DALHATOU 2014 Archivage PDF
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THÈSE
Pour obtenir le grade de
et de
Présentée par
Sadou DALHATOU
Thèse dirigée par Stéphane BAUP
Codirigée par Samuel LAMINSI et Christian PETRIER
M. Daniel NJOPWOUO
Professeur, Université de Yaoundé I, Président du jury
M. Dominique WOLBERT
Professeur, Ecole Nationale Supérieure de Chimie Rennes, Rapporteur
M. Martin-Benoît NGASSOUM
Maitre de Conférences HDR, Université de N’Gaoundéré, Rapporteur
M. Nicolas GONDREXON
Professeur, Université Grenoble Alpes, LRP, Examinateur
M. Samuel LAMINSI
Maitre de Conférences, Université de Yaoundé I, LCM, Co-directeur
M. Stéphane BAUP
Maitre de Conférences HDR, Université Grenoble Alpes, LRP, Directeur
À ma mère Adda Bano Balkissa
À titre posthume :
……………….
REMERCIEMENTS
Je tiens tout d'abord rendre à grâce à Allah Le Tout Puissant pour ses bénédictions, sa
miséricorde et la force qu'il m'a donné tout au long de ces années.
Je pense à mes directeurs de thèse dont l’apport à cette thèse est inestimable. Je vais
m’adresser notamment :
A M. Stéphane BAUP à qui j’aimerais exprimer du fond de mon cœur ma gratitude.
Dans la réalisation de cette thèse, il m’a laissé une certaine autonomie qui justifie la confiance
qu’il m’a apportée. Tout cela m’a permis d’acquérir et de développer une certaine maturité
scientifique dont je lui suis profondément reconnaissant. Nos nombreuses discussions
scientifiques mais également culturelles resteront des moments forts de ces 3 années passées
ensemble. C’était un très grand plaisir de travailler avec vous. Stéphane, une fois de plus
merci !
A M. Samuel LAMINSI, je tiens à le remercier pour sa disponibilité, ses conseils et
ses connaissances scientifiques qui m’ont facilité la réalisation et l’aboutissement de cette
thèse.
A M. Christian PETRIER, je souhaiterais lui exprimer toute ma reconnaissance pour
m’avoir fait confiance, pour m’avoir donné l’opportunité de faire une thèse dans le domaine
de la sonochimie. Sa disponibilité, son esprit critique, sa rigueur, son souci de bien faire, son
savoir profond et sa grande expérience dans le domaine des ultrasons m’ont été très
profitables.
Je pense aux différents responsables qui m’ont accueilli dans leurs laboratoires notamment :
au Pr Ricardo NOGUEIRA directeur du LEPMI, au Pr Samuel LAMINSI chef du LCM. au Pr
Nadia EL KISSI directrice du Laboratoire de Rhéologie et Procédés (LRP) où une partie des
expériences a été réalisée. Je tiens à les remercier vivement.
Je pense aussi à ceux là qui ont accepté de juger ce travail. Je vais m’adresser :
A M. Daniel NJOPWOUO, qui me fait l’honneur de juger ce travail malgré ses
multiples occupations. A M. Dominique WOLBERT, qui a accepté d’examiner ce travail
malgré ses nombreuses charges. A M. Martin Benoît NGASSOUM, qui a accepté être
rapporteur de ce travail en dépit de ses diverses tâches. Je tiens à vous exprimer toute ma
gratitude.
Au Pr Nicolas GONDREXON, sans le savoir chaque matin qu’il me saluait et me
demandait si ça allait, il injectait en moi une dose d’encouragement et d’énergie, s’il existait
en français un mot plus fort que merci, alors c’est celui là que je lui aurais adressé.
Je pense également à d’autres personnes qui ont été d’un grand apport à ce travail, il s’agit
de :
Au LEPMI, mon ami Ahmadou Thiam qui m’a hébergé pendant deux mois, j’ai passé
ensemble des moments inoubliables ; Stella qui a été toujours là pour m’encourager, sa
disponibilité permanente ; Julien Lemaire avec qui j’ai eu des discussions chaudes en
cinétique chimique qui m’ont été très profitables ; Mathieu Legay qui m’a tenu par la main à
mon arrivée au LEPMI. Merci Mathieu pour m’avoir facilité l’intégration. Houssem Ben Atti,
je ne suis pas prêt à oublier les renseignements et les conseils très précieux que tu m’as
prodigué, chaque fois que tu auras besoin d’un coiffeur pour te couper les cheveux, ne te
prends pas la tête je suis à ta disposition. Les autres thésards du LEPMI et surtout ceux de
l’équipe ELSA (Olésia, Marco, Lucas, Sébastien, etc…) merci pour les barbecues et les
tournois du labo, je me suis bien éclaté ; les personnels administratifs (Augustine, Linda,
Claire, Emilie, etc…). Enfin, PX Thivel qui m’a permis de m’épanouir pendant la rédaction
en acceptant de partager son bureau. A tous je souhaite vous remercier infiniment.
AU LRP, Loïc Cheze, Dr Saïdou Clément, Yao Jin, Claudine et tous les autres
thésards avec qui je n’ai passé que deux mois mais ont été les plus chauds de mes trois années
de thèse. Sincèrement j’ai beaucoup apprécié l’ambiance qui s’y passe. Merci !
Au LCM, Dr. George Kamgang, Dr. Iya-sou Djakaou, Elie Acayanka, Patrick
Mountapbeme et tout le reste de doctorants dont la liste n’est pas exhaustive.
A tous les enseignants du Département de Chimie Inorganique, vos conseils et vos
encouragements m’ont permis de garder le cap. J’aimerais vous remercier sincèrement.
Au Dr. Gaston Payom que j’aimerais remercier et lui souhaiter une retraite paisible.
A mes amis Serge Djepang, Souleymanou Abbagari, Hassana sani, El Hadj Deme.
Merci !
A mon proviseur et mes collègues du Lycée de Kakataré Maroua, permettez-moi de
vous remercier pour votre soutien indéfectible.
A mes frères et sœurs, Hadjdja Djeinabou, El Hadj Mohamadou, Ahmadou, Dr.
Hamidou, Mahmoudou, Asta Barka, Dr. Saïdou, Oumarou et Djeilani, trouvez ici le fruit de
vos soutiens et vos encouragements constants. Je voulais du fond de moi vous dire merci.
A ma fiancée Fadimatou Hassan pour son amour et ses encouragements réguliers ; ce
travail est le résultat de ta patience. Merci !
A toute ma famille et à tous ceux dont je n’ai pas cité leur nom ici mais qui de près ou
de loin ont participé à l’élaboration de cette thèse. Je vous adresse pour finir mes plus
profonds remerciements.
SOMMAIRE
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE……………………………………………………… 19
Introduction……………………………………………………………………………. 23
1ère PARTIE :
POLLUTION DE L’EAU : MOLECULES ORGANIQUES DE L'ETUDE
I.1. COLORANTS……………………………………………………………………... 24
I.1.1. Définition et domaines d’application des colorants………………………… 24
I.1.2. Classification des colorants………………………………………………… 25
I.1.3. Colorants azoïques…………………………………………………………. 26
I.1.4. Naphtol Blue Black (NBB)………………………………………………….. 27
I.2. TENSIOACTIFS …………………………………………………………...……... 28
I.2.1. Définition et applications des tensioactifs…………………………………… 28
I.2.2. Classification des tensioactifs……………………………………………….. 29
I.2.3. Alkylphénols (AP)…………………………………………………………… 29
I.2.4. Nonylphénol (NP)…………………………………………………………… 30
I.3. RECONSTITUTION DE LA MATRICE : MELANGE DES POLLUANTS.... 33
I.3.1. Interaction entre le NBB et NP……………………………………………… 33
I.3.2. Complexité du milieu………………………………………………………... 34
2nde PARTIE :
TECHNIQUES DE TRAITEMENT DES EAUX RESIDUAIRES
Introduction…………………………………………………………………………….. 69
II.1. PRODUITS CHIMIQUES…………………………………………..…………… 69
II.1.1. Réactifs, solvants et éluant…………………………………………………. 69
II.1.2. Propriétés physico-chimiques de molécules de l’étude …………………… 70
II.2. MATERIEL………………………………………..…………………..………… 70
II.2.1. Dispositif ultrasonore……………………………………………………… 71
II.2.2. Dispositif des ultraviolets………………………………………………….. 72
II.3. CARACTERISATION DU REACTEUR SONOCHIMIQUE………………... 74
II.3.1. Puissance acoustique………………………………………………………... 74
II.3.2. Mesure des effets chimiques………………………………………………... 75
II.4. PROTOCOLES EXPERIMENTAUX………………………………………...... 76
II.4.1. Préparation des solutions…………………………………………………… 76
II.4.2. Courbes d’étalonnages……………………………………………………… 77
II.4.3. Procédé photo-fenton……………………………………………………….. 79
II.5. METHODES D’ANALYSE……………………………………………………… 79
II.5.1. Analyse chromatographique par HPLC…………………………………… 79
II.5.2. Analyse spectrophométrique UV-visible…………………………………… 80
II.5.3. Mesure du Carbone Organique Total (COT)………………………………. 83
Conclusion……………………………………………………………………………… 85
1ère PARTIE
SONOCHIMIE : CARACTERISATION DU REACTEUR ET DEGRADATION DE DEUX
XENOBIOTIQUES ORGANIQUES
Introduction……………………………………………………………………………. 87
III.1. CARACTERISATION DU REACTEUR……………………………………… 88
III.1.1. Calorimétrie………………………………………………………………... 88
III.1.2. Dosimétries sonochimiques………………………………………………... 89
III.1.3. Effet de puissance sur l’oxydation de KI…………………………………. 97
III.1.4. Effet de concentration sur l’oxydation de KI……………………………… 99
III.1.5. Effet du molybdate sur l’oxydation de KI (mesure ex-situ) ………………. 100
III.2. DEGRADATION SONOCHIMIQUE DU NAPHTOL BLUE BLACK…….. 102
III.2.1. Cinétiques de décoloration sonochimique du NBB………………………... 102
III.2.2. Effet de la puissance ………………………………………………………. 105
III.2.3. Effet de pH sur la sonodégradation du NBB………………………………. 107
III.2.4. Taux d’utilisation de H2O2 par NBB………………………………………. 111
III.2.5. Effet des ions inorganiques à forte et à faible concentration du NBB…….. 114
III.2.6. Minéralisation de NBB…………………………………………………….. 126
III.3. DEGRADATION SONOCHIMIQUE DU NONYLPHENOL……………….. 128
III.3.1. Cinétique de dégradation sonochimique du NP…………………………… 128
III.3.2. Effet de la puissance……………………………………………………….. 132
III.3.3. Effet de pH à forte et à faible concentration du NP………………………... 133
III.3.4. Effet des ions inorganiques sur la sonodégradation du NP………………... 135
III.3.5. Taux d’utilisation du peroxyde d’hydrogène………………………………. 136
III.4. DEGRADATION SONOCHIMIQUE DU MELANGE NBB/NP……………. 139
III.4.1. Dégradation sonochimique du NBB dans le mélange…………………….. 139
III.4.2. Dégradation sonochimique du NP dans le mélange………………………. 142
-
III.4.3. Effet des HCO3 sur la sonodégradation du mélange……………………... 143
III.4.4. Effet comparatif des HCO3- sur la sonodégradation du NBB et NP……… 144
Conclusion……………………………………………………………………………… 146
2nde PARTIE
PHOTOCHIMIE : DEGRADATION DE DEUX XENOBIOTIQUES ORGANIQUES ET
COMPARAISON AVEC LES POA
Introduction……………………………………………………………………………. 149
III.5. DEGRADATION PHOTOCHIMIQUE DE DEUX XENOBIOTIQUES........ 150
III.5.1. Cinétique de photodégradation du NBB…………………….…………….. 150
III.5.2. Cinétique de photodégradation du NP…………………………………….. 155
III.5.3. Cinétique de photodégradation dans le mélange………………………….. 161
III.6. ETUDE COMPARATIVE DE PROCEDE SONO ET PHOTOCHIMIQUE 165
III.6.1. Effet du pH………………………………………………………………... 165
III.6.2. Cinétique de dégradation………………………………………………….. 166
III.6.3. Effet des ions bicarbonates……………………………………………….. 167
III.6.4. Effet du mélange………….……………………………………………….. 168
III.6.5. Minéralisation …………………………………………………………….. 168
III.7. ETUDE COMPARATIVE DES PROCEDES D’OXYDATION AVANCEE 171
III.7.1. Cinétique de dégradation du NBB………………………………………… 171
III.7.2. Cinétique de dégradation du NP…………………………...……………… 173
Conclusion……………………………………………………………………………… 175
Chapitre I Pages
Figure 1 : Mécanisme de biodégradation des APEOs…………………………….. 30
Figure 2 : Modèle cinétique pour prédire les constantes de vitesse des HO• …….. 39
Figure 3 : Réactions de péroxonation……………………………………………... 41
Figure 4 : Réactions de photofenton……………………………………………… 43
Figure 5 : Mécanisme de formation d’une paire électron-trou par photo-excitation
du semi-conducteur TiO2 en présence d’un polluant aqueux (P)………. 44
Figure 6 : Domaines des spectres électromagnétiques de la lumière et du
rayonnement UV……………………………………………………… 45
Figure 7 : Classification et utilisations des ultrasons……………………………… 50
Figure 8 : Déplacement d’une onde sonore……………………………………….. 51
Figure 9 : Schéma d’un bac à ultrasons…………………………………………… 53
Figure 10 : Montage d’une sonde ultrasonore……………………………………… 54
Figure 11 : Effets induits par ultrasons……………………………………………... 55
Figure 12 : Evolution d’une bulle de cavitation……………………………………. 56
Figure 13 : Bulle de cavitation : zones réactionnelles et réactions de dégradation
des polluants…………………………………..………………………... 60
Figure 14 : Mécanisme d’attaque des radicaux HO• sur le noyau aromatique ou
hétérocyclique... ……………………………………………………….. 66
Chapitre II
Figure 15 : Dispositif de production ultrasonore…………………………………… 71
Figure 16 : Dispositif de production ultrasonore …………………………………... 72
Figure 17 : Réacteur sonochimique………………………………………………… 72
Figure 18 : Lampe UV à basse pression de vapeur de mercure (254 nm) ………… 72
Figure 19 : Distribution spectrale relative caractéristique de la lampe à vapeur de
mercure à basse pression Pen-ray Lamps……………………………… 73
Figure 20 : Schéma du réacteur photochimique…………………………………… 73
Figure 21 : Dispositif de production des UV……………………………………… 74
Figure 22 : Effet du méthanol sur la sonodégradation du NP (8,1µM), (f : 278
kHz, P : 100W, V: 400 mL, T : 20 ±1 °C.)…………………………… 76
Figure 23 : Courbe d’étalonnage du NBB………………………………………… 77
Figure 24 : Courbe d’étalonnage du NP…………………………………………… 78
Figure 25 : Spectrophotomètre UV-visible Shimadzu UV mini 1240…………….. 81
Figure 26 : Formation des ions tri-iodures caractérisés par la coloration jaune……. 82
Figure 27 : Spectres d’absorption des ions I3– (λmax = 350 nm) et du NBB (λmax =
618 nm), (f : 278 kHz, P : 100W, V: 400 mL, T : 20 ±1 °C)………… 83
Figure 28 : COTmètre Shimadzu TOC-VCSN…………………………………… 85
Chapitre III
Chapitre I Pages
Tableau I : Types de colorants et leur structure principale selon la classification
chimique.……………………………………………………………… 26
Tableau II : Classification des tensioactifs en fonction de leur nature polaire…… 29
Tableau III : Comparaison des potentiels normaux d’oxydoréduction des
principaux oxydants utilisés dans le domaine du traitement des eaux... 37
Tableau IV : Régions du spectre électromagnétique UV, énergies correspondantes
et applications dans les PPOA……………………………………….. 45
Tableau V : Types de lampes utilisées et leurs caractéristiques………………….. 46
Chapitre II
Tableau VI : Produits chimiques utilisés au cours de cette étude…………………. 69
Tableau VII : Propriétés physico-chimiques de NBB……………………………… 70
Tableau VIII : Propriétés physico-chimiques de NP………………….…………….. 70
Tableau IX : Erreur de mesure sur la HPLC………………….…………………… 80
Chapitre III
Tableau X : Etude comparative de l’efficacité de quelques systèmes d’oxydation
de KI. (f : 278 kHz, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C)…………………… 98
Tableau XI : Effet de la concentration du molybdate sur l’oxydation de KI après
arrêt de l’irradiation (f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ±
1°C)………………………………………………………………….. 101
Tableau XII : Constante de vitesse de réaction en fonction de la concentration (f :
278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C)…………………... 103
Tableau XIII : Application de la cinétique de Serpone : Etude comparative……….. 119
-
Tableau XIV Effet comparatif des HCO3 sur la sonodégradation du NBB et NP
([CO32-] : 2,97 mM ; f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ±
1°C)………………………………………………………………….. 144
Tableau XV Constante de vitesse et demi-vie des différentes concentrations
initiales de NBB (V : 400 mL et T : 20 ± 1°C)……………………… 152
Tableau XVI Constante de vitesse et demi-vie des différentes concentrations
initiales de NP……………………………………………………… 159
Tableau XVII Taux de sonodégradation du NP par les POA………………………. 172
INTRODUCTION
GENERALE
Introduction générale
INTRODUCTION GÉNÉRALE
L’eau est abondamment utilisée dans l’environnement industriel pour des applications,
nombreuses et diverses. Lors de son utilisation dans des différentes étapes des procédés ou
lors du nettoyage de ces installations industrielles, l’eau se charge des contaminants. Ces
composés sont d’origines chimiques très diverses, sont plus ou moins polluants et/ou
toxiques, et sont ensuite déversés, directement ou indirectement, dans les milieux aquatiques
naturels. Du fait du recours fréquent aux réserves d’eaux souterraines ou des eaux
superficielles selon les caractéristiques régionales, ces polluants sont de plus en plus
consommées par les animaux ou les végétaux et s’accumulent dans la chaîne alimentaire
exposant les consommateurs en bout de chaîne, dont les humains, à des substances toxiques.
Ces dernières années, les politiques sont devenus progressivement plus rigoureux en
ce qui concerne la protection de l’environnement, imposant aux différents acteurs de la
consommation de cette ressource précieuse (agriculteurs, municipalités et industriels) des
normes et des législations de plus en plus contraignantes. Désormais le traitement des déchets
en général, et la dépollution des eaux usées en particulier, occupe un rang de choix de leurs
préoccupations. Par conséquent, cette pression environnementale politique, mais aussi sociale,
a poussé au développement de différentes technologies et filières de traitements des eaux, que
ce soit dans le domaine de l’alimentation en eau potable, de l’assainissement des eaux usées
urbaines ou de l’épuration des eaux résiduaires industrielles.
se révèlent peu efficaces face à certains types de pollutions (micropolluants émergents par
exemple). A ce titre, les techniques d’oxydation avancée, productrices de radicaux hydroxyles
HO• (puissant oxydant non sélectif E°H2O/OH• = 2,81 V/ENH) s’imposent comme une solution
alternative, située avant ou après les traitements conventionnels selon les configurations des
filières. Ce sont des techniques plus propres et très efficaces.
La gamme des procédés d’oxydation avancée est vaste et regroupe divers technologie :
certains technologies sont basées sur l’utilisation de l’ozone (ozonation simple, ozonation
assistée par la présence de peroxyde d’hydrogène, ozonation couplée au rayonnement
ultraviolet), ou sur l’utilisation des rayonnements ultraviolet (photolyse seule, photolyse
assistée par la présence de peroxyde d’hydrogène ou par l’ozone). D’autres techniques sont
basées sur l’utilisation du réactif de Fenton (simple Fenton, photo-Fenton, électro-Fenton), sur
l’utilisation de matériaux semi-conducteurs tels que le dioxyde de titane (TiO2), sur
l’utilisation d’ultrasons, sur l’utilisation de décharges plasma ou sur le bombardement
électronique.
Parmi ces différents procédés, nous nous sommes tout particulièrement intéressés à la
sonolyse et à la photolyse de micropolluants organiques. La dégradation de polluants par
utilisation d’ultrasons s’opère en propageant des ondes acoustiques dans la solution à traiter.
Il en résulte des bulles de cavitations qui naissent, croissent et implosent lorsqu’elles
atteignent leur taille critique. A l’intérieur de ces bulles, les conditions physiques sont
extrêmes (température de plusieurs milliers de Kelvins et pression de quelques centaines de
bars). Elles constituent le siège de nombreuses réactions chimiques qui conduisent à la
formation des espèces radicalaires très réactives. Ainsi, la dégradation des molécules
polluantes a lieu soit par pyrolyse (intérieur de la bulle), soit par attaques radicalaires (au
cœur de la solution), soit les deux à la fois (interface bulle/solution). Quant à la dégradation
de polluants par utilisation de rayonnement ultraviolet, elle consiste en l’irradiation de la cible
par une intensité lumineuse de longueur d’onde judicieusement choisie, afin que l’énergie des
photons puisse être absorbée dans le milieu, en particulier par les contaminants à dégrader,
induisant ainsi des phototransformations spécifiques.
20
Introduction générale
pour cette raison qu’il constituera notre préoccupation majeure dans le cadre de ce travail de
recherches.
L’objectif de cette étude est donc de montrer l’intérêt des techniques d’oxydation
avancée pour l’élimination de composés issus des effluents industriels (papeteries,
imprimerie, textiles, savonneries). Le « cocktail » qui en résulte implique une compétition,
d’une part entre micropolluants organiques, mais également du fait de la présence éventuelle
d’une matrice minérale. Dans ce contexte, notre choix des molécules modèles a porté sur deux
xénobiotiques organiques dont les propriétés physico-chimiques sont différentes :
Le Naphtol Blue Black, hydrophile et très soluble, est un colorant acide du type
azoïque, toxique, thermo et photo-stable. Il induit des effets néfastes à long
terme sur l’environnement aquatique.
Le présent mémoire est divisé en trois chapitres. Le premier chapitre est consacré à
une description des connaissances actuelles relatives aux colorants et aux alkylphénols, ainsi
qu’à leur impact sur l’environnement. Puis, une synthèse bibliographique des méthodes de
traitement des eaux, basée notamment sur les techniques d’oxydation avancée (TOA) est
présentée, avant de se focaliser sur les techniques de sonolyse et de photolyse.
21
Introduction générale
22
CHAPITRE 1 :
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE 1 :
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
LA POLLUTION DE L’EAU ET LES TECHNIQUES DE TRAITEMENT
Notre planète regorge d’une forte réserve en eau, mais seulement une faible fraction est
destinée à notre consommation. Depuis le siècle dernier, l’actualité est marquée par une révolution
industrielle de plus en plus galopante et par un boom démographique sans précédent. Ces facteurs
sont à l’origine d’une demande en eau plus croissante. Les industries et l’agriculture à elles seules
consomment plus de 90% de cette eau douce disponible. Il ne restera que moins de 10% pour les
besoins accrus des municipalités.
Dans l’optique de limiter l’arrivée de ces divers types de contaminants réfractaires dans
l’environnement, des stratégies de traitement efficaces et écologiques ont été développées. Parmi
ces stratégies se trouve l’application des procédés d’oxydation avancée (POA). Voila pourquoi ce
chapitre va être consacré à une présentation de l’état d’art sur cette thématique. Mais avant cette
présentation, il serait judicieux de faire préalablement un rappel sur les micropolluants et leurs
impacts sur l’environnement.
