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{{Voir homonymes|Vecteur (homonymie)}}
[[Fichier:Vecteurs somme.svg|droite|cadre|Deux vecteurs <math>\overrightarrow{u}</math> et <math>\overrightarrow{v}</math> et leleur vecteur somme.]]
En [[mathématiques]], un '''vecteur''' est un objet généralisant plusieurs notions provenant de la [[géométrie]] (couples de points, [[translationPoint (géométrie)|points]], [[Translation|translations]], etc.), de l'[[algèbre]] (« solution » d'un [[système d'équations]] à plusieurs inconnues), ou de la [[physique]] ([[force (physique)|forces]], [[vitesse]]s, [[accélération]]s{{etc}}).
 
Rigoureusement [[axiome|axiomatisée]], la notion de vecteur est le fondement de la branche des mathématiques appelée [[algèbre linéaire]]. En ce sens, un vecteur est un élément d'un [[espace vectoriel]], cec'est-à-dire quiqu'il permetest possible d'effectuer desles opérations d'[[somme vectorielle|addition]] et de [[multiplication par un scalaire]]. Un(par [[N-uplet|''n''-uplet]]un peutnombre), constitueret unque exempleces deopérations vecteur,ont àles conditionpropriétés qu'il appartiennenécessaires à un ensembleespace munivectoriel. des opérations adéquates.
 
Par exemple un [[couple (mathématiques)|couple]], un [[Uplet|triplet]] de [[nombre réel|nombres réels]], peut être vu comme un vecteur. L'addition et le produit par un [[nombre réel]] se font composante par composante.
Un vecteur peut être plus simplement défini comme un objet qui symbolise un déplacement entre 2 points du plan. Un vecteur <math>\overrightarrow{u} = \overrightarrow{AB}</math> est donc caractérisé par une direction (celle de la droite (AB)), un sens (de A vers B) et une norme, correspondant à la longueur AB. Si A et B sont confondus, alors <math>\overrightarrow{u} = \overrightarrow{0}</math> est dit "vecteur nul" et n'a ni direction ni sens et une norme de 0.
 
En [[géométrie euclidienne]], deux points ''A'' et ''B'' étant donnés, le vecteur <math>\overrightarrow{AB}</math> représente la translation qui, au point ''A,'' associe le point ''B''. Des couples de points différents peuvent donc correspondre au même vecteur. L'addition (voir [[relation de Chasles]]) et la multiplication se définissent géométriquement.
On représente fréquemment les vecteurs comme de simples ''n''-uplets ou, graphiquement, dans le cas particulier des espaces à 1, 2 ou 3 dimensions, par des flèches : cette représentation est issue de la combinaison des notions de couple de points de la [[géométrie euclidienne]] (qui permettent de définir les distances, mais aussi la [[direction (géométrie)|direction]] et le sens), et des possibilités de calcul offertes par l'[[algèbre]] ; cela permet de donner un sens à des vecteurs définis en dimension deux (le plan), trois (l'espace euclidien usuel), mais plus généralement dans des espaces de [[Dimension d'un espace vectoriel|dimension]] quelconque.
 
On représente fréquemment les vecteurs comme de simples n-uplets ou, graphiquement, dans le cas particulier des espaces à 1, 2 ou 3 dimensions, par des flèches : cette représentation est issue de la combinaison des notions de couple de points de la [[géométrie euclidienne]] (qui permettent de définir les distances, mais aussi la [[direction (géométrie)|direction]] et le sens), et des possibilités de calcul offertes par l'[[algèbre]] ; cela permet de donner un sens à des vecteurs définis en dimension deux (le [[Plan euclidien|plan]]), trois (l'[[espace euclidien]] usuel), mais plus généralement dans des espaces de [[Dimension d'un espace vectoriel|dimension]] quelconque.
 
En physique, les vecteurs sont grandement utilisés, ils permettent de modéliser des [[Grandeur physique|grandeurs]] comme une [[Force (physique)|force]], une [[vitesse]], une [[accélération]], une [[quantité de mouvement]] ou certains [[Champ (physique)|champs]] ([[champ électrique|électrique]], [[champ magnétique|magnétique]], [[champ gravitationnel|gravitationnel]]…). Une grandeur vectorielle s'oppose à une [[Scalaire (physique)|grandeur scalaire]] : la grandeur scalaire a uniquement une valeur mais pas de direction ou de sens.
 
Ces notions de champs, et les opérateurs permettant de les calculer, ont amené à définir, en [[algèbre multilinéaire]], la notion de [[champ de vecteurs]], c'est-à-dire une [[application (mathématiques)|fonction]] de ℝ<sup>''n''</sup> dans ℝ<sup>''n''</sup>. Ainsi, par exemple, résoudre une [[équation différentielle]], c'est déterminer les courbes auxquelles sont tangents les vecteurs du champ.
 
Ainsi, par exemple, résoudre une [[équation différentielle]], c'est déterminer les [[Courbe|courbes]] auxquelles sont [[Tangente (géométrie)|tangents]] les vecteurs du champ.
Plus généralement encore, les vecteurs sont des cas particuliers de [[tenseur]]s (ils s'identifient aux tenseurs d'ordre un). Les tenseurs d'ordre deux sont représentés par des [[Matrice (mathématiques)|matrices]], et les matrices d'une [[application linéaire]] transformant les vecteurs en [[forme linéaire]] constituent une forme particulière de vecteurs, appelées aussi [[bivecteur]]s.
 
Plus généralement encore, les vecteurs sont des cas particuliers de [[tenseur]]s (ils s'identifient aux tenseurs d'ordre 1). Les tenseurs d'ordre 2 sont représentés par des [[Matrice (mathématiques)|matrices]], et les matrices d'une [[application linéaire]] transformant les vecteurs en [[forme linéaire]] constituent une forme particulière de vecteurs, appelées aussi [[bivecteur]]s.
== Histoire ==
La notion de vecteur est le fruit d'une longue histoire, commencée voici plus de deux mille ans. Deux familles d'idées, d'abord distinctes, sont à l'origine de la formalisation. L'une d'elles est la [[géométrie]], traitant de [[longueur]]s, d'[[angle]]s et de mesures de [[Aire (géométrie)|surfaces]] et de [[volume]]s. L'autre correspond à l'[[algèbre]], qui traite des [[nombre]]s, de l'[[addition]] ou la [[multiplication]] et plus généralement d'ensembles munis d'opérations. Un vieux problème d'algèbre nous vient par exemple des [[Égypte antique|Égyptiens]] et s'exprime de la manière suivante : {{Citation|On doit diviser 100 miches de pain entre dix hommes comprenant un navigateur, un contremaître et un gardien, tous trois recevant double part. Que faut-il donner à chacun<ref>Ce problème provient du [[Papyrus Rhind]] étudié par [[Sylvia Couchoud]] dans son livre ''Mathématiques égyptiennes. Recherches sur les connaissances mathématiques de l'Égypte pharaonique'', éditions Le Léopard d'Or, 2004 {{ISBN|978-2-863-77118-1}}</ref> ?}}
Ces deux familles d'idées sont développées indépendamment, pour finir par converger vers la notion de vecteur.
 
=== Origines des deux concepts ===
[[Fichier:Title page of Sir Henry Billingsley's first English version of Euclid's Elements, 1570 (560x900).jpg|vignette|Les ''[[Éléments d'Euclide|Éléments]]'' formalise une structure géométrique initialement utilisée pour décrire l'ancêtre de l'espace vectoriel.]]
 
La [[Grèce antique|civilisation grecque]] développe la géométrie à un niveau inégalé à cette époque. L'un des fleurons est le traité nommé ''les [[Éléments d'Euclide]]'', datant du {{-s|III|e}}. Il contient la formalisation, très rigoureuse pour l'époque, d'une géométrie, encore maintenant appelée [[géométrie euclidienne|euclidienne]]. On y trouve les définitions d'une [[Droite (mathématiques)|droite]], d'un [[Plan (mathématiques)|plan]] ou de notre espace physique de [[dimension d'un espace vectoriel|dimension]] trois permettant de modéliser des volumes. Les propriétés des [[distance (mathématiques)|distances]], des angles, des mesures de surfaces et de volumes sont étudiées. Les théorèmes fondateurs, comme ceux appelés [[théorème de Thalès|Thalès]] ou [[théorème de Pythagore|Pythagore]], sont explicités et démontrés.
 
L'algèbre y est peu développée et contient essentiellement de l'[[arithmétique]]. Les nombres [[entier relatif|entiers]] et [[nombre rationnel|rationnels]] sont étudiés ainsi que quelques [[Nombre irrationnel|irrationnels]], c'est-à-dire les nombres qui ne s'écrivent pas sous forme d'une fraction d'entiers<ref>[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k68013g Le texte d'Euclide] est disponible en ligne sur [[Gallica]]. Une analyse est donnée dans R. Mankiewicz, ''L'histoire des mathématiques'', Seuil, 2001 {{ISBN|2-02048-3068}} (cet ouvrage est généraliste et traite la période hellénistique et en particulier Euclide).</ref>. Les nombres sont toujours [[Nombre positif|strictement positifs]].
 
