Exonymie

attribution de noms de peuples ou de lieux par des personnes extérieures
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L’exonymie est le fait qu'un groupe de personnes dénomme un autre groupe de personnes, un lieu, une langue par un nom distinct du nom régulier employé par l'autre groupe pour se désigner lui-même[1]. Ce nom est l’exonyme. Par extension, toute dénomination dans une langue étrangère, si elle ne correspond pas au nom local[pas clair], est un exonyme.

Définition

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L'exonyme est reconnu par le Groupe d'experts des Nations unies pour les noms géographiques comme un « nom géographique utilisé dans une langue pour désigner un lieu situé en dehors du territoire dont cette langue est la langue officielle. Les modes de formation des exonymes sont multiples, traductions, adaptations, etc. mais la moindre différence avec le nom local, dans la notation de signes diacritiques par exemple, entraîne de fait la création d'un exonyme. Exemples : Londres, Florence sont les exonymes français de London, Firenze ; Francia et Parigi sont les exonymes italiens de France et de Paris »[2].

Exemples

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  • Afin de faciliter la compréhension : l'Allemagne.
  • Les Roumains se nomment eux-mêmes Român (Români au pl.)
    Valaques était un exonyme en français jusqu'au XIXe siècle (voir Walh).
  • Les colons français désignèrent par Nez-Percés et Cœur d'Alène, deux peuples indigènes d'Amérique du nord qui se nommaient eux-mêmes Nimíipuu (Les Gens-Le Peuple) et Schitsu'umsh (Le Peuple que l'on découvre ici). Les colons anglais adoptèrent ces périphrases en ne modifiant que l'écriture qui devint : Nez Perce et Coeur d'Alene.
  • En Suisse, les exonymes courants sont systématiquement indiqués sur les cartes nationales le long des frontières linguistiques, dans un couloir d'environ 10 km de large[3].

Étymologie

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Le mot exonymie est dérivé du nom « exonyme », construit à partir du préfixe exo- « externe » et du suffixe -nyme « nom » en grec.

Connotations de l'usage

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L'emploi de l'exonymie est considéré par certaines personnes[Qui ?] comme ethnocentré et comme figurant parmi les symptômes de l'impérialisme culturel.

Limites de la définition des experts de l'ONU

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La ville de Casablanca, le grand port et la capitale économique du Maroc, serait un exonyme pour désigner la ville marocaine de ad-Dar al-Beïda. Et pourtant les Marocains considèrent eux-mêmes "Casa" ou "Casablanca" comme des noms bien à eux qu'ils utilisent très souvent.

La notion de langue officielle du territoire est une notion propre à l'ONU mais bien trop rigide pour convenir dans tous les cas. Les toponymes gaéliques d'Écosse ou amazighs du Maroc ne sont pas des exonymes, même s'ils sont doublés par des toponymes anglais ou arabes.

Les noms des villes et villages corses ont conservé leurs exonymes italiens, au détriment de leurs endonymes corses, bien que le corse ne fasse pas partie des langues de France.

Le nom de Pignerol que les Français donnent à la ville italienne de Pinerolo n'est pas un exonyme car la ville fut française avant d'être italienne. De même Colonia ou Cologne ne sont pas des exonymes de Köln, ni Potamos Sekouana un exonyme grec pour le fleuve Seine, ni Konstantinoupolis ou Lutèce des exonymes d'Istanbul ou de Paris.

D'inévitables adaptations phonétiques accompagnent le passage d'une langue à une autre : Moskva (Москва) donne Moscou, chaque langue s'appropriant les vocables étrangers et se donnant les moyens de le prononcer. Il faut également faire la part de l'histoire et des cohabitations linguistiques : Cologne fut latine avant d'être germanique et elle fut longtemps habitée par des Germains utilisant le latin.

Gratianopolis et Sophia Antipolis ne sont pas les exonymes grecs des françaises Grenoble et Antibes. Dans le premier cas il y a antécédence du nom à une époque où le grec était langue de l'Empire et où le français n'existait pas encore, dans le second cas retraduction rétroactive voulue par les Français eux-mêmes.

Affirmer que le mot Égypte serait un exonyme revient à dire que les Coptes et les pharaons seraient des étrangers dans leur propre pays et considérer le mot sémitique Misr ou Misraïm comme un endonyme reviendrait en revanche à accorder un privilège d'occupant légitime non seulement aux Arabes égyptiens mais aussi aux Hébreux.

Dans la langue italienne, certains exonymes d'États africains tels que Maurizio et Seicelle ont été totalement remplacés aujourd'hui par les endonymes étrangers Mauritius (île Maurice) et Seychelles[4].

La définition des experts de l'ONU s'explique par une vision du monde organisée exclusivement de façon juridique où coexistent des États dont les territoires sont mutuellement extérieurs les uns aux autres et où seules les langues officielles sont reconnues. Mais le monde géographique réel est aussi organisé de nombreuses autres façons. Il y a des aires linguistiques vivantes ou anciennes que l'on peut cartographier même si les langues ne sont pas reconnues officiellement ni même tolérées par les autorités de l'État. La toponymie est souvent révélatrice d'une histoire qui constitue pour les populations actuelles un patrimoine à protéger.