23
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
PARTIE I
POLLUTION DE L’EAU : MOLECULES ORGANIQUES DE L'ETUDE
Cette partie est dédiée la pollution des eaux contenant deux xénobiotiques, appartenant aux
colorants et aux tensioactifs. Il sera question de présenter leurs domaines d’utilisation, l’origine de
leur présence dans l’environnement, la menace qu’ils représentent pour l’écosystème et pour notre
santé. Enfin, nous montrerons la difficulté que peut présenter une matrice contenant plusieurs
composés.
I.1. Colorants
Depuis le premier matin du monde, les colorants ont fait l’objet d’utilisations diverses.
Avant la découverte de la mauvéine en 1956 par Perkin, les colorants appliqués jusque-là étaient
essentiellement d’origine naturelle. De nouveaux colorants synthétiques commencèrent alors à
paraître sur le marché, et ont presque complètement remplacé les colorants naturels. Aujourd’hui,
des nombreuses industries utilisent ces colorants pour de nombreux usages.
Un objet est vu coloré lorsqu’il reçoit toutes les composantes de la lumière blanche, les
absorbe et ne diffuse ou ne transmet qu’une seule. C’est cette composante diffusée ou transmise qui
donne à l’objet la couleur. Ainsi, les colorants sont constitués principalement de groupes
chromophores, auxochromes et de structures aromatiques conjuguées (cycles benzéniques,
anthracène, perylène, etc.).
24
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
formule chimique ; (ii) sa couleur et sa nuance ; (iii) sa résistance codifiée à la lumière, aux
solvants, à la chaleur, aux différents agents chimiques, (iv) ainsi qu’une description de ses
principaux domaines d’utilisation (Perrin and Scharft, 1999).
Les colorants sont largement utilisés dans l’industrie textile, les tanneries, l’industrie de
matières plastiques (pigments), l’industrie pharmaceutique (colorants), l’industrie agroalimentaire
(colorants alimentaires), les industries de fabrication de pâtes et papiers l’industrie des cosmétiques
et savonneries, (Rajgopalan, 1995 ; Routh, 1998 ; Ali and Sreekrishnan, 2001 ; Koplin et al., 1999–
2000). Ainsi, l’industrie textile reste la plus grande consommatrice de colorants.
Cependant, les colorants synthétiques sont appréciés principalement pour leur stabilité
chimique et photolytique, pour la facilité de leur synthèse et pour leur variété de couleurs. Ainsi, on
peut retrouver dans cette référence (Bizani et al., 2006) les principaux groupes chromophores et
auxochromes.
Ce principe de classification est basé sur la structure chimique des colorants (Swamy, 1998).
Suivant cette classification, nous avons répertorié dans le tableau ci-dessous (tableau I) les
différents types de colorants et leur structure principale.
25
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Tableau I.1. Types de colorants et leur structure principale selon la classification chimique
Azoïques N N
Phtalocyanines
Anthraquinoniques
O
H
O
Nitrés et nitrosés
OH
N
Indigoïdes
NO2
O
H
N(CH3 )3 Cl
O
xanthène Triphénylméthanes C
N(CH3)3 Cl
Cependant la seule propriété commune à tous les colorants de cette dernière classe est leur
capacité à absorber dans le visible. Enfin, une autre classification peut être considérée, mais repose
sur l’état physique du colorant : à l’état solide il prend le nom de pigment et à l’état liquide il
conserve le nom de colorant. Pour le souci de recherche, nous allons nous intéressés à cette dernière
classification qui se repose sur la structure chimique. Et particulièrement dans le cadre de cette
étude, nous nous focaliserons sur les colorants azoïques.
Ils sont caractérisés par la présence d’un groupement azo (-N=N-) unissant deux
groupements alkyles ou aryles identiques ou non (azoïque symétrique et dissymétrique
respectivement). Ces structures qui reposent généralement sur le squelette de l’azobenzène, sont des
systèmes aromatiques ou pseudo-aromatiques liés par un groupe chromophore azo. Actuellement
plus d’un million de tonnes de colorant est fabriqué chaque année dans le monde. Cependant, les
colorants azoïques à eux seuls représentent environ 70% de la totalité des colorants disponibles sur
le marché (Dos Santos et al., 2003). Ils peuvent être subdivisés en trois sous-classes en fonction du
nombre de liaison azo (–N=N–), en l’occurrence le monoazo, le diazo et le triazo. En plus, ils sont
obtenus par une réaction de diazotation suivi d’une réaction de condensation. Le colorant résultant
est un composé stable (Perrin and Scharft, 1999).
De façon générale, les industries qui utilisent couramment les colorants, les rejettent
directement dans les milieux récepteurs (sol et eau) après usage. Ainsi, les milieux aquatiques sont
les plus concernés car l’eau constitue le principal vecteur pour éliminer les impuretés. En plus, le
26
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
degré de fixation des colorants azoïques n’est pas complet, ce qui traduit leur présence régulière
dans les eaux usées (Pekakis et al., 2006).
Du fait de leur forte solubilité relative, les colorants synthétiques polluent l’eau et peuvent
être détectés sous forme de trace dans les eaux résiduaires. Leur présence dans les eaux, même en
faible quantité (< 1 ppm), est visible et indésirable (Robinson et al., 2001). Toutefois, le
déversement des eaux résiduaires contenant les colorants dans l’environnement est une source de
pollution considérable, d’eutrophisation et de perturbation non esthétique dans la vie aquatique et
peut engendrer par réaction chimique de nature diverse, des sous-produits souvent plus toxiques que
les composés parents (Saquib and Muneer, 2003). Dans ces conditions, la bioaccumulation de ces
polluants expose l’homme qui se trouve en bout de chaine alimentaire. Par ailleurs, cette
accumulation de couleur empêche la pénétration de la lumière et perturbe l’écosystème (Merzouk et
al., 2010). En plus, les eaux souterraines sont aussi affectées par lessivage du sol (Khaled et al.,
2009).
Plusieurs travaux de recherche sur la toxicité des colorants vis-à-vis des mammifères et
organismes aquatiques ont été effectués. Le caractère complexant de certains colorants les amènent
à séquestrer les ions métalliques provoquant la génotoxicité et la microtoxicité dans le milieu (Foo
and Hameed, 2010). La plupart des colorants azoïques ne sont initialement pas toxiques, excepté
ceux comportant le groupement amine libre (Brown and De Vito, 1993). Cependant, la réduction de
ces colorants (rupture de la liaison azoïque) génère la formation des amines aromatiques (1,4-
phénylènediamine, 1-amino 2-naphtol, benzidine et benzidine substitués comme o-toluidine) qui
sont connues pour leur caractères mutagènes et cancérigènes (Rosenkranz and Klopman, 1990).
Dans ce travail, c’est le Naphtol Blue Black qui fera essentiellement l’objet de nos investigations
pour les colorants.
Le Naphtol Blue Black (NBB) est un colorant acide appartenant à la famille des colorants
azoïques. C’est une molécule complexe constituée de plusieurs groupements fonctionnels (azo,
phénolique, aniline, naphtalène et sulfonates).
27
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
leur présence dans l’environnement par voie des eaux usées. En biochimie par exemple, c’est un
colorant organique très apprécié pour détecter les protéines (staining techniques) (Sapan et al.,
1999).
Lors de sa sixième session plénière le 23/3/2010, le Comité Européen pour la sécurité des
Consommateurs révèle que le NBB n’est ni mutagène, ni génotoxique (CESS, 2010). En plus il
n’existe aucune donnée dans la littérature sur sa cancérogénicité. Néanmoins, il reste une source de
pollution remarquable et ses produits de réduction génèrent des aromatiques mutagènes et
cancérigènes (Foo et Hameed, 2010 ; Rosenkranz et Klopman, 1990).
Toutefois, les effluents industriels ne contiennent généralement pas qu’un seul type de
polluant. Le plus souvent nous assistons à des effluents très complexes, sièges des contaminants
d’origines chimiques différentes. C’est pour cette raison que nous nous sommes intéressés à une
autre famille de polluants rejetés, notamment les tensioactifs.
I.2. Tensioactifs
Les tensioactifs sont désignés par plusieurs synonymes, notamment détergents, surfactants,
agents de surface etc… Ces désignations dépendent fortement de la profession où ils sont employés,
comme par exemple dans les savonneries où ils sont appelés détergents.
D’une manière générale, les tensioactifs sont définis comme étant des composés capables de
s’associer pour former des micelles, dans lesquelles les parties hydrophobes sont orientées vers
l’intérieur des agrégats et laissant la partie hydrophile face au milieu aqueux (Rosen and Kunjappu,
2004) . Ces composés forment des monocouches orientées à l’interface et montrent une forte
28
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
activité de surface. La formation des micelles est généralement considérée comme un compromis
entre la tendance des chaines alkyles à éviter énergétiquement le contact avec l’eau et le désir pour
la partie polaire à maintenir le contact avec l’environnement aqueux. Toutefois, les hydrocarbures et
l’eau ne sont pas miscibles et la limite de solubilité de l’espèce hydrophobe dans l’eau peut être
attribuée à l’effet hydrophobe (Schramm and Marangoni, 2000).
Du fait de leur remarquable capacité à influencer les propriétés de surface et d’interface, les
composés tensioactifs sont largement utilisés dans des nombreuses applications, qu'elles soient
industrielles, agricoles ou même domestiques. En fonction de la nature de leur partie polaire
hydrophile, les tensioactifs sont classés en plusieurs catégories.
On distingue quatre classes de tensioactifs que nous avons répertoriées dans le tableau II.
Tableau II. Classification des tensioactifs en fonction de la nature de leur partie polaire
Le terme alkylphénols (AP) désigne un type de tensioactifs obtenus par alkylation du phénol
en présence d'alcènes. Ils sont fabriqués en quantités énormes et constituent un intermédiaire
principal dans la fabrication des résines phénoliques et des tensioactifs appelés Alkylphénol
éthoxylés (APEOs). On note leur présence dans les détergents, les cosmétiques, les adjuvants de
formulation de pesticides, les peintures, additifs de désencrage (industrie papetière), les matières
29
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
plastiques, les produits de nettoyage et une large gamme de produits industriels (Naylor, 1995).
Outre leur utilisation pour produire des résines alkylphénoliques, les alkylphénols se trouvent aussi
dans les pneus, adhésifs, revêtements, papier carbone et caoutchoucs haute performance.
En effet, ils sont biodégradés par un mécanisme impliquant la perte graduelle de groupes
éthoxy pour donner l'AP et leurs homologues les alkylphénols mono et diéthoxylés (AP1EO,
AP2EO) et mono et dicarboxylés (AP1EC, AP2EC) (Ying et al., 2002) tel qu’on peut l’apercevoir
sur la figure 1.
Biodégradation
aérobique/anaérobique
Bien que les APEOs parents ne soient pas classés comme des substances hautement
toxiques, ils représentent une classe de composés d'intérêt environnemental élevé en raison de
l’omniprésence dans l'environnement, de la nature persistante, et de la lipophilie des produits
métaboliques (AP, APECS) générées au cours du traitement des eaux usées (Petrovic et al., 2001).
Cependant, les propriétés physico-chimiques de ces métabolites et en particulier leurs coefficients
30
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
de partage octanol-eau (log KOW) compris entre 4,10 et 4,48 indiquent qu'ils ont tendance à
s'accumuler dans les organismes aquatiques (Ying et al., 2002 ; EC, 2003). En outre, les APEOs et
AP ont été détectés fréquemment dans les eaux de surface à des concentrations de l’ordre du µg/L
avec des pics allant jusqu'à 644 µg/L (Ying et al., 2002).
Ces composés sont connus pour leur toxicité très élevée vis-à-vis de la faune aquatique et
présentent également une activité œstrogénique à des concentrations de quelques µg/L (Gray et al.,
1999 ; Yokota et al., 2001). Les AP, de par leur structure chimique, peuvent se fixer, par
compétition avec l’œstrogène, sur les récepteurs oestrogénique (Ying et al., 2002) Ceci entraîne
notamment une induction de la vitellogenine altérant le métabolisme stéroïdien et la croissance
testiculaire (Jobling et al., 1996). Des travaux récents ont soulevé des préoccupations relevant
directement de la santé humaine. Par exemple, Chitra et al. (2002) et Adeoya-Osiguwa et al. (2003)
ont décrit des effets sur les fonctions du sperme chez les mammifères, tandis que de récents
documents citent également une détérioration de l’ADN dans les lymphocytes humains (Harreus et
al., 2002).
De même, des effets directs du NP sur la structure et les fonctions de l’ADN dans la larve de
bernacle ont été décrits (Atienzar, 2002). Ce mécanisme pourrait être responsable des effets de
perturbation hormonale observés dans l’ensemble des organismes vivants. En suite, des nombreuses
études ont confirmé qu’ils peuvent imiter les hormones endogènes. De surcroit, les expériences
menées in vitro et in vivo ont démontré que l'effet oestrogénique des alkylphénols est de l’ordre de
grandeur de 4 à 6 plus faible que celle de l’endogène 17 β-estradiol (Jobling et al. 1996).
De manière générale, le 4-nonylphénol et le 4-tert-octylphénol sont les principaux AP
produits et commercialisés sous forme de dérivés. Le NP à lui seul représente plus 80% de la
production des AP.
Nonylphénol (NP) est le terme utilisé pour désigner un groupe d’isomères composés chacun
d’une chaîne alkyle de 9 carbones liée à un groupement phénol. Le plus représenté est le 4-NP.
La plus grande partie des nonylphénols est utilisée pour produire des éthoxylates de
nonylphénols (NPEOs), également appelés Nonylphénols éthoxylés, qui sont ensuite incorporés
dans des formulations. Ils ont un très vaste éventail d’utilisation dans l’industrie, en tant que
surfactants, détergents, agents mouillants, dispersants, antimousses, produits de désencrage et
agents anti-statiques. Dans les produits de consommation courante, ils sont présents dans les savons
31
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Ainsi, les travaux révélant la détection et l’effet des Nonylphénols éthoxylés et de ses
métabolites dans l’écosystème abondent dans la littérature (Ferrara et al., 2001 ; Tsuda et al., 2001).
Récemment, il a été montré que les produits de la biodégradation du NPEOs présentent non
seulement des propriétés de perturbateurs endocriniens, mais également des effets graves
impliquant la féminisation et la cancérogenèse d’une variété d’organismes vivants (White et al.,
1994 ; Sonnenschein et Soto, 1998 ; Sumpter, 1998). De même, des dépisteurs d’activité
œstrogénique, comme la vitellogénine et les protéines de la zone pellucide, ont été observés chez
les poissons exposés au NP (Arukwe et al., 2000 ; Korsgaard et Pedersen, 1998). D’autres preuves
d’une perturbation endocrinienne, comme des indices de réduction gonadosomatique, des effets
histologiques sur la structure testiculaire, des effets sur la smoltification et des cas d’intersexualité,
ont aussi été observées (Madsen et al., 1997 ; Christiansen et al., 1998 ; Matcalfe et al., 2001).
Ainsi, ces effets néfastes sur l’environnement et par conséquent sur les êtres vivants ont poussé les
législateurs à réglementer leur utilisation.
le papier, les pesticides, les usinages des métaux) par l’Union Européenne depuis 2003 (Directive
2003/53/CE). Cette loi existait déjà au Canada et sa mise sur pied est en cours aux Etats Unis. En
France, par exemple, cette loi a porté ses fruits ces dernières années avec une réduction d’usage
d’environ 50%, mais le véritable problème est que le rejet reste très dispersé dans l’écosystème.
Nous avons cité plus haut les domaines d’applications du NBB et NP, il en ressort que les
deux composés sont conjointement utilisés dans certaines professions telles que les industries
textiles, de pates et papiers, les tanneries et les savonneries. L’association colorant-tensioactif est
très importante dans divers processus de coloration (industries textiles, tanneries, savonneries etc…)
(Yang, 2004 ; Bilski et al., 1997; Karmakar, 2001). Cependant leur élimination simultanée est très
difficile et leur séparation avant traitement s’avère très laborieuse et très coûteuse.
33
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
34
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
PARTIE II
TECHNIQUES DE TRAITEMENT DES EAUX RESIDUAIRES
La faible disponibilité de l’eau douce, la prise de conscience des menaces et des
conséquences causées par la croissance démographique, accompagnées de l’intensification des
activités industrielles, de l’accroissement de l’utilisation des composés organiques de synthèses et
du lancement de nouveaux produits consommables (les colorants, les détergents, les pesticides, les
matières plastiques,…) ont poussé les collectivités à agir pour préserver et protéger
l’environnement. Ainsi, pour tenter de retrouver le confort existant ou d'améliorer la qualité de vie,
tous les regards ont convergés vers les scientifiques de l’environnement dont le principal défi est de
mettre sur pied des méthodes de dépollution plus efficaces et plus adaptées. Les premières qui ont
vu le jour sont les techniques dites conventionnelles.
En fonction de leur principe d’élimination des composés, ces techniques peuvent être
classées en trois principales familles : les procédés physiques, les procédés biologiques et les
procédés physico-chimiques.
Dans le domaine de traitement des eaux ou d’élimination des polluants, plusieurs procédés
physiques sont largement employés. Ces procédés sont basés sur la séparation d’un ou plusieurs
composés de l’effluent et sont le plus souvent utilisés en tant que pré ou post-traitement. Il est à
noter que dans cette séparation, le polluant passe d’une phase à une autre phase. Ces procédés
incluent : l’adsorption (Baup et al. 2000 ; Gamby et al., 2001 ; Namasivayam et Kavitha, 2004) ; la
filtration sur membrane (Chang et Kim, 2005) et le stripping (Tsai et al., 1981 ; Huang et Shang,
2006). Malheureusement, on assiste ici à un simple transfert des micropolluants contenus dans les
eaux à traiter.
Ces procédés mettent à profit l'activité de certaines bactéries afin d'éliminer les polluants des
eaux résiduaires. Ces microorganismes ne seront capables de dégrader les polluants organiques en
composés moins toxiques ou de les minéraliser que lorsque ces molécules présentent un minimum
de biodégradabilité et une faible toxicité. Les procédés biologiques diffèrent en fonction de la
présence (aérobie) ou de l’absence (anaérobie) de l’oxygène. Le procédé le plus courant utilise les
boues activées. Ce procédé est limité par le coût élevé de traitement de boue et son inefficacité vis-
à-vis des effluents concentrés ou contenant des substances bio-résistantes.
35
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Il existe plusieurs procédés chimiques qui sont appliqués dans le traitement des eaux usées.
Ces procédés peuvent à priori être classés en deux catégories :
• Les procédés basés sur des réactions physicochimiques telles que la coagulation
(Verma et al., 2012 ; Hao et al., 2000 ; Ciabatti et al., 2010), la précipitation et la complexation
(Dhankhar et Hooda, 2011 ; Poerschmann et al., 2008).
• Les procédés basés sur des réactions chimiques notamment la chloration (Darnall,
1911 ; Kim et al., 2003), l’ozonation (Rice, 1996 ; Xu et al., 2002) et l’incinération (Knox, 2000).
Afin d’améliorer les systèmes existants de traitement des eaux usées municipales et
industrielles, ou de remplacer les technologies conventionnelles peu efficaces pour l'élimination de
contaminants organiques réfractaires, inorganiques et microbiens, les scientifiques se sont intéressés
aux POA qui ont vu le jour vers les années 1970. Actuellement, ces procédés sont en pleine
expansion dans le domaine des technologies environnementales. La plupart d’entre eux nécessitent
en général moins de réactif et sont faciles d’automatisation par comparaison aux autres. De
nombreuses études réalisées à l’échelle du laboratoire ont clairement prouvé l’efficacité des POA
pour le traitement de divers effluents.
I.5.1. Définition
Les principaux radicaux produits et mis en œuvre par les POA sont les HO•, HO2• et O2-•.
Leur mécanisme de formation est spécifique à chaque procédé. Cependant le plus intéressant de ces
36
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
radicaux reste le radical hydroxyle HO• qui est un puissant oxydant non sélectif possédant un très
fort potentiel standard (E°HO•/H2O = 2,81 V/ENH) comme en atteste le tableau III. Il est notamment
capable d'oxyder pratiquement tous les composés organiques et inorganiques existants et de
désactiver les bactéries, ceci à des vitesses approchant la limite du contrôle des réactions par
diffusion (1010 M-1.s-1) (Buxton et al., 1988).
Tableau III. Comparaison des potentiels normaux d’oxydoréduction des principaux oxydants
utilisés dans le domaine du traitement des eaux (Doré, 1989).
Par contre en milieu acide, il subit principalement trois types de réaction par attaque
électrophile (Legrini et al., 1993) :
37
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
La réactivité du radical hydroxyle est tributaire de la nature du composé avec lequel il réagit.
Son comportement vis-à-vis des composés organiques est tel qu’il :
1. réagit plus rapidement avec les composés insaturés (éthyléniques et aromatiques) qu’avec
les composés aliphatiques. Il est à noter que la forte régiosélectivité de la réaction d’addition des
HO• peut donner lieu à la transition de п- à б-complexe (Ashton et al., 1995),
2. présente une assez faible réactivité avec les composés aliphatiques tels que les acides
organiques (carboxyliques), qui sont des sous-produits d’oxydation,
3. réagit plus rapidement avec les composés organiques que l’ozone moléculaire et sa vitesse
de réaction avec les aromatiques porteurs de groupements activant (-OH, -NH2) est plus élevée
qu’avec ceux présentant des groupements désactivant (-NO2, -CO2H),
4. réagit plus vite avec les aromatiques monosubstitués que les polysubstitués à l’instar du
phénol ou du chlorobenzène.
Par ailleurs, le temps de demi-vie des radicaux HO• est estimé inférieur à 70 ns dans l’eau et
le rayon de diffusion à environ 20 Ǻ (Haugland, 1996). Cette faible durée de vie le rend très peu
disponible et par conséquent, sa détection est rendue plus difficile. Néanmoins, les seules
possibilités qui prévalent concernent sa détection par l’identification du produit par la Méthode de
Compétition (MC) avec un inhibiteur adéquat (Haag and Yao, 1992). Il en découle plusieurs
méthodes de détection en milieu aqueux, soit indirectement par hydroxylation aromatique (acide
téréphtalate, acide salicylique, phénylalanine, chlorobenzene, nitro-benzène, 4-nitrobenzoate (ion),
acide benzoïque, acétophenone, pCBA (acide para-chlorobenzoïque), DMPO (5,5-
dimethylpyrroline-N-oxide) 2-propanol, et accelerine (N,N-dimethyl-4-nitroso-benzenamine),
etc…), soit directement par piégeage des spins ou par spectroscopie RPE (Résonance
Paramagnétique Electronique) (Janzen et al., 1971).
D’un autre côté, le peroxyde d’hydrogène issu de la recombinaison des radicaux hydroxyles,
est moins réactif et plus stable. Il est d’ailleurs considéré comme précurseur de ces radicaux et mis à
profit dans certaines dosimétries pour détecter les HO•. En plus, plusieurs travaux de recherche
menés sur la réactivité des radicaux HO• ont permis d’établir leur constante de vitesse avec des
nombreux composés organiques et inorganiques (Buxton et al., 1988). Toutefois, il est bien évident
que lorsque les conditions de travail ne sont pas les mêmes (par exemple les dispositifs
expérimentaux, l’approvisionnement des réactifs, les méthodes d’analyses chimiques ou les effets
de la matrice), des constantes de vitesse différentes sont susceptibles d’être obtenues pour un même
composé.