[[Fichier:Les Neuf Chapitres sur l'art mathématique.jpg|gauche|vignette|[[Les Neuf Chapitres sur l'art mathématique]] ont en Chine un rôle analogue aux [[Éléments d'Euclide]] en occident.]]
 
La [[Chine]] développe les premières idées algébriques à l'origine des vecteurs. Un vieux texte, datant probablement du {{-s|I|er}}<ref>{{en}} [[Joseph Needham]], ''Science and Civilization in China: Volume 3, Mathematics and the Sciences of the Heavens and the Earth'', Cambridge University Press, 1959 {{ISBN|0521058015}}.</ref> : [[les Neuf Chapitres sur l'art mathématique]] y consacre sa huitième partie. Elle s'intitule ''Fang cheng'' ou ''Disposition rectangulaire'' et traite d'un problème maintenant appelé [[système d'équations linéaires]]. Cette culture n'en reste pas là, [[Qin Jiushao]] <small>([[1202]] - [[1261]])</small> généralise cette étude à des nombres différents des entiers ou rationnels. Il utilise les [[congruence sur les entiers|congruences]], inaugurant une démarche consistant à définir des vecteurs sur des ensembles de nombres exotiques. Il peut ainsi résoudre des problèmes liés au calendrier et aux alignements de planètes avec une très grande précision<ref>{{en}} [[Jean-Claude Martzloff]], « Chinese Mathematical Astronomy », dans [[Helaine Selin|H. Selin]] et [[Ubiratàn D'Ambrosio|U. D'Ambrosio]], ''Mathematics Across Cultures'', Dordrecht, 2000, {{p.|373-407}}, {{DOI|10.1007/978-94-011-4301-1_18}}.</ref>. La méthode utilisée ne sera connue qu'au {{XIXe siècle}} en Occident, sous le nom de [[pivot de Gauss]]. Ce résultat est suffisamment étonnant pour que {{Lien|langue=en|fr=Ulrich Libbrecht}} précise que : {{Citation|Nous ne devrions pas sous-estimer la percée révolutionnaire de Qin, en effet, depuis le [[théorème des restes chinois]] de [[Sun Zi (mathématicien)|Sun Zi]], on passe sans intermédiaire à un [[algorithme]] plus avancé que la méthode de Gauss elle-même, et il n'y a pas la moindre indication d'une évolution graduelle<ref>{{en}} U. Libbrecht, ''Chinese Mathematics in the Thirteenth Century : the Shu-shu Chiu-chang of Ch'in Chiu-shao'', Cambridge, Mass., [[MIT Press]], 1973.</ref>.}}
 
L'aspect géométrique n'échappe pas aux mathématiciens chinois. Le dernier chapitre, le ''Gou gu'' comporte un équivalent du théorème de Thalès et de Pythagore<ref>Les informations sur les neuf chapitres ainsi qu'une version de ce texte se trouvent dans {{ChemlaShuchun}} (ce livre contient une traduction française avec des addenda détaillés et une édition commentée du texte chinois du livre et de son commentaire).</ref>.
 
=== Convergence de l'algèbre et de la géométrie ===
[[Fichier:De la perspective en peinture.jpg|vignette|Illustration extraite du traité de perspective ''De prospectiva pingendi'' de [[Piero della Francesca]], un peintre de la [[Renaissance italienne]].]]
L'existence d'un lien entre ce que l'on appelle maintenant l'algèbre et la géométrie est ancienne. Les [[Babylone|Babyloniens]] connaissaient déjà la propriété algébrique de la diagonale d'un carré de côté de longueur ''un'', à savoir que son carré est égal à ''deux''. Ils savaient de plus calculer cette valeur avec une remarquable précision<ref>{{en}} R. Calinger, ''A Contextual History of Mathematics'', Prentice Hall, New Jersey, 1999 {{ISBN|0-02318-2857}}.</ref>. Ce lien est aussi connu des Grecs et des Chinois.
 
Il faut cependant attendre la [[civilisation islamique]] pour observer un progrès significatif. Leurs mathématiciens connaissaient les travaux des Grecs, particulièrement ceux d'[[Euclide]]<ref>[[Al-Hajjaj ibn Yusuf ibn Matar]] traduit les ''[[Éléments d'Euclide|Éléments]]'' au {{IXe siècle}} (cf. {{en}} [[John Lennart Berggren|J. L. Berggren]], ''{{lang|en|texte=Episodes in the Mathematics of Medieval Islam}}'', Springer, 2003 ({{1re}} éd. 1986), {{p.|70-71}} et [https://books.google.fr/books?id=cDEQ5fH15ucC&pg=PA100 100]).</ref>. Les notations utilisées laissent penser qu'ils avaient aussi accès à des travaux des premiers mathématiciens chinois<ref>{{en}} K. Chemla, « Similarities between chineese and arabic mathematical writings : (I) root extraction », ''{{Lien|Arabic Sciences and Philosophy}}'', vol. 4, {{n°|2}}, 1994, {{p.|207-266}}.</ref>. Le progrès déterminant consiste à associer au plan géométrique des [[Système de coordonnées|coordonnées]]. [[Omar Khayyam]] <small>([[1048]] - [[1131]])</small> cherche les solutions d'un problème purement algébrique : trouver les [[racine d'un polynôme|racines]] d'un [[polynôme]] du troisième degré. Un système de coordonnées lui permet de visualiser ces racines comme les [[Coordonnées cartésiennes|abscisses]] des intersections d'une [[parabole]] et d'une [[Hyperbole (mathématiques)|hyperbole]]<ref>{{en}} A. R. Amir-Moez, « A Paper of Omar Khayyám », ''[[Scripta Mathematica]]'', vol. 26, 1963, {{p.|323-337}}.</ref>.
 
Le système des coordonnées est repris en Europe. La volonté de maitriser la perspective pousse les peintres italiens à étudier les mathématiques. [[Filippo Brunelleschi]] <small>([[1377]] - [[1446]])</small> découvre les lois de la perspective, issues d'une [[projection centrale]]<ref>[[Giulio Carlo Argan]] et [[Rudolf Wittkower]], ''Architecture et perspective chez Brunelleschi et Alberti'', [[Éditions Verdier|Verdier]], 2004 {{ISBN|2-86432-4210}}.</ref>. Ces résultats sont formalisés<ref>{{la}} Leon Battista Alberti, ''[[De pictura]]'', 1435.</ref> par [[Leon Battista Alberti]] <small>([[1404]] - [[1472]])</small>. Les théoriciens de la perspective disposent de multiples talents. Ainsi [[Piero della Francesca]] <small>([[1412|vers 1412]] - [[1492]])</small>, auteur d'un traité sur la question<ref>Piero della Francesca, ''De la Perspective en Peinture'', traduction du toscan du ''De Prospectiva pingendi'', introductions et notes. Avec une préface de [[Hubert Damisch]] et une postface de [[Daniel Arasse]], Paris, In Medias Res, 1998.</ref>, est à la fois peintre et mathématicien. [[Giorgio Vasari]] <small>([[1511]] - [[1574]])</small> indique, à propos de ses talents de géomètre « il ne fut inférieur à personne de son époque et peut-être de tout temps<ref>{{it}} Giorgio Vasari, ''[[Le Vite|Le Vite de più eccellenti pittori, scultori e architettori (Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes)]]'', 1550.</ref> ».
 
=== Apports de la physique ===
[[Fichier:Illustration des dioptriques de Descartes.jpg|vignette|gauche|[[René Descartes]] utilise l'optique pour développer le concept de [[repère cartésien]]. L'illustration provient de son traité : ''Les Dioptriques''.]]
 
La physique est le moteur suivant de la convergence entre géométrie et algèbre. En [[1604]], [[Galileo Galilei]] <small>([[1564]] - [[1642]])</small> établit<ref>{{it}} Galileo Galilei, ''{{Lien|trad=Two New Sciences|Discours et démonstrations mathématiques concernant deux sciences nouvelles|texte=Discorsi e dimonstrazioni mathematiche intorno à due nuove scienze}}'', [[Elzevir]], [[Leyde]], 1638.</ref> la loi de la chute des corps. Les illustrations de ses notes montrent l'utilisation d'un repère. L'optique est la branche qui aboutit au progrès le plus marquant. [[Pierre de Fermat]] <small>([[1601]] - [[1665]])</small>, qui connaissait les écrits de Galilée, et [[René Descartes]] <small>([[1596]] - [[1650]])</small> s'écrivent des lettres au sujet de la dioptrique (la manière dont la lumière se réfléchit sur un miroir) et à la [[réfraction]] (la déviation d'un rayon lumineux quand il change de milieu, par exemple en passant de l'air à l'eau)<ref>René Descartes, ''La Dioptrique'', Hollande, 1637 [http://classiques.uqac.ca/classiques/Descartes/dioptrique/dioptrique.html lire].</ref>. Ils arrivent à la conclusion qu'un [[repère cartésien|repère]] est une méthode systématique permettant d'appréhender ''tous'' les problèmes de géométrie euclidienne. Ces résultats sont consignés dans un traité de Descartes<ref>René Descartes, ''La Géométrie'', Hollande, 1637, [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k29040s/f8.table lire] {{p.|1}}.</ref>. Il écrit en introduction : « Comment le calcul d'arithmétique se rapporte aux opérations de géométrie ». Pour Descartes, calcul d'arithmétique signifie approximativement ce qui est maintenant appelé algèbre. Cette approche est particulièrement féconde pour l'étude d'une branche naissante des mathématiques : la [[géométrie analytique]]. Un exemple est donné par l'étude de la [[cycloïde]]. Cette courbe décrit la trajectoire d'un point de la surface d'une roue se déplaçant sans glissement sur un sol horizontal.
 
