3 - Chapitre II-Généralités Sur La Mécanique de La Rupture

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CHAPITRE II :

Généralités sur la
Mécanique de la rupture
CHAPITRE II DESA "M.S.C.P"

I- Historique
Grâce aux progrès réalisés dans le domaine de la mise en forme des métaux durant les
trois derniers siècles, le fer et l'acier ont progressivement remplacé le bois et le ciment comme
matériaux structuraux de base. Malgré leurs hautes caractéristiques, les structures réalisées à
partir de ces matériaux ont connu des accidents importants dès le milieu du 19ème siècle.
L’origine de ces accidents était la rupture inattendue de composants critiques de ces
structures. L’un des premiers incidents enregistré sur une structure importante fut la rupture
d’une chaîne du pont suspendu Montrose en Mars 1830 en Grande Bretagne. Depuis, il y a eu
un nombre important d’effondrements de ponts, dont le King’s Bridge à Melbourne (1962) ou
encore le Point Pleasant Bridge en Virginie (1967). Les accidents ferroviaires dus à une
rupture brutale des essieux, des roues ou encore des rails ont également été très nombreux.

Entre 1860 et 1870, le nombre de personnes victimes d’accidents de train en Grande


Bretagne s’élevait environ à 200 par an. De nombreux accidents intervinrent également sur
des pipelines, des pétroliers, ou encore sur des avions. En 1950, 2 avions Comet se sont brisés
à haute altitude à cause d’un problème de rupture par fatigue sur les trous des rivets près des
hublots, lesquels étaient de forme carrée ! Ces risques d’accidents étaient d’autant plus grand
que l’utilisation d’alliages à hautes caractéristiques mécaniques (ténacité, rigidité…),
permettant la réalisation de structures de plus en plus complexes et sollicitées, a énormément
augmenté. En fait, les estimations de tenue des structures, fondées sur les caractéristiques
mécaniques classiques, ne tenaient pas compte de la ténacité des matériaux en conditions
réelles de service, et les chercheurs étaient alors incapables d’expliquer le phénomène de
rupture brusque sous des sollicitations bien inférieures à celles de la limite d’élasticité.

Si Griffith est souvent cité comme le premier chercheur à avoir introduit la mécanique
de la rupture (en tant que science), ces travaux restent basés sur des études antérieures. On
peut notamment citer l’article de Wieghardt, paru en 1907 et traduit en anglais [Wieghardt
1995] [1], dans lequel l’existence de la singularité du champ des contraintes en pointe de
fissure dans un matériau élastique linéaire fut reconnue.

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A partir de ces résultats, Griffith [Griffith 1920] [1] s’est intéressé en 1920 au
problème de la rupture, dans un milieu élastique fissuré, d’un point de vue énergétique. Il a
ainsi mis en évidence une variable (appelée plus tard taux de restitution d’énergie)
caractérisant la rupture, et dont la valeur critique est une caractéristique du matériau. Vinrent
ensuite les premiers développements théoriques d’analyse des champs de contraintes et de
déformations au voisinage d’une fissure en élasticité. Ces études, menées notamment par
Sneddon en 1946 [Sneddon 1946], puis Irwin [Irwin 1957] [1] en 1957, ont permis de définir
les facteurs d’intensité de contraintes, caractérisant l’état de sollicitation de la région dans
laquelle la rupture se produit.

Entre 1960 et 1980, la mécanique de la rupture connaît un grand succès scientifique,


avec notamment l’apparition de la mécanique non linéaire de la rupture qui a permis de mieux
prendre en compte le comportement plastique des matériaux. De nombreux travaux sont
publiés à cette période ; on peut citer par exemple Rice [Rice 1968] [1] et Bui [Bui 1973] [1]
qui introduisent la notion d’intégrales indépendantes du contour telles que l’intégrale J, dont
les propriétés ont permis de caractériser la ténacité d’un matériau lorsque la plasticité n’est
plus confinée à la pointe de fissure. C’est également à cette période que les premiers travaux
concernant la mécanique de la rupture dans les matériaux multicouches sont réalisés
(Sih(1964), Erdogan (1965) et Comninou (1977)) [1].