38
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Depuis peu, pour évaluer la performance des POA, des modèles cinétiques sont établis à partir
des différentes équations mathématiques. Il peut s’agir soit de méthodes numériques pour résoudre
des équations différentielles ordinaires (Li et al., 2009 ; Minakata et al., 2009), soit d’algorithmes
qui peuvent prédire les mécanismes réactionnels et les constantes de vitesse de réaction. Pour ce
dernier cas, Minakata et Crittenden, (2011) ont développé une relation linéaire entre les constantes
de réaction des HO• de la littérature et l’énergie libre d’activation des réactions d’abstraction de
l’atome de H (liaison C-H) et d’addition (C=C) théoriquement calculée pour prédire les constantes
de vitesse des HO• (figure 2).
Figure 2. Modèle cinétique pour prédire les constantes de vitesse des HO• (relation linéaire entre
les constantes de réaction des HO• et l’énergie libre d’activation de leurs réactions) (Minakata and
Crittenden, 2011).
Ainsi, les réactions d’oxydation ne peuvent être exécutées avec succès que dans les milieux
homogènes. Par conséquent les groupes substituant (groupements alkyle) qui diminuent la solubilité
dans l’eau, défavorisent la dégradation. Au contraire en sonochimie le phénomène de cavitation que
nous verrons dans la suite de ce travail, constitue un avantage dans la mesure où les composés
moins solubles donc plus hydrophobes se dégradent plus rapidement par pyrolyse. Les POA
peuvent être subdivisés en quatre groupes :
39
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Ce sont des procédés chimiques ou photochimiques qui utilisent soit les ions Fe (II)
(procédé Fenton, H2O2/Fe2+), soit l’ozone (H2O2/O3) et soit les UV (H2O2/UV) pour activer le
peroxyde d’hydrogène.
A la fin du 19e siècle à Cambridge, H. Fenton, observa pour la première fois qu’en ajoutant
une petite quantité de Fe2+ à une solution de contenant le H2O2, le mélange résultant, principalement
les radicaux HO• produits (Fenton, 1894 ; Fenton and Jones, 1900), pourrait oxyder en milieu acide
un nombre considérable de composés organiques en peu de temps (Haber and Weiss, 1934).
L’ensemble Fe2+ et H2O2 à pH inférieur à 3 est appelé alors réactif de Fenton. La réaction de Fenton
a largement été étudiée, même s'il n’y a pas toujours d’accord sur le rapport [H2O2]/Fe II qui donne
les meilleurs résultats. Néanmoins, il est reconnu que l’excès de H2O2 ou Fe II est préjudiciable, car
ces espèces peuvent réagir avec des intermédiaires tels que les radicaux HO• responsable de
l’oxydation directe du composé cible (équations 3, 4 et 9) (Pérez et al., 2002).
La nature des espèces produites par la réaction de Fenton est encore en discussion dans la
littérature. Deux voies de mécanismes ont été avancées : une voie radicalaire qui considère la
production des radicaux HO• et une voie non radicalaire impliquant la production des ions ferryls
FeO2+ (Barbusinski, 2009).
Toutefois, la voie radicalaire semble la plus répandue (équations 1.2 à 1.9). Pour minimiser
le coût du procédé, les auteurs s’intéressent de plus en plus aux réactions de Fenton catalysées par
soit des zéolites (Centi et al., 2001), soit des argiles dont les structures contiennent le fer.
40
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Plusieurs méthodes ont été utilisées pour accroitre la décomposition de l’ozone, rentabiliser
la production des radicaux hydroxyles dans l'objectif de favoriser l’oxydation des composés
réfractaires et minimiser le coût. L’un des procédés les plus communément utilisés implique l’ajout
de peroxyde d’hydrogène à une eau ozonée. La réaction directe entre l’ozone et le peroxyde
d’hydrogène est très lente pour des pH inférieurs à 5.
L’action de l’O3 sur le H2O2 est faible, donc le schéma de sa décomposition peut être
présenté de la façon suivante (figure 3):
H3O+
+ O3 H3O+ + O3
Très lente Très rapide
O2 + HO° + HO2°
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Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Il convient de noter que pour ce procédé, un composé à oxyder subit une compétition entre
une réaction avec l’ozone moléculaire et une réaction radicalaire via les radicaux HO• produits par
la décomposition de l’ozone. Le rapport d’oxydation directe par l’ozone moléculaire est
relativement plus faible (constantes cinétiques de l’ordre de 105–107M-1.s-1) comparé à l’oxydation
par les radicaux HO• (constantes cinétiques de l’ordre de 1012–1014M-1.s-1). Cependant l’efficacité
de ce procédé reste liée à la structure du composé à dégrader.
Par ailleurs le couplage UV/O3 est particulièrement complexe car plusieurs mécanismes
interviennent, ce qui conduit à la production des radicaux HO•, soit par une succession de réactions
radicalaires complexes initiées par l’attaque de l’ozone résiduel sur la forme dissociée de H2O2 soit
par photolyse directe selon le système H2O2/UV (Guittoneau et al., 1990b).
C’est le POA qui permet de produire le plus de radicaux hydroxyles par mole de réactif et
est largement utilisé pour le traitement des eaux (Legrini et al., 1993). L’irradiation ultraviolette
provoque l’excitation de la molécule du peroxyde d’hydrogène qui subit une scission homolytique
entre la liaison O-O qui se résulte par la formation de deux radicaux HO• (1.15):
Le schéma de réaction basé sur la réaction Haber-Willstätter (1.16-1.18) est le plus accepté.
La photocatalyse au TiO2 est basée sur une double aptitude du semi-conducteur à adsorber
les réactifs et à absorber les photons simultanément. Pour une catalyse hétérogène classique, le
processus de réaction peut se décomposer en 5 étapes indépendantes :
43
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Niveau d’énergie
Réduction
ox + ne-→ red
UV
(λ < 400 nm) BC
Sous-produits
de dégradation
migration
BV
Oxydation
red → ox + ne-
• Bande de valence
• Bande de conduction
O2 + e- → O2-• (1.24)
O2-• + H+ → HO2• (1.25)
2HO2• → H2O2 + O2 (1.26)
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Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Avec ∆E = énergie absorbée pour une transition électronique entre l’état fondamental et l’état
excité ; ݄ ൌ constante de Planck ; ߥ = fréquence ; ܿ = célérité de la lumière et ߣ = longueur d’onde.
En photochimie, la source lumineuse la plus utilisée est le système de lampe. En plus des
lampes classiques notamment les lampes à arcs à vapeur de mercure, d’autres lampes ont
récemment été développées pour pallier aux limites des plus anciennes (tableau V) (Braun et al.,
1994 ; Vilhunen and Sillanpa, 2010).
46
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
En définitive, le choix d’une source de lumière convenable est gouverné par (référence) :
Par ailleurs, il convient de signaler que la désactivation de l’état excité entraine une
dissipation soit par processus radiatif, soit par réactions chimiques. Pour que ces réactions
chimiques aient lieu, il faut qu’elles soient plus rapides que les autres processus. En milieu aqueux,
les réactions photochimiques semblent plus intéressantes.
Une molécule ne peut être affectée que lorsqu’elle absorbe dans le domaine de l’émission
lumineuse, ce qui explique la sélectivité des réactions photochimiques. Ainsi, il résulte de
l’interaction entre la matière et l’irradiation lumineuse, deux types de réaction :
Dans ces types de réactions, une molécule M ayant absorbé les rayonnements
électromagnétiques passe à l’état excité M* (instable). Ce dernier peut soit directement former des
produits, soit réagir avec d’autres molécules M’ pour former à nouveau des produits.
M = molécule
hν M’ =autre molécule
M M* P
P = Produits
+ M’ * = état excité
Ces réactions mettent en jeu l’excitation des molécules S dites sensibilisateurs, qui s’avèrent
plus sensibles aux rayonnements que la molécule à photodégrader M. Par la suite, les
sensibilisateurs excités réagissent avec les molécules cibles M pour former les produits finaux.
S = sensibilisateur
M = molécule
hν +M M’ =autre molécule
S S* S + M* P P = Produits
+ M’ * = état excité
47
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
En photolyse directe, les sensibilisateurs tels que les molécules d’eau, de dioxygène etc…,
sous l’effet d’irradiation forment des espèces tels que l’oxygène singulet, l’anion superoxyde et les
radicaux hydroxyles, comme représenté par le schéma réactionnel suivant (Zimina et al., 2000) :
Dans le cas des réactions photochimiques indirectes, les radicaux HO• sont les acteurs
principaux de la dégradation des contaminants dans l’eau. Pour ce qui a trait aux rôles joués dans la
dégradation photochimique, Wols and Hofman-Caris (2012) ont étudié la dégradation par UV/H2O2
d’une variété de composés organiques d’une matrice (Nieuwegein water) et ont montré qu’une
partie de ces composés est éliminée essentiellement par photolyse directe, une partie par les
radicaux hydroxyles et enfin une autre partie par les deux combinés. En effet la diversité de leur
structure chimique explique la nature différente de leur mode d’élimination. De même, certains
auteurs ont montré que la photolyse directe, quoique minoritaire, joue néanmoins un rôle dans la
dégradation des composés organiques, et que l’ajout de H2O2 précurseurs des radicaux HO•
améliore significativement le rendement (Vilhunen et al, 2010).
Ainsi, le procédé photochimique est fréquemment utilisé en traitement des eaux comme une
barrière efficace contre les micropolluants (Legrini et al., 1993 ; Yuan et al., 2009). Ensuite la
combinaison de la photolyse UV et la réaction des radicaux HO•, garantit l’élimination d’une large
gamme des composés (De Laat et al., 1999; Esplugas et al., 2007). Par exemple, les colorants à
faible concentrations se décolorent efficacement par photolyse UV directe (254 nm) comme le cas
48
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
de la solophenyl Green BLE 155% récemment décrit (Da Silva and Faria, 2003). Comparé à
d’autres procédés, il a été démontré qu’à concentration moyenne (5-10 mg/L), l’élimination du
colorant par la technique photolytique est 2 à 3 fois plus intéressante que par les autres procédés.
Par ailleurs, le NBB, une des molécules cibles de cette étude, a fait l’objet des travaux
antérieurs relatifs à son élimination en milieu aqueux par le procédé photochimique. Ball et al.
(1992) ont étudié la photodégradation du NBB et il en résulte que la décoloration du NBB est
accélérée lorsque le peroxyde d’hydrogène est ajouté et retardée en présence du mannitol. Par
contre, en mettant dans le milieu un colorant sensible (un «triplet sensitizer dye»), la vitesse de
réaction augmente.
En résumé, la photochimie est une technique simple et propre, d’une mise en œuvre
relativement facile et d’entretien relativement léger. En plus, il a été préalablement montré que la
photodégradation directe des molécules cibles de notre étude est faisable. Il reste maintenant à
essayer d’autres méthodes notamment la sonochimie.
Situés entre le son (16 Hz à 16 kHz) et les hypersons (> 1 GHz), les ultrasons appartiennent
à la gamme de fréquence où le son est imperceptible par l’oreille humaine (>16 kHz) (Mason et
Lorimer, 1988). Deux principaux paramètres permettent de classifier les ultrasons, à savoir la
puissance et la fréquence, décrits à la figure 7 :
49
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
• suivant l’échelle de fréquence, le domaine ultrasonore est divisé entre des ultrasons de
basse fréquence (16 à 100 kHz), des ultrasons de haute (100 kHz à 1000 kHz) et enfin des
ultrasons de très haute fréquence (supérieure à 1 MHz).
• suivant l’échelle de puissance, lorsqu’elle est inférieure à 1 W, ce sont les ultrasons de
faible puissance. Ici, il n’y a pas d’interaction autre que vibratoire avec la matière et les ultrasons
n’induisent pas de modification du milieu qu’ils traversent. Le contrôle non destructif et le
diagnostic médical constituent des exemples d’applications de ces types d’ultrasons. Lorsque la
puissance ultrasonore est supérieure à 10 W, l’émission ultrasonore est susceptible de modifier le
milieu traversé, on est alors dans le domaine des ultrasons de puissance. Dans ce cas, par contre, les
applications sont destructives.
Sonochimie
Puissance
Dans cette étude, il sera donc question d’appliquer les ultrasons pour résoudre certains
problèmes environnementaux notamment la contamination chimique des eaux. Ainsi, on fera
recours à la sonochimie qui appartient au domaine des ultrasons de puissance. Pour mieux
appréhender les phénomènes qui y prennent place, il convient de présenter en détail les principes de
base de cette discipline.
Les ultrasons sont des ondes vibratoires de compression longitudinale dont la propagation
induit à la fois une variation spatiale et temporelle de la pression. Les grandeurs physiques qui les
50
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
caractérisent sont notamment la fréquence f (hertz ou cycle par seconde), la longueur d’onde λ (m),
la vitesse de propagation ou célérité c (m·s−1), telle que :
λ = c/f (Eq. 2)
et la puissance P (W) qui permet de quantifier l’énergie ultrasonore transmise au milieu soumis aux
ultrasons.
Pression
compression compression compression compression
PA
Amplitude (P)
Position
Lorsqu’une onde se propage dans un milieu, il en résulte deux formes d’agitation du fluide.
Du fait de la compressibilité du liquide, il apparaît un mouvement d’oscillation des éléments de
liquide autour de leur position d’équilibre. À cela s’ajoute un mouvement d’ensemble provoqué par
la propagation de l’onde. En fonction du milieu et de la nature de propagation, certaines contraintes
apparaissent, notamment la contrainte de transmission, de réflexion et d’ondes stationnaires.
Z = ρc (Eq. 4)
51
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Dans le cas d’une onde progressive planaire ou sphérique (dimension 2 ou 3), viennent
s’ajouter les paramètres tels que la pression acoustique PA et l’intensité ultrasonore I qui sont liées
par l’impédance acoustique Z comme donnée par l’équation suivante :
I = PA2/2Z (Eq. 5)
Pour une onde se propageant d’un milieu A vers un milieu B, le coefficient de transmission
et de réflexion que nous représentons respectivement par T et R sont donnés par les relations
suivantes :
Lorsque les impédances sont proches, alors T est sensiblement égal à 1 et par conséquent la
transmission est meilleure. En outre, lorsque l’impédance du second milieu est faible, c'est-à-dire
R<0, alors on tend vers une réflexion totale. C’est ce qui explique la non-transmission de l’onde
ultrasonore de l’eau vers l’air.
La génération des ultrasons nécessite un convertisseur d’énergie, d’une forme en une autre.
Le transducteur est le système le plus indiqué pour transformer l’énergie électrique en ondes
mécaniques de la gamme des ultrasons. Les applications des ultrasons étant très diverses, il n’est
pas possible de décrire tous les procédés de génération pour chacune d’elle. Néanmoins, on citera
les trois grands types de transducteurs couramment rencontré, notamment le sifflet acoustique
(Mason et Lorimer, 1988), les transducteurs magnétostrictifs et les transducteurs piézoélectriques.
Dans ce travail, on décrira essentiellement les transducteurs destinés à la sonochimie, notamment
les transducteurs électromécaniques.
Ce sont les plus répandus des transducteurs utilisés pour la production des ultrasons. Ils
fonctionnent soit par magnétostriction soit par piézoélectricité.
Découvert en 1847 par Joule (Briquard, 1983), les transducteurs magnétostrictifs utilisent
des matériaux ferromagnétiques (fer, nickel et leurs oxydes ou autres alliages) qui ont la propriété
de se déformer lorsqu'ils sont soumis à un champ magnétique externe. Un courant alternatif passant
52
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
à travers un cylindre ferromagnétique entouré d’un solénoïde induit un champ magnétique qui
provoque la contraction et la dilation du matériau. C’est ce qui crée la vibration mécanique à
l’origine de l’onde acoustique. L’inconvénient majeur de cet équipement est qu’il ne permet pas de
produire des ultrasons allant au-delà de 120 kHz.
L'effet piézoélectrique fut découvert quant à lui par les frères Curie (Pierre et Jacques) en
1880 quand ils constatèrent qu’un cristal en quartz soumis à une contrainte mécanique devient
électriquement polarisé (Curie and Curie, 1880). Comme en magnétostriction, l’effet inverse existe
et fut découvert un an plus tard par Lippman. Les transducteurs piézoélectriques pour produire les
ultrasons utilisent donc l’effet inverse. En sonochimie par exemple, les céramiques les plus utilisées
sont en titanate et zirconate de plomb (PZT, c’est-à-dire PbTiZrO3). D’autres matériaux
piézoélectriques existent, notamment le quartz, le titanate de barium (BaTiO3) et le niobiate de
lithium (LiNbO4).
L’avantage de ce type de transducteur est qu’il est capable de délivrer les ondes progressives
à des fréquences allant jusqu’au mégahertz. Néanmoins, sa limite est qu’elle opère à une fréquence
donnée, caractéristique de la céramique employée.
Nous décrirons ici brièvement les principaux types de sonoréacteurs rencontrés à l’échelle
du laboratoire et surtout utilisés pour la dégradation sonochimique des espèces polluantes. Les
réacteurs ici présentés fonctionnent en général avec des convertisseurs piézo-électriques. Ils sont
préalablement conçus et destinés à d’autres applications industrielles. Les réacteurs sonochimiques
sont conçus à base de deux principes différents : les bacs et les sondes.
Les bacs : C’est le système le plus répandu car très simple de conception et
généralement constitué d’une enveloppe sur les parois de laquelle sont fixés les transducteurs
(figure 9). Les diverses configurations de réacteurs basés sur ce concept se différencient
essentiellement par leur géométrie.
Transducteurs piézoélectriques
53
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Convertisseur
Sonotrode
Embout
Tout compte fait, le choix d’un type de réacteur est fonction de l’utilisation qu’on en fera et
des objectifs que l’on s’est fixé. Cependant, des discussions plus détaillées des différents types des
réacteurs sonochimiques peuvent être trouvées dans certaines références (Gondrexon and Gonthier,
1994 ; Pandit and Moholkar, 1996; Keil and Swamy, 1999; Gogate et al., 2001b).
Des phénomènes physiques et chimiques peuvent être induits lorsque des ultrasons sont
émis dans un milieu liquide, résumés par la figure 11. A priori, la dissipation de l'énergie acoustique
dans le liquide peut entrainer l’élévation de la température. En plus, cette dissipation crée un
gradient de quantité de mouvement, provoquant un mouvement macroscopique du fluide, appelé
courant acoustique. Ensuite le phénomène pouvant apparaître seulement à haute fréquence à la
surface du liquide, est la fontaine acoustique. Dans ce cas, les ultrasons sont en effet couramment
utilisés à des fins de nébulisation. Enfin le phénomène de cavitation acoustique peut aussi
apparaître. Contrairement à la cavitation hydrodynamique, on ne cherche généralement pas à éviter
ce phénomène dans la plupart des applications ultrasonores industrielles. Etant donné que nous
recherchons dans ce travail les effets chimiques induits pour éliminer les polluants organiques, nous
nous focaliserons uniquement sur le cas de la cavitation acoustique.
54
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Ensuite, l’intérieur de bulles créées s’équilibre par diffusion de gaz, de composés dissous et
par vaporisation du liquide. La bulle pulse en phase avec l’onde incidente. Dans la période de
dépression, le volume de la bulle augmente. La bulle se rétracte dans la période de compression.
Ces fluctuations s’accompagnent de diffusion de la matière vers l’intérieur dans la phase de
compression. La valeur nette des échanges étant proportionnelle à la surface de l’enveloppe de la
cavité, la quantité de matière entrante est supérieure à la quantité de matière expulsée. En
conséquence, le volume de la bulle s’accroit progressivement à chaque cycle : c’est la croissance.
Enfin, lorsque la bulle atteint sa taille de résonnance (celle-ci dépend de l’onde incidente)
son diamètre augmente brusquement dans la phase de dépression. La phase d’expansion s’achève
par un effondrement de la cavité à l’inversion du cycle: c’est l’implosion.
Le diamètre de résonnance d’une bulle de cavitation dans l’eau est fourni par l’équation
suivante (Mason and Lorimer, 2002) :
D = 6,62/ν (Eq. 8)
55
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Implosion
Rayon de la bulle (µm)
Croissance
Onde de choc
Point Trempé
Naissance chaud rapide
t, µsec
Par ailleurs, la notion de seuil de cavitation se réfère à la valeur de l’intensité acoustique en-
dessous de laquelle, il n’y a aucune cavitation (Rochon, 1969). En effet, il a été rapporté qu’aucune
réaction n’est observée en-dessous du seuil de cavitation (Floger and Barnes, 1968). Elle croit en
fonction de la fréquence de l’onde progressive. En conséquence, au-dessus de la puissance
maximale, les effets sonochimiques sont atténués (Floger and Barnes, 1968). Toutefois, pour tenter
d’expliquer les phénomènes engendrés par la cavitation acoustique, certaines théories ont vu le jour.
56
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Selon Nolting and Neppiras, 1950, la bulle de cavitation emmagasinerait une énorme
énergie acoustique qui est libérée lors de son implosion. En plus, l’effondrement brutal de la bulle
provoque localement une hausse considérable de la température et de la pression (Nolting and
Neppiras, 1959 ; Suslick, 1983) qui peuvent être évaluées à partir de l’équation déduite des travaux
de Lord Rayleigh, (1917):
– température maximale Tmax = T0[ (γ − 1)] (Eq. 9)
– pression maximale Pmax = P [ (γ − 1)] γ/γ – 1 (Eq. 10)
γ= rapport polytropique des gaz (cp/cv : rapport des capacités thermiques massiques à
pression et volume constants),
Dans le cas de l’eau, au stade final de l’implosion, le calcul fait apparaître une température
supérieure à 5200 ˚C et une pression au-dessus de 500 bars (Suslick et al., 1986). La durée de la
contraction de la bulle dépend du rayon maximal de la bulle en expansion (Rm). Elle est
normalement inférieure au 5e de la période de vibration.
Selon Flint and Suslick (1991) les conditions thermiques qui ont précédé l’effondrement de
la bulle de cavitation provoquent l’excitation des molécules qui passent à des niveaux d’énergie très
élevée. Et le retour à l’état fondamental s’accompagne d’une émission de photons qui sont
caractérisés par une énergie correspondante à la transition électronique atteinte lors de
l’effondrement. Pour les auteurs ayant décrit la théorie du point chaud, la sonoluminescence a une
origine thermique qui se manifeste lors de la recombinaison électron-molécule ionisée. Néanmoins,
certains chercheurs ont proposé une autre approche.
Théories électriques
Tous les auteurs tombent d’accord sur la production énorme de la chaleur lors de
l’effondrement de la bulle, qui se manifeste par une forte élévation de la température. Toutefois, la
compréhension de l’origine de l’émission lumineuse reste très controversée. Un groupe de
chercheurs rejettent l’hypothèse selon laquelle les flashs de lumière produits lors de l’implosion de
la bulle soient provoqués par une élévation thermique (Margulis, 1969 ; Margulis, 1985). Selon eux,
les lois de thermodynamique classique ne sont pas adaptées pour évaluer une telle température du
fait des différents niveaux d’énergie accédés par les molécules. De même, ils soutiennent que
d’autres aspects comme la déformation de la bulle par l’onde acoustique, l’inhibition de l’implosion
par les gaz contenu dans la bulle ou même l’éclatement de la bulle sont omis et mettent en cause
l’hypothèse selon laquelle la sonoluminescence ait une origine thermique.