[[Isaac Newton]] <small>([[1643]] - [[1727]])</small> développe<ref>{{la}} Isaac Newton, ''[[Philosophiae Naturalis Principia Mathematica]]'', S. Pepys, Londres, 1687.</ref> la géométrie analytique et l'utilise en [[astronomie]]. Cette application est l'origine<ref>{{en}} J. Simpson et E. Weiner, ''The [[Oxford English Dictionary]]: 20 Volume Set'', Clarendon Press, Oxford, 1989 {{ISBN|0-300-08919-8}}.</ref> de l'utilisation du terme vecteur. En [[1704]], un dictionnaire technique anglais indique :
{{Citation bloc|Une ligne dessinée depuis une planète, se déplaçant autour d'un centre ou du foyer d'une ellipse, jusqu'à ce centre ou ce foyer, est appelé Vecteur par quelques auteurs de la Nouvelle Astronomie, car cette ligne semble porter la planète autour du centre<ref>{{en}} [[John Harris]], ''{{Lien|Lexicon Technicum}}'', Londres, 1704.</ref>.}}
 
Ce terme apparait en français sous la plume de [[Pierre-Simon de Laplace]] <small>([[1749]] - [[1827]])</small> dans l'expression ''rayon vecteur''<ref>Pierre-Simon de Laplace, ''Traité de mécanique céleste'', [[Gauthier-Villars]], 1799 et 1825 [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k775861 lire].</ref>, encore dans un contexte astronomique. Il vient du latin ''vector'' provenant lui-même du verbe ''vehere'' qui veut dire transporter<ref>''[[TLFI]]'', [http://www.cnrtl.fr/etymologie/vecteur Étymologie de « vecteur »].</ref>. Pour les romains, le mot ''vector'' désignait aussi bien le passager que le conducteur d'un bateau ou d’un chariot. Les mots français véhicule, voiture, mais aussi invective proviennent de cette même racine latine. Son origine est plus ancienne, elle provient de l'[[indo-européen commun|indo-européen]] *VAG, ou *VAGH et signifie chariot.
 
Ainsi, au {{XVIIe siècle}}, le contexte géométrique et algébrique du vecteur est présent. En revanche, aucune formalisation n'est proposée et le terme, s'il est utilisé, désigne encore une [[scalaire (mathématiques)|grandeur scalaire]].
 
=== Formalisations ===
[[Fichier:Giusto Bellavitis.jpg|vignette|[[Giusto Bellavitis]] est un mathématicien italien auteur de la formalisation des vecteurs par la notion de bipoint et d'[[Équipollence (mathématiques)|équipollence]].]]
La première formalisation des vecteurs est le fruit d'un travail de plusieurs mathématiciens durant la première moitié du {{XIXe siècle}}. [[Bernard Bolzano]] publie un livre élémentaire<ref>{{de}} Bernard Bolzano, ''Betrachtungen über einige Gegenstände der Elementargeometrie'', [[1804 en science|1804]].</ref> contenant une construction axiomatique de la géométrie analogue à celle d'Euclide, fondée sur des points, droites et plans. Il adjoint les opérations algébriques d'addition et de multiplication. La [[géométrie projective]], héritière du travail sur la perspective des peintres de la renaissance italienne, conduit [[Jean-Victor Poncelet]] et [[Michel Chasles]] à affiner<ref>Jean-Victor Poncelet, ''Traité des Propriétés Projectives des Figures'', [[1822 en science|1822]], rééd. Jacques Gabay, Paris, 1995.</ref>{{,}}<ref>Michel Chasles, ''Aperçu historique sur l'origine et le développement des méthodes en géométrie'', Hayez, Bruxelles, [[1837 en science|1837]].</ref> les travaux de Bolzano. [[August Ferdinand Möbius]] apporte sa pierre à l'édifice en développant le système de [[coordonnées barycentriques]]<ref>{{de}} August Ferdinand Möbius, ''Der barycentrische Calcül : ein neues Hilfsmittel zur analytischen Behandlung der Geometrie'', Leipzig, [[1827 en science|1827]].</ref>. Enfin, la formalisation encore actuellement enseignée, à partir des notions de bipoint et d'[[Équipollence (mathématiques)|équipollence]], est l'œuvre<ref>{{it}} Giusto Bellavitis, « Saggio di applicazione di un nuovo metodo di geometria analitica », ''Annali delle Scienze del Regno Lombardo-Veneto'', vol. 5, [[1835 en science|1835]], {{p.|244-259}}.</ref> de [[Giusto Bellavitis]].
 
Une autre voie est explorée, purement algébrique. [[William Rowan Hamilton]] remarque que les [[nombre complexe|nombres complexes]] représentent un plan euclidien. Il passe dix ans de sa vie<ref>{{en}} {{Lien|lang=de|Thomas L. Hankins}}, ''Sir William Rowan Hamilton'', Johns Hopkins University Press, Baltimore, 1980.</ref> à chercher un équivalent en dimension trois, et finit par trouver le corps des [[quaternion]]s, de dimension quatre en [[1843 en science|1843]]. Il propose deux nouvelles définitions pour les mots « vecteur » et « scalaire ». Un vecteur est pour lui un élément d'un sous-ensemble des quarternions, de dimension trois. Il écrit :
{{Citation bloc|Un ''vecteur'' est donc […] une sorte de ''triplet naturel'' (suggéré par la géométrie) : et en conséquence nous verrons que les ''quaternions'' offrent une représentation symbolique simple de tout vecteur sous forme trinomiale (''ix'' + ''jy'' + ''kz'') ; ce qui ramène la conception et l'expression d'un tel vecteur à la forme la plus proche possible de celle obtenue avec les coordonnées cartésiennes et rectangulaires<ref>Traduction libre de {{en}} William Rowan Hamilton, '' Lectures on Quaternions'', 1853, Lecture 1, art. 17, [https://archive.org/stream/lecturesonquater00hami#page/17/mode/1up {{p.|17}}].</ref>.}}
 
En 1878, dans ''Éléments de dynamique'' [[William Kingdon Clifford]] reprendra en la simplifiant la notion de quaternions. Il introduit en particulier le [[produit scalaire]] et le [[produit vectoriel]] de deux vecteurs. Cette approche permit d'utiliser les vecteurs d'une manière plus calculatoire.
 
Cette deuxième voie, qui donne pour la première fois une signification analogue aux formalisations modernes de la notion de vecteur, est ensuite précisée et enrichie. Elle consiste maintenant à définir un vecteur comme un élément d'un espace vectoriel.
{{Article détaillé|Espace vectoriel}}
 
== Approche géométrique ==
La [[géométrie euclidienne]] est la géométrie du plan ou de l'espace, fondée sur les [[Géométrie euclidienne#Les outils de la géométrie d.27Euclide'Euclide|axiomes d'Euclide]]. Les notions de [[Point (mathématiques)|point]], de [[Droite (mathématiques)|droite]], de [[longueur]], sont introduitsintroduites par le biais d'axiomes. Le vecteur est alors un objet géométrique construit à partir des précédents.
 
Une visualisation intuitive d'un vecteur correspond à un ''déplacement'' d'un point, ou pour utiliser le terme mathématique précis, une [[translation (géométrie)|translation]]. Ainsi un vecteur possède une longueur, la distance entre le point de départ et d'arrivée, une direction (si le déplacement n'est pas nul, c'est la droite contenant le point de départ et d'arrivée) et un sens, depuis le départ jusqu'à l'arrivée.
 
=== Définition ===
Ligne 77 ⟶ 32 :
* son sens (il y a deux sens possibles de parcours de la droite (AB) : de ''A'' vers ''B'' ou de ''B'' vers ''A'') ;
* sa [[Norme (mathématiques)|norme]] (ou sa longueur, la longueur du segment [AB]).
Attention cependant à ne pas confondre sens et direction. En effet, dans le langage courant, lorsqu'on se trouve sur une route entre Paris et Versailles et que l'on dit que l'on va dans la direction de Versailles, on se rapproche de cette dernière ville. Mais dans le [[langage mathématique]], la direction est portée par la route (direction Paris-Versailles) sans savoir si l'on va de Versailles vers Paris ou de Paris vers Versailles. Pour savoir vers quelle ville on se dirige, il faudra aussi donner le sens : le sens Paris-Versailles par exemple pour indiquer que l'on va de Paris vers Versailles.
 
