Archeologie Et Developpement Durable Au

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66  Archéologiques, no 29

Archéologie et développement durable au Québec


Pierre Desrosiers

À partir des données colligées sur les interventions archéologiques réalisées au Québec en 2013
et 2014, des corrélations sont faites entre la recherche archéologique et les préoccupations actuelles
en matière de développement durable et de qualité de vie citoyenne. Au fil de la réflexion de
l’auteur, il s’avère que la protection du patrimoine archéologique prend définitivement le pas sur
l’acquisition de connaissances, reléguée au second plan dans les enjeux actuels de la société.
L’impact du changement explique, du moins en partie, l’inconfort des archéologues face à une
telle situation. N’empêche que l’intégration de l’archéologie dans le développement durable est
bel et bien amorcée au Québec et que de nombreuses initiatives ont déjà des retombées citoyennes.
Une meilleure prise en compte collective des réalités propres aux archéologues, aux promoteurs
et aux municipalités semble ici porteuse pour l’avenir.

This article uses data derived from archaeological work conducted in Québec in 2013 and 2014 to
make connections between archaeological research and current concerns about sustainable
development and citizens’ quality of life. The author comes to the conclusion that protection of
archaeological heritage is definitely taking precedence over knowledge acquisition and that the
latter is now of secondary importance in the choices and challenges currently facing society. The
impact of this change explains, at least in part, why archaeologists are not very comfortable with
this situation. Nonetheless, archaeology has begun to be incorporated in sustainable development
in Québec and numerous initiatives are already having spillover effects for the general public. The
best approach going forward would seem to be better collective consideration of the realities specific
to archaeologists, developers and municipalities.

Contemporary relevance of archaeology – Surveillance lors des travaux effectués par


means understanding the roles that Hydro-Québec sur les rues Monk et Cardinal-
archaeology has in the present day and a Rouleau, Québec ;
sense of the contributions that it can make – Inventaire de deux zones correspondant à un
through those roles both now and in the stationnement municipal à l’ouest de la rue de
future. (Rockman & Flatman 2013, vii) la Reine ainsi qu’une zone gazonnée en marge

L’ archéologie, le développement durable ouest du marché Richelieu dans le cadre d’un


et la qualité de vie citoyenne, quels liens programme de recherche et de diffusion, ville
existent-ils entre ces concepts, et comment de Sorel-Tracy ;
s’articulent-ils au Québec ? Ils s’inscrivent tous – Inspection visuelle, évaluation et sondage dans
dans un processus social en évolution constante. les limites de la pointe délimitée par la rive sud
Des démarches ont été effectuées auprès des in­ du fleuve Saint-Laurent, la rive est de la rivière
stances provinciales et fédérales pour obtenir des Mitis, le chemin du quai et le chemin d’accès
données sur les interventions archéologiques réa­ à l’accueil des Jardins de Métis, Métis-sur-Mer,
lisées sur le terrain en 2013 et 2014. Elles portent site DdEa-2 ;
sur la nature des interventions, les lieux dans – Île Nue de Mingan–Fouilles de deux fours
lesquels elles se déroulaient et les promoteurs de basques.
celles-ci. Voici quelques exemples des données À partir de ces descriptions et de la Biblio­
reçues dans le cadre du présent exercice : graphie de l’Inventaire des sites archéo­logiques du
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Québec (MCC 2015, septembre), disponible sur make archaeology serve the public is a quest of
Internet, qui contient l’ensemble des rapports citizenship and entails questions about what kind
déposés au ministère de la Culture et des Com­ of republic do we, as citizens, desire to co-create,
munications, il est possible de déduire les diffé­ as it is our responsibility to do? ».
rents contextes dans lesquels se fait l’archéologie. La présente étude se situe dans ce que Marcy
Plusieurs lois influencent la pratique archéo­ Rockman (2013, 3-5) considère être une partie
logique au Québec, dont la Loi sur la qualité de intégrante d’une structure à deux volets de l’ar­
l’environnement avec ses études d’impacts envi­ chéologie menée aujourd’hui au Québec et plus
ronnementaux visant à protéger le patrimoine largement dans le monde occidental : une archéo­
archéologique, la Loi sur le patrimoine culturel logie d’ordre pratique et celle qui veut avoir des
qui, en plus d’exiger un permis de recherche retombées plus profondes. Le volet pratique se
archéologique pour mener des interventions de concrétise tout simplement par des bénéfices fi­
terrain, demande certaines précautions en matière nanciers et sociaux qui témoignent des valeurs
d’archéologie lorsque des travaux doivent être propres à une société et d’un équilibre à atteindre
réalisés sur un site patrimonial (cf. exemple ci haut entre le développement économique et les retom­
d’Hydro-Québec). Il en va de même pour la Loi bées citoyennes, alors que le volet plus abstrait
sur les parcs nationaux du gouvernement fédéral, réfère à la capacité de cette discipline scientifique
qui comprend les lieux historiques nationaux, et, de jouer un rôle social plus significatif, en explo­
via l’agence Parcs Canada, assure la conservation rant des aspects du passé qui ne sont pas acces­
des vestiges archéologiques (exemple de Mingan). sibles autrement que par l’archéologie ou, encore,
S’ajoute à ces dernières, la Loi sur l’aménagement en observant des phénomènes de changement et
et l’urbanisme qui oblige les municipalités à tenir de continuité dans le temps. C’est ce que la pré­
compte du patrimoine archéologique (exemple de sente étude préconise de faire à partir des données
Sorel-Tracy). L’ensemble de ces lois participent au recueillies en 2013 et 2014, en examinant les re­
développement durable en instaurant des méca­ tombées citoyennes du développement durable,
nismes de précaution favorables à la recherche, la puis en évaluant plus spécifiquement la contri­
conservation et la mise en valeur du patrimoine bution de l’archéologie au devenir de la société
archéologique. québécoise en ce début de xxie siècle.
La notion de développement durable est abor­
dée dans la loi québécoise du même nom et est
définie comme suit :
LES INTERVENTIONS
ARCHÉOLOGIQUES DE TERRAIN
un développement qui répond aux besoins du
présent sans compromettre la capacité des Les interventions de terrain constituent l’activité
générations futures à répondre aux leurs. Le la plus visible de la pratique archéologique ; elles
développement durable s’appuie sur une vision ne représentent cependant qu’une fraction du
à long terme qui prend en compte le caractère travail de l’archéologue qui se poursuit en labo­
indissociable des dimensions environnemen­
ratoire et dans la rédaction de rapport, sans comp­
tale, sociale et économique des activités de
ter les analyses spécialisées et la conservation des
dévelop­pement. (MDDELCC 2015)
vestiges mobiliers et immobiliers, lorsque c’est
Pour ce qui est de la notion de qualité de vie, possible de le faire. La pratique archéologique est
elle se situe plus concrètement dans les retombées de fait le gagne-pain d’un nombre toujours crois­
de tous ces mécanismes de précaution et dans les sant de gens (Zorzin 2010). Ce qui distingue les
initiatives locales qui facilitent l’accès à l’archéo­ interventions de terrain des autres volets de la
logie et aux connaissances qui en découlent pratique archéologique revient au fait qu’elles sont
(exemples des Jardins de Métis et de Mingan). Ce encadrées par des dispositions légales et régle­
sont des gestes posés à des fins culturelles et tou­ mentaires.
ristiques pour atteindre, ultimement, le citoyen ; En 2013 et 2014, ont été menées sur l’ensemble
en d’autres mots, ils favorisent l’appropriation du du territoire québécois respectivement 181 et 216
passé dans l’environnement culturel du citoyen. interventions archéologiques (20 % de plus en
Barbara J. Little (2013, 278) identifie ce phénomène 2014 qu’en 2013). Ces informations proviennent
de démocratisation de l’archéologie et son orienta­ essentiellement du ministère de la Culture et des
tion résolument sociale ainsi : « … the quest to Communications du Québec et de Parcs Canada,
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qui ont fourni des listes décrivant les interventions minerais). D’une année à l’autre, la variation est
archéologiques réalisées sous leur juridiction. Des peu ou pas significative. Mentionnons qu’il ne se
vérifications supplémentaires ont été faites aussi fait pas d’interventions archéologiques à Laval et
auprès de certains organismes autochtones et peu (cinq ou moins annuellement) dans les régions
d’autres entités gouvernementales pour inclure de Lanaudière, Laurentides, Estrie et Outaouais.
des interventions réalisées sur les terres fédérales, Ce constat ne signifie pas qu’il n’existe pas de
les réserves en particulier, qui ne sont pas néces­ potentiel archéologique sur ces territoires, mais
sairement soumis à un cadre légal. plutôt que l’intégration du patrimoine archéo­
logique au développement durable et à la qualité
La répartition régionale de vie citoyenne n’est pas encore rodée à l’échelle
locale et régionale.
Il existe 17 régions administratives au Québec et
deux pôles urbains majeurs, Montréal et Québec. Les interventions archéologiques
Aux fins de cet exercice, les régions administra­
tives ont été regroupées en quatre catégories en La nature des interventions de terrain apparaît de
fonction de leurs distances par rapport aux pôles plus en plus variée et complexe d’année en année ;
urbains (fig. 1). En fait, plus on s’éloigne de Mont­ cela est dû au mandat que reçoit l’archéologue.
réal et de Québec, plus la population diminue et Pour répondre aux besoins expri­més par le pro­
devient rurale, puis les régions se transforment en moteur, il doit souvent tout prévoir – de la fouille
vastes étendues d’espaces naturels dotées de nom­ jusqu’à la surveillance en passant par l’inventaire
breuses ressources. de terrain ou l’évaluation de site. Le cumul de
Dans les pôles urbains de Québec et de Mont­ plusieurs interventions lui permet en retour d’allé­
réal se concentrent plus du tiers des projets ger certaines contraintes légales qu’il doit observer
archéologiques ; ce chiffre diminue graduellement et d’éviter des délais lors du chantier ; c’est souvent
dans les régions environnantes (banlieues) et rentable pour l’archéologue et pour le promoteur
intermédiaires, et atteint près du quart des projets de procéder ainsi. La tâche de l’archéologue n’est
dans les régions appelées « ressources » à cause de toutefois pas plus aisée puisqu’il doit opérer dans
l’exploitation des ressources naturelles (eau, bois, un cadre temporel et financier restreint, prendre

Nord-du-Québec Nord-du-Québec
Saguenay−Lac-Saint-Jean Saguenay−Lac-Saint-Jean
Côte-Nord, Gaspésie−Îles-de-la-Madeleine Côte-Nord, Gaspésie−Îles-de-la-Madeleine
Abitibi-Témiscamingue Abitibi-Témiscamingue
Laurentides: 40 (22 %) Laurentides : 51 (24 %)

Estrie, Mauricie, Centre-du-Québec Estrie, Mauricie, Centre-du-Québec


Outaouais, Lanaudière, Outaouais, Lanaudière,
Bas-Saint-Laurent : 32 (18 %) Bas-Saint-Laurent : 34 (16 %)

Capitale-Nationale Capitale-Nationale
Chaudière-Appalaches Chaudière-Appalaches
Montérégie, Laval : 41 (23 %) Montérégie, Laval : 53 (24 %)

Montréal et Québec : Montréal et Québec :


67 (37 %) 78 (36 %)

