Chartreuse de Bonpas
La chartreuse de Bonpas est un monument historique classé datant du XIIe siècle, située dans la commune de Caumont-sur-Durance en Vaucluse, au bord de la Durance.
Chartreuse de Bonpas | ||||
Période ou style | Roman et gothique | |||
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Début construction | Chapelle du XIIe siècle | |||
Fin construction | XVIIe siècle | |||
Propriétaire initial | Ordre de Saint-Jean de Jérusalem | |||
Destination initiale | Prieuré hospitalier. | |||
Propriétaire actuel | Jean-Claude Boisset | |||
Protection | Inscrit MH (1943) Classé MH (1950) |
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Coordonnées | 43° 53′ 21″ nord, 4° 55′ 30″ est | |||
Pays | France | |||
Région française | Provence-Alpes-Côte d'Azur | |||
Département | Vaucluse | |||
Commune | Caumont-sur-Durance | |||
Géolocalisation sur la carte : France
Géolocalisation sur la carte : Provence-Alpes-Côte d'Azur
Géolocalisation sur la carte : Vaucluse
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Site web | https://www.bonpas.fr/fr/ | |||
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Localisation
modifierLa chartreuse de Bonpas est située dans la commune de Caumont-sur-Durance en Vaucluse, en limite du territoire d'Avignon, entre la voie TGV, la sortie Avignon-sud de l'autoroute A7, la route nationale 7 et la route départementale D900 qui la sépare des bords de la Durance.
C'est de la route départementale D900 que l'on accède à la propriété.
Toponymie
modifierCe quartier de Caumont-sur-Durance est un passage pour traverser la Durance de longue date. Jusqu'au Moyen Âge, la traversée étant très difficile, le lieu prit le nom de « malus passus » (mauvais pas). Avec la présence de la chartreuse, les moines ont fait le nécessaire, pour des raisons économiques et pratiques quotidiennes, pour améliorer la traversée de la Durance à cet endroit, qui prit rapidement le nom de « bonus passus » (bon pas).
Histoire
modifierAntiquité et haut Moyen Âge
modifierLes premières mentions du site sont romaines et parlent d'un oppidum[1].
Vers l'an 800 sont construits sur le site une chapelle et un hôpital[1].
Moyen Âge
modifierEn 731, les Sarrasins se sont emparés du comtat Venaissin et d'Avignon après un combat à Maupas où de nombreux combattants avignonnais sont tués. La ville d'Avignon et le Comtat sont repris en 737, par Charles Martel et son frère Childebrand[2]. La chapelle Notre-Dame de Bonpas (monument historique) a été construite au-dessus de leurs tombes comme l'a confirmé la découverte de trois tombes creusées dans le roc sous la crypte de la chapelle et d'un ossuaire à l'arrière de la crypte[3]. Dom Polycarpe de la Rivière cite deux documents qu'il aurait copié dans les Archives du Grand prieuré de Saint-Gilles : un diplôme de Charles Martel datant de 739 fondant la chapelle Sainte-Marie de Maupas, un second document datant de 805 mentionnant l’église Sainte-Marie de Maupas de Charlemagne. La construction de la chapelle est peut-être due à Charles Martel pour remercier les nobles Avignonnais de leur bravoure face aux Sarrasins.
Franchissement de la Durance
modifierL'endroit est stratégique. Un rocher s'élevant en rive droite de la Durance protège un passage facilement franchissable et commandait une route allant de Bonpas à Ernaginum, sur la rive gauche du Rhône[4]. Le passage c'est d'abord appelé Maupas. Les textes du XIIe siècle mentionnent ce passage. Les archives de la chartreuse de Bonpas indiquent qu'en 1166 des maîtres pontifes et hospitaliers prévoient la construction d'un pont, mais il n'existe qu'un bac. L'église d'Avignon avait vendu à cette date aux hospitaliers et aux maîtres de la fabrique du pont la moitié du péage qu'elle y levait mais en conservant le dominium sur le lieu et le droit d'y élever des constructions. L'église d'Avignon a fait confirmer ses droits par une bulle impériale. C'est vers 1200 que le nom du lieu a changé de Malus Passus (Maupas) en Bonus Passus (Bonpas)[5]. Le XIIe siècle voit l'apparition des fortifications[1].