Ainsi, des théories basées sur les phénomènes électriques ont été développées (Margulis,
1990 ; Margulis, 1992 ; Lepoint and Mullie, 1994). En effet elles s’appuient sur l’existence de
champs électriques locaux intenses liés à des effets d’orientation moléculaire. Ces champs seraient à
l’origine de décharges électriques au sein du milieu. Une analogie numérique entre la sonochimie et
la chimie du plasma établit par Lepoint et Mullie (1994) a conduit à la conclusion selon laquelle
l’origine de la cavitation chimique serait une décharge électrique de type couronne causée par un
processus de fragmentation.
Plus récemment, en réussissant à créer une unique bulle d'argon dans une solution d'acide
sulfurique soumise à l'action d’ondes sonores (18 kHz), Flannigan et Suslick (2005) ont obtenu et
mesuré le spectre du flash de lumière. Selon leurs mesures, la température locale dans la bulle lors
de son implosion atteignait les 15.000 K. Ils rejoignent donc Lepoint et Mullie (1994) pour en
conclure qu’un plasma s’était bel et bien formé.
58
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
La sonolyse de l’eau est l’une des réactions sonochimiques les plus largement étudiées. La
formation et l’évolution de la bulle de cavitation sont les événements essentiels de l’action des
ultrasons pour l’environnement. Quand la vapeur d’eau, les gaz dissous et les substances organiques
sont exposés aux conditions extrêmes de la bulle de cavitation, la rupture de liaisons a lieu
instantanément (Adewuyi, 2001).
Ainsi, la sonolyse génère respectivement les radicaux hydroxyles HO• et l’atome d’oxygène
O• par dissociation thermique de l’eau et de dioxygène (figure 13, équations 1-4). En présence de
l’oxygène moléculaire, les radicaux perhydroxyles sont susceptibles de se former (figure 13,
équations 5). En absence de tout soluté, les premiers radicaux formés pourraient se recombiner pour
former H2O, O• et O2, puis éjectés dans la solution (figure 13, équations 8-10). Ensuite, les radicaux
formés sont diffusés dans la solution, en même temps que le peroxyde d'hydrogène libérés à partir
de la combinaison des radicaux HO• et HOO• (figure 13, équations 11 et 12). D’un autre côté, les
radicaux H• et HO• réagissent avec les H2O2 (figure 13, équations 15 et 16).
• les réactions à privilégier, qui conduisent à la formation des espèces oxydantes telles que
HO•, HOO• et H2O2 , capables dégrader les polluants organiques (figure 13, équations 1, 3, 4, 5, 11,
12 et 13)
• les réactions inhibitrices qui consomment les espèces oxydantes formées, ce qui diminue
l’efficacité du système (figure 13, équations 10, 15 et 16).
La bulle de cavitation est considérée comme un microréacteur et constitue le siège de toutes les
réactions sonochimiques (Griffing and Sette, 1953 ; Margulis, 1992). Quand la sonolyse aqueuse se
déroule en présence de solutés organiques, un certain nombre de processus chimiques dépendant de
la nature physique et chimique du soluté peut avoir lieu (Yang et al., 2007). D’après la théorie du
point chaud, les réactions sonochimiques peuvent avoir lieu dans trois régions (Adewuyi, 2001)
comme le montre la figure 13: (i) à l’intérieur de la bulle de cavitation, (ii) à l’interface bulle-
solution et (iii) dans la solution.
Ainsi, pour prédire le comportement d’une molécule dans une solution aqueuse et sa
capacité à pénétrer dans une bulle, à réagir à l’interface, ou à rester au cœur de la solution,
Heinglein (1991) a étudié le rapport d’hydrophobicité (nombre de groupes hydrophobes sur le
nombre de groupes hydrophiles) de plusieurs composés organiques. Il a montré par exemple, pour
59
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
un composé comme l’éthanol, qui présente deux sites d’hydrophobicité (atomes de carbone) et un
site d’hydrophilie (groupe hydroxyle), son rapport d’hydrophobicité est 2, alors que celui de
l’hexanol est 6. Enfin, il en déduit que, lorsque le rapport d’hydrophobicité est faible, la solubilité
est plus importante et par conséquent la réaction sonochimique a principalement lieu dans la
solution. Par contre lorsque le rapport est élevé, le composé est difficilement soluble en milieu très
dilué. Leur volatilité est toutefois assez faible pour les permettre de réagir au cœur de la solution.
Dans ce contexte, l’interface constitue un milieu idéal. Seuls les composés volatils dont le rapport
d’hydrophobicité est élevé peuvent réagir dans la bulle de cavitation (voir figure 13).
En ce qui concerne la localisation des réactions chimiques, l'objectif ici n'est pas de fournir
une liste complète de travaux réalisés, car ce sujet est largement discuté dans la littérature et les
auteurs s’accordent sur l’existence des trois zones précédement décrites (Suslick and Hammerton,
1986 ; Henglein and Karmann, 1985 ; Adewuyi, 2001). De manière générale, l’on peut retenir
essentiellement deux mécanismes de décomposition sonochimique des molécules de substrat, il
s’agit de l’action directe (pyrolyse) et de l’action indirecte (attaque radicalaire).
60
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Les conditions ambiantes du système de réaction peuvent largement influer sur l'intensité de
la cavitation, ce qui affecte directement la vitesse de réaction et / ou le rendement. Ces conditions
comprennent quelques paramètres que nous avons regroupés en 3 familles, à savoir les paramètres
liés à la technique, les paramètres liés au milieu réactionnel et ceux liés au composé à dégrader. Ici,
il ne sera pas question de décrire en détail chacun de ces facteurs, nous nous contenterons juste de
les présenter et de les définir.
• Fréquence
Bien qu’intervenant de plusieurs façons dans la cavitation ultrasonore (Hua and Hoffmann,
1997, Mason and Lorimer, 2002), ce paramètre a longtemps été ignoré en raison de l’utilisation
préférentielle des ultrasons de basse fréquence. C’est à l’issue des travaux de Pétrier et al. (1992)
que la fréquence devient l’un des paramètres fondamentaux dans la conception des réacteurs
ultrasonores. En effet, ce travail a permis de mettre en évidence une production radicalaire plus
importante à haute fréquence qu’à basse fréquence. En plus, ce résultat s’est accompagné de la
démonstration d’une meilleure efficacité à haute fréquence pour la dégradation des polluants
organiques (Pétrier et al., 1994). Il convient de noter que la suite de la recherche fondamentale
menée par l’équipe de Pétrier a montré que les meilleurs effets sonochimiques sont produits dans la
plage de 200 à 300 kHz (Jiang et al., 2006).
• Géométrie du réacteur
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Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
En plus des paramètres précités liés à la technologie ultrasonore utilisée, il existe d’autres
facteurs sur lesquels l’on peut jouer pour améliorer le rendement du procédé, il s’agit des propriétés
du liquide du milieu réactionnel.
• pH
N2 + O → NO + N (1.35)
N + O2 → NO + O (1.36)
• Propriétés physico-chimiques
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Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
• Viscosité
• Tension superficielle
La tension superficielle influence aussi la taille des bulles donc le seuil de cavitation. Le
choix d’une faible tension de surface est judicieux pour obtenir un bon rendement du procédé
(Gogate, 2008).
• Température
La température est un paramètre important qui a une influence complexe. Il modifie la viscosité du
milieu, la concentration en gaz dissous et la pression de vapeur. La plupart des réactions
sonochimiques se trouvent donc favorisées par l’abaissement de température (Gaddan and Cheung,
2001 ; Sehgal et al., 1981).
• Gaz dissous
Une solution soumise aux irradiations ultrasonores nécessite en plus des particules en
suspension, des gaz dissous pour démarrer le processus de cavitation. De même, la croissance de la
bulle résulte essentiellement des échanges gazeux entre la bulle et la solution. Ainsi, les deux
phénomènes, nucléation et cavitation, sont asservis à la teneur en gaz du liquide. Un gaz peu soluble
dans le liquide est favorable à l’intensité de cavitation par contre lorsque sa solubilité est élevée, il
augmentera la population des bulles qui vont alors coalescer, dégazer et amortir la propagation de
l’onde (Pétrier et al., 2008). De même, un gaz qui présente un rapport polytropique faible et une
forte conductivité thermique s’opposera à la compression de la cavité avec une température et une
63
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
pression plus faibles que celles obtenues pour un gaz de γ élevé et de faible conductivité thermique
(gaz rares).
Ces sont des propriétés qu’impose le composé à dégrader au milieu réactionnel. Il s’agit :
• Concentration
• Hydrophobicité / hydrophilie
Ces caractères jouent un rôle très déterminant dans la localisation des composés à dégrader
par sonolyse. En plus, ces caractères dépendent fortement de la pression de vapeur et de la constante
de Henry qui définit la solubilité (Doubla, 1989). En fonction de ces propriétés physiques, les
composés organiques peuvent être classés en trois familles : (i) les composés hydrophobes et
volatils, (ii) les composés hydrophobes et non volatils, (iii) et enfin les composés hydrophiles.
D’après la théorie du ‘‘point chaud’’ la dégradation de ces composés peut respectivement avoir lieu
dans trois régions différentes (Adewuyi, 2001) : à l’intérieur de la bulle, à l’interface bulle/solution
et dans la solution (voir figure 13). Cependant l’accumulation dans l’une des zones et la dégradation
d’un composé dépend fortement de son hydrophobicité (Henglein and Kormann, 1985). Plus il est
hydrophobe, plus il accède à l’interface zone à forte concentration des radicaux HO• et se dégrade
alors plus vite (Park et al., 2011).
Lorsque tous ces paramètres sont réussis, il est bien évident que le procédé sonochimique
soit très indiqué pour l’élimination des polluants chimiques en milieu aqueux.
Ces dernières décennies, à cause d’une nécessité grandissante d’éliminer les contaminants
chimiques dans les eaux usées, l’utilisation des ultrasons de puissance a été explorée avec un grand
intérêt (Hoffmann et al., 1996; Hua and Hoffmann, 1996 ; Hua and Hoffmann, 1997; Pétrier et al.,
1992, 1998; Pétrier and Francony, 1997). Le mode d’élimination et les rendements sont liés aux
caractéristiques physicochimiques des composés.
64
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
De manière générale, les ultrasons se montrent bien adaptés à la dégradation des composés
volatils et/ou hydrophobes (Colarusso and Serpone, 1996 ; Pétrier et al., 1999). Ce type de
composés se caractérise par une valeur élevée de la constante de Henry, ce qui leur permet de
diffuser facilement dans la bulle où ils sont pyrolysés lors de l’effondrement. C’est l’exemple des
organohalogénés volatils, de certains dérivés sulfurés, du benzène, du chlorobenzène, et des
hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Par contre, les composés hydrophiles à faible
constante de Henry, notamment les alcools, les pesticides, les tensioactifs, les phénols et les
colorants n’ont pas accès à la bulle de cavitation. Dans ce contexte, ils sont dégradés par attaques
radicalaires à l’interface et/ou dans la solution.
De nombreux articles font état de la destruction des polluants organiques par sonolyse
(Hoffmann et al, 1996 ; Goskonda et al., 2002 ; Vajnhandl et al., 2005 ; Liang et al., 2007 ; Pang et
al., 2011). Quelques exemples sont décrits ci-dessous, notamment en lien avec lees composés
aromatiques, car les plus couramment retrouvés dans les rejets.
Goskonda et al. (2002) ont examiné l’utilisation des ultrasons pour minéraliser un certains
nombre de polluants organiques. Il a été montré que les composés tels que 4-chlorophénol (4-CP),
2,4-dichlorophénol (2,4-DCP), 4-chloro-3,5-diméthylphénol (4-C-3,5-DMP), 4-fluorophénol (4-
FP), 2,4,6-trinitrotoluène (TNT), 2-amino-4,6-dinitro-toluène (2-ADNT), et 4-amino-2,6-
dinitrotoluène (4-ADNT) peuvent être dégradés par ultrasons. La libération des ions Cl− et NO3− est
la preuve de la minéralisation totale de ces composés. Cependant, l’ajout du dodecyl sulfate de
sodium ou l’acide humique a augmenté légèrement la vitesse de sonodégradation du 4-CP. D’après
les auteurs, cette augmentation est due à la présence simultanée des substrats à forte activité de
surface qui sont capables de réduire la tension de surface, augmentant ainsi les sites de cavitation.
Pétrier et al. (1994) ont conclu que les radicaux HO• sont impliqués dans la dégradation du
phénol et les produits de dégradation ont été identifiés comme l’hydroquinone, le catéchol et le
benzoquinone. En plus, ces auteurs ont rapporté que les radicaux HO•, issus de la dissociation
thermique de l’eau lors de l’effondrement de la bulle, subissaient une compétition entre les
réactions de recombinaison et la réaction avec le substrat.
Mahamuni and Pandit (2006) ont identifié les mêmes produits lors de la dégradation
ultrasonore du phénol. Comme résumé, Pang et al. 2011 ont suggéré un mécanisme de
sonodégradation des composés contenant les noyaux aromatiques ou hétérocycliques, qui implique
65
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
les radicaux HO•, donnant lieu à des produits intermédiaires tels que cités par Pétrier et al (1994).
Ensuite, une seconde phase des réactions radicalaires conduit à la formation des acides minéraux
tels que les acides formique, oxalique, maléique, succinique et propionique qui peuvent
éventuellement se convertir en CO2 et H2O aboutissant à une minéralisation totale du phénol (Pang
et al., 2011), mentionnée figure 14.
Noyau
benzénique
Figure 14 : Mécanisme d’attaque des radicaux HO• sur le noyau aromatique ou hétérocyclique
(Pang et al., 2011).
A priori, s’il est aisé d’utiliser la cinétique de pseudo-premier ordre et celle d’ordre zéro
pour décrire la vitesse de sonodégradation des composés organiques, en pratique cette tâche s’avère
plus complexe dans la mesure où la vitesse de réaction est affectée par la concentration initiale.
Dans ce contexte, la cinétique de pseudo-premier ordre n’est applicable qu’à faible concentration
initiale du substrat. Toutefois, l’existence d’une couche interfaciale (gaz/liquide) d’après la théorie
du point chaud, offre une hypothèse valable pour adopter une cinétique basée sur un système de
catalyse hétérogène où il s’établit un équilibre adsorption et désorption du substrat. Le modèle
cinétique de Langmuir–Hinshelwood (Serpone et al., 1994; Okitsu et al., 2005 et 2009) est
généralement appliqué lorsque les hypothèses suivantes sont vérifiées, en lien avec r1 la vitesse
d’adsorption du substrat sur la couche interfaciale.
66
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
r1 = k1Ci(1- θ).
où θ correspond au taux d’occupation des sites par le substrat sur la zone interfaciale, K1 s’exprime
en min-1.
r-1 ൌ k-1 θ
Où k-1 en M.min-1.
େ୧
D’où θൌ K ൌ k1/k-1
ଵାେ୧
Si le substrat réagit à l’interface, alors la vitesse de réaction peut être représentée par :
୩େ୧
r ൌ kθ ൌ (Eq.1.12)
ଵାେ୧
Par ailleurs, pour des composés dont la décomposition a lieu simultanément à l’interface et
dans la solution, Serpone et al. (1994) ainsi que Kidack and Ince (2008) ont affecté un second terme
K’ à l’expression de la vitesse proposée par Langmuir-Hinshelwood, K’ représente la vitesse de
décomposition du substrat dans la solution et r devient donc :
୩େ୧
r ൌ K′ (Eq.1.13)
ଵାେ୧
Récemment, Chiha et al. (2010) ont conclu que, comparé à la méthode de linéarisation, il est
plus approprié d’utiliser les courbes non linéaires afin de déterminer les paramètres du modèle. Ils
ont aussi rapporté que la dégradation des composés organiques ayant lieu majoritairement à
l’interface de la bulle suivait le modèle cinétique développé par Okitsu et al., (2009).
67
Chapitre I : Etat de l’art sur la pollution de l’eau et les techniques de traitement
Conclusions
68
CHAPITRE 2 :
MATERIEL ET METHODES
CHAPITRE 2 :
MATÉRIEL ET MÉTHODES
69
Chapitre II : Matériel et méthodes
Tous ces composés sont utilisés sans purification préalable. L’eau ultra-pure, utilisée
en tant qu’éluant pour HPLC ainsi que pour la préparation des solutions, est obtenue par
purification sur charbon actif puis désionisée sur une colonne échangeuse d’ions (Bioblock
Fisher).
Suite à la présentation des divers produits chimiques employés dans cette étude, il
convient également de passer en revue sur le matériel employé.
II.2. Matériel
70
Chapitre II : Matériel et méthodes
Dans ce travail, nous recherchons les effets chimiques induits par cavitation
acoustique pour détruire les xénobiotiques mentionnés plus haut. Une partie des expériences
est menée dans un réacteur cylindrique de 400 mL, en verre, à double paroi entre lesquelles
circule l’eau de refroidissement (Figures 15-17). Les ondes ultrasonores d’une fréquence de
278 kHz et de puissance variable sont émises via un disque en céramique piézo-électrique en
titanate zirconate de plomb (diamètre 4,2 cm) fixé à la base du réacteur (diamètre 5 cm). Pour
éviter le réchauffement de la céramique qui pourrait provoquer sa dilatation ainsi que sa
détérioration, un ventilateur est placé à la base du système. L’alimentation électrique est un
générateur de haute fréquence (Radiocoms Systèmes ULV300A). L’impédance de ce
générateur est fixée à 50 Ω et régulée par un adaptateur d’impédance.
Thermocryostat
Générateur
électrique
(278 kHz, 100W)
71
Chapitre II : Matériel et méthodes
La photolyse directe pour détruire les composés organiques dans cette étude a été mise
en œuvre dans un photoréacteur de 400 mL (Figure 20). Le cœur du photoréacteur est une
enveloppe à double paroi dans laquelle circule l’eau de refroidissement. Un thermocryostat
(Heto CB 8-30e) permet de maintenir la température de la solution à notre convenance. Un
système d’agitation de la solution avec un barreau aimanté assure l’homogénéisation du
milieu réactionnel. En outre, le photoréacteur est doté d’une lampe UVP crayon à basse
pression de vapeur de mercure émettant un rayonnement monochromatique à 254 nm (Pen-
ray Lamps Group) (photo 18).
72
Chapitre II : Matériel et méthodes
Unité arbitraire
Avant de lancer le traitement, un temps de deux minutes est nécessaire pour que la
lampe atteigne l’équilibre.
Sortie d’ea u de
refroidissement
La mpe UVP
Agita teur
ma gnétique
73
Chapitre II : Matériel et méthodes
Après avoir mis en évidence les différents réacteurs appliqués dans cette étude, il est
judicieux de présenter les démarches que nous avons suivies.
La puissance ultrasonore fournie par le générateur n’est pas exactement celle qui est
dissipée dans le réacteur, du fait de pertes d'énergie notamment sous forme de chaleur.
L’énergie dissipée peut être évaluée par des méthodes de mesure standard et nous permettre
par la même occasion de caractériser le réacteur. Les méthodes qui nous intéressent ici
concernent essentiellement celles qui sont les plus couramment utilisées en sonochimie ; il
s’agit des mesures physique (mesure calorimétrique) et chimique (dosimétrie à l’iode).
ௗ்
P = M Cp ( ) Eq. II-1
ௗ௧
74
Chapitre II : Matériel et méthodes
Pour un système idéal, le réacteur doit être isolé pour prévenir tout transfert de chaleur
dans l’environnement. Mais il a été montré qu’un système adiabatique n’est pas nécessaire
pour mesurer la puissance calorimétrique (Raso et al., 1999). Pour effectuer la calorimétrie du
réacteur, le système de refroidissement n'est pas utilisé et un volume d’eau désionisée
correspondant au volume de la solution à dégrader (400 mL) a été soumis aux irradiations
ultrasonores. L’évolution de la température est enregistrée pendant la durée où les échanges
de chaleur avec le milieu extérieur sont négligeables et où la partie du graphe T = f(t) est
linéaire, c'est-à-dire pendant les premières minutes d’irradiation ultrasonore (5 minutes). La
puissance calorimétrique est calculée à partir de la relation (Eq. II-1).
75
Chapitre II : Matériel et méthodes
Il s’agit ici de décrire dans ce paragraphe la manière dont les solutions modèles sont
préparées et la façon dont les courbes d’étalonnage sont obtenues.
Le NBB étant très soluble dans l’eau (10g/L), la préparation de sa solution est réalisée
très aisément. A contrario, le 4-Nonylphénol est très peu soluble dans l’eau (5,43 mg/L) et
requiert donc beaucoup d’attention. Ainsi, les solutions du NP sont préparées de deux
manières dans l’eau désionisée.
1200
NP ss MeOH
1000 NP av MeOH (250 µL/L)
NP av MeOH (2500 µL/L)
Unité arbitaire
800
600
400
200
0
0 5 10 15 20
t, min
Figure 22. Effet du méthanol sur la sonodégradation du NP (8,1µM), (f : 278 kHz, P : 100W,
V: 400 mL, T : 20 ±1 °C).
76
Chapitre II : Matériel et méthodes
Tout d’abord les premières solutions préparées nous ont permis à partir des dilutions
successives de tracer les courbes d’étalonnages.
18
16
14
y = 21.962x
Concentration, µM
12 R² = 0.9998
10
8
6
4
2
0
0 0.2 0.4 0.6 0.8
Densité optique
77
Chapitre II : Matériel et méthodes
25
20
y = 0.0081x
R² = 0.9975
Concentration, µM
15
10
0
0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500
Aire de pic, u. a
Cependant, dans le souci d’uniformiser les valeurs de départ, nous avons travaillé dans
la plupart des cas avec les valeurs relatives (grandeur divisée par la grandeur initiale). Pour les
absorbances, on a :
௦
= Eq. II-4
௦
= Eq. II-5
78
Chapitre II : Matériel et méthodes
Dans ce procédé, les radiations UV sont couplés au Fenton (Fe/H2O2) pour générer
davantage de radicaux HO•. Le protocole employé ici diffère du protocole classique par la
manière dont le peroxyde d’hydrogène est apporté à la solution. Cette méthode consiste à
injecter progressivement le H2O2 dans la solution irradiée contenant déjà le fer II et sous
agitation. La vitesse d’injection correspond à la vitesse avec laquelle le H2O2 est produit par
ultrasons (Torres et al., 2008).
Trois principales techniques analytiques ont été employées dans cette étude, à savoir la
chromatographie liquide à haute performance (HPLC), la spectrophotométrie UV-Vis et la
mesure du COT.
Notre dispositif est constitué d’une pompe Waters 515 et équipé d'une colonne
Supelcosil LC-18 (DI=4,6 mm, L=250 mm, dp=5µm) associée à un détecteur UV-visible
(Waters 486). L’injection se fait par l'intermédiaire d'une vanne de type Rheodyne, équipée
d'une boucle de 200 µL. L'éluant est un mélange d'acétonitrile et d'eau ultrapure (80/20 v/v)
préalablement dégazé dans un bac à ultrasons (Branson 1200) puis filtré à l’aide d’un filtre
millipore avant d’être introduit dans le réservoir. Le débit de l'éluant est réglé à 1,2 mL.min-1.
