différences bien tranchées, à un monde unipolaire dominé par les
États-Unis d’Amérique.
L’Afrique n’est pas épargnée. Des vagues de contestations ébranlent
les régimes dictatoriaux en place dans la plupart des pays africains. Le Bénin
ouvre le bal des conférences nationales. Les travaux de la conférence nationale
des forces vives durent dix jours au bout desquels une véritable révolution
pacifique s’opère et le Bénin passe d’une dictature militaro-marxiste à un régime
démocratique sans effusion de sang. Cet exploit redonne confiance aux Béninois
38
Moudjib Djinadou et son œuvre
qui donnent congé au général Mathieu Kérékou lors des élections pluralistes qui
ont suivi la conférence nationale, après un an de transition.
Très tôt, les populations déchantent par rapport aux espoirs soulevés
par les changements de régime et nous assistons à une sorte de retour en arrière
ou de renversement de tendance. En effet les changements de régime ont vu
dans la plupart des cas, l’arrivée au pouvoir de technocrates dont la mission
principale était de remettre à flot des économies décadentes et restaurer l’ordre
étatique. Les mesures drastiques prises dans ce sens sont mal appréciées par les
populations qui, en l’absence de toute mesure sociale, ne savent plus où donner
de la tête. Cette situation profite à quelques anciens dinosaures de la vie
publique qui voient leur popularité augmentée. C’est le cas de Mathieu Kérékou
qui revient démocratiquement au pouvoir face à Nicéphore Soglo en 1996.
D’autres chefs d’État, par contre, se sont révélés être de véritables
baobabs inamovibles et imperturbables par les différents remous politiques
agitant leurs pays. Il s’agit notamment de Gnassingbé Eyadéma au Togo, de
Paul Biya au Cameroun, d’Omar Bongo au Gabon, de Robert Mugabé au
Zimbabwé pour ne citer que ceux-là.
39
Moudjib Djinadou et son œuvre
fidélité aux couleurs naturelles, désigner tous les éléments graphiques qui
permettront de reconnaître les personnages, les lieux ou les thèmes peints.
Très tôt l’expression ‟couleur locale” est associée à la création
littéraire pour rendre compte de tous les éléments linguistiques, culturels,
géographiques, historiques et sociaux qui permettent d’identifier le milieu réel
dans lequel évolue la fiction littéraire.
Ainsi la notion de ‟couleur locale” renvoie d’abord à un espace
géographique identifiable, ensuite à un ensemble de mœurs et coutumes qui
prennent place dans le cadre géographique, enfin à des personnages qui
renseignent sur les principaux types sociaux rencontrés dans le milieu décrit 88.
Ici, nous allons nous appesantir sur les faits et les types sociaux relevés dans les
publications de Moudjib Djinadou.
88
Le rapport entre la couleur locale et la littérature a été largement illustré par S. Michel
CAKPO, avec son mémoire, La couleur locale dans Doguicimi de Paul Hazoumè.
89
Moudjib Djinadou, MO GBE : Le cri de mauvais augure(Roman), Paris, L’Harmattan (Encres
noires), 1991, p. 18.
41
Moudjib Djinadou et son œuvre
Mais comme on ne peut jamais tout avoir, Bariki constate très tôt
après son mariage qu’« Aladji était fort loin de posséder au lit le dynamisme
dont elle rêvait chez un homme »96. Sans scrupule, elle prit un amant pour y
remédier.
Par le personnage de Faïssa, l’auteur persiste et montre que la seule
valeur qui compte pour le yoruba, c’est l’argent qui par son pouvoir efface tout
handicap physique ou moral. Consciente de sa laideur, Faïssa n’a d’autre
argument de séduction que le bon contenu de son porte-monnaie. Aussi n’est-
elle pas surprise et personne autour d’elle, qu’un charmant garçon comme
Mogbé la choisisse comme fiancée. En effet, « elle possède l’atout majeur, la
carte qui gagne : elle est riche, ses parents le sont également, et l’heureux élu de
son cœur est automatiquement et définitivement à l’abri du besoin »97. Et quand
finalement, elle décide de quitter son volage de fiancé, c’est sans grand regret
car « elle savait que plus d’un jeune serait ravi de la prendre pour épouse en
raison de ses arguments sonnants et trébuchants »98.
Un autre type social caractéristique de la communauté yoruba
musulmane et fortement lié à l’argent est celui du musicien-griot. C’est un type
incontournable dans une société amatrice de soirées mondaines qui sont des
95
Moudjib Djinadou, MO GBE : Le cri de mauvais augure(Roman), Paris, L’Harmattan (Encres
noires), 1991, p. 22.
96
Op. cit. , p. 34.
97
Op. cit. , p. 38.
98
Op. cit. , p. 45.
