ANARUZ Training Manual PDF
ANARUZ Training Manual PDF
ANARUZ Training Manual PDF
Nabila Hamza
Expert en genre
Décembre 2006
Avant-propos. 6
Présentation du Manuel. 8
Organisation du manuel. 10
Annexes. 97
BIBLIOGRAPHIE 110
Si les violences dont sont l’objet les femmes ne constituent pas un fait social nouveau, l’intérêt
accordé à cette question est un fait qui marque surtout notre époque et plus particulièrement les
deux dernières décennies. Jamais on aura autant parlé de violence basée sur le genre, jamais
autant on aura tenté d’en cerner l’ampleur et les formes et on aura été invité à la dépister et à la
combattre.
L’action sur le terrain des organisations de femmes dans le monde a fini par porter la question sur
le devant de la scène internationale. Dans leur lutte pour obtenir l’égalité et la reconnaissance de
leur droits dans de nombreux domaines, les femmes ont appelé l’attention sur le fait que la
violence à leur égard ne résulte pas de la « nature humaine » et de comportements individuels
répréhensibles, mais qu’elle est profondément enracinée dans les relations structurelles
d’inégalité entre hommes et femmes, fondée par le patriarcat. Jusqu’alors, on hésitait à en parler
ou à intervenir sous prétexte qu’il s’agissait d’une histoire privée.
Aujourd’hui la question de la violence à l’égard des femmes a commencé à figurer parmi les
préoccupations internationales et les gouvernements sont invités à mettre au point des stratégies
et des plans d’action pour y remédier.
Au même moment, on assiste à une multiplication des initiatives dans différents domaines, pour
prévenir et éliminer la violence à l’égard des femmes et venir en aide aux femmes qui en sont
victimes.
La lutte contre la violence à l’égard des femmes demande en effet une réponse holistique,
indivisible et multisectorielle. L’intervention de nombreux acteurs travaillant de concert au
niveau communautaire est nécessaire pour en venir à bout. Les professionnels de l’éducation, de
la santé et les associations de femmes ont une responsabilité particulière dans ce domaine. A
chaque niveau, les mesures prises doivent viser notamment à rendre les femmes plus autonomes,
à sensibiliser les hommes aux problèmes, à durcir les sanctions pour les agresseurs et à répondre
aux besoins des victimes.
Dans ce dernier domaine, la fonction des intervenants sociaux est aujourd’hui mise à rude
épreuve. La précarité des situations sociales des victimes, la faiblesse des structures d’accueil et
des réponses institutionnelles, les lacunes des dispositifs législatifs, le manque de moyens et de
formation pédagogique des personnes chargées d’aider et d’accompagner les femmes victimes de
violence, tous ces éléments rassemblés, tendent à décourager la demande d’aide et à rendre plus
laborieuse la réponse professionnelle. Il devient alors difficile d’écouter, de comprendre, de
reconnaître et d’accompagner le cheminement de la demande, afin d’établir une relation d’aide
qui ait du sens pour l’usager et pour l’assistant de service social.
A la fois guide méthodologique et analyse des pratiques, le présent manuel se veut un outil de
formation utile aux professionnels de l’écoute. Il montre comment dans le processus d’aide aux
Il vise plus particulièrement à aider les conseillères/écoutantes des centres d’écoute des femmes
victimes de violence relevant du réseau ANARUZ, à améliorer leur connaissance des dimensions
de genre du phénomène de la violence, à rendre plus efficaces leurs interventions et à mieux
collecter, traiter et diffuser les données sur ce problème, pour pouvoir influencer de manière
efficace une masse critique de personnes, chargées d’apporter les changements et les réponses
appropriées aux défis que pose ce phénomène.
Le présent manuel de formation a été confectionné à la demande du Réseau National des Centres
d’Ecoute des victimes de Violence (ANARUZ) 1 au Maroc. Il s’inscrit dans la continuité de la
réflexion et des actions menées depuis quelques années déjà, par les militantes et les
professionnels de ce réseau, pour détecter, accueillir et accompagner les femmes victimes de
violence et pour professionnaliser les approches et les réponses à ce problème.
Il est le produit d’un processus interactif et enrichissant menée avec les professionnels de terrain
et les représentantes des associations fondatrices et membres du réseau et notamment ceux de
l’Association démocratique des Femmes du Maroc (ADFM). Ce faisant, il entend apporter une
information et une pédagogie centrée sur les femmes victimes de violence, sans trop s’attarder sur
les pratiques déjà bien connues de l’intervention auprès des familles et des agresseurs.
Ce manuel a été élaboré en se basant sur les informations qualitatives et quantitatives générées
par l’analyse socio-psychologique et médicale du phénomène de la violence fondée sur le genre,
dans diverses régions du monde. Il cristallise par ailleurs une expérience collective acquise par
nombre d’intervenants dans l’application des concepts et des bonnes pratiques en matière
d’intervention auprès des femmes victimes de violence. Il puise enfin, dans les enseignements
spécifiques générés par la réflexion et les expériences pratiques menées par le Réseau ANARUZ
dans différentes villes du Maroc2 .
Ce faisant, il relie deux sommes d’expérience : celle d’une part, de chercheur(e)s renommé(e)s
dans le domaine de la violence de genre, dont les idées et les approches éclairent notre travail ;
d’autre part, celle des intervenants sociaux, placés en première ligne d’aide d’urgence aux
victimes, qui doivent utiliser ces approches au quotidien, pour obtenir des résultats.
C’est donc une synthèse de cette expérience collective et des meilleures pratiques en matière
d’accueil, d’orientation et d’accompagnement des femmes victimes de violence, que nous vous
proposons dans ce manuel.
Ce manuel s’adresse principalement aux écoutantes bénévoles ou en fonction, des centres pour
femmes victimes de violence. Cependant, nombre d’intervenants sociaux pourront y acquérir
certains principes méthodologiques et y trouver quelques éléments de formation.
1
Crée en Avril 2004, le Réseau National des Centres d’Ecoute des victimes de Violence (ANARUZ) regroupe
plusieurs associations et plus de 40 centres d’écoute, répartis sur l’ensemble du territoire marocain. Il a pour mission
de contribuer au renforcement des capacités des associations marocaines, dans les domaines de la défense des droits
des femmes et de la lutte contre les violences à leur égard.
2
L’atelier stratégique, organisé par le réseau Anaruz, à Tétouan en Juin 2006 et regroupant un grand nombre
d’associations et de responsables de centres d’écoute des femmes victimes de violence, nous a été à cet égard, d’un
très grand apport et d’une grande utilité.
? Renforcer les savoirs et les compétences des professionnels de l’écoute, en matière d’aide
et d’accompagnement des victimes.
? De les doter des principes, des outils et des techniques nécessaires à la conduction d’une
relation d’aide.
Mie ux appréhender les mécanismes de la violence et leur action sur les victimes.
S’appuyer sur des éléments d’analyse pour mieux adapter leur intervention.
Trouver un rappel des démarches que doivent effectuer les victimes et des aspects
juridiques et médico-légaux les plus fréquemment évoqués dans ces situations.
Il devrait permettre aux femmes, car ce sont elles qui subissent majoritairement ces agissements,
de :
trouver auprès des écoutantes, l’accueil, le soutien et l’information qui leur sont
nécessaires ;
Les aides à constituer les éléments de preuve des infractions subies pour qu’elles puissent
mieux défendre leurs droits.
3
Franck Rexand-Galais : Etudiants et professionnels du secteur social. L’entretien d’aide sociale. Techniques de
l’écoute et pratiques de l’entretien. Librairie Vuibert. Paris. 2002.
Organisation du manuel.
Le présent manuel de formation comprend une série de modules de formation, déclinés en autant
d’outils pédagogiques, présentés dans un mode d’apprentissage liné aire. Cependant, ces modules
pourront être utilisés séparément et de façon non séquentielle, en fonction des objectifs
pédagogiques qu’espère atteindre le formateur et du temps qui lui est imparti.
Comme dans tout manuel d’enseignement-apprentissage, ces modules de formation sont conçus
aussi bien pour le formateur que pour l’apprenant. L’approche retenue est celle de l’approche par
compétences, c’est à dire que chaque module aura pour objectif précis l’acquisition d’une ou
plusieurs compétences jugées nécessaires à l’exercice de l’activité envisagée.
Chaque chapitre présente des problèmes clés auxquels les écoutantes sont aujourd’hui
confrontées, des conseils sur la mise en œuvre des pratiques d’aide, d’orientation et d’écoute, des
questions de réflexion, et des exemples concrets qui illustrent le rôle de l’aidant dans l’aide aux
victimes.
Le manuel comprend également des notes destinés au facilitateur, en vue de lui rappeler les
objectifs de la formation, les résultats précis attendus par chaque session, ainsi que la
méthodologie et les supports didactiques à utiliser.
(a) Session I : Cette session d’une journée, traite des causes et de l’ampleur du phénomène de la
violence fondée sur le genre, des différentes formes que celle-ci peut revêtir ainsi que des
conséquences et du coût qu’elle peut entraîner, sur les plans médical, psychologique et social.
Elle a donc principalement un objectif de connaissance et de définition du phénomène ainsi
qu’une prise de conscience des défis posées par la violence fondée sur le genre.
(b) Session II : Cette session donne les grandes lignes d’un module de formation de deux jours
sur le thème du counseling et de la relation d’aide. Elle traite de la relation d’aide dans ces
aspects pratiques et théoriques. Elle a pour objectif la maîtrise des connaissances et des
techniques de communication et d’écoute par les participants, en vue de les préparer à
apporter une aide et un accompagnement adéquats aux femmes victimes de violence. Y sont
abordés les modèles théoriques, les attitudes et les processus du counseling et de la relation
d’aide.
(c) Session III : Cette dernière session, d’une journée, traite de l’accompagnement spécifique à
apporter aux femmes victimes de violences ainsi que des principes et des pratiques qui
guident la fourniture de services. Les aspects psychologiques, juridiques et médico-légaux en
jeu dans ces situations sont largement abordés, dans le souci d’apporter aux écoutantes une
Premier jour
Deuxième jour
9h30-10h L’aide aux femmes victimes de Expliquer quelles sont les attitudes et le
violence comportement professionnel que doit
adopter une écoutante, face aux femmes
victimes de violences.
Quatrième jour
Après s’être présenté, le facilitateur commencera par clarifier les objectifs et les attendus de
l’ensemble du la session de formation puis présentera les objectifs d’apprentissage de la journée,
qu’il aura préalablement pris le soin d’inscrire sur le tableau. Il demandera aux participants s’ils
ont des questions sur ce sujet.
Objectifs d’apprentissage.
? Présenter les différentes formes de violences exercées à l’encontre des femmes, leurs
coûts, causes et conséquences ainsi que l’ampleur du phénomène et les mythes et
stéréotypes relatifs à la violence sexiste.
? Informer les participants sur les sources, les lacunes et les problèmes de données et
d’informations sur la violence à l’égard des femmes.
? Familiariser les participants aux instruments internationaux mis en place pour éliminer la
violence à l’égard des femmes.
1.1.2 Les participants sont invités à partager leurs attentes et leurs craintes éventuelles de
la session.
? Chaque participant est invité à écrire, sur deux cartons séparés, respectivement ses
craintes et ses attentes de ce workshop.
? Les participants colleront les deux cartons sur le tableau et un membre du groupe sera
appelé à les lire et les faire partager, à haute voix
? Une discussion générale s’en suivra sur les attentes et les craintes communes, amenant le
facilitateur à réagir pour clarifier davantage les objectifs et dissiper les craintes.
Exercice brise-glace
Notes au Dans la plupart des cultures, les noms des femmes sont différents de ceux
facilitateur des hommes. Le choix des noms n’est pas anodin, il est même parfois très
significatifs. Certains noms de femmes se réfèrent à la situation de la mère
au moment de la naissance de l’enfant, d’autres noms se réfèrent aux rôles
féminins dans la société, ou à leur relation à leurs enfants. D’autres encore
rappellent les attributs que la société donne aux hommes et aux femmes.
La discussion doit mettre l’accent sur le fait que les noms ont une
dimension de genre et que leur signification reflète souvent les attributs et
les rôles socialement acceptables. Par exemple, les noms de femmes font
souvent référence à des qualités comme « la délicatesse », « la pureté » ou à
des noms de fleurs, alors que ceux des hommes font souvent référence à « la
bravoure », « la force », « la justice » etc…C’est le moment aussi de
s’interroger sur les lieux et les formes de socialisation mis en marche, dès
notre naissance .
Règles de conduite.
Exercice 1.2 Etablir des règles de conduite pour les participants à la session.
Durée : 20 mn
Objectifs Arriver d’un commun accord à fixer des règles de conduite et de
fonctionnement pour le déroulement de l’atelier.
Matériels Flipchart, stylos gras
Méthode 1. Expliquer aux participants le besoin d’avoir un ensemble de règles de
conduite pendant le déroulement de la session
2. Demander au groupe de faire des propositions de règles qui doivent être
respectées par l’ensemble des participants.
3. Ecrire les règles qui ont été retenues par le groupe sur le tableau et les
garder bien en vue tout le long de la session.
Notes au Quelques exemples de règles de conduite :
facilitateur Commencer à l’heure, terminer à l’heure,
Ne pas fumer pendant la session de formation.
Ne pas interrompre les autres lorsqu’ils parlent,
Ne pas accaparer la parole,
Montrer du respect pour l’opinion et l’expérience des autres, etc..
Ne pas juger autrui,
Eteindre son téléphone portable, etc
Sexe : se réfère aux différences biologiques qui existent entre les femmes et les hommes
et à la différence corrélative entre leurs fonctions procréatives. Il décrit les
caractéristiques biologiques immuables et universelles des femmes et des hommes. Pour
les femmes, la grossesse et l’allaitement sont les seules activités déterminées par leur
appartenance biologique au sexe féminin.
En analysant l’oppression des femmes, en termes de rapports sociaux de sexe, la théorie du genre
souligne le caractère social des catégories sexuelles, en les distinguant des hommes et des
femmes biologiques. Ce faisant, elle réfute les thèses naturalistes, qui faisait du sexe biologique,
le principe explicatif de l’oppression des femmes. Car, jusqu’aux années soixante, l’alibi de la
« nature » pour maintenir, perpétrer et expliquer la domination masculine des inégalités entre les
sexes dans la société, était encore largement privilégié par les sciences humaines et la pensée
scientifique, de manière générale.
? Le Genre, c’est donc l’identité (sociale) que la société, dans un contexte socio -culturel,
religieux et économique donné, confère aux hommes et aux femmes. L’identité « Genre »
détermine largement les relations entre les femmes et les hommes, dans la sphère privée
(famille) comme dans la sphère publique (exp. au travail).
? Elles s’entrecoupent avec d’autres facteurs , signifiant que tous les hommes et toutes les
femmes ne sont pas les mêmes.
Les facteurs qui affectent l’identité « genrée » des femmes et des hommes dans un contexte
donné, sont:
? L’âge
? La classe sociale
? Le milieu géographique
? La religion
? La race
? L’ethnie
? L’époque etc..
Une analyse sensible au genre permet d’intégrer la prise en compte des dynamiques de
changements sociaux dans une situation donnée et le suivi ultérieur de leur évolution, notamment
au regard de la réduction ou de l’aggravation des disparités entre hommes et femmes.
Cadre comparatif.
Sexe Genre
Etre homme Etre femme
Innées Acquises.
Les affirmations .
Notes au Cette activité doit être développée avec des participants, qui n’ont pas ou ont
facilitateur peu de connaissances sur le concept de genre.
Adaptation : Une autre façon de faire est d’écouter le facilitateur lire les
affirmations une à une et écrire sur une feuille de papier, la lettre « G » pour
ceux qui pensent qu’elle se réfère au genre et la lettre « S », pour ceux qui
pensent qu’elle se réfère au sexe. Le facilitateur distribue alors le texte relatif au
jeu des affirmations et lit les réponses aux participants et ouvre la discussion.
Exercice 1.4 « Les femmes doivent…..Les femmes ne doivent pas… ; Les hommes
doivent….Les hommes ne doivent pas ».
« Le propre de la femme, c’est de …Le propre de l’homme c’est de…….. »
Durée : 20 mn
Objectifs Faire prendre conscience aux participants des rôles et attributs féminins et masculins
qui sont assignés socialement à chacun des deux sexes.
Matériels Flipchart, stylos
Méthode 1) Placer 4 grandes feuilles de papier sur le sol et donner leur chacun un
titre : a) Les femmes doivent ; b) Les femmes ne doivent pas ; c) Les
L’emploi des expressions « violence à l’égard des femmes » et de « violence basée sur le genre »,
est par moment objet de débat, notamment dans le mouvement féministe. Certains estiment en
effet, qu’il convient mieux d’utiliser l’expression de VBG pour mieux souligner les origines
patriarcales et les soubassements socio-culturels de la violence exercée à l’encontre des femmes, alors que
pour d’autres, le terme de genre pose problème dans la mesure où il laisse planer une certaine ambiguïté et
escamote le fait que les femmes sont les principales cibles de la violence. De manière générale, le présent
manuel ne prend pas position sur le sujet et utilise de manière indifférenciée l’une ou l’autre des deux
expressions. La raison en est simple :
Reconnaître que la violence à l’égard des femmes constitue une forme de discrimination et par conséquent
un problème de genre, constitue un point d’entrée essentiel pour appréhender le vaste contexte dans lequel
s’excerce cette violence et les facteurs qui en sont à l’origine.