79
Chapitre II : Matériel et méthodes
La longueur d’onde de détection du NP est fixée à 190 nm. Il en résulte l'obtention des pics de
très bonne résolution, avec un temps de rétention de 8,7 min.
16,2 0,5
Nombre d’essais 5
C’est une technique d’analyse dont le principe est basé sur l’absorption de la lumière
par la substance traversée. A partir de la loi de Beer Lambert, on peut déduire la concentration
du composé à analyser. Le spectrophomètre utilisé est de marque Shimadzu UV mini 1240
doté d’une double lampe, l’une au deutérium pour la zone spectrale comprise entre 190 et 350
nm et l’autre au tungstène pour la zone spectrale comprise entre 350 et 800 nm (figure 25).
Les cuves utilisées sont des cuves de précision(Roth), faites en quartz avec des trajets
optiques de 1 cm et un volume de 1,4 mL.
80
Chapitre II : Matériel et méthodes
Avec ce matériel, les principales analyses qui ont été réalisées concernent la
détermination de la concentration du NBB et l’analyse iodométrique.
Le naphtol blue black absorbe dans le visible à une longueur d’onde de 618 nm. Son
évolution est suivie par la mesure des absorbances et les concentrations sont ainsi déduites de
la loi Beer Lambert :
A = - log (I/Io) = εo C L d Eq. II-6
Cette méthode a été utilisée pour doser le peroxyde d’hydrogène ainsi que pour
évaluer le potentiel d’oxydation de l’iodure de potassium (KI) par les ultrasons. Dans les deux
cas, le principe reste le même, seuls les protocoles diffèrent. Cette méthode est fondée sur
l’oxydation d’une solution de KI en présence du molybdate comme catalyseur. En effet, les
81
Chapitre II : Matériel et méthodes
ions iodure I- (incolores) s’oxydent et forment dans un excès de KI, les ions tri-iodure I3-
(jaune, figure 26), qui sont par la suite dosés par spectrophotométrie à 350 nm.
Figure 26. Formation des ions tri-iodures caractérisés par la coloration jaune
Par ailleurs, la mesure de H2O2 dans une solution de NBB semble à priori difficile
dans la mesure où la coloration jaune des ions I3– est masquée par la coloration bleu foncé du
NBB. Pour cela, nous avons soumis un mélange de NBB et de KI aux ultrasons pendant 30
min et nous avons suivi l’évolution de chacun des composés par l'intermédiaire du spectre sur
toute la gamme du visible (figure 27).
82
Chapitre II : Matériel et méthodes
Il en résulte que les pics du NBB et des ions tri-iodures ne se chevauchent pas, et par
conséquent, qu'il est donc possible de déterminer le peroxyde d'hydrogène formé dans une
solution de NBB.
I3-
0,68
30 min.
0,544
20 min
12 min
Densité optique
0,408 6 min
4 min
2 min
0,272 0 min
NBB
0,136
0
300 400 500 600 700
Longueur d'onde, ηm
Figure 27. Spectres d’absorption des ions I3– (λmax = 350 nm) et du NBB
(λmax = 618 nm), f : 278 kHz, P : 100W, V: 400 mL, T : 20 ±1 °C.
Le principe demeure le même que précédemment sauf que dans cette détermination, la
solution aqueuse de KI + Mo est directement soumise aux irradiations ultrasonores
contrairement au cas précédent où le mélange KI + Mo n’intervient qu’après arrêt complet de
l'irradiation ultrasonore. L'objectif est d'évaluer la capacité des ultrasons à travers des entités
produites à oxyder les ions iodures. De ce fait, une solution de 400 mL contenant du KI (1
g/L) et du (NH4)6Mo7O27, 4H2O (10-4 M) est soumise directement aux irradiations
ultrasonores. Un volume d'environ 1,5 mL est échantillonné à intervalle de temps régulier, et
est aussitôt analysé au spectrophotomètre UV-visible.
83
Chapitre II : Matériel et méthodes
84
Chapitre II : Matériel et méthodes
Tous les protocoles étant maintenant établis, nous présenterons et discuterons les résultats
obtenus dans la partie suivante. Elle sera divisée essentiellement en deux chapitres qui
correspondent directement aux différentes méthodes présentées précédemment, à savoir la
sonochimie et la photochimie.
85
CHAPITRE 3 :
RESULTATS ET
INTERPRETATIONS
PARTIE 1 : SONOLYSE……………………………………………………………………. 87
III.1 Caractérisation du réacteur……………………………………………………………... 88
III.2 Dégradation sonochimique du Naphtol Blue Black.……..……………………………. 102
III.3 Dégradation sonochimique du nonylphénol……………...…………………………….. 128
III.4 Dégradation sonochimique du mélange NBB/NP…..………………………………….. 139
PARTIE 2 : PHOTOLYSE ET ETUDE COMPARATIVE DE POA……………………. 149
III.5. Dégradation par photolyse directe de deux xénobiotiques ……………...……………… 150
III.6. Etude comparative des procédés sono et photochimiques……………………………... 165
III.7. Etude comparative des procédés d’oxydation avancée………………………………... 171
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Dans la suite, les résultats expérimentaux seront présentés et discutés. Ces données
concernent les études cinétiques de la dégradation du NBB et du NP, seuls et en compétition.
Nous aborderons également l’influence de différents paramètres opératoires (puissance
ultrasonore, concentration des polluants, pH, etc…) et de l’effet de certains ions minéraux
(les ions bicarbonates, chlorures, sulfates et phosphates).
87
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
III.1.1. Calorimétrie
304
40 302
a) 10 W
Température, °K
300 20 W
298 50 W
75 W
296 100 W
294
30 292
290 R² = 0,985
0 100 200 300
dT/dt, °K/s
temps, seconde
20
10
b)
0
0 20 40 60 80 100
Pfournie, W
Cette dernière peut être remplacée dans la relation Eq. 3.1.1 pour obtenir le rendement
calorimétrique de la céramique utilisée.
88
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
/
rcalorimétrique = 100 x
= 100M*Cp*(
) Eq. 3.1.1
Le rendement déduit de la relation 3.1.1 est de 58,5%, valeur qui est en accord avec la
plage donnée dans la littérature, allant de 45 à 70% (Löning et al., 2002). Cela signifie qu’une
puissance électrique d’environ 100 W est nécessaire pour dissiper une puissance de 58,5 W.
Par ailleurs, une étude calorimétrique similaire dans des solutions aqueuses de NBB et
de NP de même concentration a été faite. Notre but est de voir si la puissance ultrasonore
varie selon la zone de réaction. On constate que la différence n’est pas observable en absence
ou en présence de chacun de substrats mentionnés. Cela pourrait être du à la faible
concentration des solutés. Par ailleurs, pour des concentrations relativement fortes en substrat,
la viscosité du milieu croit et par conséquent, le rendement calorimétrique baisse, sans que
cela soit directement lié à la présence du polluant.
Les deux méthodes mettent principalement en évidence l’activité chimique induite par
ultrasons et obéissent au même principe, à savoir l’oxydation des ions I- en I3- dont la
détection est réalisée par spectrophotométrie UV-visible. Cependant, chacune des méthodes
possède un objectif bien précis : l’une sert à déterminer le potentiel de production de H2O2
précurseurs des espèces produites (HO• et HOO•) directement par cavitation et l’autre permet
de mesurer la capacité du système à oxyder le KI. Tout au long de cette partie dédiée à la
dosimétrie sonochimique, nous mettrons en évidence l’effet de la puissance acoustique
comme paramètre fondamental.
La moitié du siècle précédent est marquée par l’intérêt qu’ont porté les chercheurs
dans le domaine de la sonochimie à la détermination du peroxyde d’hydrogène produit par
sonolyse en milieu aqueux. Différentes approches analytiques existent, parmi lesquelles la
dosimétrie de Fricke, la fluorométrie, le dosage par thiosulfate et la dosimétrie à l’iode
(Mason et al., 1995, Iida et al., 2005). Cette dernière reste la plus largement utilisée
(Weissler, 1959). Même si légèrement moins précise que certaines autres méthodes, elle offre
89
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
cependant l’avantage d’être plus simple d’utilisation, très rapide et ne nécessite pas une
quantité élevée d’échantillon.
3
3 2,81
2,81
Vitesse initiale de production de
2,5
Vitesse initiale de production du H2O2
2,00
2 Pseuil = 4,7 W R² = 0,998
H2 O2 , µM
2,5 1,5
1,28
1
2,00
2
0,5 0,48 b)
0
(µM/min)
0 20 40 60 80 100
Puissance, W
1,5 1,28
0,48
0,5
a)
0
20 50 75 100
Puissance, W
Figures 30a et 30b. Vitesse initiale de production de H2O2 en fonction de puissance appliquée
et linéarisation (f : 278 kHz, V : 400 mL, T : 20 ±1 °C).
O2 + )))) → 2O (3.2)
90
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
H• + O → HO• (3.6)
Ainsi, en absence de tout substrat susceptible de réagir avec les radicaux HO• et HO2•
formés, ces derniers se recombinent préférentiellement à l’interface de la bulle (Henglein and
Kormann, 1985) pour former essentiellement le H2O2 (3.8 et 3.9) qui est représentatif de la
concentration en HO• et HO2• produits et diffusés à l’interface. En plus le H2O2 est aussi
produit par réaction entre HO• et O (3.10). Le fait que les constantes cinétiques k3.8>>k3.9,
traduit tout simplement que la voie de production de H2O2 via HO2• (3.9) est négligeable
comparée à celle formée à partir HO• (3.8).
Par contre, une large proportion soit 80% des espèces générées par sonolyse se
recombinent à haute température à l’intérieur de la bulle pour former le H2O, O et O2 (3.11 à
3.14) (Fischer et al., 1986 ; Jiang et al., 2006). Ces entités n’entrent pas dans le bilan des
espèces utiles, car ne servent ni à la formation de H2O2 ni à l’oxydation de substrats présents
en solution.
2O → O2 (3.13)
91
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
lorsque la température baisse la puissance seuil augmente, ce qui signifie qu’à 5°C, ainsi leur
valeur passe de 3 W à 8 W (Entezari and Kruus, 1994).
En sonochimie, il s’est toujours posé le problème de la détermination du pouvoir
oxydant des ultrasons (à travers des réactions secondaires des espèces oxydantes générées) sur
les substrats. C’est pour cette raison qu’avant d’aborder la partie consacrée à la dégradation
des polluants organiques, nous avons jugé utile de faire une investigation sur la capacité du
système mis sur pied à oxyder le KI.
Considéré comme un outil d’appréciation des effets chimiques induits par ultrasons,
l’oxydation de KI est largement pratiquée en sonochimie pour quantifier la capacité des
espèces générées à oxyder un substrat (Merouani et al., 2010 ; Hart and Henglein, 1985) .
Dans ce contexte, 400 mL d’une solution de KI (1g/L) ont été soumis aux irradiations
ultrasonores et l’oxydation de KI a été suivie par mesure spectrophotométrique. L’évolution
de la vitesse initiale d’oxydation de KI en fonction de la puissance appliquée est présentée par
la figure 31a.
3 R² = 0,997
2,86
Vitesse initiale d'oxydation de
2,5
2 Pseuil = 5,2W
KI, µM/min
Vitesse initiale d'oxydation de KI
2,5 1,5
1
2,17
0,5
b)
2
0
(µM/min)
0 20 40 60 80 100
Puissance, W
1,5 1,27
0,49
0,5
a)
0
20 50 75 100
Puissance, W
92
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
évaluée à 5,2 W (Jiang et al., 2002). En fait les espèces oxydantes produites lorsque l’eau
désionisée est irradiée réagissent aussitôt avec les ions iodures I- pour former les ions tri-
iodures, caractérisés par la coloration jaune (détection par spectrophotomètre UV-visible).
Pour la première fois en 1959, Weissler a mis en évidence l’oxydation de KI par ultrasons en
suggérant dans la même occasion un schéma réactionnel (Weissler, 1959). Un mécanisme
plus complet impliquant les radicaux HO• et O• (en présence de O2) a été proposé Hart et
Henglein (1985). Ceux-ci suggèrent que ces espèces oxydent d’abord les ions iodures I- pour
former I2 (3.15 et 3.16) et ce dernier réagit à son tour avec les ions I- (en excès) pour former
les ions I3- (3.17).
I2 + I- → I3- (3.17)
Par contre, les radicaux HOO• ne réagissent pas avec les ions I-. Cependant, ils se
recombinent de préférence pour former le peroxyde d’hydrogène (3.9). De plus, en absence de
catalyseur, les ions I- réagissent très lentement avec le H2O2 et cette réaction est négligeable
comparée à leur oxydation par les radicaux HO•. Par ailleurs, le KI est très soluble dans l’eau,
par conséquent son oxydation a principalement lieu au voisinage de l’interface et au cœur de
la solution. C’est donc une fraction de ces espèces précitées non recombinées qui assurent
exclusivement l’oxydation de KI que nous pouvons résumer en deux étapes essentielles :
Pour cette caractérisation de l’activité ultrasonore, nous avons ajouté le molybdate (de
concentration 10-4 M) à la solution de KI (1 g/L), le tout a été soumis aux irradiations
ultrasonores pour des puissances variables dans une gamme allant de 20 à 100 W. La figure
32a illustre ainsi l’évolution de la vitesse initiale de l’oxydation de KI en fonction de la
puissance.
93
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
6 KI KI + Mo
Vitesse initiale d'oxydation de KI
4 5,26
Vitesse initiale d'oxydation de KI en
(µM/min)
3
5
2
présence du Mo (µM/min)
4,08
4
1
b)
0
20 50 75 100
Puissance/W
3 2,60
0,99
1
a)
0
20 50 75 100
Puissance, W
Nous avons montré au paragraphe I.3 dans un premier temps que le KI est oxydé par
les espèces non recombinées et dans un second temps la formation de H2O2 par recombinaison
des radicaux HOO• et une fraction des radicaux HO• a lieu (3.8 à 3.10). Or le H2O2 réagit très
lentement avec le KI. Néanmoins, l’ajout du molybdate permet d’activer le H2O2 et par
conséquent, cet ajout facilite l’oxydation de KI (figure 33). Par conséquent, on obtient un
maximum d’oxydation de KI, orchestré premièrement par les espèces oxydantes générées et
deuxièmement, par les espèces secondaires (H2O2) activées par le molybdate (Arias et al.,
1990).
94
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
x2
O2
x2
H2O + ))) HO° + H° HOO° H 2 O2 + O 2
KI
I3-
Mo
Ce résultat est en accord avec les travaux publiés par Hart et Henglein (1985). Ces
auteurs ont soumis aux ultrasons une solution de KI (0,1M) saturée par un mélange variable
de O2 et Ar en absence et en présence du molybdate d’ammonium (5.10-4M). Ils ont donc
montré que l’oxydation des ions I- en I2 est plus importante en présence du molybdate
d’ammonium qu’en son absence. En outre, le tétrachlorure de carbone permet aussi
d’accélérer l’oxydation de KI donnant par exemple lieu à une augmentation de facteur cinq
(Weissler et al., 1950). D’après Suslick et al. (1981) par contre le CCl4 diminue fortement la
reproductibilité des ultrasons, ce qui serait néfaste pour la dégradation d’un composé
récalcitrant qui nécessite plus d’espèces oxydantes.
L’ion molybdate réagit avec le H2O2 pour former l’ion peroxomolybdate, qui réagit
ensuite avec l’ion iodure en milieu acide et donne à travers un intermédiaire (complexe
molybdate) l’acide hypoiodeux. Ce dernier forme par réaction avec les ions iodures le diiode
dont la présence dans un excès des ions iodures produit les ions triiodures (Figure 34).
95
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
2-
O
O Mo O HOI I- (incolore)
H 2O 2
O
O OH
O Mo
O OI
2- I2 HO-
H 2O O O
O Mo I- + I-
O O H+
I3- (jaune)
Malgré les nombreuses publications sur l’oxydation de KI, le débat est loin d’être clos
surtout dans un domaine tel que la sonochimie dont l’intérêt est grandissant. Par exemple,
bien que la détermination de H2O2 (oxydation ex-situ de KI) et l’oxydation de KI (oxydation
in-situ) par les effets sonochimiques obéissent toutes deux au même principe (à savoir
l’oxydation des ions I- donnant lieu aux ions I3-, cf chapitre II, paragraphe 5.2.2), les résultats
expérimentaux réalisés dans ces conditions, semblent loin d’être similaires. Cette différence
est clairement observable sur la figure 35, qui présente les vitesses initiales obtenues avec ces
deux méthodes.
6
H2O2 KI + Mo
Vitesse initiale (µM/min)
0
20 50 75 100
Puissance/W
96
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
recombinées. Par contre, en absence de tout substrat l’irradiation de l’eau désionisée, conduit
à la recombinaison des radicaux (HO• et HOO•) puis la formation de H2O2 qui s’accumule
progressivement. Lorsque la concentration de H2O2 atteint une certaine valeur, des effets
inhibiteurs prennent place, ce qui conduit essentiellement à la consommation à la fois du
H2O2 accumulé et des radicaux susceptibles de former à nouveau le H2O2 (Mark et al., 1998).
Il s’agit notamment de la réaction entre les radicaux HO•, HOO• et H2O2 (3.14 et 3.18 à 3.21).
De plus, la présence du diazote (milieu saturé en air) conduit à la formation de l’acide nitreux
puis de l’acide nitrique par réaction avec le H2O2 (3.20 et 3.21) (Moumeni et al., 2012).
Par contre en présence du molybdate, le H2O2 est activé et, par conséquent, les
réactions inhibitrices (3.14 et 3.18-3.21) n’ont pas lieu, d’où l’oxydation optimale de KI.
C’est ce qui explique que nous n’avons pas autant de H2O2 formé que de KI oxydé en
présence de Mo (figure 35).
HO• + H2O2 → HOO• + H2O k3.18 = 2,7x107 M-1s-1 (3.18)
Dans la même logique, Nam et al. (2003) ont sonifié trois solutions dont les conditions
initiales sont différentes : une en absence de H2O2 initial et deux en présence de H2O2 initial
de concentration respective 30 et 60 µM. Pour le premier cas (eau ultra-pure seule), le H2O2
produit par ultrasons s’accumule suivant une parabole, passant de 0 à 69 µM en 15 min. Le
non linéarité de la production de H2O2 est dû au piégeage des radicaux HO• par ce dernier
(3.18) et sa pyrolyse à l’intérieur de la bulle. Pour les deux derniers cas, l’augmentation de
H2O2 reste faible et les deux courbes sont presque parallèles, ce qui renforce l’hypothèse selon
laquelle le H2O2 initial piège les radicaux HO• formés.
97
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
sont des intermédiaires pour la formation de H2O2 (Henglein, 1987). Ainsi, à 100W le
système utilisé est capable de générer le peroxyde d’hydrogène à une vitesse de 2,81 µM/min,
une quantité relativement suffisante pour détruire les polluants récalcitrants. Dans les mêmes
conditions une oxydation maximale de KI est atteinte en présence du Mo, soit une vitesse de
5,26 µM/min.
On peut retenir de cette étude que le système utilisé est capable de produire 1,74 µM
de H2O2 par heure et par unité de puissance à 278 kHz. Il peut également oxyder le KI à une
vitesse de 1,68 µM.h-1.W-1. De plus, l’ajout d’un catalyseur à l’instar de molybdate améliore
le rendement d’un facteur proche de 2, soit 3,24 µM.h-1.W-1 (figure 35). Pour mieux situer ces
résultats par rapport aux données rencontrées dans la littérature, nous avons fait une étude
comparative à partir de quelques travaux antérieurs, que nous avons récapitulés dans le
tableau X.
Il ressort que la vitesse obtenue est relativement moins élevée que celles réalisées par
les deux autres. Par contre, quand on regarde les conditions expérimentales, notre système est
plus efficace, dans la mesure où nous n’avons utilisé en termes de pourcentage massique de
KI que 0,4 wt% alors que cette concentration est plus élevée pour ces auteurs soit 3,5 wt% et
une fréquence de 278kHz qui est largement inférieure à celle utilisée par les autres (640 et
900 kHz). Ceci est en accord avec la littérature qui mentionne que les meilleurs effets
sonochimiques sont obtenus lorsque la fréquence se situe dans la gamme de 200 à 400 kHz
(Pétrier and Francony, 1997 ; Torres et al., 2008 ; Jiang et al., 2006).
Dès lors que la quantité de H2O2 produit par unité de puissance est connue, il devient
alors possible de prévoir l’énergie convenable pour détruire une quantité de polluant bien
98
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
précise. De même, il est ainsi possible de modéliser un système dont la variable judicieuse
pourrait être la puissance, en fonction de la charge du polluant à éliminer.
3,5
3
Vitesse par unité de puissance
2,5
(µM/h/W)
1,5
0,5
0
KI_Mo KI H202 (KI_Mo) - KI
Figure 36. Vitesses par unité de puissance d’oxydation de KI (KI seul et KI/Mo) et de
production de H2O2 (f : 278 kHz, V : 400 mL, T: 20 ±1 °C).
Par ailleurs, il ressort des données de la figure 36 que la différence entre la vitesse
d’oxydation de KI par unité de puissance en présence et en absence du molybdate vaut
sensiblement la vitesse de formation de H2O2 qui n’est autre que la vitesse d’oxydation de KI
par l’eau ultrasonifiée. Ceci justifie l’hypothèse selon laquelle la formation H2O2 a lieu à
l’interface bulle-solution. Vu son caractère hydrophile, l’iodure de potassium n’a pas accès à
cette partie de la bulle donc que ce soit en présence ou en absence de KI, ce serait la même
quantité des radicaux HO• qui vont se recombiner pour former le H2O2. Une observation sur
ce point a été faite par Hart et Henglein, (1985). Pour ces auteurs, la différence de rendement
entre les solutions irradiées en présence et en absence du catalyseur (molybdate) est à peu près
égale au rendement de la production de H2O2 dans l'eau pure irradiée.
99
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
7
V(KI)
6
Vitesse initiale d'oxydation de
V(KI+Mo)
5
KI, µM/min
0
0 0,5 1 1,5 2
Concentration, g/L
Gutierrez et al. (1991), ayant travaillé à une fréquence de 1 MHz, pensent que le
rendement de l’oxydation de KI n’est pas lié à sa concentration. Toutefois, le comportement
observé ici sur l’oxydation de KI en fonction de sa concentration est en accord avec les
données de la littérature (Naidu et al., 1997 ; Shirgaonkar and Pandit, 1997 ; Hart and
Henglein, 1985).
100
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
nous mesurons à nouveau l’absorbance, que nous notons A2. La différence A2-A1 nous permet
de déduire la concentration ∆C de H2O2 illustrée par le tableau XI.
Mo (mM) 0,1 1 10
t, min ∆C (µM)
0 0 0,34 2,38
5 3,86 7,8 7,65
10 5,83 14,58 8,07
15 16,82 17,31 11,82
20 16,93 22,27 18,44
Conclusion partielle
D’abord, la mesure des effets physiques et chimiques induits par ultrasons a permis de
mettre en évidence un rendement calorimétrique de 58,5%. Ce bon rendement explique la
forte activité chimique enregistrée, soit une production de H2O2 avec une vitesse de 1,74
µM.h-1.W-1 d’une part et d’autre part l’oxydation de KI avec la vitesse est de 1,68 µM.h-1.W-1.