Tous les développements théoriques réalisés à cette époque ont permis de déterminer
la forme exacte de la singularité, et des champs asymptotiques en pointe de fissure nécessaires
à l’analyse et à l’interprétation des résultats expérimentaux. De plus, ils représentent une
solution précise à de nombreux problèmes de géométries simples, et peuvent donc être utilisés
comme solutions approchées pour des problèmes plus complexes.

L’apparition de la méthode des éléments finis a permis d’étudier la mécanique de la


rupture d’un point de vue numérique, proposant ainsi des solutions plus précises à des
problèmes plus complexes.

Apparurent alors une multitude de méthodes permettant de calculer les facteurs


d’intensité de contraintes, le taux de restitution d’énergie, ou encore de découpler les
différents modes de rupture.

Parmi ces nombreuses méthodes, les plus facilement implémentables donnent bien
souvent des résultats approchés, ou dépendants du maillage, alors que les autres nécessitent
des techniques éléments finis avancées.

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La mécanique de la rupture couvrant un domaine extrêmement vaste, nous


commencerons par spécifier de façon précise le cadre de l’étude. Puis nous introduirons les
notions fondamentales liées aux approches locales et globales en mécanique linéaire de la
rupture. Cela nous amènera à faire un tour d’horizon des différentes méthodes numériques
utilisées pour le calcul de grandeurs caractéristiques telles que les facteurs d’intensité de
contraintes, ou le taux de restitution d’énergie. Enfin, nous terminerons cette partie
bibliographique par la mécanique non linéaire de la rupture, et l’élastoplasticité.

II- Mécanique de la rupture


La mécanique de la rupture a pour objet l’étude le comportement mécanique d’un
matériau en présence de fissures macroscopiques. Cela revient notamment à déterminer le
champ des contraintes et des déformations au voisinage de la pointe d’une fissure. L’étude de
ces champs mécaniques permettant ensuite de juger de la stabilité ou non d’une fissure. Il est
également possible, comme nous le verrons par la suite, d’aborder la mécanique de la rupture
à travers une étude énergétique du solide fissuré.

II.1 Modes de rupture


La fissuration se manifeste par la séparation irréversible d’un milieu continu en deux
parties, appelées lèvres de la fissure, ce qui introduit une discontinuité au sens des
déplacements. Les mouvements possibles des lèvres de chaque fissure sont des combinaisons
de trois modes indépendants :

Figure II.1 : Modes de rupture

- Mode I : ouverture (ou clivage) ;


- Mode II : cisaillement plan ;
- Mode III : cisaillement anti-plan.
Le mode I est le plus dangereux pour l’extension d’une fissure ; cependant, une fois
amorcée et pour des sollicitations mixtes ou des géométries complexes, la fissure a tendance à
bifurquer, et reste donc rarement rectiligne (2D) ou plane (3D).

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II.2 Fissures statiques, quasi-statiques, dynamiques


Les premiers travaux réalisés en mécanique de la rupture visaient à établir, de façon
précise, les champs mécaniques au voisinage d’une fissure statique. La difficulté d’une telle
étude réside dans la prise en compte de la singularité introduite par la pointe d’une fissure. Le
calcul précis de paramètres mécaniques tels que les facteurs d’intensité des contraintes, ou le
taux de restitution d’énergie réside en grande partie dans la bonne prise en compte de cette
singularité.

Ces paramètres mécaniques ainsi calculés, il est possible de prévoir la propagation ou


non de la fissure. Suivant le type de matériau étudié, et le chargement appliqué, la propagation
pourra être qualifiée de stable (la fissure a besoin de plus d’énergie pour reprendre sa
progression) ou d’instable (la fissure poursuit sa progression jusqu’à la ruine de la structure,
sans nécessiter d’énergie supplémentaire).

La propagation quasi-statique de fissures étudiée à l’aide de critères d’amorçage, de


bifurcation, et de stabilité.

A. Critères d’amorçage
Ces critères permettent de déterminer à quel moment et à quel endroit la fissure va
s’amorcer. Ils sont généralement basés sur une comparaison des paramètres de fissuration (K,
G, J, …) à des valeurs critiques de ces paramètres.

Pour une approche locale, et en mode I pur, que nous allons définir dans le paragraphe
II.2, il y aura amorçage lorsque le paramètre KI "Le facteur d'intensité de contrainte" atteint
une valeur critique KIC appelée ténacité du matériau.