Définir la notion de violence n’est pas aisée, car elle est complexe et peut être abordée de différents points
de vue. Des approches disciplinaires diverses peuvent lui être appliquées. Certains modèles d’explication
de la violence renvoient au biologique, d’autres au psychique ou encore aux inégalités socio-
économiques. De même, les causes de la violence à l’égard des femmes ont été étudiées sous diverses
perspectives, notamment le féminisme, la criminologie, le développement, les droits de l’homme, la santé
publique et la sociologie.
La Déclaration des Nations Unies sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes (1993), définit la
violence à l’égard des femmes comme : “ tous actes de violence dirigés contre le sexe féminin, et causant
ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y
compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie
publique ou dans la vie privé”. La même déclaration signale que la violence à l’égard des femmes traduit
« des rapports de force historiquement inégaux entre hommes et femmes, lesquels ont abouti à la
domination et à la discrimination exercées par les premiers et freiné la promotion des secondes ».
Les nombreuses formes et manifestations de la violence ainsi que la diversité des expériences vécues par
les femmes de par le monde révèlent le lien existant entre le patriarcat et les autres relations de domination
et de subordination des femmes dans des divers contextes. Historiquement, les rôles sexospécifiques –
rôles respectifs que les sociétés assignent aux femmes et aux hommes – ont été hiérarchisés, les hommes
exerçant le pouvoir ainsi qu’une emprise sur les femmes. Plusieurs moyens, communs à de nombreux
contextes, sont utilisés pour perpétuer la domination des hommes et la subordination des femmes. Parmi
La violence à l’égard des femmes est donc avant tout un problème structurel et ne peut pas être attribuée
aux seuls facteurs liés aux comportements individuels et aux histoires personnelles, comme l’alcoolisme
ou un passé exposé à la violence. Toute tentative d’élucidation des facteurs liés à la VBG doit s’inscrire
dans le contexte plus large des relations de pouvoir.
Par violence de genre, nous entendons donc la violence fondée sur la discrimination sexuelle, celle qui
est exercée à l’égard des femmes et qui est engendrée par le fait même d’être une femme.
Les violences commises à l’encontre des femmes traduisent en actes, l’autorisation sous-jacente de notre
société, à dominer, asservir, contrôler la vie et le corps des femmes, quel que soit leur âge. C’est la
subordination des femmes au pouvoir masculin, autrement dit les relations inégales de genre, qui sont à
l’origine de la variété de sévices que subissent les femmes. Il y a sous -jacents aux comportements de
violence sexiste, des rapports de force et de domination des hommes sur les femmes, des garçons sur les
filles, parfois directs, d’autres fois plus subtiles, beaucoup plus souvent admis par le passé que de nos
jours. Qui d’entre nous n’a entendu une fois dans sa vie reprendre ce proverbe qui dit : « Bats ta femme
tous les jours, si tu ne sais pas pourquoi, elle, elle le sait » ?
Dans cette perspective, il y a lieu de distinguer les violences de genre des autres formes de brutalité,
d’agressivité, de menaces ou de contraintes qui s’exercent dans toute société humaine. De même qu’il est
important de signaler que la violence de genre ne se limite pas à la seule violence conjugale. Certes, la
violence conjugale est une des formes les plus cruelles et les plus répandues de violence de genre, mais
elle ne saurait en aucun cas s’y limiter.
La violence de genre ne se limite pas à un pays, une région ou une culture en particulier. Elle est présente
dans tous les pays, dans toutes les couches sociales, les groupes ethniques ou culturels. Toutefois, les
études menées sur le sujet montrent que de nombreux facteurs, notamment le statut économique, la race,
l’origine ethnique, la classe sociale, l’âge, l’orientation sexuelle, la nationalité, la religion et la culture,
façonnent les différentes manifestations de cette violence et les expériences personnelles des femmes qui
en sont victimes. « Le patriarcat…fonctionne différemment selon le contexte culturel, géographique et
politique. Il s’imbrique dans d’autres systèmes de subordination et d’exclusion. Les interactions entre de
multiples facteurs le façonnent, notamment les passés coloniaux et la domination postcoloniale, les
initiatives de construction nationale, les conflits armés, les déplacements des populations et les
migrations… L’analyse des inégalités fondées sur le sexe à l’origine de la violence doit donc tenir compte
des facteurs particuliers qui marginalisent les femmes dans un contexte donné. »4
La culture a une grande influence sur les manifestations de la VBG et sur les comportements, les
perceptions et les attitudes qu’ont les individus face à cette violence, partout dans le monde. C’est ainsi
que certaines normes et pratiques culturelles et religieuses sont souvent invoquées pour justifier la
violence dont sont victimes les femmes, notamment les croyances liées aux mutilations génitales
4
Etude approfondie de toutes les forme s de violence à l’égard des femmes. Assemblée générale des Nations-Unies.
Soixante et unième session. Rapport du Secrétaire général. Juillet 2006. p. 32
Mais ne l’oublions pas les femmes contribuent également à la formation de la culture et à la perpétuation
des croyances et pratiques traditionnelles dont elles sont victimes lorsqu’elles s’y conforment: elles
peuvent donc influencer et façonner positivement ou négativement les cultures qui les entourent. Elles ne
sont pas seule ment des victimes des traits négatifs des cultures qui entourent leurs existences, mais elles
profitent également des valeurs et pratiques culturelles positives qui les soutiennent au sein de leurs
communautés et favorisent leur autonomie et la défense de leurs droits.
? La violence physique : Cette forme de violence est la plus visible: coups, blessures, fractures, etc.
? La violence psychologique , sous une forme verbale ou non-verbale : dénigrement, humiliation,
attaques verbales, scènes de jalousie, menaces, contrôle des activités, tentatives d’isolement des
proches et des amis pouvant aller jusqu'à la séquestration etc.
? La violence sexuelle : relations sexuelles, complètes ou incomplètes, sans consentement et/ou
sous la contrainte.
? La violence sociale: juridique, culturelle, spatiale ou autres.
? La violence économique : privation de moyens ou de biens essentiels, contrôle ou spoliation,
parfois même lorsque la femme a une activité rémunérée.
Les formes de violence familiales communément recensés sont notamment : l’administration de coups et
d’autres formes de violence conjugale, y compris le viol conjugal ; la violence sexuelle ; les violences
5
Idem p.34
- violence conjugale
- Pratiques traditionnelles nuisibles
On parle de violence psychologique lorsqu’une personne adopte une série d’attitudes et de propos qui
visent à dénigrer et à nier la façon d’être d’une autre personne. Ces paroles ou ces gestes ont pour but de
déstabiliser ou de blesser l’autre. Dans des moments de colère, nous pouvons tous tenir des propos
blessants, méprisants, ou avoir des gestes déplacés, mais habituellement ces dérapages sont suivis de
regrets ou d’excuses. Par contre, dans la violence psychologique, il ne s’agit pas d’un dérapage ponctuel
mais d’une façon d’être en relation. C’est nier l’autre et le considérer comme un objet. Ces procédés sont
destinés à soumettre l’autre, à le contrôler et à garder le pouvoir.
Il s’agit d’une maltraitance très subtile ; très souvent, les victimes disent que la terreur commence par un
regard méprisant, une parole humiliante, une tonalité menaçante, pour se terminer par des agressions
physiques.
Violence physique et violence psychologique sont très souvent liées : aucun homme ne va battre sa femme
du jour au lendemain, sans raison apparente, dans une crise de folie momentanée. La majorité des
conjoints violents préparent d’abord le terrain en terrorisant leur compagne. Il n’existe pas de violence
physique, sans qu’il y ait auparavant de violence psychologique.
La difficulté à repérer les violences psychologiques vient de ce que la limite en est imprécise. C’est une
notion subjective : un même acte peut prendre des significations différentes suivant le contexte dans lequel
il s’insère et un même comportement sera perçu comme abusif par les uns et pas par les autres. Les
spécialistes ne disposent pas d’une définition consensuelle de la violence psychologique, car cette forme
de violence n’a été reconnue que récemment. De la même façon, s’il est possible d’évaluer les aspects
physiques de la violence, il est beaucoup plus difficile de mesurer ce que ressent une victime de violence
psychologique.
6
Etude approfondie de toutes les formes de violence à l’égard des femmes. Assemblée généra le des Nations-Unies.
p. 42
Le contrôle.
Le contrôle se situe d’abord dans le registre de la possession, c’est surveiller quelqu’un de façon
malveillante avec l’idée de le dominer et de le commander. On veut tout contrôler pour imposer la façon
dont les choses doivent être faites. Ce peut être le contrôle des heures de sommeil, des heures des repas,
des dépenses, des relations sociales et même des pensées (je veux savoir à quoi tu penses !). Ce peut être
empêcher la femme de progresser professionnellement ou de faire des études.
L’isolement.
Pour que la violence puisse se perpétuer, il faut isoler progressivement la femme de sa famille, de ses
ami(e)s, l’empêcher de travailler, d’avoir une vie sociale. En isolant sa femme, le conjoint fait en sorte que
sa vie soit uniquement tournée vers lui. Il fait en sorte qu’elle ne soit pas trop indépendante pour ne pas
qu’elle échappe à son contrôle. Ceci peut se traduire aussi par le fait de lui imposer sa famille et son
environnement social à lui, supprimer le téléphone portable ou l’ordinateur, comme on le ferait pour un
enfant, afin que la femme ne puisse plus téléphoner à sa famille, confisquer les papiers personnels
(chéquier, carte bancaire), empêcher la personne de conduire etc. L’isolement progressif aboutit à un
contrôle total de la personne, comme dans les sectes. Les femmes disent souvent se sentir prisonnières.
Après un temps, il peut se faire que ce soit la femme elle-même qui s’isole, pour avoir la paix, ne
supportant plus la pression que lui fait subir son conjoint. L’isolement est à la fois une cause et une
conséquence de la maltraitance.
La jalousie pathologique .
Suspicion constante, attribution d’intention non fondée, qui se traduisent par la surveillance des coups de
téléphone, l’emploi du temps, les relations avec la famille et les amis …
D’une façon générale, aucune explication rationnelle ne vient apaiser une jalousie pathologique car il
s’agit ni plus ni moins que d’un refus d’une réalité.
Le harcèlement.
En répétant à satiété un message à quelqu’un, on parvient à saturer ses capacités critiques et son jugement
et à lui faire accepter n’importe quoi. Ce sont par exemple, des discussions sans fin pour extorquer des
aveux, jusqu’à ce que la personne, épuisée, finisse par céder.
L’autre stratégie consiste à surveiller la personne, la suivre dans la rue, la harceler au téléphone. Cette
forme de violence se produit le plus souvent après une séparation.
Le dénigrement.
Il s’agit avant tout d’atteindre l’estime de soi de la personne, lui monter qu’elle ne vaut rien, qu’elle n’a
aucune valeur. La violence s’exprime sous forme d’attitudes dédaigneuses et de paroles blessantes, de
propos méprisants, de remarques déplaisantes.
7
Femmes sous emprise : les ressorts de la violence dans le couple. Marie-France Hirigoyen. Oh ! Editions. Paris.
2005
D’après une étude québécois, même si les femmes sont tout aussi capables de dénigrer leur conjoint, les
attaques sont différentes selon les sexes. Les hommes attaquent plus leur femme dans leur rôle de mère,
dans leurs capacités ménagères ou dans leurs qualités de séduction, ce qui correspond au stéréotype social
de la femme Les attaques des femmes touchent en bonne logique, aux stéréotypes masculins (rôle social et
sexualité de l’homme 8 .
Les humiliations.
Humilier, rabaisser, ridiculiser est le propre de la violence psychologique. L’autre n’étant qu’un exutoire à
la rage que l’on porte en soi, il n’a pas d’existence propre : on ne le respecte pas. Cracher à la figure, faire
des gestes obscènes, des grimaces quand la personne parle, proférer des insultes le plus souvent à teneur
sexuelle, fait naître un sentiment de honte et vise l’estime de soi de la personne qui finira par intégrer la
dépréciation et ne se sentira plus digne d’être aimée.
Claquer les portes, briser des objets pour manifester sa mauvaise humeur constituent des actes
d’intimidation. Quand une personne se défoule sur des objets, la partenaire peut l’interpréter comme une
forme de violence maîtrisée. Il s’agit tout de même bien d’une violence indirecte. Le message à faire
passer à l’autre est « regarde ce que je peux (te) faire ! »
La violence morale, c’est aussi le refus d’être concerné par l’autre. C’est se monter insensible et inattentif
envers sa partenaire ou afficher ostensiblement du rejet ou du mépris. C’est ignorer ses besoins, ses
sentiments, ou créer intentionnellement une situation de manque et de frustration pour maintenir l’autre en
insécurité. C’est refuser de lui parler, de sortir avec la partenaire, la bouder plusieurs jours de suite sans
raison apparente etc.
Les menaces.
La violence psychologique peut comporter des menaces : on menace d’enlever les enfants, de priver
d’argent, de frapper, de se suicider, si la femme n’agit pas dans le sens attendu. L’anticipation d’un coup
fait autant de mal pour le psychisme que le coup porté réellement, et cela est renforcé par l’incertitude
dans laquelle la personne est tenue sur la réalité de la menace. Quand on vit en couple, on a une
connaissance intime de l’autre, on connaît ses failles, on peut donc frapper de façon précise, là ou ça fait
mal. On peut profiter d’une confidence, d’un aveu, pour mieux détruire l’autre.
8
Idem, P. 40
La violence psychologique constitue donc un processus visant à établir ou maintenir une domination sur la
partenaire. La violence psychologique est déniée par l’agresseur, ainsi que par les témoins qui ne voient
rein, ce qui fait douter la victime de son ressenti. Rien ne vient faire la preuve de la réalité qu’elle subit.
C’est une violence « propre ».
Les menaces et les actes destinés à terroriser l’autre sont l’étape ultime avant l’agression physique. Mais à
ce stade on ne voit rien. Alors que, lorsqu’il y a violence physique, des éléments extérieurs (constats
médicaux, témoins oculaires, procès-verbaux de la police) viennent témoigner de la véracité de la
violence.
La violence physique inclut une large gamme de sévices qui peuvent aller d’une simple
bousculade à l’homicide : pincements, gifles, coups de poing, coups de pied, tentatives de
strangulation, morsures, brûlures, bras tordus, agression avec une arme blanche ou une arme à
feu…La séquestration n’est pas à exclure. « Frapper au ventre avec le plat de la main, tirer les
cheveux, bousculer, tordre les bras ne laisse pas de traces, et certains hommes le savent
pertinemment. Mais quand les violents se lâchent, on voit parfois arriver aux urgences des
hôpitaux, des femmes dans un état proche du boxeur après un match, avec l’arcade sourcilière
défoncée, des fractures du nez ou des perforations du tympan »9 .
Beaucoup de coups visent le ventre lorsque la femme est enceinte, comme s’il fallait porter
atteinte à sa capacité de reproduction, comme l’atteste l’étude de l’Organisation Mondiale de la
Santé (OMS) menée dans une dizaine de pays du monde10 . Par les coups, il s’agit de marquer le
corps de la femme et marquer l’emprise que l’on a sur elle. La violence physique peut aussi
s’exprimer indirectement en malmenant un enfant d’un autre lit, son propre enfant ou un animal
familier. Toutes les études montrent que les femmes qui subissent de la violence, qu’elle soit
physique ou psychologique, ont un état de santé nettement moins bon que les autres femmes et
qu’elles consomment beaucoup plus de médicaments, en particulier des psychotropes. Nous
voyons bien qu’un lien se fait là avec la violence psychologique. Le geste violent que l’on
anticipe, mais qui ne vient pas a un effet tout aussi destructeur que le vrai coup porté.
C’est souvent quand les femmes ont pris la décision de partir que leur compagnon est le plus
violent physiquement. Les femmes le savent et c’est pour cela qu’elles craignent d’aggraver les
9
Cette partie du manuel est inspirée du livre de Marie -France, Hirigoyen : Femmes sous emprises, les ressorts de la
violence dans le couple. Oh ! Editions. 2005. Paris. P 53.
10
Rapport mondial sur la violence et la santé. OMS. Genève.2002
C’est pour cela que les femmes ont besoin d’être accompagnées et soutenues, afin de démêler ce
qui est chantage et ce qui est à prendre au sérieux. C’est un véritable plan de sécurité qu’il faudra
parfois mettre en place, pour les aider à y voir clair. Nous en reparlerons ultérieurement.
C’est la forme de violence dont les femmes ont le plus de mal à parler et pourtant elle est très
souvent présente. La violence sexuelle comprend un spectre très large, allant du harcèlement
sexuel à l’exploitation sexuelle, en passant par le viol conjugal. Ce peut être obliger quelqu’un à
des activités sexuelles dangereuses ou dégradantes, mais le plus souvent il s’agit d’obliger une
personne à une relatio n sexuelle non désirée, sous la menace. Les violences sexuelles peuvent
être à l’origine de traumatismes pelviens, de grossesses non désirées ou de maladies sexuellement
transmissibles.
Dans une étude récente 11 portant sur 148 femmes victimes de violence dans leur couple, ayant
fait l’objet d’une décision de justice, 68% des victimes interrogées rapportaient avoir subi, en
plus des coups et blessures, des violences sexuelles conjugales, et les femmes agressées
sexuellement présentaient significativement plus de symptômes psychologiques post-
traumatiques que celles qui n’avaient subi qu’une violence physique, sans composante sexuelle.