Par ailleurs, l’ajout de molybdate comme catalyseur d’activation de H2O2 a eu pour
conséquence une augmentation de l’oxydation de KI qui est passée à 3,24 µM.h-1.W-1. Enfin,
les concentrations de KI et du molybdate ont un effet sur l’oxydation de KI qui augmente
jusqu’aux maximum de 10-2M et 10-3M respectivement. Ces caractéristiques constituent donc
un fort potentiel pour la dégradation des xénobiotiques ciblés dans cette étude.
101
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Le Naphtol Blue Black est un exemple typique de colorant azoïque, hydrophile, utilisé
dans diverses industries notamment les savonneries. Bien qu’aucune littérature n’existe sur sa
carcinogénèse, il reste cependant une source de pollution non négligeable et ses produits de
dégradation génèrent des composés aromatiques, mutagènes et cancérigènes. Ses propriétés
physico-chimiques ont déjà été présentées en détail au chapitre II. Malgré le fait qu’il ne
présente pas une très forte charge organique, il constitue néanmoins une pollution visuelle
remarquable. Nous nous intéresserons donc au suivi des cinétiques de sonodégradation de ce
composé ainsi qu’à l’influence de la puissance et de la concentration initiale sur cette
cinétique. Le taux d’utilisation du peroxyde d’hydrogène sera également étudié. Puis, l’effet
de pH et l’influence de l’ajout d’ions minéraux seront présentés et discutés.
Plusieurs modèles sont utilisés pour décrire la cinétique de disparition des composés
organique par sonochimie. Cependant, il n’existe pas une règle applicable à tous les
composés. C’est en fonction du comportement de ce dernier lors de sa dégradation que l’on
peut envisager le modèle cinétique.
0,6
0,4
0,2
0
0 20 40 60 80 100 120
t, min
102
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
C Co x e Eq 3.1
HO• + I → P (3.24)
103
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Cependant, le modèle cinétique de 1er ordre d’une telle réaction établi par plusieurs
auteurs fait l’objet de controverse. Ainsi, certains ont défendu que la dégradation
sonochimique des composés n’obéit pas à la cinétique de 1er ordre (Torres et al., 2008 ;
Serpone et al., 1994). Pour vérifier notre hypothèse selon laquelle la dégradation
sonochimique du NBB serait une cinétique de 1er ordre, nous avons tracé les vitesses initiales
obtenues pour chacune des concentrations initiales en fonction de cette concentration initiale,
ce qui correspond à la figure 39a. Puis ces résultats ont été analysés en appliquant les cinq
formes linéaires différentes proposées par Okitsu et al. (2005). Seules les résultats de la forme
1, décrit par les équations Eq. 3.2 et Eq 3.3, sont présentés ici car il s’agit de la forme la
mieux adaptée, avec un coefficient de régression plus élevé (R2 = 0,999).
′
Vi Eq. 3.2
1
Vitesse initiale de dégradation du NBB
0,9
0,8
0,7
(µM.min-1 )
0,6 40
R² = 0,999
35
0,5 30
1/V, (µM/min)-1
25
0,4
20
0,3 15
10 b)
0,2 5
0
0,1 a) 0 0,5 1 1,5 2
1/Ci, µM.L-1
0
0 20 40 60 80 100
Concentration initiale, µM
104
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Par ailleurs, on admet que les molécules de NBB sont disposées de manière
concentrique au voisinage de l’interface sans toutefois s’adsorber sur cette dernière, compte
tenu du caractère hydrophile de la molécule cible. Ainsi, il s’établit un gradient de
concentration entre la couche limite et le cœur de la solution (Figure 40). Pour cette raison, sa
décoloration a principalement lieu dans la solution.
NBB
Solution
Interface
bulle/solution
Intérieur de
la bulle
Couche
concentrique
limite très proche
de l’interface
On peut conclure que le modèle utilisé s’inspire de celui de Langmuir et est très
proche du modèle cinétique d’Okitsu (Okitsu et al. 2005). La différence en est que dans notre
cas, nous excluons toute adsorption du substrat sur la couche interfaciale principale, mais
plutôt une disposition concentrique des molécules à proximité de l’interface bulle/solution
comparable à une couche secondaire et implantée dans la solution.
D’un point de vue coût énergétique, la puissance est l’un des critères les plus
importants pour déterminer le choix d’une technique de traitement des eaux. En sonochimie,
elle constitue également l’un des paramètres fondamentaux et responsables de l’activation
moléculaire.
A cet effet, à une fréquence opératoire de 278 kHz, différentes puissances ultrasonores
(20, 50, 75 et 100 W) ont été appliquées à une solution de 8,1 µM de NBB. L’effet de
puissance sur la décoloration du NBB est illustré par la figure 41. Les données de cette figure
105
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
indiquent que la concentration relative de NBB décroit en fonction du temps d’exposition aux
irradiations (Figure 41a).
0,25
1
R² = 0,992
NBB, µM/min
0,15 Pseuil = 5,3 W
0,8 0,1
0,05 b)
[NBB]/[NBB]o
0,6 0 20 40 60 80 100
Power,W
0,4
a)
0,2 20 W
50 W
75 W
100 W
0
0 30 60 t, 90
min 120 150 180
Figures 41a et 41b. Effet de la puissance sur la sonodégradation du NBB ([NBB] 0: 8,1 µM ,
f : 278 kHz, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
106
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
0,8
[NBB]/[NBB]o
0,6
0,4
20 W 50 W
0,2 75 W 100 W
0
0 2 4 6 8 10
t, min
107
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
cette logique, les spectres de la figure 43 montrent que la variation du pH ne déplace pas la
bande d’absorption du NBB qui se situe autour de 618 nm. De même, il n’y a pas de
modification de l’amplitude du signal. Il en ressort que si le pH s’avère influencer la
sonodégradation du NBB, cette influence ne sera pas due à une variation de sa coloration.
0,4
pH = 10,8
pH = 5,4
0,3 pH = 3,0
Densité optique
0,2
0,1
0
200 300 400 500 600 700
Longueur d'onde, ηm
108
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
1
pH = 3
pH = 5,4
[NBB]/[NBB]o 0,8 pH = 10,8
0,6
0,4
0,2
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
Figure 44. Influence du pH à forte concentration de NBB ([NBB] 0: 8,1 µM, f : 278 kHz, P :
100 W ; V : 400 mL et T = 20 ± 1°C).
Des essais de décoloration sous ultrasons ont été mis en œuvre à faible concentration
en NBB (0,5 M). Contrairement à ce qui est attendu, pour cette faible concentration, l’ordre
de conversion en fonction du pH est le suivent pH 10,8 > pH 3 > pH 5,4 comme en témoigne
la figure 45.
L’effet acide (à pH 3) sur la décoloration du composé reste sans modification par
rapport aux plus fortes concentrations. Par contre, l’abattement le plus important est noté à pH
10,8. Ce comportement pourrait s’expliquer des deux manières suivantes :
109
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
0,8
[NBB]/[NBB]o
0,6
0,4
pH = 3
0,2
pH = 5,4
pH = 10,8
0
0 2 4 6 8 10
t, min
Figure 45. Influence du pH à faible concentration de NBB ([NBB] 0: 0,5 µM, f : 278 kHz, P :
100 W ; V : 400 mL et T = 20 ± 1°C).
Ce raisonnement sera également développé dans les prochains paragraphes, présentant les
effets des ions bicarbonates sur la sonodégradation du NBB.
Dans l’ensemble, la formation de ces deux radicaux (HO• et CO3-•) à pH = 10,8 a un
impact positif sur la dégradation du NBB à faible concentration (0,5 µM). Par ailleurs, la
110
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
question sur la production de H2O2 a été largement discutée au paragraphe 1.2.1, mais une
autre question demeure, celle de l’utilisation de ces entités dans la dégradation du NBB.
Lorsqu’on soumet une solution aqueuse de NBB (8,1 µM) aux ultrasons à 278 kHz, sa
concentration initiale décroit exponentiellement en fonction du temps selon une cinétique
apparente de premier ordre. Un taux d’abattement de plus de 95% est atteint après 2h de
traitement ultrasonore (figures 46 et 48). La figure 46 présente également la formation de
peroxyde d’hydrogène. Ainsi, on peut observer que la formation de H2O2 est légèrement
diminuée en présence du NBB par rapport à une sonification sans NBB (∆[H2O2] ≈ 7,42 µM à
30 min).
8 100
[NBB]
7
H2O2 sans NBB
= ∆[H2 O2 ] = 7,42 µ M 80
6 H2O2 avec NBB
5 60
[NBB], µM
H2 O2 , µM
4
3 40
2
20
1
0 0
0 20 40 60 80 100 120
t, min
Figure 46. Production de H2O2 en présence et en absence du NBB ([NBB] o: 8,1 µM, f : 278
kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
111
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
50 100
NBB (48,66 µ M)
45
H2O2 sans NBB 80
∆[H 2O2] = 23,13 µM H2O2 avec NBB
40
[H2O2], µM
[NBB], µM
60
35
40
30
20
25
20 0
0 20 40 60 80 100 120
t, min
Figure 47. Production de H2O2 en présence et en absence du NBB ([NBB] o: 48,66 µM, f : 278
kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
1,5
0,5
0
0 20 40 60 80 100
Concentration initiale, µM
112
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Par ailleurs la consommation de H2O2 par le NBB est aussi observable lorsque la
puissance appliquée varie, ce qui a été étudié par l’intermédiaire des figures 41. Quelle que
soit la puissance appliquée, la moyenne du taux d’utilisation de H2O2 ne dépasse pas 8% pour
une concentration de 8,1 µM après 30 min de traitement. En parallèle à cette donnée, la
vitesse de disparition du NBB augmente linéairement avec la puissance. Ainsi, elle est
multipliée par 5, passant de 0,04 µM/min pour 20 W à 0,20 µM/min pour 100 W (figure 41b).
Des observations similaires ont été faites antérieurement par certains auteurs (Méndez-
Arriaga et al., 2008 et Hartmann et al., 2008). En eau désionisée, les résultats conduisent à la
figure 49.
3
Vitesse de production de H2 O2 , µM/min
1,5
0,5
0
20 50 75 100
Puissance, W
113
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
8%
7%
6%
Vd_NBB/Vf_H2 O2
5%
4%
3%
2%
1%
0%
20 50 75 100
Puissance, W
Figure 50. Rapport de la vitesse de disparition (Vd) du NBB (8,1 µM) sur la vitesse de
formation (Vf) de H2O2 en absence du NBB en fonction de la puissance appliquée
(f : 278 kHz, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
Ce résultat conforte finalement notre hypothèse selon laquelle le NBB est détruit par
attaques radicalaires des HO• non recombinés au sein de la solution. La sonochimie constitue
une excellente source de production in situ des radicaux HO• qui sont conservés dans la
solution sous forme de H2O2. La vitesse de réaction du NBB avec les HO• est très faible par
rapport à leur vitesse de recombinaison d’où le faible taux d’utilisation de H2O2 observé
(figure 48).
Dans la plupart des eaux résiduaires et naturelles, les études physico-chimiques ont
révélé la présence permanente des ions minéraux qui en font naturellement partie intégrante.
Cependant, leur teneur dépend essentiellement de la nature de l’effluent et de l’environnement
où le prélèvement a été réalisé. Les minéraux principalement rencontrés sont notamment les
ions HCO3-, SO42-, Cl-, et PO43-. Dans cette étude, nous allons traiter de l’effet de ces ions
inorganiques sur la dégradation de NBB, en mettant plus particulièrement l’accent sur les ions
bicarbonates et les ions phosphates.
De manière générale, les ions HCO3- sont perçus comme un obstacle à l’efficacité des
procédés d’oxydation avancée, dans la mesure où ils sont considérés comme des inhibiteurs
des radicaux HO• (Pignatello et al., 2006 et Neppolian et al., 2002). Or ces procédés et
notamment la sonochimie sont basés sur la génération des radicaux HO• qui sont alors piégés
114
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
en présence de bicarbonates et ne peuvent réagir avec leur cible. Toutefois, leur rôle dans le
traitement de ces effluents par sonochimie reste encore ambigu (Chen et al., 1997) car
certains travaux dans la littérature soulignent leur effet accélérateur sur la sonodégradation
des polluants récalcitrants, à faible concentration (Chiha et al., 2011 et Guzman-Duque et al.,
2011).
Par ailleurs, la figure 51 montre l’effet des ions HCO3- sur la production in situ de
H2O2 en absence et en présence du NBB. On observe une diminution forte (plus de 70%) de la
vitesse de production de H2O2, qui passe de 2,81 à 0,84 µM/min lorsque des ions HCO3- (2,97
mM) sont ajoutés à l’eau pure. Cet abaissement est une conséquence directe de l’inhibition
des radicaux HO• par les ions HCO3- (3.25).
3 2,81
Vitesse initiale de production de
2,5
2
H2 O2 , µM/min
1,5
1 0,84
0,73
0,5
0
Eau Eau + bicarbonate Eau + bicarbonate + NBB
Figure 51. Effet de HCO3- (2,97mM) sur la vitesse de production de H2O2 en absence et en
présence du NBB ([NBB]O : 8,1 µM, f :278 kHz, P :100 W, V :400 mL et T :20 ± 1°C).
115
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Pour mieux comprendre l’influence des bicarbonates en milieu aqueux, des solutions
de NBB, dans une large gamme de concentrations initiales, allant de 0,5 à 48,66 µM, ont été
soumises aux ultrasons à 278 kHz, en présence et en absence d’ions bicarbonates. La
concentration du NaHCO3 employé est de 250 mg/L (soit 2,97 mM), valeur qui représente à
la fois sa valeur optimale d’après la littérature (Guzman-Duque et al., 2011 ; Minero et al.,
2008) et sa teneur couramment rencontrée dans le milieu naturel. A partir de chaque
cinétique, la valeur de la vitesse initiale de dégradation est calculée, et les résultats ainsi
obtenus sont présentés à la figure 52.
0,6
NBB, µM/min
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0
0,5 1 2,02 4,05 8,1 16,22 32,44 48,66
Concentration initiale, µM
Figure 52. Effet des ions HCO3- (2,97mM) sur la vitesse de sonodégradation du NBB en
fonction de sa concentration initiale (f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
116
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
4,5
4
3,5
Vi_NBB_HCO3- / Vi_NBB
3
2,5
2
1,5
1
0,5
0
0 10 20 30 40 50
Concentration, µmol/L
Figure 53. Effet des ions HCO3- (2,97mM) sur le rapport des vitesses initiales de
sonodégradation (f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
A la concentration de 0,5 µM par exemple, la sonodégradation est 4,35 fois plus rapide
en présence des ions HCO3- qu’en absence (figure 53). Plus la concentration en polluant
augmente, plus l’effet des ions HCO3- diminue et tend à se stabiliser à partir de 32,44 µM, ce
qui correspond à un rapport de 1.
Ceci s’explique par le fait que les ions bicarbonates réagissent avec les radicaux HO•
dans la solution et il se forme des radicaux CO3-• (3.26) qui vont diffuser. Quoique moins
réactifs que les radicaux HO•, les radicaux CO3-• sont néanmoins de puissants oxydants (1,59
V/ENH à pH 7 ; Huie et al., 1991) et sont plus stables et plus mobiles. Ces caractéristiques
permettent aux radicaux CO3-• de réagir avec le NBB (hydrophile) au cœur de la solution et
d’augmenter ainsi sa vitesse de décoloration à faible concentration. Quand la concentration du
NBB est élevée, la concurrence à réagir avec les radicaux HO• s’accentue et la probabilité
pour que les HCO3- piègent les HO• diminue, ce qui conduit à une diminution globale de la
quantité des radicaux CO3-• et finalement, la vitesse de dégradation de NBB décroit. Ce
résultat est en accord avec certains travaux récents, pour lesquels l’effet néfaste des ions
bicarbonates pour des concentrations élevées du polluant a également été montré (Merouania
et al., 2010).
117
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
modèle cinétique plus adapté, type Langmuir basé sur un système de catalyse hétérogène où
la dégradation du NBB a lieu :
• au niveau d’une couche secondaire très proche de l’interface par les radicaux HO• et
• dans la solution par les radicaux CO3-• qui ont remplacé les radicaux HO•.
Un tel modèle cinétique est traduit par l'équation non linéaire Eq. 3.4, proposée par Serpone et
al., (1994) et repris par la suite par Chiha et al., (2010) et Kidak and Ince (2008).
Vi Vo Eq. 3.4
0,8
Vitesse initiale Vi (µmol/L/min)
0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50
Concentration initiale Ci ( mol/L)
Figure 54. Application du modèle cinétique de Serpone sur les cinétiques de sonodégradation
du NBB en présence des ions HCO3- (f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
118
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Pour mieux expliquer l’impact des ions bicarbonates, nous nous proposons d’appliquer
le modèle non linéaire de Langmuir pour une solution sans bicarbonates. Certes le modèle
non linéaire est moins adapté comparé au modèle linéaire appliqué au paragraphe 3.2.1.2 du
même chapitre. Néanmoins, il nous permet de faire une comparaison avec le modèle non
linéaire de Serpone pour une solution contenant les ions bicarbonates. En fait le décalage
observé entre les deux courbes sur la figure 54 explique fortement l’apparition du terme V0
dans l’équation Eq. 3.4.
Des essais ont été mis en œuvre, afin de voir si une synergie existe entre l’effet
bénéfique des bicarbonates à faible concentration en polluant et l’effet bénéfique de la
puissance, présentée préalablement. Dans cet objectif, la figure 55 présente les résultats
obtenus.
L’effet de la puissance en présence des ions bicarbonates montre que plus la puissance
croit, plus il se crée les radicaux HO• et dans ces conditions, plus il y aura plus des radicaux
CO3-• qui vont améliorer le taux de conversion du NBB (Figure 55). En outre, le transfert de
masse est amélioré lorsque la puissance augmente et cette amélioration se manifeste par une
augmentation de la vitesse de dégradation du NBB.
119
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
0,35 3
NBB sans bicarbonate
NBB avec bicarbonate
Vitesse initiale de décoloration du 0,3 VNBB_bicarbonate/VNBB
2,4
0,25
VNBB_HCO /VNBB
NBB, µM/min
1,8
0,2
-
3
0,15
1,2
0,1
0,6
0,05
0 0
20 50 75 100
Puissance, W
Figure 55. Effet combiné des ions HCO3- et de la puissance sur la vitesse initiale de
sonodégradation du NBB ([NBB] 0 : 8,1 µM, f : 278 kHz, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
En plus du fait qu’ils soient naturellement présents dans les ressources en eau, ces
anions sont également introduits dans les cycles naturels par les activités agricoles,
domestiques et industrielles. Cependant, leur effet sur l’efficacité de la technique
sonochimique demeure controversé. Ainsi, plus de travaux de recherche sont nécessaires pour
identifier leur rôle exact dans la dégradation sonochimique des micropolluants organiques.
120
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
1 aucun
NaHCO3
0,8
Na2SO4
NaCl
[NBB]/[NBB]o
0,6
Na3PO4
0,4
0,2
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
Figure 56. Effet des ions inorganiques sur la sonodégradation du NBB à concentration
relativement forte ([NBB]0 : 8,1 µM, f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
121
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
(Seymour et al.1997 ; Goel et al., 2004 ; Merouani et al., 2010). Du point vue chimique,
l’action radicalaire n’est pas à écarter, car ces ions sont des piégeurs des radicaux dont la
réaction avec les HO• conduit à la formation de leur homologue X• (X• = CO3-•, Cl2-•, SO4-• et
PO42-•). Ces radicaux sont connus pour leur pouvoir oxydant relativement intéressant (E° Cl2-
•
/2Cl- = 2,09 V), capable de dégrader les polluants organiques (Neta et al., 1988 ; Ross et al.,
1979).
Par contre, l’action des radicaux PO42-• est masquée par la basicité du milieu qui est
défavorable à la dégradation du NBB à concentration relativement élevée (8,1 µM) comme
nous l’avons montré au paragraphe 3.2.3.1 (figure 44). Aussi, des essais ont été entrepris pour
des concentrations faibles en polluant organiques (0,5 µM) dont les résultats sont exposés à la
figure 57.
1 aucun
NaHCO3
Na2SO4
0,8
NaCl
Na3PO4
[NBB]/[NBB]o
0,6
0,4
0,2
0
0 2 4 6 8 10
t, min
Figure 57. Effet des ions inorganiques sur la sonodégradation du NBB à concentration
relativement faible ( [NBB] 0 : 0,5 µM, f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
Pour des solutions de faible concentration du NBB (0,5 µM) contenant du NaCl ou
Na2SO4, la figure 57 montre que la vitesse d’élimination du NBB n’est pas affectée de façon
122
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Afin d’avoir une idée exacte sur l’apport des ions SO42-, Cl- et PO43- dans la
sonodégradation du NBB, les solutions de NBB (8,1 et 0,5 µM) contenant les acides de ces
ions de même pH (fixé à 3) ont été soumises au traitement sonochimique à 278 kHz. Les
résultats obtenus sont représentés par les figures 58 et 59 respectivement.
seul
0,8 H2SO4
HCl
H3PO4
[NBB]/[NBB]o
0,6
0,4
0,2
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
Figure 58. Effet des ions inorganiques en milieu acide sur la sonodégradation du NBB (pH =
3 ; [NBB] 0 : 8,1 µM, f :278 kHz, P :100 W, V :400 mL et T :20 ± 1°C).
Toutes les trois solutions étant de même acidité (pH = 3), la différence viendrait
certainement de l’action des anions. Cependant, nous n’aurons forcement pas les même
anions que précédemment car ils prennent des formes plus ou moins protonées en fonction de
l’acidité du milieu. Les formes prédominantes sont respectivement les ions SO42-, Cl- et
H2PO4-. D’après la figure 58, l’ordre de conversion en fonction de l’action de radicaux est le
suivant : H2SO4 > HCl > H3PO4, ce qui correspond respectivement aux radicaux
123
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
suivants : SO4-•, Cl2-• et H2PO4• obtenu par réaction avec les radicaux HO• (3.30, 3.31, 3.34 et
3.35).
0,8
[NBB]/[NBB]o
0,6
0,4
seul
H2SO4
0,2 HCl
H3PO4
0
0 2 4 6 8 10
t, min
Figure 59. Effet des ions inorganiques en milieu acide sur la sonodégradation du NBB (pH =
3 ; [NBB] 0 : 0,5 µM, f :278 kHz, P :100 W, V :400 mL et T :20 ± 1°C).
Par ailleurs, le pouvoir oxydant des différents radicaux formés pourrait également
expliquer cette augmentation de la vitesse de disparition du NBB. D’après les données de la
littérature, l’ordre de réactivité des radicaux est: SO4-• > H2PO4• > Cl2-•, ce qui correspond à
l’ordre de leur potentiel d’oxydation.
Les résultats de ces expériences sont récapitulés dans la figure 60 qui montre
l’évolution de la constante de vitesse selon les zones de pH étudiées. L’effet de ces ions est
bien observable et particulièrement accentué à pH 3,1 et 8 avec des maxima de 0,039 et 0,038
124
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Cependant, les ions phosphates sont connus pour leur effet inhibiteur des radicaux OH•
conduisant à la formation des radicaux phosphates (3.32, 3.34 - 3.36). Il a été rapporté qu’en
solution et en absence de tout substrat, la durée de vie des radicaux phosphates est de l’ordre
de plusieurs millisecondes (Rosso et al., 1960) et peuvent exister sous trois formes acide/base
(H2PO4•, HPO4-• et PO42-•) correspondant à trois zones de pH 3-4, 7-9 et 12 respectivement
(Jiang et al. 2002 ; Maruthamutu et Nita, 1977) qui sont mentionnées sur la figure 60. Il a été
mentionné dans la littérature que ces radicaux réagissent avec des composés organiques et
inorganiques soit par abstraction d’hydrogène ou par transfert d’électron augmentant ainsi
l’efficacité selon l’ordre suivant : H2PO4• > HPO4-• > PO42-• (Maruthamutu et Nita, 1978).