De même, au niveau énergétique, Griffith [Griffith 1920] [1] a proposé une valeur
limite du taux de restitution d’énergie, appelée résistance à la fissuration et notée GC. Il y aura
alors propagation lorsque G atteint la valeur critique GC qui représente l’énergie nécessaire à
la création de nouvelles surfaces libres en fond de fissure. Remarquons que pour un matériau
élastique fragile, GC ne dépend que de l’énergie superficielle intrinsèque 2γ du matériau :
GC=2γ.

De même que pour G ou K, il existe une caractéristique intrinsèque du matériau δC,


qui représente l’ouverture de fissure critique (CTOD) que peut subir le matériau avant qu’il
n’y ait propagation.

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De son côté, Sih [Sih 1974] [1] a introduit un critère basé sur la densité d’énergie de
déformation N minimale. Après avoir déterminé l’angle θ0 de bifurcation, il suppose que la
propagation a lieu dans cette direction lorsque Nmin atteint une valeur critique NC
caractéristique du matériau. NC peut être reliée à KIC en se plaçant en mode d’ouverture pur et
en identifiant N=NC à KI=KIC.

Yehia [Yehia et al. 1988] [1] pour sa part, a exprimé le rayon rp de la zone plastique
confinée en fond de fissure. Puis, il a considéré que la propagation s’effectuait lorsque rp
atteignait une valeur critique caractéristique du matériau rpc, appelée rayon critique.

Enfin, il est également possible de localiser l’amorçage à l’aide d’une approche basée
sur l’endommagement. Lors d’un chargement, les lois d’endommagement permettent de
modéliser la dégradation du matériau et de déterminer le lieu d’endommagement maximal. Il
est alors possible de déterminer un endommagement critique, caractéristique au matériau
étudié, et au-delà duquel une macro-fissure s’amorce.

B. Critères de bifurcation
Lorsque le chargement ou la géométrie d’une structure n’est pas symétrique par
rapport à l’axe de la fissure, la rupture se présente en mode mixte, et la fissure ne se propage
pas de façon rectiligne. Il est alors nécessaire d’utiliser des critères de bifurcation, afin de
déterminer la nouvelle direction de propagation.

Critère de la contrainte normale maximale : Proposé par Erdogan et Sih [Erdogan et


al. 1963] [1], ce critère est basé sur les hypothèses suivantes :

 La fissure se propage dans la direction


pour laquelle la contrainte de traction
circonférentielle σθθ est maximale.
 L’accroissement de fissure se produit
lorsque 2π rσ θθ = K IC . (II.1)

Figure II.2 : Fond de fissure

Finalement, l’angle de bifurcation de la fissure est solution du système :

(II.2)

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Ce critère permet également de montrer qu’il existe un angle limite, correspondant au


cas du mode de cisaillement pur, au-delà duquel la fissure ne peut se propager : θ0=±70.54°.
Cette technique a été étendue aux matériaux anisotropes par Saouma et al. [Saouma et al.
1987] [1].

Sa facilité de mise en oeuvre, entièrement basée sur la notion de facteurs d’intensité de


contraintes, le rend très utilisé. Il peut cependant paraître discutable dans la mesure où le
champ de contraintes locales en fond de fissure est seulement un champ approché. De plus,
l’existence d’une zone non élastique en fond de fissure modifie également la répartition de
contraintes. C’est pourquoi les critères énergétiques, faisant intervenir des grandeurs globales
au niveau de la structure, peuvent paraître plus appropriés.

Remarque : Il existe également un critère basé sur la déformation maximale [Maiti


et al. 1984] [1]. La propagation de la fissure se manifeste lorsque la déformation εθ atteint une
valeur critique εθc (déterminée en mode d’ouverture pure et reliée à KIc).

Critère de la densité d’énergie de déformation minimale : Dans ce critère


énergétique, Sih [Sihet al. 1974] [1] considère que l’énergie de déformation s’oppose à
la croissance de la fissuration. Celle-ci cherchera donc à se propager dans la direction où
la densité d’énergie de déformation N est minimale.