Figure 1.  Répartition des interventions archéologiques sur le territoire. Le premier cercle comprend les villes
de Montréal et de Québec, le deuxième les régions environnantes, le troisième les régions intermédiaires et le
quatrième les régions périphériques. L’image de gauche représente la répartition régionale en 2013, celle de
droite en 2014.
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des décisions rapides sur le terrain en fonction des collégiale, souvent réalisée en partenariat avec un
découvertes qu’il fait et, en conséquence, la qualité musée ou un lieu d’intérêt patrimonial, comme
de l’intervention peut en souffrir au bout du com­ c’est le cas pour l’Université Laval à l’Îlot des Palais
pte. L’avantage pour l’ar­chéologue réside dans à Québec et pour l’Université de Montréal au site
l’autonomie qu’il obtient sur le terrain pour ex­ Droulers-Tsiionhiakwatha à Saint-Anicet.
plorer plus attentivement ce qui mérite de l’être, L’inventaire, qui se concrétise par un échan­
en vue d’une meilleure inter­prétation des événe­ tillonnage du territoire sous forme de sondages,
ments qui se sont déroulés sur le site. La catégorie se déroule sur un territoire susceptible de contenir
« Divers » a été créée pour couvrir cet ensemble un site archéologique ; il peut se faire dans tous les
d’interventions proposées au sein d’un même pro­ milieux. Il sert avant tout à identifier des sites et
jet. à les circonscrire, en vue d’y poursuivre des re­
Par opposition à la catégorie « Divers », les cherches plus substantielles.
inter­ventions traditionnelles, mieux circonscrites L’évaluation se fait sur un site archéologique
et plus segmentées, soit les fouilles, les inventaires déjà recensé ou un lieu qui présente un potentiel
ou les évaluations, sont adaptées à la recherche archéologique ; elle se pratique là où il existe des
archéologique et ont l’avantage de mieux encadrer données historiques, archéologiques ou archi­
le travail scientifique sur le terrain destiné à une vistiques. L’évaluation correspond parfois à une
interprétation plus significative de l’histoire du fouille, selon l’intensité de la recherche qui y est
lieu. faite.
De son côté, la surveillance est considérée Les activités subaquatiques regroupent une
comme le dernier recours avant la destruction du gamme d’interventions qui permettent de docu­
patrimoine archéologique. Durant la surveillance, menter un territoire ou un site. En 2013 et 2014,
l’archéologue s’entend avec l’entrepreneur pour elles ont été réalisées principalement le long du
faire arrêter l’excavation afin de consigner les Saint-Laurent, du fleuve au golfe ; elles sont me­
découvertes. La durée de cette interruption est nées par des organismes spécialisés, dont le Ser­
souvent variable et l’archéologue a avantage à né­ vice d’archéologie subaquatique de Parcs Canada
gocier le tout avec le promoteur et l’entrepreneur à Ottawa et un nouveau venu, le Centre Inter­
au préalable, ce qui évite des imbroglios au mo­ disciplinaire de Développement en Cartographie
ment des travaux sur le chantier. La surveillance des Océans (CIDCO), à Rimouski. Les activités
s’impose lorsqu’il est possible de rencontrer des subaquatiques sont limitées à cause des coûts qui
vestiges structuraux lors des travaux d’excavation, y sont rattachés (beaucoup plus onéreux que l’ar­
mais elle s’applique mal au patrimoine archéo­ chéologie terrestre), sauf qu’elles utilisent mainte­
logique amérindien, qui compte peu de vestiges nant des technologies de pointe de plus en plus
architecturaux. sophistiquées telles que la télédétection, ce qui
De tous les types d’interventions archéo­ permet de repérer des épaves et de les re­constituer
logiques, les fouilles (terrestres ou subaquatiques) virtuellement en 2D ou 3D sans affecter leur in­
demeurent celles où l’archéologue peut exercer tégrité.
toute son expertise scientifique, c’est-à-dire ex­ Les activités ouvertes au public (fouilles) sont
traire des données en fonction d’une probléma­ des activités à caractère éducatif et ludique pour
tique de recherche qui orientera son travail sur le tous les âges ; elles se déroulent sur un site archéo­
terrain puis en laboratoire, produire des résultats logique et sont souvent associées à un musée,
significatifs et engendrer des nouvelles connais­ comme à la Pointe-du-Buisson, à un lieu d’intérêt
sances. Ce processus scientifique traditionnel est patrimonial naturel comme dans le Parc national
toujours valable, sauf que les écueils pour arriver du Lac-Témiscouata, ou culturel comme au Ma­
à terme se multiplient et ne dépendent souvent noir Mauvide-Genest sur l’île d’Orléans.
plus de l’archéologue, qui n’a plus l’autonomie Les relevés permettent de documenter un
d’antan. Cette situation s’étend même aux cher­ vestige architectural. La plupart du temps cette
cheurs universitaires qui développent des parte­ activité est jumelée à d’autres, mais elle peut aussi
nariats publics et privés (scientifiques, logistiques, se faire seule, comme c’est le cas dans les lieux
etc.) et qui, en retour, influencent, maximisent et… historiques nationaux du Canada gérés par Parcs
prolongent la recherche. Canada où les vestiges sont souvent monumen­
Le chantier école est une activité de recherche taux.
(fouille) qui sert à la formation, universitaire ou
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Tableau 1.  La nature des interventions Le nombre d’activités publiques, appelées éga­
effectuées en 2013 et 2014 lement les fouilles ouvertes au public, suit une
tendance populaire observée jusqu’en Europe
2013 : 181 2014 : 216 occidentale (Van den Dries 2015, 51). Si elles ont
Interventions Nb % Nb % peu ou pas de retombées en matière de recherche
Inventaire de terrain 49 27 53 24 archéologique, elles permettent de rejoindre un
Surveillance 44 24 50 23 public grandissant. S’ajoutent aux activités exi­
Évaluation 35 19 46 21 geant un permis de recherche, des fouilles simu­
Fouilles 20 11 20 10 lées offertes dans les musées et lieux patrimoniaux
Activités publiques 9 5 9 5 qui ne requièrent pas la présence d’un archéologue.
Chantiers écoles 6 3 7 3 Celles-ci se déroulent dans un espace déjà fouillé
Activités subaquatiques 4 2 5 2 ou créé de toutes pièces pour recevoir un public
Divers 14 8  23 12 familial où enfants et parents s’initient à l’archéo­
Relevés 0 3 1 logie, soit à la pratique archéologique et à la dé­
couverte d’artefacts dans le sol. De telles activités
de fouilles (simulées ou non) sont offertes dans le
Les types d’interventions archéologiques en­ cadre du Mois de l’archéologie, un événement
registrés pour les années 2013 et 2014 montrent annuel coordonné par Archéo-Québec, le réseau
bien leur grande diversité (tableau 1). Sauf pour de la diffusion de l’archéologie.
la catégorie « Divers », les pourcentages sont sem­ Les activités subaquatiques, quant à elles,
blables d’une année à l’autre. Cumulée avec la cumulent plusieurs objectifs à la fois scientifiques,
catégorie « Surveillance » et les autres interven­ récréatifs et éducatifs. Leur nombre s’accroît en
tions qui ont identifié la surveillance comme com­ fonction des développements technologiques et
posante du projet, on peut observer une augmen­ de l’engouement populaire pour la découverte et
tation notable (77 des 181 projets en 2013 et 106 la recherche sur les épaves. Les années 2013 et
sur 216 en 2014, soit l’équivalent de 43 % des inter­ 2014 ont été marquées par les activités subaqua­
ventions en 2013 et 49 % de celles effectuées en tiques entourant le centenaire du naufrage de
2014). Durant ces deux années, la majorité des l’Empress of Ireland au large de Sainte-Luce.
interventions archéologiques réalisées sur le ter­ En résumé si l’acquisition des connaissances
ritoire aurait eu pour objectif de « sauver » le par les voies traditionnelles est de plus en plus
patrimoine archéologique de la destruction. limitée aujourd’hui, quantitativement du moins,
Les fouilles et les chantiers écoles, qui per­ elle est remplacée par des mesures de précaution
mettent spécifiquement à l’archéologue d’extraire de plus en plus importantes pour protéger le pa­
des données en vue de l’interprétation du site, trimoine archéologique et par des liens plus forts
représentent aujourd’hui un peu moins de 15 % avec le public fasciné par le passé matériel du
des interventions annuelles sur le territoire. Pour Québec (tableau 2).
leur part, les chantiers écoles sont de plus en plus À partir des données recueillies en 2013 et
populaires auprès des professeurs chercheurs qui 2014, il s’avère que les activités de recherches
initient leurs étudiants au travail de terrain, pour­ traditionnelles ont diminué (46 % en 2013 et 39 %
suivent des recherches plus substantielles et dé­ en 2014) et sont de plus en plus greffées à de la
veloppent des nouvelles expertises scientifiques surveillance, même lorsqu’il s’agit de recherches
(en archéologie environnementale, archéomé­ préliminaires (inventaires et évaluations).
trie, etc.).

Tableau 2.  Les catégories d’activités liées aux interventions archéologiques de terrain

Activités de recherche Activités liées Activités d’initiation


traditionnelles au principe de précaution et de sensibilisation Activités autres
Fouilles, Surveillance, Activités publiques Activités subaquatiques,
Inventaire, Divers (fouilles ouvertes au public) Relevés
Évaluation,
Chantier école
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Tableau 3.  Le potentiel scientifique des données et l’intensité des travaux sur le terrain

Substantielles/Majeures Préliminaires/Mineures Variables/Mineures Variables/Équivoques


Les fouilles L’inventaire Les activités subaquatiques La surveillance
Divers L’évaluation Les activités ouvertes au public Les relevés
Les chantiers écoles

Pour les fins de cet exercice (tableau 3), les publiques et privées et, de plus, réaliser son projet
interventions de terrain seront qualifiées de sub­ en partenariat avec d’autres institutions ou or­
stantielles lorsqu’il s’agit de fouilles et de chantiers ganismes. C’est lui qui confie les travaux d’ex­
écoles, de préliminaires pour des inventaires ou cavation à un entrepreneur responsable du chan­
des évaluations, et de variables pour des sur­ tier et c’est en coordination avec ce dernier que
veillances et autres activités de terrain ; la catégorie l’archéologue et son équipe réalise son inter­
« Divers » est considérée ici comme étant substan­ vention. En 2013 et 2014, les principales catégories
tielle. Les qualificatifs majeur, mineur et équivo­ de promoteurs sont :
que concernent l’intensité de la destruction du – Les promoteurs publics (de juridiction fédérale
patrimoine archéologique occasionnée par les et provinciale, incluant les sociétés d’État) ;
interventions archéologiques. Les fouilles, les – Les organismes municipaux (incluant les mu­
chantiers écoles et la catégorie « Divers » consti­ nicipalités locales, régionales, y compris la
tuent des interventions irréversibles sur un site Con­férence régionale des Élus) ;
archéologique. L’inventaire et l’évaluation cor­ – Les promoteurs privés de tous les horizons (en
respondent, théoriquement du moins, à de la pro­ partant du propriétaire privé qui doit faire
spection, soit des interventions mineures. Les faire une intervention archéologique sur son
activités subaquatiques et les fouilles ouvertes au terrain parce qu’il est situé dans un site patri­
public sont mineures également, ces dernières se monial déclaré, jusqu’à la compagnie multi­
déroulant généralement dans des secteurs déjà nationale qui exploite un minerai dans le
prospectés qui recèlent un contenu archéologique Nord-du-Québec) ;
prévisible. Les relevés n’affectent pas le site archéo­ – Les institutions muséales et lieux patrimo­
logique, alors que les travaux d’excavation associés niaux ouverts au public ;
à une surveillance ont un impact considérable sur – Les organismes autochtones ;
celui-ci. – Les universités ;
Il en résulte que moins du quart des inter­ – Les promoteurs étrangers qui envoient leurs
ventions archéologiques en 2013 (22 %) et en 2014 chercheurs poursuivre des recherches au
(24 %) avaient un potentiel de recherche scienti­ Québec.
fique substantiel ; près de la moitié (46 % les deux Les quatre dernières catégories ont été re­
années) peuvent être qualifiées de préliminaires tenues pour illustrer la participation des promo­
et un peu plus du quart de variable. Proportion­ teurs qui ont des affinités plus importantes en
nellement, près de la moitié (46 %) des interven­ matière d’archéologie au Québec (tableau 4).
tions archéologiques sont menées dans des cir­ Près du tiers des interventions au Québec se
constances où la destruction du patrimoine ar­ font majoritairement par les deux paliers gou­
chéologique est majeure. vernementaux – le provincial et le fédéral – suivis
de près par les autorités municipales locales (villes)
Le promoteur ou régionales (municipalité régionale de comté ou
Conseil régional des élus), puis du privé qui gagne
Le promoteur est le premier responsable de l’exé­ du terrain (25 % en 2014). Il reste un peu moins
cution du projet ; il n’est pas nécessairement le de 15 % des projets qui sont réalisés par divers
principal bailleur de fonds et sa motivation pre­ organismes culturels (institutions muséales, lieux
mière est rarement la recherche archéologique, d’interprétation et organismes autochtones) et
mais plutôt son projet qui comporte des travaux établissements d’enseignement (universités et
d’excavation susceptibles d’avoir un impact sur le collèges).
patrimoine archéologique. Le promoteur peut Les promoteurs publics provinciaux tels le
obtenir des subventions de plusieurs sources ministère des Transports, Hydro-Québec et les
72  Archéologie et développement durable au Québec ~ P. Desrosiers