Une définition formelle utilise au préalable la notion de '''bipoint'''. Il est défini comme un [[couple (mathématiques)|couple]] de points. L’ordre a une importance : le premier point est appelé '''origine'''. Deux bipoints ('''A''', '''B''') et ('''C''', '''D''') sont dits [[Équipollence (mathématiques)|équipollents]] lorsque les segments [AD] et [BC] ont le même milieu. La relation d'équipollence constitue une [[relation d'équivalence]] sur les bipoints. Une classe d'équivalence contient tous les bipoints dont le deuxième membre est l''''image''' du premier point par le déplacement.
Ligne 90 ⟶ 45 :
Tous les bipoints constitués de la répétition d'un même point : (''A'', ''A''), sont équipollents entre eux, ils sont les représentants d'un vecteur qualifié de '''nul'''. Il est noté
:<math>\overrightarrow{AA}=\overrightarrow{0}</math>.
Cet unique vecteur possède la propriété particulière d'avoir son origine et son extrémité confondues. Ce vecteur sera alors le seul à être représenté comme un point. Un vecteur représente un déplacement. Mais dans un [[vecteur nul]], l'extrémité et l'origine étant confondues, il n'y a aucun déplacement. Cela veut donc dire que l'absence de déplacement est considérée comme un déplacement.
 
Les théories présentant les vecteurs comme une classe d'équivalence de bipoints les notent en général par une lettre surmontée d'une flèche<ref>[http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http://andre.turbergue.free.fr/sous_geom/geom_pdf/cours_espace_ch15.pdf&title=Droites%20et%20plans%20dans%20l%27espace Droites et plans dans l'espace] Cours de Terminale par A. Turbergue.</ref>.
Ligne 109 ⟶ 64 :
 
Si <math>\vec{u}</math> et <math>\vec{v}</math> sont deux vecteurs, soit un couple (''A'', ''B'') de points représentant <math>\vec{u}</math> et ''C'' le point tel que le couple (''B'', ''C'') représente le vecteur <math>\vec{v}</math>. Alors un représentant du vecteur <math>\vec{u} + \vec{v}</math> est le couple (''A'', ''C''). Si <math>\vec{v}</math>
est le vecteur nul, alors les points ''B'' et ''C'' sont confondus, la somme est alors égale à <math>\vec{u}</math> et le vecteur nul est bien l'élément neutre pour l'addition des vecteurs. Soit α un nombre, si <math>\vec{u}</math> est le vecteur nul, alors <math>\alpha \vec{u}</math> est aussi le vecteur nul, sinon il existe une unique droite contenant ''A'' et ''B'', et un unique point ''C'' teltels que la distance entre ''A'' et ''C'' soit égale à
<math>|\alpha|\; \cdot ||\vec{u}||</math> et le sens de (''A'', ''B'') si α est positif, relativement au sens de <math>\vec{u}</math>, et l'inverse sinon.
 
Ligne 116 ⟶ 71 :
=== Formalisation ===
[[Fichier:Hilbert.jpg|vignette|[[David Hilbert]] propose une construction [[axiome|axiomatique]] de la [[géométrie euclidienne]] rigoureuse.]]
On ne trouve pas de vecteurs dans les [[élémentsÉléments (Euclide)|''Éléments'' d'Euclide]], mais les notions de point ou de [[parallélogramme]], de l'approche esquissée ci-dessus y sont bien présentes. Mais l'axiomatisation des éléments''Éléments'' n'est pas tout à fait satisfaisante, bien qu'elle ait été longtemps un modèle en la matière : certains axiomes restent implicites. [[David Hilbert]] a montré comment axiomatiser rigoureusement le plan ou l'espace affine de façon géométrique (voir les articles [[plan affine de Desargues]] et [[axiomes de Hilbert]]). En utilisant le parallélisme, il est alors possible de définir les [[translation (géométrie)|translations]] et les [[homothétie]]s, et en utilisant ces transformations, les vecteurs et les scalaires<ref name="artin">[[Emil Artin]], ''Algèbre géométrique'', [[Calmann-Lévy]], chap. II.</ref>. Cette approche est très générale : elle permet de traiter des cas utiles, où les scalaires ne sont pas forcément des [[nombre réel|réels]], mais par exemple des [[nombre complexe|complexes]] ou les éléments d'un [[corps fini|ensemble fini de nombres]]<ref name="artin"/>. Elle se généralise également en dimension quelconque, au moins finie<ref name="artin"/>.
 
Cependant le développement des mathématiques a élargi considérablement les domaines d'utilisation des vecteurs, et une approche plus algébrique est très largement utilisée. Elle est fondée sur deux ensembles : l'un contenant les scalaires, l'autre les vecteurs. Le deuxième est appelé [[espace vectoriel]]. Ces deux ensembles sont munis d'opérations et des axiomes sont vérifiés pour chacune des opérations. Cette construction différente pour formaliser le même concept de vecteur est celle qui est traitée dans l'article consacré aux [[espace vectoriel|espaces vectoriels]]. Elle est esquissée ci-dessous.
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{{Article détaillé|Base (algèbre linéaire)}}
 
Dans un plan, deux vecteurs <math>\vec a</math> et <math>\vec b</math> non nuls et de directions différentes possèdent une propriété importante. Un vecteur <math>\vec u</math> quelconque est la somme d'un multiple de <math>\vec a</math> et d'un multiple de <math>\vec b</math>. Cela signifie qu'il existe un unique [[Couple (mathématiques)|couple]] de nombres, {{math|(''u''<sub>1</sub>, ''u''<sub>2</sub>)}}, tel que
:<math>\vec u=u_1 \vec a+ u_2 \vec b</math>.
<math>\vec u</math> est alors qualifié de [[combinaison linéaire]] de <math>\vec a</math> et <math>\vec b</math>. Comme tout vecteur du plan s'exprime de manière unique comme combinaison linéaire de <math>\vec a</math> et <math>\vec b</math>, la [[Famille (mathématiques)|famille]] <math>(\vec a,\vec b)</math> est qualifiée de base du plan et {{math|''u''<sub>1</sub>}}, {{math|''u''<sub>2</sub>}} sont appelés [[composantes d'un vecteur|composantes]]<ref>A la place de l'appellation «  composantes  », certains emploient aussi «  [[coordonnée]]s  », mais ce dernier terme empêche la différenciation entre l'unicité de la localisation des [[point (géométrie)|points]], qui sont «  fixes  » dans un [[Repère (mathématiques)|repère]], et l'aspect «  glissant  » des composantes vectorielles, dû à la nature de [[classe d'équivalence]] et la multiplicité des représentants de chaque vecteur. Cf. {{Baruk}}.</ref> du vecteur <math>\vec u</math> dans cette base. Cette définition correspond à celle d'un plan affine muni d'un [[Repère (mathématiques)|repère]].
Une telle propriété est encore vraie dans l'espace. Cependant, deux vecteurs ne suffisent plus, toute base contient exactement trois vecteurs non nuls et dont les directions ne sont pas [[coplanaire]]s (c'est-à-dire qu'il n'existe aucun plan contenant les trois directions). Si dans l'espace, les trois composantes d'un vecteur <math>\vec u</math> sont {{math|''u''<sub>1</sub>}}, {{math|''u''<sub>2</sub>}} et {{math|''u''<sub>3</sub>}}, il est d'usage de noter :
:<math>\vec{u} = \begin{pmatrix} u_1 \\ u_2 \\ u_3 \end{pmatrix}</math>
pour indiquer les composantes du vecteur. Le tableau est appelé [[vecteur colonne]] et correspond à un cas particulier de [[Matrice (mathématiques)|matrice]]. Les opérations algébriques sur les vecteurs sont simples, avec une telle représentation. Additionner deux vecteurs revient à additionner chacune des composantes et la multiplication par un scalaire revient à multiplier chaque composante par le scalaire.
 
Dans un plan vectoriel, une base étant choisie, un vecteur s'identifie ainsi à un couple de scalaires, et dans l'espace à un triplet. Si les nombres choisis sont [[nombre réel|réels]] alors un plan (respectivement un espace) s'identifie à ℝ{{2}} (respectivement à ℝ{{3}}). Ici, ℝ désigne l'ensemble des nombres réels.
 
Notons qu'il s'agit en général seulement d'un isomorphisme d'espace vectoriel et non d'une égalité. L'identification est de plus liée à la base choisie :
en changeant la base du plan ou de l'espace, les composantes, pour un même vecteur, sont changées et la correspondance est alors différente.
 
=== Ébauche d'une construction algébrique ===
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La logique précédente, appliquée pour une dimension égale à deux ou trois se généralise. Il est ainsi possible de considérer la structure ℝ<sup>''n''</sup> ou de manière plus générale ''K<sup>n</sup>'' avec ''K'' un ensemble de scalaires possédant de bonnes propriétés (précisément, ''K'' est un [[corps commutatif]]). Une telle structure possède une [[somme vectorielle|addition]], et une [[multiplication par un scalaire]] définies comme au paragraphe précédent.
 