 ∂N   ∂2N 
L’angle de déviation θ0 est alors défini par :   = 0 sous la condition  2  ≥ 0
 ∂θ θ 0  ∂θ θ0
Critère du Taux de restitution d’énergie maximal : Parmi tous les accroissements
virtuels et cinématiquement admissibles, l’accroissement réel est celui qui maximise le
taux de restitution d’énergie. En calculant le taux de restitution d’énergie pour
différentes directions de propagation éventuelles de fissure, on détermine celle pour
laquelle G est maximal.
Plusieurs études comparatives ont été effectuées sur ces différents critères [Maiti et al.
1984], [Elouard 1993] [1]. Elles montrent une bonne corrélation au niveau de l’angle de
déviation et du chargement critique. Maiti montre cependant que les chemins de fissuration
instables peuvent différer pour des fissures inclinées et pour des chargements en cisaillement
pur.

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C. Critères de stabilité
Il existe deux types de propagation :

La propagation stable : après son amorçage, la fissure s’arrête, nécessitant plus


d’énergie pour reprendre sa propagation. Ce mode de propagation n’est a priori pas
dangereux ;
La propagation instable : après son amorçage, la fissure poursuit sa progression en
l’absence de toute modification des paramètres de la sollicitation. Cette instabilité
conduit alors à la ruine de la structure.
L’analyse de la stabilité de propagation est fondée sur le bilan énergétique :

(II.3)

Alors, pour une fissure de longueur « a » donnée, et un incrément de propagation


« da », la propagation sera :

(II.4)

Pour étudier la stabilité d’une propagation de fissures, plusieurs méthodes ont été
proposées. Parmi ces méthodes, la notion de courbe de résistance revient souvent.

La courbe de résistance, ou encore courbe-R, traduit l’évolution du taux critique de


restitution de l’énergie G (ou de J) en fonction de la longueur de la fissure. Elle est déterminée
de façon expérimentale, et permet de caractériser la propagation stable d’une fissure dans un
matériau donné. Pour des matériaux fragiles, cette courbe (peu ou pas utilisée) est réduite à
une droite (en déformation plane) puisque dans ce cas le taux de restitution d’énergie critique
Gc, ou plus précisément la ténacité KIc, ne dépend pas de la longueur de fissure.

La courbe-R, introduite plus particulièrement pour les matériaux ductiles, est une
caractéristique intrinsèque du matériau. La condition de rupture fragile G≥2γ doit être
remplacée par une condition de rupture ductile, prenant en compte le fait que la résistance du
milieu fissuré est ici une fonction de la longueur de fissure « a » :

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(II.5)

De même, Paris et al. [Paris et al. 1979] [1] ont proposés d’étudier la stabilité de la
propagation à travers un paramètre T, appelé module de déchirement, qui est la dérivée de
l’intégrale J par rapport à la longueur de la fissure « a ».

II.3 Mécanique linéaire, et non-linéaire de la rupture


La mécanique de la rupture se propose de décrire les étapes d’amorçage et de
propagation de la fissuration. Selon le comportement du matériau durant la propagation d’une
fissure, on peut être confronté à deux types de rupture :

- Rupture fragile, en l’absence de déformation plastique significative


(mécanique linéaire de la rupture) ;
- Rupture ductile, en présence de déformation plastique non négligeable
(mécanique non linéaire de la rupture). Dans ce cas, suivant l’étendue de la
zone plastique en pointe de fissure, on différencie le cas de la plasticité
confinée, de celui de la plasticité étendue.
a) Etude d’un milieu élastique fissuré
Dans un milieu élastique fissuré, la région proche de la pointe de fissure peut être
décomposée en trois zones [Zhang 1992] [1]:

1) La zone d’élaboration : au voisinage direct de la pointe de fissure, l’étude de


cette zone (considérée comme ponctuelle d’un point de vue mécanique) est très
complexe dans la mesure où les contraintes tendent vers l’infini (d’un point de
vue théorique) à la pointe de fissure ;
2) La zone singulière : dans cette zone,
le champs de contrainte présente une
singularité en r-1/2 ;
3) La zone des champs lointains :
extérieure aux deux précédentes, elle
raccorde la zone singulière aux
conditions aux limites de chargement
et déplacement.
Figure II.3 : Les zones de champs mécaniques

C’est la singularité d’ordre –1/2 dans la zone singulière qui caractérise la solution
obtenue en élasticité pure.