Tableau 4.  Le profil des promoteurs des interventions archéologiques au Québec

2013 : 181 projets 2014 : 216 projets


58 projets municipaux (32 %), dont 16 à Montréal 70 projets gouvernementaux (32 %) : 48 du gouvernement
et 10 à Québec, 26 dans d’autres villes du Québec et 22 du gouvernement fédéral
et 6 dans les MRC et CRÉ
58 projets gouvernementaux (32 %) : 37 du gouvernement 59 projets municipaux (27 %) dont 19 à Montréal et
du Québec et 21 du gouvernement fédéral 9 à Québec, 21 dans d’autres villes et 10 dans
les MRC et CRÉ

38 projets privés (22 %) : minier, forestier, religieux, 55 privés (25 %) : minier, forestier, religieux, industriel,
industriel, domiciliaire… domiciliaire…

11 projets d’institutions muséales/lieux patrimoniaux 12 projets d’établissements d’enseignement :


(6 %) 10 universités (4 individuelles) et 2 collèges (6 %)

9 projets d’établissements d’enseignement : 8 universités 11 projets d’institutions muséales/lieux patrimoniaux


(4 individuelles) et un collège (5 %) (5 %)

6 projets d’organismes autochtones (5 individuels) (3 %) 7 projets d’organismes autochtones (5 individuels) (3 %)
1 projet étranger (USA, Smithsonian Institute) 2 projets étrangers (USA, Smithsonian Institute)

autres sociétés d’État réalisent généralement des gueuil, soucieuses de conserver et de mettre en
interventions archéologiques dans un contexte valeur leur patrimoine culturel.
légal : construction de routes, de barrages, d’im­ Le nombre de projets réalisés par des promo­
meubles, etc. De leur côté, les promoteurs publics teurs privés s’accroît d’année en année et ils sont
fédéraux tels que Parcs Canada sont mandatés de plus en plus variés puisqu’ils concernent aussi
pour assurer la conservation des lieux historiques bien le particulier (propriétaire foncier), la fa­
et des parcs qui sont leurs propriétés. L’investis­ brique, le promoteur industriel et couvrent grosso
sement public demeure de loin le plus important modo toutes les sphères de la société. Pour leur
en subventionnant, directement ou indirectement, part, les promoteurs culturels doivent porter une
les autres promoteurs, que ce soient les munici­ attention particulière à la conservation et à la mise
palités, les promoteurs privés, les organismes en valeur du lieu, ce qui correspond souvent à la
autochtones, les institutions muséales et même restauration des bâtiments et à l’ajout de services
les établissements d’enseignement. publics destinés à mieux accueillir les visiteurs ; ils
De leur côté, les promoteurs municipaux doi­ financent aussi des projets de fouilles ouvertes au
vent répondre à des besoins d’aménagement qui public, ainsi que des fouilles simulées.
comprennent des infrastructures urbaines (réfec­ Les collèges conçoivent des stages pratiques
tion de rues, enfouissement des réseaux câblés, sur le terrain, appelés aussi des chantiers écoles,
réseau d’aqueduc, parcs, etc.) et des projets cultu­ pour former leurs étudiants, tandis que les uni­
rels et touristiques (restauration de bâtiments versités incluent dans leur formation de base en
patrimoniaux, mise en valeur des lieux d’inter­ archéologie des chantiers écoles où les professeurs
prétation et des institutions muséales). Plusieurs chercheurs y poursuivent aussi des recherches à
de ces projets sont situés dans des sites patrimo­ long terme. De leur côté, les organismes autoch­
niaux déclarés ou classés, dans lesquels ils doivent tones mènent des chantiers écoles visant, en plus
tenir compte du patrimoine archéologique. C’est de la recherche archéologique traditionnelle, la
ce qui a permis aux villes de Montréal et de Qué­ formation des jeunes, la sensibilisation de la popu­
bec de développer depuis 30 ans des mécanismes lation locale à l’archéologie et à son patrimoine
de gestion interne pour mieux intégrer le patri­ culturel. Enfin, les archéologues du Smithsonian
moine archéologique dans la planification urbaine. Institute aux États-Unis poursuivent des projets
Le même phénomène s’étend maintenant aussi à de recherche sur la basse Côte-Nord et au Labra­
d’autres municipalités, comme à Lévis et à Lon­ dor depuis bon nombre d’années.
Archéologiques, no 29  73

Tableau 5.  Description des contextes dans lesquels se font les interventions archéologiques au Québec

Contextes Exemples Cadre légal et réglementaire Principaux promoteurs


Grands projets de Éolienne, forestier, La Loi sur la qualité de Publics et privés
développement hydroélectrique, minier, l’environnement (LQE)
routier
Projets Réfection de rues, de LQE, Loi sur l’aménagement et Municipaux
d’aménagements réseaux d’aqueduc et l’urbanisme (LAU) et Loi sur le
urbains autres infrastructures patrimoine culturel (LPC)

Autres projets de Développement Réglementation municipale, Privés, municipaux, organismes


développement domiciliaire LAU, LPC autochtones

À caractère culturel Aménagement et mise LPC et réglementation Institutions muséales et lieux


et touristique en valeur de sites municipale patrimoniaux, organismes
patrimoniaux autochtones

À caractère Chantiers écoles, LPC Établissements d’enseignement,


scientifique, fouilles ouvertes au organismes autochtones,
éducatif et ludique public institu­tions muséales et lieux
patri­moniaux, promoteurs
étrangers

Les contextes Par exemple, s’il n’y avait que des interventions
archéologiques dans des projets de développe­
Les données sur les promoteurs et sur la nature ment, on pourrait s’interroger sur les retombées
des interventions sont utiles pour établir les prin­ citoyennes qui en découlent. En théorie, l’équilibre
cipaux contextes dans lesquels l’archéologie se fait devrait être atteint lorsqu’une certaine proportion
au Québec. À la lumière des données disponibles des interventions est destinée à des fins scienti­
pour les années 2013 et 2014, cinq contextes res­ fiques, culturelles, touristiques ou éducatives.
sortent clairement : il s’agit des grands projets de Quant à l’aménagement urbain, l’intégration des
développement, de projets de développement de interventions archéologiques à de tels projets
moindre envergure (autres projets), d’aménage­ constitue une prise de conscience des bénéfices
ments urbains, de projets à caractère culturel et potentiels pour les citoyens et s’inscrit du même
touristique, et de projets à caractère scientifique, coup dans le développement durable (tableau 6).
éducatif et ludique (tableau 5). À maints égards, Plusieurs grands projets sont liés au Plan
ces mêmes contextes sont représentatifs de ce qui Nord 1 et sont situés sur la Côte-Nord, mais il y en
se passe dans le monde occidental en général et a eu moins en 2014, alors que les projets mineurs
permettent d’aborder comment l’archéologie s’in­ (autres) de développement se sont accentués en
scrit dans le développement durable et la qualité 2014. Les promoteurs publics et privés qui réali­
de vie citoyenne. sent de tels projets, incluent l’archéologie dans

Tableau 6.  Les principaux contextes des interventions archéologiques en 2013 et 2014

2013 : 181 projets 2014 : 216 projets

Projets d’aménagement urbain : 50 - 28 % Projets d’aménagement urbain : 57 - 26 %


Projets culturels et touristiques : 44 - 24 % Projets culturels et touristiques : 53 - 25 %
Autres projets de développement : 33 - 18 % Autres projets de développement : 50 – 23 %
Projets scientifiques, éducatifs, ludiques : 32 - 18 % Projets scientifiques, éducatifs, ludiques : 35 - 16 %
Grands projets : 22 - 12 % Grands projets : 21 - 10 %
74  Archéologie et développement durable au Québec ~ P. Desrosiers

leurs travaux d’excavation, surtout pour respecter concrétisent par des ententes de développement
les lois sur la qualité de l’environnement et sur le culturel (plus de 25 millions de dollars en 2013 et
patrimoine culturel. L’aménagement urbain est plus de 4 millions de dollars en 2014) 2 . Les villes
surtout l’affaire des municipalités et des promo­ de Québec et de Montréal ont fait des grands pas
teurs publics comme Hydro-Québec et le ministère en ce sens depuis 30 ans et ont établi des façons
des Transports, mais d’autres promoteurs privés de faire porteuses en fonction de leurs réalités
et publics ont recours à des interventions archéo­ respectives. Mais en dehors de ces deux villes, le
logiques dans le cadre de leurs travaux d’excava­ réflexe « archéo » se limite très souvent à la recon­
tion. Ils sont souvent liés à des obligations légales, naissance de l’impact du projet sur le patrimoine
en particulier dans les sites patrimoniaux déclarés archéologique, sans plus. Deux villes situées à
de Québec et de Montréal. Les travaux de restau­ proximité de ces pôles urbains, Lévis et Longueuil,
ration sur le patrimoine bâti entraînent souvent constituent toutefois des exemples éloquents d’in­
des interventions archéologiques ; de plus, plu­ tégration de cette dimension culturelle, contras­
sieurs institutions muséales et lieux patrimoniaux tant avec son absence quasi complète à Laval.
doivent réaliser divers travaux pour les conserver La catégorie des projets culturels et touris­
et les mettre en valeur. De leur côté, les projets de tiques s’impose pour mettre en évidence les efforts
recherche scientifique, de formation étudiante et mis sur la conservation et la mise en valeur du
de sensibilisation du public à l’archéologie sont de patrimoine archéologique ; elle indique que la
plus en plus amalgamés et se retrouvent autant en majorité des projets concernent le patrimoine bâti
milieu universitaire, collégial qu’en milieu au­ et que l’intervention archéologique lui est su­
tochtone. bordonnée. Il en va de même pour les interventions
Les compilations permettent de constater une réalisées sur des lieux patrimoniaux ou autour des
prise en compte importante de l’archéologie en institutions muséales ; elles ont essentiellement
matière de développement durable fortement en­ pour objectif d’intégrer la protection du patri­
couragée par les lois en place. Son intégration se moine archéologique dans l’aménagement. Cer­
limite cependant au fait que le promoteur recon­ tains projets se démarquent néanmoins, dont celui
naît que son projet peut avoir un impact sur le de Pointe-à-Callière, le musée d’archéologie et
patrimoine archéologique ; de là à savoir comment d’histoire de Montréal, qui a pour objet l’acquisi­
optimiser « culturellement » son investissement tion de nouvelles connaissances en vue d’alimenter
en collaborant davantage en amont avec l’archéo­ et d’enrichir la mise en valeur des sites et des
logue, il reste un grand pas qui ne semble pas collections qui seront présentés au public. Toute­
encore avoir été franchi. S’ajoute à ce constat, le fois, globalement, peu de projets culturels sont
nombre croissant de promoteurs publics et privés menés à des fins d’acquisition de nouvelles con­
avec lesquels l’archéologue doit négocier pour naissances.
faire valoir que sa contribution représente une Les projets scientifiques ont été regroupés
valeur culturelle ajoutée plutôt qu’une contrainte avec les chantiers écoles et les fouilles ouvertes au
au développement économique. Le défi d’intégra­ public. En tout, cette catégorie ne dépasse pas les
tion de l’archéologie n’en est apparemment qu’à 20 %. Par l’entremise des chantiers écoles, les cher­
ses débuts. cheurs universitaires peuvent amener leurs étu­
A priori, la distinction entre les grands projets diants sur les sites qui les intéressent, y poursuivre
et les autres projets de développement s’avérait des recherches, y donner une formation et obtenir
nécessaire pour départager ce qui était une obliga­ une reconnaissance universitaire pour leurs ef­
tion légale de ce qui ne l’était pas. Cependant, dans forts. Quant aux fouilles ouvertes au public, elles
les faits, les projets des promoteurs privés doivent constituent un moyen de diffusion fort attrayant
aussi être réalisés en fonction de la nouvelle Loi et peu coûteux pour animer les lieux durant la
sur le patrimoine culturel (2012), qui les oblige belle saison ; elles obtiennent un grand succès
dorénavant à considérer l’archéologie dans les sites auprès des familles car celles-ci répondent avec
patrimoniaux déclarés et classés. enthousiasme à l’activité, qui en retour les intro­
La présence de l’archéologie dans l’aménage­ duit à la notion d’un passé tangible, méconnu.
ment urbain semble solide, notamment grâce aux On peut se demander, après la description de
liens qui se tissent graduellement avec le monde ces divers contextes, qu’en est-il de la recherche
municipal, les partenaires privilégiés du ministère qui permet l’acquisition de nouvelles connais­
de la Culture et des Communications, et qui se sances ? Elle est certes présente dans les grands
Archéologiques, no 29  75