44
Moudjib Djinadou et son œuvre
occasions pour « les nantis de faire la parade en déposant sur le front des
musiciens et des danseurs des billets de banque à n’en pas finir ; c’est à qui aura
dépensé le plus d’argent, fait le plus de dons» 99. Et de ce fait, le musicien-griot
n’a d’autres chansons à proposer à l’assistance que des louanges destinées aux
généreux donateurs. Dans MO GBE : Le cri de mauvais augure, le type est
seulement mentionné. On en voit une présence physique dans Blédici à travers
le personnage de Falilou :
« S’il avait troqué les tam-tams en peau de vache
contre une boîte à rythme et des percussions, Falilou avait
pris grand soin de ne rien modifier de l’art suprême de
flatter et caresser, chanter aussi haut que possible les
louanges d’individus qu’il ne connaissait ni d’Ève ni
d’Adam, […], aussi longtemps que sur son front humide de
sueur et de concentration pleuvaient les billets de
banque»100.
99
Op. cit. , p. 17.
100
Moudjib Djinadou, Blédici(Roman), Porto-Novo, chez l’auteur, 1996, p. 122.
101
Moudjib Djinadou, MO GBE : Le cri de mauvais augure(Roman), Paris, L’Harmattan (Encres
noires), 1991, p. 73.
45
Moudjib Djinadou et son œuvre
-Debbie, la meilleure amie d’Ysa, se brouille avec sa copine parce qu’elle s’est
choisie un petit ami africain. Elle change de trottoir chaque fois qu’elle doit
croiser Délé.
-Une dame décrite comme suit :
« Une dame, la cinquantaine chic, les cheveux strictement tirés en arrière
vers un chignon sévère, et l’air un rien hautain, monte et préfère ostensiblement
rester debout plutôt que d’occuper l’une des deux places vacantes.
Heureusement, l’Antillais descend, et elle daigne s’installer »105.
Cependant on découvre des personnages qui font preuve d’humanisme et
d’une bonté de cœur très touchant. C’est le cas de :
-M.Placide, gardien de la prison où sont enfermés Mogbé et Beau-Gars, il
n’hésite pas à mettre en jeu sa sécurité professionnelle pour venir en aide à deux
prisonniers noirs. C’ « était un homme bon et tout son être se révoltait à la seule
pensée que tout près de lui un autre homme souffrait dans l’indifférence et le
mépris des autres »106.
- Hope qui s’est retrouvé en prison pour avoir caché un couple voleur d’un
nourrisson. Quand Mogbé le rejoint au cachot, qui est une prison à l’intérieur de
la prison, il y est déjà depuis cinq mois pour « avoir bousculé un gardien qui
maltraitait un détenu »107.
En plus de ceux précédemment cités, l’auteur fait découvrir d’autres
types sociaux sympathiques de la France à travers :
-M. Doucy, professeur de physique en fin de carrière, qui accueille les étudiants
avec la formule « bienvenus chez Tartuffe »108. Il regrette d’avoir quitté sa
Savoie natale « pour parcourir le monde et faire le plein de désillusions »109.
105
Moudjib DJINADOU, Blédici(Roman), Porto-Novo, chez l’auteur, 1996, p. 44.
106
Moudjib DJINADOU, MO GBE : Le cri de mauvais augure(Roman), Paris, L’Harmattan
(Encres noires), 1991, p. 112.
107
Op. cit. , p. 128.
108
DJINADOU (Moudjib), Blédici(Roman), Porto-Novo, chez l’auteur, 1996, p49.
109
Op. cit. , p. 50.
48
Moudjib Djinadou et son œuvre
110
Op. cit. , p. 51.
111
Op. cit. , p. 25.
49
Moudjib Djinadou et son œuvre
Les situations sociopolitiques qui ont servi de trame aux écrits de Moudjib
Djinadou se rapportent au Bénin des années 1980, à l’histoire de la colonisation
et au système de la Françafrique.
Claude Hagège, Combat pour le français. Au nom de la diversité des langues et des
114
115
DJINADOU (Moudjib), Mais que font donc les dieux de la neige? (Roman), Paris,
L’Harmattan (Encres noires), 1993, p9.
116
Op. cit. , p. 84.
52
Moudjib Djinadou et son œuvre
117
Le titre complet de l’ouvrage de François-Xavier est La françafrique : Le plus long scandale
de la République. Tiken Jah Fakoly, chanteur ivoirien, dénonce lui aussi l’impérialisme et le
néocolonialisme français, dans un album intitulé « La françafrique » en 2002.
118
François-Xavier Verschave, La françafrique : Le plus long scandale de la République(Essai),
Paris, Stock, 1998, p. 5.