Cette solution n’est malheureusement pas physiquement réaliste. En fait, les

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contraintes en pointe de fissure sont « écrêtées » par la plasticité (Figure II.4.) [François et
al. 1993] [1]. De plus, la signification énergétique de la rupture proposée par Griffith
devient plus ambiguë, dans la mesure où elle consiste à représenter la propagation de
fissure comme un déchargement. Or, en plasticité, une partie de l’énergie est dissipée
(phénomène irréversible) et on ne peut donc pas toujours évaluer la fraction d’énergie «
disponible » pour la propagation.

Figure II. 4. Plasticité en pointe de fissure

Même si l’étude de la mécanique non linéaire de la rupture est en plein essor


actuellement, la majorité des résultats obtenus d’un point de vue numérique concernent la
mécanique linéaire de la rupture. Il est souvent difficile de différencier les méthodes
applicables à tout type de matériau, ou uniquement aux matériaux élastiques.

Les ruptures obtenues par fatigue, par choc thermique, ou par corrosion couvrent
également un domaine de recherche important, mais elles ne seront pas abordées dans ce
mémoire.

II.4 Les essais mécaniques


Il y a une grande variété de comportements présentant des non-linéarités liées à la
déformation ou au temps, en relation avec l’environnement. Il est donc indispensable de les
caractériser expérimentalement.

Les essais mécaniques sur des petits spécimens, ou éprouvettes sont donc à la base de
toutes les études. L’observation des caractéristiques expérimentales va permettre d’identifier
les types de comportement fondamentaux qu’il importera de simuler. Il existe de nombreux
essais qui permettent de caractériser les propriétés mécaniques des matériaux. Certains sont
normalisés (AFNOR, Association Française de NORmalisation ; ISO, International
Standardisation Organisation ; ASTM, American Society for Testing and Materials) ; il s’agit

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d’essais simples à réaliser, reproductibles, servant à donner des informations sur les seuils de
charge qui produisent des déformations irréversibles, ou encore la rupture. Ils sont utilisés par
les ingénieurs en contrôle et caractérisation. En revanche, et pour caractériser plus finement
les matériaux, les chercheurs ont recours à des moyens d’essais plus complexes, mettant en
oeuvre des chargements multiaxiaux ou anisothermes.

Nous définissons dans ce mémoire que l'essai de traction afin de donner une idée sur la
méthodologie expérimentale de l'obtention des caractéristiques élastiques des matériaux.

II.4.1 Essai de traction simple


Il consiste à imposer un allongement à une éprouvette de section initiale So et de
longueur utile Lo. La courbe type obtenue pour un matériau ductile est la suivante:

Figure II-5: Schéma d’un essai de traction simple

La droite OA correspond à la déformation élastique réversible.

La courbe AC est le domaine de déformation plastique homogène: si on supprime la


force de traction, il y a un retour élastique suivant une parallèle à OA et il reste une
déformation permanente.

Pour CD, la force nécessaire pour déformer le matériau diminue alors que
l’allongement continue d’augmenter : cette instabilité est appelée instabilité plastique. La
striction apparaît.

En D il y a rupture de l’éprouvette.

o Re désigne la limite d’élasticité, ou limite de proportionnalité,

o R0,2 désigne la limite d’élasticité conventionnelle, qui correspond à une déformation


inélastique de 0,2%,

o Rm désigne la résistance à la traction,

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II.5 Les facteurs de la rupture


II.5.1 Facteurs d’intensité des contraintes
Introduits par G.R. Irwin [Irwin 1957] en 1957, les facteurs d’intensité de contraintes
correspondent à des cinématiques particulières du mouvement des fissures. Dans le cadre de
la mécanique linéaire de la rupture, les contraintes et les déformations au voisinage d’une
fissure admettent un développement asymptotique dont le terme singulier s’écrit :

(II.6)

Figure II. 5 Champ des contraintes au voisinage de la fissure


Kα est le Facteur d’Intensité des Contraintes (FIC) en mode α, avec α=I, II ou III. Les
fonctions f et g donnent la répartition angulaire. Ainsi que dans plusieurs ouvrages de
mécanique de la rupture [François et al. 1993], [Miannay 1995]. Lorsque l’on se trouve en
mode I pur, l’état local de contraintes et de déformations peut être caractérisé à l’aide du seul
paramètre KI.