0 3 4 7 9 12 14
H2PO4• HPO4-• PO42-• pH
0,045 ? ?
-1
0,04
min-1min
0,035
de vitesse,
0,03
Rate constant,
0,025
0,02
Constante
0,015
0,01
0,005
0
5,4 (control) 3,1 4,8 8 10
pH
Figure 60. Effet des ions phosphates sur la sonodécoloration du NBB selon le pH ([NBB] 0 :
8,1 µM, f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ±1°C).
On constate tout d’abord que les valeurs de pH 3,1 et 8, pour lesquelles les constantes
de vitesse sont les plus élevées, appartiennent aux domaines de stabilité des radicaux H2PO4•,
HPO4-• définies par Maruthamutu and Nita, (1977) respectivement 3-4 et 7-9. Ce sont donc
ces radicaux qui ont amélioré la dégradation du NBB. En outre, à pH 4,8 les ions HPO42- sont
prédominants, mais ce pH ne correspond à aucun intervalle où l’existence des radicaux
125
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
H2PO4• est favorable. Dans ces conditions de pH, les radicaux H2PO4• se forment, mais sont
cependant très instables et donc défavorables à une amélioration du taux de sonodégradation
du NBB. Cela explique la faible constante de vitesse (K = 0,03 min-1) à pH 4,8.
Enfin, à pH 10, les ions HPO42- et PO43- sont prédominants. Deux effets néfastes
prennent place à la fois. Il s’agit de l’effet du pH (basique) qui est non seulement défavorable
à la sonodégradation du NBB, mais aussi à cette valeur précise de pH, aucune forme des
radicaux phosphates ne peut exister, ce qui explique la faible constante de vitesse.
Au final, les ions phosphates par l’intermédiaire de leurs radicaux peuvent avoir un
effet positif sur l’élimination sonochimique du NBB, mais cet effet positif dépend fortement
du pH d’existence de ces radicaux.
0,8
TOC/TOCo
0,6
0,4
0,2
0
0 180 360
t, min
Figure 61. Evolution du COT du NBB en fonction du temps de traitement aux ultrasons
([NBB] 0 : 97,32 µM, f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T :20 ± 1°C).
Le faible taux conversion du COT obtenu confirme que l’action des ultrasons sur le
micropolluant conduit aux intermédiaires organiques très hydrophiles et peu volatils, qui
migrent au cœur de la solution où ils se dégradent difficilement par attaque des radicaux HO•
126
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
(Guzman-Duque et al., 2011). Pour le même polluant, Stock et al. (2000) ont étudié sa
sonodégradation dans des conditions opératoires différentes : 640 kHz, 240 W de puissance
électrique, V = 500 mL et Co = 50 µM. Les auteurs ont obtenu après un temps d’irradiation
ultrasonore de 720 min un taux d’élimination du COT de 35%.
Conclusion partielle
127
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Le nonylphénol (NP) et ses dérivés éthoxylés (NPEOs) représentent à eux seuls plus
de 80% de la production des alkylphénols éthoxylés rencontrés sur le marché. Ils sont
reconnus comme substances dangereuses prioritaires et ont fait l’objet d’une limitation et d’un
suivi sévère par les législations (Directive Européenne 2003/53/CE du 18/06/2003). Des
informations plus détaillées sur sa stabilité, sa toxicité et ses activités oestrogéniques peuvent
être retrouvées au paragraphe 1.2.4 du chapitre I. Dès lors, la nécessité d’éliminer cette
substance dans les eaux résiduaires devient impérative. Bien que la littérature concernant le
traitement des effluents industriels contaminés par les colorants et les pesticides soit
abondante, on trouve très peu des travaux qui s’intéressent en détail à l’élimination
sonochimique du NP, qui constitue un sous-produit plus toxique que les composés parents
(NPEOs).
Dans cette partie, les performances de traitement ont été évaluées à travers différents
paramètres comme la concentration du NP, la puissance ultrasonore, le pH du milieu et les
effets des ions inorganiques.
Dans ce contexte, il a été montré dans la partie précédente que, du fait de son caractère
hydrophile, la dégradation sonochimique du NBB a lieu dans la solution suivant une cinétique
de premier ordre. Dans cette partie, nos études concernent le nonylphénol, un composé de
caractéristique différente du NBB. Ainsi, nous nous baserons sur des modèles existants
(Serpone et al., 1994 ; Kidack and Ince, 2008 ; Okitsu et al., 1995 ; Chiha et al., 2010) pour
étudier sa cinétique de sonodégradation. Cependant, il est important de noter que Ince et al.
(2009) ont montré que le modèle cinétique de dégradation du NP à 20 kHz est pseudo-premier
ordre pour des concentrations Co > 20 µM. A notre connaissance, aucun autre travail de type
128
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
cinétique n’est effectué à des concentrations Co < 20 µM du NP. Pour compléter ces
informations, nous nous sommes intéressés à la gamme de concentration comprise entre 0,50
et 24,32 µM (limite de solubilité).
1
24,5 µM
16,22 µM
0,8
8,1 µM
4,05 µM
[NP]/[NP]o
0,6
2,02 µM
0,4 1,01 µM
0,5 µM
0,2
0
0 20 40 60 80 100 120
t, min
Nous avons observé que le NP se dégrade plus rapidement pendant les 30 premières
minutes avec au minimum 80% de taux d’abattement pour les différentes concentrations, et
disparait totalement au bout de 120 min. On observe à partir de 30 min de traitement une
stabilisation des courbes. Ceci montrerait la difficulté des ultrasons à minéraliser les solutions
très fortement diluées. Par ailleurs, on constate que les concentrations du NP restants en
solution après traitement, que ce soit à 0,50 µM ou à 24,32 µM, sont presque identiques et
correspondent à la limite de détection du HPLC.
Une description des profils montre que la disparition du NP est une pseudo-cinétique
d’ordre un. En effet, les constantes de vitesse ont été estimées en utilisant la forme intégrée de
l’équation de la cinétique de 1er ordre :
129
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
où kapp est la constante de vitesse apparente (min−1), t le temps d’irradiation ultrasonore (min),
[NP] et [NP]o représentent la concentration de NP à l’instant t et to respectivement (µM).
Les données et les constantes de vitesse calculées sont présentées à la figure 63.
-0,4
24,5 µM
Ln([NP]/[NP]o )
-0,8 16,22 µM
8,1 µM
-1,2 4,05 µM
2,02 µM
-1,6 1,01 µM
0,5 µM
-2
En effet, le NP est non seulement un composé hydrophobe et non volatil, mais aussi
doté des propriétés tensioactives avec une structure bipolaire (queue hydrophobe et tête
hydrophile). Ces caractéristiques sont favorables à son adsorption sur la couche interfaciale
gas/liquide de la bulle comme expliqué à la figure 64, où la densité des radicaux OH• est plus
élevée (Gutierrez et al., 1991). Par conséquent, sa dégradation a principalement lieu à
l’interface par deux voies essentielles, qui sont l’attaque radicalaire et la pyrolyse au sein de la
bulle de cavitation (Vinodgopal et al., 2001 ; Yim et al. 2003).
Intérieur de la bulle
Interface bulle/solution
Solution
130
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
1,6
y = 0,159x
R² = 0,998
1,2
0,8
0,4
0
0 5 10 Concentration,
15 µM 20 25 30
Par rapport aux travaux de Ince et al., (2009) menés à 20 kHz, il faut noter que la taille
de la bulle de cavitation est inversement proportionnelle à la fréquence (D = 6,62/fréquence),
ce qui implique forcement que la bulle est plus petite à 278 kHz (haute fréquence) comparée à
20 kHz où elle est relativement plus grande. De plus, l’interface de la bulle de cavitation
constitue un potentiel site d’adsorption qui reste constant tout au long de l’opération (Okitsu
et al., 2005). Cette situation conduit à une saturation plus rapide de la surface de la bulle
même à faible concentration de l’adsorbat. Cependant l’avantage d’un tel système (278 kHz et
100 W) repose sur la présence d’un grand nombre de bulles et l’implosion plus violente, d’où
une dégradation plus rapide du polluant. La diminution de la vitesse de dégradation à 16,22
µM pourrait donc s’expliquer par la saturation des sites d’adsorption et la compétition plus
élevée au niveau de l’interface (Vinodgopal et al., 2001). Cependant, il est prématuré de
prédire ce comportement, nous avons besoin d’élargir la gamme de concentration et de
pousser les études pour confirmer.
Il résulte après examen des profils de disparition du NP dans la gamme de
concentrations étudiées que la sonodégradation du NP s’effectue selon une cinétique de
131
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
1
20 W 0,5
50 W 0,45
0,8 75 W 0,4
Vitesse initiale du NP, µM/min
0,35
100 W 0,3 R² = 0,958
0,25 Pseuil = 4,5 W
0,2
[NP]/[NP]o
0,6 0,15
0,1 b)
0,05
0
0 20 40 60 80 100
0,4 P, W
0,2
a)
0
0 20 40 60 80 100 120
t, min
132
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
puissance acoustique sur la production des radicaux HO• en accord avec la littérature
(Méndez-Arriaga et al., 2008 ; Moumeni et al., 2012).
3
Sans NP
Vitesse de production de
2,5 a vec NP
H2 O2 , µM/min 2
1,5
0,5
0
20 50 75 100
Puissance, W
Dans ce travail, nous avons irradié à 278 kHz et à 100 W une solution de NP à
concentration relativement forte (8,1 µM) et faible (0,5 µM) en faisant varier le pH (3 - 5,4 et
10). Les résultats obtenus sont illustrés sur la figure 68.
133
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
1 1
pH=3
0,8 pH=3 0,8 pH=5,4
pH=5,4 pH=10,2
pH=10
0,6
[NP]/[NP]o
0,6
[NP]/[NP]o
0,4 0,4
0,2 0,2
0 0
0 10 20 30 40 50 60 0 2 4 6 8 10
t, min t, min
On peut observer sur cette figure que l’acidification du milieu (pH=3) améliore
nettement la dégradation du NP que ce soit à 8,1µM ou à 0,5 µM. Par contre à pH basique
(pH = 10), l’effet du pH n’est pas assez significatif à 8,1 µM, alors que son effet est
légèrement positif à faible concentration du NP (0,5 µM). En effet, quel que soit le pH de
l’étude, le NP se trouve sous une forme moléculaire neutre car son pKa vaut 10,7 (Figure 69).
134
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Afin d’avoir une idée de l’effet des ions HCO3- sur la dégradation sonochimique d’un
composé hydrophobe et non volatil type tensioactif, des solutions du NP dans la limite de
solubilité (0,5 à 24,5 µM) sont traitées par ultrasons à 278 kHz et à 100 W en absence et en
présence des ions HCO3- (2,97 mM). Les résultats expérimentaux obtenus sont résumés dans
la figure 70.
2
NP sans bicarbonates
NP avec bicarbonates
Vitesse initiale de dégradation du
1,5
NP, µM/min
0,5
0
0,5 2,02 4,05 8,1 16,2 24,3
Concentration, µM
Il ressort de ces résultats que l'ajout des ions bicarbonates au cours de la dégradation
sonochimique du NP permet d'améliorer l'efficacité du traitement. Il est visible sur cette
figure que l’effet des bicarbonates est plus accentué à faible concentration du polluant, soit un
facteur d’amélioration de 1,9 à 0,5 µM. Cet effet décroit quand la concentration du polluant
augmente, puis s’annule à environ 19 µM et devient néfaste au-delà de cette concentration
(figure 71).
En effet, les ions bicarbonates comme nous l’avons précisé au paragraphe 3.2.5.1
réagissent dans la solution avec les radicaux HO• formés (3.26) pendant la sonolyse (k26 =
8,5.106 M-1.s-1) donnant lieu aux radicaux bicarbonates qui sont diffusés dans la solution lors
de l’implosion de la bulle. Les radicaux bicarbonates sont caractérisés par leur pouvoir
oxydant (E = 1,59 V/ENH) (Huie et al., 1991), leur stabilité, leur forte mobilité et leur
sélectivité plus élevée que celle des radicaux HO•. Ce qui justifie l’augmentation de la
performance de la technique à faible concentration en micropolluant (Pétrier et al., 2010). A
forte concentration du polluant au contraire, le phénomène de compétition prend place. Les
135
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
radicaux HO• susceptibles de réagir avec les ions HCO3- sont interceptés par les molécules de
NP en forte concentration et par conséquent, il se formera très peu des radicaux CO3-• qui sont
insuffisants pour augmenter la dégradation du NP mais assez significatifs par rapport la
quantité des radicaux HO• consommés. Il en résulte qu’à forte concentration du NP, les ions
HCO3- ont un effet inhibiteur sur sa dégradation du NP (Chiha et al., 2010). Dans l'ensemble,
ces résultats sont en accord avec la littérature (Minero et al., 2008).
1,2
Effet des ions
1
HCO3 - s’annule
Ln(V av HCO3 -/V ss HCO3 -)
0,8
0,6
0,4
0,2
-0,2
0 5 10 15 20 25
Concentration, µM
Figure 71. Mise en évidence de l’influence des ions HCO3- sur la cinétique de
sonodégradation du NP (f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
A environ 19 µM, l’effet des ions bicarbonates devient néfaste (figure 71) et la valeur
du logarithme du rapport de vitesse en présence et en absence des ions bicarbonates devient
négative. On aura donc pour une concentration de NP > 19 µM une diminution de la vitesse
qui correspond à un l’effet négatif des bicarbonates.
Comme précédemment pour le NBB, dans le cas de la dégradation du NP, nous avons
aussi mis en évidence l’effet de compétition en étudiant le taux d’utilisation de H2O2. Dans ce
contexte, nous avons évalué la quantité de H2O2 produit en absence et en présence du NP (8,1
µM) à 278 kHz pendant une durée de 30 min. Ensuite, nous avons illustré les résultats obtenus
dans la figure 72. Il est observable sur cette figure que la concentration de NP décroit
rapidement d’une manière exponentielle, suivant une cinétique de pseudo-ordre premier
(comme développé au paragraphe 3.3.1).
136
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
9 60
NP
8
H202 (Eau) 50
Dégradation du NP, µM
7
Formation de H2 O2 , µM
H2O2 (NP)
6 40
5
30
4
3 20
2
10
1
0 0
0 20 40 60 80 100 120
t, min
Eau NP NP+HCO3-
Vitesse de production de
2,5
H2 O2 , µM/min
1,5
0,5
0
20 50 75 100
Puissance, W
137
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Il s’en suit donc une diminution de la production de H2O2 (figure 73) du à l’inhibition
des radicaux HO• par les ions HCO3- qui constituent dans ces conditions un excellent piégeur
de ces radicaux. Néanmoins, la dégradation du NP a augmenté en présence des ions HCO3-.
En fait, on a assisté à un transfert d’électrons des HO• aux radicaux CO3-•.
Conclusion partielle
Trois points clés doivent être retenus de cette partie relative à la sonodégradation du
nonylphénol. Tout d’abord, la sonodégradation du NP s’effectue à l’interface bulle/solution
et sa cinétique respecte le modèle pseudo-ordre premier.
En outre, l’acidification du milieu (pH=3) n’a pas d’effet très significatif sur la
sonodégradation du NP vu qu’il est originellement hydrophobe. Par contre à faible
concentration et à pH basique (pH=10), la carbonatation du milieu permet d’améliorer le
rendement.
Enfin, les ions HCO3- ont un effet positif sur la sonodégradation du NP à faible
concentration et néfaste à forte concentration.
138
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Dans cette étude, une matrice modèle contenant un mélange du Naphtol Blue Black
(hydrophile) et du Nonylphénol (hydrophobe) a été étudiée. L’objectif est d’examiner
l’influence exercée par le NP sur la cinétique de décoloration du NBB et réciproquement.
Avant d’étudier l’effet d’un des composés sur le second composé dans le mélange, il
est important de suivre le composé traité seul. Pour cela, deux solutions différentes, de 400
mL chacune, contenant respectivement le NBB (8,1 µM) et le NP (8,1 µM), sont traitées aux
ultrasons, comme effectués dans les paragraphes 3.2 et 3.3. On remarque que dans les
conditions opératoires identiques, le NP se dégrade plus rapidement que le NBB (Figure 74).
A titre d’exemple, le taux de conversion du NP est de 85 % au bout de 30 min de traitement
ultrasonore alors que le taux de conversion du NBB est 55% pour la même durée.
1
NBB seul (Co=8,1µM)
NP seul (Co=8,1µM)
0,8
0,6
C/Co
0,4
0,2
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
Figure 74. Comparaison des sonodégradations du NP (8,1 µM) et du NBB (8,1 µM)
seuls (f : 278 kHz, P : 100 W, V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
139
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
En effet, le NBB étant hydrophile et non volatil, il est détruit au cœur de la solution
par attaques radicalaires des HO• qui n’ont pas pu se recombiner. Par contre, le NP se dégrade
directement à l’interface bulle solution par pyrolyse et indirectement par attaques radicalaires
(Ince et al., 2009). C’est pour cette raison que le NP se dégrade plus vite que le NBB.
1
NBB seul (Co=8,1µ M)
0,6
[NBB]/[NBB]o
0,4
0,2
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
Les données résultant de ces expérimentations nous ont permis de tracer le diagramme
de l’évolution de la vitesse initiale de décoloration du NBB, selon la concentration initiale du
NP, présenté à la figure 76.
140
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
0,3
0,2
0,15
0,1
0,05
0
0 0,5 1 2 4 8,1
[NP]o , µM
Il convient de rappeler aussi que les radicaux HO• formés à l’intérieur de la bulle de
cavitation diffusent de l’intérieur vers l’extérieur de la bulle. Lorsqu’on ajoute du NP dans la
solution, ce dernier par son caractère hydrophobe et non volatil investit l’interface bulle
solution. Ainsi, une partie des radicaux HO• susceptibles de dégrader le NBB dans la solution,
est interceptée par le NP qui subit en plus de la pyrolyse, une dégradation radicalaire à
l’interface bulle/solution. Plus la concentration du NP croit, plus les radicaux HO• sont
impliqués dans sa destruction et moins le NBB est décoloré. La figure 77 illustre les
différentes composantes de la bulle de cavitation avec son milieu environnant dans un
mélange de NBB et de NP.
141
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
H2 O2
H2O2
HO
H
HO
O
H2 O2
HO HO
HO°
HO°
H2O2
HO H2O2
H2O2 H2 O2
HO HO
HO°
HO° H2 O2
HO
HO
HO
H2 O2
= NP
= NBB
HO° = attaque radicalaire
Figure 77. Compétition dans les diverses zones réactionnelles lors de la sonodégradation du
mélange du NBB et du NP.
Cette fois, le but est d’apprécier l’influence du NBB sur la sonodégradation du NP.
Avant cela, nous avons comparé les vitesses de dégradation du NP seul, à une concentration
de 8,1 µM, en absence et en présence du NBB de concentration identique. Les résultats
obtenus sont récapitulés dans la figure 78.
1
NP seul (Co = 8,1 µ M)
0,6
[NP]/[NP]o
0,4
0,2
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
142
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Les ions bicarbonates sont un des composants minéraux majeurs des eaux naturelles et
sont connus pour leur effet inhibiteur des radicaux hydroxyles (Doré, 1989, Chen et al.,
1997). C’est pour cette raison qu’ils sont indésirables pour la plupart des procédés
d’oxydation avancée. Dans ce contexte, il a été effectué une sonodégradation du mélange
équimolaire de NBB et NP préalablement étudié, comportant également 2,97 mM des ions
bicarbonates. Les cinétiques correspondantes sont présentées à la figure 79.
1
NBB seul (Co=8,1µM) NP seul (Co=8,1µM)
NP mél (Co=8,1µM) NBB mél (Co=8,1 µM)
NP mél. Av HCO3- NBB mél. Av. HCO3-
0,8
0,6
C/Co
0,4
Action NP =
-∆(C/Co)
0,2
Action HCO3 - =
+ ∆(C/Co)
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
(8,1µM ; symboles vides) : Seuls (trait continu ), en mélange équimolaire (trait interrompu
143
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
Ces résultats sont en adéquation avec notre paragraphe 3.2 ainsi que la littérature
récente (Pétrier et al., 2010 ; Guzman et al., 2011), qui montrent que la présence d’ions
bicarbonates permet d’accélérer la sonodégradation des composés organiques à de faibles
concentrations.
En effet, comme nous l’avons montré précédemment, les ions bicarbonates réagissent
avec les radicaux hydroxyles pour former des radicaux carbonates CO3•- qui diffusent dans la
solution. Ce sont donc ces radicaux qui sont associés à l’augmentation de la vitesse de
décoloration du composé et qui ont contrebalancé l’effet inhibiteur du NP.
NP NBB
0,5 1,92 4,35
144
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
solution où il est dégradé par les radicaux CO3•-. Par contre le NBB subit uniquement les
attaques des radicaux CO3•-, car il se trouve majoritairement dans la solution. C’est pour cette
raison que l’effet de ces radicaux CO3•- est plus important pour le NBB.
Conclusion partielle
145
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
L’objet premier de ce chapitre est d’évaluer les effets physiques et chimiques induits
par ultrasons à 278 kHz afin d’appliquer cette technique à la dégradation des xénobiotiques
organiques en milieu aqueux. Il découle de cette étude que le réacteur sonochimique employé
de capacité 400 mL a un fort potentiel de produire in situ du peroxyde d’hydrogène
précurseur des radicaux HO• et HOO• et d’oxyder le KI en présence de molybdate avec des
rendements respectifs de 1,74 µM.h-1.W-1 (soit G = 4,83 mol.J-1) et 3,24 µM.h-1.W-1 (soit G =
9 mol.J-1). Cette forte capacité à la fois à produire le H2O2 in situ et oxyder le KI est
révélatrice d’un fort potentiel du système à dégrader les polluants organiques en milieu
aqueux.
Dans ce contexte, la disparition totale du NBB (8,1 µM) et du NP (8,1 µM) est
observée après respectivement 180 min et 120 min de traitement ultrasonore à une fréquence
de 278 kHz et une puissance de 100 W, en milieu aqueux saturé en air. Compte tenu de la
disparition exponentielle de ces composés en fonction du temps, les cinétiques de premier
ordre pour le NBB et pseudo-ordre premier pour le NP ont été retenues avec des constantes
de vitesse respectives de 3,2.10-2 et 7,8.10-2 min-1. Les intermédiaires n’ont pas été identifiés,
mais cependant un temps de 360 min a été nécessaire pour minéraliser environ 20% de NBB
(97,32 µM). Leurs vitesses initiales de sonodégradation sont améliorées lorsque les
paramètres tels que la concentration du substrat et la puissance augmentent. En milieu acide
par exemple, le pH (pH=3) a un effet positif et plus significatif sur l’élimination du NBB que
sur l’élimination du NP. Par contre en milieu basique (pH=10), son effet est néfaste à
concentration relativement forte (8,1 µM) et positif à faible concentration du polluant (0,5
µM).