Il faut aussi tenir compte du fait que les populations migrent et emportent avec elles l'usage de leur langue habituelle et de quelques autres langues. Les personnes qui exercent des activités commerciales utilisent les langues de leurs clients si bien que, par exemple, le russe a remplacé le finnois parmi les langues étrangères les plus utilisées à Chypre depuis 1990.

Une vision nationaliste a fait considérer comme une menace, depuis le XIXe siècle, la proximité d'une langue étrangère à la langue nationale officielle. La France reste dans cette vision, n'ayant pas ratifié et appliqué la charte européenne des langues régionales ou minoritaires[5].

Au XXIe siècle, on a plutôt tendance à la considérer comme un signe ou une source de richesse culturelle ou économique. L’Union européenne, pour sa part, encourage l'apprentissage des langues et reconnaît l'existence des langues minoritaires. La signalisation routière française signale désormais parfois l'entrée d'une localité par un toponyme inscrit non seulement en français mais aussi dans une autre langue. Or ni Avignon, ni Avignoun ne sont des exonymes.

Proposition alternative de définition

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Une autre proposition de définition de l'exonyme peut être avancée : c'est un « nom géographique utilisé dans une langue pour désigner à distance un lieu (topos) ou un peuple étranger dans une situation délibérée d'ignorance des noms ou des notions utilisés par les populations du lieu. Les contacts commerciaux et culturels équitables limitent l'exonymie à l'adaptation phonétique rendue nécessaire par le passage d'une langue à une autre ».

Selon cette définition, l'adaptation phonétique ou significationnelle (la traduction) ne seraient pas des cas d'exonymie mais au contraire des cas d'appropriation et de respect du toponyme issu d'une langue étrangère, dans un contexte linguistique où l'usage de plusieurs langues est possible en un même lieu.

La lecture exotique d'une graphie endonymique serait en revanche potentiellement génératrice de caconymie voire d'exonymie. Lire en effet Saho Paolo quand les lusophones écrivent São Paulo mais prononcent très approximativement, Sinhou Paolou car la diphtongue ni l'accent tonique en question n'existent en français, c'est manquer délibérément de respect pour le nom originel. Il serait peut-être en effet préférable de lire "Sain(t) Paol(o)" ou même de traduire "Saint-Paul". On peut prendre un autre exemple : le toponyme "Lisboa" est respecté, autant que faire se peut, par la forme anglaise "Lisbon" ou française "Lisbonne", mais il serait déformé par la prononciation prétendue endonymique Lisboha.

Le déformations faussement érudites d'une toponymie rurale mal interprétée par des cartographes officiels mais extérieurs au milieu local seraient aussi, selon la définition ci-dessus, des cas particuliers d'exonymie. Le village gascon des Pyrénées-Atlantiques qui porte le nom officiel de Saint-Dos s'appelle en réalité "Sendos" depuis des siècles et n'a aucun rapport ni avec la sainteté ni avec un personnage qui se serait appelé Dos et qui n'a jamais existé. On pourrait citer en France de nombreux exemples de cette exonymie opérant dans le cadre de la langue nationale.

La volonté du pouvoir mussolinien de rebaptiser en Ulzio la localité d'Oulx, dans la haute vallée francophone de Suze, dans les Alpes piémontaises, serait aussi, selon cette dernière définition, une tentative d'imposer l'exonymie à la population d'un lieu. Conformément aux désirs du dictateur, la vallée est devenue italophone depuis 1945, mais elle n'a jamais accepté que le toponyme italophone vienne remplacer, ni dans l'usage du lieu, ni dans la terminologie officielle, le nom francophone originel, porteur d'une histoire transalpine et d'une identité dauphinoise qui, en l'occurrence, n'exclut absolument pas l'appartenance loyale à la nation italienne.

Exonymie et démocratie

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La notion d'exonymie et les différentes définitions qu'on peut en donner relèvent éminemment de deux questions très sensibles : l'identité nationale et son aptitude plus ou moins grande à se définir à l'intérieur d'un cadre démocratique et respectueux de tous. Il est indispensable que les deux notions complémentaires d'exonymie et d'endonymie intègrent les notions opposées de respect de l'identité ou de refus délibéré du respect de l'identité d'autrui. À cet égard, le préambule de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (Paris, 1789) pourrait servir de guide : « L'ignorance, l'oubli, sont la cause de tous les maux ».

La toponymie en effet n'est pas seulement un patrimoine national, elle est un patrimoine de l'humanité. Les langues n'appartiennent pas seulement aux États qui les adoptent comme langue officielle mais à tous les locuteurs qui prennent la peine de les apprendre et de s'en servir.