Le viol conjugal est le plus souvent passé sous silence, parce qu’il est considéré comme faisant
partie du « devoir conjugal » de la femme envers son époux. Beaucoup de femmes acceptent des
rapports sexuels non désirées, simplement pour que leur partenaire cesse de les harceler.
Toute violence sexuelle constitue un traumatisme majeur. Les personnes qui subissent une
violence sexuelle vivent souvent avec le sentiment qu’elles sont méprisables et qu’aucun
partenaire ne voudra d’elles.
Le cas le plus classique est la dépendance économique de la femme victime de violence, qui ne
travaille pas et qui n’a pas de revenus propres. La crainte des difficultés économiques empêche
cette femme de quitter un conjoint d’autant plus violent qu’il sait que sa marge de liberté est
11
McFarlane J.: Intimate partner sexual assault against woman. Frequency, health consequences and treatment
outcomes” Obstetrics and Gynecology, 2005
Pour s’assurer de garder le pouvoir financier, l’homme peut commencer par vérifier
systématiquement les comptes de son épouse, refuser de donner suffisamment d’argent ou bien
en donner au compte-goutte, tout cela accompagné de remarques culpabilisantes. Cela peut aller
jusqu’à la confiscation du salaire pour une femme qui travaille. On est parfois étonné qu’une
femme qui travaille ne puisse pas disposer de son salaire ou avoir accès à son compte. L’homme
estime normal de gérer non seulement son propre argent, mais aussi celui que gagne sa compagne
et parfois même les revenus de son héritage. Cette dépendance peut exister, quel que soit le
niveau de revenus du ménage, et il arrive que l’homme justifie cette pression économique qu’il
fait subir à sa femme au quotidien par son souci «d’assurer une bonne gestion des revenus du
ménage », tout en l’accusant d’être dépensière et d’être par conséquent incapable de gérer son
propre salaire.
L’homme peut aussi faire pression pour amener sa femme à cesser toute activité professionnelle
ou ses études, en culpabilisant la femme et en mettant en avant le fait que les enfants sont
négligés, que les repas sont mal faits, la maison mal entretenue, ou encore que ce second salaire
ne rapporte pas grand chose et qu’il ne sert à rien, etc. Plusieurs études ont d’ailleurs montré que
les femmes qui travaillent, même lorsqu’elles ne sont pas quotidiennement harcelées par leur
époux, éprouvent un fort sentiment de culpabilité envers leur conjoint et leurs enfants, surtout
lorsque ces derniers sont en bas âge.
Dans les couples où la femme gagne autant ou plus que son compagnon, les problèmes sont d’un
autre ordre. Celui-ci peut être amené à dévaloriser la position enviable de sa compagne, à la
culpabiliser de vouloir faire carrière « au détriment de sa vie familiale » et à la pousser à renoncer
ou à reléguer en seconde position sa vie professionnelle, pour mieux valoriser la sienne.
Le vrai obstacle au départ des femmes victimes de violence, n’est donc pas toujours la
dépendance économique et matérielle, mais aussi et peut-être surtout la dépendance
psychologique.
Certaines formes de violence exercée à l’encontre des femmes et des petites filles, relèvent de plusieurs
types de violence et impliquent plusieurs niveaux à la fois, familiale, communautaire et étatique. C’est le
cas par exemple, de certaines pratiques traditionnelles nuisibles, comme les mutilations génitales,
l’infanticide des filles et le choix du sexe de l’enfant avant la naissance, les mariages précoces, les crimes
dits « d’honneur » commis contre les femmes et l’esclavage sexuel.
Les violences conjugales sont une des causes principales de la mortalité des femmes. D’après le
Ministère de l’Intérieur, en France, trois femmes meurent du fait de violences conjugales tous les
Le meurtre du conjoint constitue un acte de domination extrême, qui survient souvent sur un fond
de violences répétées et de jalousie. Bien sûr, la prise d’alcool ou de drogue peut jouer un rôle en
levant les inhibitions et en libérant les pulsions agressives, mais il s’agit, au départ, de la négation
de l’autre et de sa valeur.
Dans plusieurs pays, dont les Etats-Unis et l’Espagne, des mesures ont été prises pour protéger
les femmes en période de séparation de ce type de conséquences.
Parmi elles nous situons notamment, la violence juridique, la traite des femmes et l’utilisation de l’image
de la femme à des fins commerciales (pornographie, publicité,…)
La violence juridique.
L’Etat peut également perpétrer des violences à l’égard des femmes par la négation de leurs droits et la
promulgation de lois et de mesures qui limitent leurs rôles dans la famille et dans la société. C’est le cas
par exemple, de nombreuses législations dont les codes de la famille, actuellement en vigueur dans
nombre de pays arabes et musulmans , qui ne reconnaissent pas la pleine citoyenneté des femmes et
légalisent le contrôle exercé sur elles par les hommes (polygamie, mariage forcé, privation de garde etc..).
Les Etats peuvent également tolérer la violence à l’égard des femmes par la promulgation de lois
inappropriées ou l’application inefficace de la législation, assurant dans la réalité l’impunité aux auteurs
de violences à l’égard des femmes (viols, crime d’honneur etc).
12
Campbell J.C. Assessing dangerousness, Sage Publications, 1995. ( rapporté par Marie-France Hirigoyen, oeuvre
citée précedemment)
Au Maroc, malgré les avancées réalisées en matière de promotion des droits des femmes, notamment par
la promulgation du Code de la Famille, du Code du Travail et par la révision partielle de la législation
pénale, les plaintes reçues par les centres d’écoute relevant du réseau Anaruz révèlent que les nouvelles
dispositions ne sont pas toujours appliquées en concordance avec l’esprit et le texte de ces nouvelles lois
et plus particulièrement en ce qui concerne le code de la famille.
Durant les conflits armés, les femmes subissent toutes formes de violence physique, sexuelle et
psychologiques de la part des belligérants. Ces violences sont notamment, les enlèvements, le viol,
l’esclavage sexuel, le meurtre, les exécutions illégales, la torture, les détentions arbitraires, le viol de leurs
enfants. Ces traitements cruels, inhumains et dégradants ont été signalés dans des situations de conflits ou
d’après conflits dans nombre de régions et pays au monde, notamment en Afghanistan, au Burundi, au
Rwanda, en Colombie , en Tchétchénie, au Darfour etc.
La traite constitue une forme de violence à l’égard des femmes qui prend de l’ampleur et touche plusieurs
pays. Celle -ci a supplanté la prostitution «classique » dans la plupart des métropoles du monde. De
nombreuses sources semblent indiquer que des centaines de milliers de femmes sont, chaque année,
victimes de la traite au niveau mondial, mais peu de cas sont portés à l’attention des autorités. Par
exemple, en 2005, 506 victimes ont été recensés au Portugal, 412 au Mexique et 243 en Turquie. Le
nombre de trafiquants poursuivis et condamnés est également très faible. Les pays d’Europe occidentales,
d’Asie et d’Amérique du Nord sont les destinations les plus couramment signalées. Elles seraient plus de
300 000, venues des républiques de l’Est, à se prostituer dans les pays de l’Union européenne, sans
compter les bataillons fournis qui débarquent d’Afrique du Nord et d’Afrique sub-saharienne. Elles sont
pour leur quasi-totalité sous la coupe de mafias ultra-violentes, déterminées à faire du chiffre à n’importe
quel prix. Selon le Protocole additionnel à la Convention des Nations-Unies contre la criminalité
transnationale organisée, visant à prévenir et à punir la traite des personnes, en particulier des femmes et
des enfants, « la traite aux fins d’exploitation comprend au minimum, l’exploitation sexuelle, le travail ou
les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement
d’organes »14.
Cette forme de violence à l’égard des femmes, est extrêmement sournoise, car l’opinion publique n’est pas
unanime quant à l’atteinte qu’elle porte à la dignité de la femme.
L’utilisation de l’image de la femme à des fins commerciales se retrouve sous des formes diverses telles
que, par exemple, les journaux et revues spécialisées, les cassettes vidéo, les sites Internet, qu’on pourrait
13
Le code est une violence. Rapport Alternatif du collectif Maghreb - Egalité sur la Réforme du Code de la Famille algérien
14
Résolution de l’Assemblée Générale 55/25 du 8 Janvier 2001, Article 3.
Ceci nous amène au problème de l’impact de la pornographie et de sa relation avec la violence sexuelle.
« Ces dernières années, on a assisté à une augmentation très importante de la production et de la
consommation de matériel pornographique, ainsi qu’un durcissement très net du contenu de cette
production, où prédominent de plus en plus des scènes de violence assimilables à la torture. Parallèlement,
on assiste à une banalisation de la pornographie, qui acquiert droit de cité à la télévision et s’introduit dans
les foyers par le biais des cassettes-vidéo. Or, des études effectuées dans certains pays, notamment aux
Etats-Unis, ont démontré qu’il existe une relation entre la consommation de pornographie et
l’augmentation des actes de violences sexuelles contre les femmes. Aux Etats-Unis également, il a été
constaté une augmentation de la proportion de scènes de violence contre les femmes dans les films
commercialement diffusés. Un film sur huit parmi ceux diffusés en 1983, contre un sur vingt en 1982,
montrait ces violences.
La pornographie est aujourd’hui poursuivie activement dans plusieurs pays, surtout lorsque celle -ci met
en scène des enfants (Belgique, Luxembourg, Norvège, Suède, etc…). D’autres pays réagissent aussi, à
l’utilisation indue de l’image de la femme.
En dehors de la pornographie proprement dite, l’image érotisée du corps de la femme, envahit aujourd’hui
les espaces publicitaires. Cette utilisation commerciale du corps féminin a mobilisé en plusieurs endroits,
l’action des groupements de défense des femmes.
Ainsi l’association suisse « Viol-Secours » voit dans l’utilisation du corps des femmes à des fins
publicitaires une incitation à la violence : « comment s’étonner du viol déclare t-elle, lorsqu’on voit le
corps des femmes traité, comme un objet, à longueur de journée sur les affiches publicitaires, à la
télévision, dans les magazines, etc ? On ne peut lutter contre le viol, sans lutter contre tout ce qui le
légitimise et ce qui le banalise. 15
Aussi, la recommandation des féministes dans ce domaine est claire : que la loi interdise toute
publicité qui porte atteinte à la dignité des femmes, notamment par l’utilisation de leur corps à
des fins commerciales et comme simple objet de promotion.
La violence à l’égard des femmes influe sur leur santé et leur bien-être, entraîne un coût humain et
économique élevé, entrave le développement et peut également provoquer des déplacements de personnes.
Conséquences sanitaires.
Outre qu’elle constitue une atteinte aux droits fondamentaux des femmes et un obstacle à
l’exercice de leurs libertés, la violence à l’égard des femmes a été considérée par l’OMS16,
comme un véritable problème de santé publique.
La violence à l’égard des femmes a de multiples conséquences sur la santé physique et peut nuire
à la santé de la reproduction. Outre les blessures, comme les fractures, les lésions ou les maladies
15
Contre le viol et les violences. Que faire – Que voulons nous ? Edité par Viol-Secours, Genève, 1988, P ; 8
16
Rapport mondial sur la violence et la santé. Organisation mondiale de la santé. Genève. 2002
Les conséquences sur la santé reproductive sont notamment les troubles gynécologiques, les
infections sexuellement transmissibles, au VIH notamment, les grossesses non désirées et les
problèmes obstétriques. Il ressort par exemple, d’une étude menée aux Etats-Unis que la
proportion de femmes atteintes de pathologies gynécologiques parmi les victimes de violence
conjugales était trois fois supérieure à la moyenne 17.
Les études montrent par ailleurs, des liens de plus en plus étroits entre la violence à l’égard des
femmes et leur infection par le VIH/Sida.
Les grossesses non désirées constituent une autre conséquence majeure de la violence sexuelle.
Le viol, notamment lors des conflits armés, en accroît le risque. La peur de subir des violences de
la part de leur mari ou de leur partenaire peut dissuader les femmes de recourir à la contraception
ou à l’avortement et conduire à des grossesses non souhaitées. Les conséquences peuvent
être multiples: avortements non médic alisés, suicides etc..
La violence perpétrée avant et durant la grossesse a de graves effets sur la santé de la mère et de
l’enfant : problèmes obstétriques, notamment fausses couches, travail prématuré, souffrance
fœtale, faible poids à la naissance etc.
En plus des traumatismes physiques directs, les femmes victimes de violence sont
particulièrement exposées à toute une gamme de problèmes psychologiques et comportementaux,
dont la dépression, l’alcoolisme, l’anxiété et le comportement suicidaire, tout comme à des
problèmes de santé génésique, tels que grossesse non désirée, maladie sexuellement transmissible
ou dysfonctionnement sexuel.
Les effets psychologiques de cette violence peuvent être aussi graves que ses conséquences
physiques, comme nous l’avons déjà signalé. La dépression est l’une des conséquences les plus
répandues. Le stress, les troubles d’anxiété et les troubles post-traumatiques sont également
signalés. Une étude menée dans le Michigan, aux Etats-Unis, par exemple, a révélée que 59% des
femmes victimes de sévices graves souffraient de problèmes psychologiques, contre 20% chez
celles qui n’ont fait état d’aucun sévice.
Incidences sociales.
La violence à l’égard des femmes, qu’elle soit familiale, sociale ou étatique, limite leur
épano uissement et leurs opportunités de participer pleinement à la vie sociale ou économique de
leurs communautés.
17
Etude approfondie de toutes les formes de violence à l’égard des femmes. Assemblée Générale des Nations-Unis.
Cité précédemment.
Il semblerait par ailleurs qu’un lien étroit existe entre la violence familiale à l’égard des femmes
et la violence sociale. Etre témoin de violence familiale chronique peut induire un comportement
délinquant et le recours à la violence dans les relations personnelle et la résolution des conflits.
En plus des souffrances humaines qu’elle provoque, la violence fait peser un très lourd fardeau
sur l’économie. Ainsi des études parrainées par la Banque interaméricaine de Développement
entre 1996 et 1997 sur les répercussions économiques de la violence dans six pays d’ Amérique
Latine ont montré que les dépenses qu’elle entraînait rien que pour les services de santé
représentaient entre 1,3 et 1,9% du Produit intérieur brut de nombre de pays.
Les faits montrent qu’en règle générale, chez les victimes de violence familiale ou sexuelle, les
problèmes de santé sont plus nombreux, les dépenses de santé nette ment plus élevées et le
recours aux services d’urgence d’un hôpital plus fréquent tout au long de la vie. Il en va de même
pour les enfants victimes de maltraitance.
Il existe plusieurs types de coût dans le court et le moyen terme. En premier lieu, le coût direct
des services fournis pour faire face aux dépenses réelles assumées par les femmes, les pouvoirs
publics et les entreprises en biens, structures et services en vue de soigner et d’aider les
victimes/survivantes et traduire les auteurs de ces violences en justice. Ces services sont
notamment le système de justice pénale (notamment la police, les tribunaux, les prisons, les
programmes à l’intention des délinquants etc) ; les services sanitaires (services de santé primaires
et hospitaliers pour traiter les préjudices aussi bien physiques, psychologiques ou
psychiatriques) ; les services d’hébergement lorsqu’ils existent, les services sociaux et les
services d’aide. Le coût de ces services est en grande partie assumé par l’Etat, quoique le secteur
privé et le secteur associatif en assument aussi une partie.
Les coûts de la deuxième catégorie, sont occasionnés par la perte d’emplois et de la productivité
qu’encourent les entreprises. Les femmes peuvent interrompre leur travail après avoir subi un
préjudice ou un traumatisme ou bien leur productivité risque de baisser du fait des troubles
psychologiques et du stress ressentis. Leur absentéisme et la baisse de leurs performances
professionnelles, ainsi que le changement de lieu de domicile, peuvent entraîner la perte de leurs
emplois et occasionner des coûts aussi bien pour les travailleuses que pour les employeurs.
La violence à l’égard des femmes impose d’autres coûts qu’il est toutefois très difficile d’estimer.
Un coût majeur de cette catégorie correspond aux conséquences pour les enfants témoins de
violence, comme la nécessité pour eux de bénéficier d’un traitement post-traumatique, et les
Une étude réalisée en 2005 au Maroc par l’Association marocaine de lutte contre les violences à
l’égard des femmes 18, estime que le coût des pertes économiques privées, directs et indirectes,
supportées par les femmes victimes de violences conjugales serait, selon différents taux
hypothétiques de prévalence variant de 5% à 30%, entre 0,15% et 0,9% du produit intérieur brut.
En d’autres termes, ce coût varierait de 594 millions de dirhams à 3,5 milliards de dirhams. Pour
tenter d’appréhender le coût de la violence conjugale, cette étude a mis en œuvre une
méthodologie d’observation au niveau microéconomique faisant ressortir les effets économiques
sur les quatre niveaux :
Cette estimation ne tient pas compte des effets multiplicateurs négatifs induits par la perte de
revenus des ménages qui auraient pu, dans des situations exemptes de violence conjugale, allouer
ces ressources à des activités génératrices d’emploi, de revenus et d’investissement.
C’est dire que l’analyse des coûts de la violence à l’égard des femmes revêt une grande
importance, car elle permet de saisir non seulement son ampleur, mais également son incidence
économique sur le secteur public/Etat, les secteur privé, le secteur associatif et les individus. Se
faisant, elle souligne le caractère hautement public, politique et économique de la violence à
l’égard des femmes et non simplement privé.