Tableau 7.  Les contextes regroupés

Contextes des interventions en 2013 : 181 Contextes des interventions en 2014 : 216

Projets d’aménagement urbain : 50 - 28 % Projets d’aménagement urbain : 57 - 26 %


Projets de développement : 55 - 30 % Projets de développement : 71 - 33 %
Projets culturels (général) : 76 - 42 % Projets culturels (général) : 88 - 41 %

projets, en autant qu’elle respecte les balises im­ Montréal et Québec est important (plus de 20 %) ;
posées par le promoteur et, bien sûr, qu’il y ait des le peu de projets à Montréal n’a cependant aucune
découvertes. La recherche peut être assez variable corrélation avec la nature ou l’investissement fi­
dans les projets d’aménagement, à moins qu’elle nancier associé aux projets. De tels chiffres con­
soit encadrée par les archéologues municipaux. cordent toutefois avec le fait que la métropole
Autrement, il ne reste que les chantiers écoles où demeure le théâtre de nombreux projets de dé­
la recherche est jumelée à la formation. veloppement, alors que la capitale via ses sites
Le tableau ci-dessus (tableau 7) regroupe les patrimoniaux déclarés du Vieux-Québec, de Char­
principaux contextes des interventions archéo­ lesbourg, de Sillery et de Beauport entretient sa
logiques selon qu’il s’agit de projets de dévelop­ réputation de ville du patrimoine mondial en met­
pement (grands et autres), d’aménagement urbain tant l’accent sur l’aménagement urbain.
ou de projets culturels (incluant les projets scienti­ Si l’on considère que les interventions archéo­
fiques et touristiques), ceci afin de mieux faire logiques se font généralement dans un contexte
ressortir les liens entre le développement éco­ de développement durable, il est possible de dis­
nomique, l’aménagement urbain et, globalement, cerner ici trois pôles d’intérêt, le premier d’ordre
ce qui est produit pour le citoyen sous forme de économique, le deuxième lié à l’aménagement
projets culturels. urbain et le troisième d’ordre culturel. Une ville
doit composer avec ces trois volets pour que le
UN DÉVELOPPEMENT DURABLE développement durable se concrétise par des re­
À MONTRÉAL ET À QUÉBEC ? tombées citoyennes ; le résultat de leur maillage
permet ainsi d’exprimer son caractère distinctif
Près de la moitié de toutes les interventions qui peut différer d’une ville à l’autre et même d’une
archéologiques à Montréal sont réalisées dans le région à l’autre. Ainsi, à Montréal le ratio (sur 10
cadre de projets de développement, surtout des projets) : 4D (développement) - 4A (aménagement)
projets domiciliaires, alors que Québec dépasse à - 2C (culture) de projets archéologiques, alors qu’à
peine le quart en 2014 (tableau 8). En 2013 et en Québec le ratio s’établit à 3D-4A-3C. Cela étant
2014, environ 40 % de celles-ci s’inscrivent dans le dit, les interventions archéologiques ne devraient
cadre de projets d’aménagement urbain tant à pas être toutes les mêmes (des surveillances uni­
Montréal qu’à Québec ; ce pourcentage est intéres­ quement, par exemple), on devrait privilégier aussi
sant puisqu’il révèle un souci d’intégration du un certain nombre d’interventions majeures
patrimoine archéologique à l’aménagement ur­ (fouilles), préliminaires (inventaires et évalua­
bain. Quant aux projets culturels, l’écart entre tions). La participation des promoteurs gouver­

Tableau 8.  Les contextes de réalisation des projets archéologiques à Montréal et à Québec en 2013 et 2014

Contextes Mtl – 2013 Mtl – 2014 Qc – 2013 Qc – 2014


39 projets 40 projets 32 projets 38 projets

Projets de développement
(mineurs et majeurs) 17 - 44 % 19 - 47 % 4 – 13 % 10 - 26 %
Projets d’aménagement urbain 15 - 38 % 17 - 42 % 14 - 44 % 14 - 37 %
Projets culturels, scientifiques,
touristiques, éducatifs, etc. 7 - 18 % 4 - 10 % 14 - 44 % 14 - 37 %
76  Archéologie et développement durable au Québec ~ P. Desrosiers

Tableau 9.  Description des projets dans le Bas-Saint-Laurent en 2013 et 2014

2013 : Nature des 2014 : Nature des


15 projets Promoteurs interventions 9 projets Promoteurs interventions

2 projets de 1 municipal et 2 inventaires 2 projets de 1 privé et 1 lieu 1 évaluation et


développement 1 provincial développement d’interprétation 1 inventaire

7 projets 2 provinciaux, 3 activités 5 projets 2 universitaires, 2 activités


scientifiques, 2 fédéraux, subaquatiques, scientifiques, 1 fédéral, publiques,
éducatifs, 1 lieu d’inter­ 2 activités éducatifs, 1 provincial, 1 activité
culturels et prétation, pu­bliques, culturels et 1 lieu subaquatique,
touristiques 1 université, 1 évaluation et touristiques d’inter­prétation 1 fouille,
1 privé, 1 inventaire 1 évaluation

6 projets 4 municipaux et 3 inventaires et 2 projets 1 privé et 1 évaluation


d’aménagement 2 lieux 3 surveillances d’aménagement 1 lieu avec surveil­
urbain d’interprétation urbain d’interprétation lance et
1 inventaire

nementaux, municipaux et privés devrait égale­ UN DÉVELOPPEMENT DURABLE


ment être assurée. POUR LES RÉGIONS ?
En ce qui a trait aux projets culturels, le réflexe
d’en faire revient surtout aux villes, même si l’État À partir de la description des interventions ar­
et le privé doivent également s’investir. De plus, chéologiques et les contextes établis à partir de
dans la planification des projets d’aménagement, celles-ci, il est possible de dégager certaines carac­
il est important que les villes réalisent des inter­ téristiques régionales en matière de dévelop­pe­
ventions archéologiques préliminaires afin d’éva­ ment, d’aménagement et de retombées cultu­relles.
luer l’impact de leurs projets et d’entrevoir des Les régions du Bas-Saint-Laurent, de la Côte-Nord
solutions où les gains peuvent bien se mesurer aux et de la Montérégie se prêtent bien à cet exercice ;
pertes. Quant aux projets de développement, le la première est représentative d’un milieu rural
privé et l’État peuvent y jouer un rôle actif en traditionnel, la deuxième d’un milieu propice à
envisageant d’avance l’impact de leurs projets sur l’exploitation des ressources naturelles et la der­
le patrimoine archéologique que ce soit dans un nière, située à proximité de la métropole, d’un
cadre légal ou non. La Ville peut les amener aussi milieu en pleine transformation démo­gra­phique,
à éviter certains secteurs d’intérêt ou à mieux sociale et culturelle. Les autres régions n’ont pas
intégrer le patrimoine archéologique dans leurs suffisamment de projets archéologiques pour ser­
projets. vir d’exemples, ce qui révèle en soi des disparités
Dans les pôles urbains de Montréal et de Qué­ régionales substantielles dues à plu­sieurs facteurs,
bec se retrouvent les principaux enjeux en­tourant dont la méconnaissance et, con­séquemment, l’ab­
l’intégration du patrimoine archéologique à la sence de prise en compte du potentiel archéo­
qualité de vie des citoyens. logique dans le développement régional.

Le Bas-Saint-Laurent
Les projets scientifiques, éducatifs, touristiques et
culturels sont majoritaires (autour de 50 %), les
projets de développement sont minoritaires
(moins de 20 %), alors que les projets d’aména­
gement urbain fluctuent grandement d’une année
à l’autre (40 % en 2013 et moins de 20 % en 2014)
(tableau 9). La diversité des projets, des promo­
teurs et des interventions archéologiques est élo­
Archéologiques, no 29  77

Tableau 10.  Description des projets sur la Côte-Nord en 2013 et 2014

2013 : Nature des 2014 : Nature des


9 projets Promoteurs interventions 19 projets Promoteurs interventions

6 projets de 4 provinciaux, 4 inventaires, 11 projets de 6 provinciaux, 7 inventaires,


développement 2 privés 1 fouille et développement 3 privés, 2 évaluations,
1 divers 2 municipaux 1 fouille,
1 divers

3 projets 1 organisme 2 fouilles et 7 projets 4 municipaux, 3 évaluations,


scientifiques, autochtone, 1 évaluation scientifiques, 1 privé, 2 fouilles,
éducatifs, 1 fédéral, éducatifs, 1 organisme 1 acti­vité publique
culturels et 1 étranger culturels et autochtone, et
touristiques touristiques, 1 étranger 1 activité sub­
aquatique