Il est possible de généraliser encore la définition d'un vecteur. Si un ensemble ''E'' possède une addition et une multiplication scalaire sur un corps commutatif et si ses opérations vérifient certaines propriétés, appelées axiomes et décrites dans l'[[Espace vectoriel|article détaillé]], alors ''E'' est appelé '''espace vectoriel''' et un élément de ''E'' vecteur.
 
De très nombreux exemples d'ensembles mathématiquement intéressants possèdent une telle structure. C’est le cas par exemple des espaces de [[polynôme]]s, de fonctions vérifiant certaines propriétés de régularité, de [[matrice (mathématiques)|matrices]]... Tous ces ensembles peuvent alors être étudiés avec les outils du calcul vectoriel et de l'[[algèbre linéaire]].
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Si les deux constructions, algébrique et géométrique, sont équivalentes pour les structures vectorielles du plan et de l'espace usuel, la géométrie apporte en plus les notions de distance et d'angle.
 
La notion de [[produit scalaire]] permet de combler cette lacune. Un produit scalaire associe à deux vecteurs un réel. Si les deux vecteurs sont identiques le réel est positif. Il existe un produit scalaire tel que la norme du vecteur soit égale à la [[racine carrée]] du produit scalaire du vecteur avec lui-même. La géométrie euclidienne apparaitapparaît alors comme l'étude d'un [[espace affine]] comprenant un espace vectoriel de dimension deux ou trois sur le corps des réels, muni d'un produit scalaire : plan affine euclidien ou espace affine euclidien.
 
Une fois équipée d'un produit scalaire, il devient possible de définir sur l'espace vectoriel des transformations classiques de géométrie euclidienne comme la [[Symétrie (transformation géométrique)|symétrie]], la [[Rotation affine|rotation]] ou la [[projection orthogonale]]. La transformation associée aux espaces vectoriels laisse toujours [[invariant]] le vecteur nul. Les rotations permettent de définir la notion d'angle pour les vecteurs. L'angle <math>\scriptstyle (\widehat{\vec{u},\vec{v}})</math> est égal à <math>\scriptstyle (\widehat{\vec{u'},\vec{v'}})</math> si et seulement s'il existe une rotation qui envoie <math>\scriptstyle \vec{u}</math> sur <math>\scriptstyle \vec{u'}</math> et <math>\scriptstyle \vec{v}</math> sur <math>\scriptstyle \vec{v'}</math>. Cette définition, qui s'applique à une formalisation algébrique de la notion d'espace vectoriel, est équivalente à celle de la construction géométrique. Une telle approche simplifie parfois grandement les démonstrations, un exemple est le [[théorème de Pythagore]].
 
L'approche algébrique permet de définir toutes les notions de la géométrie euclidienne, elle généralise cette géométrie à une dimension quelconque si les nombres sont réels. Dans le cas des [[nombre complexe|nombres complexes]] une construction analogue, appelée [[espace hermitien]], existe.
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Le [[produit scalaire]] dans un système non orthonormé, va faire apparaître deux types de projection (parallèle aux axes ou perpendiculairement) et donc deux types de coordonnées :
=== Composantes covariantes d'un vecteur ===
En effectuant le produit scalaire d'un vecteur <math>x = x^{i}e_{i}</math> par le [[vecteur de base]] <math>e_{j}</math> (avec les règles de la [[convention de sommation d'Einstein]]), on obtient la composante covariante de ce vecteur
 
:<math>x.e_{j} = (x^{i} e_{i}).e_{j} = x^{i} (e_{i}.e_{j}) = x^{i}.g_{ij} = x_{j}</math>
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On note les composantes contravariantes par un indice supérieur, les composantes covariantes par un indice inférieur.
 
En multipliant les composantes contravariantes par le [[tenseur métrique]], on obtient les composantes covariantes
 
:<math>x^{i} g_{ij} = x_{j}</math>
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Une vaste partie des mathématiques utilise les vecteurs, en algèbre, en géométrie ou en analyse.
 
Un exemple archétypal en algèbre est la résolution d'un [[système d'équations linéaires]]. Un exemple de trois équations à trois [[Inconnue (mathématiques)|inconnues]] correspond à la recherche des vecteurs de dimension trois, [[antécédent (mathématiques)|antécédents]] d'une [[application linéaire]] d'un vecteur donné. Le plan euclidien ℝ{{2}} peut aussi être [[Dimension d'un espace vectoriel#Classification|identifié]] au [[plan complexe]] ℂ. La [[base canonique]] est composée de deux [[Vecteur unitaire|vecteurs unitaires]] : l'unité des réels et l'[[unité imaginaire]].
 
Les vecteurs offrent un outil efficace pour la résolution de nombreux problèmes de géométrie. Ils sont utilisés pour la détermination de propriétés de [[Parallélisme (géométrie)|parallélisme]] ou d'[[orthogonalité]] de droites, plan ou segments. À travers l'utilisation des [[Barycentre (géométrie euclidienne)|coordonnées barycentriques]], les vecteurs forment un outil adapté pour caractériser le centre d'une figure géométrique et permettent une démonstration simple du [[théorème de Leibniz]], du [[théorème de Ceva]] comme de nombreux résultats sur la géométrie du triangles. Le produit scalaire, qui s'exprime particulièrement simplement dans une [[base orthonormée]], offre de nombreuses possibilités. Il permet, par exemple, de mesurer la distance d'un point à une droite ou à un plan. Une telle base permet d'exprimer aussi simplement des [[Transformation géométrique|transformations géométriques]] comme la [[projection orthogonale]] sur un plan ou une droite.
 
L'analyse n'est pas en reste. L'espace vectoriel ℝ{{2}}, copie du plan euclidien est le cadre naturel de représentation du [[graphe d'une fonction]]. Les vecteurs permettent par exemple de déterminer la droite perpendiculaire à une courbe en vue de déterminer les foyers d'une [[conique]]. La représentation graphique offre une solution pour déterminer une approximation d'une [[racine d'un polynôme|racine]] d'une [[équation]] dans le cas où une résolution par une méthode algébrique n'est pas connue<ref>Ces divers exemples sont essentiellement issus des programmes de mathématiques du secondaire [http://www.education.gouv.fr/bo/2001/hs4/default.htm Le B.O. {{n°|4}} 2001 mathématiques hors série] page 69 pour la terminale et [http://www.education.gouv.fr/bo/2001/hs2/default.htm Le B.O. {{n°|2}} 2001 mathématiques hors série] page 34 pour la seconde.</ref>.
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La [[physique]] est à l'origine du terme de vecteur, elle utilise toujours largement ce concept. La raison historique provient du fait qu'en [[physique classique]] l'espace qui nous entoure est bien modélisé comme [[espace affine]] (géométrie euclidienne) de dimension trois avec le temps (absolu) comme paramètre d'évolution. En physique, une addition de vecteurs ne peut avoir de sens que si leurs coordonnées respectives ont la même [[Analyse dimensionnelle|dimension]].
 
La position d'un point est décrite par des coordonnées dans un repère, mais sa vitesse et son accélération sont des vecteurs. Pour établir la [[mécanique du point]], c'est-à-dire l'étude des mouvements d'un point matériel, les vecteurs sont indispensables. La position d'un point se modélise par ses trois coordonnées (qui sont des nombres réels) dont chacune est une fonction du temps ; on peut aussi la décrire par le ''vecteur position'' allant de l'origine du repère au point : les composantes du vecteur sont alors identifiables aux coordonnées du point. Le vecteur [[vitesse]] est égal à la dérivée du [[vecteur position]] (c'est-à-dire : les composantes du vecteur vitesse sont les dérivées de celles du vecteur position), et c'est encore un vecteur. Il en est de même pour l'[[accélération]], correspondant à la [[dérivée seconde]].
 
