Gaston Bergery

homme politique français

Gaston Bergery, né le à Paris où il est mort le [1], est un homme politique de gauche, collaborationniste et ambassadeur français.

Gaston Bergery
Illustration.
Gaston Bergery en 1933.
Fonctions
Ambassadeur de France en Turquie

(2 ans)
Prédécesseur Jean Helleu
Successeur Gaston Maugras
Ambassadeur de France en Union soviétique

(2 mois)
Prédécesseur Eirik Labonne
Successeur Roger Garreau (indirectement)
Député français

(5 ans, 11 mois et 30 jours)
Élection 3 mai 1936
Circonscription Seine-et-Oise
Législature XVIe (Troisième République)
Groupe politique GI
Prédécesseur Roger Sarret
Successeur Circonscription supprimée

(5 ans, 8 mois et 19 jours)
Élection 29 avril 1928
Réélection 8 mai 1932
Circonscription Seine-et-Oise
Législature XIVe et XVe (Troisième République)
Groupe politique RRRS
Prédécesseur Circonscription créée
Successeur Roger Sarret
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Paris 9e
Date de décès (à 81 ans)
Lieu de décès Paris 7e
Profession Avocat

Biographie

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Fils illégitime d'un important financier allemand, il est élevé par sa mère dans un milieu bourgeois. Il est licencié en droit. Il fait la guerre de 1914-1918 et est blessé en sur le front de Champagne. Il reçoit la Military Cross pour ses activités de liaison avec l'armée britannique.

Il est ensuite attaché au secrétariat du traité de paix de Versailles, puis est nommé en 1920 secrétaire général adjoint de la Commission des réparations qui siège de 1918 à 1924. Après la victoire électorale du Cartel des gauches, il est directeur du cabinet d'Édouard Herriot au ministère des Affaires étrangères (1924-1925). Ultérieurement, les relations avec Herriot se dégradent, Bergery reprochant à ce dernier ses capitulations devant les puissances d'argent[2].

À partir de 1926, il exerce la profession d'avocat à la cour d'appel de Paris[3], spécialiste du droit privé international, ayant pour clientèle quasiment exclusivement des Anglais et des Américains[4], ce qui l'amène à se déplacer des États-Unis à l'URSS.

De 1934 à août 1939, il fait paraître l'hebdomadaire La Flèche de Paris, qui a pour devise « Libérer la France de la tyrannie de l'argent et des ingérences étrangères »[5].

Radical

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En 1928, il est élu député radical de la Seine-et-Oise. Il est favorable au rapprochement avec la SFIO et soutient sans en faire partie les « Jeunes Turcs ». Ses prises de position « gauchistes » contre le capitalisme et pour la nationalisation des monopoles lui valent le qualificatif de « radical-bolchévik » de la part de ses adversaires[6]. Toutefois, peu intéressé par les problèmes économiques et sociaux, il concentre son attention sur la politique extérieure. Devant l'émergence de la vague nazie en Allemagne, il préconise l'annulation des réparations et l'acceptation d'un désarmement contrôlé.

Les élections législatives de 1932 donnent la majorité à la gauche, mais Herriot s'appuie sur l'aile droite du Parti radical. Bergery favorable à une alliance avec le Parti socialiste s'oppose de plus en plus à Herriot et vote en décembre la défiance au gouvernement[7]. Bergery entre en rapport avec la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme en 1932 par l’entremise de Georges Pioch, qui était dreyfusard et philosémite, dirigeant de la LICA et fut déatiste modéré sous l’Occupation[8]. « Le racisme et l’antisémitisme sont contraires à l’idée de nation » affirme-t-il[9]. Le , il démissionne du groupe radical et quitte le Parti quelques jours après.

Dissident

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Il fonde alors un mouvement antifasciste, le « Front commun contre le fascisme, contre la guerre et pour la justice sociale », proche du mouvement Amsterdam-Pleyel et de la Ligue des droits de l'homme, puis, en , le bimensuel frontiste La Flèche de Paris. Impressionné par la crise du 6 février 1934, il tente de capter les couches moyennes de la société en combattant le fascisme sur son propre terrain, celui de la propagande aux formules simplistes[10]. Afin de faire plébisciter ses propres propos d'unité des radicaux avec la gauche, contre ceux des dirigeants du Parti radical-socialiste soutenant le gouvernement nationaliste de Gaston Doumergue, il démissionne spectaculairement de son mandat de député et se représente à l'élection partielle de Mantes. Son plébiscite échoue : soutenu par la SFIO, mais combattu par la droite et le Parti communiste, il est battu de 299 voix.

Le Front commun fusionne lors des Assises de Lyon les 3 et avec la Troisième Force de Georges Izard et prend le nom de Parti frontiste pour se démarquer du Front populaire en cours de négociation entre le PC et la SFIO. L'attachement à gauche reste solide et le nouveau parti décide de s'associer à la coalition lors des élections législatives de 1936. Bergery est donc élu député du Front populaire en retrouvant son siège de Mantes alors qu'Izard est élu à Longwy.

Le Parti frontiste apporte un soutien critique aux gouvernements du Front populaire. Au cours de l'été 1937, Bergery démissionne du Comité central de la Ligue des droits de l'homme pour dénoncer sa complaisance à l'égard de Moscou. En novembre, tirant les conclusions de l'échec frontiste de rassemblement national au-delà des partis classiques, Izard et ses amis de la Troisième Force reprennent leur liberté. Bergery conserve le soutien de personnalités telles que Jules Romains ou Claude Mauriac.