Exercice 1.5 L’arbre des violences basées sur le genre : Causes, formes et conséquences.
Durée : 2 heures
Objectifs ? Identifier les différentes formes de violence basées dur le genre
? Comprendre les causes et les conséquences de la violence à l’égard des
femmes.
? Reconnaître que les inégalités de genre sont véritable cause des
violences basées sur le genre.
Matériels Flipchart, stylos
Etape 1 1) Demander aux participants ce qu’on entend par « violences basées sur le
genre ». Expliquer que les VBG est physique, mentale ou sociale et
Les formes de qu’elle est dirigée contre une personne sur la base du sexe ou du genre.
violences 2) Demander aux participants d’identifier quelques formes de violence
basées sur le basées sur le genre. Dessiner un arbre sur le tableau – utiliser seulement
18
Belghazi Saâd : Le coût économique de la violence conjugale. Association marocaine de lutte contre la violence à
l’égard des femmes. Centre d’Ecoute et d’orientation juridique et de soutien psychologique pour femmes victimes de
violence. Fadéla. Mohammedia. Maroc. 2005
Encourager toutes les idées et les exemples. Veiller à ce que toutes les formes
de violence soient couvertes. Il est important de signaler que les hommes et les
garçons peuvent aussi être ciblés d’abus sexuel, habituellement commis par un
autre homme, mais que les filles et les femmes sont davantage touchées.
Synthétiser et conclure :
Rappeler que très souvent les traditions, «les spécificités culturelles » et la
religion sont utilisées pour justifier l’usage de la violence envers les femmes et
que le droit d’être libre est un droit fondamental
1) Expliquer que les conséquences des VBG peuvent être classifiées en trois
grands domaines :
a) Santé
b) Emotionnel, social et psychologique
c) Juridique/système judiciaire
2) Diviser les participants en 4 groupes représentant chacun un de ces 4 secteurs
et demander aux participants dans leur groupe de :
? Revoir les différentes formes de VBG identifiées lors de la première
étape.
? Lister et discuter des conséquences/incidences des VBG dans leur
secteur. Tâcher d’inclure les conséquences directes sur la victime, ainsi
que leurs incidences sur la société, la famille, le gouvernement etc.
? Préparer un papier recensant la liste des conséquences identifiées par
leur groupe.
? Au fur et à mesure que chaque groupe lit sa propre liste, le facilitateur
écrit les exemples au sommet de l’arbre en forme de branches.
Etape 3 1) Demander au groupe d’identifier les causes et les facteurs qui contribuent à
Causes et l’existence de la VBG. Utiliser le 1/3 de l’espace existant en dessous de l’arbre
facteurs pour les lister au fur et à mesure qu’ils sont énoncés par les membres du
contribuants groupe.
- Une phase de tension, d’irritabilité de l’homme, liées selon lui à des soucis ou à
des difficultés de la vie quotidienne. Pendant cette phase, la violence n’est pas
exprimée directement, mais elle transparaît à travers les mimiques (silences
hostiles), les attitudes (regards agressifs) ou le timbre de la voix (ton irrité). Tout
ce que fait le conjoint ou la compagne énerve. Pendant cette phase de montée de la
violence, l’homme tend à rendre la femme responsable des frustrations et du stress
de sa vie. Bien sûr, les raisons invoquées par lui ne sont qu’un prétexte et en aucun
cas une cause de la violence. A cette étape, les victimes ne sont pas encore
capables de comprendre se qui se passe et les stratégies utilisées consistent à éviter
les dégâts, à minimiser les choses et faire baisser la tension.
Lorsque la violence est installée, les cycles se répètent, telle une spirale qui va en s’accélérant dans le
temps et avec une intensité croissante. Au fur et à mesure, la période de rémission diminue et le seuil de
tolérance de la femme augmente. La violence devient normale ; elle est banalisée. A partir d’un certain
seuil, si rien ne vient interrompre le processus, la vie de la femme peut être en danger.
Le cycle de la violence
Angoisse
Peur Anxiété Evite la
Confusion Peur Provocation
Peine Désillusion
Culpabilité
Accumulation de Tension
Femme
Il est utile cependant de rappeler que toutes les violences n’obéissent pas forcément à
ce modèle et que l’on peut rencontrer des formes intermédiaires que l’on pourrait
qualifier de « violences perverses »
Il est difficile d’établir un seul et unique profil de l’agresseur et on dispose de relativement peu
d’études sur le sujet. La plupart des études concernant la violence faite aux femmes ont été réalisées par
des militantes ou des chercheuses féministes ou des bénévoles d’associations. De ce fait, elles se pla cent
pratiquement toutes du point de vue de la femme victime de violence. N’ayant pas accès aux hommes
violents, elles tendent à les mettre tous dans un même groupe. Or il existe, selon les spécialistes, différents
types d’hommes violents.
L’explication sociologique met avant tout l’accent sur la socialisation des petits garçons et leur
préparation à occuper un rôle dominant et dominateur dans la famille et la société. Aux femmes, on
attribue des comportements typiquement « féminins », tels que la douceur, la passivité, l’abnégation, alors
qu’aux hommes seraient forts, dominants et courageux. Comme le montre Pierre Bourdieu19 , tout ce qui
est valeureux, respectable, digne d’admiration est du domaine du masculin, alors que ce qui faible,
méprisable et indigne est du registre féminin.
D’autres approches mettent en avant, les traumatismes subis dans l’enfance pour expliquer le phénomène.
Il apparaît en effet, qu’un pourcentage important d’hommes poursuivis en justice pour violence à
l’encontre des femmes auraient souffert de maltraitances dans leur enfance.
Un autre angle d’approche se fonde sur la théorie de l’apprentissage social. Les comportements violents
s’acquièrent par l’observation des autres et se maintiennent s’ils sont valorisés socialement. Les enfants
élevés par un père violent ont tendance à recourir à la violence comme mode de fonctionnement. Ils
prendront l’habitude de réagir par la violence pour résoudre les problèmes, soulager les tensions et ou se
valoriser. Dans le même ordre d’idées, la pornographie favoriserait les stéréotypes dans les relations
sexuelles et banaliserait l’agression sexuelle et le viol.
Cependant tout porte à croire que ces différentes approches ne sont pas contradictoires, mais bien
complémentaires et toutes sont à prendre en compte.
La déresponsabilisation
19
Bourdieu Pierre, La Domination masculine. Seuil, Paris, 1998.
La fragilité psychologique..
Ce sont leur fragilité et leur sentiment d’impuissance intérieure qui améneraient les hommes violents à
vouloir contrôler et dominer les femmes et notamment leur compagnes. L’acte violent agit chez eux
comme une protection de leur intégrité psychique. Le contrôle sur l’autre, à l’extérieur, vient suppléer leur
manque de contrôle interne. « La violence est pour ces hommes un palliatif pour échapper à l’angoisse,
ainsi qu’à la peur d’affronter les affects de l’autre, peur d’affronter les leurs ».20
L’homme violent dans le couple est incapable d’établir une distance entre lui et l’autre, qui lui permet une
relation saine. Sa crainte d’être abandonné l’amène à établir une relation fusionnelle avec l’autre, sans
position de recul. Trop de proximité avec l’autre engendre un sentiment d’étouffement de la partenaire.
Les féministes espagnols ont beaucoup travaillé sur la différence entre amour et possession. Quand un
homme dit à une femme « Je te veux toute à moi », cela signifie le désir, mais il peut signifier aussi « tu
m’appartiens, rein qu’à moi et tu n’existe pas sans moi ». Leur slogan pour sensibiliser les jeunes à cette
question est « l’amour ne tue pas ! il n’étouffe pas… bien au contraire il laisse de la latitude à l’autre pour
s’épanouir ».
Exergue : « L’erreur ne devient pas vérité …parce qu’elle se propage et qu’elle se multiplie »
Un stéréotype est une image simpliste, un cliché qu'on rapporte à une catégorie de personnes, à
une institution ou à une culture. La notion de stéréotype est généralement utilisée négativement
pour dénoncer une idée reçue et fausse qui fait obstacle à la connaissance véritable. La
constitution des stéréotypes ne parvient à la reconnaissance des objets que sur la base d'images ou
de schèmes préconstitués.
La persistance de stéréotypes dans les socié tés modernes, en particulier ceux qui se réfèrent aux
caractéristiques ethniques ou au statut de la femme ou de l'étranger et induisent des attitudes
racistes machistes ou xénophobes, témoigne de la difficulté qui existe aujourd'hui encore pour
faire admettre une idée non stéréotypée de l'être humain, dont la liberté et l'identité singulière ne
se laissent pas enfermer dans des catégories toutes faites.
20
Hirigoyen, Marie-France, op. cité p 147
Le mythe est une croyance qui devient réalité et que nous intériorisons à travers la socialisation.
Ainsi nous construisons notre identité, nos valeurs, notre manière de penser, d’agir et de sentir.
Au fil du temps, les mythes culturels et les préjugés sociaux ont contribué à l’acceptation et au
maintien de la violence et à son invisibilisation, en la considérant comme un problème privé.
Pour prévenir la violence de genre, il est nécessaire d’interroger et de remettre en cause les
mythes et les stéréotypes qui expliquent son acceptation et sont à la base de sa tolérance sociale.
La violence de genre existe dans tous les groupes sociaux et ethniques et dans tous les milieux
socio-économiques et culturels. Cependant, toutes les familles peuvent avoir des problèmes, mais
toutes n’ont pas recours à la violence pour les résoudre. Il est vrai que la pauvreté et le manque
d’éducation sont des facteurs aggravants, mais les études montrent que la violence domestique
peut se produire dans n’importe quelle famille, indépendamment de son niveau économique,
social et culturel. Quoique l’on voit de plus en plus de femmes appartenant à des milieux aisés,
porter plainte et solliciter de l’aide, celles-ci ont davantage tendance, sous pression de la famille,
à occulter « le problème » pour sauver la réputation de la famille ou encore leur carrière
professionnelle ou celle de leur conjoint.
Les études menées par les mouvements de femmes dans différents pays arabes et musulmans
montrent bien que l’Islam n’immunise pas les femmes de maltraitances perpétrées par les
membres de la famille, la communauté ou par l’Etat. Bien au contraire, la religion musulmane,
souvent mal interprétée est utilisée par les Etats et les individus pour justifier les législations
inégalitaires et discriminatoires et la violence physique, économique et sociale exercée à leur
encontre.
? Les agresseurs sont des malades mentaux, des alcooliques ou des drogués.
Les hommes violents ne souffrent pas spécialement de pathologies psychiatriques. Selon les
experts, seuls 5% d’entre eux seraient déséquilibrés. Moins de 10% de cas de violences
conjugales sont dus à des troubles psychopathologiques. Quant à l’alcool et aux drogues, même
s’ils peuvent favoriser ou aggraver la violence, ils n’en constituent pas cependant la véritable
cause, car d’une part nombre d’hommes sont violents sans être dépe ndants et que d’autre part,
tous les alcooliques, les drogués et les malades mentaux ne sont forcément violents. Les études
montrent que l’agresseur est quelqu’un qui se comporte généralement de manière tout à fait
normale et civilisée en société et avec ses collègues de travail et que sa conduite à cet égard
n’éveille aucun soupçon.
Selon l’Association de Juristes « Themis », seuls 5% des hommes jugés pour violence sexiste
étaient dépendants de l’alcool. Les boissons alcoolisées et certaines drogues diminuent les
inhibitions et l’auto-contrôle, mais en aucun cas ils ne peuvent excuser ou justifier les
comportements violents.
? La violence domestique est un problème privé dans lequel personne n’a le droit de
s’immiscer.
Toute situation qui porte atteinte à la liberté et la sécurité d’un être humain doit être considérée
comme un délit et non comme une question privée. A ce titre, la violence de genre constitue une
violation des droits humains. Il est donc, de la responsabilité des institutions et de toute la société
de protéger ces droits et de punir ce délit. Pendant longtemps, la société a ignoré ou justifié la
violence de genre, en prétextant qu’elle relevait de l’ordre privé. Heureusement, la communauté
internationale a enfin reconnu que….
? Les femmes aiment cela, elles supportent parce qu’elles le veulent bien.
Même si cette idée est largement répandue, aucune femme ne cherche et ne jouit d’être
maltraitée. Si les femmes ne partent pas, c’est qu’elles sont piégées, mises sous emprise. Il y a
plusieurs raisons qui rendent difficile la décision de mettre fin à la maltraitance : dépendance
économique, émotionnelle, peur, honte, perte d’auto-estime, sentiment de culpabilité, espoir que
l’agresseur change etc …La difficulté qu’ont les femmes à quitter un conjoint violent ne peut être
comprise qu’en tenant compte de la vulnérabilité du statut de la femme dans notre société et des
rapports de soumission/domination que ce statut leur impose. Selon une étude réalisée sur un
échantillon de 500 jeunes espagnols de 14 à 18 ans, 14% des garçons considèrent que les femmes
Il n’y a pas de limite d’âge pour subir les mauvais traitements. Plusieurs jeunes filles vivent des
situations de violence dans leur famille, où elles apprennent à supporter les mauvais traitements
et finissent par intérioriser le modèle de la victime.
Un foyer dans lequel sévit la violence est un foyer déstructuré et déstructurant. C’est pourquoi, il
est préférable de soustraire les enfants à cet environnement, dans laquelle ils peuvent apprendre à
devenir de futures victimes ou de futurs agresseurs. Il ne faut pas oublier par ailleurs que les
mineures eux- mêmes sont souvent objet d’agressions dans la famille.
? Si elle était vraiment maltraitée, pourquoi continuerait elle à vivre avec lui ?
La spirale de la violence provoque chez les femmes perte d’auto-estime, dépression, peur et
sentiment de culpabilité. C’est ce qui explique qu’elles n’abandonnent pas l’agresseur. Dans
beaucoup de cas elles sont dépendantes économiquement et gardent l’espoir de voir les choses
changer. Elles craignent de faire du tort à leurs enfants et ont parfois peur d’être agressées
mortellement, si elles quittent le domicile conjugal.
S’il en était ainsi, tous les garçons seraient toujours violents et avec toutes les personnes. La
violence de genre est acquise, elle est le résultat de tout un processus de socialisation. Elle n’est
pas innée.
? Les femmes aussi peuvent être tout aussi violentes que les hommes.
Même s’il existe bien sur des femmes qui agressent leur compagnon, ce sont des cas rares et dans
la majorité des cas, il s’agit de réactions de défense. Les femmes peuvent être violentes et, quand
elles le peuvent, utiliser les outils du pouvoir. Cependant, si des hommes sont violentés par leur
femme, ce n’est pas du tout dans les mêmes proportions que les femmes. Dans 98% des cas de
violence, l’auteur est un homme. Par ailleurs, la violence des femmes est le plus souvent réactive.
La majorité de celles qui ont tué leur conjoint l’ont fait dans un contexte de protection légitime ou
de légitime défense, face aux violences dont elles étaient victimes. D’autre part, étant donné que
leur force physique est moindre, la violence des femmes a des conséquences moins dramatiques
que celle des hommes. Elles frappent à main nue et beaucoup plus rarement en utilisant des objets
contondants. De toutes les façons, la condamnation sociale est beaucoup plus dure et sévère
lorsqu’il s’agit d’une femme qui agresse un homme que le contraire.
21
Article « de chaque 100 heures de travail non rémunéré, 80 sont exécutées par des femmes » étude présentée par
José Diaz-Aguado. Journal El Mundo (9 mars 2000).
L’estimation de la prévalence des différentes formes et manifestations de la violence à l’égard des femmes
est une opération difficile qui pose d’emblée le problème de la collecte et du traitement des données. En
effet, les données disponibles dans divers pays au monde, ne recouvrent qu’une très faible partie des faits,
qui proviennent du recueil des plaintes déposées auprès des forces de police, des centres médicaux ou des
mouvements féministes militants, dont les moyens restent souvent dérisoires face à l’ampleur du
problème.
En dépit des efforts accomplis ces dernières années, la connaissance que nous avons du phénomène
demeure très partielle et ne permet pas que les politiques et stratégies soient élaborées en connaissance de
cause. De nombreux pays continuent de manquer cruellement de données ou de données fiables. En outre,
très peu de pays assurent une collecte régulière de données sur la violence à l’égard des femmes, qui
permettent de mesurer l’évolution du problème et de déterminer la manière dont les différentes formes de
violence affectent les différents groupes de femmes, en tenant en compte des facteurs comme l’âge, le
milieu géographique, le niveau d’instruction etc.
Cependant, el s études et enquêtes menées au cours des dernières années par de multiples organismes,
notamment des ministères, des bureaux de statistiques nationaux, des universités, des organisations
internationales des ONG et des associations de défense des droits des femmes, montrent très clairement
que la violence à l’égard des femmes est un phénomène largement répandu et que ses effets sont
particulièrement dévastateurs sur la santé et le bien-être des femmes et de leurs enfants.
Toutes les enquêtes donnent des chiffres similaires, selon que l’on tient compte ou pas de la
violence psychologique.
Plus de 25% des couples américains ont vécu un ou plusieurs épisodes de violence domestique.
Les chiffres de la maltraitance pendant la grossesse varient entre 1% et 17% (Campbell et al.,
1992).
Canada.
Une femme sur 4 a subi de la violence de la part de son partenaire actuel ou précédent et, dans
20% des cas, cette violence a commencé pendant la grossesse.