0 projet — — 1 projet 1 privé 1 évaluation


d’aménagement d’aménagement
urbain urbain

quente. La présence de Ruralys, un centre d’ex­ peu populeuses, munies d’une équipe profes­
pertises en patrimoine culturel, et le rayonnement sionnelle restreinte, éprouvant de la difficulté à
régional du ministère de la Culture et des Com­ protéger leur patrimoine archéologique souvent
munications contribuent à cette dynamique ter­ par méconnaissance de son potentiel. L’investis­
ritoriale. Bref, le portrait des années 2013 et 2014 sement de la CRÉ, en partenariat avec le MCC,
semble indiquer que l’archéologie y fait bonne réussit à combler une lacune importante puisque
figure. Une synergie particulièrement fructueuse le patrimoine archéologique de la région, situé
semble exister entre les partenaires publics et dans la principale voie navigable de pénétration
privés, scientifiques, culturels et économiques de au continent, est substantiel ; il compte plus d’un
la région. Un ratio 2D, 4A, 4C semble se dégager millier de sites, mais demeure vulnérable au
pour la région. L’élément clé de ce modèle régional développement du territoire comme aux change­
semble résider dans la mise en place d’une ex­ ments climatiques (érosion des berges).
pertise régionale qui s’inscrit et évolue fructueu­ Les bilans de 2013 et 2014 révèlent une situa­
sement au sein d’un développement durable. tion particulière ; environ les deux tiers des projets
archéologiques se font dans le cadre du dévelop­
La Côte-Nord pement du territoire et l’autre tiers de projets
culturels ciblés pour les citoyens et le touriste de
La région de la Côte-Nord se distingue par les passage. Ce lien entre développement économique
grands projets qui y sont réalisés par Hydro- et culture est intéressant lorsqu’on constate que
Québec, le ministère des Transports du Québec, les résultats de toute intervention sur la Côte-
ainsi que les firmes d’ingénieurs qui travaillent Nord se soldent immanquablement par des dé­
pour les minières (tableau 10). En tant qu’entité couvertes qui enthousiasment tout le monde,
municipale, la Conférence régionale des Élus de comme en font foi les médias traditionnels et
la Côte-Nord s’est investie dans plusieurs projets sociaux. La quasi-absence de projets d’aménage­
d’archéologie au cours de ces deux années et a ment urbain semble être le volet vulnérable de
redonné à la population locale accès à son patri­ l’archéologie régionale. Malgré le fait qu’il n’existe
moine archéologique en l’invitant à participer aux plus de CRÉ depuis 2015, un organisme régional,
interventions sur le terrain. De plus, la protection Archéo-Mamu, a été créé pour mener des activités
du patrimoine archéologique subaquatique, nom­ archéologiques. Le ratio de 4-D, 2A, 4C semble
mément les épaves, est depuis longtemps une correspondre au standard régional actuel. L’élé­
préoccupation importante de la région. La quasi- ment clé de ce modèle serait le maintien d’une
absence de projets d’aménagement urbain s’ex­ structure organisationnelle sur l’ensemble de ce
plique par des municipalités locales et régionales vaste territoire.
78  Archéologie et développement durable au Québec ~ P. Desrosiers

Tableau 11.  Description des projets sur le territoire de la Montérégie en 2013 et 2014

2013 : Nature des 2014 : Nature des


17 projets Promoteurs interventions 21 projets Promoteurs interventions

5 projets de 3 provinciaux, 2 inventaires, 9 projets de 5 privés, 6 évaluations de


développement 1 municipal, 1 fouille, développement 2 municipaux, site (5 avec
1 fédéral 1 évaluation et 2 provinciaux surveillance) et
1 surveillance 3 inventaires

6 projets 4 municipaux, 1 fouille, 6 projets 3 municipaux, 2 chantiers écoles,


scientifiques, 1 provincial, 1 divers, scientifiques, 2 provinciaux et 1 fouille,
éducatifs, 1 fédéral 1 évaluation, éducatifs, 1 privé 1 inventaire,
culturels et 1 surveillance, culturels et 1 activité
touristiques 1 chantier école, touristiques subaquatique,
1 activité publique 1 activité publique

6 projets 2 municipaux, 3 surveillances, 6 projets 3 universités, 2 inventaires,


d’aménagement 2 fédéraux, 1 inventaire et d’aménagement 1 fédéral, 2 évaluations,
urbain 1 privé et 2 évaluations dont urbain 1 lieu 1 divers et
1 lieu 1 avec surveillance d’interprétation, 1 surveillance
d’interprétation 1 municipal

La Montérégie sur la scène régionale et participer aux enjeux


culturels et économiques et à l’aménagement du
La Montérégie, foyer de plusieurs lieux d’intérêt territoire. Le ratio pour ces deux années est de 2D,
historique, devient de plus en plus populeuse et 5A, 3C en Montérégie. L’élément clé de ce modèle
urbaine (tableau 11). En particulier, les villes de régional serait donc l’intégration de l’archéologie
La Prairie, de Longueuil et de Boucherville se sont dans les nombreux enjeux sociaux, économiques
beaucoup investies en archéologie au fil des années et culturels de développement du territoire.
afin de créer un milieu où les citoyens peuvent
cultiver un sentiment d’appartenance. Il en va de Comparaison interrégionale
même pour la municipalité régionale de comté du
Haut-Saint-Laurent préoccupée par son patri­ En 2013 et 2014, la région du Bas-Saint-Laurent
moine amérindien. De leur côté, les universités y est déficitaire sur le plan des projets de dévelop­
trouvent des sites archéologiques particulièrement pement (moins de la moitié de la moyenne qué­
riches pour y poursuivre des chantiers écoles. Les bécoise), alors que c’est le contraire sur la Côte-
lieux historiques nationaux du Canada (forts et Nord (presque le double) ; de son côté, la Monté­
canaux, en particulier) y abondent ; c’est le cas régie dépasse légèrement la moyenne québécoise
aussi des institutions muséales qui abordent divers (tableau 12). En matière d’aménagement urbain,
volets du patrimoine archéologique amérindien la Côte-Nord accuse un important déficit alors
et eurocanadien. Il existe dans cette région une que les deux autres régions dépassent un peu la
combinaison d’éléments propices au dévelop­ moyenne québécoise. En ce qui a trait aux projets
pement durable et à l’amélioration de la qualité de culturels, c’est le Bas-Saint-Laurent qui remporte
vie des citoyens. Sur ce plan, on peut constater la palme, mais les autres régions font bonne figure
qu’en 2013 et 2014, autour 30 % des projets se font aussi, même si elles se situent légèrement en
dans le contexte de l’aménagement urbain et il en dessous de la moyenne québécoise pour les deux
va de même pour les projets culturels, scienti­ années.
fiques, éducatifs et touristiques. La seule donnée Comme on peut le constater, les variations
qui fluctue concerne les projets de développement, régionales sont importantes et il serait probable­
mais dans une proportion similaire d’une année à ment vain de construire un modèle applicable à
l’autre. L’archéologie semble donc bien présente l’ensemble des régions du Québec. Il faut donc
Archéologiques, no 29  79

Tableau 12.  Comparaisons (régions et territoire du Québec)


en fonction des contextes d’interventions archéologiques

Bas-Saint-Laurent Côte-Nord Montérégie Tout le Québec Tout le Québec Moyenne


2013 et 2014 2013 et 2014 2013 et 2014 2013 2014 québécoise
24 projets 28 projets 38 projets 181 projets 216 projets (2 ans)

4 projets de 17 projets de 37 projets de 55 projets de 71 projets de 33 %


développement développement développement développement développement
17 % 61 % 37 % 33 % 33 %

8 projets 1 projet 12 projets 50 projets 57 projets 27 %


d’aménagement d’aménagement d’aménagement d’aménagement d’aménagement
33 % 3 % 31 % urbain urbain
28 % 26 %

12 projets 10 projets 12 projets 76 projets 88 projets 40 %


culturels culturels culturels culturels culturels
50 % 36 % 31 % 42 % 40 %

2D-4A-4C 4D-2A-4C 2D-5A-3C 3D-3A-4C 3D-3A-4C 3D-3A-4C

faire reposer le modèle sur des valeurs qualitatives tant. Un effort concerté entre les divers inter­
attribuées individuellement dans les trois régions venants de ces régions permettra à l’archéologie
explorées précédemment. Ce sont : d’occuper une place prometteuse et enviable pour
– la présence d’une communauté d’experts en l’avenir. Ce n’est toutefois pas un constat applicable
archéologie travaillant en synergie avec l’en­ pour l’ensemble des régions administratives du
semble des acteurs du développement régio­ Québec qui s’avèrent sous-représentées en matière
nal ; d’archéologie.
– le maintien d’une structure organisationnelle
pour donner une voix citoyenne au dévelop­ DE 1993 À 2013, COMMENT
pement régional ; L’ARCHÉOLOGIE S’EST TRANSFORMÉE ?
– l’intégration de l’archéologie dans les nom­
breux enjeux culturels, sociaux et économiques Les interventions de terrain ont quasiment doublé
du développement régional. en 20 ans (tableau 13) ; en 1993, excluant certaines
Les comparaisons interrégionales démontrent interventions de Parcs Canada et d’autres inter­
bien l’importance des projets culturels par rapport venants sur les sites fédéraux 3 , on atteignait le
aux projets de développement et d’aménagement ; chiffre symbolique de 100 permis au ministère de
sur 10 projets, il y en a généralement trois, sauf à la Culture et des Communications (Desrosiers
Montréal où il n’y en a que deux. On constate aussi 1996, 295-301) alors qu’en 2013 on en recense 181.
que les projets d’aménagement urbain sont les plus Les régions où il se fait le plus et le moins
nombreux dans les pôles urbains et qu’ils dimi­ d’archéologie ont peu changé depuis 20 ans.
nuent graduellement dans les banlieues, puis dans Montréal et Québec demeurent les villes les plus
les milieux ruraux pour disparaître dans les ré­ actives. En dehors des pôles urbains, la Monté­
gions « ressources ». Même si le portrait qui se régie, la Côte-Nord et le Bas-Saint-Laurent font
dégage de cet exercice n’est basé que sur certaines bonne figure alors que les régions de Laval 4 , La­
données quantitatives établies pour les années naudière et Laurentides ne semblent pas considé­
2013 et 2014, il révèle des efforts réels d’intégrer rer l’archéologie comme un élément significatif de
le patrimoine archéologique dans le développe­ leur patrimoine culturel. Malgré certains gestes
ment durable du territoire en général et des villes pour corriger cette situation au fil des ans, les
en particulier. De plus, des retombées concrètes résultats restent étonnamment maigres.
se matérialisent dans les divers projets culturels Relativement à la nature des interventions,
où le citoyen joue un rôle de plus en plus impor­ plusieurs projets amalgamaient déjà la surveil­
80  Archéologie et développement durable au Québec ~ P. Desrosiers