Dans un [[référentiel galiléen]], l'accélération d'un point est proportionnelle à la [[Force (physique)|force]] qui lui est appliquée. Une force est équivalente à un vecteur. La trajectoire d'une planète est connue par la force qui lui est appliquée à chaque instant. Cette force est la conséquence de la [[gravitation]], essentiellement due au Soleil. Ce phénomène est décrit par la donnée du [[champ gravitationnel]]. Ce champ associe un vecteur proportionnel à la force de la gravitation à chaque point de l'espace.
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Cette modélisation est très générale. Toutes les forces de la physique sont la conséquence des [[Interaction élémentaire|interactions élémentaires]], agissant sur les [[Particule (physique)|particules]]. L'[[électricité]] et le [[magnétisme]] agissent comme la [[gravitation]]. Les champs [[champ magnétique|magnétiques]] ou [[champ électrique|électriques]] permettent, à l'aide de la résolution d'une [[équation différentielle]], de déterminer la trajectoire d'un point.
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== Histoire ==
La notion de vecteur est le fruit d'une longue histoire, commencée voici plus de deux mille ans. Deux familles d'idées, d'abord distinctes, sont à l'origine de la formalisation. L'une d'elles est la [[géométrie]], traitant de [[longueur]]s, d'[[angle]]s et de mesures de [[Aire (géométrie)|surfaces]] et de [[volume]]s. L'autre correspond à l'[[algèbre]], qui traite des [[nombre]]s, de l'[[addition]] ou la [[multiplication]] et plus généralement d'ensembles munis d'opérations. Un vieux problème d'algèbre nous vient par exemple des [[Égypte antique|Égyptiens]] et s'exprime de la manière suivante : {{Citation|On doit diviser 100 miches de pain entre dix hommes comprenant un navigateur, un contremaître et un gardien, tous trois recevant double part. Que faut-il donner à chacun<ref>Ce problème provient du [[Papyrus Rhind]] étudié par [[Sylvia Couchoud]] dans son livre ''Mathématiques égyptiennes. Recherches sur les connaissances mathématiques de l'Égypte pharaonique'', éditions Le Léopard d'Or, 2004 {{ISBN|978-2-863-77118-1}}</ref> ?}}
Ces deux familles d'idées sont développées indépendamment, pour finir par converger vers la notion de vecteur.
 
=== Origines des deux concepts ===
{{pertinence section|date=février 2021}}
[[Fichier:Title page of Sir Henry Billingsley's first English version of Euclid's Elements, 1570 (560x900).jpg|vignette|Les ''[[Éléments d'Euclide|Éléments]]'' formalise une structure géométrique initialement utilisée pour décrire l'ancêtre de l'espace vectoriel.]]
 
La [[Grèce antique|civilisation grecque]] développe la géométrie à un niveau inégalé à cette époque. L'un des fleurons est le traité nommé ''les [[Éléments d'Euclide]]'', datant du {{-s|III|e}} Il contient la formalisation, très rigoureuse pour l'époque, d'une géométrie, encore maintenant appelée [[géométrie euclidienne|euclidienne]]. On y trouve les définitions d'une [[Droite (mathématiques)|droite]], d'un [[Plan (mathématiques)|plan]] ou de notre espace physique de [[dimension d'un espace vectoriel|dimension]] trois permettant de modéliser des volumes. Les propriétés des [[distance (mathématiques)|distances]], des angles, des mesures de surfaces et de volumes sont étudiées. Les théorèmes fondateurs, comme ceux appelés [[théorème de Thalès|Thalès]] ou [[théorème de Pythagore|Pythagore]], sont explicités et démontrés.
 
[[Fichier:Les Neuf Chapitres sur l'art mathématique.jpg|gauche|vignette|[[Les Neuf Chapitres sur l'art mathématique]] ont en Chine un rôle analogue aux [[Éléments d'Euclide]] en occident.]]
 
{{refnec|La [[Chine]] développe les premières idées algébriques à l'origine des vecteurs}}. Un vieux texte, datant probablement du {{-s|I|er}}<ref>{{en}} [[Joseph Needham]], ''Science and Civilization in China: Volume 3, Mathematics and the Sciences of the Heavens and the Earth'', Cambridge University Press, 1959 {{ISBN|0521058015}}.</ref> : [[les Neuf Chapitres sur l'art mathématique]] y consacre sa huitième partie. Elle s'intitule ''Fang cheng'' ou ''Disposition rectangulaire'' et traite d'un problème maintenant appelé [[système d'équations linéaires]]. Cette culture n'en reste pas là, [[Qin Jiushao]] <small>([[1202]] - [[1261]])</small> généralise cette étude à des nombres différents des entiers ou rationnels. Il utilise les [[congruence sur les entiers|congruences]], inaugurant une démarche consistant à définir des vecteurs sur des ensembles de nombres exotiques. Il peut ainsi résoudre des problèmes liés au calendrier et aux alignements de planètes avec une très grande précision<ref>{{en}} [[Jean-Claude Martzloff]], « Chinese Mathematical Astronomy », dans [[Helaine Selin|H. Selin]] et [[Ubiratàn D'Ambrosio|U. D'Ambrosio]], ''Mathematics Across Cultures'', Dordrecht, 2000, {{p.|373-407}}, {{DOI|10.1007/978-94-011-4301-1_18}}.</ref>. La méthode utilisée ne sera connue qu'au {{XIXe siècle}} en Occident, sous le nom de [[pivot de Gauss]]. Ce résultat est suffisamment étonnant pour que {{Lien|langue=en|fr=Ulrich Libbrecht}} précise que : {{Citation|Nous ne devrions pas sous-estimer la percée révolutionnaire de Qin, en effet, depuis le [[théorème des restes chinois]] de [[Sun Zi (mathématicien)|Sun Zi]], on passe sans intermédiaire à un [[algorithme]] plus avancé que la méthode de Gauss elle-même, et il n'y a pas la moindre indication d'une évolution graduelle<ref>{{en}} U. Libbrecht, ''Chinese Mathematics in the Thirteenth Century : the Shu-shu Chiu-chang of Ch'in Chiu-shao'', Cambridge, Mass., [[MIT Press]], 1973.</ref>.}}
 
L'aspect géométrique n'échappe pas aux mathématiciens chinois. Le dernier chapitre, le ''Gou gu'' comporte un équivalent du théorème de Thalès et de Pythagore<ref>Les informations sur les neuf chapitres ainsi qu'une version de ce texte se trouvent dans {{ChemlaShuchun}} (ce livre contient une traduction française avec des addenda détaillés et une édition commentée du texte chinois du livre et de son commentaire).</ref>.
 
=== Convergence de l'algèbre et de la géométrie ===
{{pertinence section|date=février 2021}}
[[Fichier:De la perspective en peinture.jpg|vignette|Illustration extraite du traité de perspective ''De prospectiva pingendi'' de [[Piero della Francesca]], un peintre de la [[Renaissance italienne]].]]
L'existence d'un lien entre ce que l'on appelle maintenant l'algèbre et la géométrie est ancienne. Les [[Babylone|Babyloniens]] connaissaient déjà la propriété algébrique de la diagonale d'un carré de côté de longueur ''un'', à savoir que son carré est égal à ''deux''. Ils savaient de plus calculer cette valeur avec une remarquable précision<ref>{{en}} R. Calinger, ''A Contextual History of Mathematics'', Prentice Hall, New Jersey, 1999 {{ISBN|0-02318-2857}}.</ref>. Ce lien est aussi connu des Grecs et des Chinois.
 
Il faut cependant attendre la [[civilisation islamique]] pour observer un progrès significatif. Leurs mathématiciens connaissaient les travaux des Grecs, particulièrement ceux d'[[Euclide]]<ref>[[Al-Hajjaj ibn Yusuf ibn Matar]] traduit les ''[[Éléments d'Euclide|Éléments]]'' au {{IXe siècle}} (cf. {{en}} [[John Lennart Berggren|J. L. Berggren]], ''{{lang|en|texte=Episodes in the Mathematics of Medieval Islam}}'', Springer, 2003 ({{1re}} éd. 1986), {{p.|70-71}} et [https://books.google.fr/books?id=cDEQ5fH15ucC&pg=PA100 100]).</ref>. Les notations utilisées laissent penser qu'ils avaient aussi accès à des travaux des premiers mathématiciens chinois<ref>{{en}} K. Chemla, « Similarities between chineese and arabic mathematical writings : (I) root extraction », ''{{Lien|Arabic Sciences and Philosophy}}'', vol. 4, {{n°|2}}, 1994, {{p.|207-266}}.</ref>. Le progrès déterminant consiste à associer au plan géométrique des [[Système de coordonnées|coordonnées]]. [[Omar Khayyam]] <small>([[1048]] - [[1131]])</small> cherche les solutions d'un problème purement algébrique : trouver les [[racine d'un polynôme|racines]] d'un [[polynôme]] du troisième degré. Un système de coordonnées lui permet de visualiser ces racines comme les [[Coordonnées cartésiennes|abscisses]] des intersections d'une [[parabole]] et d'une [[Hyperbole (mathématiques)|hyperbole]]<ref>{{en}} A. R. Amir-Moez, « A Paper of Omar Khayyám », ''[[Scripta Mathematica]]'', vol. 26, 1963, {{p.|323-337}}.</ref>.
 