Selon le Conseil consultatif canadien sur la situation des femmes, 18% des femmes qui se
présentent aux urgences des hôpitaux seraient des victimes de violence conjugale.
Chaque année en moyenne, 20 Québécoises sont assassinées par leur conjoint (Centre canadien
de la statistique juridique).
Hollande.
20% des femmes entre 20 et 60 ans ont subi des violences physiques dont 11% graves et répétées,
de la part de leur partenaire (Romkens, 1989).
Angleterre.
Une femme sur 4 déclare avoir vécu des expériences de violence domestique, 1 femme sur 10
dans les douze derniers mois (Mooney, 1993).
Espagne.
En Espagne, les chiffres sont effarants 22 et ont amené les politiques sous la pression des
associations féministes, à réagir :
Selon une étude de l’Institut de la femme, près de deux millions de femmes seraient
techniquement maltraitées, ce qui ne signifie pas seulement des violences physiques, mais aussi
des menaces, des insultes, des pr ivations ou des vexations. D’après les données de l’enquête, ces
femmes ont en majorité plus de 40 ans, sont mariées ou plus souvent divorcées, ont fait peu
d’études et vivent dans une ville de plus de 20 000 habitants. 70% de ces femmes ont attendu plus
de cinq ans avant de se confier à quelqu’un. En 2003, plus de 100 espagnoles ont été assassinées
par leur conjoint, leur compagnon ou ancien compagnon.
22
Selon Amparo Marzal Martinez, Ministère des Affaires Sociales ; lors des Jornadas sobre la violencia de généro,
UNAF, 17 et 1_ novembre 2004.
Les données d’une enquête nationale réalisée en 2006 par l’INSP, révèlent que 53% des femmes
déclarent avoir été victimes de violences. Sur un échantillon de 10 000 femmes battues, 50% ont
entre 23 ans et 40 ans. En outre, 73% des femmes ont été agressées chez elles. Dans la majorité
des cas, l’auteur de ces violences est le mari.
En Tunisie.
Quoique l’information relative à ce sujet reste parcellaire, une étude menée Belhadj en 1997 en
milieu hospitalier révèle que 35% des femmes ont été agressées au moins une fois par leur époux.
Quant à la nature de l’agression, elle serait psychologique da ns 98% des cas et physique dans
42%.
Au Maroc
Il ressort des données collectées auprès des centres d’écoute et des institutions publiques que
82% des actes de violence subies par les femmes se produisent dans la sphère domestique et que
87% de ces actes sont commis par l’époux. Dans près de 9,7 fois sur 10, la violence est perpétrée
par des personnes avec lesquelles les victimes entretiennent des relations intimes ou des
personnes connus par elles23 . Pour l’Association marocaine de lutte contre la violence à l’égard
des femmes, les femmes mariées sont les plus exposées à la violence. Elles représentent 76,99%
des femmes battues, contre 11,23% pour les femmes divorcées. La forme de violence la plus
répandue est de type psychologique (insultes, menaces, dénigrement systématique) avec 47,80%,
suivie par la violence économique (privation d’autonomie financière) 30,78%, physique (sévices
corporels) 17,35% et sexuelle (viols et sévices sexuels) 4,07%.
D’après le sondage Eurobaromètre 1999, une femme européenne sur 5 a été, au moins une fois
dans sa vie, victime de violence de son compagnon et 25% des crimes commis concernent un
homme ayant agressé sa partenaire.
Aux Etats-Unis, les études montrent qu’un quart des femmes ayant accès aux urgences sont
victimes de violence conjugales ; en psychiatrie, un quart des femmes qui se suicident ont été
victimes de violences conjugales.
Lors de ces enquêtes, il apparaît clairement que la violence psychologique est identifiée par les
femmes comme faisant partie de la violence conjugale. Cela débute par du non-verbal, se
poursuit par des insultes pour aboutir à la violence physique ou à la mort.
23
Saâd Belghazi, op cité p. 34
Après de nombreuses années de lutte, l’action sur le terrain des organisations féministes et
mouvements de femmes dans le monde a fini par porter la question de la violence à l’égard
des femmes sur le devant de la scène internationale. Aujourd’hui l’Organisation des Nations-
Unies accorde une grande attention à ce problème et considère la violence à l’égard des
femmes comme une forme de discrimination et une violation des droits fondamentaux des
femmes. La communauté internationale s’est engagée à protéger les droits et la dignité des
hommes et des femmes, via de nombreux traités et déclarations.
Les premières initiatives de lutte contre la violence à l’égard des femmes au niveau
international ont mis l’accent en premier sur la famille. Sans pour autant se référer
explicitement à la violence, le Plan d’action mondial pour la femme, adopté en 1975 lors de la
Conférence de l’Année internationale de la femme à Mexico, a appelé l’attention sur la
nécessité de mettre en œuvre des programmes éducatifs et des approches propres à résoudre
les conflits familiaux en garantissant dignité, égalité et sécurité à chacun des membres de la
famille. Toutefois, la tribune des ONG, tenue en parallèle à la conférence et le tribunal
international des crimes contre les femmes, tenu à Bruxelles en 1976 ont mis en évidence de
nombreuses autres formes de violence à l’égard des femmes.
La mobilisation des femmes sur le sujet s’est accrue au début des années 80 et la troisième
conférence mondiale sur les femmes organisée à Nairobi en 1985 a fait une large place au
problème.
Les stratégies prospectives d’action de Nairobi pour la promotion de la femme ont tenu
compte de la prévalence de la violence contre les femmes qui « sous diverses formes,
s’exerce partout, dans la vie quotidienne », et ont recensé les diverses manifestations de cette
violence en appelant l’attention sur la situation des femmes victimes de mauvais traitement à
domicile, de trafics de prostitution forcée ou encore de conflits armés.
Au début des années 90, le mouvement des femmes a intensifié ses efforts pour que la
violence à l’égard des femmes soit reconnue comme une question touchant le respect des
droits fondamentaux de l’être humain. En prévention de la Conférence mondiale sur les droits
de l’homme tenue à Vienne en 1993, des femmes se sont réunies et ont fait pression au niveau
mondial et régional pour que le droit relatif aux droits de l’homme s’étende aux expériences
vécues par les femmes et ont dirigé un tribunal mondial qui a entendu les témoignages de
femmes, touchant notamment des cas de violence familiale dans les monde entier. La
Conférence de Vienne a également donné une impulsion considérable à l’adoption, plus tard
la même année, de la Déclaration sur l’élimination de la violence contre les femmes par
? Prendre des mesures concertées afin de prévenir et d’éliminer la violence à l’égard des
femmes
? Etudier les causes et les conséquences de la violence à l’égard des femmes et
l’efficacité des mesures de prévention
? Eliminer la traite des femmes et aider les femmes victimes de violences liées à la
prostitution et à la traite.
Ces objectifs énoncent une série de mesures concrètes à prendre par les gouvernements,
notamment la mise en œuvre d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ;
l’adoption et l’examen périodique d’une législation sur la violence à l’égard des femmes ;
l’accès à la justice et des voies de recours dignes de ce nom ; des mesures et programmes
visant à protéger et aider les femmes victimes de violence ; enfin, des actions de
sensibilisation et d’éducation.
La résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité a
marqué une étape dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes dans les situations de
conflits armés. Constatant la nécessité de la pleine mise en œuvre d’une législation
garantissant les droits des femmes et des filles pe ndant les conflits armés, la résolution plaide
pour des mesures spéciales visant à les protéger et met l’accent sur la responsabilité de tous
les Etats de mettre fin à l’impunité des auteurs de cette violence.
24
Résolution 48/104 de l’Assemblée générale.
La violence à l’égard des femmes a été considérée comme un problème mondial si important
et nuisible, que pas moins de dix différentes conventions internationales, déclarations et
autres traités y font référence, dont :
Cette deuxième partie du manuel est consacrée à la situation d’aide et aux techniques de l’ entretien, qui
sous tendent le comportement professionnel d’une écoutante. Elle a pour principaux objectifs de :
? Connaître les références théoriques qui fondent le concept de « counselling » et de relation d’aide
? Définir la notion de relation d’aide
? Identifier les objectifs de la relation d’aide
? Identifier et caractériser chacune des attitudes qui peuvent être adoptées au cours de
l’entretien..
? Enumérer les composantes de l’attitude compréhensive
? Indiquer les fonctions de la synthèse globale de l’écoute après l’entretien.
La relation d’aide a toujours existé. Le premier concept rattaché à cette relation était le
counseling, défini comme « une relation dans laquelle une personne tente d’aider une autre à
comprendre et à résoudre des problèmes, auxquels elle doit faire face». 25
Le counseling s’est d’abord développé aux Etats-Unis au début du XXème siècle : En 1908, F.
Parsons va ouvrir à Boston un des premiers centres de counseling (Centre de guidance juvénile).
En 1909, le mouvement de santé mentale lancé par C. Beers va établir des programmes de
counseling dans des services psychiatriques. Dans les années 30, Carl Rogers va bouleverser aux
Etats-Unis la psychologie clinique en remettant la personne au centre du dispositif thérapeutique.
Il initialisera un des grands de counseling : l’approche centrée sur la personne, développée dans
son ouvrage Counseling and psychotherapy, paru en 1942.
25
http.//www.comment dire.com/counseling/bref historiquecounseling.htm.
Aujourd’hui, le terme de « counseling » est utilisé pour désigner un ensemble de pratiques très
diversifiées, au sein de multiples champs d’application (santé mentale, counseling pratiqué dans
les institutions scolaires et universitaires, vie familiale et conjugale, orientation professionnelle,
santé de la reproduction, assistance aux femmes victimes de violence etc). Il couvre une gamme
de services d’accompagnement ou de soutien aux personnes confrontées à une situation difficile :
cas de maladie grave (cancer, SIDA, etc .), tentative de suicide, viol, torture, toxicomanie,
violence domestique etc.
Développé par Carl Rogers, durant les années 40, ce modèle place une confiance dans les
capacités de l’individu à résoudre ses problèmes. La relation d’aide psychologique est ainsi
définie, comme « une relation permissive, structurée de manière précise, qui permet au client
d’acquérir une compréhension de lui-même à un degré qui le rend capable de progresser à la
lumière de sa nouvelle orientation (…) Toutes les techniques utilisées doivent avoir pour but de
développer cette relation libre et permissive, cette compréhension de soins dans l’entretien d’aide
et cette orientation vers la libre initiative de l’action »27 . Selon la conception régorienne, la
relation d’aide consiste à offrir au client les possibilités d’une compréhension de soi par une
nouvelle perception et une acceptation de soi. L’aidant facilite l’expression et la reconnaissance
des sentiments négatifs et positifs de l’aidé, sans chercher à l’influencer, en lui manifestant un
intérêt authentique.
L’aidant selon Rogers, favorise cette progression en adoptant certaines attitudes ou qualités
fondamentales qui sont :
-l’authenticité : appelé aussi congruence, elle désigne « la capacité d’une personne d’être ce
qu’elle est, de jouer les rôles qui lui conviennent, à sa façon, sans façade ni prétention ».
26
Carl Rogers est un grand psychologue et psychothérapeute américain, mort en 1968 et qui a été à l’origine du
courant « humaniste » des psychothérapies dans les années 1950, à une époque ou seuls régnaient les courants
comportementalistes et psychanalytiques. Son postulat de départ est que chaque personne a en elle une faculté de
croître au mieux de ses possibilités, qu’il a nommé « la tendance actualisante ». Cette faculté nécessite des conditions
favorables pour être mise en œuvre : la relation avec des personnes qui vont accepter positivement ce qu’elle est,
sans conditions, tout en étant honnête avec elle (la congruence) dans un climat d’empathie.
27
Rogers. C. La relation d’aide et la psychothérapie. ESF éditeur. Paris. 1986. p 33
Ceci veut dire que si l’aidant manifeste de l’authenticité, une compréhension empathique
adéquate et une considération positive inconditionnelle et que le client perçoit ces attitudes, il
accomplira un changement bénéfique, en cheminant vers l’actualisation des soi et en surmontant
les restrictions qu’ il a intériorisées.
Dans la relation d’aide centrée sur la personne, l’expérience présente est importante et fournit les
ressources pour la croissance personnelle du client et favorise le changement. L’aidant assume le
rôle de facilitateur et aide le client à établir et à attacher une signification à son expérience
intérieure. Toute expression qui est de nature à être interprétée comme une évaluation doit être
évitée par l’aidant, comme les questions interrogatoires ou exploratoires et les descriptions du
client.
L’approche centrée sur la personne nourrit une relation une relation qui inclut la chaleur, la
sympathie de la part du conseiller, sentiments exprimés librement et influencés par un climat
permissif caractérisé par l’absence de coercition ou de pression. Dans sa relation avec le client,
l’aidant est considéré comme un facilitateur et le client est « l’autre ».
Un important postulat de base de cette approche, est d’une part, que tout individu est animé d’une
tendance inhérente à développer toutes ses potentialités de manière à favoriser sa conservation et
son enrichissement et d’autre part, tout individu possède, potentiellement, la compétence
nécessaire à la solution de ses problèmes ou encore « la capacité inhérente de s’orienter, de se
diriger, de se contrôler » bref, de modifier par lui- même son système de valeurs en fonction de
son expérience propre.
Le modèle rogérien est indéniablement une référence en matière de counseling. C’est un modèle
essentiellement non-directif. Le rôle de l’aidant ou du conseiller est un rôle de facilitateur, qui
aide la consultante à faire « un choix informé » pour se sortir d’une situation difficile. Elle en est
capable, selon Rogers, parce qu’elle dispose « d’une tendance inhérente à développer toutes ces
potentia lités » et « d’une capacité inhérente de s’orienter, de se diriger et de se contrôler ».
Le mérite de ce modèle est également important, du fait qu’il met l’accent sur les attitudes que
doit adopter le conseiller envers ses consultant(e)s. Il doit être congruent, authentique,
manifestant une considération positive inconditionnelle envers ses clients.
Pour G. Egan, la relation d’aide dans le domaine de l’éducation, repose sur deux dimensions
essentielles qui sont : la présence d’un client en difficulté et la non-utilisation par le client, de ses
propres ressources. De ces deux dimensions découlent les principes qui guideront l’intervenant
dans son rôle d’aidant. Le but de la relation d’aide, c’est d’apprendre à l’individu à découvrir
certaines de ses ressources, à les actualiser, à les utiliser et à les développer. Autrement dit, il
s’agit d’amener le client vers une meilleure adaptation. Car, comme le souligne G.Egan « le rôle
de l’aidant n’est pas de refaire la vie de son client, mais d’aider celui-ci à s’occuper de ses
problèmes et à remodeler sa vie selon ses propres valeurs. »
Le rôle de l’intervenant est l’accompagnement de son client dans une relation d’interaction,
jusqu’au stade où ce dernier développe sa capacité de faire ses choix. A cet effet, les méthodes
d’intervention devront confronter le sujet avec les conséquences de ses choix et engager sa
responsabilité. En d’autres termes, le client devra être en mesure de choisir ses actes, en fonction
des conséquences qu’il sera prêt à assumer.
Bien qu’initialement destiné aux intervenants travaillant avec une clientèle spécifique, à savoir
celle des adolescents en difficulté d’adaptation, ce modèle de relation d’aide peut être facilement
transposé à d’autres domaines d’intervention. Que cette relation d’aide se déroule dans le cadre
d’un centre de réadaptation, d’un centre de service sociaux ou en milieu sanitaire ou scolaire, les
règles de base demeurent les mêmes. Toutefois, il reviendra à l’intervenant de découvrir les
modalités particulières d’application de ses règles, selon les spécificités de la clientèle et celles du
contexte.
Dans un champ tout aussi vaste, qui est celui de la santé, ces auteurs se sont penchés sur la
relation d’aide infirmier- malade en milieu hospitalier.
Pour H. Lazure (1987) « devenir une infirmière aidante exige plus que du savoir (elle peut
mémoriser) et du savoir- faire (les gestes peuvent devenir automatiques)… il exige du savoir-être
tant avec elle- même qu’avec le client ». En effet, sans ce savoir-être la notion de croissance
personnelle restera inopérante pour l’un et l’autre. Afin d’atteindre ce but, l’in firmière devrait
être persuadée que son client est le seul détenteur d’un potentiel de ressources nécessaires à la
résolution de son problème (de santé ou autre).
Rejoignant ainsi la conception rogérienne, le rôle de l’infirmière est de donner à son clie nt, les
moyens complémentaires, sans imposition, lui permettant de reconnaître ses ressources
personnelles, qu’il utilisera à sa façon dans un processus de résolution de problème.
Dans la même optique et pas loin de l’approche de H. Lazure se présente le modèle de la relation
d’aide en soins infirmiers de J. Chalifour (1989). Ce modèle, d’une grande rigueur sur les plans
théorique et pratique, est considéré comme la base des programmes d’enseignement de la relation
d’aide dans nombre d’école de santé.
Inspiré de certaines données de la psychologie humaniste, le modèle que propose J. Chalifour est
basé sur trois éléments : la personne aidée, l’aspect relationnel et l’aidant qui favorise cette
relation.
Nous avons développé jusqu’ici quelq ues modèles théoriques, auxquels le conseiller se réfère
pour expliquer et prédire le comportement de ses clients. Ces connaissances théoriques
gagneraient à être complétées par d’autres relatives à la « relation d’aide ».