Listes existantes

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  • Exemples d'exonymes de langue française concernant les pays :
Exonyme Nom dans le peuple d'origine
Albanie Shqipëria (autrefois les Albanais ont également été appelés Arnautes)
Allemagne Deutschland
Arménie Hayastan, en arménien Հայաստան , ("La terre de Haïk")
Bhoutan Druk Yul (« Terre du dragon » en dzongkha)
Chine Zhongguo (中國), les caractères signifiant (« Pays du milieu »)
Corée Chosŏn (Joseon) (조선 / 朝鮮) en Corée du Nord et Hanguk (한국 / 韓國) en Corée du Sud, mais Goryeo (고려 / 高麗), à l'origine du mot Corée, est également utilisé comme mot neutre pour désigner la Corée ; voir les articles détaillés Noms de la Corée et Pays du Matin calme.
Empire byzantin L'Empire romain ou la Romanie (Geoffroi de Villehardouin), en grec archê ton Rhômaion, litt. "État des Romains" (Constantin VII Porphyrogénète)
Égypte Miṣr (مصر) en arabe, Maṣr en arabe égyptien; signifiant « un pays » ou un « État » (du nom de Misraïm). L'exonymie est discutable.
Finlande Suomi en finnois, mais est appelée Finland en suédois
Géorgie Sakartvelo
Grèce Ἑλλάς / Hellás) ; voir Noms des Grecs.
Hongrie Magyarország
Inde Bhārat en hindi, mais India est également reconnu officiellement ; voir Origine du nom de l'Inde
Japon Nippon / Nihon (日本, « L'origine/racine du soleil », souvent traduit en Occident « pays du Soleil levant » ; voir Noms du Japon)
Maldives Dhivehi raajj'e ; (« Les îles du peuple Dhivehi » en langue dhivehi (divehi) ; voir Histoire des Maldives)
Maroc al-Maghrib (« Le Couchant » en arabe ; voir aussi Maghrib et Maghreb) L'exonymie est discutable car le royaume de Maroc (de Marrakech) fut un royaume marocain. Le mot al-Maghrib en revanche s'oppose à al-Mashreq et procède d'une vision panarabe.
Monténégro Crna Gora / Црна Гора (« Montagne noire » en serbe ; voir Histoire du Monténégro)
Nouvelle-Zélande New Zealand / Aotearoa (« La terre du nuage long et blanc »)
Sumer Ki-en-gi (« Lieu des seigneurs civilisés »)
Exonyme Nom dans le peuple d'origine
Aztèques Mexica ou Tenochca
Berbères Imazighen (singulier Amazigh, « homme libre »)
Tziganes Roms (« homme » en sindhi) - De nombreux exonymes existent, voir l'article.
Esquimaux Inuits, Yupiks, Aléoutes
Incas Tawantinsuyu (« Quatre Coins »)
Iroquois Haudenosaunee (« La Ligue de Paix et de puissance »)
Sumériens Sag-gi-ga (« Le peuple à tête noire »)
Touaregs Kel Tamasheq (« ceux de la langue tamasheq »)
  • Exonymes correspondant aux toponymes/villes
Exonyme Nom dans le peuple d'origine
Canton Guangzhou (廣州), les caractères signifiant (« Vaste Préfecture »)
Laponie Sápmi en same, mais est appelée Lappi en finnois (et Sameland ou Lappland en suédois)
Pékin Beijing (chinois : 北京) : Capitale du nord
Taipei (chinois traditionnel : 臺北市) : Capitale du nord de Taïwan
Mont Everest Chomolugma (mont), c'est un cas certain d'exonymie
Mont Sinaï Moussa (Djebel), l'exonymie est discutable car le mont fut Sinaï avant d'être le mont de Moïse.

Notes et références

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  1. Jean-Louis Vaxelaire, Les noms propres : une analyse lexicologique et historique, H. Champion, , p. 169.
  2. Naftali Kadmon (direction), Commission nationale de toponymie (traduction et adaptation) et Commission de toponymie du Québec (traduction et adaptation) (trad. de l'anglais), Glossaire de la terminologie toponymique, (lire en ligne)
  3. Conseil national (Suisse), Réponse du Conseil fédéral à l'interpellation no 13.3703 du d'Andrea Geissbühler, « Désignation des lieux bilingues. Décision arbitraire ou politique ? » [lire en ligne (page consultée le 19.11.2022)]
  4. Sandro Toniolo, I perché e i nomi della geografia, Istituto Geografico Militare, Florence, 2005, p. 88-89, n. 170-171.
  5. « Liste complète », sur Bureau des Traités (consulté le )

Annexes

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Bibliographie

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  • Andres Max Kristol, « Motivation et remotivation des noms de lieux: réflexions sur la nature linguistique du nom propre », Rives nord-méditerranéennes [En ligne], 11 | 2002, mis en ligne le 21 juillet 2005, Consulté le 29 janvier 2012. [lire en ligne]

Articles connexes

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Liens externes

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