Tableau 13.  Comparaisons entre les données provenant des bilans de 1993 et 2013

1993 2013 Évolution

Nombre de projets 100 permis de recherche archéo- 181 (incluant celles réalisées - augmentation
terre délivrés par le MCC sur les terres fédérales)
(n’incluant pas tous les projets
menés sur les terres fédérales)
Nature des inventaires : 37 % inventaires : 27 % - baisse
interventions fouilles : 35 % fouilles : 11 % - baisse
surveillance (seule- surveillance (seule-
ment) : 16 % ment) : 24 % - augmentation
évaluations : 10 % évaluations : 19 % - augmentation
divers : 2 % divers : 8 % - augmentation
autres : 11 %
Promoteurs gouvernementaux : 48 % gouvernementaux : 32 % - baisse
municipaux : 33 % municipaux : 32 % - stable
privés : 9 % privés : 22 % - augmentation
universités : 9 % universités : 5 % - baisse
institution muséale : 1 % institutions muséales : 6 % - augmentation
Contextes développement : 44 % développement : 30 % - baisse
aménagement : 32 % aménagement urbain : 28 % - baisse
culturels, scientifiques, édu- culturels, scientifiques, édu-
catifs et touristiques : 24 % catifs et touristiques : 42 % - augmentation

lance aux interventions traditionnelles de fouilles, En 1993, 9 % des promoteurs de l’archéologie
inventaires et évaluations. À l’époque, 27 % des provenaient du privé alors qu’en 2013, ils consti­
projets incluaient la surveillance ; 20 ans plus tard, tuent 23 % ; ces chiffres confirment la participation
c’est 43 % 5 . C’est donc une réalité avec la­quelle accrue de promoteurs privés provenant de plu­
tous les archéologues sont confrontés aujourd’hui sieurs sources, notamment des milieux industriel
sur le terrain. La surveillance comme unique inter­ et patrimonial et du particulier (propriétaire pri­
vention de terrain continue aussi à progresser ; vé), liés souvent aux nouvelles obligations légales.
alors qu’en 1993, 16 % des terrains seulement Du côté des municipalités, les proportions de­
étaient des surveillances, elles se rapprochent du meurent stables et représentent environ un tiers
quart en 2013 (24 %). Cette tendance semble indi­ des projets ; une baisse importante s’observe dans
quer que la surveillance est toujours prisée même la présence de l’État qui était le promoteur de 48 %
si les résultats qui en découlent demeurent large­ des projets en 1993 et de 32 % en 2013. On serait
ment insuffisants pour les archéologues, qui pré­ porté à croire ici que le partage public-municipal-
conisent plutôt une augmentation des prospec­ privé tend à s’équilibrer avec le temps (1/3, 1/3,
tions (inventaires et évaluations) et des fouilles. 1/3) ; cela indique à tout le moins que le réflexe de
En ce qui a trait aux fouilles, en incluant les chan­ protéger le patrimoine archéologique est de plus
tiers écoles et la catégorie « Divers », elles consti­ en plus étendu et traduit un meilleur partage de
tuaient 37 % des interventions en 1993 et sont responsabilités face à ce bien collectif. De plus, il
tombées à 22 % en 2013 6 . Cette diminution peut faut reconnaître qu’il est encouragé par un cadre
être due à de nombreux facteurs dont les coûts législatif qui souhaite responsabiliser davantage
entourant des fouilles qui constituent des inter­ les municipalités locales et régionales.
ventions substantielles ; il n’en demeure pas moins Les contextes d’intervention en 1993 et de
que c’est là que réside le potentiel de recherche 2013 ont été regroupés en fonction de ce qui est
archéologique au Québec, potentiel qui s’érode et considéré comme un projet de développement (lié
qui donne lieu à une accumulation de données aux études d’impact environnementales), un pro­
préliminaires et de qualité variable provenant des jet d’aménagement urbain (lié aux projets muni­
autres types d’interventions. cipaux) ou un projet culturel (lié à la recherche, à
Archéologiques, no 29  81

la gestion des biens culturels, etc.). En 1993, les dépendants de l’archéologue, mais qui affectent
projets se répartissaient de la façon suivante : 44 % sérieusement la qualité de son travail et, con­
(développement), 32 % (aménagement) et 34 % séquemment, l’interprétation qu’il peut faire des
(culture). En 2013, les pourcentages sont de 30 % découvertes. C’est comme si, après avoir passé par
(développement), 28 % (aménagement) et 42 % la période de professionnalisation (des années
(culture). Le changement majeur qui s’est opéré 1970 aux années 1990), l’archéologie se démo­
depuis 20 ans se situe donc dans les projets cultu­ cratise et se manifeste un peu partout, mais s’ex­
rels qui couvrent maintenant un éventail très large prime de différentes manières en fonction de la
et comprennent outre la recherche, la gestion du volonté des promoteurs qui, par ailleurs, ont des
patrimoine architectural, la mise en valeur et les connaissances assez limitées du potentiel de l’ar­
activités offertes au public. On peut en déduire chéologie. En fait, cela les concerne effective­ment
que l’intérêt collectif pour l’archéologie s’est gran­ assez peu, l’important étant de montrer patte blan­
dement accru et proposer que les activités du che, tout en limitant les coûts et les délais. Il faudra
réseau Archéo-Québec durant le Mois de l’archéo­ donc encore du temps avant de constater des
logie soient largement responsables de cette si­ changements significatifs chez les promoteurs.
tuation. D’ici là les archéologues devront redoubler d’ef­
En somme, le visage de l’archéologie au Qué­ forts pour les convaincre d’en faire plus, surtout
bec s’est bien modifié depuis 20 ans. Il s’en fait de des recherches plus substantielles, en réitérant que
plus en plus et la surveillance est devenue presque c’est à leur avantage !
incontournable lorsqu’on prévoit des travaux d’ex­
cavation qui sont susceptibles d’af­fecter, voire ARCHÉOLOGIE,
détruire, le patrimoine archéologique. La respon­
DÉVELOPPEMENT DURABLE
sabilité de faire de l’archéologie ne se limite toute­
fois plus à l’État et aux municipalités, elle s’étend ET QUALITÉ DE VIE CITOYENNE
maintenant aux promoteurs privés. Face au dé­ As a citizen and taxpayer, I start with a
veloppement et à l’aménagement du territoire, des presumption that archaeology mandated by
mécanismes sont maintenant im­plantés pour faire legislation or funded with public monies
en sorte que, d’un côté, les citoyens prennent should be of public benefit.
contact avec leur patrimoine archéologique et, de (Little 2013, 277)
l’autre, que les archéologues acceptent volontiers
de participer au dévelop­pement durable. Si cela Voici deux exemples qui unissent l’archéologie
accroît la tâche de ces derniers et présente plus de autour des concepts de développement durable et
défis pour eux, elle élargit aussi leur influence de qualité de vie des gens, et qui illustrent plus
culturelle et sociale. concrètement les rapports entre eux. S’ensuit une
Le réflexe de faire de l’archéologie de terrain discussion sur l’évolution de la pratique archéo­
est de plus en plus présent chez les promoteurs logique et les principes auxquels les concepts font
publics et privés, mais il reste encore beaucoup à référence.
faire pour que les interventions en elles-mêmes
soient significatives. D’un côté, l’archéologie s’est Un projet archéologique qui s’inscrit
beaucoup infiltrée dans le développement et dans dans le développement durable
l’aménagement urbain. De l’autre côté, elle fait
bonne figure dans bon nombre de projets culturels Le parc national du Lac-Témiscouata a été créé en
et touristiques, où elle s’inscrit dans une vision 2014 après plusieurs années de gestation. Il est
plus globale de la protection du patrimoine cultu­ géré aujourd’hui par la Société des établissements
rel, donc moins segmentée. Il reste que la possibi­ de plein-air du Québec, une société d’État. Il s’agit
lité de faire des recherches (des fouilles) devient d’un territoire naturel situé au sud du fleuve Saint-
de plus en plus marginale. Laurent faisant partie d’un système de lacs et de
De son côté, le promoteur reconnaît qu’il doit rivières qui mènent à l’océan Atlantique. Le parc
intégrer l’archéologie à son projet – geste souvent renferme à ce jour une cinquantaine de sites ar­
justifié par des obligations légales – et qu’il peut chéologiques qui ont fait l’objet de bon nombre
s’éviter des problèmes en l’intégrant dans sa d’interventions depuis des décennies ; les archéo­
planification. Malheureusement cette intégration logues y collaborent avec plusieurs intervenants
varie énormément en fonction des impératifs in­ publics et privés pour protéger le patrimoine
82  Archéologie et développement durable au Québec ~ P. Desrosiers

archéologique de ce territoire. Il a fallu, entre préalables aux travaux sur les fondations de l’égli­
autres, que l’Université de Montréal s’y investisse se, qui menaçait de s’écrouler. L’église ayant été
sur le plan scientifique, que les autorités régionales cons­t ruite au xixe siècle, partiellement sur le cime­
militent pour conserver intact ce patrimoine natu­ tière protestant du xviiie siècle, plusieurs sépul­
rel, que la population locale accepte de se voir tures y ont été dégagées. En tout, pour l’ensemble
dépossédée de son accès privilégié au territoire et, des interventions, plus de 200 sépultures ont été
enfin, que les gestionnaires du parc prennent le ex­humées lors des interventions archéologiques.
beau risque d’axer la promotion du parc sur son Étant devenue propriétaire du lieu, la Ville de
patrimoine archéologique ; ce n’est pas une mince Québec s’est associée à l’Université Laval pour
tâche puisqu’il faut aménager le parc à des fins de effectuer des analyses bioarchéologiques selon un
conservation et de tourisme, sans pour autant code de déontologie établi en concertation étroite
occasionner d’impact négatif sur la ressource ar­ avec la communauté anglicane de Québec.
chéologique. Comme prévu, partout où des amé­ En 2015, les ossements ont été réinhumés
nagements devaient être effectués, des nouveaux dans le cimetière Mount Hermon à Sillery et, le
sites ont été découverts. De plus, comment mettre 4 décembre 2015, les résultats des recherches ont
en valeur un patrimoine culturel qui sur le plan été présentés à la communauté anglicane dans les
scientifique est captivant, mais qui l’est certes laboratoires de l’Université Laval. Le programme
moins pour le visiteur avec le peu de connaissan­ de recherche réunissant des chercheurs de plu­
ces qu’il a de l’archéologie ? Ici, tout réside dans la sieurs universités et centres de recherche cana­
manière dont on se sert de l’archéologie ; en d’au­ diens, s’est déroulé sur plus de dix ans ; il a produit
tres mots, au lieu de voir celle-ci comme une trois thèses de doctorat et huit mémoires de maî­
finalité, il faut l’appréhender dans un processus de trise. Grâce au programme de recherche, des
recherche et de mise en valeur. Ainsi, le visiteur avancées considérables ont été faites dans le do­
est invité à découvrir l’archéologie du parc de maine de la bioarchéologie. Les recherches ont
plusieurs manières : fouilles, explorations, expé­ porté entre autres sur les comportements funé­
rimentations, des activités de sensibilisation à raires différents entre les cimetières catholiques
la  protection du patrimoine archéologique. En et protestants, la  démographie à cette époque
somme, le développement durable appliqué en préindustrielle (1772–1860), les maladies caren­
archéologie ne consiste pas à l’offrir comme un tielles, l’alimen­tation, la santé et l’origine ethnique
plat tout cuit, mais bien de le faire mijoter lon­ des individus.
guement pour atteindre sa pleine saveur. Ce qui est remarquable dans cet exemple, c’est
le respect accordé à la communauté anglicane de
Un projet archéologique qui présente Québec et, en retour, sa grande ouverture vis-à-vis
des retombées citoyennes de la recherche scientifique et ce, depuis le début
du projet jusqu’à son terme. Pendant toute la pé­
Voici un exemple où le contexte dans lequel se fait riode des recherches, cette collaboration a amené
l’archéologie – celui de l’aménagement urbain la réalisation de plusieurs projets de mise en valeur
(réfection de rue, puis restauration d’un bâtiment sur place, dont la conversion de l’église en biblio­
patrimonial) – loin d’être idéal puisque subordon­ thèque municipale. Enfin, un projet de publication
né à des impératifs autres que ceux liés à la recher­ est maintenant envisagé en collaboration avec tous
che archéologique stricte, peut apporter une con­ les partenaires.
tribution pertinente à la qualité de vie des citoyens. En somme, les recherches scientifiques sur des
Il démontre bien comment les interventions sépultures provenant d’un cimetière présentent
archéologiques peuvent contribuer à l’avancement leur lot de défis et rendent le projet archéologique
des sciences et parvenir à reconstituer un passé d’autant plus complexe à gérer. Le support de la
méconnu, celui d’une communauté anglicane de population locale peut toutefois grandement
Québec. enrichir un tel projet et l’exemple de St. Matthew
À plusieurs reprises des interventions archéo­ est très éloquent à cet égard.
logiques ont été menées sur le site du cimetière
St. Matthew à Québec. Cela a commencé par des
surveillances lors de la réfection de la rue Saint-
Jean-Baptiste durant les années 1980 et s’est ter­
miné au début des années 2000 avec des fouilles
Archéologiques, no 29  83