La relation d’aide se fonde sur le counseling centré sur le client. Ce qui caractérise
essentiellement cette relation, ce sont les attitudes facilitantes que le conseiller est appelé à
adopter envers son client. Ces attitudes doivent être comparées avec d’autres attitudes qui
peuvent entraver la relation. C’est ce que nous développerons dans la deuxième partie de cette
session.
Si l’on se réfère à Rogers, le client est le seul détenteur des ressources de base pour résoudre ses
problèmes. Dès lors, le rôle du conseiller est d’offrir à so n client et sous aucune contrainte, des
moyens complémentaires lui permettant de découvrir ou de prendre conscience de ses
potentialités qu’il utilisera à sa façon, dans un processus de résolution de problème. Au lieu de lui
fournir la solution toute faite, il oriente le client, l’assiste et lui facilite chacune des étapes du
processus de résolution du problème, appliquant ainsi le célèbre proverbe de Conficius : Si tu
rencontres un homme qui a faim, ne lui donne pas un poisson, mais apprends lui à pêcher.
Chalifour définit la relation d’aide en ces termes : « La relation d’aide, écrit- il, consiste en une
interaction entre deux personnes, l’intervenant et le client, chacun contribuant personnellement à
la recherche et à la satisfaction d’un besoin d’aide présent chez ce dernier. Cela suppose que
l’intervenant adopte une façon d’être et la communique en fonction des buts poursuivis. Ces buts
sont à la fois liés à la demande du bénéficiaire et à la compréhension que le spécialiste possède de
son rôle. »
L’idée essentielle qui ressort de cette définition est la satisfaction d’un besoin d’aide chez le
client. La façon d’être du conseiller renvoie à l’attitude de facilitation que nous avons mentionnée
ci-dessus.
Hélène Lazure donne de la relation d’aide une définition très synthétique, en écrivant que « c’est
une relation dans laquelle un aidant fournit au client certaines conditions dont ce dernier a besoin
pour satisfaire ses besoins fondamentaux. »
Les attitudes jouent un grand rôle dans la communication. Une attitude d’appréciation peut faire
avorter une communication et risque d’être à l’origine d’une rupture de l’échange, tandis qu’une
attitude de compréhension, qui suppose écoute et empathie est fondamentale dans une relation
d’aide. Nous sentons bien ce que veut dire «être en phase » avec quelqu’un, et que cela est
indispensable pour bien communiquer. Mais qu’est-ce que cela signifie exactement ? Et comment
pouvons- nous y parvenir ?
Un chercheur américain Porter, a montré qu’en observant leurs conséquences sur l’interlocuteur,
on pouvait classer les attitudes adoptées face au consultant en six grands types. Nous les
présentons ci-après.
?CONSEQUENCES :
Je donne l’impression de faire la morale, de juger. Mon interlocuteur peut ne pas apprécier et à la
longue me rejeter ou se taire.
- Attitude d’interprétation : Intervention qui vise, en quelque sorte, à instruire son interlocuteur
au sujet de lui- même, à lui faire prendre conscience de quelque chose, à lui démonter l’une ou
l’autre chose. D’une manière directe ou indirecte, elle vise à indiquer comment il pourrait ou
devrait se représenter la situation. Mes réponses ne reflètent pas ce qui vient de m’être dit, je
traduis et sélectionne dans les propos de mon interlocuteur ce que je veux comprendre, je cherche
à faire apparaître ce qui me semble être le vrai motif (souvent celui que j’ai prévu). En fait, je
déforme et opère une distorsion par rapport à ce que l’autre voulait dire.
J’influence plus ou moins l’autre, suivant que l’interprétation est plus ou moins proche de la
réalité vécue.
Phrase type : « ce qui est important dans ce que vous avez dit… »
Exemple : « En fait, plus il vous sent vulnérable, plus il vous agresse » « Vous ne voulez pas le
quitter à cause de vos enfants, vous avez peur pour eux ».
?CONSEQUENCES :
? soit l’interlocuteur accepte cette déformation,
? soit il se ferme,
? soit il dit « comprenez moi bien… »,
- Attitudes de soutien : Intervention qui vise à rassurer la personne, à soulager son angoisse, à
l’apaiser. Mes réponses veulent apporter un encouragement ou un réconfort, je compatis et
cherche à éviter qu’autrui ne dramatise, je lui indique ce qu’il doit ressentir. D’une manière ou
d’une autre, elle implique que le sentiment de l’interviewé n’est pas justifié; que le problème
n’existe pas ou qu’il n’est pas aussi sérieux que se le présente la personne. C’est parfois pour
écarter la gêne que me cause le problème de l’autre.
Phrases types: « Il ne faut pas vous en faire, ça n’est pas grave, ….ça arrive à tout le monde….Je
suis passée par là et je vous comprends très bien »
?CONSEQUENCES :
J’apparais comme compatissant,
? soit mon interlocuteur s’épanche de plus en plus pour se faire consoler,
? soit cela l’énerve car il se sent infantilisé.
Ces trois attitudes, dites d’influence, indiquent une non reconnaissance de l’autre, on lui vole en
quelque sorte, le moteur de son action, la liberté de sa pensée et la spontanéité de son ressenti.
- Attitude d’enquête : Intervention qui vise à obtenir des données supplémentaires, à vérifier ou à
approfondir la discussion. L’interviewer amène son vis-à-vis à examiner de plus près tel ou tel
aspect du problème. Je réponds en posant des questions, sans avoir précisé pourquoi je pose ces
questions, je cherche immédiatement un complément d’information.
J’influence plus ou moins l’autre, suivant que les questions s’harmonisent plus ou moins au vécu
de l’autre. Je risque de tirer l’entretien vers ce qui me paraît important comme si je l’accusais de
vouloir perdre du temps et de ne pas dire l’essentiel.
Exemple : « Depuis combien de temps vous agresse-t-il ? » « Comment réagissent vos enfants, à
ce moment là ? »
?CONSEQUENCES :
? J’apparais comme quelqu’un qui s’intéresse au problème du client.
Cependant mal posées, ces questions peuvent donner l’impression d’un interrogatoire.
? Je risque de passer à côté de ce qui est important pour le client.
Cette attitude est dite de semi- influence, parce qu’elle peut peser sur la liberté de l’autre ou, au
contraire, se rapprocher fortement de l’attitude de compréhension.
Je réponds en proposant immédiatement une solution, je réagis par l’action en poussant à l’action.
Je vois tout de suite ce que je ferais si j’étais à sa place sans attendre d’en savoir davantage.
Inconsciemment, je me débarrasse du client et de ses plaintes.
Exemple : « Vous devriez quitter votre mari », « Vous devriez porter plainte ». Je pense et il ou
elle exécute. Cette attitude peut aller de l’influence la plus légère (conseil, suggestion) à
l’influence la plus pesante (menace, chantage).
?CONSEQUENCES :
J’apparais comme quelqu’un qui a des solutions, je me substitue à l’interlocuteur :
? soit celui-ci accepte la solution, mais la suivra-t- il ?
? soit il répond « oui mais… », ce qui signifie qu’il y a des problèmes que je n’ai pas pris en
compte.
Exemple : Je me sens incapable de réagir, je ne sais pas quoi faire devant tant d’agressivité ». « Je
comprends que vous vous sentez impuissante face à ce comportement ».
Cette réponse traduit une attitude compréhensive, parce qu’elle comporte l’écoute, l’empathie (se
mettre dans la peau de l’autre et la reformulation).
?CONSEQUENCES :
J’apparais comme quelqu’un qui veut comprendre, qui écoute. Cela renforce la confiance de
l’interlocuteur en moi. Il perçoit plus clairement ses problèmes et est poussé à les résoudre lui-
même. Si je fais trop durer cette attitude, il peut croire que je me dérobe.
Quelles sont les fonctions de chacune des attitudes que nous venons d’examiner ?
a)Mieux se connaître : Elles permettent de savoir quelle est notre attitude face à l’autre.
Cependant, il est important de signaler qu’il n’y a pas de mauvaises attitudes en soi, mais qu’il y
a seulement des attitudes plus ou moins adaptées à des situations concrètes.
Dans le cas qui nous intéresse, qui est celui de l’aide qui doit être apportée aux femmes victimes
de violence, l’attitude de compréhension nous semble incontestablement la plus appropriée pour
établir avec les victimes un dialogue, dans un climat de confiance et de sécurité. C’est par
l’écoute, l’empathie et la reformulation que l’écoutante parviendra à cerner la demande de la
personne, analyser la situation et évaluer avec elle le chemin qu’elle est prête à parcourir pour
résoudre son problème, compte-tenu de son histoire singulière.
- L’écoutante contrôle son désir d’aider. Devant un cas, la débutante en service d’écoute
éprouve un véritable besoin de faire quelque chose, d’apporter immédiatement une aide concrète.
Poussé à l’action, elle n’est pas en mesure d’apprécier l’urgence du besoin de l’autre. Elle
projette son impulsion d’aider sur la cliente et ne distingue pas son besoin d’agir vite et le besoin
de la cliente. Pour devenir un véritable aidant, il faut savoir maîtriser cette incapacité naturelle de
supporter et de partager la souffrance d’autrui.
- L’écoutante contrôle sa curiosité. Les questions qu’elle pose à la victime, les liaisons qu’elle
fait ou les enquêtes qu’elle mène sont uniquement motivées par la nécessité de comprendre la
demande de la cliente afin d’y mieux répondre. Cette nécessité de connaître est très différente du
désir de savoir.
- L’écoutante donne à son interlocutrice l’impression de comprendre son problème. Et ceci non
pas en disant rapidement : « oui, oui, je vois », mais en posant des questions qui convainquent la
personne que sa demande et son problème ont été compris. Ceci enc ourage l’interlocuteur à
parler d’autre chose que de l’aspect extérieur et banal de son problème et d’exprimer ce qu’il
ressent envers lui- même et envers les autres.
- L’écoutante expérimentée et bien formée donne à sa cliente, le sentiment qu’elle est acceptée
telle qu’elle est et qu’elle n’est pas jugée. Les femmes victimes de violence ont en effet tendance
à penser que leurs problèmes ou l’aspect affectif de leurs problèmes sont choses très personnelles,
dont on ne parle pas. Elles conservent une attitude empreinte de pudeur et de crainte, et taisent ce
quelles pensent n’être pas convenable ou pas comme il faut. Ce faisant, elles refreinent de livrer
un matériel qu’il est cependant important de connaître pour le traitement de leur cas. En les
écoutant, en les encourageant à parler d’elles- mêmes et de leur entourage, l’écoutante les amène à
prendre conscience de l’existence de telle ou telle difficulté à laquelle elles n’avaient pas songé.
Souvenons-nous que la relation d’aide, à fortiori dans un service d’écoute de femmes victimes de
violence, diffère de la plupart des autres contacts professionnels, car le but ultime de la relation
est l’épanouissement et l’autonomie de la personne qui consulte et le développement de ses
potentialités, en la rendant acteur de son propre changement.
Pour parer aux dérapages que toute situation d’aide peut présenter, il faut penser à mettre au point
un code de déontologie, c’est-à-dire un ensemble de règles professionnelles auxquels toutes les
praticiens de l’écoute doivent se soumettre volontairement et qui contribuent à définir ce que
l’on pourrait nommer une politique implicite de l’entretien.
- Le respect de la vie privée des individus, auquel s’articule la notion de consentement dans la
mise en place du travail et de respect dans le rendu des conclusions pratiques. La femme qui vient
nous voir parce qu’elle est momentanément en difficulté, nous nous engageons à la respecter.
Cela veut dire que nous ne la considérons pas comme un problème, mais comme une femme
ayant un problème.
- La référence au droit : ceci implique que l’écoutante évolue dans une pratique collant aux
règles internationales et nationales, fixés par la Convention sur l’élimination de toutes les formes
de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW, 1979), la Convention sur les droits des enfants
(1979), la Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes (1994), le Code de la
Famille (la Moudawana), le Code pénal etc
- La compétence : A celle qui vient nous consulter nous promettons tacitement une aide et une
compétence professionnelles. Nous ne donnons pas de conseils au petit bonheur la chance, selon
l’inspiration du moment. Notre guidance n’est ni impulsive, ni pressée.
-La conviction : Elle désigne notre aptitude à nous mettre inconditionnellement au service d’une
fin. Elle renvoie également à une représentation spécifique de l’autre et à des principes
fondamentaux qui organisent cette représentation d’autrui. Ceci est à rapprocher de notions de
valeurs, de principes qui conditionnent la pratique : tolérance ou intolérance, acceptation ou refus
de l’autre, etc.
- La ponctualité : Nos rendez-vous, ceux dont nous sommes convenus avec la personne qui
consulte, sont scrupuleusement tenus, l’intimité de l’entretien préservée, les promesses de
services faites exécutées.
- Le secret professionnel : Nous sommes soumis au secret professionnel, ce qui veut dire que
nous n’avons rien à révéler de ce qui nous est dit au cours de l’entretien ou des entretiens. Les
affaires ou les histoires tragiques des femmes victimes de violence (viols, séquestrations,
tentatives de suicide, etc), ne font l’objet de conversations privées. Ce que nous voyons chez les
Abordons le cas difficile d’une femme battue qui présente des lésions plus ou moins graves et qui
ne veut pas voir un médecin. La responsabilité de l’écoutante sera d’amener cette personne à se
faire soigner et à établir un certificat médical approprié, en lui expliquant que cette dernière
constitue une pièce essentielle pour la victime dans l’exercice de ses droits. Si l’exercice de la
pratique d’aide consiste aussi, avec beaucoup d’habilité, à faire prendre conscience aux victimes
de leurs droits, la personne qui consulte a un droit inaliénable de prendre ses propres décisions.
Cette situation toutefois change, quand il y a personne en danger, surtout lorsque les services
d’écoute sont cha rgés par la loi, du mandat d’aviser les autorités compétentes (gendarmerie,
police, services hospitaliers etc) de cas de violence grave, comme c’est le cas de nombre de pays
européens. Dans ce cas, nous avons la possibilité voire l’obligation de faire un signalement aux
autorités compétentes. Si ce mandat n’existe pas ou si le signalement n’aboutit pas, il nous reste
la ressource d’intervenir, comme le ferait n’importe quelle autre personne : assistance à personne
en danger. Car, si respectueux que soit le conseiller de la personne qui consulte, il ne doit en
aucun cas prôner l’individualisme à outrance.
Ces principes éthiques éclairent pleinement de quelle manière l’intervention psychosociale d’aide
à la personne engage un positionnement ou, plus exactement des positionnements. Au cœur du
processus, l’entretien est un moment capital qui ne peut se satisfaire de simples supposés
techniques. Devenir écoutant et intervenant social nécessite de se positionner par rapport à ces
données. Il s’agit de savoir ce que l’on veut et à quel prix, de quelle manière et dans quel objectif.
La consultation dans une relation d’aide comporte différentes étapes, qui se traduisent par un seul
ou plusieurs entretiens et que nous pouvons schématiser comme suit :
Dans la pratique social, un entretien se déroule habituellement comme ceci : le conseiller écoute
ce que la personne est venue pour lui dire, l’aide à s’exprimer si besoin est, puis lui répond avec
compétence. Cette approche méthodique de l’aide qui commence avec le relevé des faits
concernant le problème décrit et leur étude et qui continue avec la formulation de la nature du
problème, se termine avec le choix d’un traitement. Ces trois moments de l’écoute, qui
s’interpénètrent et se chevauchent constamment dans la pratique, mais que nous distinguons pour
exposer rationnellement le processus, font appel à un savoir-être de l’aidant (moi discipliné), à un
savoir tout court (connaissance du comportement humain), et à un savoir-faire (direction de
l’entretien). Grâce à ses atouts, l’aidant offre à la personne qui consulte un véritable service
d’aide et pas seulement un secours ponctuel.
Le processus entrepris avec l’usager, à partir de sa demande d’aide est un processus, qui est
décomposé en trois moments.
2.6.1.1. L’accueil
Au cours de cette étape, le conseiller souhaite la bienvenue, se présente à lui, l’appelle par son
nom, l’encourage à coopérer, lui explique l’offre de services, le rassure et l’assure de la
confidentialité absolue de l’entretien.
Cette étape est celle du diagnostic du besoin et de l’évaluation de la situation. Il s’agit d’identifier
la demande réelle ou le problème de la personne qui vient consulter. Cette demande peut être
-du début des difficultés (quand le problème s’est manifesté pour la première fois ?)
-de ce qui en précipité l’évolution
-de ce qui a été entrepris pour y répondre.
L’habilité technique de l’écoutante consiste à éviter de poser des questions auxquels il est
possible par oui ou par non. Il s’agit de l’interroger en utilisant : qui, quoi, où, par quels moyens,
pourquoi, comment, quand ?
L’écoutante part d u vécu, du présent, de l’actuelle situation pour aller vers le passé ou les
éventuelle motivation du comportement. Elle ne commence jamais par l’histoire du sujet. Les
débutantes en service d’écoute escamotent généralement ce premier temps de l’entretien.
Un véritable pas est fait dans la communication entre l’aidant et l’aidé, lorsque l’écoutante
perçoit clairement le but de son interlocuteur, lorsqu’elle comprend « ce que la personne a dans la
tête ». Le problème réel de la consultante est clairement isolé et précisé.
Avec la progression de l’entretien s’accumulent les éléments dont l’écoutante va tenir compte
pour arrêter son plan d’aide. Il relève soigneusement les faits saillants et la manière dont la
personne les ressent. Il est sensible au ton affectif des confidences, aux silences, aux éventuels
blocages traduisant peine ou anxiété.