(II.7)

Dans certains cas (préchargement à chaud [Pineau 1998] [1], effets d’échelle ou de
géométrie [Bauvineau 1996], [Hancock 1993] [1]…), il est nécessaire de tenir compte
également des premiers termes non singuliers :

La contrainte transverse T, est une contrainte parallèle au plan de fissure, et


n’intervient que sur σxx. Elle a également pour effet de modifier le terme hydrostatique du
tenseur des contraintes : σm=Trace (σ)/3 (donc la triaxialité des contraintes) ainsi que la plus
grande contrainte principale.

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Les FIC caractérisent la force de la singularité du champ des contraintes à l’extrémité


de la fissure [Erdogan 1983]. Ils sont proportionnels aux discontinuités des déplacements des
lèvres de la fissure, et ne dépendent que de la répartition des efforts extérieurs et de la
géométrie de la fissure. Plusieurs ouvrages tels que celui de Murakami [Murakami et al. 1987]
[1] donnent l’expression de ces FIC pour des géométries et des chargements variés.

A. Matériaux isotropes
i. Cas d’une géométrie infinie :

Dans le cas d’une plaque infinie, contenant une fissure de longueur 2a, soumise à des
contraintes à l’infini, PARIS et SIH [2]ont montré que pour un matériau isotrope on a :

KI = σ ∞ (π a)1/ 2 (II.8) et KII = τ ∞ (π a)1/ 2 (II.9)

ii. Cas d’une géométrie finie :

Pour des éprouvettes de dimensions finies, plus intéressantes en pratique, les facteurs
d’intensité de contraintes K (m= I, II) sont de la forme :

Km = ασ m (π a)1/ 2 , σm = σ∞ ou τ∞ (II.10)

α est dans la plupart des cas représentée sous forme d’une fonction polynomiale de la
longueur de la fissure et de la géométrie de l’éprouvette pour les matériaux isotropes.

B. Matériaux orthotropes
Pour les matériaux orthotropes, on a proposé (Thèse du Pr. LAHNA)[2], pour
l'éprouvette D.C.B (Double Cantilever Beam) des expressions des facteurs d'intensité de
contraintes KI et KII faisant apparaître explicitement les coefficients d'élasticité.
1
     
2
2
λ + λ λ λ − λ λ
2 2
P I  12 sh sin sh ch sin cos  + 
c c c c c c 3r
( )  3 3 λ a  +
b  λ h   sh2 λc − sin 2 λc   sh λc − sin λc
2 2
 h
       (II.11)
K I
= 1

 α 22  α 22  2 2α 12 + α 66 
1 4

   + 
 2α 11  α 11  2α 11 
   

Où r = α 66 ; λ =  6α 11 
1
1  4

α 11
h  α 22 

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c : le ligament ; a : longueur de la fissure ; b : épaisseur de l'éprouvette ; h : demi hauteur de


l'éprouvette ; PI : charge d'ouverture (mode I).

2h
c
a

Figure II.6 : Eprouvette DCB.

II.5.2 Le taux de restitution d’énergie


Noté G, le taux de restitution d’énergie représente l’énergie nécessaire pour faire
progresser la fissure d’une longueur unité. Elle correspond à la décroissance de l’énergie
potentielle totale Wp pour passer d’une configuration initiale avec une longueur de fissure "a",
à une autre où la fissure s’est propagée d’une longueur da [5]:

(II.12)

Où We représente l’énergie de déformation élastique, Wext l’énergie potentielle des


forces extérieures f, et ∂A l’incrément de surface correspondant à l’extension de la fissure.

En utilisant le champ des contraintes dans la zone singulière et la loi de comportement


élastique linéaire, il est possible de relier le taux de restitution d’énergie aux facteurs
d’intensités de contraintes par :

(II.13)

Où E est le module d’Young et ν le


coefficient de poisson.

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CHAPITRE II DESA "M.S.C.P"

Pour un matériau orthotrope, ces relations s'écrivent [2]:


1
 
= K I  α 11α 22   22  + 2α 12 α 66 
α
1 1 2
2   2
 2
+
G  α 
(II.14)
I
 2 
 11  2α 11 
1
 
= K II  α 11   α 22  + 2α 12 α 66 
1 1 2
2   2
 2
+
G  α 
(II.15)
II
 2   11  2α 11 
De ces relations, nous voyions que la connaissance du taux de restitution d'énergie
GI, II et des coefficients élastiques α ij , permet d'accéder aux facteurs d'intensité de contraintes

KI et KII.