53
Moudjib Djinadou et son œuvre
54
Moudjib Djinadou et son œuvre
Chapitre III :
La réception de l’œuvre de Moudjib Djinadou
« Une œuvre littéraire ne vit qu’à partir du moment où elle est lue »119
affirme Roland Barthes dans Plaisir du texte. Avant de la lire le lecteur doit
avoir eu connaissance de l’œuvre en question. De nos jours, les mass media
119
Roland Barthes, Le plaisir du texte(Essai), Paris, Éditions du Seuil (Collection Essai), 1973,
p. 6.
55
Moudjib Djinadou et son œuvre
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Moudjib Djinadou et son œuvre
Cité par Maurice Nevis, Edgard Okiki Zinsou et son œuvre : Du contexte de publication à la
120
Les articles pris sur internet sont publiés par des universitaires
anglophones. Il s’agit notamment des docteurs Philip A. Ojo d’Agnès Scott
College au Canada et Phillip Winn d’ University of Western Australia en
Australie.
Le docteur Philip A. Ojo, dans son article intitulé « (Re)Writing
Identities in Contemporary Beninese Literature » où il fait le point des écrivains
béninois de la troisième génération, estime que :
« While Moudjib Djinadou’s Mais que font donc
les dieux de la neige ? (1993) is about the sexual
escapades of postcolonial leaders who use their position
and wealth to abuse vulnerable women, […], Moudjib
Djinadou’s Mo Gbé : le cri de mauvaise augure (1991)
123
Pendant que son Mais que font donc les dieux de la neige ?(1993) développe les
escapades sexuelles des leaders postcoloniaux qui utilisent leur position et leur richesse pour
abuser des femmes vulnérables, […], Mo Gbé, le cri de mauvais augure(1991) de Moudjib
Djinadou insiste sur les conséquences d’un tel style de vie (la maladie, l’aliénation, et la
mort) à travers le vécu du personnage principal. L’article en anglais peut être consulté sur
internet :
http://www.projectponal.com/newsletter/invisible.html.
124
Alternativement, le sida peut être vu comme un fléau occidental, le résultat de la
dépravation et du crime ; c’est ainsi qu’il apparaît, par exemple, dans Mo gbé : Le cri de
mauvais augure de Moudjib Djinadou. L’intégralité de cet article peut être consultée sur
internet : http://www.arts.uwa.edu.au/MotsPluriels/MP397pw.html.
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c- L’avocat de Vanessa
d- Blédici
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c- L’avocat de Vanessa
d- Blédici
………………………………………………………………………
………………………………………………………………………..
c- L’avocat de Vanessa
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d- Blédici
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………………………………………………………………………
………………………………………………………………………..
c- L’avocat de Vanessa
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…………………………………………………………………………
d- Blédici
…………………………………………………………………………..
6°) Citez un ouvrage de chacun des trois auteurs béninois suivants :
a- Jérôme Carlos : …………………………………………………………...
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La question n°1, « quel écrivain béninois est l’auteur du roman ayant pour
titre Mais que font donc les dieux de la neige ? », a obtenu 18% de bonnes
réponses contre 82% de mauvaises réponses. La question 2, « donnez le nom du
personnage principal du roman Blédici et le nom de son auteur », est restée cinq
semaines à l’antenne et a connu trois fois plus d’audience que la première. Et
pourtant elle n’a enregistré aucune bonne réponse.
Au terme du jeu, sur environ 500 auditeurs à intervenir, on se rend compte
qu’à peine 4% connaissent Moudjib Djinadou et seulement à travers le roman
Mais que font donc les dieux de la neige ?
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CONCLUSION
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ATCHADÉ, Julien, « Lu pour vous », Le matin n°666 du mardi 20 août 1996.
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du Jeudi 13 novembre 1997.
CAKPO, S. Michel, La couleur locale dans Doguicimi de Paul Hazoumé,
mémoire de maîtrise (Lettres Modernes), École Normale Supérieure/ Université
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Éditions (Collection Études), 2008.
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Histoire de la littérature écrite de langue française dans l’ex-Dahomey
(des origines à 1972), thèse de doctorat d’État (Lettres et sciences
humaines), Université Paris-Nord, Paris, 1979.
« Douze ans de littérature béninoise (1983-1995) », Notre Librairie, n°
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MIDIOHOUAN, Guy Ossito, (introduction de), Le Bénin littéraire : 1980-
1999(plaquette), Cotonou, Service de Coopération et d’Action Culturelle au
Bénin/A.E.G.L.B.(Association des Écrivains et Gens de Lettres du Bénin),
novembre 1999.
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PHILLIP, Winn, « Personal Suspects and the Framing of Africa: Who's to blame
for AIDS? », Mots Pluriels, Vol. 1, n° 3, University of Western Australia, 1997.
http://www.arts.uwa.edu.au/MotsPluriels/MP397pw.html.
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Africaine/Edicef/UNESCO, 1989.
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PATILLON, Michel, Précis d’analyses littéraires : Les structures de la fiction,
Paris, Nathan (Collection Fac), 1995.
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