Une archéologie en mutation logique doit s’ajuster ou, tout simplement, être
occulté si ce n’est pas absolument nécessaire de le
Depuis les années 1990, on constate davantage le faire. La vigilance est toujours de mise dans chaque
poids que la société peut avoir sur les archéologues projet.
qui étudient le passé matériel enfoui sous nos En devenant plus intégrée aux projets de dé­
pieds. Qui plus est, les réalités sociales, culturelles veloppement et d’aménagement sur le territoire,
et économiques imposent des contextes d’inter­ la recherche se fragilise et il devient de plus en
ventions archéologiques de plus en plus rigides et plus difficile de réaliser les interventions archéo­
influencent les résultats de la recherche archéo­ logiques dans des conditions optimales sur le plan
logique, parce qu’elle fait partie intégrante du tissu scientifique. Cette situation critique s’accroît avec
social (Flatman 2013, 291 ; Desrosiers 2011). les années. Il semble néanmoins que c’est le prix
Depuis les cinquante dernières années, l’État à payer – momentanément – pour que l’archéolo­
a gardé le cap sur l’édification d’un corpus re­ gie devienne un acquis au développement et à
présentatif des caractéristiques de l’archéologie l’aménagement du territoire et une valeur ajoutée
québécoise. Les éléments de base sont maintenant à la qualité de vie des citoyens. Cette situation ne
presque constitués avec une carte archéologique doit toutefois pas s’éterniser ; on doit à long terme
du Québec, une bibliothèque virtuelle en bonne instituer des mécanismes beaucoup plus satis­
voie d’être réalisée et contenant les rapports ar­ faisants et, surtout, offrir des résultats pertinents
chéologiques, une loi qui permet de protéger à partir des interventions archéologiques. Il re­
(quoique partiellement) le patrimoine archéo­ vient aux archéologues de maintenir les standards
logique et d’encadrer ce qui se fait sur le terrain, et de ne pas baisser les bras !
et des nouvelles publications (Air, Eau, Feu, Terre, En ce sens, l’archéologue n’est pas au bout de
et Fragments d’humanité 7 ) réalisées par Pointe- ses peines puisqu’il doit aussi tenir compte d’autres
à-Callière, musée d’archéologie et d’his­toire de réalités culturelles, notamment dans ses rapports
Montréal, qui permettront au public de recon­ avec les peuples autochtones. L’archéologue amé­
naître l’expertise des archéologues québécois. rindien Joe Watkins voit des compromis inévi­
Toutefois, il devient évident que l’archéologue tables pour que l’archéologie puisse être vraiment
s’éloigne de plus en plus de ses assises scientifi­ pertinente dans la société d’aujourd’hui :
ques. En lieu et place, il doit faire valoir son travail
auprès de gens peu ou pas familiers avec l’archéo­ However, if archaeology wishes to go beyond the
status of mere “utility” and on to one of true
logie, expliquer ce qu’il fait, proposer des scénarios
relevance, it must change. It must stop seeing
applicables à l’exécution du projet du promoteur,
itself as the “finder of truths” outside of a cul­ture
rester souple devant les imprévus, etc. Son travail
and establish working partnerships aimed at
professionnel s’alourdit considérablement et vise sharing the development of pragmatic ap­
à sensibiliser le promoteur face à l’archéologie en proaches to gather data and understand the
général et au rôle qu’il doit jouer dans le cadre du cultural meanings of past events. (Watkins
projet (rôle qui ne se limite pas à l’intervention de 2013, 264)
terrain, bien sûr, mais qui reste mineur aux yeux
du promoteur).
De son côté, le promoteur doit prendre con­ L’ORIGINE DES CONCEPTS ENTOURANT
science de l’importance du patrimoine archéo­ LE DÉVELOPPEMENT DURABLE
logique et de sa protection, mais malheureuse­ ET LA QUALITÉ DE VIE, ET LEUR
ment il le fait généralement trop tard, au moment APPLICATION EN ARCHÉOLOGIE
de l’exécution des travaux d’excavation. Il reste
beaucoup à faire pour développer un réflexe de Le Québec suit de près l’évolution des pratiques
précaution lors de la planification des travaux, internationales en matière de patrimoine culturel
même au sein de l’État. Toutefois, de leur côté, les en général et de patrimoine archéologique en
archéologues rattachés au ministère des Trans­ particulier. Des liens peuvent aisément être établis
ports et à Hydro-Québec ont bien établi des façons avec les conventions qui ont été mises de l’avant
de faire pour examiner les projets à venir en par l’UNESCO et d’autres organismes qui in­fluen­
amont ; mais il y a toujours des surprises, des cent grandement les pratiques profession­nelles
changements de priorités et des oublis qui font actuelles. Par exemple, le Conseil de l’Europe a
que l’agenda est bousculé et que le volet archéo­ conçu plusieurs cadres de référence qui définissent
84  Archéologie et développement durable au Québec ~ P. Desrosiers

et orientent la protection du patrimoine archéo­ b. à prendre en considération la valeur atta­


logique et qui ont grandement influencé le Qué­ chée au patrimoine culturel auquel s’iden­
bec. C’est le cas de la Convention internationale tifient les diverses communautés patri­
pour la protection du patrimoine archéologique, moniales ;
communément appelée la Convention de La c. à reconnaître le rôle des organisations bé­
Valette (Malte) : névoles à la fois comme partenaire d’in­
tervention et comme facteurs de critique
Le but de la présente Convention (révisée en construc­t ive des politiques du patrimoine
1995) est de protéger le patrimoine archéo­ culturel ;
logique en tant que source de la mémoire d. à prendre des mesures pour améliorer l’ac­
collective européenne et comme instrument cès au patrimoine, en particulier auprès
d’étude historique et scientifique. À cette fin, des jeunes et des personnes défavorisées,
sont considérés comme éléments du patri­ en vue de la sensibilisation à sa valeur, à la
moine archéologique tous les vestiges, biens et nécessité de l’entretenir et de le préserver,
autres traces de l’existence de l’humanité dans et aux bénéfices que l’on peut en tirer.
le passé.
Le même esprit d’inclusion se manifeste dans
Sont inclus dans le patrimoine archéo­logique le guide Archéologie préventive. Guide pour les
les structures, constructions, ensembles archi­ municipalités du Québec réalisé par Archéo-
tecturaux, sites aménagés, témoins mobi­liers, Québec en 2012. Ce guide permet à une muni­
monuments d’autre nature, ainsi que leur con­ cipalité de formuler un diagnostic qui vise à mi­
texte, qu’ils soient situés dans le sol ou sous les
nimiser les répercussions des excavations sur la
eaux. (Conseil de l’Europe 1995, article 1er)
ressource archéologique et d’appliquer une straté­
Plus récemment, avec la Convention de Faro gie qui lui servira de la conception d’un projet
sur la valeur du patrimoine culturel pour la société jusqu’à sa réalisation concrète (Archéo-Québec
(2005), le Conseil de l’Europe apporte une con­ 2012, 10). Pour sa part, la Loi sur le patrimoine
tribution originale aux questions du « vivre en­ culturel reprend les grandes lignes de la conven­
semble », de la qualité et du cadre de vie dans tion de Faro en développant une vision holistique
lequel les citoyens veulent prospérer. Elle recon­ du patrimoine culturel en fonction de l’ensemble
naît ainsi qu’il existe une responsabilité indivi­ de ses composantes, dont le patrimoine archéo­
duelle et collective envers ce patrimoine culturel logique et immatériel. Comme avec les énoncés
constitué d’ : de valeurs qui sont exposés dans les lignes di­
un ensemble de ressources héritées du passé rectrices adoptées par Parcs Canada 8 , le citoyen
que des personnes considèrent […] comme est invité à participer au débat et l’État est encou­
un  reflet et une expression de leurs valeurs, ragé à être plus transparent dans sa démarche de
croyances, savoirs et traditions en continuelle reconnais­sance du patrimoine culturel. À la lu­
évolution. Cela inclut tous les aspects de l’en­ mière des contextes qui ont été exposés à partir
vironnement résultant de l’interaction dans le des interven­tions archéologiques de 2013 et 2014,
temps entre les personnes et les lieux. (Conseil la table paraît ainsi déjà mise pour que le citoyen,
de l’Europe 2005, article 1er). la municipalité, l’État, le promoteur et l’archéo­
logue collaborent encore davantage à l’améliora­
L’article 12 de la Convention de Faro va encore tion de la qualité de vie des gens dans une per­
plus loin en énonçant comment se concrétisent spective de développement durable.
l’accès au patrimoine culturel et la participation
démocratique :
L’approche préventive en archéologie :
Les Parties s’engagent : des retombées limitées
a. à encourager chacun à participer :
– au processus d’identification, d’étude, L’approche préventive s’applique dans une per­
d’interprétation, de protection, de con­ spective de développement durable où le pro­
servation et de présentation du patri­ moteur paie pour protéger le patrimoine archéo­
moine culturel ; logique et son intégration fait partie de la planifi­
– à la réflexion et au débat publics sur les cation du projet. Dans un tel cadre, le rôle de
chances et les enjeux que le patrimoine
l’archéologue consiste à réaliser une intervention
culturel représente ;
archéologique préalablement et, en dernier re­
Archéologiques, no 29  85

cours, durant les travaux. L’approche préventive – les modes de transmission des résultats de la
est fort louable en principe. Toutefois dans la recherche et l’analyse des retombées qui en
pratique, elle n’atteint pas souvent son objectif découlent.
premier d’intégration au projet du promoteur ;
l’archéologue a rarement l’occasion de faire valoir Cette approche qui inclut des mécanismes en
l’importance du patrimoine archéologique mena­ amont et en aval d’un projet permettrait ainsi
cé, de proposer une série d’actions pour consigner d’obtenir des résultats concrets là où cela s’impose
efficacement les données recueillies dans un délai et de réévaluer périodiquement le tout. Bref l’ap­
raisonnable et d’influencer les décisions s’il s’avé­ proche verticale actuelle liée au développement
rait que le patrimoine archéologique se révélait et à l’aménagement du territoire, qui impose des
d’intérêt. Dans les faits, entre les dispositions conditions à l’archéologue, ne lui permet pas de
légales et leur application, de nombreux facteurs jouer pleinement son rôle et de faire une contribu­
interviennent et font en sorte que l’approche tion marquante.
préventive ne soit pas réellement performante :
des intervenants (promoteurs, architectes, ingé­ L’archéologie citoyenne :
nieurs, entrepreneurs, autorités municipales, le des retombées prometteuses
responsable de chantier, etc.), des éléments de
conformité (Loi sur la qualité de l’environnement, À l’opposé d’une approche préventive où, somme
Loi sur le patrimoine culturel, règlements munici­ toute, l’archéologie joue un rôle mineur dû aux
paux, contrats entre les divers intervenants, con­ nombreux facteurs qui limitent son action, une
ditions de chantier, etc.) et des inconnues sur le approche citoyenne conçue pour améliorer la qua­
plan archéologique. Les connaissances sur le patri­ lité de vie des gens présente l’avantage de retom­
moine archéologique susceptible d’être tou­ché par bées concrètes à l’échelle locale. L’approche ci­
les travaux demeurent généralement très som­ toyenne en est une de concertation où différents
maires et les recommandations émises ne portent partenaires du milieu s’investissent pour découvrir
souvent que sur les interventions à faire plutôt que et mettre en valeur le patrimoine archéologique.
sur des mécanismes d’intégration, de conservation Cette approche n’est certes pas nouvelle, mais elle
ou d’évitement du patrimoine ar­chéologique. Tout est de plus en plus populaire chez les archéologues
cela fait en sorte que l’approche préventive préco­ qui veulent s’investir dans un milieu en particulier
nisée pour protéger le patrimoine archéologique et participer aux débats de société qui ont cours
soit assez peu performante. Cette situation n’est au sein de cette communauté. Bref, le rôle de
pas exclusive au Québec, elle se manifeste ailleurs l’archéologue est plus valorisant.
aussi. Comme il a déjà été mentionné, plusieurs ac­
Il en résulte des compromis au moment du tivités archéologiques sont réalisées dans un con­
chantier et des pertes plus ou moins importantes texte éducatif, touristique et même récréatif. Très
sur plusieurs plans : sur le plan archéologique à populaires actuellement, elles permettent d’initier
cause des conditions de travail sur le chantier, sur le public à l’archéologie à court terme. Tout en
le plan financier à cause des limites budgétaires étant assez superficielles, elles permettent aux
contractuelles et sur le plan social dans l’apport citoyens de prendre conscience de leur patri­moine
de connaissances que la recherche archéologique archéologique, de découvrir son potentiel, ce qui
devrait apporter à la communauté. Pour remédier a pour effet d’ouvrir sur des projets plus porteurs.
à cette situation, il faut mettre sur pied un système C’est du moins ce que l’archéologue souhaite offrir
de gestion qualitative de la protection du patri­ comme expertise à long terme. Les liens devraient
moine archéologique fondé sur trois aspects clés ensuite prendre la forme d’une étude de potentiel
dérivés de la réflexion de Vander Linden et Webley archéologique, suivie d’un inventaire de terrain.
(2012, 1-8) : Cette démarche permet à la collectivité locale de
– les processus de planification entourant les mieux appréhender ce qui est important de con­
projets des promoteurs et l’intégration des server et de mettre en valeur ce qui traduit le
interventions archéologiques au moment op­ mieux les intérêts de la collectivité en fonction des
portun, c’est à-dire en amont ; projets de développement et des aménagements
– l’emploi avisé des ressources professionnelles envisagés. La finalité de cette col­laboration réside
et techniques pour optimiser les résultats et dans l’intégration du patrimoine archéologique au
les retombées escomptées ; milieu de vie, ce qui permet d’apprécier un passé
86  Archéologie et développement durable au Québec ~ P. Desrosiers