Une autre tâche de l’écoutante consiste à apprécier l’aptitude de la personne à utiliser l’aide, ce
qu’en d’autres termes on appelle l’évaluation de la situation. La manière dont la personne relate
son histoire permet d’estimer le capital de forces dont elle dispose encore et de faire un pronostic
sur son attitude à utiliser l’aide et le traitement proposé.
2.6.1.3. Le traitement.
A cette étape, l’écoutante est invitée à fournir à son interlocutrice, des propositions de solution à
sa situation. Sachant qu’il est rare qu’un problème ne possède qu’une solution, il convient de lui
présenter les différentes manières d’envisager plusieurs réponses à son problème, afin de lui
permettre de prendre une décision en connaissance de cause. L’attitude à adopter par la conseiller
est une attitude non-directive, pour éviter d’influencer le choix du demandeur qui peut s’avérer
plus tard contre-indiqué.
-L’écoutante apporte à la consultante les clarifications dont elle a besoin pour résoudre son
problème.
Il faut rappeler que pour le professionnel de l’écoute, la situation d’aide est considérée comme
une opportunité offerte à la victime de retrouver une certaine autonomie de fonctionnement lui
permettant de prendre ses propres décisions. Devant un cas de violence caractérisée, nous ne
disons pas simplement « Que puis-je faire pour cette femme ? Quelles ressources puis-je
mobiliser pour l’aider ? ». Nous nous interrogeons plutôt ou aussi sur ce que cette femme serait
capable de faire par elle- même, si nous l’aidons à mobiliser les forces dont elles disposent.
L’entretien axé sur la demande durant ses diverses phases se termine avec la satisfaction de la
demande. Il est toutefois des demandes qui se nécessitent la conduite de plusieurs entretiens,
notamment dans les cas de violence et de traumatismes très lourds.
Un entretien d’accueil ou un premier entretien se termine de l’une des trois manières suivantes :
La solution ou l’amélioration obtenues grâce aux entretiens peut s’avérer plus ou moins durable.
Dans le cas d’une rechute ou d’un échec, il ne faut blâmer personne, ni la personne qui consulte,
ni l’aidant. Il faut traiter la rechute sociale ou psychologique comme une rechute médicale et
aider à nouveau, moyennant quelques ajustements.
L’écoute ne cesse pas avec le temps formel de l’entretien. Au contraire, elle se prolonge par le
travail de remémoration et de réflexion. Le temps de la synthèse constitue donc un moment clef.
Il offre notamment la possibilité d’un dépassement du cadre de l’entretien à travers une mise en
ordre des données collectées, en vue d’une évaluation et d’une éventuelle transmission.
Ceci dit, il peut y avoir un seul entretien, comme plusieurs entretiens successifs avec la même
personne. Chacun d’entre eux doit être consigné dans une feuille d’écoute (feuille d’écoute n°1,
feuille d’écoute n° 2 etc..) contenant des informations utiles temporairement pour le travail
individuel et collectif. Ces entretiens doivent se clôturer par un temps de synthèse globale, qui
reprend les synthèses des rencontres antérieurs et intègre la plupart des documents qui ont
orientés l’écoute. On y retrouve ainsi, en annexe la liste des documents apportés par l’usager et
une référence aux textes de lois ou décrets utiles.
Les raisons qui justifient la pratique d’une synthèse, dépassant la simple et traditionnelle prise de
notes (dont il n’est guère possible de faire l’économie en cours d’entretien), sont au moins au
nombre de quatre.
La synthèse permet de réentendre ce qui a été dit. En effet, même si une position d’écoute de la
globalité devrait toujours intervenir régulièrement au cours de l’entretien, elle n’est jamais tout à
fait possible. La synthèse est ainsi un moment qui favorise le passage véritable d’une logique de
l’écoute de l’instant à une écoute globale de la rencontre, dans toute sa durée. Par cette opération,
des éléments qui n’avaient pas été entendus dans toutes leurs implications peuvent l’être
désormais.
Elle a une fonction réflexive et ouvre à d’autres causalités en donnant au professionnel l’occasion
de prendre acte de références ou de réflexions qu’il ne possédait pas, ou seulement partiellement,
durant l’entretien. Ce recul qui s’organise est également le temps éve ntuel d’une réflexion sur le
positionnement professionnel.
A condition d’être en accord avec les obligations légales et les règles déontologiques, relatives au
secret professionnel et sous réserve que l’information conservée réponde au mandat de
l’organisme enregistreur, la pratique de la synthèse globale peut correspondre à une vocation
d’archivage efficace. En effet, que le travail d’écoute ait abouti ou non, la synthèse globale
équivaut à une mémoire : elle permet le suivi de la personne écoutée d’une part et constitue
d’autre part, une base de données pouvant fournir des indications utiles sur le phénomène de la
violence de genre. Elle est en outre, une source de références en matière de pratiques dans
laquelle un professionnel peut puiser.
Pour bien comprendre ce que doit être une synthèse, il faut avoir à l’esprit que le document
réalisé doit être non seulement valable pour soi- même, c’est-à-dire constituer un instrument de
travail efficace immédiatement, mais encore pour les autres. Il doit être un outil sur la base
duquel un collègue peut se forger une représentation la plus objective possible de l’échange et du
travail en cours. C’st pourquoi celui-ci doit être lisible. Le style est simple, clair et la forme
concise.
D’une manière générale, une synthèse globale de l’écoute contient au strict minimum:
-des précisions sur les aspects psychologiques et sociaux du cas ;
-un diagnostic et une évaluation du cas ;
-les détails du traitement ;
-des comptes-rendus successifs sur l’aide apportée,
-la réaction au traitement.
En ce qui concerne l’écoutant, doivent figurer son nom, sa fonction et son lieu d’exercice, en sus
de la datation et autre éléments de forme.
Pour ce qui est de l’écoutée, on retiendra son état civil complet incluant son nom, son adresse,
son numéro de téléphone, sa situatio n de famille et un résumé de sa situation économique et
sociale, psychologique et psychosociale. Ces deux dernières catégories ont l’avantage de pouvoir
relater des particularités psychologiques et d’informer éventuellement le lecteur sur le rapport du
sujet à sa situation.
Les informations relatives au contenu de la ou des rencontre(s) sont à détailler en une série de
catégories, dont certaines sont naturellement des reprises des synthèses d’étape de l’entretien.
-la primo-demande : cette dernière (téléphonique ou énoncée en début d’entretien par l’usager ou
son représentant) doit être indiquée, car son caractère secondaire n’efface pas le fait qu’elle
puisse correspondre à un problème social réel et traitable ;
-la demande : la demande isolée à l’issue de l’écoute doit être résumée. En cas d’unité avec la
primo-demande, il convient de préciser simplement qu’elle est conforme ;
-le problème : le problème réel de l’usager doit être clairement isolé et argumenté ;
-les particularités : il s’agit ici d’indiquer les difficultés rencontrées au cours de l’entretien,
qu’elles soient de nature communicationnelle, comportementale (violence, passivité, agitation) ou
encore psychologique.
-le traitement : l’objectif est ici d’informer le lecteur sur la manière dont le problème isolé a été
appréhendé.
Les propositions : sachant qu’il est rare qu’un problème ne possède qu’une solution, il convient
de consigner quelles ont été les manières d’envisager plusieurs réponses au problème.
-les solutions : en relation avec la section précédente, l’information à donner concerne désormais
le mode et la forme du travail ayant été réellement retenus ;
-les causes de l’échec : en cas d’échec, les facteurs qui l’occasionnèrent doivent être relevés.
Etaient- ils à imputer à la technique (et pourquoi), à la situation de l’usager, à l’environnement,
etc ?
Remarque : chacune de ses catégories est à renseigner en trois ou quatre lignes. On s’attachera
une attention particulière aux catégories « Demande », « Problème » et « Traitement ».
Remarques : Pour toutes ces informations ou catégories, la question se pose de savoir si leur
rédaction doit être directement réalisée au cours de l’entretien. La réponse est strictement
négative. En effet, ce serait vicier la fonction de la synthèse que d’opérer ainsi. Ne demeure pas
moins le fait de savoir si les entretiens doivent être réalisés avec ou sans prises de notes. Il es t
clair que le modèle idéal est un entretien sans prise de notes, pour lequel le recours au crayon ou
à l’ordinateur est effectué en l’absence de l’écoutée. Cependant, c’est relativement difficile à
réaliser au vu de la quantité d’information apportée. Pour cette raison, il est de bon ton de prendre
quelques notes au cours de la rencontre, en ne retenant que les termes clefs du propos et les
informations souvent difficilement restituables par le biais de la mémoire (adresse, patronyme,
etc..)
A titre indicatif, l’expérience montre qu’un entretien de 45mn suivi, soit immédiatement, soit
quelques heures plus tard, d’un temps de synthèse ou de prise de notes se satisfait largement en
cours d’écoute d’un relevé de 25 à 45 mots clefs traitant du contenu, comme d u contenant (ex :
remarques personnelles sur l’entretien).
Une parenthèse s’impose. Il est souhaitable que les centres d’écoute relevant du réseau Anaruz,
standardisent leurs dossiers, de telle façon que les mêmes renseignements s’y trouvent disposés
de la même manière. Ceci faciliterait l’utilisation des dossiers à des fins d’études et de recherche.
Ces dossiers, contiennent en effet des mines de renseignements, mais restent la plupart du temps
inexploitables. Pour mieux appréhender le phénomène de la vio lence basée sur le genre, ne
conviendrait- il pas de rédiger nos dossiers de manière qu’ils puissent être utilisés ?
Chapitre III.
Dans ce dernier chapitre, nous nous proposons de centrer l’intervention et les pratiques sur
l’accompagnement des femmes victimes de violence, notamment celles qui sont victimes de
violences conjugales 28 , qui sont incontestablement les plus nombreuses. Il a pour objectif de :
Confrontée aux situations de violence, l’écoutante ne doit pas méconnaître ses propres
réactions émotionnelles, ses valeurs, ses valeurs, ses opinions personnelles et certains
préjugés qui peuvent influencer les attitudes et les comportements des victimes, comme nous
l’avons longuement exposé dans le chapitre précédent.
? La durée des violences : il peut paraître inacceptable qu’une femme ait supporté pendant
10 ou 15 ans les agressions de son conjoint, notamment lorsque ses propres enfants ont eu
à endurer le climat de violence au sein du couple, ou encore qu’elle ait supporté les
avances répétées de son supérieur ou chef hiérarchique pendant quelques ou même
quelques mois.
? Les allers-retours des femmes : le retour auprès du conjoint de femmes qui avaient
entamé une démarche de séparation (parfois dans le cadre d’un projet et d’un processus
d’aide élaboré avec les écoutantes d’un des centres du réseau Anaruz) peut donner à
l’intervenant un sentiment d’impuissance et d’échec, l’amener à renoncer à aider les
femmes maltraitées.
28
L’étude menée par le réseau Anaruz au Maroc et relatives aux violences basées sur le genre (Rapport initial.
Analyse des plaintes enregistrées par les centres d’écoute et d’assistance juridique) révèle que 82 % des violences
enregistrées, sont des violences de type conjugal.
En réalité, le regard négatif qui peut être porté sur la femme dans ces situations risque
fortement d’accroître son sentiment de culpabilité et de renforcer l’image défavorable qu’elle
a d’elle-même. Il conduit en outre, par un renversement des valeurs, à blâmer davantage la
victime que l’agresseur dans un contexte social très tolérant à l’exercice de la violence contre
les femmes.
La plupart du temps, les femmes restent au domicile conjugal ou au sein de la famille, ou
encore avec le même employeur qui la harcèle par peur du pire. Elles se résignent par détresse
et parce qu’elles ne trouvent pas en elles les ressources nécessaires pour rompre le cercle de
leur quotidien.
Il est faux de penser qu’une femme battue ait cherché à l’être, ou qu’elle resterait avec son
conjoint par pur masochisme ou besoin d’être dominée. Aucune femme n’aime la dégradation
et l’humiliation qu’elle subit dans une telle situation.
Par ailleurs, il importe de bien appréhender les mécanismes et le déroulement du cycle de
violence, l’existence de « phases de lune de miel » au cours desquelles la femme reprend
l’espoir que tout va rentrer dans l’ordre.
Ainsi les ruptures définitives sont fréquemment le terme d’un processus évolutif, d’une
longue maturation, tout au long duquel ou de laquelle, par des départs successifs, la femme
vérifiera d’une part les aptitudes et la volonté du conjoint à changer, et d’autre part ses
propres capacités à reprendre son autonomie et à renoncer à la vie de couple.
Il est donc préférable de considérer les allers-retours des femmes comme une expérimentation
positive, permettant une évolution vers l’autonomie. A ce titre, ils doivent être respectés.
Il importe de connaître les démarches et les ressources utiles aux femmes dans la plupart des
cas de violence conjugale ou familiales.
? Consulter un médecin pour des soins d’une part, pour faire établir un certificat médical
constatant les coups et blessures et d’autre part précisant la durée de l’interruption
temporaire de travail (I.T.T.), au cas où la victime travaille. Ce certificat devra être
conservée en lieu sûr. Qu’elle souhaite déposer plainte ou différer cet acte dans le temps,
l’établissement d’un certificat médical détaillé, constitue une pièce essentielle pour la
victime dans l’exercice de ses droits.
? Porter plainte : s’adresser aux services de police ou de gendarmerie pour une déclaration
des violences subies sur le registre de main-courante (police), dans un procès-verbal de
renseignements judiciaires (gendarmerie) ou porter plainte.
Il existe de nombreuses circonstances dans lesquelles une écoutante peut être confrontée à
des situations de violence basée sur le genre. Elle peut en effet, être confrontée à une
demande en situation de crise (femmes fuyant le domicile familial ou conjugal, ou
brutalement mises à la porte par sa famille ou son conjoint, victimes blessées devant recevoir
des soins en milieu hospitalier, etc).
-par le signalement émanent d’une tierce personne (voisinage, famille, collègue de travail)
-a l’occasion d’une demande de service : aide juridique (violence juridique) ou de logement,
-lors d’une demande d’aide financière, alors même que la femme peut justifier de ressources
qui lui sont propres (violence économique).
-lors du signalement d’une enfant en danger par un professionnel de la santé, par le milieu
scolaire ou par le lieu d’accueil (jardin d’enfants, garderie scolaire) ou encore un voisin.
-par la révélation de harcèlement sexuel, sur le lieu de travail,
-lors d’une grossesse non désirée y compris les grossesses hors mariage suite à un viol.
-par une demande émanant d’associations partenaires ou d’autres services spécialisés.
Il n’est pas toujours facile, dans des moments de crise, de procéder à une évaluation
approfondie qui permette de trouver les solutions appropriées.
Il importe tout d’abord d’apprécier l’urgence et la gravité de la situation :
Il s’agit dans ce cas d’aider la victime à prendre une décision d’urgence. L’écoutante doit se
garder de dramatiser ou de dédramatiser inutilement la situation. Elle doit par contre, si la
a) La femme estime qu’il lui est possible ou préférable de rentrer chez elle :
Dans cette situation, la femme ne se sent pas en mesure de s’opposer au partenaire violent,
d’assumer les conséquences d’un départ, pour elle comme pour ses enfants.
Il convient à la fois de respecter cette décision et de prémunir la victime contre l’éventualité
de nouvelles agressions. Il est essentiel de prévoir avec elle un scénario de protection.
Il importe donc :
? d’analyser avec elle le degré de danger existant.
? de suggérer à la femme :
? de noter les numéros de téléphone utiles (la permanence téléphonique du centre
d’écoute pour femmes victimes de violences, commissariat, gendarmerie etc, ou
encore de les lui faire apprendre par cœur).
? d’identifier les personnes proches qui peuvent l’aider ou alerter les autorités
concernées, en cas d’urgence.
? D’informer les enfants sur les conduites à tenir lors d’actes de violence : se réfugier
chez les voisins, alerter les grands-parents ou les amis, etc…
? Préparer un sac de départ, éventuellement dans un lieu sûr ou chez une personne de
confiance, contenant les papiers importants, (actes notariés, certificats médicaux etc),
une somme d’argent et des effets personnels, en cas de départ d’urgence.
Cette mise à l’abri est destinée à assurer la sécurité et le repos indispensables après une
agression. De même, elle peut constituer une première démarche, qui peut devenir
déterminante dans l’évolution de la situation.
Bien qu’il semble s’agir d’une réponse de court terme, il convient dans la mesure du possible
de l’organiser au maximum, afin de diminuer le caractère anxiogène de cette rupture et d’en
préserver les évolutions possibles.
Ainsi il est préférable que femmes et enfants disposent des effets personnels nécessaires :
linge, vêtements, cartables etc..
L’examen des lieux potentiels d’accueil doit s’établir d’un commun accord avec la victime,
selon :
La sécurité physique assurée dans ces lieux, doit être une préoccupation prioritaire.
d) L’hébergement d’urgence
La violence conjugale ou familiale n’est pas toujours facile à déceler, tant la femme a
tendance à cacher la vérité, parfois à ses propres yeux, ou encore à minimiser la gravité de la
situation.
Le combat qu’elle mène pour maintenir l’unité familiale, la crainte des conséquences qui
pourraient résulter de ses démarches, notamment quant au sort réservé aux enfants, peuvent
amener une réticence à dévoiler la violence à des intervenants institutionnels. Ainsi les
femmes victimes de violence conjugale sont hantées par la menace du placement de leurs
enfants, représailles annoncées par le conjoint violent.