En 1189, le pape Clément III adresse une bulle à Raymond, prieur de Bonpas, et aux religieux les louant pour la construction du pont, confirmant et ratifiant tous les biens et privilèges du prieuré, leur permettant de recevoir des legs pieux. Nouvelle bulle du pape Célestin III, en 1197, confirmant la précédente pour la construction d'un pont. Ces deux bulles semblent montrer que le pont était toujours à construire à ces dates[6]. Ce pont devait être un pont de bateaux comme le montre un document de 1241 dans les religieux se plaignent que Nicolas, bailli de Noves, a enlevé tous les bateaux avec tous les cordages et agrés[7].
Ce passage a attiré des convoitises. Raymond VII de Toulouse, comte de Toulouse et marquis de Provence, s'en est emparé en 1241 et a fortifié le lieu[8],[9] pour empêcher le comte de Provence de franchir la Durance et de pénétrer sur ses terres.
À la suite de cette usurpation, les religieux ont dû quitter le lieu et établir un bac, peut-être à traille, vers Noves, permettant de traverser la Durance et appartenant au prieuré[10], lui fournit d'importants revenus. Les évêques d'Avignon contestaient aux religieux le droit d'avoir une barque et réclamaient le droit d'en avoir une.
En 1267, le prieur de l'ordre des hospitaliers de Bonpas, qui étaient des chanoines de Saint-Augustin, prend le titre de la Maison du pont de Bonpas. Le terme d'hospitalier provient du fait qu'ils devaient un hôpital ou une hâtellerie pour accueillir des pèlerins.
En août 1267, l'évêque d'Avignon Bertrand II transige avec le prieur du prieuré de Bonpas sur les droits du port de Rognonac et reconnaissait aux religieux de Bonpas le droit immémorial d'avoir une barque sur la Durance et l'emplacement d'un port dans un lieu convenable et le libre accès des routes qui y mènent[11],[12].
En 1270, Alphonse de Poitiers, accorda aux frères hospitaliers du pont de Bonpas sur la Durance confirmation de tous les droits, juridictions, fiefs et banalités qu'ils avaient dans le Comtat Venaissin et son comte de Toulouse. L'acte est intitulé Privilegiam hospitaleriis Boni Passus[13].
Aucun document ne permet d'affirmer qu'un pont ait existé avant celui construit en mélèze des Alpes entre 1807-1812, malgré le titre de Maison du pont de Bonpas. Cependant L. Pelloux écrit qu'un pont a été construit en dix ans après 1189 mais qu'il a été emporté par une crue vers 1272 et qu'on voyait les débris de quelques piles en 1618. Ce pont devait comporter douze ou treize arches et mesurait 224 mètres de long[14].
Hospitaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem
modifierLe 8 des calendes de juillet 1277, le prieur Raymond Alfanti et les religieux élisent frère Pierre de Regerio pour demander au pape Jean XXI la translation de leur ordre aux Templiers après avoir reçu l'accord de Giraud, évêque de Cavaillon. Ce choix est peut-être dû aux vexations des hommes du comte de Toulouse et des habitants de Noves. L'évêque de Cavaillon change d'avis. Raymond Alfanti informe Giraud, évêque de Cavaillon, et son chapitre, le 9 des calendes d'août 1278, que le pape Nicolas III avait accepté d'aliéner la Maison de Bonpas avec tous ses droits et dépendances à Guillaume de Villaret, prieur et grand-maître des Hospitaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem[1],[15]. Malgré les contestations de l'évêque de Cavaillon et de son chapitre, la Maison de Bonpas est restée aux hospitaliers de Saint-Jean.
Chartreuse
modifierEn 1318, Jean XXII, pape installé à Avignon, prend le monastère et le cède aux chartreux[1]. Le pape Jean XXII a donné Bonpas aux chartreux par la bulle du . La chartreuse est organisée le [16]. Ces bâtiments n'étant pas appropriés pour la vie des chartreux, ils cherchèrent un nouvel emplacement. Le niveau du sol pour la construction de la chartreuse a été réhaussé. La construction de la chartreuse a été financée par Jean XXII, entre 1331 et 1333. Ils ont été continués à partir de 1368 par La chapelle et tous les bâtiments qui s'y rattachent au levant par le cardinal Simon Langham. La chartreuse ne comprend que six cellules donnant sur le grand cloître. Le nombre de cellules a été réduit à quatre, en 1675, lors de leur reconstruction[17]. Il y a été inhumé dans l'église, mais son corps a été transporté dans la cathédrale de Canterbury trois après sa mort[18],[19].
Le cardinal Philippe de Cabassolle décédé en 1372 y est inhumé[20].
