À LA UNE
LES ANCIENS GUERRIERS GERMANIQUES. DE LA COLONNE TRAJANE AUX SAGAS ISLANDAISES, MICHAEL PAUL SPEIDEL, Éditions Certamen, 304 p., 34 €
En examinant les bas-reliefs de la colonne Trajane, les passionnés d’histoire, même les mieux renseignés, identifieront simplement des troupes romaines en train de vaincre des Daces. Le travail de Michael Paul Speidel va beaucoup plus loin. Il inventorie et décrit la multitude de guerriers germaniques au service de Rome qui s’y trouvent. Il distingue ainsi des « guerriers animaux» (loups, ours, boucs, martres…), des « guerriers effrayants» (notamment les fameux « berserkers nus », véritables modèles de guerriers extatiques), mais aussi de plus discrets « guerriers à massue » ou des cavaliers portant leur lance géante sur l’épaule. Speidel remonte par là même aux sources de la culture indo-européenne, en décrivant, à la manière d’un Georges Dumézil, la permanence et la continuité de traditions venues des âges du bronze et du fer, portées par les Germains à une époque où Grecs et Romains, qui les avaient partagées, avaient fini par les oublier. Pour chaque type de combattant, Speidel se fait descriptif et explicatif. Il illustre ses propos d’exemples tirés de l’histoire romaine, puis de l’époque du haut Moyen Âge, avant d’évoquer leurs dernières formes d’expression chez les peuples scandinaves. Ce livre remarquable et atypique, né d’un travail méthodique, au plus près des sources, éclaire le lecteur sur de nombreuses techniques propres à la guerre antique — comme celle des éventreurs de chevaux — tout en restituant la valeur symbolique et spirituelle de traditions guerrières communes à tous les peuples indo-européens. Frédéric Bey
Enseigner la guerre. Former les chefs, 1918-1945, Morgane Barey, Perrin, 368 p., 25 €
Je suis un fervent partisan de disséquer les organisations, tant leurs fonctionnements, leurs cultures et leurs réseaux éclairent les choix de leurs acteurs. Je ne suis pas le seul, puisque Perrin publie une version élargie de la thèse de Morgane Barey consacrée aux écoles des cadres des armées françaises (Terre, Mer puis Air). L’autrice y démontre à quel point ces institutions pluriséculaires, à commencer par Saint-Cyr et l’École navale, cultivent un entresoi et un dogmatisme que même la défaite de 1940 et les aléas de la guerre ne parviennent à bousculer. Elles refusent de devenir les avant-gardes de la Révolution nationale avant d’être fermées fin 1942.