qui est le leur et de cultiver un sentiment d’ap­ EN CONCLUSION : L’ARCHÉOLOGIE


partenance au sein de la com­munauté. COMME PRATIQUE SOCIALE
Déjà, le patrimoine archéologique tient une
place plus importante dans les lieux patrimoniaux Common factors in the fragmentation of the
et les lieux d’interprétation ou les musées, du scope of archaeology include the failure to pro­
moins dans le réflexe d’intégrer celui-ci comme vide for both the continuity of the profession in
human terms and to allow for the need to
un élément du patrimoine culturel, à conserver et
increase physical capacity in other areas, in­
à mettre en valeur. L’intégration la plus intéres­
cluding archiving, dissemination and the op­
sante se produit cependant lorsque l’archéologie
portunity for informed discourse and debate.
s’inscrit de la planification et dans l’élaboration (Cumberpatch & Roberts 2013, 29)
d’un projet qui permet au lieu de se démarquer. À
ce stade, la recherche archéologique ne se limite L’exercice a permis de constater que, malgré une
pas à une activité d’appoint (un réflexe), mais segmentation plus grande de la pratique archéo­
devient un élément contributif à l’histoire du lieu logique, il existe bel et bien des retombées ci­
et qui s’exprime dans l’exploration d’une facette toyennes. Sauf que, comme le rappelle Marcy
propre au lieu. Les chantiers écoles en sont les Rockman (2013, 3-5), en plus de ce côté pratique
exemples les plus éloquents. de l’archéologie, l’archéologue cherche aussi à faire
Le défi réside dans la valorisation de l’histoire une contribution plus marquante dans la société.
locale et de sa signification dans l’expérience hu­ Le défi reste grand.
maine en fonction d’une perspective double, syn­ À partir d’un bilan sur les interventions de
chronique et diachronique, c’est-à-dire qui permet terrain réalisées en 2013 et 2014, un cadre global
d’avoir un recul et de se resituer dans le présent. dans lequel se pratique l’archéologie actuellement
Pour ce faire, il n’est pas nécessaire de voir grand au Québec a été dégagé. Il en ressort que l’ar­
et d’avoir des sommes d’argent importantes. Les chéologue vit dans une période de transition ma­
éléments de cette histoire sont enfouis dans le site jeure où son rôle se transforme rapidement. Il ne
archéologique et il ne reste qu’à les découvrir. Il se définit plus strictement en fonction de sa con­
revient à l’archéologue de les trouver et de les tribution scientifique, il doit également mettre de
reconstituer, tout en faisant appel aux citoyens qui l’avant son engagement professionnel au sein de
veulent participer à cette recherche. Outre le bé­ la société. Certains diront qu’il appauvrit son rôle
néfice de donner un sens historique et culturel à en s’adaptant aux besoins de la société, d’autres y
un lieu donné, on construit par le fait même un reconnaîtront plutôt des opportunités. Le débat
environnement culturel lui-même composé d’un reste ouvert au sein de la communauté des archéo­
ensemble de lieux patrimoniaux, de lieux publics, logues.
de parcs, d’aires récréatives, en somme des lieux À ce titre, le présent auteur se rallie à la vision
d’espaces communs favorables aux échanges, au symbiotique avancée par Sophie Limoges à propos
vivre-ensemble et au partage de valeurs com­ de l’archéologie, du développement durable et de
munes. Le rôle des autorités locales et de l’État, la qualité de vie citoyenne :
n’est donc pas à négliger à cet égard.
L’archéologie durable et citoyenne passe évi­
Les choix que l’on fait aujourd’hui ne doivent
demment par l’expertise, la concertation et
pas être minimisés ; ils ont un impact évident sur
l’adoption de pratiques exemplaires dans le
la mémoire collective. Les approches préventive
traitement du patrimoine archéologique. Elle
et citoyenne sont évidemment complémentaires ; vise également à donner sa juste valeur à la
l’archéologue doit les embrasser comme un tout recherche afin de générer des connaissances
et espérer qu’elles puissent se rencontrer davan­ pour contribuer à l’économie du savoir.
tage et s’influencer mutuellement. (Limoges 2015, 21)

Le survol actuel montre bien que les actions


et les rôles de l’archéologue au Québec sont éten­
dus et que les contextes d’interventions sont de
plus en plus complexes. En cela, la réalité de la
pratique archéologique au Québec rejoint aussi
celle qui prévaut aussi dans le monde occidental.
Elle s’inscrit dans des préoccupations sociales qui
Archéologiques, no 29  87

font valoir l’importance de considérer ce patri­ générosité ; ils m’ont beaucoup inspiré et je leur en
moine culturel en fonction du développement du suis fort reconnaissant. Je dédie cet article à la
territoire. C’est du moins le réflexe que l’archéo­ brillante relève professionnelle issue des univer­
logue véhicule auprès des divers intervenants avec sités québécoises inquiète de son avenir.
lesquels il opère : les promoteurs publics et privés
et ses partenaires issus de divers milieux. Les Notes
intervenants, de plus en plus nombreux et issus
de plusieurs milieux économiques, culturels et 1. Pour en savoir plus, voir Plan Nord 2014.
sociaux, sont motivés par des enjeux qui vont bien 2. Source : MCC, via la loi sur l’accès à l’information.
au-delà de la protection du patrimoine archéo­ L’écart important entre les montants de 2013 et 2014 tient
du fait que les ententes peuvent s’étendre sur un an jusqu’à
logique, souvent bien secondaire à leurs yeux.
cinq ans.
L’archéologue est un nouveau venu dans la planifi­
3. Certains projets du fédéral ont été recensés dans le
cation des projets et ses préoccupations vis-à-vis bilan de 1993.
la protection de ce patrimoine sont en­core mal
4. Pendant 20 ans, rares ont été les interventions archéo­
comprises. Essentiellement, il doit faire valoir son logiques à Laval.
rôle en matière de développement durable en ex­ 5. En 2014, la surveillance prévaut dans presque la moitié
pliquant aux promoteurs les béné­fices entourant des projets (49 %).
la protection du patrimoine ar­chéologique et l’im­ 6. Le pourcentage est le même en 2014.
pact que sa destruction peut avoir à long terme. 7. Air et Fragments d’humanité ont été publiés respecti­
Sa motivation s’inscrit dans une nouvelle pratique vement en 2015 et 2016 ; les autres le seront sous peu.
qui fait lentement son chemin dans la société et 8. Un énoncé de valeur (qu’on appelle « énoncé d’impor­
qui a pour finalité une meilleure appropriation tance » dans le Réseau canadien des lieux patrimoniaux)
citoyenne du passé. Cette appropriation passe définit la valeur patrimoniale du lieu et énumère les élé­ments
nécessairement par une con­nexion plus concrète caractéristiques à conserver pour préserver cette valeur.
entre le citoyen et l’histoire de son milieu de vie. L’énoncé d’importance permet aux professionnels, aux plani­
ficateurs et au grand public de comprendre la reconnaissance
Pour ce faire, des traces du passé doivent être d’une collectivité et l’évaluation du lieu patrimonial (Parcs
perceptibles dans son quotidien, dans son envi­ Canada 2010, viii).
ronnement immédiat. Que ce soit par un lieu
d’interprétation ouvert au public, par des éléments
signalétiques, des sentiers de dé­couverte ou des
Ouvrages cités
applications adaptables à tous les types d’appareils, Archéo-Québec (le réseau de la diffusion de l’archéologie)
il existe une panoplie de moyens pour renseigner (2012) Archéologie préventive. Guide pratique à l’intention
les citoyens et leur faire découvrir ceux et celles des municipalités du Québec. Recherche et rédaction :
qui étaient là avant eux et qui ont construit la David Gagné, Bernard Hébert et Jean-Yves Pintal. 60 p. En
ligne :
société dans laquelle ils évo­luent aujourd’hui. Le
<http://www.archeoquebec.com/sites/default/files/
patrimoine archéologique est constitué d’une série archeologie_preventive._guide_pratique_a_lintention_
de signes tangibles du passé, déclencheurs de mé­ des_municipalites_du_quebec.pdf>.
moire et de rappels historiques. Toutefois, si aupa­ Conseil de l’Europe (2005) Convention de Faro sur la va­
ravant le dévelop­pement de l’archéologie québé­ leur du patrimoine culturel pour la société. Faro, Por­tugal.
coise reposait en grande partie sur l’État, il semble En ligne :
aujourd’hui s’être déplacé inéluctablement vers le <https://www.coe.int/t/dg4/cultureheritage/heritage/
citoyen et son milieu de vie. identities/default_FR.asp>.
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<http://www.coe.int/en/web/conventions/full-list/-/
Rédigé à la suite de mon départ du ministère de conventions/rms/090000168007bd31>.
la Culture et des Communications à l’été 2015, cet Cumberpatch, Chris & Howell M. Roberts (2013) “Life
article traduit chez moi un besoin impératif d’ex­ in the Archaeological Marketplace.” Dans Rockman &
poser concrètement – à partir de faits – la réalité Flatman 2013 : 23-43.
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Les institutions, les organismes et les personnes archéologique entre au musée. Presses de l’Université Laval,
que j’ai sollicités et côtoyés au cours de cet exercice Québec. 321 p.
ont démontré une grande ouverture et une belle
88  Archéologie et développement durable au Québec ~ P. Desrosiers

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<http://www.pc.gc.ca/fra/rech-srch/clic-click.aspx?/
cgi-bin/MsmGo.exe?grab_id=0&page_id=59655>.
Pierre Desrosiers
[email protected]

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