Le cardinal Martin de Salva et son neveu Michel de Salva ont financé la chapelle Saint-Laurent où ils ont été inhumé, le premier en 1403, et le second en 1406[21]. Du côté opposé à la chapelle Saint-Laurent par rapport à l'église avait été construite en 1346 la chapelle Saint Hugues grâce à la donation de Maître Hugues de Harlam.
Au XVe siècle, Hugues de Saint-Martial y est prieur commendataire.
La chartreuse n'a pas subi de dégradations de la part des protestants pendant les guerres de religion.
Alphonse-Louis du Plessis de Richelieu, frère du cardinal de Richelieu, est prieur de la chartreuse de Bonpas en 1621 avant d'être nommé archevêque d'Aix-en-Provence, le 6 décembre 1625, puis archevêque de Lyon en 1628, créé cardinal en 1629.
De nouveaux bâtiments, le chapitre, deux petits cloîtres et sept cellules, sont construits grâce à la donation de François Seytres, seigneur de Vaucluse, et sa femme, Éléonore de Sade, dame de Goult et de Beauchamp, en 1631[22].
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Frère donat
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Frère convers
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Symbole des chartreux
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Tenue ordinaire
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Tenue de ville
Période moderne
modifierLes chartreux sont expulsés ont quitté la chartreuse le [23]. La chartreuse comptait alors 16 pères et 8 frères convers. Le prieur, dom Massilian a émigré en Italie. 4 pères et 4 frères ont prêté serment civique de liberté-égalité à Avignon en septembre 1792 et bénéficient du statut de pensionnaires de l'État. un religieux avait prêté serment en juillet devant la municipalité de Caumont. Le , le district d'Avignon s'inquiète de la conservation des archives des établissements religieux supprimés. Il nomme Joseph-Hippolyte Milon, prêtre du diocèse de Senez, comme archiviste-bibliothécaire, et Jean-Étienne Néry (1750-1837), ancien religieux de Bonpas, comme adjoint. Mais Milon quitte Avignon pour Nice pour ne plus revenir, laissant Néry seul pour recueillir les archives des établissements religieux[24]. La chartreuse et ses biens sont vendus comme bien national.
Le [25], le poète et auteur dramatique français Adolphe Dumas naquit à la Chartreuse.
Le , alors qu'il était en route vers l'île d'Elbe, Napoléon après avoir quitté Avignon, passa sur le pont de Bonpas. Il fit arrêter son équipage et, prenant sa lunette de campagne, regarda la chartreuse. Il dit alors : « Dans un autre siècle, un caprice du destin m'aurait peut-être jeté dans ce cloître ; là encore, je me serais fait une place. Le catholicisme remuait alors le monde ; toutes ces congrégations de moines étaient autant de régiments, on pouvait en devenir le chef »[26],[27]. L'église et les bâtiments de la chartreuse vont servir de carrière de pierre. L'ancienne hôtellerie et la chapelle Notre-Dame ont été conservées.
La chartreuse appartient à la famille de Grenaud entre 1841 et 1941.
Période contemporaine
modifierEn 1942, la chartreuse de Bonpas est achetée par Pierre Olphe-Galliard, qui la rénove entièrement, et lui donne son aspect actuel. La chapelle est restaurée en 1949 et est consacrée la même année par Gabriel de Llobet, archevêque d'Avignon, ancien évêque de Gap et d'Embrun. La famille Olphe-Galliard, puis Casalis Olphe-Galliard, reste propriétaire jusqu'en 2003, date à laquelle la chartreuse de Bonpas est vendue au groupe Boisset.
Protection
modifierLa chapelle du XIIe siècle est classée monument historique[28].
La chartreuse
modifierCouvent créé par les hospitaliers au XIIIe siècle, la chartreuse connut la prospérité au XVIIe siècle, époque à laquelle fut élevée la salle capitulaire.
Le caveau
modifierSon caveau permet de déguster des vins de la vallée du Rhône et d'autres terroirs viticoles comme la Bourgogne, le Beaujolais, le Languedoc. Une initiation à la dégustation du vin est possible sur rendez-vous.
Les jardins
modifierJardins à la française.
Les environs
modifierOutre la route nationale, la Durance, la ligne TGV, l'Aéroport Avignon-Provence et l'autoroute, la chartreuse de Bonpas est entourée de vignes.
Galerie de photos
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Cour d'honneur
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Le grand cellier
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Le chai
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Les jardins à la française
Notes et références
modifier- (fr) Histoire de la Chartreuse sur le site de la Maison Louis Bernard.