Remarque : Il est également possible de relier G à la complaisance C de la structure par

(II.16)

Sur la courbe Force/Déplacement ci-


contre, OA correspond à une fissure de
longueur a, et OB à une fissure de longueur
a+δa. G représente l’aire située dans le triangle
OAB pour un essai effectué à charge imposée
ou dans le triangle OAC pour un pilotage en
déplacement imposé.
Figure II. 7. Relation entre G et la complaisance de la structure

II.5.3 Intégrale de RICE [1968] [2].


On considère un milieu bidimensionnel fissuré, dont la fissure sera supposée rectiligne.
Le contour C est un contour ouvert, orienté dont les extrémités se trouvent sur les faces
supérieure et inférieure de la fissure.

(II.17)

Figure II. 8. Contour d’intégration

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CHAPITRE II DESA "M.S.C.P"

Où We est la densité d’énergie de déformation élastique telle que σij = ∂We /∂εij, u est le
vecteur déplacement en un point M du contour C avec la normale n tournée vers l’extérieur et
σ représente le champ de contraintes.

* L’intégrale J est indépendante du contour (à condition qu’il n’y ait pas de forces de surface
sur les lèvres de la fissure, que l’on soit en conditions isothermes, et en quasi-statique);
* L’intégrale J représente le taux de décroissance de l’énergie potentielle : J=− (∂Wp /∂A)= G
* L’intégrale J permet, dans certaines conditions, de décrire le champ des contraintes et des
déformations à la pointe de la fissure à travers le champ HRR.
Dans les cas où la plasticité est importante, on effectue une analogie avec un matériau
élastique non linéaire. Cette hypothèse est valable à condition qu’il n’y ait pas de brusques
variations dans la direction du chargement appliqué, et donc, pas de déchargement. En effet,
le déchargement en élasticité non linéaire s’effectue suivant la même courbe qu’à la montée,
ce qui n’est pas le cas en élastoplasticité. Dans ce cadre, l’intégrale J est étendue au cas des
matériaux élastiques non linéaires, et permet ainsi d’intégrer le champ des contraintes et des
déplacements à la pointe de la fissure. Ayant ainsi fait l’analogie entre l’élastoplasticité et
l’élasticité non linéaire, l’intégrale J peut être obtenue, comme précédemment, par la méthode
de la complaisance :

(II.18)

Figure II. 9. Détermination de J par la méthode de la complaisance

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CHAPITRE II DESA "M.S.C.P"

II.5.4 Relation entre J, G, K en élasticité :


On a :

= JI = υ
1−
2
dP

2

da E K I
(II.19)
En déformation
= J II = υ
1−
2
dP

2

da E K II
(II.20)

JI =K I
= GI (II.21)
E
En contrainte plane
2

J II =K II
= GII
E (II.22)
Lorsque les deux modes se superposent, on aura :

1 −υ
2

J =
E
(K + K )
2
I
2
II
(II.23)
E
Avec : µ= Coefficient de Lamé.
2(1 + υ )

Conclusion :
Le but de la mécanique de la rupture est de formuler des critères, c'est-à-dire de définir
les conditions pour les quelles un défaut identifié (ou non) peut se propager sous une
sollicitation donné.

On cherche alors des relations quantitatives entre la taille des défauts, les contraintes
appliquées et un paramètre caractéristique du matériau, dit de ténacité KIC.

Dans ce deuxième chapitre, nous avons essayé de donner une idée générale sur la
mécanique de rupture, son historique, ses auteurs, son objectif…

Aussi, nous avons cité quelques essais mécaniques, en donnant des brefs définitions.

Enfin, les déffirents paramètres de la rupture, le facteur d'intensité des contraintes, le


taux de restitution d'énergie et l'intégral de RICE.

Dans le chapitre qui suit, nous allons introduire la méthode des éléments finis, sa
définition et ses domaines d'utilisation, aussi, nous donnerons quelques méthodes numériques
de calcul du facteur d'intensité de contraintes.

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