Dans le mélange, la présence du NBB n’a pas une influence significative sur la
disparition sur NP tandis que la décoloration du NBB est affectée significativement par la
présence du NP. Leurs caractéristiques physicochimiques jouent un rôle très important dans
146
Chapitre III : Résultats et discussions / 1ère partie : Sonolyse
147
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
149
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
III.5.1.1. Effet de pH
1
pH=3
0,8 pH=5,4
pH=10,8
[NBB]/[NBB]o
0,6
0,4
0,2
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
150
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
La structure du composé joue un rôle très important sur l’effet de pH, le cas du NBB
en est un exemple typique (Cisneros et al., 2002 ; Muruganandham and Swaminathan, 2004).
Ses différents groupements fonctionnels sont sensibles au pH dont la variation se manifeste
par l’ionisation des groupements (modification des propriétés physicochimiques) et par
conséquent affecte sa dégradation photochimique, dans la mesure où certaines molécules
n’absorbent pas à la même longueur d’onde selon leurs formes conjuguées. D’autre part,
l'abaissement du taux de décoloration à pH alcalin (pH=10,8) est due à la réduction de la
concentration en radicaux hydroxyle. Sous cette condition, le H2O2 accumulé subit une
photodécomposition en eau et en oxygène plutôt qu’en radical hydroxyle (Galindo et al., Kalt,
1998).
Compte tenu du fait que l’influence du pH en milieu acide (pH=3) sur l'élimination du
NBB n’est pas assez significative, dans la suite de ce travail les expériences seront réalisées à
pH du milieu naturel (pH = 5,4).
Bien que le NBB n’absorbe pas dans le domaine d’émission de la lampe UV utilisée, il
reste cependant très sensible aux irradiations UV par le biais de certains groupements
fonctionnels, tels que les liaisons insaturées azo et celles des noyaux aromatiques, qui sont
concernés par l’irradiation. Ainsi, on peut voir sur la figure 81 l’évolution de la concentration
du NBB au cours du temps d’irradiation selon les concentrations initiales mises en jeu.
1 16,22 µ M 8,11 µM
4,05 µM 2,02 µM
0,8
[NBB]/[NBB]o
0,6
0,4
0,2
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
152
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
153
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
35
diecte, µM 20
(Pha se I)
15
(Pha se II)
10
R² = 0,999
5
0
0 5 10 15 20 25 30
t, min
Du fait de la présence abondante des ions bicarbonates dans les eaux naturelles, leur
influence à une concentration de 250 mg.L-1 sur la photodégradation du NBB a été suivie dans
les mêmes conditions qu’au chapitre précédent. Les ions HCO3- ne semblent pas interagir
avec la structure du NBB. En effet, les spectres du NBB en présence et en absence de ces ions
ne sont pas modifiés.
154
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
1 1
NBB (8,1 µM) ss HCO3- NBB (2,0 µM) ss HCO3-
NBB (8,1 µM) av. HCO3- NBB (2,0 µM) av HCO3-
0,8 0,8
[NBB] / [NBB]o
[NBB] / [NBB]o
0,6 0,6
0,4 0,4
0,2 0,2
0 0
0 10 20 30 40 50 60 0 2 4 6 8 10
t, min t, min
La présence des ions HCO3- affecte donc la photodégradation du NBB, mais de façon
relativement peu significative, ce qui nous amène à conclure que la participation des HO• sur
la dégradation du NBB n’est pas majoritaire, dans la mesure où l’impact de leur piégeage
n’est pas significativement ressenti. Dans ce contexte, l’élimination du NBB serait fortement
attribuée à son interaction directe avec la radiation lumineuse absorbée (Ball et al., 1992).
Par contre, certains travaux ont montré l’effet positif des ions HCO3- en photolyse UV
directe à faible concentration du polluant (Li et al., 2013). Dans notre cas, même à faible
concentration du NBB (2,0 µM), les ions HCO3- influent négativement la photo-élimination
du colorant (Figure 83 droite). Ce comportement pourrait être dû à la nature même de la
molécule. Pour cette raison, nous verrons dans la suite si l’influence des ions bicarbonates en
photolyse UV directe est liée à la structure de la molécule en étudiant par exemple un dérivé
phénolique : le nonylphénol (NP).
III.5.2.1. Effet de pH
155
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
1
pH=3
0,8 pH=5,4
pH=10
[NP]/[NP]o
0,6
0,4
0,2
0
0 5 10 15 20
t, min
156
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
1
16,22 µ M
0,8 8,1 µ M
4,05 µ M
0,6 2,02 µ M
[NP]/[NP]o
0,5 µ M
0,4
0,2
0
0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20
t, min
Absorption photonique :
Réactions radicalaires :
157
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
V=
Eq. 3.7
peut également s’exprimer selon une contribution de 2 termes étant donné que la dégradation
s’effectue par deux principales voies. L’équation Eq. 3.7 devient alors:
V = Vabs + Vrad
= [- ( ) ]abs +[- )]rad Eq. 3.8
Par ailleurs, quelle que soit la proportion de chacun des oxydants à intervenir dans la
destruction du NP, l’oxydation est relative au même composé. Soit k la constante de vitesse
équivalente et [O] l’oxydant équivalent, qui tiennent compte de deux processus d’élimination,
de sorte que:
k = kabs. krad
= k [O].dt Eq. 3.13
= k Odt Eq. 3.14
Or durant la première phase du traitement, l’oxydant [O] ne semble pas varier, d’où:
ln() = k[O].t Eq. 3.16
158
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
ln( ) = -kapp.t Eq. 3.17
159
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
sa ns HCO3-
0,8
a vec HCO3-
0,6
[NP]/[NP]o
0,4
0,2
0
0 5 10 15 20 25 30
t, min
Il est observable sur la figure 87 que la présence des ions HCO3- rélentit la cinétique
de photo-dégradation du NP. En effet, on aurait pu penser à un effet d’absorption
concurrentielle des radiations UV. Or les ions HCO3- n’absorbent pas à 254 nm (Neamtu et
Frimmel, 2006). Cependant, la présence des pièges à radicaux, notamment les ions HCO3-
limite l’action des radicaux HO• par inhibition ; les produits résultants sont les radicaux CO3-•
(3.46). Or le rendement de la production des radicaux HO• par photolyse UV directe étant
160
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
relativement faible, il en ressort que la quantité des radicaux CO3-• formés n’est pas suffisante
pour compenser l’action des radicaux HO• qui sont plus réactifs qu’eux. D’un autre point de
vue, la concentration des ions HCO3- est 370 fois plus élevée que celle du NP, ce qui permet
d’apprécier significativement l’effet inhibiteur des ions HCO3- (El Hachemi et al., 2005).
Dans ces conditions, il est bien évident que l’inhibition de la dégradation du NP est favorisée.
Notons aussi qu’après un temps d’irradiation relativement long, les radicaux bicarbonates
s’accumulent et leur quantité devient assez importante et pourraient par conséquent augmenter
la dégradation du polluant. Ainsi, on peut bien remarquer sur la figure 87 qu’après une
dizaine de minutes d’irradiation, la disparition du NP semble légèrement accélérée. Toutefois,
l’élimination des polluants dans une matrice semble beaucoup plus complexe avec la présence
simultanée de composés organiques et inorganiques.
0,12
NP (0,5 µ M)
0,1
0,8
du NBB, min-1
NP (2,02 µ M)
0,08
NP (8,1 µ M) 0,06
[NBB]/[NBB]o
0,6 0,04
0,02
0
0,4 0 0,5 2,02 8,1
[NP]o, µM
b)
0,2
a)
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
161
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
Dans cette expérience, nous voulons examiner l’effet de la présence du NBB sur la
photodégradation du NP. Dans la plupart des effluents, les composantes de la matrice ne
varient pratiquement pas car leur pouvoir auto-épurateur est souvent négligeable. Pour cela,
nous avons maintenu constante la concentration du NBB (8,1 µM) dans le mélange et nous
avons fait varier celle du NP (0 ; 0,5 ; 2,0 et 8,1 µM).
Pour exprimer le pouvoir inhibiteur du NBB sur NP, nous avons proposé une équation qui
nous a permis de déterminer le pourcentage de cette inhibition que nous avons noté id. Ce
dernier s’écrit selon l’équation Eq. 3.18.
100
Inhibition de la dégradation du NP en
80
présence du NBB, %
60
40
20
0
0,5 2 8,1
[NP]o , µM
D’après les résultats illustrés sur la figure 89, l’effet inhibiteur du NBB est plus
important à faible concentration du NP. Ce résultat met en évidence le fait que dans une
matrice réelle, l’élimination par photo-oxydation d’un polluant à faible concentration est plus
difficile.
162
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
L’effet des ions bicarbonates a été également étudié dans le cas du mélange NBB/NP,
comme en atteste la figure 90, qui présente la constante de vitesses de photo-oxydation du
NBB seul, du NBB en présence de NP et du NBB en présence du NP et d’ions bicarbonates. Il
en ressort que la présence des ions bicarbonates ralentit la photodégradation du NBB dans le
mélange.
1,4E-1
Constante de vitesse de disparition du
1,2E-1
1,0E-1
NBB, min-1
8,0E-2
6,0E-2
4,0E-2
2,0E-2
0,0E+0
NBB seul NBB + HCO3- NBB + NP NBB + NP + HCO3-
En effet, une solution contenant un mélange de NBB et de NP est assez chargée d’où
une compétition élevée par rapport à l’absorption des rayonnements UV. Plusieurs travaux
mettent en exergue la complexité de la matrice et la difficulté du procédé de photo-oxydation
à épurer les effluents réels, car ceux-ci constituent un milieu où l’inhibition des radicaux HO•
est très élevée. On peut citer par exemple les effluents hospitaliers (Nagarnaik et Boulanger,
2011), les lacs et les rivières (Westerhoff et al., 2007 ; McKay et al., 2011) et les eaux usées
urbaines à destination des stations d’épuration (Nagarnaik et Boulanger, 2011).
Par ailleurs, comme largement discuté précédemment, les bicarbonates n’augmentent
pas la pollution mais sont cependant des piégeurs des radicaux HO•. Ainsi, ils constituent un
facteur limitant qui participe très favorablement à l’inhibition de la dégradation du polluant.
Ainsi, Mazellier et al. (2002) ont montré que la présence des bicarbonates inhibe le processus
de photo-oxydation, en se basant sur l’étude de la phototransformation du carbendazim. Ces
résultats s’appuient sur l’hypothèse d’une désactivation photochimique intermoléculaire, ce
qui est d’ailleurs vérifié par la relation de Stern-Volmer. Bien que les ions HCO3- soient
163
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
considérés comme un excellent inhibiteur, nous ne pouvons pas vérifier dans ce travail
l’hypothèse de Stern-Volmer car nous travaillons à une seule concentration des ions HCO3-
(2,97 µM) alors que les conditions de Stern-Volmer impliquent plusieurs valeurs de la
concentration.
Conclusion partielle
164
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
Dans cette partie, nous allons procéder à une étude comparative sur l’efficacité des
deux procédés mis en œuvre tout au long de ce travail : photo-oxydation (notée UV par la
suite) et sono-oxydation (notée US par la suite). Cette comparaison concernera les principales
conditions opératoires, notamment l’effet de pH, de la concentration, la présence des ions
bicarbonates, et l’influence de la présence simultanée des 2 molécules organiques.
III.6.1. Effet du pH
0,14
Constante de vitesse de décoloration
0,12
0,1
du NBB, min-1
0,08
US
0,06
UV
0,04
0,02
0
3 5,4 10,8
pH
165
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
phénol en milieu acide est meilleure qu’en milieu alcalin. Par ailleurs, plusieurs autres
chercheurs ont également montré que la dégradation par US des polluants organiques est plus
favorable en milieu acide (Akshaykumar et Gogate, 2011 ; Kotronarou et al., 1991; Okouchi
et al., 1992).
Afin de comparer les cinétiques de dégradation du NBB par les deux procédés étudiés,
nous avons comparé les résultats des vitesses initiales en fonction des concentrations initiales
en colorant, comme en atteste la figure 92. Cette étude comparative a été réalisée dans la
gamme de concentration allant de 0,50 à 97,32 µM. Ces cinétiques sont représentées par deux
profils distincts caractéristiques de chacun de ces procédés.
1
Vitesse initiale de dégradation du
0,8
NBB, µM.min-1
0,6
US
0,4
UV
0,2
0
0 20 40 60 80 100
[NBB]i , µM
Figure 92: Evolution des vitesses initiales de décoloration du NBB par US et par UV en
fonction de la concentration
(f : 278 kHz ; P : 100 W ; λUV : 254 ηm, pH : 5,4 ; V : 400 mL et T : 20 ± 1°C).
166
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
En fin de compte, il ressort de ce qui précède que la technique sonochimique est mieux
adaptée au traitement des solutions concentrées (Jiang et al., 2006) que la photolyse UV
directe. Par contre pour des solutions relativement peu concentrées, la photolyse est plus
indiquée, comme cela a été décrit récemment par Da Silva et Faria (2003).
0,8
0,5
0,7
0,6 0,4
Vi, µM.min-1
Vi, µM.min-1
0,5
sans HCO3- 0,3 sans HCO3-
0,4
avec HCO3- avec HCO3-
0,3 0,2
0,2
0,1
0,1
0 0
US UV US UV
Lorsqu’on ajoute dans une solution de NBB une quantité équimolaire de nonylphanol
NP (8,1 µM), il apparait après examen de la figure 94 que, quel que soit le procédé (UV
figure de gauche ; US figure de droite), la décoloration du NBB est affectée négativement.
De plus, la présence des ions bicarbonates dans ce mélange équimolaire NBB/NP
diminue davantage la vitesse de disparition du NBB par UV. En revanche, dans le cas de la
sonolyse, les ions bicarbonates via les radicaux bicarbonates permettent de compenser l’effet
inhibiteur du NP et d’améliorer sensiblement la vitesse de d’élimination du NBB.
0,14 0,04
Constante de vitesse de décoloration
US
Constante de vitesse de décoloration
0,12 UV 0,035
0,03
0,1
de NBB, min-1
de NBB, min-1
0,025
0,08
0,02
0,06
0,015
0,04
0,01
0,02
0,005
0 0
NBB seul NBB + NP NBB + NP + HCO3 NBB seul NBB + NP NBB + NP + HCO3
III.6.5. Minéralisation
168
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
Il semble d’après la figure 95 que la photolyse du NBB soit plus efficace en termes de
minéralisation que sa sonolyse. Ainsi, après 90 minutes de traitement, les taux d’abattement
en COT mesurés sont de 10,8% et de 14,8%, respectivement pour les procédés US et UV.
Cependant, cette différence reste assez peu significative. Par contre, à 180 minutes, on
observe une baisse considérable du COT pour le procédé de photolyse, de 65,1%, alors qu’il
n’est que 23,0% pour le procédé de sonolyse.
0,8
COT/COTo
0,6
US
0,4 UV
0,2
0
0 90 180
t, min
169
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
Après une étude comparative de l’effet des différents paramètres sur la dégradation
du NBB par photolyse et par sonolyse, les principales conclusions sont les suivantes :
- En ce qui concerne le pH, les conditions acides sont plus favorables, ceci pour les
deux techniques mises en œuvre.
- Pour la concentration, la photolyse UV directe est plus efficace à faible concentration
du polluant alors que la sonolyse US est plus adaptée aux solutions de concentration
relativement élevée.
- Les ions bicarbonates sont favorables en sonolyse, tandis que leur effet est inhibiteur
en photolyse.
- La compétition à l’oxydation par les radicaux HO• diminue l’efficacité du procédé
UV directe. En sonochimie au contraire, les radicaux CO3-• minimisent la compétition et par
conséquent améliorent l’efficacité du procédé.
- Enfin, l’élimination du COT par photolyse UV directe est plus efficace comparée à
celle obtenue par le procédé US.
170
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
III.7.1. Cinétique de dégradation du Naphtol Blue Black par les différents POA
Les résultats de ces expériences illustrées par la figure 96 font ressortir des forts taux
d’élimination du NBB après seulement 10 min de traitement. Après 20 min, il ne reste dans la
solution que des traces de NBB, dont l’élimination totale est observée après 60 min.
0,8 UV
UV/H2O2
[NBB]/[NBB]o
0,6 Fe(II)/H2O2
UV/Fe(II)
0,4 UV/Fe(II)/H2O2
0,2
0
0 10 20 30 40 50 60
t, min
171
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
Il est à noter que ces différents procédés génèrent des radicaux HO• qui sont les
principaux responsables de la destruction du NBB. Cependant, la photolyse UV directe
constituant la plus faible source de production des radicaux HO• comparée aux autres
systèmes, peut à elle seule éliminer le NBB, mais requiert un temps d’irradiation beaucoup
plus long que les autres. En effet l’oxydant H2O2 est activé soit par irradiation UV (UV/H2O2)
(Shu et al., 2004 ; Shu et al., 2006), soit par le Fe2+ (Fe2+/H2O2) (Sun et al., 2007), soit par les
deux à la fois (UV/Fe2+/H2O2) (Perez et al., 2002), les équations de réactions relatives étant
présentées au chapitre I. Par ailleurs, nous pouvons dire que la décomposition de H2O2 par les
ions Fe2+ est plus importante que celle produite par les rayonnements ultraviolet, ce qui
explique le taux d’élimination plus élevé du NBB par Fe2+/H2O2 par rapport au système
UV/H2O2.
172
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
1
UV
UV/H2O2
0,8 Fe(II)/H2O2
UV/Fe(II)/H2O2
0,6
[NP]/[NP]o
0,4
0,2
0
0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 30
t, min
NP (% élimination)
POA H2O2, µM/min Fe, µM UV
3 min 5 min
UV - - 254 nm 66,9 81,8
UV/H2O2 2,81 - 254 nm 83,6 94,0
2+
Fe /H2O2 2,81 100 - 91,9 96,6
2+
UV/Fe /H2O2 2,81 100 254 nm 97,3 98,0
173
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
Conclusion partielle
174
Chapitre III : Résultats et discussions / 2ème partie : Photolyse et étude comparative des POA
175
CONCLUSION ET
PERSPECTIVES
Conclusion générale
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
Dans ce contexte, la sonodégradation totale du NBB (8,1 µM) et du NP (8,1 µM) a été
observée respectivement après 3h et 2h. Pour le NBB, nous avons appliqué le modèle linéaire
de Langmuir à sa cinétique de sonodégradation, ce qui nous a permis de déduire une cinétique
de premier ordre. Toutefois la présence des ions bicarbonates modifie la cinétique préétablie,
177
Conclusion générale
ce qui nous a amené à adopter un modèle plus adapté, celui de Serpone basé sur un système
de catalyse hétérogène où la dégradation du NBB a lieu à une couche secondaire très proche
de l’interface par les radicaux HO• et dans la solution par les radicaux CO3-•. Pour
l’élimination du NP, nous avons retenu la cinétique de pseudo-premier ordre.
Enfin nous avons montré que les radicaux HO• produits in situ par sonolyse et se
conservant sous forme de H2O2 sont faiblement utilisés : c’est la compétition. Pour des
nouvelles perspectives de recherches, il serait donc très intéressant d’envisager l’activation de
ces peroxyde d’hydrogène inutilisés soit par les UV (US/UV ; sonophotochimie) soit par ions
Fe II (US/Fe2+/H2O2 ; sonofenton), soit par les deux (US/UV/Fe2+/H2O2 ; sonophotofenton)
pour produire plus des radicaux HO• et par conséquent améliorer le rendement système.
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194
LISTE DES TRAVAUX
Liste des travaux
Articles
Communications orales
195
Liste des travaux
196
Application des techniques d’oxydation avancée pour la dépollution des effluents
organiques dans les eaux de rejets industriels : Cas des savonneries
Dans le cadre de l’élimination de composés réfractaires contenu dans une matrice complexe,
les procédés d’oxydation avancée s’avèrent être une technologie de choix. Cette étude est donc
consacrée à la sonolyse et à la photolyse de deux xénobiotiques organiques, le naphthol blue
black (un colorant hydrophile, noté NBB) et le nonylphénol (un détergent, hydrophobe et volatil,
noté NP), seuls ou en compétition.
L’efficacité de la technique ultrasonore de haute fréquence (278 kHz) a été testée sur les
molécules cibles et leur mélange. La décoloration du NBB est effective après 180 min de traitement
et s’accompagne d’une minéralisation de 23% alors que le NP se dégrade après 120 min. L’effet des
paramètres a été étudié, tels que la puissance ultrasonore, la concentration du substrat, le pH, les
ions inorganiques (bicarbonates et phosphates) et la compétition. Ainsi dans le mélange, la présence
du NBB n’a pas d’influence sur la disparition sur NP tandis que la décoloration du NBB est affectée
par la présence du NP. Cependant, la présence des ions bicarbonates dans le mélange permet par
l’intermédiaire des radicaux carbonates de contrebalancer l’effet inhibiteur du NP.
L’utilisation de la photolyse directe a fait l’objet de la deuxième partie de ce travail, ce qui a
permis de faire une étude comparative des deux techniques. Il a été montré que la sonochimie, fort
de sa capacité à produire abondamment les radicaux HO•, est plus adaptée au traitement des
effluents relativement plus concentrés. De plus, la sonochimie permet de mettre en valeur les ions
inorganiques, constituants naturels de l’eau pour minimiser l’effet inhibiteur de la matrice. Ensuite,
l’efficacité de certains Procédés d’Oxydation Avancée (POA) sur l’élimination des xénobiotiques
sus-mentionnés a été testée et les résultats obtenus ont donné lieu à l’ordre suivant : UV < UV/H2O2
< Fe2+/H2O2 < UV/Fe2+/H2O2.
Mots clés : sonolyse, photolyse, POA, naphthol blue black, nonylphénol, bicarbonates, compétition.
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Advanced oxidation processes applied to organics micropollutants contained in
industrial wastewaters: case of soap factories.
Within the framework of the destruction of refractory organics contained in a complex
aqueous matrix, the advanced oxidation processes appear to be a first class technology. So this
survey is dedicated to the sonolysis and the photolysis of two organics, namely the naphthol blue
black (an acid azo-dye, hydrophilic, noted NBB) and the nonylphenol (a detergent, hydrophobic et
volatile, noted NP), single or in competition.
High frequency (278 kHz) ultrasound is found to be efficient. NBB decolorization is
effective within 180 min and its mineralization reaches 23% while NP is degraded for 120 min.
Different parameters were studied, such as ultrasound power, substrate concentration, pH, inorganic
ions (bicarbonate and phosphate), and competition. In the NBB/NP mixture, NBB has no influence
on the NP degradation whereas NP has a strong effect on the NBB decolorization. Nevertheless, the
presence of bicarbonate ions in the mixture reduces the negative effect of NP, thanks to the
formation of carbonates radicals.
Direct photolysis is the topic of the second part of this study, so as to make a comparison of
these two oxidative techniques. It was emphasizes that sonolysis is most adapted for the treatment
of more concentrated pollutant, because of the intense production of HO• radicals. Moreover
sonolysis is relevant when inorganic ions are present in the mixture, in order to minimize the
competition between organics. Then the efficiency of different AOP was tested for the two target
pollutants; results can be organized according the following: UV < UV/H2O2 < Fe2+/H2O2 <
UV/Fe2+/H2O2.
Keywords: sonolysis, photolysis, AOP, naphthol blue black, nonylphenol, bicarbonates,
competition.