- Nouguier 1659, p. 27-28
- Gayet 1886, p. 67
- Rochetin 1891, p. 56
- Gayet 1866, p. 67-68
- Dubois 1930, p. 5
- Dubois 1930, p. 9
- Michel 1911, p. 370
- Dubois 1930, p. 8-9
- Catherine Lonchambon, « D’une rive à l’autre de la Durance : d’étranges bateaux », in Guy Barruol, Denis Furestier, Catherine Lonchambon, Cécile Miramont, La Durance de long en large : bacs, barques et radeaux dans l’histoire d’une rivière capricieuse, Les Alpes de lumière n° 149, Forcalquier 2005, (ISBN 2-906162-71-X), p 55
- François Nouguier, Histoire chronologique de l'Eglise, évesques, et archevesques d'Avignon, Avignon, Imprimerie de Georges Bramereau, (lire en ligne), p. 89
- Dubois 1930, p. 9
- Grégoire 1818, p. 25-27
- L. Pelloux, « La Durance. Ponts sur la Durance », Annales des Basses-Alpes : bulletin de la Société scientifique et littéraire des Basses-Alpes, t. 19, no 70, , p. 405-406, 409 (lire en ligne)
- Dubois 1910, p. 10-11
- Gayet 1886, p. 72
- Gayet 1886, p. 83
- Gayet 1886, p. 77
- Dubois 1930, p. 130
- De nos jours, son tombeau se trouve dans la cathédrale de Cavaillon.
- Gayet 1886, p. 75
- Gayet 1886, p. 84-88
- Gayet 1886, p. 90
- Bernard Thomas, « Archives et Révolution en Vaucluse : l'œuvre de Jean-Étienne Néry (1750-1837) », La gazette des archives, nos 146-147, , p. 387-407 (lire en ligne)
- La transcription de sa date de naissance sur son acte de décès indique le .
- Revue Mabillon, Société Mabillon pour le développement des recherches d'histoire monastique en France, vol. XX, 1930, p. 136.
- Napoléon sur le pont de Bonpas
- Notice no PA00082016, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
Pour approfondir
modifierBibliographie
modifier- [Grégoire 1818] Henri Grégoire, « Chapitre V. Établissement des Frères Pontifes à Bonpas, à Lourmarin, à Malemort, à Mirabeau », dans Recherches historiques sur les congrégations hospitalières des Frères pontifes ou constructeur de pont, Paris, Chez Baudouin frère libraires, (lire en ligne), p. 25-27
- [Gayet 1886] Gayet, « Monographie de trois monastères fortifiés du XIVe siècle construits au sud-est d'Avignon : Montfavet par le cardinal Bertrand de Montfavet, Ste Praxède d'Espagne par le cardinal Pierre Gomez de Barrosso, chartreuse de Bonpas par le cardinal Simon de Langham », Mémoires de l'Académie de Vaucluse, t. V, , p. 64-92 (lire en ligne)
- [Rochetin 1891] L. Rochetin, « Archéologie Vauclusienne : Caumont - Bonpas - L'aqueduc de Vaucluse à Arles », Mémoires de l'Académie de Vaucluse, t. X, , p. 56-82 (lire en ligne)
- [Michel 1911] Robert Michel, « Les constructions de Jean XXII à Bonpas », Mélanges de l'école française de Rome, t. 31, , p. 369-392 (lire en ligne)
- [Dubois 1930] Marc Dubois, « La Chartreuse de Notre-Dame de Bonpas », Revue Mabillon : archives de la France monastique, t. 20, nos 77-80, , p. 1-14, 111-154, 242-259 (lire en ligne), t. 21, 1931, no 81-84, p. 4-24
- Robert Bailly, Dictionnaire des communes du Vaucluse, A. Barthélemy, Avignon, 1986, (ISBN 2-903044-27-9)
- Jules Courtet, Dictionnaire géographique, géologique, historique, archéologique et biographique du département du Vaucluse, Nîmes, Christian Lacour, Nîmes (réed.), 1997, , 385 p. (ISBN 2-84406-051-X)
- Librairie Hachette et société d'études et de publications économiques, Merveilles des châteaux de Provence, Paris, Collection Réalités Hachette, , 324 p.Préface du Duc de Castries vice-président de l'Association des Vieilles maisons françaises : Comtat Venaissin-Comté de Nice-Corse : Caumont-sur-Durance : La Chartreuse de Bonpas, Sur la route de l'Île d'Elbe..., pages 176 à 181
Articles connexes
modifier- Elzéar de Grimoard, prieur de Bonpas
- Pont de Bonpas
- Liste des sites classés de Vaucluse
Liens externes
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