Désenchanté par le Front populaire, peu à peu son discours intègre les thèmes d'autorité et de révolution nationale. Bien que dénonçant toujours le racisme, un relent d'antisémitisme est perceptible[11]. Sans être d'un pacifisme intégral comme son ami Félicien Challaye, il approuve les accords de Munich dans l'esprit des conciliateurs du gouvernement, sans abandonner les garanties données aux États de l'Europe orientale. Sa conviction profonde est que la France n'a pas les moyens diplomatiques et militaires de mener une guerre offensive[12].

Vichyste

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En , un Comité de liaison contre la guerre est constitué, réunissant une quinzaine de députés de droite et de gauche et auquel Bergery apporte son concours. Après la déclaration de guerre, Bergery réclame en vain que la discussion sur le vote des crédits militaires se fasse en séance secrète. Il est le seul député à voter contre les crédits de guerre en [13].

Pendant la Drôle de guerre, il refuse de soutenir le gouvernement Daladier, pour quelques jours plus tard voter contre l'investiture de Paul Reynaud, jugé trop belliciste.

La défaite consommée, il rédige, le , une motion instaurant un « ordre nouveau, autoritaire, national, social, anticommuniste et antiploutocratique ». Cette motion est cosignée par de nombreux parlementaires. Le 10 juillet, il fait partie des parlementaires réunis en Congrès qui votent les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Pendant l'été, il est membre du Comité d'organisation chargé de définir les bases d'un Parti national unique. Le rapporteur devait en être Marcel Déat, mais le projet échoua devant les réticences de Jacques Doriot, Charles Maurras et du colonel de La Rocque.

Dans le climat d'intrigues des premiers mois du régime de Vichy, Bergery s'accroche à nouveau à son projet de Parti unique en réunissant autour de lui quelques adversaires de Pierre Laval. Il rédige une partie du message radiodiffusé aux français du maréchal (), dans lequel ce dernier propose aux Français d'adhérer à un ordre nouveau et à une collaboration réciproque avec l'Allemagne. Il rédige aussi, avec Emmanuel Berl, l’« appel aux travailleurs » du maréchal Pétain.

Il est ambassadeur du régime de Vichy à Moscou, d'avril à la rupture des relations diplomatiques en . De retour en France, il refuse le poste de Garde des Sceaux que lui propose Darlan[14] et reprend sa profession d'avocat partagée entre Paris et Vichy. Il devient membre du Conseil national, puis, entre 1942 et 1944, ambassadeur à Ankara[15], où il entretient de bonnes relations avec l'ambassadeur allemand Franz von Papen. Après la libération de Paris et le départ de Pétain en Allemagne, il s'efface devant le représentant à Ankara du Comité français de la Libération nationale, Jacques Tarbé de Saint-Hardouin.

Il a reçu l'ordre de la Francisque[16].

Il rentre en France en 1945. Arrêté, il fait cinq mois de détention préventive. Poursuivi pour intelligence avec l'ennemi[17], il est traduit devant la Cour de justice de la Seine en février 1949 et acquitté. Il reprend en 1947 une carrière d'avocat. En 1951, il participe à la fondation de l'Association pour défendre la mémoire du maréchal Pétain.

Mandats de député

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  • -  : Seine-et-Oise (étiquette : Républicain radical et radical-socialiste)
  • -  : Seine-et-Oise (étiquette : Républicain radical et radical-socialiste)
  • -  : Seine-et-Oise (étiquette : Parti frontiste)

Famille

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Gaston Bergery épouse en 1920 en premières noces Germaine Malançon (1900-1982) et en 1927 en deuxièmes noces Lioubov Krassine (1908-1991), fille du révolutionnaire Leonid Krassine. Elle lui donne un fils, Jean-François Bergery (1927-1975), futur journaliste et scénariste, avant de divorcer l'année suivante en 1928. Elle sera ensuite l'épouse d'Emmanuel d'Astier de La Vigerie. Il épouse en troisièmes noces, en 1934, Elizabeth (dite Bettina) Shaw-Jones (1902-1993), assistante d'Elsa Schiaparelli.

Notes et références

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  1. Insee, « Extrait de l'acte de décès de Gaston Franck Bergery », sur MatchID
  2. Philippe Burrin, La dérive fasciste : Doriot, Déat, Bergery (1933-1945), Éditions du Seuil, réed. 2003, p. 37.
  3. Combat, 8 février 1949, p. 6 : « Inscrit au Barreau de Paris en 1926 ».
  4. Combat, 8 février 1949, p. 6 : « Quand j'étais avocat, tous mes clients étaient anglais ou américains ».
  5. Combat, 8 février 1949, p. 6.
  6. Burrin, op. cit., p. 40
  7. Burrin, op. cit., p. 109
  8. Epstein 2008, p. 61.
  9. Epstein 2008, p. 62.
  10. Burrin, op. cit., p. 119-122
  11. Burrin, op. cit. p. 260-263
  12. Burrin, op. cit. p. 346.
  13. Gérard Boulanger, A mort la Gueuse !, Calmann-Lévy 2006 p. 142
  14. Burrin, op. cit. p. 410
  15. À la suite du ralliement de Jean Helleu à la France libre.
  16. Henry Coston (préf. Philippe Randa), L'Ordre de la Francisque et la révolution nationale, Paris, Déterna, coll. « Documents pour l'histoire », , 172 p. (ISBN 2-913044-47-6), p. 24 — première édition en 1987.
  17. Combat, 8 février 1949, p. 1.

Bibliographie

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Liens externes

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Articles connexes

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