Le système des coordonnées est repris en Europe. La volonté de maîtriser la perspective pousse les peintres italiens à étudier les mathématiques. [[Filippo Brunelleschi]] <small>([[1377]] - [[1446]])</small> découvre les lois de la perspective, issues d'une [[projection centrale]]<ref>[[Giulio Carlo Argan]] et [[Rudolf Wittkower]], ''Architecture et perspective chez Brunelleschi et Alberti'', [[Éditions Verdier|Verdier]], 2004 {{ISBN|2-86432-4210}}.</ref>. Ces résultats sont formalisés<ref>{{la}} Leon Battista Alberti, ''[[De pictura]]'', 1435.</ref> par [[Leon Battista Alberti]] <small>([[1404]] - [[1472]])</small>. Les théoriciens de la perspective disposent de multiples talents. Ainsi [[Piero della Francesca]] <small>([[1412|vers 1412]] - [[1492]])</small>, auteur d'un traité sur la question<ref>Piero della Francesca, ''De la Perspective en Peinture'', traduction du toscan du ''De Prospectiva pingendi'', introductions et notes. Avec une préface de [[Hubert Damisch]] et une postface de [[Daniel Arasse]], Paris, In Medias Res, 1998.</ref>, est à la fois peintre et mathématicien. [[Giorgio Vasari]] <small>([[1511]] - [[1574]])</small> indique, à propos de ses talents de géomètre : « Il ne fut inférieur à personne de son époque et peut-être de tout temps<ref>{{it}} Giorgio Vasari, ''[[Le Vite|Le Vite de più eccellenti pittori, scultori e architettori (Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes)]]'', 1550.</ref> ».
 
=== Apports de la physique ===
[[Fichier:Illustration des dioptriques de Descartes.jpg|vignette|gauche|[[René Descartes]] utilise l'optique pour développer le concept de [[repère cartésien]]. L'illustration provient de son traité : ''Les Dioptriques''.]]
 
La physique est le moteur suivant de la convergence entre géométrie et algèbre. En [[1604]], [[Galileo Galilei]] <small>([[1564]] - [[1642]])</small> établit<ref>{{it}} Galileo Galilei, ''[[Discours et démonstrations mathématiques concernant deux sciences nouvelles|Discorsi e dimonstrazioni mathematiche intorno à due nuove scienze]]'', [[Elzevir]], [[Leyde]], 1638.</ref> la loi de la chute des corps. Les illustrations de ses notes montrent l'utilisation d'un repère. L'optique est la branche qui aboutit au progrès le plus marquant. [[Pierre de Fermat]] <small>([[1601]] - [[1665]])</small>, qui connaissait les écrits de Galilée, et [[René Descartes]] <small>([[1596]] - [[1650]])</small> s'écrivent des lettres au sujet de la dioptrique (la manière dont la lumière se réfléchit sur un miroir) et à la [[réfraction]] (la déviation d'un [[rayon lumineux]] quand il change de milieu, par exemple en passant de l'air à l'eau)<ref>René Descartes, ''La Dioptrique'', Hollande, 1637 [http://classiques.uqac.ca/classiques/Descartes/dioptrique/dioptrique.html lire].</ref>. Ils arrivent à la conclusion qu'un [[repère cartésien|repère]] est une méthode systématique permettant d'appréhender ''tous'' les problèmes de géométrie euclidienne. Ces résultats sont consignés dans un traité de Descartes<ref>René Descartes, ''La Géométrie'', Hollande, 1637, [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k29040s/f8.table lire] {{p.|1}}.</ref>. Il écrit en introduction : « Comment le calcul d'arithmétique se rapporte aux opérations de géométrie ». Pour Descartes, « calcul d'arithmétique » signifie approximativement ce qui est maintenant appelé « algèbre ». Cette approche est particulièrement féconde pour l'étude d'une branche naissante des mathématiques : la [[géométrie analytique]]. Un exemple est donné par l'étude de la [[cycloïde]]. Cette courbe décrit la trajectoire d'un point de la surface d'une roue se déplaçant sans glissement sur un sol horizontal.
 
[[Isaac Newton]] <small>([[1643]] - [[1727]])</small> développe<ref>{{la}} Isaac Newton, ''[[Philosophiae Naturalis Principia Mathematica]]'', S. Pepys, Londres, 1687.</ref> la géométrie analytique et l'utilise en [[astronomie]]. Cette application est l'origine<ref>{{en}} J. Simpson et E. Weiner, ''The [[Oxford English Dictionary]]: 20 Volume Set'', Clarendon Press, Oxford, 1989 {{ISBN|0-300-08919-8}}.</ref> de l'utilisation du terme vecteur. En [[1704]], un dictionnaire technique anglais indique :
{{Citation bloc|Une ligne dessinée depuis une planète, se déplaçant autour d'un centre ou du foyer d'une ellipse, jusqu'à ce centre ou ce foyer, est appelé Vecteur par quelques auteurs de la Nouvelle Astronomie, car cette ligne semble porter la planète autour du centre<ref>{{en}} [[John Harris]], ''{{Lien|Lexicon Technicum}}'', Londres, 1704.</ref>.}}
 
Ce terme apparaît en français sous la plume de [[Pierre-Simon de Laplace]] <small>([[1749]] - [[1827]])</small> dans l'expression ''rayon vecteur''<ref>Pierre-Simon de Laplace, ''Traité de mécanique céleste'', [[Gauthier-Villars]], 1799 et 1825 [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k775861 lire].</ref>, encore dans un contexte astronomique. Il vient du latin ''vector'' provenant lui-même du verbe ''vehere'' qui veut dire transporter<ref>''[[TLFI]]'', [http://www.cnrtl.fr/etymologie/vecteur Étymologie de « vecteur »].</ref>. Pour les Romains, le mot ''vector'' désignait aussi bien le passager que le conducteur d'un bateau ou d’un chariot. Les mots français véhicule, voiture, mais aussi invective proviennent de cette même racine latine. Son origine est plus ancienne, elle provient de l'[[indo-européen commun|indo-européen]] *VAG, ou *VAGH et signifie chariot.
 
Ainsi, au {{XVIIe siècle}}, le contexte géométrique et algébrique du vecteur est présent. En revanche, aucune formalisation n'est proposée et le terme, s'il est utilisé, désigne encore une [[scalaire (mathématiques)|grandeur scalaire]].
 
=== Formalisations ===
[[Fichier:Giusto Bellavitis.jpg|vignette|[[Giusto Bellavitis]] est un mathématicien italien auteur de la formalisation des vecteurs par la notion de bipoint et d'[[Équipollence (mathématiques)|équipollence]].]]
La première formalisation des vecteurs est le fruit d'un travail de plusieurs mathématiciens durant la première moitié du {{XIXe siècle}}. [[Bernard Bolzano]] publie un livre élémentaire<ref>{{de}} Bernard Bolzano, ''Betrachtungen über einige Gegenstände der Elementargeometrie'', [[1804 en science|1804]].</ref> contenant une construction axiomatique de la géométrie analogue à celle d'Euclide, fondée sur des points, droites et plans. Il adjoint les opérations algébriques d'addition et de multiplication. La [[géométrie projective]], héritière du travail sur la perspective des peintres de la renaissance italienne, conduit [[Jean-Victor Poncelet]] et [[Michel Chasles]] à affiner<ref>Jean-Victor Poncelet, ''Traité des Propriétés Projectives des Figures'', [[1822 en science|1822]], rééd. Jacques Gabay, Paris, 1995.</ref>{{,}}<ref>Michel Chasles, ''Aperçu historique sur l'origine et le développement des méthodes en géométrie'', Hayez, Bruxelles, [[1837 en science|1837]].</ref> les travaux de Bolzano. [[August Ferdinand Möbius]] apporte sa pierre à l'édifice en développant le système de [[coordonnées barycentriques]]<ref>{{de}} August Ferdinand Möbius, ''Der barycentrische Calcül : ein neues Hilfsmittel zur analytischen Behandlung der Geometrie'', Leipzig, [[1827 en science|1827]].</ref>. Enfin, la formalisation encore actuellement enseignée, à partir des notions de bipoint et d'[[Équipollence (mathématiques)|équipollence]], est l'œuvre<ref>{{it}} Giusto Bellavitis, « Saggio di applicazione di un nuovo metodo di geometria analitica », ''Annali delle Scienze del Regno Lombardo-Veneto'', vol. 5, [[1835 en science|1835]], {{p.|244-259}}.</ref> de [[Giusto Bellavitis]].
 
Une autre voie est explorée, purement algébrique. [[William Rowan Hamilton]] remarque que les [[nombre complexe|nombres complexes]] représentent un plan euclidien. Il passe dix ans de sa vie<ref>{{en}} {{Lien|lang=de|Thomas L. Hankins}}, ''Sir William Rowan Hamilton'', Johns Hopkins University Press, Baltimore, 1980.</ref> à chercher un équivalent en dimension trois, et finit par trouver le corps des [[quaternion]]s, de dimension quatre en [[1843 en science|1843]]. Il propose deux nouvelles définitions pour les mots « vecteur » et « scalaire ». Un vecteur est pour lui un élément d'un sous-ensemble des quarternions, de dimension trois. Il écrit :
{{Citation bloc|Un ''vecteur'' est donc […] une sorte de ''triplet naturel'' (suggéré par la géométrie) : et en conséquence nous verrons que les ''quaternions'' offrent une représentation symbolique simple de tout vecteur sous forme trinomiale (''ix'' + ''jy'' + ''kz'') ; ce qui ramène la conception et l'expression d'un tel vecteur à la forme la plus proche possible de celle obtenue avec les coordonnées cartésiennes et rectangulaires<ref>Traduction libre de {{en}} William Rowan Hamilton, '' Lectures on Quaternions'', 1853, Lecture 1, art. 17, [https://archive.org/stream/lecturesonquater00hami#page/17/mode/1up {{p.|17}}].</ref>.}}
 
En 1878, dans ''Éléments de dynamique'' [[William Kingdon Clifford]] reprendra en la simplifiant la notion de quaternions. Il introduit en particulier le [[produit scalaire]] et le [[produit vectoriel]] de deux vecteurs. Cette approche permit d'utiliser les vecteurs d'une manière plus calculatoire.
 