Plus précisément, l’expérience subjective de la violence, telle qu’elle est vécue par les
femmes évolue avec le temps. On peut schématiquement repérer les étapes suivantes :
Négation de la violence
Dans un premier temps, la femme ne peut admettre qu’elle a été l’objet de violences ou qu’il
existe un problème dans la relation de couple. Elle minimise les faits, considère qu’il s’agit
d’accidents, trouve une excuse à la violence en croyant fortement qu’elle ne se reproduira
pas.
Culpabilité
La femme reconnaît qu’il y a un problème mais se considère responsable. Elle pense ne pas
répondre de façon satisfaisante aux attentes de son conjoint.
Prise de conscience
La femme ne peut plus assumer la responsabilité des actes violents de son conjoint. Mais elle
veut croire encore à sa relation avec son partenaire et continue d’espérer qu’ensemble et
moyennant quelques efforts, ils pourront s’en sortir.
Prise en charge par la femme
Se rendant à l’évidence que son conjoint ne changera pas, qu’il ne peut changer et continuera
à être violent, la femme décide alors de ne pas se soumettre plus longtemps à cette violence et
de s’engager dans une nouvelle voie.
Pour appréhender la situation avec plus de pertinence encore, il est utile de s’enquérir
ensuite :
? Du début des difficultés (quand le problème s’est-il manifesté pour la première
fois ?) ;
? Quelle évolution a connu le couple ; l’exploration de l’histoire des violences dans
le couple peut permettre à la femme de p rendre une distance salutaire.
? De ce qui en précipité l’évolution ;
? A quel étape dans le cycle de la violence se situe l’intervention : après crise,
montée des tensions…
? Il sera utile de repérer et de nommer le type de violence et de menaces, la
fréquence des actes, leur degré de gravité, etc.
? Il est également important de prendre en compte les difficultés matérielles, le
degré d’isolement de la famille, l’usage d’alcool ou de drogue, le niveau de violence sur
d’autres membres de la famille (enfants, personnes âgées) et éventuellement hors de la
famille.
? A quel degré d’élaboration intérieure de son histoire la femme est parvenue (déni
ou négation de la violence, culpabilisation, recherche de solutions pour le couple,
décisions de reprise d’autonomie).
? De ce qui a été entrepris pour y remédier et y répondre.
Tous ces aspects influeront fortement sur les aptitudes de la victime à dire la violence, à
rechercher de l’aide, à envisager des stratégies à court ou à long terme pour modifier sa
situation.
? La confidentialité
Nous avons déjà évoqué le principe de confidentialité dans la relation d’aide, mais nous
permettons d’insister sur cette notion dans le cas précis, car les révélations des victimes de
violence touchent au plus intime et au plus profond d’elles- mêmes.
29
Même si toutes ces professions tournent autour du psychisme, au sens large, il est important cependant de saisir
leurs spécificités.
a) Le psychiatre est un médecin qui établit un diagnostic et un pronostic sur l’état d’un patient. A partir de là, il va
envisager un traitement de type chimique (médicaments qu’il est habilité à délivrer) soit de type thérapeutique.
b) Le psychologue a suivi 5 à 6 ans d’études universitaires, qui peuvent déboucher sur une carrière orientée vers la
recherche ou l’enseignement en psychologie ou encore vers des pratiques dites cliniques (il travaille avec des
patients à qui il propose un soutien psychologique). Le titre de psychanalyste peut ensuite s’appliquer aux deux
précédents s’ils ont suivi une formation adéquate.
c) Le psychanalyste a suivi lui-même une analyse, plus une analyse dite « didactique » pour apprendre et est inscrit
aupès d’une instance psychanalytique (école, fédération…)
d) Enfin, le psychothérapeute a normalement suivi une formation, une thérapie et est en supervision.
Il peut arriver que le mari, le fiancé, l’ami ou encore le père ou le frère de la victime, c'est-à-
dire l’agresseur souhaite rencontrer l’écoutante, qui a soutenu la victime. Ceci peut être très
embarrassant et déroutant pour l’écoutante qui ne saura pas quelle attitude adopter et ceci est
compréhensible.
Il faut signaler tout d’abord que cette demande sociale est en soi peu compatible avec la
relation de confiance, de sécurité et de confidentialité qui doit caractériser tout processus
d’aide à la victime. Il est préférable dans ce cas et dans la mesure du possible, c’est-à-dire
dans la mesure où cette entrevue ne peut être évitée, d’orienter le partenaire vers d’autres
services plus spécialisés ou vers les services de police ou de gendarmerie, tout en lui signalant
que le recours à la violence demeure inacceptable, quelqu’en soient les raisons et qu’il
encoure des sanctions pénales au regard de la loi.
Il demeure malheureusement difficile dans nos pays, d’orienter des hommes souhaitant mettre
fin à leur comportement violents vers des structures spécifiques. A notre connaissance, il
n’existe pas de structures ou d’associations d’aide aux hommes violents, comme c’est le cas
dans d’autres pas européens ou d’Amérique du Nord. Le seul conseil dans ce cas demeure le
recours à un psychologue ou un psychothérapeute, si la personne le souhaite.
Dépister la violence.
Les femmes cachent souvent au médecin l’existence de violences. Même lorsqu’il est clair
qu’elles ont subi des agressions physiques, elles n’en expliquent pas toujours les
circonstances par honte, peur des conséquences ou pour ne pas abuser du temps du médecin.
Lorsqu’elles sont exposées à des agressions répétées ou des menaces constantes, elles en
arrivent à douter de leurs émotions et de leur compréhension du problème. Plus leur intégrité
physique et psychologique est menacée, plus leur seuil de tolérance à la violence comme à la
douleur augmente, à tel point qu’elles n’en aperçoivent plus les manifestations quotidiennes.
Ainsi, alors qu’il existe un danger réel, la femme peut ne pas reconnaître la gravité de la
situation.
Si certaines victimes évoquent les violences subies, la plupart consultent pour des soins, sans
vouloir indiquer la cause du traumatisme ou en alléguant une circonstance plus ou moins
crédible :chute de l’escalier, choc contre une porte ouverte, allégation de maladresse etc..
Face à des récits peu cohérents, les médecins peuvent suspecter que les faits rapportés par la
patiente ne sont pas vraisemblables et néanmoins préférer ne pas approfondir la question.
Ceci pour différentes raisons, telles qu’une formation peu appropriée à la prise en charge de
difficultés de nature extra-médicale, le fait de ne pas s’autoriser à intervenir dans un différend
de nature privée, la manque de temps etc ..
Par ces attitudes, patientes et médecins renforcent mutuellement le déni de violences, leur
banalisation, et laissent le champ libre aux risques de récidive.
Soigner.
Prescrire la suite.
Le médecin est tenu d’assurer un premier accueil et si nécessaire, renvoyer la victime sur une
assistance spécialisée (services sociaux, police ou gendarmerie, associations spécialisées,
centre d’information sur les droits de femmes …).
Il faut signaler ici que certains pays comme la France, l’Espagne et d’autres encore ont
apportés de nouvelles dispositions au Code de déontologie médicale, qui stipulent que
lorsqu’un médecin discerne qu’une personne auprès de laquelle il est appelé est victime de
sévices ou de privations, et notamment lorsqu’il s’agit de mineur, il doit en alerter les
autorités judiciaires, médicales ou administratives.
Néanmoins, des services d’urgences médico-judiciaires européens ont tenté de définir les
critères susceptibles d’être retenus dans la détermination de l’ITT :
Je soussigné Dr……
exerçant à ….
En qualité de….
Certifie avoir examiné le …………à…………..heures
Une personne déclarant se nommer :
NOM……..
Prénoms……
Sexe………..Nom d’épouse….
Se disant âgée de…….. Nationalité…………..
Résidant à …………….
Disant avoir été victime de (description de l’agression) :
………………………………………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………
…………………………
Le…………………..à (heure et lieu)…… ……
De la part de………….
Se plaignant de (doléances physiq ues, psychologiques ou sexuelles)………
………………………………………………………………………………………………..
Avoir constaté :…………………………………………………………………………….
……….. ………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………..
Les lésions constatées ce jour justifient une incapacité Totale de Travail de …………..
En lettres………………………………………………………………………………………
Sous réserves de complications
Les examens complémentaires suivants sont prescrits pour compléter le dossier médical
…………………………………………………………………………………………………
…….
Les résultats pouvant éventuellement modifier la détermination de l’ITT
? La victime peut déposer plainte : cette demande est peu fréquente en réalité, tant la
victime se sent menacée et connaît d’obstacles psychologiques dans l’accomplissement de cette
démarche. Toutefois cette voie judiciaire ne doit pas être négligée notamment en cas de graviter
des mauvais traitements et de réitération des violences. Le médecin peut alors orienter la
victime vers un service spécialisé (urgences médico-judiciaires).
Il arrive également que la femme ne connaisse pas les conséquences judiciaires du dépôt de
plainte : toute plainte est transmise au Procureur de la République, et c’est au Parquet qu’il
appartient d’entamer les poursuites éventuelles : orientation vers le tribunal compétent ou
classement sous condition ; ou de classer l’affaire. Le dépôt de plainte implique la convocation
et l’audition de l’auteur des violences par les policiers ou les gendarmes et peut entraîner des
suites au pénal : amende, contrôle judiciaire, emprisonnement.
Qu’elle souhaite déposer plainte ou différer cet acte dans le temps, l’établissement d’un
certificat médical détaillé mentionnant la durée de l’ITT constitue une pièce essentielle
pour la victime dans l’exercice de ses droits. Il éclairera d’abord le magistrat du Parquet
sur l’importance des dommages subis par la victime ime et sur la gravité de l’agression :
l’opportunité des poursuites judiciaires en dépendra largement
? La femme souhaite quitter temporairement le domicile familial : il convient de lui
confirmer son droit de partir avec ses enfants et surtout l’intérêt de signaler son départ
ainsi que les violences subies, au commissariat de police (déclaration de main courante)
ou à la brigade de gendarmerie (déclaration dans un procès-verbal de renseignement
judiciaire).
? Dans tous les cas il importe d’inciter les victimes à parler de leurs problèmes avec des
personnes susceptibles de les orienter dans leurs démarches. Des documents d’information
contenant des répertoires d’adresses pour les femmes en difficulté devront être réalisés dans de
nombreux départements (associations d’aide aux femmes victimes de violences, centres
d’information des droits des femmes, travailleurs sociaux).
? Si la femme ne souhaite consulter personne, les numéros de téléphone des services ou
associations susceptibles d’être joints lorsque le besoin s’en fera sentir, pourront utilement lui
être remis.
Conférence Le cadre légal de la violence basée sur le genre. Ce que dit la législation
marocaine :
? En matière civile (le couple, les enfants mineurs, le logement etc)
? En matière pénale.
Objectif Familiariser les participants avec les principaux textes législatifs nationaux en
vigueur relatifs à la violence basée sur le genre.
Méthode Un conférencier juriste sera invité à donner une conférence sur le sujet et des
documents de référence seront distribués.
Le pourcentage des femmes et des petites filles, victimes de violence sexuelle (viols et abus
sexuels) ayant déposé plainte durant l’année, par rapport à la population féminine totale.
Le pourcentage des hommes et des petits garçons, victimes de violence sexuelle (viols et abus
sexuels) ayant déposé plainte durant l’année, par rapport à la population masculine totale.
5. Indicateur des lésions non mortelles, y compris des séquelles psychologiques et sociales,
et des morts pour violence intra- familiales ou autres.
Pourcentage de femmes et de petites filles ayant gardé des séquelles suite à des violences au
sein de la famille, par rapport à la population féminine totale.
Pourcentage de femmes et de petites filles, mortes suite à des violences intra- familiales, par
rapport à la population féminine totale.
La liste des lois comportant des sanctions pénales spécifiques contre la violence conjugale, le
harcèlement sexuel, le viol et le commerce sexuel.
Nombre de femmes victimes de violences pendant une année, divisé par le nombre total de
femmes.
10. L’assistance physique et/ou psychologique aux femmes victimes de violence, dans les
services de santé.
Un coach efficace :
? établit une relation de confiance et de soutien
? prend soin de la personne coachée ou garde à l’esprit le développement
d’autrui
? écoute bien
? pose des questions pour clarifier ou mettre en lumière un but ou un défi.
Source : Transformer les managers en leaders : Guide pour l’amélioration des services de santé. Cambridge, MA : Management Sciences for
Health, 2006
Objectif
Grâce à cet exercice, les participants pourront s’entraîner à un petit entretien de coaching et
découvrir son utilité pour améliorer la relation d’aide. Utilisez- le pour des équipes qui
travaillent sur un défi et qui ont besoin d’améliorer leurs compétences de coaching afin de
maintenir l’efficacité de l’action.
Processus
Préparation
? Prévoyez des photocopies de la fiche :
-Principes de coaching (1er Document) en nombre suffisant pour tous les participants.
En séance plénière, avec un autre facilitateur (ou avec un participant prévenu), menez un
deuxième jeu de rôle illustrant la situation suivante :
Deuxième scène : Le superviseur coache le membre du personnel.
? Le coach salue le membre du personnel et lui demande sa vision de la situation.
? Le coach pose ensuite des questions pour essayer de comprendre :
- ce que le membre du personnel cherche à réaliser
- les actions qu’elle a entreprises
- ce qu’elle juge nécessaire de faire ensuite.
? Le coach reste dans un mode de « questionnement » et pose des questions sans
proposer de solutions.
? Le coach donne au membre du personnel la possibilité de réfléchir à ses problèmes et
lui offre un soutien en essayant de comprendre sa vision du problème.
Discutez du jeu de rôle. Demandez :
- Que ressent le membre du personnel à présent ?
- A-t-elle pu élaborer des solutions ?
- Est-elle susceptible d’être plus motivée pour atteindre ses objectifs ?
Distribuez le 1er Document : Principes de coaching et passez en revue les principes à la
lumière des jeux de rôle.
Étape 4. Pratiquer un coaching efficace
Distribuez le 2e Document : Exercice de coaching à 3 et répartissez les participants en groupes
de trois.
Lisez les instructions et le rôle de l’exercice de coaching pour chaque personne.
Étape 5. Présenter à tous les expériences
En séance plénière, demandez aux participants de présenter leurs expériences au groupe au
complet :
- Écoutez ce que les observateurs ont vu.
- Passez en revue les expériences de ceux qui étaient coachés : ce qui était bien et ce qui
aurait pu être mieux.
- Puis passez en revue les expériences de coaching : ce qui était facile et ce qui était
difficile.
Évoquez les défis à relever pour être coach et aidez les participants à identifier les points qu’ils
doivent travailler pour être de meilleurs coachs.
104
Le coach a-t- il été encourageant ?
- A-t-il bien écouté ?
- A-t-il posé des questions pour aider le membre du personnel à réfléchir
aux problèmes ?
- A-t-il évité de donner des solutions ?
- La personne coachée est-elle plus motivée après son intervention ?
Source : Transformer les managers en leaders : Guide pour l’amélioration des services de santé. Cambridge, MA : Management Sciences
for Health, 2006
105
Annexe 5. Améliorer l’aptitude au coaching : La check-list ODÉFA
objectif
ODÉFA – qui signifie : Observer, Demander, Écouter, donner le Feed-back et mettre d’Accord –
est une technique destinée au personne l qui coache. Utilisez cette check- list avant ou après une
session de coaching. Elle peut également être utilisée pour préparer un coaching, comme mémo
des éléments clés auxquels il est nécessaire de faire attention. Il vous permettra également de
déterminer vos compétences de coaching à améliorer.
processus
Pour utiliser la check- list ODÉFA, étudiez les éléments et questions de chaque étape et cochez la
colonne appropriée (oui ou non).
106
Check-list ODÉFA
Source : Transformer les managers en leaders : Guide pour l’amélioration des services de santé. Cambridge, MA : Management Sciences
for Health, 2006
107
Annexe 5. Poème.
108
BIBLIOGRAPHIE
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l’Europe. stratégie de lutte contre les diverses formes de cette violence dans les
Etats membres du Conseil de l’Europe. Strasbourg 1991
FNUAP Comment aborder en pratique la violence contre les femmes : guide pour
l’élaboration des programmes à l’intention des praticiens et gestionnaires
de santé. FNUAP. New York. 2002.
Garcia Ada Les violences sexuelles à l’égard des femmes : éléments pour une
stratégie de lutte contre les diverses formes de cette violence dans les
Etats membres du Conseil de l’Europe. Conseil de l’Europe, le Comité
Européen pour l’égalité entre les femmes et les hommes. Strasbourg.
1991.
Hirigoyen Marie- Femmes sous emprise : les ressorts de la violence dans le couple. Oh !
France Editions. 2005.
Nations Unies Etude approfondie de toutes les formes de violence à l’égard des femmes.
Rapport du Secrétaire général. A/61/122/Add.1. New York. 6 Juillet
2006.
109
ONFP Le counselling dans la santé reproductive. Office National de la Famille
et de la Population. Tunis. 1997.
Réseau National Les violences basées sur le genre au Maroc : Rapport initial. Réseau
des Centres National des Centres d’Ecoute des Femmes Victimes de Violences.
d’Ecoute des Rabat. 2006.
Femmes
Victimes de
Violences
Service des Les femmes victimes de violences conjugales : le rôle des intervenants
Droits des sociaux. Brochure réalisée par le Service des Droits des Femmes du
Femmes Ministère du Travail et des Affaires Sociales Français. Paris. 1995.
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