Cette deuxième voie, qui donne pour la première fois une signification analogue aux formalisations modernes de la notion de vecteur, est ensuite précisée et enrichie. Elle consiste maintenant à définir un vecteur comme un élément d'un espace vectoriel.
{{Article détaillé|Espace vectoriel}}
== Généralisations ==
=== Mathématiques ===
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Les deux exemples précédents correspondent à des cas où la structure est enrichie par une multiplication interne. Elle porte le nom d'[[algèbre sur un corps|algèbre]], ses éléments sont appelés souvent vecteurs et parfois points. Des exemples sont données par l'ensemble des polynômes à coefficients réels ou encore une [[algèbre de Lie]].
 
Dans d'autres cas, la structure est appauvrie. Un [[module sur un anneau|module]] est une structure analogue teltelle que les scalaires différents de zéro ne sont plus toujours inversibles. Le terme de vecteur est néanmoins toujours utilisé.
 
=== Physique ===
[[Fichier:basculer.jpg|vignette|Selon le point d'application des forces, le solide bascule ou non. L'objet mathématique associé est un vecteur glissant.]]
{{ÀSection à recycler|thème=mathématiques|date=octobre 2009}}
Les lois établissant les mouvements d'un point s'appliquent aussi dans le cas d'un [[Mécanique du solide|solide]], les calculs deviennent néanmoins plus complexes{{pertinence détail|date=octobre 2009}}. Si les vecteurs restent omniprésents, le point d'application de la force possède son importance. Selon sa position, le solide tourne en plus du déplacement de son [[centre de gravité]]. Pour tenir compte de ce phénomène, de nouvelles définitions sont proposées. Un '''vecteur lié''' ou '''pointeur''' est un couple composé d'un vecteur et d'un point appelé '''point d'application'''. La rotation du solide est la conséquence d'une grandeur physique appelé [[Moment de force (mécanique)|moment]]. Elle ne dépend pas de la position du vecteur sur une droite donnée. Pour cette raison, un '''vecteur glissant''' est un couple composé d'un vecteur et d'une droite affine. Dans ce contexte, et pour éviter toute ambigüité, un vecteur au sens classique du terme est appelé '''vecteur libre'''<ref>Le site [http://uel.unisciel.fr/physique/outils_nancy/outils_nancy_ch03/co/apprendre_01.html Mathématiques pour la Physique et la Chimie] réalisé par ''Université en ligne'' propose un exposé des définitions du paragraphe.</ref>.
 
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L'informatique utilise le terme de vecteur, à la fois pour des raisons géométriques et algébriques. Le codage d'une image sur un écran d'ordinateur utilise au choix deux techniques : [[Image matricielle|matricielle]] et [[Image vectorielle|vectorielle]]. La première utilise des éléments graphiques définis point par point. À chaque [[pixel]] est associéassociée la quantité de [[Couleur primaire|couleurs primaires]] correspondante. Si cette méthode est économique en termesmatière de puissance de calcul, un agrandissement de la taille de l'image possède pour conséquence un [[Crénelage|effet d'escalier]].
 
Un dessin vectoriel est une représentation composée d'objets géométriques (lignes, points, polygones, courbes…) ayant des attributs de forme, de position, de couleur, etc. À la différence de la technique précédente, il s'agit d'une méthode plus coûteuse en termesmatière de puissance de calcul mais dans laquelle l'effet d'escalier n'existe pas<ref>[http://www.cuk.ch/articles/294 Comprendre l'image numérique: vectorielle et bitmap...] sur le site Cuk, 2004.</ref>.
 
La [[Format de données|représentation des données en informatique]], pour les fonctions de mémoire ou de calcul, se fonde sur des tableaux d'[[octet]]s. Si un octet est identifié à un scalaire, ce qui se conçoit car deux octets s'additionnent et se multiplient, alors un tel tableau s'apparente à une famille de composantes vectorielles. Pour cette raison, un tel tableau est appelé vecteur. Par extension, le terme de vecteur désigne aussi des tableaux dont les composantes sont autre chose que des nombres, par exemple des [[Pointeur (programmation)|pointeurs]] ou des structures informatiques quelconques<ref>[http://mitpress.mit.edu/sicp/full-text/book/book-Z-H-33.html#%_sec_5.3.1 Memory as Vectors] tiré de {{en}} H. Abelson, G. J. Sussman et J. Sussman ''Structure and Interpretation of Computer Programs'', {{2e}} éd., [[MIT Press]], 1996, {{ISBN|0262011530}} (ce livre est disponible sur le [http://mitpress.mit.edu/sicp/full-text/book/book.html Web]. Il traite des aspects théoriques de la programmation et des structures vectorielles de stockage des informations).
</ref>.
 
=== Application en linguistique ===
 
En [[linguistique]], les vecteurs sont utilisés pour quantifier le degré de similarité [[sémantique]] entre plusieurs mots. La proximité sémantique entre plusieurs mots est d'autant plus forte que la proximité spatiale entre vecteurs est élevée. Calculée à partir d'un indice compris entre 0 et 1 (0 = proximité nulle, 1 = proximité maximale), elle est obtenue à partir de l'angle ou de la longueur. La [[polysémie]] constitue une limite de cette approche : ainsi, le mot "vol" désigne à la fois un larcin et un déplacement dans l'air (et sera donc proche de mots en rapport avec l'une ou l'autre signification, ce qui rapprochera des mots sans rapport entre eux), ce qui peut se résoudre en prenant en compte le contexte linguistique<ref>{{Article|langue=en|auteur1=David Yenicelik|titre=How does BERT capture semantics ? A closer look at polysemous words|périodique=roceedings of the Third BlackboxNLP Workshop on Analyzing and Interpreting Neural Networks for NLP|date=2020|pages=156-162}}</ref>. Un autre facteur de pertinence de la représentation vectorielle est la fréquence du mot : moins le mot est employé et moins la représentation vectorielle sera pertinente, d'où une proposition de fixer un seuil de fréquence minimale<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Magnus Sahlgren|titre=The Word-Space Model: Using distributional analysis to represent syntagmatic and paradigmatic relations between words in high-dimensional vector spaces (Thèse de doctorat)|date=2006}}</ref> {{,}} <ref>{{Article|langue=fr|auteur1=Marine Wauquier|titre=Apports de la sémantique distributionnelle pour la morphologie dérivationnelle|périodique=Corpus|date=2 mars 2022|lire en ligne=https://journals.openedition.org/corpus/6303}}</ref>.
 
== Notes et références ==
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| wikiversity titre = Introduction à la notion de vecteur
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=== Liens externes ===
* {{en}} [http://members.aol.com/jeff570/v.html Premières utilisations connues des termes mathématiques] par J. Miller
* {{MacTutor|class=HistTopics|id=Abstract_linear_spaces|title=Abstract linear spaces}}
 
=== Bibliographie complémentaire ===
==== Référence historiqueHistoire ====
* {{ouvrage|lang=en|edition = New edition| éditeur = Dover Publications Inc.| isbn = 978-0-486-67910-5| nom = Crowe| prénom = Michael J.|lien auteur=Michael J. Crowe| titre = A History of Vector Analysis: The Evolution of the Idea of a Vectorial System| date = 2003-03-28}}
{{en}} J. V. Field, ''The Invention of Infinity: Mathematics and Art in the Renaissance'', [[Oxford University Press]], 1997 {{ISBN|0198523947}}{{Commentaire biblio|Ce texte montre comment les artistes de la [[Renaissance]] produisent des mathématiques qui non seulement révolutionnent leur métier, mais contribuent aussi aux [[mathématiques pures]].}}
* {{article|lang=en| doi = 10.1006/hmat.1995.1024| issn = 0315-0860| volume = 22| numéro = 3| pages = 227–261| nom = Dorier| prénom = Jean-Luc| titre = A general outline of the genesis of vector space theory| journal = Historia mathematica| consulté le = 2021-02-03| date = 1995| url = https://archive-ouverte.unige.ch/unige:16642}}
* {{en}} J. V. Field, ''The Invention of Infinity: Mathematics and Art in the Renaissance'', [[Oxford University Press]], 1997 {{ISBN|0198523947}}{{Commentaire biblio|Ce texte montre comment les artistes de la [[Renaissance]] produisent des mathématiques qui non seulement révolutionnent leur métier, mais contribuent aussi aux [[mathématiques pures]].}}
 
==== Ouvrages de vulgarisation ====
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